Cin-écrits 24 images - Érudit

La page est créée Charlotte Clement
 
CONTINUER À LIRE
Cin-écrits 24 images - Érudit
Document generated on 10/07/2021 1:14 p.m.

24 images

Cin-écrits

Number 36, 1987

URI: https://id.erudit.org/iderudit/22204ac

See table of contents

Publisher(s)
24/30 I/S

ISSN
0707-9389 (print)
1923-5097 (digital)

Explore this journal

Cite this review
(1987). Review of [Cin-écrits]. 24 images, (36), 80–83.

Tous droits réservés © 24 images inc., 1987               This document is protected by copyright law. Use of the services of Érudit
                                                          (including reproduction) is subject to its terms and conditions, which can be
                                                          viewed online.
                                                          https://apropos.erudit.org/en/users/policy-on-use/

                                                          This article is disseminated and preserved by Érudit.
                                                          Érudit is a non-profit inter-university consortium of the Université de Montréal,
                                                          Université Laval, and the Université du Québec à Montréal. Its mission is to
                                                          promote and disseminate research.
                                                          https://www.erudit.org/en/
Cin-écrits 24 images - Érudit
CIN-ÉCRITS
                                                            Chronique sous la responsabilité de Benoît Patar

           Collaborateurs: Benoît Patar (B.P.), Norbert Spehner (N.S.), François Lebeau (F.L.), Pierre Brière (PB.), MauriceTourigny (M.T.), Elie Castiel (E.C.)

