CONTRIBUTION À L'ÉLABORATION D'UN DISPOSITIF JURIDIQUE POUR LA PROMOTION DE LA PARITÉ - PROJET DE PROMOTION DE LA REPRESENTATION POLITIQUE DES ...

 
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CONTRIBUTION À L’ÉLABORATION D’UN DISPOSITIF
                                             JURIDIQUE POUR LA PROMOTION DE LA PARITÉ

  PROJET DE PROMOTION DE LA REPRESENTATION
       POLITIQUE DES FEMMES AU MAROC

CONTRIBUTION À L’ÉLABORATION D’UN DISPOSITIF JURIDIQUE
           POUR LA PROMOTION DE LA PARITÉ

                  Professeur Nadia Bernoussi
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CONTRIBUTION À L’ÉLABORATION D’UN DISPOSITIF
                                                   JURIDIQUE POUR LA PROMOTION DE LA PARITÉ

SOMMAIRE

I- LE CADRE GÉNÉRAL								4
  • Introduction								4
  • Le contexte									4
  • L’objectif									5
  • La démarche								6
  • Le référentiel								6
  • La problématique								8

II- INTERROGATION DES CONCEPTS ET ÉTAT DES LIEUX 				                            8
  • La clarification des concepts 							8
  • Les liens entre la parité et la CEDAW, la démocratie,
    le mouvement féministe, la sécularité et le communautarisme			               10
  • Les acquis									13
  • Les défis									15

III- LA LÉGITIMITÉ DE LA PARITÉ							16
  • Des chiffres stagnants ou en régression						                                16
  • Les limites des mécanismes existants						17
  • La consécration de l’article 19							18

IV- LA PARITÉ SOUS LE PRISME DU DROIT 						                                     19
  • La constitution et la parité							19
  • Le législateur et la parité							21
  • Le juge constitutionnel et la parité						                                   23

V- LA MISE EN ŒUVRE DE LA PARITÉ						                                           25
  • Une parité globale ou sélective ?						                                      25
  • Quel dispositif juridique pour poser la parité ?					                        27

VI- QUEL MODE DE SCRUTIN ? RÉFORMER LE MODE DE SCRUTIN
     OU CIBLER D’AUTRES ANGLES D’ATTAQUE ? 					                                 31
  • Les techniques électorales							31
  • La sociologie électorale							32
  • Les éléments de droit								32
  • Les mesures d’accompagnement						32
  • Les vigilances								32

VII- LES PISTES DU PLAIDOYER							33
  • La recherche d’un environnement favorable					                               33
  • Les alliances								33
  • La stratégie								                                                         33
  • L’appui du chef de l’Etat							33
  • La charte d’honneur							                                                   33

CONCLUSION 									34

                                                                                           3
D’un côté il y a ceux qui pensent :
Que « L’avenir appartient à celles et ceux qui croient en la beauté de leurs rêves. » (E. Roosevelt)
Que « La parité dans la représentation, c’est tout simplement l’application du principe d’égalité des personnes qui
forment le genre humain : autant de femmes que d’hommes dans les assemblées élues ainsi que dans les conseils et
comités consultatifs nommés par l’exécutif et le législatif pour concourir à la décision publique. »1
D’un autre, ceux qui rappellent :
Qu’il faut laisser le temps au temps2
Ou qui préviennent que : Que ça sent la poudre3… Que la cause est bonne mais pas le moyen.4

I-LE CADRE GENERAL
INTRODUCTION
L’étude initiée par l’Association Jossourffm et la Fondation Friedrich Ebert (FFE) portant sur la question de la
promotion de la représentation politique des femmes au Maroc, s’inscrit dans une démarche continue de réflexion
et de recherche-action couvrant la période de 2017 à 2020.
Cette recherche-action portée par deux institutions connues notamment pour leur attachement à la promotion
de l’Etat de droit, des droits humains, de la bonne gouvernance et de l’égalité de genre a abouti à la livraison de
documents de haute facture dont « l’évaluation des mécanismes de promotion de la représentation politique des
femmes au Maroc » et l’élaboration d’un guide destiné à organiser une pétition en faveur de la parité.
Les recommandations phares de la phase I ont montré que malgré des progrès indéniables enregistrés au niveau
juridique, politique et pratique, les mécanismes utilisés jusque-là pour promouvoir une participation effective des
femmes en politique interpellent sur leur pertinence, leur effectivité, voire sur leur raison d’être.
C’est dans ce sens que les deux institutions partenaires ont décidé de passer à la phase II dans l’objectif de réinterroger
ces outils et mécanismes qui ont fait leur temps et sans doute montré leurs limites, pour faire tomber la digue des
résistances et opter franchement pour la parité, droit constitutionnel considéré comme l’une des avancées notoires
de la constitution en matière d’égalité de genre.
LE CONTEXTE
En effet et malgré une nouvelle loi fondamentale réputée en faveur des droits des femmes 5 et en dépit d’une volonté
affichée au plus haut sommet de l’Etat sur cette question, les chiffres restent en deçà du tiers onusien admissible.
Cette sous représentation mondiale nous renvoie notamment au rapport des femmes au pouvoir, à leur accès aux
postes de décision dans les différentes sphères des secteurs privé et public, ainsi qu’à l’exercice et à la pratique de
cette gouvernance.
Certes, personne ne remet plus en cause aujourd’hui le fait que la participation des femmes dans les lieux de prises
de décision dans la vie publique et politique est à la fois un droit fondamental, un levier démocratique et un indice
déterminant du développement humain.
  Il s’agit en effet d’un droit reconnu par les instruments onusiens des droits humains dont la Convention sur
l’Elimination de toutes les formes de Discrimination à l’Egard des Femmes (CEDAW), ratifiée par le Maroc en 1993.
Ce droit constitue également l’un des 12 domaines critiques identifiés et retenus par la plate-forme d’action de la
Quatrième conférence mondiale sur les femmes (Beijing 1995), comme il constitue l’un des ODD 20306.

