Rapport en vue des Etats généraux du tourisme genevois 2018 - GE.CH

 
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REPUBLIQUE ET CANTON DE GENEVE
Département de la sécurité et de l’économie
Direction générale du développement économique,
de la recherche et de l'innovation

                                                                                         Genève, le 30 avril 2018

                 Rapport en vue des Etats généraux du tourisme genevois 2018

Préambule

Le tourisme est un formidable relais de croissance économique. Cette industrie emploie
actuellement une personne sur dix dans le monde. Elle est aussi devenue la troisième
catégorie d'exportation la plus importante du globe, après la chimie et les matières fossiles, et
représente aujourd'hui 10% du PIB de la planète.
L'évolution du tourisme mondial a été spectaculaire ces sept dernières décennies. En 1980, le
secteur recensait 104 millions de voyageurs internationaux, soit neuf fois plus qu'en 1950.
Leur nombre, qui a grimpé de 83% au cours du XXIe siècle, devrait atteindre les 1,8 milliard
d'individus à l'horizon 2030. Mieux: depuis la fin de la deuxième Guerre Mondiale, les recettes
engrangées par les destinations grâce à ces flux de visiteurs étrangers ont connu une envolée
de plus de 6000%, soit 1220 milliards de dollars de recettes.
Toutefois, Genève n'a que modérément profité de cet essor. Ses hôtels ont enregistré l'an
passé 3,3 millions de nuitées. Un résultat louable, mais qui dépasse de peu le chiffre réalisé il
y a 40 ans environ alors que, dans l'intervalle, la croissance du tourisme mondial a été
multipliée par cinq.
Les compagnies aériennes à bas prix, très présentes à Genève, fonctionnent beaucoup sur un
modèle "outbound" (les passagers prennent l'avion depuis Genève pour passer du temps à
l'étranger). Il s'agirait d'inverser cette dynamique et faire en sorte que les passagers utilisent
davantage ces mêmes compagnies pour venir visiter Genève ("inbound").

Contexte et visée du présent rapport

Ce document dresse un état des lieux du tourisme genevois. Il a fait l’objet d’échanges nourris
auprès de 80 acteurs clé de la destination Genève et ses environs (France voisine, Vaud,
Valais, etc.). Les consultations, sous forme d’entretien individuels ou en groupes restreints,
sont toutefois appelées à se poursuivre jusqu’au 15 mai courant, voire au-delà, puisqu’au total
plus de 150 contributeurs phares ont été identifiés

L'exercice s'inscrit en effet dans le cadre des premiers Etats généraux du tourisme 2018,
organisés le mois prochain par le département de la sécurité et de l’économie (DSE). Cette
rencontre associe l’ensemble des parties prenantes au bon fonctionnement et à la mise en
avant du canton en tant que lieu de villégiature, de rencontres institutionnelles, comme de
visites d’affaires. Elle a pour objectif de redynamiser la destination Genève.

Le processus, initié voilà un peu plus de deux mois par M. Pierre Maudet, conseiller d'Etat en
charge du DSE et ministre de tutelle de la Fondation Genève Tourisme et Congrès (FGT&C),
Direction générale du développement économique, de la recherche et de l'innovation • Rue de l'Hôtel-de-Ville 11 • 1204 Genève
               Tél. +41 (0) 22 388 34 34 • Fax +41 (0) 22 388 31 99 • E-mail dgderi@etat.ge.ch • www.ge.ch/dse
                         Ligne TPG 36 - arrêt Taconnerie • www.ge.ch/entreprises • www.whygeneva.ch
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vise notamment à permettre au public extérieur d’identifier l’image de Genève. Il s'attache
également à porter un regard sans concession sur les raisons de son relatif déclin, en tenant
compte des enjeux liés à la numérisation et des nouvelles façons de voyager.

Les travaux, menés par la direction générale du développement économique, de la recherche
et de l’innovation (DG DERI), ont permis à ce stade de mettre en lumière les principaux atouts
et faiblesses de la destination. Ce rapport offre un tour d’horizon de la promotion touristique du
canton et formule des thèses propres à fertiliser son fonctionnement. Il a vocation à servir de
base pour alimenter les discussions à venir, d’ici à la rencontre du 15 mai et au sortir de cette
dernière, afin de redessiner un visage plus conquérant de Genève.

Aperçu des forces et des faiblesses de Genève

   1) Aspects identitaires

       Genève est un symbole de paix, mondialement reconnu. Berceau d'idées humanistes
       et d'idéaux politiques, le canton est un centre réputé pour son rayonnement intellectuel
       et sa tolérance. Il est par ailleurs doté d’un lien moral avec la Genève internationale.
       Cette dernière, considérée comme un monde à part, n'occupe qu'une zone restreinte
       du canton. Le multiculturalisme qui s’exprime sur le reste du territoire est toutefois
       considéré comme harmonieux.

