Le vol de données bancaires - Universités de Genève et de Lausanne Faculté de droit Master of advanced studies (LL.M.) in Business Law - MBL ...

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Universités de Genève et de Lausanne

                    Faculté de droit

Master of advanced studies (LL.M.) in Business Law – MBL

                       Mémoire

  Le vol de données bancaires

                     Mélissa Palin

     Sous la direction du Professeur Christian Bovet

             Années académiques 2009-2011
Remerciements
Par ces quelques lignes, je tiens à remercier Madame Simona Mulinari et Maître Emmanuel
Genequand pour le soutien qu’ils m’ont apporté durant l’accomplissement de ce mémoire ainsi
que pour leurs précieux conseils. Que mes collègues chez PricewaterhouseCoopers trouvent
également ici l’expression de mes remerciements pour leur encouragement et leur aide au
cours de ce travail.

Enfin, je remercie mes proches pour leur soutien, leur présence et leur encouragement tout au
long de ce travail.

                                             1
Tables des matières

REMERCIEMENTS................................................................................................................. 1

LISTE DES ABRÉVIATIONS ................................................................................................ 4

I.     INTRODUCTION ........................................................................................................... 6

II.    DONNÉES PROTÉGÉES PAR LE SECRET BANCAIRE........................................ 8

III. LA GARANTIE DE L’ACTIVITÉ IRRÉPROCHABLE.......................................... 10

IV.    L’ORGANISATION DE L’INTERMÉDIAIRE FINANCIER................................. 13

           a.      Du point de vue interne -------------------------------------------------------------- 13
                   i. Au niveau du Conseil d’administration ------------------------------------------ 13
                   ii. Au niveau de la direction ---------------------------------------------------------- 17
                   iii.Au niveau de la révision interne -------------------------------------------------- 17
                   iv. Au niveau du compliance ---------------------------------------------------------- 19
                   v. Au niveau risk management ------------------------------------------------------- 21

           b.      Du point de vue externe -------------------------------------------------------------- 22
                   i. Le cas de l’outsourcing------------------------------------------------------------- 22
                   ii. La surveillance consolidée --------------------------------------------------------- 26
                   iii.Les réviseurs externes -------------------------------------------------------------- 30

V.     LES DISPOSITIONS PÉNALES ................................................................................. 32

           a.      La Convention du Conseil de l’Europe sur la cybercriminalité------------- 32
                   i. Champ d’application---------------------------------------------------------------- 32
                   ii. Les dispositions transposées------------------------------------------------------- 33

           b.      La compétence pénale ---------------------------------------------------------------- 33

           c.      Les dispositions spéciales applicables ---------------------------------------------                      36
                   i. La soustraction de données (art.143 CP) ----------------------------------------                       36
                   ii. L’accès indu à un système informatique (art.143bis CP) ---------------------                          39
                   iii.Le service de renseignements économiques (art. 273 CP) --------------------                           40

           d.      La responsabilité pénale de l’intermédiaire financier------------------------- 42

                                                               2
VI.     LES DISPOSITIONS EN MATIÈRE FISCALE ....................................................... 45

            a.      Procédure formelle d’entraide en matière fiscale ------------------------------ 46

            b.      Procédure informelle dans le cadre du FATCA --------------------------------                               48
                    i. Explications ---------------------------------------------------------------------------                48
                    ii. Conséquences pour les intermédiaires financiers -------------------------------                        49
                    iii. Problèmes et conflits dans l’application des règles FATCA -----------------                           51

VII. LES CONSÉQUENCES POUR LES INTERVENANTS............................................ 52

            a.      En matière civile -----------------------------------------------------------------------                  52
                    i. En droit de la personnalité ---------------------------------------------------------                   52
                    ii. En matière délictuelle---------------------------------------------------------------                  54
                    iii.En matière contractuelle------------------------------------------------------------                   56

            b.      En matière administrative (LFINMA et pratique de la FINMA)----------- 59

            c.      En matière pénale --------------------------------------------------------------------- 60

            d.      En matière fiscale --------------------------------------------------------------------- 61

            e.      En matière d’autorégulation -------------------------------------------------------- 61

VIII. CONCLUSION .............................................................................................................. 62

IX.     ANNEXE - REGLES DE CONDUITE PROPOSEES ET COMMENTEES .......... 64

            a.      Le domaine des ressources humaines --------------------------------------------- 66

            b.      Le domaine informatique------------------------------------------------------------ 67

            c.      Le domaine de l’organisation ------------------------------------------------------- 68

            d.      Le domaine des prestataires externes --------------------------------------------- 68

BIBLIOGRAPHIE .................................................................................................................. 70

