La grotte des Rhinocéros à Casablanca (Maroc) livre les plus anciennes traces (c. 700 000 ans) de boucherie en grotte en Afrique - Insap

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La grotte des Rhinocéros à Casablanca (Maroc) livre les plus anciennes traces (c. 700 000 ans) de boucherie en grotte en Afrique - Insap
La grotte des Rhinocéros à Casablanca (Maroc) livre les plus
anciennes traces (c. 700 000 ans) de boucherie en grotte en
Afrique.
Des ossements d’antilopes et de zèbre portant des marques de boucherie, associés à de
nombreux autres restes de mammifères, à un reste humain et à des outils en pierre (bifaces,
hachereaux et éclats en quartzite et en silex), ont été mis au jour dans un site acheuléen
daté de 700 000 ans situé à Casablanca (Maroc) par une équipe franco-marocaine (1)
réunissant des chercheurs de l’INSAP, du CNRS, du MNHN de Paris, du Max Planck Institute
et des Universités de Bordeaux et Paul Valéry Montpellier3. Ouverte dans la carrière
OuladHamida 1, anciennement Thomas III, la Grotte des Rhinocéros a en effet livré les plus
anciens vestiges fossiles d’animaux consommés en grotte par des hommes sur le continent
africain. L’étude, qui vient de paraître dans la revue Scientific Reports (2), apporte les
premiers éléments d’information sur les comportements de subsistance de ces hominines
d’Afrique du Nord au début du Pléistocène moyen.
Si les plus anciens témoins de consommation de viande (3 – 2 Ma) ont été le plus souvent
découverts dans des sites de plein-air, sur des carcasses charognées traitées et consommées
in situ, ce n’est qu’avec l’émergence de l’Acheuléen (autour de 1,8 Ma) que vont peu à peu
se mettre en place des comportements plus maîtrisés, qui attestent de la prédation, de la
découpe et du transport de viande dans des lieux d’occupation fréquentés plus
régulièrement et sur de plus longues durées, comme ici dans des grottes.
Dans les niveaux acheuléens de la grotte des Rhinocéros, 37 ossements témoignent
d’activités de boucherie. Des stries, des impacts de percussion et des traces de dents
humaines sont présents sur plusieurs os longs d’herbivores, et mettent en évidence le
dépouillement, la désarticulation, le décharnement, la consommation de la viande et la
récupération de la moelle. Bien que la majorité de l’assemblage fossile ait été accumulée par
les nombreux carnivores présents (hyènes, panthères, chacals), l’emplacement de ces
marques sur le squelette met en évidence des accès primaires par les hommes à certaines
carcasses, par prédation ou charognage, avec le transport de morceaux jusqu’au site. Au
début du Pléistocène moyen en Afrique, la compétition avec les autres prédateurs et
charognards reste en effet forte, à la fois pour les ressources et pour les habitats. Dans le
site sub-contemporain voisin de la Grotte à Hominidés, de nombreux restes d’hominines ont
été découverts en contexte de repaire de carnivores, dont un fragment de fémur présentant
des traces de consommation par un grand carnivore, très probablement une hyène.

(1)Le programme de recherche franco-marocain Préhistoire de Casablanca est développé et soutenu
conjointementpar l’Institut National des Sciences de l’Archéologie et du Patrimoine (INSAP) du Ministère de la
Culture, de la Jeunesse et des Sports du Royaume du Maroc / Département de la Culture, par le Ministère des
Affaires Étrangères et du Développement International et par l’Université Paul Valéry de Montpellier. Ce
programme est également financé par le Department of Human Evolution duMax Planck Institute for
EvolutionaryAnthropology de Leipzig (Allemagne) et par le LabExArchimede (ANR-11-LABX-0032-01). Le
programme a bénéficié du soutien de la Région Aquitaine et d’apports du Collège de France, du Muséum
d’Histoire naturelle de Paris et de l’Université de Bordeaux.
La grotte des Rhinocéros à Casablanca (Maroc) livre les plus anciennes traces (c. 700 000 ans) de boucherie en grotte en Afrique - Insap
(2) Camille Daujeard1*, Christophe Falguères1, Qingfeng Shao2, Denis Geraads3,4, Jean-Jacques Hublin4,5, David
Lefèvre6, Mohssine El Graoui7, Mathieu Rué6,8, Rosalia Gallotti6,9, Vincent Delvigne9,10, Alain Queffelec9,
Eslem Ben Arous1, Olivier Tombret1, Abderrahim Mohib7,11, Jean-Paul Raynal9,4 (2020).

Earliest African evidence of carcass processing and consumption in cave at 700 ka, Casablanca,
Morocco.Scientific Reports.

ABSTRACT

To date, in Africa, evidence for animal processing and consumption in caves routinely used
as living spaces is only documented in the late Middle Pleistocene of the North and South of
the continent and postdates the Middle Pleistocene in East Africa. Here we report the
earliest evidence in a North-African cave (Grotte des Rhinocéros at Casablanca, Morocco) of
cut, percussion and human gnawing marks on faunal remains directly associated with lithic
knapping activities in the same space and in a well-documented stratified context. Ages for
this Acheulean site are provided by the dating of herbivorous teeth to 690-720 ka and 520-
550 ka (lower and upper sets) by combined Electron Spin Resonance (ESR) and U-series
techniques. Traces of butchery on gazelle, alcelaphin, and zebra bones demonstrate that
hominins had primary access to herbivore carcasses. Hominins brought and consumed meat
in the cave, as documented by herbivore bones bearing human tooth marks concentrated in
a circumscribed area of the excavation. In Africa, this site provides the earliest evidence for
in situ carcass processing and meat-eating in cave, directly associated with lithic production
and demonstrates the recurrent use by early Middle Pleistocene hominins of a North African
cave site 400 000 years before that by Homo sapiens at Jebel Irhoud (Morocco).
La grotte des Rhinocéros à Casablanca (Maroc) livre les plus anciennes traces (c. 700 000 ans) de boucherie en grotte en Afrique - Insap
- Photo 1 : Vues du site de la Grotte des Rhinocéros en cours de fouilles en 1991 et 2006(Carrière
OuladHamida 1, Casablanca) (© Jean-Paul Raynal).
- Photo 2: Stries de boucherie sur un fragment de radio-ulna de zèbre (Equus mauritanicus). Plusieurs
dizaines de courtes incisions parallèles sont visibles le long du bord latéral de la diaphyse. Plusieurs
d’entre elles présentent une section en V et des micro-stries internes (©Camille Daujeard et Sylvain
Pont).
- Photo 3: Traces de dents humaines et marques de boucherie antérieures sur un fragment de côte
d’Alcelaphini (Parmulariussp.) (©Camille Daujeard et Gildas Merceron).
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