LE MEDECIN AUXILIAIRE DE LA JUSTICE
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Rapport adopté lors de la session du Conseil national de l’Ordre des médecins février 2001 Dr. Jean POUILLARD LE MEDECIN AUXILIAIRE DE LA JUSTICE RESUME En dehors de son activité de soins et des conditions d’exercice de l’expertise médicale, le médecin peut être mandaté par une autorité judiciaire ou administrative dans le cadre d’une mission de service public dans diverses circonstances : La réquisition qu’il s’agisse d’un constat nominatif ou descriptif, d’un état pathologique, ou d’une investigation corporelle interne, est destinée soit à : - la garde à vue dont l’objet est d’attester que l’état de santé d’un prévenu est compatible avec la détention provisoire, - un état d’ivresse ou d’alcoolisme, - la recherche au dépistage et au transport des stupéfiants “ in corpore ”. La situation du mineur délinquant justifiant d’une enquête médico-psychologique, neuropsychiatrique pour le placement éventuel en centre d’accueil ou d’orientation. Les infractions sexuelles sur mineur lors des auditions ou confrontations en présence d’un médecin pédopsychiatre. Les décisions concernant l’autorité parentale (enquête sociale par un médecin psychiatre). L’identification génétique à des fins judiciaires (enquête et procédure judiciaire lors de l’établissement ou la constatation d’un lien de filiation). L’autopsie dans le cadre des dispositions prévues par la loi civile ou pénale. Doivent être respectées les dispositions des articles du code de déontologie médicale qui justifient le consentement de l’intéressé, la confidentialité des données médicales comme l’intimité de toute personne avec le souci de préserver tout ce qui pourrait porter atteinte à l’intégrité physique, mentale et à la dignité de tout individu. Le médecin auxiliaire de justice est un médecin mandaté, en dehors d’une activité de soins, à la demande d’une autorité judiciaire et avec une mission précise, définie par une commission rogatoire, une réquisition ou un mandat, en vue - tant au pénal qu’au civil - d’une action de justice et seulement dans ce cas : c’est une mission de service public, article L. 4124-2 (ancien article L. 418) du code de la santé publique, engageant la responsabilité civile professionnelle du médecin. Ne seront pas traitées dans cet exposé les conditions d’exercice d’expertise médicale qui ont fait l’objet d’une précédente communication : Cf. “Secret médical et assurance“ Dr Saury, session du Conseil national, avril 2000.
LA REQUISITION Il s’agit d’une injonction faite à un médecin par une autorité judiciaire ou administrative d’avoir à exécuter une mission d’ordre médico-légal à laquelle le médecin est tenu de déférer : article R.642-1 du code pénal. De plus, l’article L. 4163-7 du code de la santé publique (anciens articles L.367 et L.379) stipule : “ Est puni de 25 000 F d'amende le fait : ……pour un médecin, de ne pas déférer aux réquisitions de l'autorité publique. ” (le décret du 20 juin 1961 autorise la réquisition des internes des hôpitaux) “ Tout défaut de réponse à une réquisition des autorités judiciaires ou administratives ” est considéré comme un délit passible du tribunal correctionnel, sauf “ motif légitime “ : si la réquisition concerne : 1. un parent proche ou allié ou vivant en communauté de vie et d’intimité (concubinage, PACS) ; 2. un collaborateur professionnel ; 3. un médecin ayant soigné ou soignant le patient concerné, sauf si le seul médecin disponible est le médecin local ; pour inaptitude physique (maladie, invalidité) à condition que cette inaptitude soit justifiée et constatée, l’autorité requérante devant en être avertie le plus rapidement possible ; en cas de force majeure ; pour clause de conscience du médecin requis si les constatations ne sont pas de sa compétence. Il doit en alors en avertir l’autorité requérante. Enfin, le médecin peut se récuser s’il estime que les conditions de lieux et d’examen sont de nature à compromettre la qualité de ses actes et à nuire à la confidentialité et à l’intimité