                                                                3
Liste des abréviations
Al.             Alinéa

Art.            Article

ASB             Association Suisse des Banquiers

ATF             Arrêt du Tribunal fédéral

BCM             Business Continuity Management

CC              Code Civil suisse

CFB             Commission fédérale des banques

CO              Code suisse des obligations

CP              Code pénal suisse

FATCA           Foreign Account Tax Compliance Act

FF              Feuille fédérale

FFI             Foreign Financial Intermediary

FINMA           Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers

HIRE            Hiring Incentives to Restore Employment Act

IT              Information Technology

IRS             Internal Revenue Service

JDT             Journal des Tribunaux

LB              Loi fédérale sur les banques et les caisses d’épargne

Let.            Lettre

LFINMA          Loi fédérale sur l’Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers

LPD             Loi fédérale sur la protection des données

                                              4
OACDI   Ordonnance relative à l’assistance administrative d’après les conventions
        contre les doubles impositions

OB      Ordonnance sur les banques et les caisses d’épargne

OCDE    Organisation de coopération et de développement économiques

SWIFT   Society for Worldwide Interbank Financial Telecommunication

                                    5
I.    Introduction
1.     Le vol de données est une problématique actuelle qui s’est distinguée dans plusieurs
       affaires médiatiques. S’agissant du domaine bancaire, cette problématique s’est illustrée
       dans plusieurs affaires dont notamment celle survenue au sein de HSBC ou encore celle
       de LGT. Le nombre de personnes affectées par une perte ou un vol de données est
       estimé à environ 250 millions en 2009 dont environ 40 % dans le domaine des services
       financiers.1
2.     Quelque soit le secteur concerné, le facteur humain est le point commun des différents
       vols de données. En effet, pour la majeure partie des cas reportés, il s’est avéré que la
       personne physique traitant des données confidentielles était souvent un des maillons
       faible de la chaîne.2 Les personnes intervenant dans le processus de traitement des
       données peuvent être poussées à la commission d’un vol pour différents motifs qui
       peuvent être de plusieurs ordres. Bien souvent le vol de données est motivé par des
       aspirations économiques, l’auteur de la soustraction de données espérant pouvoir
       monnayer les informations dérobées et ainsi tirer un profit de la commission de
       l’infraction. Ces employés ont souvent le profil d’employés mécontents ayant volé les
       informations dans divers but dont entre autres de mettre leur ancien employeur dans une
       position préjudiciable à sa réputation.
3.     Un établissement est confronté en permanence au risque de vol de données qu’il soit
       perpétré par un membre interne ou externe à son organisation. Afin de minimiser ce
       risque, un établissement doit se doter de mesures lui permettant de contrôler et limiter la
       fuite d’informations confidentielles. Dans le domaine bancaire, la fuite d’information a
       diminué de deux tiers en 2009, il ne reste pas moins que ce secteur est le plus touché par
       ce genre d’infraction.3
4.     Ce travail a pour objectif de se concentrer sur la problématique du vol de données dans
       les établissements bancaires. Le vol de données, en plus d’avoir des conséquences sur le
       plan réputationnel, peut induire d’autres effets plus dommageables encore pour un
       établissement bancaire soumis à autorisation de l’autorité de surveillance des marchés
       financiers. Afin de cerner tous les enjeux de la fuite d’informations pour un

1
  Data loss barometer, pp. 14-15.
2
  Data loss barometer, p. 5.
3
  Data loss barometer, p. 6.

                                                 6
établissement assujetti à la surveillance de la FINMA, nous allons aborder la question
des normes applicables à un tel événement, tant dans le domaine administratif que pénal
en passant par l’aspect fiscal. Puis nous analyserons les conséquences juridiques qu’un
vol d’informations confidentielles pourrait avoir sur les intervenants d’un événement de
ce type. Pour finir, nous tenterons de proposer un code de conduite à l’intention des
établissements bancaires visant à leur proposer une manière de monitorer et surveiller ce
risque afin de mieux canaliser cette problématique.

