Pathologies buccales cancéreuses

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Pathologies buccales cancéreuses
Eugénie Marole et Prune Caillon
UE2 - EC3 Oncologie
Pr. Marie-Dominique GALIBERT
02/04/2021

            Pathologies buccales cancéreuses

I. Les lésions précancéreuses
       A. Chéilite actinite
C’est une altération chronique de la semi-muqueuse de la lèvre
inférieure et supérieure provoquée par les UV. La lèvre est sèche
squamo-kératosique et fissurée. Et à la fois sur la lèvre supérieure et
le versant cutané.
C’est le nid pour le développement des kératoses : lésions
précancéreuses.

       B. Leucoplasie

Elle est sous                                                                       forme de plaque
blanche                                                                             chronique sur
laquelle la muqueuse est sèche et rêche. Toutes ces leucoplasies sont suspectes. Il faut investiguer
pour être sûr qu’elles ne soient pas le lit d’un développement d’une lésion cancéreuse.

       C. Papillomatose orale floride
Ce sont des lésions tumorales multiples. Elles ont une allure
verruqueuse, souple. Elles reviennent de façon chronique, parfois à
des zones désépithélialisées.
Parfois très envahissantes, leur destruction est suivie inexorablement
de récidives. Tôt ou tard, il y aura une dégénérescence maligne.
Dans ce cas, on a pu trouver le génome d’un virus HPV.

       D. Mélanoses
On en retrouve sur la partie basse des dents (des collets) et sont
fréquentes au niveau de la lèvre inférieure.
Ces pigmentations noires ne sont généralement pas inquiétantes,
mais doivent être sous surveillance.
Certaines mélanoses extensives, mal limitées, peuvent faire le lit
d’un mélanome.

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II. Les cancer buccaux

       A. Les cancers épidermoïdes (les plus fréquents)

              1. Sur les lèvres
   -   Développement sur la semi-muqueuse de la lèvre inférieure mais aussi sur la partie cutanée
       de la lèvre supérieure.
   -   Origines (exposition à des toxiques) : ultraviolets - tabac
   -   Formation cornée kératosique – base indurée, qui peut s’ulcérer
       ⇨ prolifération tumorale

              2. Sur la langue, le plancher de la bouche, le palais
   -   Il n’y a pas de lien à l’exposition UV
   -   Lésion kératosique, leucoplasique, bas indurée +/- ulcération
       ⇨ prolifération tumorale

             3. Plus rarement la lésion se développe sur les gencives, la face
       interne des joues
Par exemple dans un cas de mélanome qui n’est pas le site initial on peut avoir des extensions au
niveau de la face interne des joues.

       B. Les sarcomes, les lymphomes
Ce sont des tumeurs profondes qui se propagent jusqu’à la surface (lymphomes cutanés), avec des
lésions au niveau de la peau et des muqueuses. Dans ces cas-là, on aura toujours un diagnostic
histologique et biologique.

Il y a des problématiques d’environnement (soleil, tabac, alcool) mais aussi les mauvais états dentaires
qui favorisent ces pathologies. Et dans les cas de Xeroderma Pigmentosum qui sont des anomalies
génétiques associées à la réparation, ce sont ces types de tumeurs qui peuvent émerger.

       C. Les mélanomes
Les mélanomes sont rares sur la muqueuse, donc pas de lien avec l’exposition UV, en revanche on peut
avoir des liens avec des toxiques alimentaires.
L’incidence de ces mélanomes muqueux est très faible dans la population caucasienne alors que c’est
dans cette population que l’incidence des mélanomes cutanés est très élevée. En revanche, dans la
population asiatique il y a une incidence très élevée des mélanomes muqueux (jusqu’à 8%).

III. Caractérisation et comparaison des mélanomes canins
et humains : quels types et quelles races sont de bons
modèles pour le mélanome humain ?
   A. Mélanome humain
Le chien est très intéressant car c’est une alternative à la complexité des maladies notamment le
mélanome chez l’Homme.

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C’est une maladie très complexe avec différents sous types : cliniques et histopathologiques
   - mélanome cutané : SSM - LMM - NM - ALM
   - mélanome muqueux : orale, vaginale, anale
       ⇨ ce sont souvent des mélanomes agressifs avec une évolution défavorable

Différents facteurs étiologiques :
   - facteurs environnementaux : UV - radiation
   - facteurs constitutionnels : phototype (MC1R: MelanoCortin 1 Receptor)

Les variants génétiques du gène MC1R sont des facteurs de susceptibilité au développement du
mélanome. En fonction de ces variants génétiques, c’est ce récepteur qui va donner ce signal. Un
simple changement d’acide aminé permet de donner le phénotype cheveux roux - peau blanche -
taches de rousseur - yeux clairs. Chez ces patients on a une prédisposition, parce qu’il ne sont pas
protéger à l’exposition au soleil, à développer des mélanomes. Ce qui explique pourquoi les individus
d’origine celte en Australie ont une fréquence de mélanome beaucoup plus élevée.