indispensables à cette consultation (code de déontologie, article 71). La réquisition ne doit pas être un moyen pour obtenir le témoignage du médecin traitant sur des faits connus dans son exercice habituel ordinaire. Si l’autorité requérante intime au médecin l’ordre d’effectuer la mission de réquisition le médecin requis doit s’y soumettre mais il est nécessaire de rappeler que cette réquisition ne peut en aucun cas délier le médecin du secret professionnel : il est alors indispensable qu’il soit fait mention sur le certificat que sa mission ne saurait être pour autant une dérogation à l’article 4 du code de déontologie médicale concernant le secret professionnel. Qui peut diligenter la réquisition d’un médecin ? le Procureur de la République ou son substitut un officier de police judiciaire (police nationale, gendarmerie) l’autorité administrative (officier d’état civil, préfet, sous préfet, maire) Conditions de la réquisition Toute réquisition doit être signifiée par écrit et signée sous forme d’injonction (en cas d’urgence, la réquisition peut être signifiée verbalement pour être exécutoire immédiatement, mais doit dans ce cas être confirmée par une réquisition écrite) et comporter une mission précise dans les termes suivants : “agissant en cas de flagrant délit et conformément à l’article 60 du code de procédure pénale, vu l’article L. 4163-7 (anciens articles L.367 et L.379) du code de la santé publique, requérons Mr...Docteur en médecine à...de nous accompagner à... pour, 2
serment préalablement prêté entre nos mains à l’effet de procéder aux actes ci-après Mr... nous donnera son avis en son honneur et conscience, en tête de son rapport “. Le requérant doit alors faire connaître expressément son identité et les fonctions exercées dans le cadre de sa mission. Le médecin requis doit se présenter comme tel à la personne qu’il doit examiner, l’informer explicitement de sa mission, en lui manifestant le plus grand respect en particulier du fait de la situation la privant de ses droits (détention, garde à vue, incarcération). La sauvegarde du secret professionnel impose que l’officier de police judiciaire n’assiste pas à l’examen sauf en cas d’insécurité. Déontologie de la réquisition La réquisition peut être rapprochée d’une mission de contrôle ou d’expertise ; et de ce fait tout praticien requis a le devoir de respecter les dispositions du code de déontologie : article 101 : lorsqu’il est investi de sa mission, le médecin de contrôle doit se récuser s’il estime que les questions qui lui sont posées sont étrangères à la technique proprement médicale, à ses connaissances, à ses possibilités ou qu’elles l’exposeraient à contrevenir aux dispositions du présent code. article 102 : le médecin de contrôle doit informer la personne qu’il va examiner de sa mission et du cadre juridique où elle s’exerce et s’y limiter. Il doit être très circonspect dans ses propos et s’interdire toute révélation ou commentaire. Il doit être parfaitement objectif dans ses conclusions. article 105 : “ Nul ne peut être à la fois médecin expert et médecin traitant d’un même malade. Un médecin ne doit pas accepter une mission d’expertise dans laquelle sont en jeu ses propres intérêts, ceux d’un de ses patients, d’un de ses proches, d’un de ses amis ou d’un groupement qui fait habituellement appel à ses services. ” article 106 : “ Lorsqu’il est investi d’une mission, le médecin expert doit se récuser s’il estime que les questions qui lui sont posées sont étrangères à la technique proprement médicale, à ses connaissances, à ses possibilités ou qu’elles l’exposeraient à contrevenir aux dispositions du présent code. ” article 107 : “ Le médecin expert doit, avant d’entreprendre toute opération d’expertise, informer la personne qu’il doit examiner de sa mission et du cadre juridique dans lequel son avis est demandé. ” article 108 : “ Dans la rédaction de son rapport, le médecin expert ne doit révéler que les éléments de nature à apporter la réponse aux questions posées. Hors de ces limites, il doit taire tout ce qu’il a pu connaître à l’occasion de cette expertise. Il doit attester qu’il a accompli personnellement sa mission ” Ces dispositions sont de nature à préserver l’indépendance des décisions du médecin requis, à respecter toute impartialité et équité, défendant contre toute fraude et tout abus les intérêts légitimes de l’organisme mandataire. A l’égard des patients, le médecin 3