       Genève est vu comme un îlot de prospérité. Cette caractéristique, encore largement
       véhiculée, a historiquement contribué à faire du canton une destination prisée. Pour
       preuve, le taux d'occupation de ses infrastructures d’hébergement a par le passé
       franchi la barre des 80%, un chiffre qui ferait aujourd’hui rêver n’importe quel
       hôtelier. La performance date toutefois de 1947, une époque où le rayonnement de
       Genève était à son sommet, forçant certains visiteurs à trouver logis chez l'habitant.

       Cette physionomie de Genève a depuis lors subi une érosion progressive. La
       destination a aujourd’hui une réputation de cherté, même si beaucoup d’activités
       peuvent être faites gratuitement (visite des collections permanentes dans les musées,
       parcours historiques, parcours de lieux emblématiques, animations estivales, etc.).

       D’aucuns prêtent à Genève un visage conformiste et ennuyeux. Le canton attirerait
       surtout une clientèle puritaine, plutôt aisée, alors que la demande internationale
       s'oriente de nos jours vers un tourisme hédoniste et aventurier. Cette description est
       quelque peu en décalage avec les évolutions récentes, comme l’essor que connaît la
       vie nocturne dans le canton, qui se défend mieux face aux soirées notamment
       lausannoises.

       Genève donne l'impression de ne pas être très ouverte au tourisme. Le foisonnement,
       pour ne pas dire la concurrence des messages visant à promouvoir son offre (GT&C,
       Ville, agendas culturels et artistiques, etc.) provoque un sentiment d’éclatement et de
       manque d'harmonisation de la destination. Le visiteur s’y perd.

       L’image de Genève est pour l’heure fortement diluée, en raison d’initiatives qui se
       cannibalisent, voire se neutralisent. La promotion touristique du canton n'a pas le statut
       de réseau d'influence, également à destination de la population locale.

       Le tourisme genevois rechigne encore à sortir de ses murs. Le canton est trop replié
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   sur lui-même et n’assume pas son statut de porte d’entrée de la Suisse romande et de
   la France voisine. La coopération régionale en matière touristique se révèle
   embryonnaire, alors que les offres de part et d’autres des frontières administratives ne
   sont pas nécessairement en concurrence directe, mais peuvent être très
   complémentaires, en particulier dans le cadre de Congrès.

2) Offre touristique

   Genève ne se résume pas au Jet d'Eau et à l'Horloge Fleurie. Le canton dispose de
   nombreuses autres facettes touristiques – souvent méconnues, voire carrément
   cachées –, dont des parcours culturels, littéraires et architecturaux.

   La dimension culturelle genevoise est vaste, mais cette étendue n'est pas
   suffisamment mise en valeur. Les Etats généraux des musées genevois, menées entre
   2012 et 2013, ont conclu à l’impératif de coopérer plus étroitement avec les organes de
   promotion de la destination. Toutefois, les échanges souhaités entre le tourisme et la
   culture ne sont toujours pas satisfaisants. Les mises en commun restent encore trop
   ponctuelles. D'aucuns estiment ainsi que les musées genevois occupent beaucoup de
   personnes, mais n'attirent en réalité que peu de monde, comparé à d'autres structures,
   comme la Fondation Gianadda en Valais.

   La situation géographique exceptionnelle de Genève (au cœur de l’Europe, au pied
   des montages et au bord d’un lac avec le statut – depuis tombé en désuétude – de
   perle du Léman), ainsi que sa qualité de vie (un cadre naturel exceptionnel, à taille
   humaine), figurent parmi les atouts majeurs du canton.

   La campagne genevoise couvre plus de la moitié du canton. Elle représente un atout
   considérable. Genève est en quelque sorte une cité à la campagne, un territoire
   pénétrée par la nature, dans un environnement intact et écologiquement remarquable.
   Cet aspect semble pour l’heure largement sous-exploité.

   Genève est à la fois un canton-jardin et un lieu de contrastes. Son territoire urbain
   étant porté par l'eau, cet élément fort en termes d'attractivité mériterait une mise en
   valeur plus innovante.

   Genève ne brille pas en tant que destination de bien-être, selon plusieurs études.
   Pourtant, le canton dispose des moyens pour devenir une référence en la matière, via
   notamment ses cliniques privées, internationalement réputées, et ses infrastructures
   d'hébergement haut de gamme.

