LA REVUE DE PRESSE ÉGALITÉ
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Slate.fr – 7 novembre 2017 «Nous n'enseignerons plus que "le masculin l'emporte sur le féminin"» [Tribune] 314 membres du corps professoral de tous niveaux et tous publics, enseignant la langue française ou ayant à corriger des copies ou autres textes rédigés dans cette langue, s'engagent à ne plus enseigner la règle de grammaire résumée par la formule «le masculin l'emporte sur le féminin». Nous, enseignantes et enseignants du primaire, du secondaire, du supérieur et du français langue étrangère, déclarons avoir cessé ou nous apprêter à cesser d'enseigner la règle de grammaire résu- mée par la formule «Le masculin l'emporte sur le féminin». Trois raisons fondent notre décision : La première est que cette règle est récente dans l'histoire de la langue française, et qu’elle n’est pas nécessaire. Elle a été mise au point au XVIIe siècle. Auparavant, les accords se faisaient au gré de chacun·e, comme c’était le cas en latin et comme c’est encore souvent le cas dans les autres langues romanes. Bien souvent, on pratiquait l'accord «de proximité», venu du latin, qui consiste à accorder le ou les mots se rapportant à plusieurs substantifs avec celui qui leur est le plus proche. Par exemple : «afin que ta cause et la mienne soit connue de tous» (Ronsard, épître à la Response aux injures et calomnies…, 1563). La nouvelle règle a d’ailleurs dû attendre la généralisation de l'école primaire obligatoire pour être appliquée massivement: «On peut aller sur le lac [d’Évian], en bateaux à vapeur ou petits- bateaux, et visiter les coteaux et montagnes voisines, à pied ou en voiture» (Dr Linarix, Guide pratique de la Savoie et Haute-Savoie médicale et pittoresque, 1896). La seconde raison est que l’objectif des promoteurs de la nouvelle règle n’était pas linguistique, mais politique: «Parce que le genre masculin est le plus noble, il prévaut seul contre deux ou plu- sieurs féminins, quoiqu’ils soient plus proches de leur adjectif.» (Dupleix, Liberté de la langue fran- çoise, 1651) ; «Le masculin est réputé plus noble que le féminin à cause de la supériorité du mâle sur la femelle» (Beauzée, Grammaire générale… 1767). REVUE DE PRESSE EGA 15/11/2017 Page 2 sur 13
Si l'école de la République a préféré abandonner cette formule au profit de celle qu'on connaît, c'est en reconduisant l'ordre de valeur qui est à son fondement. Un ordre que les classes poli- tiques maintenaient parallèlement, en refusant aux femmes les droits politiques jusqu'en 1944, et en refusant plus longtemps encore de leur ouvrir les grandes écoles ou d'abroger les dernières dispositions du «Code Napoléon». La troisième raison est que la répétition de cette formule aux enfants, dans les lieux mêmes qui dispensent le savoir et symbolisent l’émancipation par la connaissance, induit des représenta- tions mentales qui conduisent femmes et hommes à accepter la domination d'un sexe sur l'autre, de même que toutes les formes de minorisation sociale et politique des femmes. Pourquoi n'accepteraient-elles pas de gagner moins que leurs collègues, ou d'accomplir des cor- vées dont leurs compagnons se dispensent, ou de supporter leurs coups, s’il est admis au plus haut niveau que «le masculin l'emporte sur le féminin»? La lutte contre les stéréotypes de genre, qui est essentielle au progrès de l'égalité réelle des femmes et des hommes, ne peut être effica- cement menée si cette maxime n'est pas mise au ban de l'école. D’autres mesures travaillant à l’expression d’une plus grande égalité dans la langue sont néces- saires, mais le plus urgent est de cesser de diffuser cette formule qui résume la nécessaire subor- dination du féminin au masculin. En conséquence: Nous déclarons enseigner désormais la règle de proximité, ou l’accord de majorité, ou l’accord au choix ; Nous appelons les enseignantes et les enseignants de français, partout dans le monde, à renouer avec ces usages ; Nous les appelons à ne pas sanctionner les énoncés s’éloignant de la règle enseignée jusqu’à présent ; Nous appelons le Ministère de l'Éducation nationale à donner à ses personnels et à ceux des établissements sous sa tutelle des instructions précises allant dans le même sens ; Nous appelons les professionnelles et les professionnels de la presse et de l'édition, les correc- teurs et correctrices, les écrivaines et les écrivains à en faire autant ; Nous appelons les citoyennes et les citoyens francophones à en faire autant. REVUE DE PRESSE EGA 15/11/2017 Page 3 sur 13