1 Françoise Gaspard : La parité pourquoi pas ? Pouvoirs n°82 - Femmes en politique - septembre 1997, P125.

2 Formule attribuée à F.Mitterand.

3 L. Favoreu : « Principe d’égalité et représentation politique des femmes : la France et les exemples étrangers », in Conseil d’État, Sur le principe d’égalité. Rapport public
1996, La Documentation française, série « Études et documents », nº 48, 1997, p. 395-407.p115.

4 F. Furet : Propos exprimés dans l’émission Réplique de France Culture le 10 mai 1997. Pour l’historien, « l’idée est fasciste. »

5 N.Bernoussi : notre constitution est-elle féministe ?Journal Illi. 8mars 2016. Entretien.

6 La cible 5 en l’occurrence qui décline ses autres cibles à savoir :
« Mettre fin, dans le monde entier, à toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et des filles.
Éliminer de la vie publique et de la vie privée toutes les formes de violence faite aux femmes et aux filles, y compris la traite et l’exploitation sexuelle et d’autres types
d’exploitation.
Éliminer toutes les pratiques préjudiciables, telles que le mariage des enfants, le mariage précoce ou forcé et la mutilation génitale féminine.
Faire une place aux soins et travaux domestiques non rémunérés et les valoriser, par l’apport de services publics, d’infrastructures et de politiques de protection sociale et la
promotion du partage des responsabilités dans le ménage et la famille, en fonction du contexte national.
Garantir la participation entière et effective des femmes et leur accès en toute égalité aux fonctions de direction à tous les niveaux de décision, dans la vie politique, économique
et publique.

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CONTRIBUTION À L’ÉLABORATION D’UN DISPOSITIF
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Pour autant, force est de constater que de par le monde, les statistiques révèlent qu’aucun pays, aussi avancé soit-il,
ne parvient à réaliser pleinement l’égalité entre les sexes dans les hautes sphères de la hiérarchie des instances de
gouvernance. Ceci s’applique aux secteurs privé et public ainsi qu’au niveau des mandats et assemblées électifs.
Ainsi, si les femmes assument des rôles importants au sein de la famille, de la collectivité, de la société civile ainsi
que dans le cadre des regroupements informels, et bien qu’elles aient investi les différents champs et secteurs
d’activités et démontré leurs compétences, leadership et talents managériaux, elles restent néanmoins nettement
moins représentées que les hommes dans les sphères du pouvoir et les postes de responsabilité. La participation
des femmes à la gouvernance et à la gestion de la chose publique et politique constitue l’un des domaines où ces
inégalités perdurent de manière significative.
Au Maroc par exemple, si le taux de féminisation de l’administration publique est de l’ordre de 33,8%, la représentation
des femmes dans les postes de responsabilité ne dépasse guère 16%.7 Ce taux n’excède pas 7% au sein des organes
de gouvernance des grandes entreprises publiques et privées nationales8.
En matière électorale, les femmes constituent 17% des élus aux élections législatives de 2011, soit 67 femmes
parlementaires élues à la Chambre des représentants, dont 7 seulement élues au suffrage direct et 60 par le recours
à la Liste nationale. Il est utile de rappeler que la moyenne mondiale des femmes parlementaires est de l’ordre de
21.9%. 9
Conscient de cet état de fait, le constituant marocain a, en 2011, adopté de nouvelles dispositions en faveur de la
promotion et de la mise en œuvre effective de l’égalité de genre.
Le recours aux actions positives de nature à favoriser l’égal accès des citoyennes et des citoyens aux fonctions
électives est dès lors inscrit expressément dans la loi fondamentale dans son article 30 ; quant à l’article 19 plus haut,
il consacre l’égalité dans tous les domaines et énonce que l’Etat œuvre à la réalisation de la parité. Par ailleurs, l’article
6 dispose que « les pouvoirs publics œuvrent à la création des conditions permettant de généraliser l’effectivité de
la liberté et de l’égalité des citoyennes et des citoyens ainsi que de leur participation à la vie politique, économique,
culturelle et sociale. »10
Pour autant, et depuis 2011, l’égalité réelle et l’accès aux postes de responsabilité sont encore loin d’être réalisés
même si l’on note une faible augmentation au niveau de la représentation politique, visible lors du dernier scrutin
législatif.
Ainsi, « 81 femmes députées ont été élues le 7 octobre 2016, 14 femmes de plus qu’en 2011. 60 sont issues de la
première partie de la liste nationale réservée aux femmes et 11 de la deuxième partie de la liste nationale réservée aux
jeunes et 10 élues dans les circonscriptions locales. Le taux de représentation politique des femmes s’élève à 20,51%,
contre 16,96 % en 2011 et 10,46 % en 2007.11
L’OBJECTIF
L’objectif de cette étude sera d’essayer de mettre en relief les pistes d’approches concrètes pour mieux appréhender
le principe d’égalité en identifiant dans la constitution les moyens et outils à même de porter et de garantir ce
principe pour tenter de réduire les inégalités de fait. L’article 1912 même s’il n’est pas le seul, parait être dans ce sens
d’un atout considérable dans la mesure où le constituant a dans le même dispositif, consacré et l’égalité et la parité,
l’une apparaissant comme un idéal à atteindre et l’autre comme un moyen pour y parvenir.