                                                                                                                              NICHOLAS
                                                                                                                                 RAY
                                                            CONVERSATIONS AVEC SERGIO LEONE
                                                            par Noel Simsolo, Paris, Éd. Stock, coll. «Stock
                                                            Cinéma», 1987. ISBN: 2-234-02049-2. Dist. au
                                                            Québec : Québec-Livres.
                                                                 «Nourri dans le sérail, j'en connais les
                                                            détours», ce vers de Racine aurait pu servir
                                                            d'exergue à ces entretiens qui se lisent d'un
                  LE PLAISIR DES YEUX                       trait, au rythme piaffant que leur imprime
                                                            Sergio Leone.
                                                                 Cet enfant de la balle, fils d'un ancien
                        un o s m I.IM-;\U                   acteur devenu réalisateur sous le pseudo-
                                                            nyme de Roberto Roberti, devenu à 16 ans
                                                            le plus jeune assistant du cinéma transal-
                LE PLAISIR DES YEUX                         pin, travaillera successivement pour les                                NICHOLAS RAY
     par François Truffaut, Paris, Éd. des «Cahiers du      vétérans Carmine Gallone ou Mario Bon-                  par Pierre Giuliani, Paris, Édilig, 1987,136 pages,
     cinéma», octobre 1987, 256 pages, 27 photos noir       nard, par qui il fera engager la fraîche                30 photos noir et blanc. ISBN: 2-85601-171-3. Dist.
     et blanc. ISBN: 2-86642-57-8. Dist. au Québec:         épouse de Vadim, Brigitte Bardot, et, pour              au Québec: Diffulivre.
     Dimédia.                                               les nouveaux maîtres de Cinecittà, les                       Nicholas Ray est un réalisateur dont on
         C'est toujours un bonheur renouvelé de             Américains Wise, Le Roy ou Wyler, venus                 ne peut se passer, tant furent exemplaires
     lire François Truffaut. Non pas que l'on soit          ressusciter, le temps d'une décennie, l'anti-           à la fois ses échecs et ses réussites. Que
     toujours d'accord avec ce qu'il a pu écrire,           que tradition du péplum où il puisera l'inspi-          l'auteur de ce livre ait réussi à nous le faire
     notamment sur le cinéma, mais parce que                ration de son premier film, Le Colosse de               voir n'est pas du tout certain, car le propos
     le point de vue est toujours original, subtil          Rhodes.                                                 est souvent entremêlé de considérations
     et inspiré.                                                 La suite est bien connue. Les années               littéraires et philosophiques et d'aperçus
         Dans ce gros volume de 250 pages, où               60, l'ultime métamorphose d'un genre, le                cinématographiques plutôt filandreux. De
     l'on a rassemblé de nombreux articles                  western, dont l'agonie se prolongeait en                toute évidence, Giuliani est un passionné —
     publiés jadis dans Les Cahiers ou dans                 d'exsangues copies conformes, sa sou-                   et c'est tout à son honneur — , mais qui
     Arts, il nous parle de son métier, des                 daine résurgence par le recours au mythe,               manque quelque peu de sens critique et de
     acteurs et actrices qu'il a rencontrés (remar-         sa théâtralisation par le biais de Goldoni,             discernement esthétique. Comment, en
     quable article à l'occasion du décès de                par le jeu des marionnettes (choix superbe              effet, peut-on rapprocher des cinéastes
     Françoise Dorléac), des metteurs en scène              de Clint Eastwood, masque de bronze sur                 aussi divergents et aussi incompatibles que
     qu'il a admirés (Renoir, Audiberti, Cocteau,           lequel venaient se briser les grimaces de               Welles, Bunuel, d'une part et Ray ou Sirk,
     etc.), et cela avec une délicatesse et un              Volonté), par les partitions inspirées d'En-            d'autre part, des critiques aussi anémiques
     savoir-vivre qui nous le rendent plus pro-             nio Morricone («Il est mon scénariste»,                 que Rivette ou Michel Ciment et des analys-
     che. On sort de ce livre ravi, étonné, ému,            avoue Leone), enfin par l'utilisation systé-            tes aussi intelligents qu'André Bazin ou
     tant il est vrai que derrière ce visage d'un           matique d'une forme de prémontage conçu                 même François Truffaut. Par ailleurs, dans
     cinéaste timide, se cachaient une intelli-             dès le moment de l'écriture pour forger une             l'oeuvre du réalisateur de Party Girl, la
     gence complice et un coeur prompt à s'en-              structure éclatée où chaque plan, avec son              quantité de films ratés l'emporte largement
     flammer. — B.P.                                        tempo, se place à l'intérieur du récit, s'arti-         sur le nombre de films réussis. Il aurait donc
                                                            cule autour d'un scénario scandé, codé à                fallu, dans l'introduction, faire moins éta-
                                                            l'extrême.                                              lage de connaissances cinématographi-