Aspects moléculaires :
   - mutations constitutionnelles CDKN2A - CDK4
   - événements somatiques : BRAF/NRAS - cKIT (récepteur tyrosine kinase) - PTEN (gène
      suppresseur)…

   B. Caractéristiques du mélanome humain

En 2011, Brice Bastien a cartographié les différents types de mélanomes en fonction de leur localisation
(face, dos, face interne du pied, muqueuse), histologie, lien avec l’exposition au soleil, lien avec la
nature de la prolifération.

LMM (Lentigo Maligna Melanoma) :
  - lent, indolent
  - mélanome Dubreuilh
  - au niveau de la face, de la poitrine chez les personnes âgées
  - au début une simple tâche puis ça devient problématique
  - associé à une exposition UV chronique
  - relativement rare
  - mutations KIT, NRAS, peu de BRAF (mutations activatrices)

SSM (Superficial Spreading Melanoma) :
  - le plus fréquent
  - superficiel, proliférant et invasif
  - en lien avec des expositions intenses et intermittentes
  - plutôt le dos
  - mutations BRAF (50%), NRAF (20-25%), NF1 (15%), les triples sauvages
      ⇨ On propose une approche thérapeutique avec un inhibiteur pour les mutations BRAF, qui
      permet une diminution massive de la tumeur et de régression. Malheureusement avec
      généralement des rechutes.
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Mélanome acrolentigineux :
   - forme nécrotique, aggressive
   - peu de lien avec l’exposition UV
   - souvent au niveau de la voûte plantaire
   - parfois des mélanomes non pigmentés
   - mutations KIT, BRAF, NRAS

Mélanome muqueux:
   - pas de lien avec l’exposition UV
   - peut avoir toute la muqueuse atteinte
   - mutations KIT, NRAS

   C. Approches génétiques
Il y a eu énormément d’études génétiques pour identifier ces quelques gènes. Pour identifier de
nouveaux gènes et de nouveaux acteurs, il est intéressant de faire des approches génétiques.

Dans une étude française : une mutation germinale de MITF prédispose au mélanome et au carcinome
rénal

Dans une autre étude américaine : une nouvelle mutation récurrente du MITF prédispose au mélanome
familial et sporadique

IV. Le modèle canin
Les animaux de compagnie sont un très bon modèle pour faire de la génétique.

Certaines races de chiens sont prédisposées pour déposer certains types de cancers. Les chiens
partagent également l’environnement des humains donc c’est également intéressant à étudier. Le chien
possède des traits phénotypiques qui sont très proches de
l’homme notamment au niveau de la pigmentation.

On peut donc comparer certains types de mélanome entre le
chien et l’homme : mélanome de la muqueuse, cutané, inguinal
(au niveau de l’ongle) et oculaire.
On retrouve des mélanome cutané chez les chiens au niveau
des zones dépourvues de poils.
Quel est la sévérité de ces mélanomes chez le chien ? La
sévérité est assez importante, assez comparable à l’homme
pour les mélanomes cutanés et inguinales alors que pour les
mélanomes oculaires sont bénins chez le chien (contrairement à
l’homme).

Certaines races sont plus disposées à développer ces
mélanomes :
- muqueux : caniche, boxer, labrador
- Cutané et inguinal : schnauzer, rottweiler, labrador
- Oculaire : labrador, golden retriever
Comment est-ce possible ? Il y a des sélections artificielles, avec transmission d’un caractère délétère à
toute une race surtout pour les « pures races ».

Une base de données (Canine BioBank) a été créer avec des caractéristiques cliniques des chiens mais
aussi de tissu ARN de 300 races différentes. Cette base de données va pouvoir permettre de comparer
le génome canin avec le génome humain. Parfois on trouve des concordances parfaites entre les deux,
parfois des inversions. Ces bases permettent de faire des études épidémiologiques ainsi que des
études histiopathologiques de comparaison. Ces études ont démontré que le mélanome muqueux du
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chien est un excellent modèle pour le mélanome muqueux humain : on retrouve les mêmes anomalies
car il y a une forte homologie entre les deux au niveau des séquences codantes et acides aminés.

La question maintenant est : si je considère qu’il y a une homologie très forte entre l’homme et le chien,
est- ce que je pourrais grâce au mélanome de chien aller identifier les gènes qui vont prédisposés à
cette transformation chez l’humain ?
= Une étude a été faite sur 172 mélanomes de caniches (avec des malades et des cas contrôles
(chiens âgés car ils ont dépassé l’âge pour développer ces cancers)) où on va comparer les résultats.
Au final 3 locus ont été identifiés comme pouvant avoir un rôle dans le déclenchement de la maladie.

Conclusion :

Le chien développe des mélanomes muqueux tout à fait comparable avec ceux humain notamment les
UV non dépendants. Des études pré-cliniques ont donc pu être mises en place pour pouvoir étudier les
liens génétiques entre le chien et l’humain.

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