Assurer l’accès de tous aux soins de santé sexuelle et procréative et faire en sorte que chacun puisse exercer ses droits en matière de procréation, ainsi qu’il a été décidé dans
le Programme d’action de la Conférence internationale sur la population et le développement et le Programme d’action de Beijing et les documents finals des conférences
d’examen qui ont suivi.
Entreprendre des réformes visant à donner aux femmes les mêmes droits aux ressources économiques, ainsi qu’à l’accès à la propriété et au contrôle des terres et d’autres
formes de propriété, aux services financiers, à l’héritage et aux ressources naturelles, dans le respect du droit interne.
Renforcer l’utilisation des technologies clefs, en particulier l’informatique et les communications, pour promouvoir l’autonomisation des femmes.
Adopter des politiques bien conçues et des dispositions législatives applicables en faveur de la promotion de l’égalité des sexes et de l’autonomisation de toutes les femmes et
de toutes les filles à tous les niveaux et renforcer celles qui existent. »

7 Rapport sur les ressources humaines, MEF2013 et rapport du MFPRA 2012, sur le même sujet.

8 Etude relative à « La représentativité des femmes dans les organes de gouvernance des grandes entreprises publiques et privées», MAGG, 2013.

9 Union interparlementaire, 2014.

10 Constitution du 29 juillet 2011.

11 Evaluation des mécanismes de promotion de la représentation politique des femmes au Maroc.
Phase 1. Jossour Forum des femmes marocaines et FFE.P49.

12 « L’homme et la femme jouissent à égalité des droits et libertés à caractère civil, politique, économique, social et environnemental énoncés dans le présent titre et dans
les autres dispositions de la constitution, ainsi que dans les conventions et pactes internationaux dûment ratifiés par le Maroc, et ce, dans le respect des dispositions de la
constitution, des constantes du royaume et de ses lois.
L’Etat œuvre à la réalisation de la parité entre les hommes et les femmes.
Il est crée à cet effet, une autorité pour la parité et la lutte contre toutes formes de discrimination. »Constitution du 29 juillet 2011.

                                                                                                                                                                             5
Aussi et si l’on est convaincu de la force juridique de l’article 19, et afin de consacrer de manière contraignante le
principe de parité globale ou seulement électorale, il serait loisible d’imaginer un dispositif institutionnel d’une force
significative pour le fixer juridiquement et envisager les rapports politiques sous le signe de l’équité, de la mixité et
de la bonne gouvernance.
Doit-on pour cela recourir à une loi, à une loi-cadre sur l’égalité ou sur la parité, à une loi sur l’égalité effective, faut-
il revoir certaines dispositions constitutionnelles, modifier les règlements intérieurs des assemblées, revoir le code
électoral ? Envisager une charte d’honneur ?
LA DEMARCHE
Fidèle à la méthodologie empruntée par l’Association Jossour Forum des femmes marocaines concernant la phase I,
et convaincue de la légitimité d’une telle approche, la démarche retenue se veut graduelle, participative, délibérative,
pluraliste et inclusive. Elle privilégie la discussion, les échanges et l’argumentation venant de bords politiques et
scientifiques différents.
L’activité scientifique se déroulera en cinq formats :
Un focus group ;
Une journée d’études sous le thème : « Ensemble pour l’effectivité du droit constitutionnel à la parité » ;
Une table ronde sous le thème « Mode de scrutin et représentation politique des femmes »;
Un ftour-débat sur la « présentation des grandes lignes du dispositif » ;
Une table ronde sous le thème : « Contribution à l’élaboration d’un mécanisme juridique pour la promotion de la
parité » ;
Une pétition, accompagnée d’une charte d’engagement en faveur de la parité.
L’écriture se veut exigeante par rapport à la règle de droit, l’approche est normative ; pour autant et compte tenu à
la fois du contexte marocain parfois régressif en matière des droits des femmes et de l’évolution des jurisprudences
étrangères quant au principe d’égalité, la posture du rapport prendra en considération de tels éléments pour faire des
propositions conformes à la constitution ou à tout le moins, qui ne lui sauraient être contraires.
LE REFERENTIEL
Que ce soit au niveau des discours royaux, de la constitution, des engagements internationaux ou des différentes
stratégies et plans d’action, la préoccupation semble franchement en faveur d’une égalité entre les sexes sinon
effective, du moins souhaitée et parfois même sublimée.
* Les discours Royaux
Dans ses nombreux discours ou lettres lues par l’un de ses conseillers13, le Chef de l’Etat a, à plusieurs reprises, mis
l’accent sur la lésion historique subie par la femme marocaine et a par conséquent, démontré son souci ardant de
lui rétablir ses droits.
Au-delà des discours, les réformes nombreuses qui sont intervenues dans ce sens dés le début du règne du Roi
Mohammed VI, attestent de cette préoccupation égalitaire.
Les discours marquants où le souverain s’est expressément déclaré en faveur du principe de la parité restent les
discours de juin 201114 et juillet 2018 lorsque pour ce dernier, le Roi s’est adressé aux participants au Sommet annuel
de l’Initiative “Women in Africa15:
« Dans cette optique, Nous nous attachons à assurer les conditions d’une vie digne à tous les
Marocains. Nous œuvrons aussi, depuis plusieurs années pour que le Maroc s’engage plus
avant sur la voie de l’égalité entre les hommes et les femmes: une finalité considérée comme
un droit humain fondamental, un impératif juridique, une exigence socio-économique.

En la matière, la Constitution de 2011 a représenté un tournant fondamental, en consacrant sans
équivoque l’égalité entre l’homme et la femme en termes de droits et de libertés et en soulignant la
nécessité d’instaurer le principe de parité.

13 Mme Zoulikha Nasri, Conseillère de S.M. le Roi : le projet de Code de la famille, nouvelle étape dans le processus de consolidation des Droits de la Femme« Cette
méthodologie s’est traduite dans la composition tripartite de la commission chargée de l’élaboration du projet à savoir les ouléma, les magistrats et les représentants de la
société civile, a-t-elle indiqué, notant que l’adoption d’une approche de concertation a permis une ouverture du fiqh sur la réalité.D’autre part, a souligné Mme Zoulikha Nasri,
le nouveau projet a pour objectif la levée de l’injustice qui pèse sur la femme marocaine et la solution des problèmes sociaux en se référant aux préceptes de l’Islam et au fiqh
malékite, ce qui confère à ce projet authenticité et spécificité comme en témoigne le large écho suscité à l’étranger notamment parmi les intellectuels, les médias, les hommes
politiques et la société civile. »Le matin.6 décembre 2003.

