239 LE POUVOIR DES FORÊTS - Revue internationale des forêts et des industries forestières - Food and Agriculture Organization of ...
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ISSN 0251-1053 239 Organisation Revue internationale Vol. 63 des Nations Unies des forêts pour l'alimentation et des industries et l'agriculture forestières 2012/1 LE POUVOIR DES FORÊTS
FAO/FO-5154/Veracel FAO/FO-6960/J. Carle M.L. Wilkie M.P. Wilkie Évaluation des ressources forestières mondiales de la FAO L’ÉVALUATION DES RESSOURCES FORESTIÈRES MONDIALES (FRA) DE LA FAO est un processus continu visant à fournir les meilleures données possibles sur les forêts du monde. Le rapport publié le plus récent, FRA 2010, couvre 233 pays pour la période 1990-2010 et présente des données nationales sur plus de 90 variables clés, qui portent sur l’étendue, les conditions, l'utilisation et la valeur des forêts. DIVERS PRODUITS SONT DISPONIBLES POUR VOUS AIDER À ACCÉDER AUX DONNÉES DE FRA: • Le CD ROM FRA 2010 contient les résultats essentiels et le rapport principal de FRA 2010, de même que 233 rapports nationaux, des tableaux de résultats en format Excel, et des termes et définitions – le tout en anglais, arabe, chinois, espagnol, français et russe. Envoyer une demande à fra@fao.org. • Un nouveau Natural Inquirer – The World’s Forests Edition –, magazine pour élèves entre 11 et 14 ans, présente cinq enquêtes s’appuyant sur les résultats de FRA 2010. Disponible uniquement en anglais. Télécharger à l’adresse www.fao.org/forestry/fra/1194/en/ ou envoyer une demande à fra@fao.org. • La base de données interactive de FRA 2010 offre un accès facile aux informations recueillies pour FRA 2010: http://countrystat.org/home.aspx?c=FOR. • FRA 2015-NEWS est un bulletin d’information envoyé par courriel contenant les nouvelles, activités et événements les plus récents concernant la prochaine Évaluation des ressources forestières mondiales – FRA 2015 –, qui paraîtra en 2015. Pour s’abonner, écrire à mailserv@mailserv.fao.org, laisser l’objet du courriel vide et inscrire le message: subscribe FRA2015-News-L. FAO/G. Napolitano
ISSN 0251-1053 239 Organisation Revue internationale Vol. 63 des Nations Unies des forêts pour l'alimentation et des industries et l'agriculture forestières 2012/1 Rédacteur: A. Sarre Comité consultatif de rédaction: P. Csoka, L. Flejzor, T. Hofer, F. Kafeero, W. Kollert, Table des matières E. Rametsteiner, S. Rose, A. Sarre, J. Tissari, P. van Lierop, P. Vantomme, M.L. Wilkie Éditorial 2 Conseillers émérites: J. Ball, I.J. Bourke, C. Palmberg-Lerche, L. Russo J.R. Matta et L. Schweitzer Meins Conseillers régionaux: F. Bojang, P. Durst, M. Saket Replacer les forêts dans le champ du développement 3 Unasylva paraît en anglais, français et espagnol. D.K. Lee Pour souscrire, s’adresser par courriel à Contribution du secteur forestier à une vision «bas unasylva@fao.org. Les demandes d’abonnement carbone, croissance verte» en République de Corée 9 venant d’institutions (bibliothèques, sociétés, organisations et universités, par exemple) sont M.K. Muthoo préférables aux demandes individuelles, afin de rendre la revue accessible à davantage de lecteurs. La certification forestière et l’économie verte 17 Tous les numéros d’Unasylva sont disponibles en ligne à titre gratuit à l’adresse suivante: C. Peirano www.fao.org/forestry/unasylva. Assurer la sécurité des travailleurs forestiers 24 Veuillez envoyer vos commentaires et questions à: unasylva@fao.org. Z. Calle, E. Murgueitio et J. Chará Les informations ci-après peuvent être reproduites ou diffusées à des fins éducatives et Intégrer les activités forestières, l’élevage extensif non commerciales sans autorisation préalable durable et la restauration du paysage 31 du détenteur des droits d’auteur à condition que la source des informations soit clairement P.H.S. Brancalion, R.A.G. Viani, B.B.N. Strassburg indiquée. Ces informations ne peuvent toutefois et R.R. Rodrigues pas être reproduites pour la revente ou d’autres fins commerciales sans l’autorisation écrite du détenteur Financer la restauration des forêts tropicales 41 des droits d’auteur. Les demandes d’autorisation devront être adressées au Chef de la Sous- M. Skutsch et M.K. McCall division des politiques et de l’appui en matière de Le rôle de la gestion forestière communautaire dans publications, Bureau de l’échange des connaissances, la REDD+ 51 de la recherche et de la vulgarisation, FAO. Les appellations employées dans ce produit A. Setyowati d’information et la présentation des données qui y figurent n’impliquent de la part de l’Organisation Garantir que les femmes bénéficient de la REDD+ 57 des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) aucune prise de position quant A. Del Lungo au statut juridique ou au stade de développement Irrigation forestière durable dans les zones arides des pays, territoires, villes ou zones ou de leurs et semi-arides 63 autorités, ni quant au tracé de leurs frontières ou limites. La mention de sociétés déterminées ou R. Simpson, S. Lemaître et A. Whiteman de produits de fabricants, qu’ils soient ou non brevetés, n’entraîne, de la part de la FAO, aucune Mise en œuvre d’un plan d’action pour combattre approbation ou recommandation desdits produits de l’exploitation illégale du bois 65 préférence à d’autres de nature analogue qui ne sont pas cités. Les opinions exprimées dans ce produit Section spéciale sur l’Année internationale des forêts d’information sont celles du/des auteur(s) et ne reflètent pas nécessairement celles de la FAO. Les forêts vues à travers votre objectif 72 Pour commander les publications de la FAO mentionnées dans Unasylva, veuillez contacter le La FAO et la foresterie 76 Groupe des ventes et de la commercialisation, Bureau de l’échange des connaissances, de la Le monde forestier 79 recherche et de la vulgarisation, FAO, Viale delle Terme di Caracalla, 00153 Rome, Italie. Livres 81 Tél.: (+39) 06 57051; Télécopie: (+39) 06 5705 3360; Télex: 625852/625853/610181 FAO I; Courriel: publications-sales@fao.org Couverture: Des enfants de la maternelle font des exercices d'étirement lors d'une visite en forêt en République de Corée. FAO/FO-7393/Beomtae Kim