                                        7
II.   Données protégées par le secret bancaire
5.     L’un des points centraux de l’activité bancaire4 en Suisse réside dans l’obligation de
       discrétion à la charge des banques, de leurs organes, de leurs employés et de leurs
       mandataires sur les affaires de leurs clients ou de tiers qui viendraient à leur
       connaissance dans le cadre de l’exercice de leur profession. Lors d’une relation bancaire
       avec une personne, l’intermédiaire financier dispose d’informations très étendues sur
       cette personne, notamment sur sa situation financière, ses revenus, ses relations
       professionnelles et personnelles. Les renseignements qu’il détient révèlent certains
       aspects de la vie de son client. Il s’avère donc nécessaire que ces données personnelles
       soient protégées et restent confidentielles.5 Juridiquement, l’obligation de confidentialité
       du banquier et de ses auxiliaires trouve son fondement dans trois domaines du droit
       distincts.
6.     Tout d’abord, elle trouve son fondement dans le droit de la personnalité traité aux
       articles 27 et suivants du Code civil suisse, droit qui vise à assurer la protection des
       valeurs qui constituent l’essentiel du domaine intime de l’individu.6 A noter que le
       domaine privé économique est également couvert par cette norme dont la violation
       constitue un acte illicite au sens des articles 41 et suivants du Code civil.7
7.     L’obligation de confidentialité trouve également son expression dans le domaine
       contractuel et plus précisément dans les règles du mandat énoncées aux articles 394 et
       suivants du Code des obligations suisse. En effet, l’intermédiaire financier est tenu dans
       le cadre d’une relation contractuelle avec son client à tous les égards découlant des
       règles sur le contrat de mandat, il est tenu à la bonne et fidèle exécution du mandat
       conformément à l’article 398 al.2 CO et doit pour se faire conserver la confidentialité sur
       les informations entrant en sa connaissance durant la relation avec son client.
8.     Pour finir l’obligation de confidentialité résulte de la loi fédérale sur les banques et les
       caisses d’épargne (LB)8, plus particulièrement de son article 47. Cette base légale
       constitue le fondement pénal de la violation de l’obligation de discrétion du banquier.

4
  Par soucis de précision, ce travail se concentre sur la réglementation applicable au domaine bancaire. Ainsi, la
réglementation applicable aux négociants en valeurs mobilières n’a, volontairement, pas été abordée.
5
  C. LOMBARDINI, p. 965 N. 1.
6
  A. BUCHER, N. 413.
7
  M. AUBERT, P.-A. BÉGUIN, P. BERNASCONI et consorts, p. 44. ATF 64 II 162 ss, 169, JT 1938 522ss 531-
532.
8
  RS 952.0.

                                                        8
Elle considère l’obligation de confidentialité du banquier comme un devoir
     professionnel ayant sa source dans le droit économique administratif régissant l’activité
     des banques.9 La LB ne définit pas spécifiquement la notion au centre de l’obligation de
     discrétion, il convient donc de se référer, selon la doctrine unanime et la jurisprudence10,
     à la définition de droit civil afin de pouvoir déterminer ce qu’il faut entendre par secret
     bancaire.11 A la différence du droit civil, l’étendue de la notion de droit administratif ne
     recouvre pas le même cercle de personnes. En effet, contrairement au droit de la
     personnalité, droit dont la portée est absolu et donc opposable à tous, l’obligation
     contenue dans cette disposition de droit administratif se destine à un cercle limité de
     personnes à savoir celles mentionnées au deuxième alinéa de cette disposition.12 En ce
     qui concerne les bénéficiaires du secret et les informations confidentielles couvertes par
     celui-ci, il ne résulte aucune divergence quelque soit le fondement employé.
9.   A noter que la loi fédérale sur la protection des données (LPD) tend quant à elle à
     protéger la personnalité et les droits fondamentaux des personnes qui font l’objet d’un
     traitement de données. Les données bancaires entrent également dans la sphère de
     protection de cette loi. Cette loi appréhende des situations pour lesquelles le droit de la
     personnalité n’est pas adéquat, ni efficace lors de traitements de données personnelles,
     en raison des difficultés quant à l’identification des risques encourus ou des atteintes
     subies et quant à la détermination de la licéité des traitements effectués. 13 La protection
     des données doit également être assurée dans le cadre du trafic international des
     paiements. Plusieurs décisions ont permis de préciser la pratique dans ce domaine-là. La
     plus connue est sans doute la décision SWIFT dans laquelle il a été jugé que la
     transmission de données concernant le trafic de paiement de la part de SWIFT aux
     autorités américaines était contraire aux principes énoncés par la LPD, en particulier à
     celui énoncé à l’article 6 LPD, lequel impose un degré de protection adéquat des
     données dans le pays requérant et le consentement de la personne concernée par les

9
  AUBERT, BÉGUIN, BERNASCONI et consorts, p. 52.
10
   RDAF 1970 p. 133, pp. 136-137.
11
   A. RAPPO p. 92.
12
   Ibidem.
13
   AUBERT, BÉGUIN, BERNASCONI et consorts, p. 45.