14 « Ont été constitutionnalisées à cet égard, la prééminence des conventions internationales telles que ratifiées par le Maroc, par rapport aux législations nationales, ainsi
que l’égalité de l’homme et de la femme pour ce qui concerne les droits civils, et ce, dans le respect des dispositions de la Constitution ainsi que des lois inspirées de la religion
musulmane. Sont consacrées, au même titre, l’égalité entre l’homme et la femme, dans tous les droits politiques, économiques, sociaux, culturels et environnementaux, ainsi
que la création d’un mécanisme de promotion de la parité entre l’homme et la femme. »Discours royal du 17 juin 2011.

15 2ème édition du Sommet annuel de l’Initiative « Women in Africa ». Marrakech.27 septembre 2018.

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CONTRIBUTION À L’ÉLABORATION D’UN DISPOSITIF
                                                                                                                  JURIDIQUE POUR LA PROMOTION DE LA PARITÉ

Et afin de conforter cette dynamique, Nous avons initié de nombreux programmes en faveur de
l’indépendance économique des femmes et de l’entreprenariat féminin, au niveau national. Nous avons
également procédé à la réforme du Code de la Famille et du Code pénal pour lutter contre les violences
faites aux femmes. De même qu’a été institué un quota pour la représentation des femmes au sein du
Parlement.
Dans cette optique, Nous nous attachons à assurer les conditions d’une vie digne à tous les Marocains. Nous
œuvrons aussi, depuis plusieurs années pour que le Maroc s’engage plus avant sur la voie de l’égalité entre
les hommes et les femmes : une finalité considérée comme un droit humain fondamental, un impératif
juridique, une exigence socio-économique. »

Le message envoyé aux participants au Forum mondial des droits de l’homme reste aussi un moment fort de signaux
percutants en direction de l’égalité de genre :
« Le premier enjeu concerne les questions de l’égalité et de la parité, inscrites comme des objectifs à
caractère constitutionnel dans notre Texte fondamental depuis la réforme constitutionnelle de juillet 2011.
Il y a vingt ans en effet, en 1995, 189 Etats membres de l’ONU adoptaient la Déclaration et la Plateforme
d’Action de Pékin pour l’intégration du genre dans les politiques, stratégies et programmes de tous les
pays. La Déclaration invitait les Etats membres à promouvoir les objectifs d’égalité, de développement et
de paix pour toutes les femmes, en réaffirmant que les droits fondamentaux des femmes et des fillettes
font inaliénablement, intégralement et indissociablement partie des droits humains universels.
Vingt ans après cette conférence, les données disponibles et le vécu quotidien des femmes et des filles
dans de nombreuses régions du monde témoignent de l’ampleur des résistances aux objectifs fixés par la
Déclaration et le programme d’action de Pékin. Malgré les avancées, les réalisations sont loin d’être à la
hauteur des ambitions alors tracées.
Comme vous le savez, un processus participatif d’évaluation des résultats atteints et des défis qui restent
depuis Pékin est en cours actuellement aux niveaux national, régional et international, en vue du Sommet
des Chefs d’Etat, prévu par les Nations unies en septembre 2015. A cet égard, Nous nous félicitons que le
Forum de Marrakech ait choisi la question de l’égalité et de la parité comme un des thèmes principaux
des débats. Nous sommes Convaincus que vos échanges à l’occasion de ce Forum constitueront un apport
important au processus international en cours.
Notre pays a fait de cette question un des axes principaux de ses politiques publiques, notamment en
développant la budgétisation sensible au genre, reconnue par les Nations unies comme une démarche
pionnière. Nous savons cependant, qu’il nous reste beaucoup à faire. Une loi sur le travail domestique qui
concerne principalement les jeunes filles est actuellement en discussion au Parlement et le gouvernement
travaille à l’élaboration d’une loi sur la lutte contre la violence à l’égard des femmes. De même, une
Autorité pour la parité et la lutte contre toutes les formes de discrimination, organe constitutionnel,
devrait être installée prochainement.16
* La Constitution du 29 juillet 2011
Tant dans son mode d’élaboration17, participatif et inclusif, que dans son contenu ouvertement en faveur de l’égalité
de genre, la constitution reste un référentiel normatif plein de promesses pour qui voudra et saura les mettre en
œuvre. A cet égard, sont interpelés à la fois le législateur, les juges mais aussi la société civile par le truchement
notamment de l’exception d’inconstitutionnalité inscrite dans la constitution et qui tarde à entrer en vigueur. Pas
moins de 14 références expressément dédiées aux droits des femmes y sont présentes.18
* Les engagements internationaux
Le Maroc a souscrit aux instruments internationaux relatifs aux droit humains et aux mécanismes spécifiques dont la
Cedaw ratifiée en 1993 et pour laquelle il convient de signaler la levée des réserves en 2011. Il adhère également aux
ODD 2030, ce qui l’engage au niveau national à revoir et harmoniser sa législation interne.
Il est également signataire de 3 des 4 conventions de l’Organisation Internationale du Travail (OIT) consacrées à
l’égalité, dont les conventions 100 et 111 relatives à l’égalité de chances, de traitement et de rémunération. Le
Royaume s’est également engagé à mettre en œuvre la Déclaration et le Programme d’action de Beijing, adoptés à
la 4e conférence sur les femmes en 1995 ainsi que la Déclaration du Millénaire pour le Développement. »19

16 Extrait du message adressé par SM le Roi Mohammed VI aux participants au 2ème Forum mondial des Droits de l’Homme, qui s’est ouvert le jeudi 27/11/2014 à Marrakech
et dont lecture a été donnée par le ministre de la Justice et des Libertés, M. Mustapha Ramid message adressé par SM le Roi Mohammed VI aux participants au 2ème Forum
mondial des Droits de l’Homme, qui s’est ouvert le jeudi 27/11/2014 à Marrakech et dont lecture a été donnée par le ministre de la Justice et des Libertés, M. Mustapha Ramid

17 La CCRC a reçu près de 200 mémorandum.

18 N.Bernoussi :la Constitution marocaine du 29 juillet 2011 entre continuité et ruptures. Revue française de droit public.RDP. 2012.N°3.