Éditorial Le pouvoir des forêts C e numéro d’Unasylva arrive dans le sillage de la carbone et à protéger les ressources en eau. Cela devrait permettre Conférence des Nations Unies sur le développement aussi de créer des emplois – peut-être cinq fois plus que l’élevage durable, Rio+20, qui, entre autres choses, a produit un extensif conventionnel – et de produire des aliments et d’autres document intitulé L’avenir que nous voulons. Dans ce dernier, produits de haute qualité. Pedro Brancalion et ses co-auteurs les dirigeants du monde entier ont réaffirmé leur engagement montrent que la restauration des terres forestières dégradées peut à l’égard du développement durable, et déclaré que «la grande accroître les revenus des éleveurs et des agriculteurs, notamment diversité des produits et des services fournis par les forêts peut au travers de la production de bois et de la vente de services permettre de relever un bon nombre des défis les plus urgents écosystémiques. L’élevage extensif est si répandu en Amérique en matière de développement durable». latine qu’un mouvement vers les systèmes sylvopastoraux et la Les forestiers devraient se réjouir de ces mots car ils indiquent restauration forestière pourrait avoir un considérable effet positif que les forêts commencent à obtenir la reconnaissance qu’elles sur l’environnement, la productivité des terres et l’emploi. méritent. Dans ce numéro d’Unasylva, nous nous penchons sur Alf Leslie, un penseur novateur aujourd’hui disparu, a pré- le pouvoir qu’ont les forêts d’entraîner un développement durable. dit un jour que les services écosystémiques pourraient valoir Dans leur article offrant une vue d’ensemble, Rao Matta et Laura 2,6 billions par an en 2040, plus de 10 fois la valeur de tous les Schweitzer Meins exposent les nombreuses contributions que les autres produits forestiers ensemble (Leslie, 2005). Ce n’est là forêts sont susceptibles d’apporter, comme l’approvisionnement certes que la supposition d’une personne (bien informée), mais durable en aliments, en énergie, en bois et en services écosysté- monétiser ne serait-ce qu’une fraction relativement petite d’une miques. Ils appellent à replacer les forêts vers une position plus telle valeur aurait des implication immenses sur les forêts, de centrale dans les initiatives visant au développement durable, et même que sur ceux qui les possèdent, les gèrent ou en dépendent. déclarent qu’un encadrement fort au niveau mondial est nécessaire On observe un intérêt croissant pour la REDD+, une politique si l’on veut parvenir à une compréhension élargie des avantages qui a été proposée pour inciter, au travers de rémunérations socioéconomiques de l’investissement dans les forêts. financières, les pays en développement à fournir des services Don Koo Lee reparcourt l’extraordinaire œuvre de reboisement écosystémiques forestiers en rapport avec la lutte contre les gaz de la République de Corée depuis les années 1960, et présente à effet de serre. Tandis que les négociations ont eu tendance à le rôle joué par les forêts dans la vision de son pays prônant une mettre l’accent sur la réduction du déboisement dans les forêts société sobre en carbone et orientée vers une croissance verte. pluviales tropicales, Margaret Skutsch et Mike McCall défendent Les expériences de la République de Corée montrent le pouvoir l’intérêt de la gestion forestière communautaire en matière de détenu par les forêts dans la restauration de l’intégrité écologique REDD+, suggérant que celle-ci pourrait mieux convenir aux et l’appui au développement économique durable. Le gouverne- émissions dérivées de la dégradation des forêts qu’à celles issues ment est actuellement en train de tendre la main aux autres pays du déboisement, et qu’elle pourrait être particulièrement efficace de la région, dans l’espoir de les aider dans leurs propres efforts. dans les forêts tropicales sèches. Abidah Setyowati affirme que Maharaj Muthoo décrit la certification forestière comme étant un les négociations relatives à la REDD+ doivent mieux intégrer instrument politique non contraignant, susceptible d’encourager une démarche soucieuse de l’égalité entre les sexes, ou risquent les échanges et le commerce équitables et d’améliorer l’accès au fort de ne faire que défavoriser ultérieurement les femmes. marché des produits forestiers, qu’il s’agisse de bois ou de produits Complétant ce numéro d’Unasylva, un article d’Alberto Del forestiers non ligneux. D’après lui, la certification forestière peut Lungo présente un projet régional de la FAO qui promeut l’uti- être un agent de durabilité, d’équité et de justice dans le secteur lisation des eaux usées urbaines pour l’irrigation de plantations forestier, et il suggère la création de partenariats novateurs entre d’arbres dans quatre pays d’Afrique du Nord, et un article de Robert les populations, le secteur public et le secteur privé, nécessaires Simpson et ses co-auteurs décrit les résultats et la seconde phase pour mieux exploiter son potentiel. d’une initiative visant à renforcer l’application des réglementations Si le secteur forestier est appelé à véritablement contribuer forestières, la gouvernance et les échanges commerciaux des bois. au développement durable, il est essentiel que ses employés Tous les articles de ce numéro d’Unasylva suggèrent que la prise bénéficient de conditions de travail garantissant leur sécurité. de conscience du rôle joué par les forêts, ainsi que la volonté Claudia Peirano décrit un processus de formation continue et de rémunérer ce rôle, ne fera que croître dans les prochaines de dialogue social mené en Argentine qui a permis de réduire décennies; les forêts sont trop importantes, sur le plan cultu- de moitié les accidents dans le secteur forestier. rel, écologique, économique et social, pour être négligées plus Zoraida Calle et ses co-auteurs prônent de passer, en Amérique longtemps. Leur accès au premier plan des politiques de déve- latine, d’un type d’élevage reposant sur un apport élevé d’intrants loppement fera au monde le plus grand bien. et l’utilisation de pâturages dégradés à des systèmes sylvo- pastoraux intensifs respectueux de l’environnement, affirmant Référence que l’incorporation d’arbres dans les systèmes d’élevage peut Leslie, A. 2005. What will we want from the forests? Tropical contribuer à réduire la dégradation des sols, à séquestrer le Forest Update 15(1): 14–16.