requis s’interdira toute investigation à risque et prudent dans ses propos, il se gardera consciencieusement de toute révélation traumatisante. Le médecin doit faire part à l’intéressé de sa mission dans son cadre légal (ordre de réquisition), demander au besoin un interprète s’il s’agit d’un étranger, recueillir le consentement du sujet, s’abstenir de toute attitude discriminatoire (code de déontologie médicale, article 7). Missions de la réquisition Elles peuvent concerner : la recherche d’une information de nature médicale ou à caractère médico-administratif ; un constat nominatif ou descriptif : coups et blessures volontaires ou involontaires, attentat aux mœurs, violences, sévices, agressions, décès suspect, découverte de cadavre, un état pathologique : examen médico-psychologique et psychiatrique susceptible d’informer l’autorité judiciaire sur la personnalité d’un prévenu, examen médical d’un sujet suspect d’ébriété, notamment en cas d’accident sur la voie publique, justifiant une recherche du taux d’alcoolémie, examen d’un sujet en état d’intoxication, toxicomanie notamment, une investigation corporelle interne, lors de la garde à vue (article 63-5 du code de procédure pénale) ou la recherche de stupéfiants “in corpore“. Ces examens doivent être pratiqués prioritairement le plus rapidement, si possible dans une unité médico-judiciaire où le personnel médical est habilité dans les limites de l’article L.4111-1 (ancien article L. 356) du code de la santé publique et les locaux étant spécialement conçus pour ces examens. Rapport de réquisition il doit se borner strictement à répondre aux seules questions posées, conditions indispensables pour respecter l’objet de la mission. La conclusion ne peut être que réservée et prudente, sans hésiter de la part du médecin requis à signaler avec le maximum de rigueur l’absence de réponse à des questions dépassant sa compétence ; le médecin requis se limitera aux faits constatés, non sans prudence et objectivité, sans la moindre critique ni interprétation hasardeuse ni la moindre opinion personnelle. Ce rapport, rédigé et signé par le médecin requis, qui en gardera un exemplaire, doit être remis à l’autorité judiciaire requérante en double exemplaire avec mémoire d’honoraires, conformément à la législation en vigueur. Circonstances des réquisitions 1. garde à vue (article 63-3 du code de procédure pénale) : c’est une mesure qui permet à un officier de police judiciaire de retenir dans les locaux de la police ou de la gendarmerie un individu aux fins de faciliter les investigations nécessaires à une enquête ; il faut avoir constamment à l’esprit qu’il s’agit d’une procédure judiciaire dans des conditions de privation de liberté, particulièrement traumatisantes pour tout individu. 4
Toute personne gardée à vue peut à sa demande être examinée par un médecin et réexaminée une seconde fois au bout de 24 heures, l’examen médical prévu par le code de procédure pénale a pour objet d’attester des conditions physiques et psychiques du gardé à vue et d’attester que son état de santé est compatible ou non avec son maintien dans les locaux de détention provisoire et de prévenir toutes violences durant cette période de garde à vue. A tout moment, le procureur de la République ou l’officier de police judiciaire peut d’office désigner un médecin pour examiner la personne gardée à vue, à plus forte raison si un membre de la famille le demande. La garde à vue est prévue pour une durée de 24 h qui peut être prolongée de 24 h sur autorisation du Procureur de la République. Dans le cadre d’actes de terrorisme (article 706- 24 du code de procédure pénale) une prolongation de garde à vue de 48 heures est possible