                                               9
données à transmettre.14 La transmission de données ne doit se faire qu’en présence de
      motifs justificatifs, ces derniers doivent être compris comme étant le consentement de la
      personne concernée, un intérêt prépondérant public ou privé, ou une disposition légale.15

      III. La garantie de l’activité irréprochable
10.   L’activité bancaire est une activité soumise à autorisation de la FINMA, la banque ne
      pourra commencer son activité et être inscrite au Registre du Commerce qu’une fois
      l’autorisation obtenue (art. 3 al.1 LB). Cette autorisation est dite de police, c’est-à-dire
      qu’une fois les conditions remplies, l’autorisation ne peut être refusée.16 Afin d’obtenir
      l’autorisation, l’intermédiaire financier doit remplir certaines conditions, celles-ci
      peuvent être classées en trois catégories17. Tout d’abord, la banque doit répondre à des
      conditions d’organisation administrative et à une surveillance appropriée (art. 3 al. 2 let.
      a LB, art. 6 et 7-10 OB), puis elle doit répondre à des exigences relatives à la
      surveillance des risques et à l’adéquation de ses fonds propres (art. 3 al. 2 let. b LB et
      art. 4 OB). Pour finir, la dernière catégorie fait référence à des conditions personnelles,
      celles de la bonne réputation et de la garantie irréprochable des personnes qui sont
      chargées d’administrer et de gérer la banque (art. 3 al. 2 let. c LB).
11.   Concernant la condition de la garantie de l’activité irréprochable, l’article 3 al. 2 let. c
      LB précise que l’autorisation d’exercer une activité bancaire est accordée à la condition
      continue que, notamment, les personnes chargées d’administrer et de gérer la banque
      jouissent d’une bonne réputation et présentent toutes les garanties d’une activité
      irréprochable. La garantie d’une activité irréprochable, notion d’abord introduite pour
      les banques étrangères18, est souvent définie comme étant une condition personnelle que
      doivent remplir les membres de la direction et du conseil d’administration. La FINMA

14
   Protection des données dans le trafic international des paiements (SWIFT) ; L’accès aux données des
transactions bancaires du réseau mondial SWIFT-Avis du Préposé fédéral à la protection des données et à la
transparence. R. MONTBEYRE, « Le transfert de données bancaires à caractère personnel vers les Etats-Unis :
aspects juridiques de l’Affaire SWIFT ».
15
    Communication de données personnelles relatives au trafic des paiements aux autorités américaines ;
Communication de données du trafic international des paiements à des gouvernements étrangers, dans la
perspective de l’application de sanctions.
16
   C. LOMBARDINI, p. 17.
17
   A. RAPPO, ECS p. 208.
18
   A. HIRSCH, nbp N. 2.

                                                    10
précise qu’entrent dans cette « garantie » toutes les compétences professionnelles et
      personnelles qui permettent à une personne d’assurer correctement la direction d’un
      établissement assujetti.19 Elle précise également que le principal critère lui permettant de
      déterminer si la garantie de l’activité irréprochable est remplie est celui de l’activité
      professionnelle passée et présente de la personne au regard de l’activité envisagée. 20 A
      l’évidence cette disposition semblait jusqu’à maintenant n’être destinée qu’aux
      personnes physiques ayant pour tâche la gestion de la banque, cependant la pratique de
      l’autorité de surveillance démontre que cette notion est une notion plutôt « malléable »
      qui peut être modulée par l’autorité au gré des situations qu’elle juge propre à mettre en
      péril la gestion et l’administration de la banque.21
12.   En effet, une évolution de la notion de garantie de l’activité irréprochable est apparue
      dans les décisions rendues par la CFB puis par la FINMA. Désormais la garantie de
      l’activité irréprochable n’est plus seulement applicable aux personnes en charge de la
      gestion et de l’administration de la banque, mais l’est également à l’établissement lui-
      même. L’autorité de surveillance a rapproché dans plusieurs décisions la notion
      d’organisation adéquate à celle de la garantie de l’activité irréprochable.
13.   Le premier rapprochement opéré par l’autorité de surveillance est apparu dans la
      décision Montesinos22. Dans cette décision, la CFB examine la condition de l’activité
      irréprochable du directeur de l’établissement. Elle constate que ce dernier a manqué à
      ses principales obligations, c’est-à-dire celles de veiller à ce que son établissement soit
      organisé de manière adéquate et suffisante. La CFB a ainsi conclu que cette carence dans
      l’organisation de l’établissement est par là même une des raisons pour lesquelles le
      directeur de cet établissement ne remplit pas la condition de la garantie de l’activité
      irréprochable. Dans cette décision, la CFB a ainsi clairement établi un lien entre
      l’organisation de l’établissement bancaire et la garantie de l’activité irréprochable des

19
   Questions et réponses au sujet de la lettre de la Commission fédérale des banques (CFB) concernant la
« garantie d’une activité irréprochable ».
20
   http://www.finma.ch/f/sanktionen/gewaehrserfordernis-watchlist/Pages/gewaehrserfordernis.aspx site consulté
le 14.10.2010
21
   Op cit n°14.
22
   Rapport de gestion CFB 2001, p. 170, Bulletin CFB 42, p.123.