   Genève, qui campe sur ses acquis, peine à se remettre en question. Le canton jouit en
   effet d’une certaine rente de situation liée à la présence des organisations
   internationales, elle-même découlant de la neutralité du pays et du caractère paisible
   du territoire. Mais cette sclérose semble se lézarder. Une concurrence accrue dans le
   secteur de la restauration a récemment conduit à l'émergence d'expériences très
   originales, adossées à des tarifs plus digestes. Un tel rééquilibrage est espéré dans le
   domaine de l'hôtellerie.
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   3) Infrastructures

       L’accès à Genève, que ce soit par les airs ou le rail, ainsi que la Geneva Transport
       Card (gratuité des transports publics pour les touristes), est un avantage comparatif
       unique par rapport à d’autres destinations.

       L’offre hôtelière genevoise, qui a été rénovée à grands frais et continue de s'améliorer,
       n’a pas fortement augmenté ces 15 dernières années (+ 1,5% entre 2012 et 2016,
       contre + 8,2% à Bâle et +12% durant la même période côté vaudois). Le canton
       présente toujours une quantité surnuméraire d’hôtels de luxe et des prix jugés (tous
       segments confondus, mis en particulier pour des établissements de catégorie
       intermédiaire, lors de Congrès ou en cas de "blackout dates") abusivement élevés par
       rapport à Zurich, Vienne, ou Amsterdam.

       Genève peine à favoriser l’ouverture d'enseignes moins étoilées, (comme le Motel
       ONE de Zurich, dont le modèle d'affaires peut être comparé à celui d'EasyJet dans
       l'aéronautique), sinon dotés de grandes capacités ou de concepts très identitaire.

       Airbnb capte déjà environ 10% des parts de marché de l’hébergement à Genève et sa
       région. Ce contingent aide à attirer une clientèle de chercheurs et d’employés
       d’organisations internationales dont le per diem a été revu à la baisse.

       Touristiquement parlant, le plus important est moins ce qu'on achète, que les
       conditions dans lesquelles on le fait. Le shopping à Genève n'est pas des plus
       performants, en raison de l’indigence des horaires d’ouverture des magasins.

       Genève ne dispose pas de véritable Palais des Congrès moderne et fonctionnel. Les
       halles de Palexpo s’avèrent certes très utiles, mais ne sont pas toujours adaptées à
       cette activité. Et le Centre international (CICG), hormis le besoin d’un important lifting,
       est en voie de saturation. Il est toutefois important de noter qu'une structure
       spécialement dédiée aux Congrès, apparaît – expériences faites ailleurs - difficile à
       rentabiliser.

Axes de réflexion

L'étude des éléments ci-dessus nous permet de soumettre 10 thèses à la discussion prévue le
15 mai prochain. Cet inventaire est destiné à être analysé, complété ou resserré, avant d'être
validé en vue d'une mise en œuvre à l'horizon 2022.

   1) Redéfinir la clientèle cible à viser. Quel tourisme veut-on exactement à Genève?
      L'activité mondiale des Congrès et des Salons augmente plus rapidement que le
      segment purement récréatif, lequel exprime toutefois une notion plus conviviale des
      destinations. Par ailleurs, tous les visiteurs de passage dans le canton ne séjournent
      pas nécessairement dans un hôtel et leurs dépenses ne s'adressent pas
      exclusivement à ce seul secteur.

   2) Collaboration transfrontalière. Briser le tabou du partenariat avec la France voisine,
      en particulier lors de Congrès. Travailler plus étroitement avec l'ensemble des acteurs
      du bassin franco-valdo-genevois, jusqu’à Chamonix et le Valais.

   3) Investir dans la formation de haut niveau. Le défi qualitatif, en matière d'accueil et
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   de prestations, est un enjeu central du tourisme. Genève doit accroître le niveau des
   compétences-métier dans la branche, de sorte à y améliorer la productivité, tout en y
   limitant le taux de rotation du personnel. Le degré de professionnalisme est en effet
   l'un des facteurs explicatifs les plus importants du fléchissement/renforcement du
   secteur, ainsi que de son image.

4) Déployer une stratégie de marketing territorial. Associer l'ensemble des acteurs de
   la destination Genève (pouvoir politique, milieux académiques, métiers du tourisme,
   acteurs internationaux, population et entreprises locales) pour créer un réseau
   d’ambassadeurs et doper l'attractivité du canton. Le dispositif implique de se doter
   d'une identité claire et fortement distinctive, propre à attirer de nouveaux agents
   économiques à Genève.

5) Construire une plateforme touristique augmentée. Faire de la GT&C, en particulier
   son site internet, la vitrine de référence et la porte d’entrée principale vers la
   destination. Capitaliser sur les expériences existantes, comme le projet «smart
   canton» et traiter Genève en sa qualité de hub de l’attractivité régionale. Transformer
   l’approche numérique, en aidant notamment les partenaires à se mettre
   technologiquement à niveau, afin de développer l’approche HtoC (Human to Client, par
   des contenus prônant des expériences individualisées, authentiques et fortement
   engageants).