                       FILM DOPE                                 «Cette mécanique imparable», comme                 ques, et faire preuve davantage de perspi-
     n° 36 (44 pages, 52 photos noir et blanc) et n° 37     la définit son auteur, qui tournera à plein             cacité. L'auteur devrait comprendre que
     (44 pages, 54 photos noir et blanc), Londres, 1987.    régime dans la trilogie célèbre, Pour une               dans une monographie consacrée à un
     ISSN: 0305-1706.                                       p o i g n é e de dollars, Et p o u r quelques           artiste célèbre, il n'est pas nécessaire de
         Comme je l'ai souligné dans un numéro              dollars de plus, Le bon, la brute et le                 tout récupérer à tout prix. Ainsi, il aurait
     précédent, il s'agit ici, sans conteste, de la         truand, entrée dans l'histoire du cinéma                peut-être mieux valu parler moins de Wim
     meilleure publication de caractère encyclo-            par son énorme succès populaire et par sa               Wenders, et examiner plus en détail ces
     pédique (du moins à ma connaissance).                  tentative de renouvellement formel, deman-              magnifiques réalisations que furent Flying
         Dans le n° 36, qui débute par la filmogra-         derait aujourd'hui un nouvel examen criti-               Leatherneck, J o h n n y Guitare, Run for
     phie de Lloyd Webber et se termine par                 que.                                                     Cover et Wind A c r o s s the Everglades.
     celle de George Lucas, on nous parle aussi                  Je connais moins la suite des travaux du           D'autre part, l'auteur aurait eu intérêt à
     de Julie London (merveilleuse actrice fort             grand barbu, mais le silence des 12 années              revoir et re-revoir les films dont il parle, et à
     oubliée, remarquable dans Drango, Man of               qui précèdent l'enfantement de // était une             ne pas se fier à sa mémoire et à l'exultation
     the West, The Wonderful Country), Peter                fois l'Amérique n'est-il pas l'aveu du carac-           passée. Il aurait peut-être eu la surprise de
     Lorre, Eugène Lourié, Antonella Lualdi (elle           tère éphémère d'une greffe restée sans                  constater que Party Girl n'est pas le chef-
     aussi trop méconnue) et E. Lubitsch, pour              descendance (oublions les parodies et suc-              d'oeuvre tant vanté; que Le violent est un
     n'en citer que quelques-uns.                           cédanés du type «Trinidad»)?                            film bâclé, dont les dimensions «psycholo-
         Le n° 37 commence avec Bêla Lugosi                      L'oeuvre de Sergio Leone, c'est aussi le           giques» sont de la grosseur d'une noisette;
     (prince poussiéreux de l'épouvante) et finit           deuil glorieux d'une saga dont la mort se               que La fureur de vivre est tout sauf un film
     avec Shirley McLaine (l'inoubliable héroïne            confond avec celle de John Wayne dans                   fiévreux ou inspiré.
     de Artists a n d Models et de Irma la dou-             L'homme q u i tua Liberty Valence. — F.L.                    Ces réserves étant posées, cet ouvrage
     ce). À signaler quelques notices intéressan-                                                                    mérite qu'on le consulte, en raison de sa
     tes sur McCarey, Robert McKimson et A.                                                                         documentation soignée et de sa présenta-
80   Mackendrick. À suivre. — B.P.                                                                                  tion. - B.P.
Cin-écrits 24 images - Érudit
WOODY ALLEN! ACTION!
par Thierry de Navacelle, Paris, Éditions Sylvie
Messinger, 1987,408 pages, 45 illustrations noir et
blanc. ISBN: 2-86583-075-6. Dist. au Québec: Édi-
presse.                                                                                                  CINEMACTION: LES CINEMAS ARABES
    Les tournages de Woody Allen sont                                                                   dossier réuni par Mouny Berrah, Jacques Levy et
secrets. Bienheureux celui qui arrive à y                                                                Claude-Michel Cluny, Paris, Éd. du Cerf, 1987,192
assister. Personnage discret, fuyant la                                                                  pages, 84 photos noir et blanc. ISSN : 0243-4504.
presse et la publicité, Allen protège son                                                                Dist. au Québec: Saint-Loup.
équipe des regards intrus; il a cependant                                                                    Deux préfaces, quatre chapitres et qua-
fait une exception en admettant sur le pla-                                                              tre annexes composent ce remarquable
teau de Radio Days Thierry de Navacelle,                                                                 dossier consacré à ce cinéma relativement
un auteur et cinéaste français installé en                                                               mal connu et incompris. Cette «enquête»
Californie.                                                                                              sur l'âme et la conscience des cinémas
    De Navacelle a observé chaque minute                                                                 arabes est à la fois étonnante par ses ana-
du tournage de novembre 1985 à février                                                                   lyses méditées, et convaincante par ses
 1986 et lors des reprises en avril et en mai                                                            références précises et son respect de la
1986. Son journal constitue le plus complet             LES MONDES D'ANDREI TARKOVSKI                   chronologie. À signaler, sur un total de 25