et comporte un examen médical de droit. En cas d’infractions en matière de stupéfiants (article 706- 29 du code procédure pénale) dès la garde à vue, un médecin expert est désigné pour pratiquer un examen médical toutes les 24 heures et délivrer un certificat médical motivé qui est versé au dossier. Des examens médicaux peuvent être demandés de droit, ils sont mentionnés au procès verbal et émargés par la personne intéressée. En cas de refus il en est fait mention au procès verbal. Il ne faut surtout pas méconnaître les conditions très particulières de cette mission médico-légale que représente l’examen médical en garde à vue : elle s’effectue dans des conditions matérielles, parfois urgentes, et surtout psychologiquement difficiles, le gardé à vue se présentant souvent choqué, angoissé, mutique ou au contraire revendicatif, agressif, voire assez violent. Ces examens doivent être pratiqués dans des conditions assurant la confidentialité indispensable à tout examen médical (Cf. plus haut). L’examen médical, précédé d’un entretien, est souvent délicat, devant faire la part médicalement objective des “allégations” invoquées, notamment devant des lésions traumatiques dont l’origine doit être recherchée. Mais surtout la prudence et la méfiance doivent concerner toute pathologie préexistante rapportée par le sujet gardé à vue susceptible d’une décompensation parfois brutale, imprévisible, principalement lorsqu’il s’agit d’asthme notamment, de diabète, d’H.T.A., de coronaropathie, d’antécédents psychiatriques avec sidération anxieuse liée à l’attente d’une décision et risque possible de “passage à l’acte ” ou de manifestations d’auto-agressivité ou de simulation à démasquer. Une surveillance soigneuse s’impose et la continuité des traitements en cours doit être poursuivie dès la mise en garde à vue, en attendant la décision judiciaire. Chez le toxicomane, le “manque” est un motif important d’examen médical pour éviter à court terme des accidents de sevrage. Enfin, l’existence parfois insoupçonnée d’atteinte intracrânienne doit être systématiquement recherchée, particulièrement chez les sujets en état d’ébriété ou susceptibles d’être atteints d’un traumatisme crânien ou de toute trace de “ violence“ Un certificat médical est versé au dossier, précisant l’existence ou non de contre- indication médicale à la prolongation de la garde à vue (avec éventuellement un traitement ambulatoire pour une affection bénigne ne risquant pas de mettre en péril la vie de l’individu), sans précision d’ordre diagnostique consignant la nécessité de soins immédiats. Il appartient à l’autorité requérante de poursuivre la garde à vue en milieu hospitalier, sous surveillance de l’administration judiciaire et pénitentiaire, la priorité étant toujours donnée à l’état de santé du prévenu. Rappelons que la rédaction du certificat, remis aux autorités de justice et dont il est prudent de garder un double, engage pleinement la responsabilité de tout médecin quel que soit son statut, libéral ou hospitalier. 5
2. Mise en chambre de sûreté pour toute personne trouvée en état d’ivresse sur la voie publique jusqu’à ce qu’elle ait recouvré sa raison (article L. 76 du code des débits et boissons) mais ne bénéficiant pas des droits accordés par l’article 63 du code de procédure pénale, aux personnes placées en garde à vue. 3. Alcoolisme : en cas d’impossibilité d’exécuter les épreuves de dépistage de l’imprégnation alcoolique par l’air expiré, en raison d’une incapacité physique attestée par le médecin requis (article L 3 du code de la route) la preuve de l’état alcoolique est établie au moyen d’analyses et examens médicaux cliniques et biologiques, effectués par un médecin ou à défaut, par un interne ou un étudiant en médecine autorisé à exercer la médecine à titre de remplaçant (article L 3591du code de la santé publique) requis à cet effet (article R 18 du code de la route). 