3 FAO/G. Napolitano Replacer les forêts dans le champ du développement J.R. Matta et L. Schweitzer Meins D Les forêts sont essentielles à urant des millénaires, les popula- L’économie mondiale a quadruplé au un avenir durable et doivent tions ont bénéficié des abondantes cours du dernier quart de siècle, au profit gagner une place de choix dans ressources de notre planète et ont de centaines de millions de personnes. les politiques économiques et pu prospérer grâce à elles. Aujourd’hui, Cependant, suffisamment d’éléments signi- les prises de décision. nous sommes sept milliards d’habitants ficatifs montrent qu’il ne s’agit pas d’un (Fonds des Nations Unies pour la popu- développement durable. D’après l’Évalua- lation, 2011) mais, alors que notre nombre tion des écosystèmes pour le Millénaire augmente, les ressources, elles, n’augmen- (2005), plus de 60 pour cent des principaux tent pas. Le concept de développement biens et services écosystémiques de la pla- durable répond à la prise de conscience nète sont dégradés ou utilisés de manière que nos ressources sont limitées. Ainsi, non durable, et l’urbanisation rapide a le rapport de la Commission Brundtland exacerbé les problèmes de pollution, pro- intitulé Notre avenir à tous (CMED, 1987), duction de déchets et congestion (CNUDD, qui a largement contribué à divulguer le concept de développement durable, faisait Jagannadha Rao Matta est Fonctionnaire En haut: Des enfants pêchent dans forestier, FAO, Rome. valoir que notre économie devait s’inscrire un cours d’eau de la forêt de Yoko, Laura Schweitzer Meins est Experte dans le cadre des capacités de régénération République démocratique du Congo. forestière; son travail pour cet article a été et d’assimilation de notre biosphère, aussi La chasse et la pêche sur les terres soutenu par le Mécanisme mondial de la forestières fournissent plus d’un Convention des Nations Unies sur la lutte bien dans sa nature que dans son ampleur cinquième des besoins en protéines contre la désertification. (Daly, 2002). dans quelque 60 pays en développement Unasylva 239, Vol. 63, 2012/1
4 2010). Malgré les avertissements répétés Les forêts fournissent des aliments et forêts fournissent de nombreuses matières concernant les risques environnementaux, de l’énergie premières utilisées par les entrepreneurs sociaux et économiques associés aux chan- Près de 350 millions parmi les personnes locaux. Au Cameroun, par exemple, les gements climatiques induits par l’homme, les plus pauvres du monde, dont 60 millions petites entreprises forestières axées sur le volume des émissions de gaz à effet de d’autochtones, dépendent presque entière- le miel, l’écorce de Prunus africana, le serre continue de croître (The Guardian, ment des forêts pour leur subsistance et manguier sauvage (espèce Irvingia) et la 2011). leur survie (FAO, 2012a). Ces populations gomme arabique (tirée de Acacia senegal) Si le progrès économique a été specta- comprennent les personnes les plus défavo- ont permis à de nombreuses populations culaire à l’échelle mondiale, les avantages risées et vulnérables – et souvent les plus locales de gagner des revenus monétaires, qui en dérivent n’ont pas été partagés équi- faibles sur le plan politique – de la société. susceptibles d’être utilisés ensuite pour tablement entre les pays et au sein de ces Pour ces dernières, les forêts constituent acheter des denrées alimentaires, des derniers (CNUDD, 2010). Treize pour cent une ressource importante en termes d’ali- combustibles et d’autres biens essentiels des habitants du monde en développement mentation et de santé; ainsi, la chasse et (FAO, 2012b). n’ont toujours pas accès à de l’eau propre la pêche sur les terres forestières four- Non seulement les forêts améliorent en quantité suffisante (Organisation mon- nissent plus d’un cinquième des besoins en la sécurité alimentaire mais elles jouent diale de la santé, 2011) et 25 pour cent protéines dans quelque 60 pays en dévelop- un autre rôle important en contribuant d’entre eux n’accèdent que faiblement ou pement (Mery et al., 2005). En outre, les à ralentir et à inverser le processus de pas du tout aux services modernes de four- niture en énergie (Agence internationale de l’énergie, 2009). Par ailleurs, la crois- sance économique rapide mais inégale est devenue l’un des facteurs essentiels des troubles politiques et sociaux dans de nombreuses parties du monde (Sreedharan et Matta, 2010). À mesure que la population humaine s’étend et que la consommation par habitant augmente, la biosphère, déjà trop sollicitée, ne fait que s’épuiser davan- tage; ainsi, la superficie de terre arable par tête a chuté depuis les années 1960, du fait d’une utilisation trop intensive des terres et de leur dégradation, ainsi que de l’urba- nisation (IFPRI, 2011). Face à de telles perspectives, la nécessité de réexaminer et recentrer nos efforts pour garantir un avenir durable apparaît de plus en plus évidente. CONTRIBUTION DES FORÊTS AU DÉVELOPPEMENT DURABLE De nombreux pays ont besoin de se déve- lopper pour pouvoir augmenter les emplois et élever le niveau de vie (Dasgupta, 2011). Toutefois, pour être durables, les activités de développement doivent équilibrer les facteurs économiques, sociaux et écolo- giques. Les forêts constituent une ressource unique à cet égard, du fait de leur aptitude à répondre aux multiples besoins et enjeux économiques, sociaux et écologiques, et en raison du fait qu’elles sont renouvelables. Un enfant boit à une pompe communale, FAO/A. Hafeez Sukkur, Pakistan. Treize pour cent des habitants du monde en développement n’ont toujours pas accès à de l’eau propre en quantité suffisante Unasylva 239, Vol. 63, 2012/1