témoignage sur les méthodes de W. Allen :            par Bàlint Andràs Kovàcs et Akos Szilàgyi, Lausan- articles, deux surprenantes incursions dans
sa direction d'acteurs, son ouverture aux            ne, L'Âge d'homme, coll. «Histoire et théorie du le mélodrame égyptien (p. 116 et p. 121), un
suggestions des collaborateurs, sa réécri-           cinéma», 1987,196 pages, 32 photos noir et blanc. panorama des cinémas maghrébins, et un
ture du dialogue, sa façon d'affronter les           ISBN: aucun.                                       court mais éloquent exposé sur le cinéma
problèmes techniques, etc.                                                                               palestinien (cf. à ce sujet, l'article critique
    Mais un livre de 408 pages ne contient           Il est difficile pour quelqu'un qui n'aime pas sur Noce en Galilée, dans le présent
pas que de la «substantifique moelle». Des           du tout le cinéma de Tarkovski (ce cinéma numéro). Par ailleurs, à l'approche sémiolo-
centaines de détails et d'anecdotes sont             sent la guimauve !) de se prononcer sur cet gique de Ratiba Hadj Moussa à propos
aussi relatés, et leur accumulation finit par        ouvrage. Une chose est sûre en tout cas : d'Ùne femme pour mon fils, on peut pré-
lasser. Qui peut bien s'intéresser à ce qu'a         le travail est méthodiquement mené et est férer des lectures moins ardues comme
mangé Woody le 31 décembre à 14h30                   d'un niveau intellectuel garanti.                  celles, par exemple, d'Abdou B. sur la reli-
dans un restaurant chinois?                          Un chapitre me paraît particulièrement gion et le sexe sur les écrans arabes, ou
    Chaque entrée du journal est précédée            intéressant, celui qui s'intitule «Introduction encore une analyse plus structurée sur le
de titres de quotidiens new-yorkais et d'ex-         à la poétique». Il est à mes yeux une expli- même sujet, celle de Rafiq Sabban.
traits d'articles et de notices nécrologiques.       cation parfaite de ce qui fait le charme, pour         Témoin oculaire, l'écrivain marocain
Quel était le but de Navacelle en emprun-            les uns, et l'ennui pour les autres, du réali- Tahar Ben Jelloun souligne que «...l'intel-
tant ce procédé «dos passossien» ? Le lien           sateur d'Andrei Roublev, de Solaris, de lectuel arabe est de plus en plus voué à
entre Radio Days, sa fabrication et les              Stalker, ou du Sacrifice. Tarkovski est un témoigner, à dénoncer, à dépendre de cet
événements sociaux, politiques et culturels          cinéaste chez qui la symbolique est le fon- environnement encombré de drames et de
qui se produisirent pendant le tournage est          dement du réel; l'action pour lui n'a de sens confusion. (...) Il est temps, ajoute-t-il, de
inexistant et rend donc cette initiative inutile.    que par rapport au symbole auquel elle est prendre l'initiative de s'attacher à sauver
    L'admirateur de Woody, le cinéaste en            supposée se rattacher. Par conséquent, la l'individu arabe, celui qui n'a de place ni
herbe, l'assoiffé de potins et de petits faits       description prend le pas sur l'objet décrit, dans l'histoire ni dans la culture» (p. 8). Ne
vécus y trouveront leur compte: ouvrage              voire même sur l'intervenant, et se suffit à reste donc que l'heure de faire des choix.
sérieux, augmenté de descriptions croustil-          elle-même en tant qu'objet d'émotion.
                                                     Les auteurs parlent d'une similitude avec la                                                 - É.C.
lantes, le livre de Navacelle, malgré sa
longueur rébarbative, a de quoi plaire à             liturgie orthodoxe, en ce sens que la lenteur
tous. — M.T.                                         des cérémonies y serait une condition                          DES HOMMES SEULS
                                                     essentielle. Penser ainsi, ce n'est pas du par Gian Lhassa, avec la collaboration de Michel
   DOCTEUR JERRY ET MISTER LEWIS                     tout savoir en quoi consiste la liturgie ! Dans Lequeux, Mariembourg, Éd. Grand Angle (16, rue
                                                                                                         Reine-Astrid. 6370 Mariembourg, Belgique), 1987,
par Jerry Lewis, Paris, Ramsay, 1987, 258 pages, la cérémonie sacrée, tout l'appareil symbo- 236 pages, une vingtaine de photos.
74 photos noir et blanc. ISBN : 2-85956-593-0. Dist. lique,  toute   la gestuelle, tout le rituel n'ont
au Québec: DMR.                                      de sens que par rapport à l'objet adoré,
                                                     vénéré, présent, qui est le Christ, et par             Ce troisième volet de la trilogie consa-
    Comme il s'agit de l'édition de poche rapport à l'assemblée qui lui manifeste son crée au western italien se veut une étude
d'un ouvrage paru chez Stock en 1983, attachement. Donc rien à voir avec l'artifice approfondie de la solitude à l'intérieur des
sans modification aucune ni ratures, le godardien ou wellesien dont les auteurs scénarios, des procédés et des effets du
lecteur se reportera à la critique que j'en ai voudraient discerner l'influence, par liturgie western italien. Après avoir exploré la thé-
faite dans le n° 17 de 24 Images. Ce volume interposée, dans la démarche tarkovskien- matique du genre dans le premier volume
est à conseiller à tous les déprimés de la ne.                                                          de la série, les auteurs ont cru bon revenir
planète et à ceux que consterne encore le Par ailleurs, la dimension proprement pictu- à leur sujet en s'intéressant plus particuliè-
cinéma de Chantai Akerman ! — B.P.                   rale du réalisateur russe est celle de rement à l'éthique «dans le sens où il leur
                                                     quelqu'un qui, de toute évidence, n'a pas semble que ce western, né en 1964, faisait