4. Stupéfiants : tout conducteur de véhicule impliqué dans un accident mortel de la circulation doit subir des épreuves de dépistage de stupéfiants (article L. 3-1 du code la route) et lorsqu’elles se révèlent positives ou sont impossibles ou en cas de refus de la part du conducteur il est procédé à des analyses et examens médicaux, cliniques et biologiques en vue d’établir s’il conduisait sous l’influence de substances classées comme stupéfiants. 5. Dépistage de transport de stupéfiants “in corpore“ : code des douanes article 60 “ pour l’application des dispositions du présent code en vue de la recherche de la fraude, les agents des douanes peuvent procéder à la visite des marchandises et des moyens de transport et à celle des personnes “. Article 60 bis “ lorsque des indices sérieux laissent présumer qu’une personne franchissant les frontières transporte des produits stupéfiants dissimulés dans son organisme, les agents des douanes peuvent la soumettre à des examens médicaux de dépistage après avoir obtenu son consentement exprès. En cas de refus, les agents des douanes présentent au président du TGI compétent une demande d’autorisation, transmise au magistrat qui peut autoriser les agents des douanes à faire procéder aux examens médicaux en désignant le médecin chargé de les pratiquer dans les meilleurs délais. Les résultats de l’examen communiqués par le médecin, les observations de la personne concernée et le déroulement de la procédure, doivent être consignés dans un procès verbal transmis au magistrat. Toute personne qui aura refusé de se soumettre aux examens médicaux prescrits par le magistrat sera puni d’une peine d’emprisonnement d’un mois à un an et d’une amende de 500 F à 15 000 F (loi n° 87- 1157 du 31 décembre 1987) ‘’ . Dans la fouille au corps, cette réquisition nécessite la présence d’un médecin femme pour les examens des sujets de sexe féminin; la présence d’un témoin est souhaitable lorsqu’il s’agit de mineures. Les touchers pelviens, anal et vaginal, seront pratiqués avec prudence, en cas de vaginisme, hémorroïdes, fissure anale... 1 devenu article L. 4131-2 6
Situations particulières En milieu hospitalier, l’avis ou le concours des médecins est très souvent sollicité par les autorités de police ou de justice. Il faut à nouveau rappeler que la réquisition ne peut avoir pour objet d’obtenir le témoignage du médecin sur des faits connus à l’occasion de son exercice. Ainsi, hors les cas prévus par la loi, le médecin qui a pris en charge le patient ou participe à sa prise en charge reste tenu au respect du secret professionnel et ne peut : communiquer l’identité d’un patient hospitalisé ou ayant consulté dans l’établissement ; déclarer l’admission d’un blessé par arme à feu ou arme blanche ; la conduite à tenir doit être adaptée à la situation : - si le blessé est un mineur de 15 ans ou une personne hors d’état de se protéger (article 226-14 du code pénal), le médecin doit avertir les autorités judiciaires ; - si le blessé est âgé de plus de 15 ans et de moins de 18 ans, le médecin doit en informer les parents ; - si le médecin reçoit du patient l’aveu d’un crime ou le déduit de son examen, il ne peut le dénoncer ; - si le médecin acquiert la conviction, voire la certitude que le malade se prépare à commettre un crime, il a le droit d’en avertir les autorités compétentes ; s’il s’agit d’un patient majeur, seul l’accord de celui-ci permet au médecin de procéder à son signalement.. Toutefois lorsqu’un patient hospitalisé doit être entendu par les autorités de police, le médecin peut attester que “ l’état de santé du patient (ne) fait (pas) obstacle à ce qu’il soit interrogé ”. Une situation particulière doit être signalée : Le patient est trouvé porteur de drogue ou d’une arme : celle-ci doit être remise au directeur de l’établissement sans révéler l’identité du patient. Il appartient au directeur de l’établissement d’informer par écrit le procureur des circonstances de cette découverte et lui remettre la drogue ou l’arme. LE MINEUR DELINQUANT La connaissance de la personnalité du mineur justifie que, en dehors de l’enquête familiale et de l’enquête judiciaire, l’enquête médico-sociale soit approfondie par : un examen médico-psychologique (considéré ici comme une mesure d’expertise au sens des articles 156 et suivants du Code de procédure pénale), un examen médical (état de santé actuel et son évolution), un examen neuropsychiatrique, et le cas échéant un examen d’orientation professionnelle (contre-indications et aptitudes professionnelles). . Ces examens ont pour but de situer les perturbations du caractère, en suggérant un pronostic sur l’évolution future du comportement et les indications thérapeutiques ; ils sont pratiqués par des médecins psychiatres et pédiatres, choisis sur les listes dressées par les cours d’appel ou les listes nationales établies par le bureau de la Cour de cassation, conjointement avec un psychologue et un travailleur social. Il est important de 7
noter que l’examen médico-psychologique est l’affaire du seul médecin désigné à cet effet, c'est-à-dire en l’absence de tiers. Le juge des enfants décidera le cas échéant le placement du mineur dans un centre d’accueil ou dans un centre d’observation en fonction des résultats de l’examen médico- psychologique (juridictions pour mineurs, ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante, et décret n° 88- 949 du 6 octobre 1988). LES INFRACTIONS SEXUELLES SUR MINEUR Au cours de l’enquête ou de l’information, les auditions ou confrontations d’un mineur victime d’infractions sexuelles sont réalisées sur la seule décision du procureur de la République ou du juge d’instruction, le cas échéant à la demande du mineur ou de son représentant légal, en présence d’un psychologue ou d’un médecin spécialiste de l’enfance ou d’un membre de la famille du mineur ou de l’administrateur “ ad hoc “ ou encore d’une personne chargée d’un mandat du juge des enfants (article 706- 53 du code de procédure pénale). Il est à noter que la présence de ces personnes n’est pas obligatoire, que leur rôle est conçu comme entièrement passif, sans pouvoir ni répondre à l’enquêteur, ni interroger le mineur. Il ne s’agit donc que de reconnaître à l’enfant, dans un souci de protection, le droit de ne pas être seul au cours de la procédure et de bénéficier d’un soutien moral (article 706-54 du code procédure pénale). Ce sont les mêmes raisons qui, dans un souci de ne pas raviver le traumatisme subi par un mineur victime d’agressions sexuelles, ont conduit à recourir à un enregistrement audiovisuel ou sonore de l’audition du mineur pour lui éviter la répétition de son témoignage au cours de la procédure judiciaire (circulaire CRIM 99-4 F1 du 20 avril 1999). LE DIVORCE ET GARDE DES ENFANTS Avant toute décision, provisoire ou définitive, fixant les modalités de l’exercice de l’autorité parentale et du droit de visite ou confiant les enfants à un tiers, décision relevant exclusivement de la compétence du juge aux affaires familiales, celui-ci peut donner mission à toute personne qualifiée - psychiatre, psychologue, assistante sociale...- d’effectuer une enquête sociale : situation matérielle et morale de la famille, conditions de vie et d’éducation des enfants, tous éléments de nature à éclairer le tribunal sur les mesures à prendre dans l’intérêt des enfants. L’enquête sociale ne peut être utilisée dans le débat sur la cause du divorce (code civil, article 287-2). Il est à noter que l’enquête médico-psychologique ne peut être assimilée à une expertise psychiatrique, mais doit au contraire être rapprochée de l’enquête sociale, dont elle doit suivre le régime procédural (cour de cassation, chambre civile 28 mai 1984). L’IDENTIFICATION GENETIQUE A DES FINS JUDICIAIRES L’identification d’une personne par ses empreintes génétiques qui n’est cependant pas une mission d’expertise, ne peut être entreprise que dans le cadre de mesures d’enquête ou d’instruction diligentées lors d’une procédure judiciaire (ou à des fins médicales ou de recherche scientifique). En matière civile, cette identification ne peut être réalisée qu’en exécution d’une mesure d’instruction ordonnée par le juge saisi d’une action tendant soit à l’établissement ou à la contestation d’un lien de filiation, soit à l’obtention ou à la suppression de subsides.Le consentement de l’intéressé doit être préalablement et expressément recueilli 8