5 Les petites entreprises forestières exploitant le fruit du manguier sauvage (espèce Irvingia) génèrent des emplois et des revenus pour de nombreuses populations locales au Cameroun dégradation des terres, en particulier grâce à leur aptitude à réapprovisionner le sol en nutriments et à accroître sa capacité de rétention. Aussi la gestion durable des forêts et la restauration forestière ont- elles fini par être reconnues comme des démarches cruciales pour relever les défis majeurs de la sécurité alimentaire, tels que la désertification et la dégradation des sols. L’agroforesterie et l’aménagement des terres sylvopastorales bénéficient tous deux des fonctions protectrices des arbres et des forêts, de façon à accroître la pro- duction alimentaire au fil du temps (Calle, FAO/J. FOTSING Murgueitio et Chará, 2012). Les forêts jouent de même un rôle clé en produisant du combustible: pour plus de deux milliards de personnes, la dendroé- Au fil du temps, grâce à un soutien (FAO, 2010a). De plus amples investisse- nergie est fondamentale pour la cuisson des financier et technique ainsi qu’au déve- ments dans la gestion durable des forêts aliments, le chauffage et la préservation loppement des capacités, l’utilisation et la restauration forestière pourraient des denrées alimentaires (aliments fumés) et la commercialisation croissantes des permettre d’accroître le stockage du car- (FAO, 2010a). Par ailleurs, le charbon et produits ligneux et non ligneux permet- bone dans les forêts (Skutsch et McCall, le bois de feu sont souvent des sources tront de créer de nouvelles entreprises, 2012). En outre, une meilleure intégration principales de revenus en espèces pour davantage d’opportunités d’emploi et des des activités forestières et agricoles est les personnes démunies vivant à l’inté- moyens d’existence de plus en plus sûrs. rapidement en train d’apparaître comme rieur et au voisinage des forêts (FAO, Des instruments tels que la certification et un moyen significatif de garantir à la fois 2006). Des recherches importantes sont l’étiquetage écologique pourraient aider à une agriculture durable et la sécurité ali- menées actuellement sur l’utilisation de favoriser la commercialisation des produits mentaire. Ainsi, le passage de l’agriculture la biomasse forestière en tant que source forestiers (Muthoo, 2012). Une réaction traditionnelle à l’agroforesterie peut poten- d’énergie durable, propre et de haute tech- positive en boucle pourrait être créée de tiellement permettre de séquestrer jusqu’à nologie (FAO, 2008). la sorte: un revenu local plus important 25 tonnes de carbone en plus par hectare et accroît la consommation, qui en retour par an (Matta, 2009; voir aussi Brancalion Les forêts contribuent à créer des stimule la production et crée de nou- et al., 2012). Les forêts peuvent aussi aider emplois et à améliorer les moyens veaux emplois. La restauration forestière à donner une utilisation productive aux d’existence est de même prometteuse en termes de eaux usées (Del Lungo, 2012). Les forêts sont parvenues à être reconnues création d’emplois et de revenus substan- comme des moteurs du développement tiels (Calle, Murgueitio et Chará, 2012; Les forêts fournissent un vaste économique rural. Dans le sud de la Chine, Brancalion et al., 2012). éventail de produits par exemple, les activités liées aux forêts Les écosystèmes forestiers fournissent une contribuent à hauteur de 40 pour cent au Les forêts fournissent des services grande variété de produits ligneux et non revenu des exploitations agricoles (Banque écosystémiques essentiels ligneux qui sont intrinsèquement natu- mondiale, 2006). Dans l’ensemble, le sec- Les forêts fournissent une vaste gamme rels et recyclables, et souvent réutilisables teur forestier formel représente presque de services écosystémiques. Elles aident et biodégradables. Il existe un potentiel un pour cent du produit mondial brut (la à réguler les cycles hydriques et à réduire considérable pour une utilisation accrue somme des produits intérieurs bruts de la menace et l’impact des inondations et de ces produits, par exemple dans les bâti- tous les pays) et génère au moins 10 mil- de la sécheresse (Daily et al., 1997), et ments «verts» et autres infrastructures, lions d’emplois (FAO, 2010a). Si l’on elles abritent plus de 80 pour cent de la dans les pièces recyclables de voiture considère l’emploi dans les petites entre- biodiversité terrestre mondiale (WWF, et d’ordinateur, et dans les produits ali- prises locales informelles, il est probable 2012). Les forêts jouent aussi un rôle pré- mentaires, médicinaux et cosmétiques. que plus de 100 millions de personnes tra- pondérant dans le cycle du carbone global, L’utilisation accrue et novatrice de produits vaillent dans des activités liées aux forêts notamment en stockant quelque 289 giga- forestiers pourrait conduire à des change- (Macqueen, 2008). tonnes de carbone dans leur biomasse ments radicaux dans la manière dont nous Unasylva 239, Vol. 63, 2012/1