                   DIALOGUE,                         connu l'art contemporain. À voir certaines l'apologie d'un système de valeurs origina-
   CINÉMA CANADIEN ET QUÉBÉCOIS.                     scènes du Sacrifice, on se croirait revenu les, bien ancré dans la mentalité méditerra-
                                                     en plein XIXe siècle, quand l'art factice néenne et en rupture complète avec les
    CANADIAN AND QUEBEC CINEMA                       triomphait et que les grandes fresques valeurs bourgeoises traditionnellement
sous la responsabilité de Pierre Veronneau, solennelles à la Horace Vernet était un sujet prônées par le western américain...»
Michael Dorland et Seth Feldman, Montréal, Media- d'étonnement. On me trouvera injuste; il                  Ainsi s'achève un cycle foisonnant et
texte Publications/La Cinémathèque québécoise, faudrait peut-être voir l'oeuvre de Tarkovski solidement documenté, écrit par des
1987, 336 pages, 14 illustrations noir et blanc. avec un peu de recul, et avec sagacité.                enthousiastes et des connaisseurs, cycle
ISBN: 0-9691771-2-0.
                                                                                                - B.P. qui constitue, avec ses trois ouvrages, une
    En 1986 eut lieu à l'Université Laval un                                                            véritable encyclopédie du western italien,
colloque «bilingue» sur le cinéma québé-                                                                une somme inégalée sur ce genre cinéma-
cois (canadien). Le présent ouvrage est                                                                 tographique souvent snobé.
l'ensemble des textes qui furent lus à cette                                                                Rappelons que cette collection, hélas
occasion. Le lecteur se reportera avanta-                                                               à tirage limité, ne peut être obtenue que
geusement à l'analyse qu'en a faite Danièle                                                             dans certaines librairies spécialisées, ou en
Trottier dans le n° 28-30 de 24 Images.                                                                 écrivant à l'adresse indiquée ci-dessus.
                                         - B.P.                                                                                                    - N . S . 81
Cin-écrits 24 images - Érudit
GENETIERNEY
     par Marcel Devillers, Paris, Pygmalion-G. Watelet,
     1987, 210 pages, 288 photos noir et blanc. ISBN :
     2-85704-230-2 Dist. au Québec: DMR.
          Au fil des pages de ce somptueux volu-
     me, les superbes portraits de Gene Tierney,
     comme en forme d'ex-voto aux murs d'une
     chapelle ardente, sont autant de témoigna-
     ges de reconnaissance à la troublante pho-
     togénie de l'immortelle Laura. Grâces
     soient donc rendues à ces grands prêtres                                                                        MEMOIRES SPLASTICK
     de la lumière dont les savantes composi-                                                              par Buster Keaton, avec la collaboration de
     tions, admirablement reproduites ici, jouent                                                          Charles Samuels, Paris, Éd. du Seuil, coll. «Points
     de tous les raffinements du noir et blanc.                                                            virgule», 1984,319 pages. ISBN : 2-02-004450. Dist.
          La rêverie suscitée par l'image s'accom-                                                         au Québec: Dimédia
     mode volontiers du silence des mots. Un                                                                  Présenté pour la première fois en 1960,
     texte pourtant vient la troubler, quelqu'un                                                          sous le titre original de My Wonderful World
     s'affaire dans le sanctuaire de l'ineffable: ce                                                      ofSplastick, cette autobiographie de Buster
     commentateur, dans l'ensemble correct, a                              ARTHUR PENN                    Keaton est maintenant disponible en fran-
                                                           par Gaston Haustrate, Paris, Édilig, 1968, 127
     pour nom Marcel Devillers. Je ne l'aurais                                                            çais. Malgré une certaine lourdeur dans la
                                                           pages. Dist. au Québec: Difulivre.
     pas autrement signalé au lecteur si quel-                                                            traduction et quelques inexactitudes (par
     ques lignes consacrées à Leave Her to                 La critique française a souvent eu un point exemple, traduire «world series» au base-
     Heaven (Péché m o r t e l - 1945) n'impo-             de vue étrange sur le cinéma américain : ball par «séries internationales»!), ce livre
     saient par leur excès ridicule une courte             obnubilée par des images mythiques du intéressera tous les cinéphiles amoureux
     mais nécessaire mise au point. Ce «pénible            Nouveau Monde et d'Hollywood, elle pro- du burlesque. Considéré comme l'un des
     mélo» (sic), dont j'ai gardé l'enregistrement         pose fréquemment des lectures de films qui plus grands artistes comiques du cinéma
     pour les meilleurs de mes amis cinéphiles,            nous semblent fantaisistes, partielles ou muet, sinon comme le plus grand, le plus
     est en réalité une oeuvre forte et inclassa-          carrément faussées.                            génial, Buster se livre ici à coeur ouvert,
     ble—mélodrame, film noir? À ce sujet, je              Ainsi Haustrate voit en Four Friends un dans un style détendu, souvent drôle et
     renvoie à l'ouvrage de Jean-Loup Bourget,             des grands films de Penn, alors que cette anecdotique.
     Le mélodrame hollywoodien (Stock-Ciné-                oeuvre sans spontanéité et au symbolisme