                                                     11
personnes chargées de la gestion et de l’administration de celui-ci. Une autre décision
      allant dans ce sens et confirmant cette tendance a été rendue dans une autre affaire23.
14.   La CFB a ensuite aussi établi que le manquement dans l’identification des risques de
      réputation et des risques juridiques était propre à remettre en question la garantie de
      l’activité irréprochable des membres du Conseil d’administration. 24 En effet, comme
      nous le verrons plus en avant dans ce travail, les administrateurs ont notamment pour
      tâches d’identifier les risques potentiels et de les limiter autant que possible.
15.   S’agissant de la conservation et de l’archivage de données, autre élément inhérent à
      l’organisation des établissements bancaires, la CFB a précisé que des manquements dans
      ce domaine sont perçus comme incompatibles avec le comportement adéquat attendu
      d’une banque et des personnes chargées de l’administrer et de la gérer. 25
16.   Dans son premier bulletin26, la FINMA reprend et confirme la pratique de la CFB et
      relève que la banque doit disposer d’une organisation administrative correspondant à son
      activité (art. 3 al.2 let. a LB). Dans ce cadre, elle doit être en mesure de déterminer, de
      limiter et de contrôler les risques pertinents. Font notamment partie de ces risques, les
      risques juridiques et les risques de réputation au sens de l’article 9 al.2 OB. Une
      déficience dans l’organisation de la banque sera considérée comme incompatible avec la
      garantie de l’activité irréprochable.
17.   Dans ce même bulletin, la FINMA déclare que la garantie de l’activité irréprochable est
      applicable aux personnes chargées d’administrer et de gérer la banque, mais aussi à la
      banque elle-même. En sa qualité d’entreprise, la banque doit également respecter la
      condition de la garantie d’une activité irréprochable.27
18.   Au vu de ces exemples, on ne peut que constater que la pratique de l’autorité de
      surveillance a évolué vers une prise en compte des déficiences organisationnelles de la
      banque dans son appréciation de la condition de la garantie de l’activité irréprochable
      des organes de direction. Evolution ayant pour conséquences que les insuffisances
      organisationnelles de la banque risquent de plus en plus souvent d’avoir des

23
   Bulletin CFB 46, p. 31.
24
   Bulletin CFB 49, p. 133 et Bulletin CFB 50, p. 65.
25
   Bulletin CFB 51, p. 70.
26
   Bulletin FINMA 1/2010, pp. 104, 111-113.
27
   Bulletin CFB 41, p.15, Bulletin CFB 47, p. 21, Bulletin FINMA 1/2010, pp. 50-51.

                                                     12
conséquences négatives sur la garantie d’une activité irréprochable des organes de
         direction.

         IV. L’organisation de l’intermédiaire financier
19.      Comme nous l’avons vu précédemment, l’intermédiaire financier doit requérir une
         autorisation d’exercer une activité bancaire de la part de la FINMA. Une des conditions
         devant être remplie est celle d’une organisation interne appropriée (art. 3 al. 2 let. a LB).
         Cette dernière nécessite notamment le pouvoir d’imposer des directives reposant sur des
         règles d’attribution des tâches, de compétence et de comportement.28 Elle nécessite aussi
         des mécanismes de contrôle adaptés et efficaces. Pour remplir cette exigence, la banque
         doit, notamment, disposer d’organes chargés de la haute direction, de la surveillance et
         du contrôle et d’organes chargés de la direction.29 L’organisation de l’intermédiaire
         financier devra être telle qu’il puisse déterminer, limiter et contrôler tous les risques
         auxquels il peut être confronté. Lors de la sollicitation d’une licence bancaire,
         l’intermédiaire financier devra également démontrer qu’il bénéficie d’organisation
         adéquate du point de vue logistique et informatique, il devra faire part à l’autorité de
         surveillance d’éventuels accords d’externalisation de prestations de service. L’existence
         et la fonctionnalité d’un système informatique adéquat font parties des exigences devant
         être satisfaites préalablement à la demande d’autorisation d’exercer. La société de
         révision devra d’ailleurs prendre position sur la satisfaction de cette condition vis-à-vis
         entre autres de la séparation adéquate des compétences, notamment dans l’octroi des
         accès informatiques.

               a. Du point de vue interne

                  i. Au niveau du Conseil d’administration
20.      L’article 3 al. 2 let. a LB correspond à l’article 716a CO définissant les attributions
         intransmissibles et inaliénables du Conseil d’administration d’une société anonyme.