6 La foresterie urbaine joue un rôle important en rendant les villes plus vivables menons nos vies. La plus grande prospé- rité, associée à une demande croissante de modes de consommation et d’existence plus durables, sont susceptibles de créer une demande accrue de produits issus de méthodes d’exploitation durables. Dans la mesure où les produits forestiers peuvent répondre si simplement et rapidement à une telle demande, il est fort probable que l’importance des forêts se révélera de plus en plus, tant aux yeux des producteurs que des consommateurs. Les forêts favorisent des villes plus saines et plus vivables Les forêts sont essentielles à notre épa- nouissement culturel, esthétique et récréatif. Grâce à l’augmentation du temps de loisir et du revenu disponible, l’intérêt des citadins pour l’utilisation récréative des forêts s’est considérablement accru; ainsi, la moitié du tourisme mondial est axé sur la nature (FAO, 2012a). Les résidents urbains peuvent en outre être affectés par les pertes de superficies forestières, lorsque celles-ci conduisent à des inondations ou à des sécheresses plus fréquentes, ou bien à une baisse de qualité de l’eau dispensée dans les villes. Par ailleurs, la présence d’arbres peut venir en aide aux citadins en atténuant l’effet «îlot de chaleur» – à savoir le phénomène par lequel les zones urbaines sont plus chaudes que les zones rurales environnantes. La foresterie urbaine joue FAO/S. Urareepichit ainsi un rôle important, en permettant de réguler la température à l’intérieur des villes (FAO, 2001); elle contribue de même à la gestion des eaux et favorise la créa- tion et l’expansion d’aires de récréation et d’espaces verts urbains et péri-urbains. vies (Braatz et al., 2006). De telles crises terrains en pente, qui vise à transfor- Ce phénomène a même été associé à une peuvent parfois mener à la création de mer 14,7 millions d’hectares de terres de réduction de la délinquance dans les zones programmes forestiers, susceptibles de culture en forêts (Bennet et Xu, 2005). intra-urbaines (Kuo et Sullivan, 2001). bénéficier aux populations locales sur le long terme. Ainsi, le programme mexicain FORÊTS ET AVENIR DURABLE Les forêts atténuent et amoindrissent de rémunération des services hydriques, S’il existe des raisons incontestables de l’impact des catastrophes qui incite financièrement les propriétaires conserver les forêts et d’encourager leur Les forêts peuvent fournir un moyen pour terriens à conserver le couvert forestier intégration dans les stratégies de déve- atténuer les événements catastrophiques et dans les bassins versants critiques, a été loppement durable, les risques auxquels mieux faire face aux chocs qui en résultent. établi à l’origine en réponse à une situation elles doivent faire face, et qui dérivent de Ainsi, il apparaît clairement que les forêts de grave sécheresse et de pénurie d’eau la dégradation, du morcellement, de leur côtières sont en mesure de réduire l’impact (Munoz et al., 2008). En Chine, des inon- conversion à d’autres utilisations des terres des cyclones et d’autres calamités natu- dations dévastatrices le long de la rivière et d’une exploitation excessive, demeurent relles, et par là de diminuer les dégâts sur Yangtze ont conduit le gouvernement à élevés. Ainsi, quelque 130 millions d’hec- les propriétés et le nombre de pertes de lancer le Programme de conversion des tares de forêt, comprenant 40 millions Unasylva 239, Vol. 63, 2012/1
7 d’hectares de forêt primaire, ont été perdus exemple, pourrait changer de manière une mise en réseau. Les instances œuvrant durant la période 2000-2010 (FAO, 2010a). significative la dynamique commerciale à une telle tâche pourraient avoir à aller Le 20 e anniversaire de la mémorable des entreprises forestières et accroître leur au-delà de l’organisation de congrès et évé- Conférence des Nations Unies sur l’envi- viabilité financière. Cela pourrait en retour nements ponctuels, et devoir employer les ronnement et le développement (CNUED) conduire à un plus grand investissement technologies numériques modernes et les de 1992, connue aussi sous le nom de dans le secteur forestier et, en dernière méthodes de diffusion axée sur Internet, qui Sommet de la planète Terre, a été marqué analyse, à un accroissement des revenus et détiennent un potentiel sans précédent pour en 2012 par la Conférence des Nations des possibilités de moyens d’existence pour servir de caisse de résonance aux exemples Unies sur le développement durable les communautés locales. Pour garantir de réussite. Eu égard aux bénéfices géné- (CNUDD), tenue à Rio de Janeiro, Brésil que les produits forestiers puissent lut- raux fournis par les forêts, les interventions (et connue sous le nom de Rio+20). Là, ter sur un pied d’égalité (Martin, 2008), visant à faire mieux apprécier la valeur des des dirigeants mondiaux et d’autres repré- il est nécessaire de mettre en œuvre des biens et services forestiers et les avantages sentants de la société civile ont identifié politiques assurant que les prix des pro- qui en dérivent doivent être menées tant sept domaines requérant une attention duits issus de pratiques non durables ou au niveau national que mondial. prioritaire: l’emploi, l’énergie, les villes, «non verts» reflètent la totalité de leurs Rio+20 nous a fourni une opportunité l’alimentation, l’eau, les océans et les catas- coûts environnementaux (par exemple en pour repenser le développement durable. trophes (CNUDD, 2012). termes de pollution, d’utilisation d’énergie, Peut-être le moment est-il venu de faire Les forêts jouent un rôle crucial dans cha- d’émission globale de gaz à effet de serre un véritable et significatif changement de cun de ces champs, mais ce rôle est souvent et d’évacuation des déchets). paradigme, et d’intégrer les forêts au sein sous-évalué. Jusqu’à présent, les forêts ont Des questions sous-jacentes telles que le de nos réflexions et actions pour mener rarement été au premier plan des préoccu- régime foncier et la gouvernance doivent réellement à bien un développement pations des décideurs, et nombre de leurs être abordées, et il faudrait mettre en place durable. Nous pouvons encore avoir les contributions à la société sont inconnues des politiques encourageant les entreprises forêts que nous voulons. u hors du secteur forestier (FAO, 2010b). locales axées sur les forêts, les coopéra- Ainsi, le document final issu de Rio+20, tives et la gouvernance forestière. Les L’avenir que nous voulons, ne consacre mécanismes REDD+ devraient inclure que quatre paragraphes (dans un document des sauvegardes spécifiques garantissant qui en contient 283) aux forêts (Assemblée que le flux des bénéfices est durable, non générale des Nations Unies, 2012). exclusif (et qu’il comprend notamment les Quoi qu’il en soit, L’avenir que nous femmes – Setyowati, 2012) et participatif. Références voulons souligne l’importance d’intégrer Dans certains pays, des politiques de les objectifs et les pratiques de la gestion conformité – réglementaire et volontaire – Agence internationale de l’énergie. 