                                                                                                              On peut diviser sa vie en deux parties.
     ma), qui analyse en profondeur les qualités           gros agence tous les clichés de l'Amérique
                                                                                                          La première est exposée dans les dix pre-
     du film de Stahl, insistant avec justesse sur         dans une structure on ne peut plus éviden-
                                                                                                          miers chapitres de l'ouvrage (qui en compte
     l'originalité de la photographie, «technico-          te. L'auteur a tendance, lui aussi, à réduire
                                                                                                          15). Le cinéphile lira avec intérêt les souve-
     lor-chromo des plus affreux» (resic), dont le         la complexité des États-Unis à quelques
                                                                                                          nirs de Keaton sur la naissance du cinéma
     responsable n'est autre que le grand Léon             formules trop simples qui plaisent tant à la
                                                                                                          et ses premiers travaux avec Fatty Arbuc-
     Shamroy (opérateur favori de Preminger),              France mais qui ne collent ni à la réalité du
                                                                                                          kle, celui-là même qui l'initia au 7 e art.
     qui se vit pourcetravail récompensé par un            continent ni à notre sensibilité et à notre
                                                                                                          Durant la période 1920-23, Keaton réalisera
     Oscar!! La même récompense faillit échoir             compréhension d'Américains du Nord.
                                                                                                          19 courts métrages, et de 1923 à 1927, 8
     à Gene Tierney— elle ne fut devancée que              L'étude d'Haustrate a cependant bien des
                                                                                                          longs métrages, dont ses plus célèbres
     par Joan Crawford pour Mildred Pierce-                qualités. Elle est d'abord minutieuse dans
                                                                                                          sont: The Navigator (1924), Sherlock Jr.
      qui, dans son autobiographie, ne s'est pas           son analyse de chaque film de Penn. Elle
                                                                                                          (1924), B a t t l i n g Buttler (1926) et The
     trompée sur le rôle que Zanuck lui avait              rassemble de nombreux propos du réalisa-
                                                                                                          General (1926).
     confié. Je lui laisse la conclusion: «Plus            teur sur son travail et contient une abon-
     qu'aucun autre des personnages qui me                 dante documentation photographique.                La deuxième partie du livre débute en
     furent confiés, celui-ci compte beaucoup              Haustrate accorde la place qui leur revient 1928. Le «professeur de lancer de tartes à
     pour moi en tant que femme.» — F.L.                   aux vrais chefs-d'oeuvre de Penn: The la crème» nous entretient des périodes les
                                                           Miracle Worker, Bonnie a n d Clyde et Lit- plus sombres de sa vie: l'avènement du
                                                           tle Big Man. Favorisant une approche tan- cinéma parlant, son contrat avec la MGM
                     HENRY FONDA                           tôt structuraliste, tantôt psychanalytique, et l'abandon de son indépendance, son di-
     par Jean Pierre Piton, Paris, Édilig, 1987,160 pa-    l'auteur établit les thèmes, dégage la cons- vorce, son alcoolisme. Gloire et déchéance.
     ges, 148 photos noir et blanc et 16 photos cou-       truction et démontre l'unité de chaque film        Mentionnons que le livre reproduit une
     leurs. ISBN: 2-85601-159-4. Dist. au Québec: Diffu-
                                                           et finalement de l'oeuvre entière de Penn.     excellente filmographie, établie par Ray-
     livre.
                                                           Aucun artiste ne créant dans un vacuum, il mond Rohauer, qui comprend les films,
                                                           aurait été intéressant de mieux situer Penn dramatiques et émissions dans lesquels on
         Jean-Pierre Piton avait déjà écrit un             dans son époque et dans son milieu. Haus- a pu voir l'artiste. Toutefois, elle ne réperto-
     excellent livre sur Robert Aldrich. Voici qu'il       trate mentionne bien le Viêt-Nam, le Water- rie pas les travaux de Keaton en tant que
     nous revient avec une monographie consa-              gate, mais on saisit mal l'originalité de scénariste, gagman, assitant-réalisateur,
     crée à Henry Fonda. Le travail, dans l'en-            Micky One et la dénonciation de The Case etc., où sa présence n'est peut-être pas
     semble, est bien fait et ne verse jamais              s'ils ne sont pas opposés à la production physique, mais néanmoins réelle. — PB.
     dans la dithyrambe ou le panégyrique. La              contemporaine.
     première partie, plus de 80 pages, est un
     large tour d'horizon sur la carrière du célè-         Bonnie and Clyde et Alice's Restaurant                     KATHARINE HEPBURN
     bre acteur. Il est évident que l'auteur n'a pu        appartiennent à ce mouvement unique du          par Anne Edwards, Paris, Éd. Perrin, coll. «Terre