19 Conseil économique social et environnemental : Rapport sur la Promotion de l’égalité entre les femmes et les hommes dans la vie économique, sociale, culturelle et
politique. Auto-Saisine n° 8 / 2012.

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* Les stratégies et plans gouvernementaux
Stratégie gouvernementale avec le plan Ikram I puis II ou stratégie sectorielle avec le plan d’action du (MFPMA)20
lequel a intégré le principe de l’égalité des sexes dans les Référentiels des Emplois et des compétences et qui a
développé des mécanismes institutionnels permettant aux femmes d’accéder aux différents postes de responsabilité
dans l’administration marocaine, l’égalité entre les sexes est au cœur des projets de développement humain et elle
est devenue notamment pour le (MRAFP)21, un des chantiers structurants en matière de gouvernance publique
responsable et équitable et un levier pour la représentation équitable des femmes au niveau des emplois supérieurs
et des postes de responsabilités.
LA PROBLEMATIQUE
Si « l’effectivité est définie comme le degré de réalisation, dans les pratiques sociales, des règles énoncées par le
droit »,22 le rapport se penche sur la question de la mise en œuvre d’un principe consacré par la constitution, à
savoir comment implémenter le principe de la parité en proposant d’ouvrir aux femmes les espaces de décision
publique tout en entamant une réflexion sur les enjeux, les défis et les atouts.
Comment mettre en exergue l’apport constitutionnel et clarifier les différents concepts utilisés afin de montrer
l’intention du constituant par rapport au principe de la parité ?
Comment montrer les atouts et les limites de la Liste nationale ?
Comment être prudent, lucide en identifiant les liens multiples qui existent entre la parité et d’autres principes ou
mouvement tels que la démocratie, la sécularité ou le communautarisme ?
Quels sont les acquis dont les femmes disposent aujourd’hui, quels sont les défis ?
Quelle place pour la parité dans la constitution ? Quelle appréhension par le juge constitutionnel ? Quel cadrage
législatif ?
Comment à partir de ces éléments, opter pour une parité globale ou seulement électorale et à partir de quel
dispositif juridique ?
II INTERROGATION DES CONCEPTS ET ÉTAT DES LIEUX
1- La clarification des concepts
Contrairement à sa devancière, la Constitution de 2011 s’est révélée « exubérante » concernant la question de
l’égalité des sexes. Ainsi, devant la déferlante des terminologies utilisées, n’est-il pas utile et même fondamental
de nettoyer cette « situation verbale » et de tenter d’éclaircir ce brouillage sémantique dû à l’utilisation de notions
voisines ?
« Qui trop embrasse, mal étreint. »
La notion première n’est-elle pas celle des principes d’égalité et de non-discrimination qui sont les deux versions
d’une même pratique ?
De fait, le principe d’égalité se trouve réinterrogé au profit de la parité, de l’égalité des chances, de l’équité, de la
mixité et du genre.
L’égalité de droit parait souvent formelle, elle est différente de l’égalité de fait et de l’égalité réelle ; si elle reste
un acquis, elle reste un concept à concrétiser.
L’égalité devant la loi fait appel au juge, mais « on peut être égaux » devant une loi inégale, discriminante.
L’égalité dans la loi ou par la loi fait appel au législateur qui lui, devra prendre des mesures et des dispositions à
même de garantir l’égalité réelle entre les sexes.
L’égalité des chances, inscrite dans le préambule de la Constitution de 2011, est encore plus précise, l’Etat
s’engageant à donner à tous les citoyens les mêmes chances, les mêmes opportunités que ce soit dans les domaines
économique, social ou politique. L’égalité des chances apparait comme un point de départ, l’égalité tout court
comme un long processus.
L’égalité civile a été tempérée dans la constitution par le recours aux lois du royaume et aux constantes de la nation.
L’égalité politique est absolue en droit et encouragée par le recours à la discrimination positive.
La non-discrimination : Consacrée dans l’article 2 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme et dans le
préambule de la Constitution marocaine qui énonce que « l’Etat s’engage à bannir et combattre toute discrimination
à l’encontre de quiconque, en raison du sexe, de la couleur, des croyances, de la culture, de l’origine sociale ou
régionale, de la langue, du handicap ou de quelque circonstance personnelle que ce soit ».
20 Ministère de la réforme de l’administration publique et de la fonction publique.

21 Ministère de la réforme de l’administration publique et de la fonction publique.

22 LASCOUMESP et SERVERINE : « Théories et pratiques de l’effectivité du droit », in Droit et société, 1986, n° 2.

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CONTRIBUTION À L’ÉLABORATION D’UN DISPOSITIF
                                                                                                                      JURIDIQUE POUR LA PROMOTION DE LA PARITÉ