(article 16-11 du code civil) Dans le cas d’un mineur, il est indispensable d’obtenir le consentement des parents ou celui du détenteur de la garde parentale. Sont seules habilitées à procéder à des identifications par empreintes génétiques les personnes ayant fait l’objet d’un agrément dans les conditions fixées par décret en Conseil d’Etat et être inscrites sur une liste d’experts judiciaires (article 16-12 du code civil et décret n°97-109 du 6 février 1997). L’AUTOPSIE Le but de l’autopsie est la recherche des causes de la mort et elle ne peut avoir lieu que dans les cas prévus par la loi, en particulier lorsqu’elle est diligentée par décision de l’autorité judiciaire, soit par réquisition du procureur de la République, soit par ordonnance du juge d’instruction : l’autopsie en matière civile nécessite l’autorisation des ayants droit qui sont libres de refuser mais dans ce cas, ils doivent être prévenus qu’ils perdent tous leurs droits de recours ; en matière pénale, il y a lieu à autopsie: en cas de mort violente : crime, suicide ou accident (article 81 du code civil) ; en cas de mort suspecte : découverte d’un cadavre ou lorsque le certificat de décès mentionne qu’il existe un obstacle à l’inhumation (article 74 du code de procédure pénale) ce qui suppose l’intervention d’un tiers. Il est alors justifié que le corps reste à la disposition de la justice (l’officier d’état civil transmettant le certificat de décès au procureur de la République) les opérations funéraires étant suspendues jusqu’à autorisation donnée par l’autorité judiciaire, généralement après autopsie. En vertu du principe d’ordre public de recherche de la vérité, en matière pénale, il ne peut exister d’empêchement qui entraverait le cours de la justice. Si tout médecin peut être requis - en principe - pour procéder à une autopsie judiciaire, il est évident qu’il doit se récuser s’il s’estime incompétent (Article 101 du code de déontologie). Le plus souvent il est fait appel normalement à la compétence d’un médecin légiste qualifié. CONCLUSION Le médecin ne saurait ignorer les conditions et la conduite à tenir lorsqu’il est appelé en vue d’une mission d’auxiliaire de justice : en rappelant que le respect de la vie humaine, le respect dû à toute personne et à sa dignité ne cesse pas dès lors qu’elle est privée de liberté ou en état de dépendance (alcool, stupéfiants). En toutes circonstances, les mineurs délinquants, les mineurs victimes d’infractions sexuelles, exigent des examens le moins traumatisant possible et de toutes façons exigent d’être protégés et de bénéficier d’un soutien moral. Rappelons que dans toutes les situations du médecin mandaté par une autorité judiciaire, il importe que la priorité soit toujours donnée à l’état de santé du patient, que l’indépendance professionnelle et le secret professionnel soient en toutes circonstances respectés. 9
Code de déontologie Article 2 : “ Le médecin, au service de l’individu et de la santé publique, exerce sa mission dans le respect de la vie humaine, de la personne et de sa dignité. Le respect dû à la personne ne cesse pas de s’imposer après la mort. ” Article 10 : “ Un médecin amené à examiner une personne privée de liberté ou à lui donner des soins ne peut, directement ou indirectement, serait-ce par sa seule présence, favoriser ou cautionner une atteinte à l’intégrité physique ou mentale de cette personne ou à sa dignité. S’il constate que cette personne a subi des sévices ou des mauvais traitements, il doit, sous réserve de l’accord de l’intéressé, en informer l’autorité judiciaire. Toutefois, s’il s’agit des personnes mentionnées au deuxième alinéa de l’article 44, l’accord des intéressés n’est pas nécessaire. ” Code civil article 16 : “ la loi assure la primauté de la personne, interdit toute atteinte à la dignité de celle-ci, garantit le respect de l’être humain dès le commencement de la vie. “ 10
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