28
     B. STÖCKLI, pp. 584-588.
29
     C. LOMBARDINI, p. 45 N. 11.

                                                   13
Dans le domaine bancaire, les attributions du Conseil d’administration ont été étoffées et
      complétées par des dispositions spéciales se trouvant dans la législation bancaire et plus
      particulièrement dans la circulaire sur la surveillance et le contrôle interne dans le
      secteur bancaire (ci-après circulaire FINMA 08/24).30
21.   Le Conseil d’administration est ainsi l’organe chargé de la haute direction de la banque,
      de sa surveillance et de son contrôle. Il est également tenu de fixer son organisation. A la
      différence de la direction, le Conseil d’administration n’est pas tenu de gérer la banque,
      mais uniquement d’en assurer la haute surveillance. Par l’attribution de la haute
      direction de l’établissement, le Conseil d’administration a pour tâches plus spécifiques
      de déterminer la politique de gestion des risques choisie par la banque, il doit également
      veiller à ce que la banque dispose des moyens financiers et personnels pour suivre la
      politique choisie. Le Conseil d’administration a la responsabilité d’édicter les principes
      généraux inhérents à la gestion des risques et de veiller à ce que ceux-ci soient mis en
      place par la direction et que les mesures visant à l’identification, la gestion et à la
      surveillance des risques soient implémentées par l’établissement.31 Comme nous le
      verrons plus tard, le Conseil d’administration a également la responsabilité de mettre en
      œuvre la Recommandation de l’ASB en matière de Business Continuity Management et
      de veiller au respect d’une stratégie en la matière sous forme écrite.32
22.   Concernant la gestion des risques, le Conseil d’administration doit, afin de satisfaire à
      ses obligations, mettre en place un système lui permettant d’être régulièrement informé
      sur la situation de l’établissement et sur son exposition aux risques. A cette fin, le
      Conseil d’administration doit mettre en place un système de reporting et d’information
      des risques qui doit être efficient, périodique et fonctionnel, mais qui doit également être
      un système permettant de délivrer des informations adaptées.33 Conformément au chiffre
      marginal 9 de la circulaire FINMA 08/24, le Conseil d’administration est également tenu
      de réglementer, d’instaurer, de maintenir, de surveiller et de valider un contrôle interne
      approprié. En instaurant ce système de contrôle interne, et en le surveillant, le Conseil
      d’administration s’assure que tous les risques inhérents à l’établissement ont été

30
   P. HAURI, pp. 25-32.
31
   C. LOMBARDINI, p.49 N. 26; P. HAURI, A. CARRI, p. 1235.
32
   Recommandation en matière de Business Continuity Management (BCM), p. 6.
33
   P. HAURI, A. CARRI, p. 1235.

                                                  14
identifiés, limités et surveillés.34 Le Conseil d’administration est tenu de vérifier que la
      révision interne dispose des ressources et des compétences adéquates, y compris en
      matière informatique, et pour la surveillance appropriée des risques auxquels la banque
      est exposée, dont également ceux liés aux technologies informatiques. Le Conseil
      d’administration a de ce fait la compétence d’approuver les accords relatifs à
      l’externalisation de prestations de service, y compris ceux liés à ce domaine-là.
23.   Comme nous l’avons vu au sujet de la garantie de l’activité irréprochable, l’autorité de
      surveillance a précédemment estimé qu’une lacune dans l’identification des risques de
      réputation et des risques juridiques est susceptible de contrevenir à la garantie de
      l’activité irréprochable dont les administrateurs sont notamment les sujets. 35

24.   Le Conseil d’administration est composé de personnes devant disposer des compétences
      professionnelles, d’expérience et de disponibilités nécessaires à l’accomplissement de
      leurs fonctions, notamment au vu des domaines d’exposition de la banque. Dans le cas
      contraire, l’autorité de surveillance pourrait estimer que la condition de la garantie de
      l’activité irréprochable, applicable notamment aux personnes chargées d’administrer,
      n’est pas remplie. Afin d’éviter les conflits d’intérêts, les administrateurs doivent être
      indépendants. Il est ainsi interdit aux membres du Conseil d’administration d’occuper un
      poste dans la direction opérationnelle de la banque.36 Le critère d’indépendance doit
      également être satisfait au regard des chiffres marginaux 20 à 24 de la circulaire FINMA
      08/24. Les membres du Conseil d’administration seront ainsi réputés indépendants s’ils
      n’occupent pas d’autre fonction au sein de l’établissement, ou s’ils n’ont pas occupé de
      poste au sein de l’établissement durant les deux dernières années, ni au sein de la société
      d’audit externe. Les membres du Conseil d’administration ne doivent également pas
      avoir de relations d’affaires qui pourraient conduire à un conflit d’intérêt, de même
      qu’ils ne doivent pas détenir de participation qualifiée, ni représenter un tel détenteur de
      participation.
25.   Concernant la répartition des tâches au sein du Conseil d’administration, ce dernier peut
      instaurer des comités chargés de le seconder ou confier des tâches à certains de ses

34
   Circulaire FINMA 08/24 cm 10.
35
   Bulletin CFB 49, p. 133; Bulletin CFB 50, p.65.
36
   Article 8 al. 2 OB, Circulaire FINMA 08/24 cm 18.