     tout voir, ou revoir, mais sa démarche est            cinéma américain qui a donné naissance à        des hommes», 1987, 320 pages, 40 photos noir et
     assez sûre et son point de vue souvent                Mash, Easy Rider, Five Easy Pieces, Mid-        blanc. ISBN: 2-262-00437-4. Dist. au Québec:
     perspicace. On pourra regretter quelques              night Cowboy, etc. Loin de diminuer l'art       Québec-Livres.
     jugements rapides, par exemple sur Young              de Penn, un rappel de cette vague de la fin         Ceux qui admirent la grande actrice
     Mr. Lincoln (qui n'est pas, n'en déplaise à           des années 60 aurait confirmé la force et la    américaine trouveront dans cette biographi-
     l'auteur, un «des deux ou trois chefs-d'oeu-          maturité du réalisateur.                        que une raison supplémentaire à leur admi-
     vre» du vieux borgne) ou sur Warlock ou               On ne peut terminer sans souligner la quan-     ration. Non seulement le sujet est admira-
     sur Les raisins de la colère (un des film             tité déplorable de fautes et de coquilles, et   ble, mais la manière de le célébrer est à la
     les plus ennuyeux du vieux maître) ou sur             les effets stylistiques douteux qu'une cor-     fois intelligente et sensible. Un seul regret,
      The Tin Star (qu'il ne doit pas avoir vu             rection d'épreuves et une révision plus         et de taille : l'auteur ne connaît pas très bien
     récemment), etc. Cela n'enlève rien aux               attentive du manuscrit auraient éliminés.       les grands metteurs en scène américains;
     mérites de cet ouvrage ni à l'intérêt qu'il                                                - M.T.     par conséquent, elle ne se risque pas à
     représente pour un cinéphile averti. La                                                               nous évoquer les péripéties des tournages
     seconde partie est une filmographie faite                                                             et des scènes de plateau. Ce sera sans
82   uniquement de génériques. — B.P.                                                                      doute pour une autre fois... — B.P.
RICHARD FLEISCHER
par Stéphane Bourgoin, Paris, Édilig, 1987,160 pa-
ges, 24 photos noir et blanc. ISBN: 2-85601-168-3.
Dist. au Québec. Diffulivre.
    L'ouvrage que Stéphane Bourgoin
consacre à Richard Fleischer mérite tous
les éloges, tant pour son sens de l'analyse,
ses connaissances cinématographiques,
que pour le soin avec lequel chaque film
est étudié.
    Pourtant le metteur en scène de La fille
sur la balançoire n'a pas fait que des                                                                        LE CINEMA BRESILIEN
chefs-d'oeuvre, tant s'en faut, et il n'est pas                                                   collectif sous la direction de Paulo Antonion Para-
exagéré de dire que les 20 dernières                                                              nagua, Paris, Éd. du Centre Georges-Pompidou,
années de sa carrière sont franchement                                                            1987, 324 pages, 251 photos noir et blanc. ISBN :
médiocres. Des films comme Soylent                                                                2-85850-387-7. Dist. au Québec: Livrimport.
Green, Conan le destructeur, Red Sonja,                                                                Ce qui frappe à la lecture de cet extraor-
Amityville 3 D ne mériteraient même pas                                                           dinaire ouvrage, c'est le foisonnement pro-
qu'on les mentionne (même si Ashantl, une                                                         digieux, le dynamisme insoupçonné du
de ses dernières oeuvres (1979), n'est pas                L'ART D'ALFRED HITCHCOCK.               cinéma brésilien depuis les origines. Pour
dépourvu d'intérêt). Cependant, ne retenir                       50 ANS DE FILMS                  l'ignorant que je suis, et pour tous ceux qui
que cette partie de son oeuvre serait par Donald Spoto, Paris, Édilig, 1987 , 320 pages, sont dans le même cas (spécialement en
oublier que le fils de Max Fleischer fut, 241 photos noir et blanc. ISBN: 2-85601-157-8. Dist. Amérique du Nord), il s'agit d'une révélation
durant les années 45-60, un metteur en au Québec: Diffulivre.                                     et, sans doute, d'une envie d'en savoir plus
scène percutant, à l'occasion inventif, et            À n'en pas douter, la grande trouvaille sur les écrans.
toujours sûr de son métier. Des films d'Hitchcock en tant que narrateur fut d'in-                     Ce gros volume comprend 3 grandes
comme Trapped, Follow Me Quietly, venter le MacGuffin, et ceci non pas afin de parties. Dans                        la 1 ère , on retrouve 4 chapi-
                                                                                                             er
Bodyguard, Armored Car Robbery, The duper le spectateur, mais de dérouter la tres : le 1 est consacré à un historique                    e
                                                                                                                                               très
Narrow Margin, Violent Saturday, sont critique. Car le propre d'un objet qui n'existe fouillé du cinéma brésilien; le 2 porte sur
des séries B grand format que tous les pas si nécessaire et incongrue qu'eût été quelques grands réalisateurs (H.e Mauro, G.
cinéphiles intelligents devraient voir ou son existence, est de n'être pas et donc de Rocha, N.R Dos Santos); le 3 passe en
avoir vu.                                          n'avoir rien à dire. Un peu comme ces leur- revue quelques genres typiques (comme,
    Mais c'est dans le film d'aventures que res que l'on dissimule dans les microproces- par exemple, la chanchada e: films populai-
le grand Richard devait donner le meilleur seurs avec comme unique but d'empêcher res des années 40-50); le 4 enfin est une