2009. durable des forêts dans le courant prin- ont dissuadé les propriétaires de terres World energy outlook 2010. OECD cipal des politiques économiques et des de mener à bien une gestion durable des Publishing. prises de décision. Cela impliquera de faire forêts. La crédibilité des produits ligneux Assemblée générale des Nations Unies. 2012. comprendre les bénéfices d’une telle mise en matière d’environnement et de durabi- Résolution adoptée par l’Assemblée générale en valeur, d’obtenir l’engagement des déci- lité – à savoir qu’ils sont renouvelables, [sans renvoi à une grande commission deurs à l’égard des actions identifiées, et recyclables et biodégradables, et que leur (A/66/L.56)] 66/288. L’avenir que nous de s’assurer que ces actions sont effecti- production requiert une moindre quantité voulons. New York, États-Unis d’Amérique. vement menées à bien sur le terrain. Cela d’énergie – exige une plus grande visi- Disponible sur: http://daccess-dds-ny.un.org/ exigera des capacités directrices fortes au bilité. Les responsables des politiques et doc/UNDOC/GEN/N11/476/10/PDF/N1147 niveau mondial et national, ainsi que des les praticiens du développement devraient 610.pdf?OpenElement. actions concertées sur divers fronts. Des regarder de près les politiques et les cadres Banque mondiale. 20 06. Unlocking ajustements de fond des politiques et des réglementaires existants. Ils devraient opportunities for forest-dependent people pratiques doivent être effectués sans faille. s’assurer que ceux-ci encouragent effec- in India. Report No. 34481–IN. Washington, Les articles de ce numéro d’Unasylva (dont tivement un environnement qui favorise D.C., États-Unis d’Amérique. certains sont cités ici) offrent un aperçu de l’industrie forestière, notamment la petite et Bennett, M.T. et Xu, J. 2005. China’s sloping certaines des voies qu’il est possible d’ex- moyenne industrie, et qui élargit l’éventail land conversion program: institutional plorer pour renforcer le secteur forestier et des valeurs et avantages associés aux forêts innovation or business as usual? Document son rôle dans le développement durable. en développant des produits et services présenté à l’atelier ZEF–CIFOR sur la Des incitations, conçues pour encou- nouveaux et novateurs. rémunération des services environnementaux rager l’investissement dans des activités De même, si l’on veut parvenir à une dans les pays développés et en développement, liées aux forêts et stimuler la création de compréhension élargie des avantages Titisee, Allemagne, 15-18 juin 2005. nouveaux marchés, seront nécessaires, socioéconomiques de l’investissement Braatz, S., Fortuna, S., Broadhead, J. et parallèlement au développement de cadres dans les forêts, il faut un encadrement fort Leslie, R., éds. 2006. Coastal protection réglementaires appropriés. La rémuné- au niveau mondial, une communication in the aftermath of the Indian Ocean ration des services écosystémiques, par concertée, un partage des connaissances et tsunami: What role for forests and trees? Unasylva 239, Vol. 63, 2012/1
8 Comptes rendus de l’atelier technique FAO. 2006. Améliorer la foresterie pour réduire hydrological services of Mexico’s forests: régional de la FAO, Khao Lak, Thaïlande, la pauvreté: manuel du praticien. Étude FAO: analysis, negotiations and results. Ecological 28-31 août 2006. Forêts n° 149. Rome (disponible aussi sur: Economics, 65: 725–736. Brancalion, P. H. S., Viani, R. A.G., www.fao.org/docrep/009/a0645f/a0645f00. Muthoo, M. 2012. La certification forestière Strassburg, B.B.N. et Rodrigues, R.R. htm). et l’économie verte. Unasylva, 239: 17–23 2012. Financer la restauration des forêts FAO. 2008. Les forêts et l’énergie: questions (ce numéro). tropicales. Unasylva, 239: 41–50 (ce numéro). principales. Étude FAO: Forêts n° 154. Organisation mondiale de la santé. Calle, Z., Murgueitio, E. et Chará, J. 2012. Rome (disponible aussi sur: www.fao.org/ 2011. 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9 Contribution du secteur forestier à une vision «bas carbone, croissance verte» en République de Corée D.K. Lee L Le pays poursuit l’objectif de e Gouvernement de la République marché international, aux infrastructures la croissance verte à travers la de Corée a conçu une stratégie juridiques, aux protocoles commerciaux gestion durable et la conservation visant à promouvoir une société et aux mécanismes d’aide (PNUE, 2011). des forêts, tout en étendant son verte, au travers de sa vision nationale pour Cet article décrit quelques-unes des rôle au niveau régional. les 60 années à venir synthétisée dans la activités entreprises en République de formule «bas carbone, croissance verte» Corée au cours des 60 dernières années, (low carbon, green growth). Celle-ci a pour lesquelles sont susceptibles d’aider le pays objectif de passer du système énergétique à faire avancer sa vision pour les 60 à venir. actuel, impliquant d’importantes émissions Il présente ainsi des interventions réussies de gaz à effet de serre, à un modèle plus de reboisement dans des zones forestières durable, producteur de faibles émissions dégradées; il étudie la dynamique des de carbone. Une transition douce vers politiques forestières visant à accroître une économie verte requiert des condi- la valeur des forêts, dans le contexte du tions favorables spécifiques, notamment programme gouvernemental «bas carbone, des réglementations nationales, des poli- Don Koo Lee est Ministre du Service forestier tiques, des subventions et des mesures Le «cœur de Marie», Lamprocapnos coréen, Daejeon, République de Corée. d’incitation, ainsi que des éléments liés au spectabilis, pousse dans une forêt en République de Corée FAO/FO-7401/Myunggi Joo Unasylva 239, Vol. 63, 2012/1