Slate.fr – 13 novembre 2017 2017, un tournant dans la lutte contre le patriarcat? Léa Marie Scandale Weinstein, #BalanceTonPorc, écriture inclusive, harcèlement de rue. 2017 pourrait bien constituer l'année où les femmes ont dit stop. L'année où tout a basculé. Alors que 2017 approche de sa fin, force est de constater que nous tra- versons actuellement un moment important dans l'histoire du féminisme. De la Women's March en réaction à l'élection de Donald Trump, aux mouvements #Metoo et #BalanceTonPorc, en passant par l'avènement en France du débat sur l'écriture inclusive, un vent de révolte inédit souffle sur les sociétés occidentales. Les futurs manuels d'histoire parleront-ils de l'année 2017 comme d'un pivot dans la lutte contre le patriarcat? Bilan non-exhaustif de douze mois de bouleversements. 2017 avait mal commencé «L'année où les femmes ont fait exploser leur rage.» C'est ainsi que la journaliste Emma Gray dit percevoir 2017. Dans un article publié sur le Huffington Post, cette dernière retrace, du point de vue américain, la succession d'évènements qui ont, selon elle, changé la donne. «Il y a pratiquement un an jour pour jour, je pensais que j'allais entrer dans une pièce où la première femme présidente des États-Unis livrerait un discours», débute-t-elle. Mais le 8 novembre 2016, c'est Donald Trump qui remporte l'élection présidentielle américaine. Pour de nombreux observateurs, le triomphe d'Hillary Clinton ne faisait pourtant aucun doute. Le succès de l'homme d'affaires –face à une candidate pourtant bien plus expérimentée et déjà accoutumée aux rouages du pouvoir– dé- montrait à la fois la complexité du mode de scrutin –Trump est élu avec près de trois millions de voix de moins que sa rivale– et symboliquement la solidité du fameux plafond de verre: cet obstacle invisible auquel se heurtent les femmes qui prétendent à la fonction suprême, ou à tout poste à hautes responsabilités. Ainsi, une majorité d'hommes, notamment d'hommes blancs, a voté pour Trump. REVUE DE PRESSE EGA 15/11/2017 Page 6 sur 13
«Une femme en colère est une femme folle» Fier d'«attraper les femmes par la chatte», le président américain n'a depuis cessé de remettre en cause l'avortement, de réduire les moyens des plannings familiaux et des associations féministes ou de mettre à mal les droits LGBTQ+. Face à ce péril, des millions de femmes sont descendues dans les rues de Washington (puis des quatre coins du monde) pour protester contre les discours profon- dément misogynes du milliardaire et sa politique sexiste, raciste et homophobe. Les Américaines étaient en colère et comptaient bien le faire savoir, même si ce n'est pas ce qui était traditionnelle- ment attendu d'elles. «Les femmes ne sont pas censées être en colère –du moins pas de manière explicite, rappelle la jour- naliste Emma Gray. Nous sommes censées garder notre calme dans des situations de pression, être accueillantes et agréables. Une femme en colère est une femme folle. Et on ne peut pas faire con- fiance à une femme folle.» Hillary Clinton l'a appris à ses dépens, comme bien d'autres femmes politiques avant elle. «Peut-être que j'ai trop bien appris ma leçon sur le fait de rester calme [...], de me mordre la langue et d'enfoncer mes ongles dans mon poing replié, tout en affichant un grand sou- rire», a-t-elle analysé après sa défaite. Cette injonction à ravaler leur rage, les femmes s'apprêtaient à la faire vaciller. Tout «balancer» En octobre 2017, des actrices hollywoodiennes