Alors que l’égalité est une prescription, la discrimination est une interdiction.
Il y a les discriminations directes et les discriminations indirectes. Seules ces dernières sont dénoncées par
le droit international, les premières étant légitimes.
L’équité : celle-ci fait appel à la notion de justice.
La parité : elle signifie que chaque sexe est représenté à égalité, dans ce cas, la parité (50/50) est un quota égalitaire
au service de l’égalité ; principe constitutionnel et objectif universellement partagé par les Etats.
Mais la parité doit être un mécanisme efficient et non un saupoudrage. Ainsi, la démocratie paritaire suppose des
hommes et des femmes aux commandes et non pas, les hommes aux postes décisionnels et les femmes aux postes
d’exécution.
On parle de « zone paritaire » située entre 40 et 60%.
La mixité : il s’agit d’intégrer et faire travailler ensemble les hommes et les femmes, l’objectif étant non pas de
s’opposer mais de participer ensemble à un exercice équilibré du pouvoir, principe de justice sociale et d’éthique.
Dans le domaine professionnel, le taux de mixité est de 40%. La mixité est effective s’il y a égalité des chances en
termes de recrutement, de promotion et d’avancement de carrière.
Le genre : ce terme se réfère à une approche sociologique et non juridique, basée sur la transformation des rapports
sociaux de manière à déconstruire les stéréotypes, à défiger la société et à promouvoir la place des femmes là où
elles étaient exclues.
En Europe, il s’agit de concepts non encore consolidés, on en veut pour preuve que le législateur français s’y est
astreint tardivement23, que le monde économique préférera les notions de mixité et d’équilibre et qu’en Espagne, le
constituant préférera parler d’égalité effective et de composition équilibrée.
On a aussi pu déceler qu’il y avait un changement de paradigme dans l’appréhension du principe d’égalité. Le Conseil
d’Etat, au début rétif à la notion de discrimination positive au motif de la dérive communautaire, de l’atteinte à la
liberté de l’électeur et à l’indivisibilité de la souveraineté, a évolué dans son appréciation « quand il a mis en avant le
préambule de la Constitution de 1946 pour arguer en faveur de mesures de discrimination positive pour les femmes ,
il existe bien en droit français, une alternative dans les conceptions de l’égalité qui sont mobilisables, en particulier
pour légiférer sur l’égalité des sexes ».24
Le droit s’exprime par la langue. Celle-ci n’est pas neutre et détermine bien ce qu’elle veut dire. Le vocabulaire est
clair et exprime un point de vue particulier.
La parité est-elle conçue comme un objectif ou un droit ? A-t-elle une puissance normative ou incitative ?
La constitution traite de l’égalité, de la parité, de la non-discrimination, de la représentation des femmes dans le
Conseil supérieur du pouvoir judiciaire, mais les mots utilisés ne sont pas les mêmes. Concernant le principe de non-
discrimination, la Constitution dit « l’Etat doit bannir et combattre », le ton est ferme, il s’agit d’un bannissement.
Pour la parité, la constitution énonce que « l’Etat œuvre à la réalisation de la parité » ; doit-on comprendre le
mot « œuvrer » comme une ambition, une projection ou une obligation ? L’Etat ne doit-il pas prouver qu’il a fait
tout le nécessaire pour y arriver ? L’indicatif ne vaut-il pas impératif en droit ? On peut aussi l’entendre comme une
habilitation et non une contrainte, le comprendre comme un objectif constitutionnel, comme un impératif au temps
long ?
S’agissant des élections, qu’elles soient législatives ou régionales, la Constitution dit « l’Etat favorise et encourage »,
cela semble peu contraignant car il est laissé au législateur une marge de manœuvre appréciable pour fixer des
taux de participation précis. Il convient de rappeler qu’il « existe en France un mouvement pour obtenir le verbe «
garantit » au lieu de « favorise ».25 Quant à la représentation des magistrates dans le Conseil supérieur du pouvoir
judiciaire au Maroc, lorsque la Constitution dispose que « l’Etat doit assurer », il s’agit d’une contrainte absolue.
Au niveau de la démocratie locale, les mots sont également en cause ; ainsi, les lois organiques relatives à la région
et à la commune incitent à consacrer aux femmes un tiers des sièges des vice-présidents de la commune ou de la
région. Or, le côté incitatif apparaît ici plus comme un vœu qu’une contrainte. On revient encore au côté incitatif de
la parité.26

23 « Le mot parité, qui est pourtant sur toutes les lèvres dans les années 2000, n’est pas présent dans la loi du 6 juin 2000, « tendant à favoriser l’égal accès des femmes
et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives », dite loi sur la parité. Il faut attendre 9 ans pour qu’un amendement porté à cette loi en 2009 concernant le
rapport d’évaluation, présenté au Gouvernement par le Parlement, indique qu’il doit comprendre une présentation des actions entreprises en faveur de la parité politique et
13 ans, dans la loi de 2013 relative à l’enseignement supérieur et à la recherche. Et enfin dans un des titres de la loi de 2014 :« Titre V : Dispositions visant à mettre en œuvre
l’objectif constitutionnel de la parité », sachant que le mot parité n’existe pas dans la Constitution française. Au mot « parité » est préférée la notion d’égal accès pour ce qui
est du monde politique ou de représentation équilibrée des hommes et des femmes pour ce qui est du monde économique. De fait le mot parité n’est pas utilisé dans le monde
économique : on lui préfère le mot de mixité ou de représentation équilibré pour les postes de gouvernance ». In B.Grésy: La parité politique et économique :un long chemin.
Journée d’études sous le thème « Ensemble pour l’effectivité du droit constitutionnel à la parité ». Rabat, 9 novembre 2018.

24 Conseil d’État, avis du 14 octobre 1999.

25 B.Grésy : La parité politique et économique : un long chemin. Op cit.

26 M.Brahimi : Les aspects électoraux de la représentation politique des femmes. Débat : « Je ne comprends pas qu’au niveau de la présidence d’une région, on puisse utiliser
la fameuse expression « l’Etat œuvre…il faut utiliser le présent de l’indicatif, permettre et rendre effective la présence des femmes au niveau de la commune et au niveau de
la région. » Table ronde sous le thème « Mode de scrutin et représentation politique des femmes » 12 avril 2019.