10 croissance verte»; il précise en outre le TABLEAU 1. Superficie forestière et bois sur pied au fil du temps rôle du secteur forestier coréen dans la Année Superficie (1 000 ha) Bois sur pied (1 000 m3) Bois sur pied (m3 par ha) croissance verte, tant au niveau national 1960 6 700 63 995 9,6 qu’international. 1970 6 611 68 772 10,4 PERTES FORESTIÈRES ET 1980 6 567 145 694 22,2 RÉCUPÉRATION DES FORÊTS 1990 6 476 248 426 38,4 Les forêts de la République de Corée cou- 2000 6 430 387 758 60,3 vrent 6,4 millions d’hectares, soit quelque 2010 6 369 800 025 125,6 64 pour cent de la superficie totale des Source: Service forestier coréen. terres émergées. Dans le passé, en parti- culier durant la première moitié du XXe Projet de plantation de bois de feu, été plantées, principalement entre 1962 siècle, les forêts du pays ont subi une 1945-1976 et 1972. Des espèces d’arbres fruitiers à sévère dégradation. Jusque dans les années Les principales causes des pertes de haute valeur marchande, comme le châ- 60, elles ont en effet souffert des guerres, superficies forestières consistaient dans taignier d’Amérique (Castanea crenata de la coupe illégale et des cultures itiné- le défrichement à grande échelle et l’ex- var. dulcis), et des espèces pour la pro- rantes non contrôlées. Le volume de bois ploitation des ressources forestières pour duction de bois, telles que le mélèze du sur pied a chuté brutalement, atteignant l’approvisionnement en nourriture et Japon (Larix kaempferi), le pin de Corée environ 10 m3 par hectare. Cependant, combustible. Une quantité considérable (Pinus koraiensis) et le cyprès du Japon suite à une série de programmes de reboi- de bois de feu était requise pour chauffer (Chamaecyparis obtusa), ont également sement réussis – décrits ci-dessous –, il est les maisons en hiver. Le Gouvernement été plantées. Ainsi, 30 pour cent de la remonté, atteignant en 2010 126 m3 par amorça ainsi des plantations nationales superficie forestière totale consistait en hectare (voir par exemple la figure 1). Le de bois de feu en 1945 mais les pro- plantations d’origine humaine (Lee, 2000). tableau 1 montre l’accroissement du bois grammes s’interrompirent lorsque la Non seulement cette activité de plantation sur pied au fil du temps. Les projets de guerre de Corée éclata en 1950. Selon a contribué à l’approvisionnement en bois reboisement menés par le Gouvernement une inspection menée en 1972, 56 pour de feu et à l’expansion de la superficie depuis 1945 se sont traduits par la plan- cent (436 000 ha) de la superficie totale forestière nationale, mais elle a apporté de tation de plus de 11 milliards d’arbres de plantations (780 000 ha) avait survécu multiples avantages écologiques (comme sur une superficie de plus de 4,25 mil- (Lee, Lee et Kim, 1999). la conservation de la biodiversité et la lutte lions d’hectares répartis à travers le pays Durant les années 60 et 70, en réponse contre l’érosion) et économiques. (Service forestier coréen – Korea Forest à la demande cruciale de combustible Service –, 1997). au sein des communautés locales, le Plans forestiers nationaux: évolution Gouvernement a mis en œuvre un projet au fil du temps de plantation massive, recourant à une Le Gouvernement met en œuvre des 1 Forêt dégradée à Pohang, Province de sélection d’arbres à croissance rapide. Des Plans forestiers nationaux depuis 1973, Gyeongbuk, dans les années 60 (en haut). espèces telles que le pin rigida (Pinus lorsqu’a été lancé le premier Plan national En 1974, cette zone a bénéficié d’un rigida), le faux acacia (Robinia pseudo- décennal de réhabilitation et restauration projet de lutte contre l’érosion. La même zone, dans les années 90 (en bas), permet acacia), l’aune (Alnus spp.) et le chêne forestières. Grâce à ce plan, 207 000 ha de voir les résultats de programmes de du Japon (Quercus acutissima) ont ainsi de plantations supplémentaires ont été éta- réhabilitation et restauration réussis blis. En outre, entre 1976 et 1977, quelque 127 000 ha (20 pour cent de la super- ficie totale des plantations) ont été plantés, au travers d’un prêt de 4,4 millions de dollars EU de la Banque internationale pour la reconstruction et le développement TABLEAU 2. Superficie des plantations de bois de feu Année Superficie Programmée Établie 1959-1966 800 000 – 1967-1972 514 000 436 000 1973-1977 207 000 207 000 Total 1 521 000 643 000 Source: Service forestier coréen. Source: Song, 1982. Unasylva 239, Vol. 63, 2012/1