de lui-même. 20 000 lieues sous les le piratage. Le maître du suspense a donc série de thèmes et de réflexions. Dans la
mers, Bandldo Caballero et Les Vikings réussi à égarer les plumitifs en leur faisant deuxième partie, on retrouve un diction-
sont, en effet, de magnifiques exemples de prendre des vessies pour des lanternes.                naire des réalisateurs brésiliens (une
ce que peut faire un réalisateur inspiré par                                                      soixantaine). Dans la troisième partie, on
                                                      Ceci dit, l'ouvrage de Donald Spoto ne passe au crible près de deux cents films
son sujet. Le premier est sans doute une manque pas d'intérêt bien documenté,
des meilleures productions de Walt Disney; méthodique, il permet au lecteur qui désire (avec générique et bref synopsis).
le second, une des meilleures interpréta- s'initier aux mystères hitchcokiens, de com-                Le tout est complété par une bibliogra-
tions de Mitchum; le troisième, une des prendre un peu mieux la démarche du réa- phie, par un lexique et par un index des
meilleures réalisations inspirées par la saga lisateur anglais et d'avoir une vue d'ensem- films cités. Inutile d'ajouter que chacun
normande. Revoir ces films est un plaisir ble de son oeuvre. Un certain nombre de devrait se procurer ce chef-d'oeuvre. — B.P.
toujours renouvelé.                                jugements esthétiques sont fort discutables
    Comme dans tous les livres de cette (il faut dire, à la décharge de Spoto, que ce
remarquable collection, de nombreux index livre a été écrit il y a près de 10 ans),                  FRAGMENT D'UNE AUTOBIOGRAPHIE
(films cités, scénaristes, opérateurs, musi- notamment quand l'auteur veut nous prou- par Roberto Rossellini, Paris, Ramsay, 1987,
ciens) permettent au lecteur de mieux se ver à tout prix que Family Plot ou Frenzy 198pages. ISBN: 2-85956-608-2. Dist. au Québec:
situer et au chercheur de trouver matière à sont d'excellents films, que Torn Curtain DMR.
ses efforts. À se procurer nécessaire- est un film ennuyeux ou encore que Vertigo                      Voici un livre du plus haut intérêt, on y
ment.-B.P.                                                                                        découvre un Rossellini tel qu'il n'a jamais
                                                   est chef-d'oeuvre (film bien vieilli). Mais le cessé secrètement de se vouloir: ambi-
                                                   cinéphile intelligent rectifiera de lui-même, tieux, rebelle, scientiste à rebours, anti-
 LES DOSSIERS DE LA CINÉMATHÈQUE. sachant bien que la plupart des critiques intellectualiste et, malgré lui, rêveur. De
       RÉSISTANCE ET AFFIRMATION:                  américains ont un sens inné de la gaffe ou tous ces propos, il ressort que l'auteur
                                                   de l'humour involontaire. Ce livre a un d'Europa 51 est bien ce cinéaste qui refuse
    LA PRODUCTION FRANCOPHONE À                    immense mérite: il est clair, facile d'accès, toute nostalgie, de peur d'échapper à
              L'ONF-1934-1964.                     bien structuré, bien écrit. Il est donc à l'authenticité des faits, toute invention
     (Histoire du cinéma au Québec III)            recommander à tous les cinéphiles éclairés esthétique, toute dimension visuelle où le
 par Pierre Veronneau, Montréal, Cinémathèque ainsi qu'à tout les étudiants en cinéma.            regard pourrait construire un univers qui lui
québécoise/Musée du cinéma, 148 pages, 40 pho-                                             - B.P. échappe. Est nécessaire avant tout l'objecti-
tos noir et blanc. ISBN: 2-89207-030-9. Dist. au                                                  vité qui donne au réel une garantie et au
Québec: Diffusion parallèle/Messageries Prolo-                                                    spectateur l'assurance de n'avoir pas été
gue.                                                          SIX CONTES MORAUX                   dupé. Pour Rossellini, le 7e art n'a été la
    Quand il s'en donne la peine, Pierre par Éric Rohmer, Paris, Ramsay, coll. «Ramsay plupart du temps qu'une immense fraude
Veronneau est capable du meilleur. En voici poche cinéma», 1987, 256 pages. ISBN: 2-85956- où les réalisateurs, producteurs, monteurs,
la preuve étincelante, noir sur blanc. Cet 572-2. Dist au Québec: DMR.                            conjugant parfois leurs efforts, ne cher-
ouvrage, en effet, se lit comme un roman Ces six contes moraux ne sont en fait chaient qu'à corrompre la vérité. Car ce qui
tant il est bien écrit, soigneusement docu- qu'une version imprimée et cursive de six revient constamment à travers les nombreu-
menté et d'une rare intelligence. On pourra films écrits et mis en scène par Rohmer. ses et savoureuses anecdotes que nous
ici et là contester certains jugements, certai- Comme chacun le sait, le réalisateur de La raconte l'auteur (sa vie avec Ingrid Berg-
nes prises de position politique (c'est pres- collectionneuse a toujours rêvé d'être man, ses rencontres avec Claudel, Coc-
que inévitable), à aucun moment on ne écrivain. Voici la chose accomplie. Le teau, Renoir, ses voyages en Inde, etc.),
pourra dénier à cette recherche de longue cinéma y gagnera sans doute, mais la litté- c'est cette obsession de la vérité, d'une
haleine sa pertinence et son utilité. Un seul rature?-B.P.                                        vérité conçue à la fois comme un principe
souhait: que l'auteur n'en reste pas là et                                                        moral et comme une reduplication photo-
nous donne la suite. Indispensable à toute                                                        graphique du réel. On conviendra qu'il s'agit
bibliothèque.— B.P.                                                                               là d'un singulier idéal ! — B.P.                      83
Vous pouvez aussi lire