s'unissent pour dénoncer tour à tour le harcèlement, les agressions sexuelles ou les viols dont elles ont été victimes à Hollywood. Après les prémières révélations du New York Times puis du New Yorker sur Harvey Weinstein, la parole se libère, entraî- nant la chute d'un certain nombre de personnalités du cinéma ou de la télévision. Les tabous s'ef- fritent également dans d'autres secteurs (la politique et la mode, notamment), et le mouvement dépasse rapidement les frontières américaines. Cette incroyable insurrection traverse la société dans son ensemble. En France, des dizaines de mil- liers de femmes partagent leurs mauvaises expériences et leurs traumatismes sur Twitter via les hashtags #BalanceTonPorc puis #MeToo. Outre-Atlantique, les Américaines font de ce dernier leur nouveau mot d'ordre. Entre le 25 et le 29 octobre 2017, plusieurs milliers de femmes osent des- cendre dans la rue pour faire exister #MeToo dans la vraie vie. Preuve que les langues ne se délient pas uniquement sur les réseaux sociaux –un mode opératoire critiqué par certains commentateurs et commentatrices–: en octobre 2017, les plaintes pour violences sexuelles déposées en zone de gendarmerie ont augmenté de 30% par rapport à la même période l'année dernière. En France, la bataille de la langue Le 7 novembre 2017, 314 professeurs de français signent une tribune dans laquelle ils et elles s'en- gagent à ne plus enseigner que «le masculin l'emporte sur le féminin». Une première initiative au goût de victoire pour les féministes, qui se battent depuis des années pour faire triompher l'écriture inclusive. Reflet du sexisme de la société française, les règles orthographiques et grammaticales du REVUE DE PRESSE EGA 15/11/2017 Page 7 sur 13
français sont encore trop représentatives de la domination masculine. Mais depuis quelques se- maines, les choses bougent et l'intérêt pour ce débat de société va croissant, comme le montre l'évolution des recherches Google sur ce sujet. Pendant que l'Académie française lance un «cri d'alarme» contre «une aberration», Slate s'engage à appliquer, dans tous ses articles, l'accord de proximité. Une décision qui entend ouvrir la voie à d'autres résolutions de ce type dans le monde des médias et, à terme peut-être, dans l'Éducation nationale, espèrent les partisans de l'écriture inclusive. Et maintenant? Le 7 novembre dernier, les élections parlementaires américaines voyaient la victoire de Danica Roem, candidate Démocrate transgenre de 33 ans, élue face à un adversaire Républicain farouche- ment anti-LGBTQ+. Un symbole fort, après un an de mandat de Trump. En France, après le débat (plutôt fructueux) du manspreading, la lutte contre le harcèlement de rue figure désormais parmi les priorités de Marlène Schiappa. La très populaire secrétaire d'État char- gée de l'Égalité femmes-hommes prépare un projet de loi «contre les violences sexistes et sexuelles afin d’abaisser le seuil de tolérance de la société», visant à réhabiliter la place des femmes dans l'espace public. Pendant ce temps-là, certains hommes prennent conscience que ce qu'ils estimaient normal relève, en fait, de la perpétuation d'une forme de culture du viol. Bien sûr, on pourrait citer d'innombrables exemples inverses qui témoigneraient quant à eux du re- cul des droits des femmes, dans certaines régions du monde. À une toute autre échelle, mais sans que cela soit pour autant dépourvu de valeur, l'Arabie Saoudite autorise ses citoyennes à con- duire (sous condition) depuis septembre 2017. Une décision historique qui devrait, logiquement, en amener bien d'autres. Si la route vers l'égalité est encore longue, les secousses sismiques de 2017 font bouger les choses. Les militantes féministes américaines en sont en tout cas persuadées: «The Future is Female». REVUE DE PRESSE EGA 15/11/2017 Page 8 sur 13
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Le Nouvelliste – 14 novembre 2017 REVUE DE PRESSE EGA 15/11/2017 Page 12 sur 13
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