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2- Les liens possibles entre parité et cedaw, parité et démocratie, parité et mouvement des femmes, parité
et sécularité et parité et communautarisme
Dans une approche globale, la réflexion sur la parité a fait émerger d’autres instruments, principes ou idées en lien
avec elle et qui permettent d’approfondir l’analyse pour mieux cerner le principe.
a-Parité et instruments internationaux relatifs à l’égalité de genre
Le terme « parité » n’est pas utilisé en tant que tel dans les textes internationaux, ni dans la jurisprudence
internationale, par contre, il est plus courant dans les plans d’action27 et les stratégies.
De l’égalité formelle initiale à l’égale représentation des hommes et des femmes, on assiste de plus en plus à
une dynamique juridique visant à donner au principe d’égalité des sexes un contenu de plus en plus substantiel,
s’émancipant du cadre de l’égalité formelle.
Au niveau du Pacte international relatif aux droits civils et politiques l’article 26 dispose de manière « neutre »
que : « Toutes les personnes sont égales devant la loi … ».
Au niveau européen, dans le domaine du marché du travail notamment, la Directive sur l’égalité des chances28
clarifie le rapport Discrimination positive et principe de Non-discrimination lorsqu’elle affirme que l’égalité de
traitement ne fait pas obstacle à des mesures de traitement préférentiel en faveur des femmes dans la mesure où
elles visent à remédier aux « inégalités de fait ».
Au niveau Onusien, la « Convention pour l’élimination des discriminations à l’égard des femmes » (CEDAW) incite
les États à prendre des « mesures temporaires spéciales » pour améliorer la place des femmes dans la représentation
politique.29
Au niveau de la Quatrième Conférence mondiale des femmes à Pékin.1995, les États signataires s’engagent
à œuvrer pour « atteindre l’objectif d’un équilibre entre les sexes (gender balance) dans les organes et comités
gouvernementaux, ainsi que dans les administrations publiques et la justice, à travers, entre autres, la définition
d’objectifs spécifiques (targets) et l’application de mesures pour accroître substantiellement le nombre de femmes
en visant la réalisation d’une égale représentation des femmes et des hommes, si nécessaire grâce à des actions
positives30.
Le droit international en revanche, concernant l’égalité des sexes, incrimine les discriminations indirectes que
la Cour de justice des Communautés européennes appréhende comme l’application de règles différentes à des
situations comparables ou l’application de la même règle à des situations différentes.
Les Objectifs de Développement Durable à l’horizon 2030 (ODD30)
Les ODD30 dont la cible 5 consiste à « Réaliser l’égalité des sexes et autonomiser toutes les femmes et les filles. »
         « Le cinquième objectif est spécifiquement dédié à l’autonomisation des filles et des
         femmes. Il concerne l’égalité entre les sexes et vise à mettre fin à toutes les formes de
         discriminations et de violences contre les femmes et les filles dans le monde entier. Les cibles
         définies concernent : la lutte contre les discriminations et contre les violences faites aux
         femmes, l’accès des femmes à des fonctions de direction et de décision et l’accès universel
         aux droits sexuels et reproductifs. Il agit en interrelation avec les 16 autres ODD : il permet
         la conception et la mise en œuvre de toutes les politiques publiques au prisme du genre et
         encourage la mise en place de politiques dédiées à la lutte contre les inégalités qui subsistent
         et nécessitent des mesures positives en faveur des femmes. »
b- Parité /démocratie
Pour le représentant de la FFE, « Il ne peut y avoir de libération de l’humanité sans indépendance des femmes et
une parité sociale. La parité et la participation politique des femmes sont des incontournables du développement. La
parité est un devoir constitutionnel plus qu’un droit ».31
Elle apparaît alors comme étant de nature à permettre aux femmes et aux hommes d’entrer réellement dans
l’universel.
La réflexion sur la parité ne semble pas séparable des conquêtes démocratiques. Le plaidoyer pour la parité ne peut
que se consolider s’il est lié au processus démocratique et s’il s’adresse à l’ensemble de la population hommes et
femmes confondus. Il y a aussi et fort heureusement des hommes pour défendre les intérêts des femmes. Pour
construire le « vivre ensemble », le pays a besoin de ses femmes, de ses hommes et de tout son potentiel.

27 Le Programme d’action de l’OIT pour la parité entre hommes et femmes.

28 Directive égalité des chances 1976, Journal officiel, 1976-02-14, N°.L39, pp40-42.

29 Cf. article 7 de la CEDAW.

30 §190, Plate-forme d’action de la 4ème Conférence mondiale.

31 Mot d’ouverture du représentant de la FFE lors du Focus group organisé à la fondation F.Ebert le 10 septembre 2018.

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CONTRIBUTION À L’ÉLABORATION D’UN DISPOSITIF
                                                                                                                      JURIDIQUE POUR LA PROMOTION DE LA PARITÉ