6) Identifier un nouvel emblème. Genève doit pouvoir offrir une attraction phare, autre
   que le Jet d'Eau ou l'Horloge Fleurie. Exemples: la future Cité de la musique, pour faire
   de Genève une "petite Sydney" européenne, le FIFDH un "mini-Cannes" des Droits
   humains, le projet de pavillon d’accueil de l'ONU et son musée (ONU Live), ou encore
   le parc du Palais des Nations (un joyau environnemental de 45 hectares).

7) Enrichir le catalogue touristique. Développer l'agrotourisme et l'offre bien-être.
   L'offre créant la demande touristique, il s'agit également de proposer davantage
   d'événements (sportifs, culturels, tourisme vert, etc.) internationaux, sous forme de
   rendez-vous annuels, biennaux ou triennaux.

8) Repenser les infrastructures d'accueil. Favoriser l'implantation d'hôtels proposant
   une offre complémentaire à l'existante, de manière à panacher et étoffer le parc de
   chambres disponibles à Genève.

9) Mieux séquencer l'ADN de Genève, en tant que lieu privilégié au monde pour les
   échanges d'idées et pôle scientifique de la Suisse occidentale.

10) Travailler sur les prix. Le différentiel observé entre les tarifs des services touristiques
    et ceux des autres biens et services consommés à Genève ne s'explique pas que par
    des facteurs liés à la fiscalité (TVA) ou à l'augmentation des coûts (charges salariales,
    etc.). L'UNIGE a estimé par le passé qu'une hausse des prix de 10% à Genève par
    rapport à ceux en vigueur dans le pays d'origine des visiteurs se traduit par une baisse
    de 5,3% des nuitées au cours du trimestre suivant.
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Remarques annexes

Le présent aggiornamento, piloté par la DG DERI, associe les communes, les cafetiers, les
restaurateurs et hôteliers, les commerçants, les acteurs du transport, les représentants
institutionnels et académiques. Mais aussi les associations professionnelles, les partenaires
sociaux, tout comme les responsables d’agences, les acteurs de l’aménagement du territoire
ou encore les fournisseurs actifs dans le numérique.

La démarche a été accueillie avec enthousiasme; les entretiens se déroulent dans un esprit
positif et constructif. Les intervenants, qui ont jusqu'ici formulé un nombre remarquable de
propositions d'amélioration, nourrissent de grandes attentes à l’égard des Etats généraux du
tourisme 2018.

Certains interlocuteurs ont émis des doutes quant à leur implication dans la Genève du
tourisme. Les discussions ont permis de leur révéler, sinon de leur expliquer en quoi ils étaient
partie prenante des efforts de promotion de la destination.

Le monde du tourisme genevois a été secoué par deux années largement déficitaires des
Fêtes de Genève. Toutefois, la FGT&C reste saine du point de vue financier. Cet épisode
regrettable est l'arbre qui cache la forêt. Celle d'une promotion touristique qui, malgré ses
imperfections, s'avère profitable.

Le tourisme genevois, en chiffres

Que représente, économiquement, le tourisme à Genève? Sa contribution à la prospérité du
canton n’est pas aisée à calculer. En effet, les données officielles relatives à ce secteur
n’existent pour l’heure qu’à l’échelle nationale. Le seul moyen d’appréhender le poids du
tourisme à Genève consiste à étudier l’emploi dans la seule branche d’importance à vocation
touristique, soit l’hôtellerie-restauration.

Selon les dernières données fournies par le recensement fédéral des entreprises (RFE), cette
branche dénombre près de 15 300 postes de travail, soit 4,9% du total des équivalents plein
temps du canton de Genève (1,4% dans l’hôtellerie et 3,5% dans la restauration). Les emplois
en question se répartissent dans plus de 2200 établissements.

Environ une chambre hôtelière sur 15 en Suisse se trouve à Genève. Le canton accueille plus
de 80% de touristes étrangers (dont environ 43% provenant d’Europe, 10% d’Amérique du
Nord, 11% d’Asie et 7% des Pays du Golfe), a dépassé les 3 millions de nuitées l’an passé,
pour un taux d’occupation de 66,3%.

A Genève, la demande touristique (dépenses des visiteurs, toutes origines confondues)
avoisine pour l’heure les 3 milliards de francs par an. On estime ainsi que le tourisme
genevois génère près d’un milliard de francs de valeur ajoutée par année, soit 2,1% de celle
créée dans l’ensemble de l’économie du canton, et contribue à 1% des rentrées fiscales des
personnes morales.

Mais le tourisme n’est pas qu’une affaire comptable. C’est aussi un puissant vecteur de
notoriété internationale.

Auteurs du rapport : Jacques Folly, Délégué au développement économique du commerce (DG DERI)
                   Dejan Nikolic, Délégué responsable de la communication et de l'information (DG DERI)
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