                                                       15
membres. L’établissement d’un audit committee est exigé dès lors que l’établissement
      atteint une certaine taille ou un certain niveau de complexité.37
26.   Le comité d’audit est chargé d’une tâche importante en matière de gestion des risques, il
      est entre autres tenu de créer le système de gestion des risques, de définir le profil de
      risque de l’établissement, d’évaluer et de surveiller le contrôle interne.38 Il peut aussi
      intervenir en matière de risques juridiques. Afin d’assurer un suivi approprié d’un sujet
      comme le vol de données, il est utile que le comité d’audit dispose en son sein d’une ou
      de plusieurs personnes compétentes dans le domaine informatique. Ces personnes
      seront, ainsi, plus à même d’évaluer, surveiller et gérer les risques liés au système
      informatique.
27.   L’article 9 al.2 OB dispose que la banque doit déterminer, limiter et contrôler les
      risques, notamment, opérationnels et juridiques, ainsi que les risques susceptibles de
      ternir sa réputation. On peut définir le risque opérationnel comme étant le risque pour la
      banque de pertes résultant de carences ou de défauts attribuables à des procédures,
      personnels et systèmes internes ou à des événements extérieurs. La définition inclut le
      risque juridique.39 Celui-ci inclut l’exposition à des amendes, pénalités et dommages
      pour faute résultant de la surveillance prudentielle ainsi que de transactions privées.40 La
      pratique de la CFB, puis de la FINMA, a mis en évidence qu’un manquement dans
      l’établissement des risques était propre à mettre en péril la garantie de l’activité
      irréprochable des membres du Conseil d’administration et par là même la garantie de
      l’activité irréprochable de l’établissement lui-même.41
28.   Ainsi comme nous l’avons vu, le Conseil d’administration est en charge notamment de
      l’organisation de la banque et de l’établissement des risques. On peut ainsi se demander
      si la garantie de l’activité irréprochable des membres du Conseil d’administration ne
      pourrait pas être remise en question dès lors que ceux-ci n’ont pas cerné le risque de vol
      ou de fuite de données dans leur établissement. En effet, comme mentionné
      précédemment, la pratique de l’autorité de surveillance tend à rapprocher la notion
      d’organisation adéquate à celle de la garantie de l’activité irréprochable. Elle fait de

37
   Circulaire FINMA 08/24 cm 28-29 et 32-37.
38
   C. TAGOUO, p. 604, Circulaire FINMA 08/24 cm 41à 53.
39
   Bâle II p. 121 disponible sur http://www.bis.org/publ/bcbs107fre.pdf. C. LOMBARDINI, p. 67 N. 86.
40
   Bâle II, p.121 nbp N. 90.
41
   Bulletin CFB 49, p. 133; Bulletin CFB 50, p. 65.

                                                     16
même pour la gestion des risques. Ainsi un tel manquement peut amener à la conclusion
      que les membres du Conseil d’administration, mais également l’établissement bancaire
      lui-même, ne respectent plus cette exigence impérative à l’exercice de l’activité
      bancaire.

                 ii. Au niveau de la direction
29.   La direction est l’organe en charge de la gestion de la banque, elle est tenue de mettre en
      application les politiques de gestion adoptées par le Conseil d’administration et de
      prendre des mesures opérationnelles pour limiter les risques identifiés par ce dernier.
      Elle est en particulier affectée de la tâche de l’élaboration des procédures appropriées
      pour identifier, mesurer, évaluer, analyser et contrôler les risques pris par l’établissement
      (Circulaire FINMA 08/24 cm 81). Elle est en charge aussi de la fonction compliance et
      du contrôle des risques. A noter que la mise en œuvre du dispositif de gestion des
      risques peut nécessiter la création d’un poste spécifique de risk manager dont la tâche
      est de s’assurer que le système de gestion des risques soit appliqué par les personnes
      concernées.42
30.   La direction doit veiller à contrôler l’application des règlements internes et à
      l’organisation appropriée de l’établissement conformément à l’article 3 al.2 let a LB.
      Ainsi une surveillance insuffisante de la part de la direction sera considérée comme
      contraire à la garantie de l’activité irréprochable.43
31.   En matière informatique, la direction est tenue de s’assurer que la banque dispose d’un
      système informatique performant et en adéquation avec l’activité de la banque.44 Elle est
      aussi en charge de superviser le système d’information à l’intérieur de son établissement
      et de veiller à ce que la ségrégation des compétences, de façon générale, soit maintenue,
      ce qui inclut notamment la vérification du respect des compétences et des autorisations
      pour l’octroi et la modification des accès informatiques.45

                 iii.Au niveau de la révision interne
32.   Chaque établissement est tenu d’instaurer une révision interne ou aussi appelée
      inspectorat (art. 9 al.4 OB). Dans certains cas, la FINMA peut exempter, après
42
   C. TAGOUO, p. 604.
43
   Bulletin CFB 45, pp. 150, 159.
44
   C. LOMBARDINI, p. 52 N. 40.
45
   C. LOMBARDINI, p. 53 N. 44.