Par ailleurs, il existerait une véritable retro-alimentation entre la démocratie et l’égalité. Selon l’Onu Femmes, «la
démocratie est un incubateur de l’égalité », elle exige la participation de tous, est inclusive et non discriminante, est
basée fondamentalement sur le principe d’égalité, celui-là même qui évolue et inclut les mesures de discrimination
positive. La parité de son côté, dans la mesure où elle fait participer la moitié de la population et où elle exige une
mixité dans les instances de décision, elle concoure à la réalisation de la démocratie.
Aussi, « lorsqu’ils sont représentés par une représentation égale des femmes et des hommes, dans des forums,
les débats, les lois, les politiques et les programmes génèrent les talents et la dynamique de tous les segments
de la société, et pas seulement d’une partie de ceux-ci. Lorsque les femmes sont représentées numériquement,
compétences égales, influence égale, connaissances et créativité, l’impact est important. »32
En fait, la question de la place des femmes dans les sphères de décision pose tout simplement la question
démocratique du partage du pouvoir, au départ, il n’était question que d’exercer un droit de vote qu’elles n’avaient
pas (suffragettes), aujourd’hui, les femmes veulent partager le pouvoir et être partie prenante au niveau des prises
de décision.33
D’ailleurs le lien parité, représentativité des femmes et démocratie est d’autant plus percutant que les Etats autoritaires
ne le prévoient pas ou le suppriment une fois au pouvoir.34
Pour autant, si à elle seule, la parité ne suffira pas à instaurer la démocratie et à résoudre toutes les inégalités, elle
contribuerait en tous cas à faire évoluer le statut de la parole publique. »35
Pour nombre d’intervenants aux différents formats des activités scientifiques organisées par Jossourffm, il n’est
pas loisible de dissocier la parité de la démocratie et de l’Etat de droit. Peut-on parler de démocratie avec un
Gouvernement avec une seule femme36 et des mécanismes de promotion de la participation politique des femmes
distribués comme des présents en période électorale ?
c- Parité/mouvement des droits des femmes
« Les deux dernières années, et 2019 le sera aussi, ont été des années décisives pour le féminisme entendu comme
courant de pensée défendant l’éradication des discriminations basées sur le genre et l’égalité multidimensionnelle
entre les hommes et les femmes. Des milliers de femmes ont créé des momentums à travers le monde en revendiquant
l’exercice de plus de droits et de plus libertés. On parle déjà d’une quatrième vague de féminisme plus consciente de
l’égalité sans laquelle, il n’y a pas de démocratie. Comme l’affirmait le Secrétaire Général de l’ONU António Guterres,
dans son message à l’occasion de la Journée internationale du droit des femmes, le 8 mars 2019 : « Nous avons vu
des femmes réaliser de remarquables avancées dans certains domaines en matière de droit et de leadership mais ces
progrès sont loin d’être complets ou systématiques et ils ont suscité une réaction hostile et inquiétante de la part
d’un patriarcat solidement enraciné… ».37
« Il était également visible le lien entre une forte présence du mouvement féministe et l’adhésion aux mesures
volontaristes. Ainsi, les pays où les partis se montrent les plus favorables à des mesures volontaristes en faveur des
femmes sont ceux où le mouvement féministe est une composante légitime du jeu politique, notamment ceux où il
existe des organisations féminines autonomes dans les partis »38
Ceci se vérifie aisément au Maroc puisque depuis la création des partis politiques, les sections féminines ont été
présentes et actives ; la question de leur autonomie participe d’un autre débat.
A cet égard, le puissant mouvement des droits des femmes a été au Maroc à l’origine du changement du Code de la famille
et de bien autres dispositions que ce soit le code de la nationalité ou le code pénal ; il est important de signaler qu’il y a eu
une osmose à ce niveau entre la demande démocratique du mouvement associatif et le dynamisme du féminisme d’Etat.

32 Françoise Gaspard :la parité pourquoi pas. Op cit.

33 Pour M.Brahimi : « la réussite de la parité passe par la réconciliation des marocains avec les urnes et sachant que ceux et celles qui adhèrent à la parité sont le plus souvent
abstentionnistes ».Débat. Table ronde sous le thème « Mode de scrutin et représentation politique des femmes ». Op cit.

34 Cf. la dictature franquiste « À la suite du coup d’État militaire de Franco, la démocratie a disparu. La dictature franquiste (1939-1975) a supprimé les élections libres. La
femme ne devait pas retrouver le droit de vote (actif et passif) jusqu’à ce que les premières élections démocratiques tenues de le 15 juin 1978. Toute suite, la Constitution de
1978 reconnaît naturellement le droit de vote sans aucune discrimination fondée sur le sexe. »

35 « Compte tenu du fonctionnement des systèmes politiques, si elle était appliquée demain, les femmes sélectionnées par les partis seraient probablement, au moins dans
une phase intermédiaire, choisies (par les appareils demeurés masculins) en raison d’une conformité attendue et certainement pas de leur féminisme. Le choix des électeurs
s’opérant sur une base politique, il est tout aussi évident que des conservatrices, et éventuellement des adversaires de la démocratie, seraient élues. Ce n’est pas la parité qui
serait alors en cause, mais l’état du débat politique. La parité dans la représentation constituerait, en tout cas, Non pas parce que les femmes sont différentes des hommes,
mais parce que l’expérience et l’expertise des unes et des autres, en raison de la construction du genre, ont fait que les unes et les autres ont une appréhension différente,
aujourd’hui, des mots et des choses, de l’espace et du temps. C’est parce qu’ils dominent numériquement dans les lieux de pouvoir que les hommes oublient cette commune
humanité des femmes et des hommes. » Blandine Barret-Kriegel, « La parité ? Une évidence ? », L’Express, 10 octobre 1996.

36 Gouvernement Benkirane I et Gouvernement El Othmani.

37 Cité par O.Hajji : la participation politique des femmes, une pièce maîtresse de l’égalité et une force de progrès .In Journée d’étude sous le thème « Ensemble pour le droit
constitutionnel à la parité »Op cit.

38 Ainsi, au sein du SPD allemand, les quotas ont été largement imposés sous la pression de la puissante organisation féminine du parti, la « Communauté de travail des
femmes sociales-démocrates » (Arbeitsgemeinschaft sozialdemokratischer Frauen, ASF), affichant depuis les années 1970 des objectifs explicitement féministes. Dans les pays
scandinaves, le mouvement féministe émergeant dans les années 1970 a d’emblée intégré parmi ses objectifs la question de l’inclusion politique des femmes, et a favorisé
la constitution de réseaux féminins inter et intra-partisans qui n’ont cessé de faire pression sur les partis pour obtenir des mesures volontaristes. À l’inverse, en France, le
mouvement des femmes a été très peu intégré dans le paysage de la politique conventionnelle depuis les années 1970, et les partis se sont montrés particulièrement réticents
à l’émergence d’une « conscience de genre », si bien qu’il n’existe pas d’instances féminines autonomes à l’intérieur des principales organisations partisanes.

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