11 2 «Triangle de la croissance verte» Améliorer la qualité de la vie: prévu par la stratégie «bas à travers le reverdissement des carbone, croissance verte» terres, l’extension des espaces écologiques, la promotion de la consommation verte et la Renforcer la contribution du pays réalisation d’un système de sur le plan international: Créer un cycle vertueux de transport vert à travers la participation de (BIRD) (Institut économique rural de l’environnement et de l’économie: la République de Corée à la Corée – Korea Rural Economic Institute –, contribuer au développement et coopération internationale 1978). En 1977, la superficie totale des à la promotion de technologies en matière de changement plantations du pays avait atteint 643 000 ha et d’industries vertes, qui, climatique, et grâce à la mise Triangle de (tableau 2). ensemble, favoriseront la en pratique de son rôle de guide croissance, créeront des la croissance au niveau mondial, en tant que Les Plans forestiers nationaux ont été verte emplois, contribueront à réduire nation susceptible de servir adaptés au fil du temps afin de refléter les émissions de gaz à effet de de pont et d’aider les pays en les changements de contexte. De 1973 à serre et atténueront les effets développement à s’orienter vers 1987, le Gouvernement s’est concentré sur des changements climatiques une croissance verte le reboisement des forêts dégradées, au Source: Comité présidentiel sur la croissance verte – Presidential Committee on Green Growth –, 2012. travers des deux premiers Plans forestiers nationaux décennaux. De 1988 à 1997, au travers du troisième Plan forestier natio- conçu pour élargir la mise en œuvre de FORÊTS, FAIBLES ÉMISSIONS DE nal, il a mis l’accent sur la mise en œuvre la gestion durable des forêts. Le Plan CARBONE ET CROISSANCE VERTE d’une utilisation efficiente des ressources souligne tout particulièrement l’impor- Stratégie nationale forestières, visant à accroître la valeur tance des fonctions assurées par les forêts, En 2008, reconnaissant l’exigence de économique des forêts et à renforcer les notamment en tant que puits de carbone et garantir un développement durable, le avantages publics tirés des forêts. Le qua- dans la réponse au changement climatique. Gouvernement a annoncé une stratégie trième Plan forestier national décennal, Avec ce plan, le Service forestier coréen orientée vers la réduction des émissions couvrant de fait la période 1998-2007, a continue à asseoir les bases d’un bien-être de carbone et la croissance verte (stratégie posé les bases d’une gestion durable des durable de la société en développant les dite «bas carbone, croissance verte»), qui forêts en élaborant un cadre, des critères ressources sociales et environnementales, constituait la nouvelle vision du développe- et des indicateurs pour le pays, ainsi qu’en et à favoriser les entreprises forestières en ment national à long terme. Cette stratégie promouvant la participation des organisa- tant que part d’une «stratégie océan bleu»1. comprenait des objectifs politiques qui tions de la société civile dans la gestion La vision d’ensemble du cinquième Plan visaient à affronter le changement clima- des forêts. est de «réaliser une nation verte apte à tique et les questions énergétiques, à créer assurer un bien-être et une croissance de nouveaux moteurs de croissance grâce Un nouveau type de Plan forestier durables». Soumises à une gestion viable, à l’investissement dans les secteurs liés à national: renforcer les fonctions des les forêts sont à cet égard une ressource l’environnement, notamment les forêts, forêts et favoriser la croissance verte clé, susceptible de favoriser le développe- et à développer une infrastructure éco- S’appuyant sur les bases et les cadres éta- ment économique national, de renforcer logique (figure 2). L’année suivante, le blis lors du quatrième Plan, le cinquième la conservation des sols et d’accroître la Comité présidentiel sur la croissance verte Plan forestier national (2008-2017) est qualité de la vie. était créé, et la Stratégie nationale pour une croissance verte était lancée. Un Plan quinquennal pour une croissance verte Saemaul Undong: favoriser le reboisement était annoncé, en tant que plan de mise en œuvre à moyen terme de cette stratégie – et Le succès du reboisement des forêts dégradées doit être attribué non seulement à la mise une partie de son exécution était confiée en œuvre massive des plans forestiers, mais aussi au lancement d’un nouveau mouvement à divers ministères et services. communautaire dénommé «Saemaul Undong». Lancée en 1970 par le Président de la En outre, une loi-cadre sur la croissance République de Corée, cette initiative visait à moderniser l’économie rurale du pays. Au verte sobre en carbone a été promulguée, travers de ce mouvement, le Gouvernement a pu ainsi renforcer les ressources humaines au la première loi de ce type au monde, qui moyen de campagnes de promotion éducative et de programmes de formation réalisés dans a conduit à la mise en œuvre de politiques diverses régions (Lee et Lee, 2005). L’objectif était d’accroître le nombre de spécialistes et de responsables d’aménagement forestier, tout en stimulant le reboisement et les efforts en matière de gestion des forêts. Les communautés locales étaient consultées sur la mise en 1 Tel qu’il est utilisé ici, un «océan bleu» désigne un marché qui n’existe pas encore et œuvre des politiques forestières, et les besoins en combustible dans les zones rurales ont qui n’est donc pas affecté par la concurrence. été satisfaits grâce à la réalisation de projets de plantation de bois de feu. Parallèlement Une «stratégie océan bleu», telle qu’elle est à ces projets, le Gouvernement a fourni un soutien financier aux communautés locales exposée par Kim et Mauborgne (2005), décrit la croissance qu’une entité est en mesure au travers de ce qu’on appelait des kyes (associations d’aide mutuelle) forestières. de générer en créant de la demande sur un nouveau marché. Unasylva 239, Vol. 63, 2012/1
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