                                                 17
consultation avec la société d’audit, l’établissement de l’obligation d’instaurer une
      révision interne.46
33.   La révision interne occupe une position directement subordonnée au Conseil
      d’administration ou à l’un des ses comités. Ses tâches sont celles de l’évaluation des
      risques, de la planification de la révision et de l’émission de rapports à l’attention du
      Conseil d’administration. Elle fournit les éléments clés permettant au Conseil
      d’administration d’apprécier si l’établissement dispose d’un système de contrôle interne
      efficace et adapté à son profil de risque47 en d’autre termes, elle vérifie et évalue le
      contrôle interne et contribue à son amélioration.
34.   Il est utile de rappeler que la circulaire FINMA 08/24 définit le système de contrôle
      interne comme étant l’ensemble des structures et processus de contrôle qui, à tous les
      échelons de l’établissement, constituent la base de son bon fonctionnement et la
      réalisation des objectifs de politique commerciale. Il comprend à part les activités de
      contrôle a posteriori, les activités en rapport avec la gestion et la planification.
35.   La révision interne est tenue une fois par an de procéder à une évaluation globale des
      risques encourus par l’établissement notamment en tenant dûment compte des évolutions
      externes telles que le contexte économique, les modifications réglementaires, mais aussi
      en prenant en considération les facteurs internes pouvant se présenter au sein de
      l’établissement (les projets importants pouvant être réalisés par l’établissement ou
      encore à une réorientation de l’activité, par exemple).48 Une fois les conclusions de
      l’inspectorat déposées, la direction prend les mesures qui s’imposent en vue de parvenir
      à un système de contrôle de risques satisfaisant.
36.   A noter que la révision n’a pas le pouvoir d’émettre des directives, elle met uniquement
      en relief les défaillances du système de contrôle interne, à charge pour la direction de
      prendre les mesures adaptées pour y remédier. Précisons encore que l’autorité de
      surveillance n’a aucun contact direct avec la révision interne et n’est pas informée du
      contenu des rapports de cette dernière à moins qu’elle demande à en prendre
      connaissance.49

46
   Circulaire FINMA 08/24 cm 55.
47
   Circulaire FINMA 08/24 cm 69.
48
   Circulaire FINMA 08/24 cm 70.
49
   C. LOMBARDINI, p. 56 N. 55.

                                                 18
Cas pratique
       L’audit interne d’une banque a procédé à ses tâches d’évaluation des risques encourus. A
       l’achèvement de son examen, l’audit interne a émis un rapport dans lequel il relevait que
       les accès au fichier client n’étaient pas assez restreints, en d’autres termes un certain
       nombre d’employés avaient accès au fichier source contenant les données clients
       numérisées en même temps que l’accès à d’autres systèmes informatiques leur permettant
       ainsi de réconcilier les numéros clients aux opérations effectuées par ceux-ci. A l’issue de
       ce rapport, l’audit interne a relevé les carences de ce système et a demandé à la direction
       l’octroi d’un budget visant à remédier à des manquements concernant l’accès aux
       systèmes informatiques de la banque. La direction a refusé l’octroi du budget. Quid juris
       dans l’hypothèse où un vol de données est commis quelques mois après les constatations
       faites par l’audit interne ? Pour la direction ? Pour le Conseil d’administration ?

                 iv. Au niveau du compliance
37.     Le fondement de la fonction compliance a d’abord été exprimé dans les règles destinées
        à l’organisation de la société anonyme. En effet, l’article 716a CO dispose que le
        Conseil d’administration a, entre autres, pour attribution intransmissible et inaliénable
        d’exercer la haute surveillance sur les personnes chargées de la gestion afin de s’assurer
        que ces dernières respectent la loi, les statuts, les règlements et les instructions
        données.50 Le fondement a, par la suite, été exprimé spécifiquement dans la législation
        bancaire et plus particulièrement dans la circulaire FINMA 08/24. Celle-ci définit par
        compliance la conformité aux prescriptions légales, réglementaires et internes, ainsi que
        le respect des normes et règles déontologiques en usage sur le marché concerné. Ainsi
        lorsqu’on parle de risque de compliance, on entend par là le risque pour l’établissement
        d’enfreindre des prescriptions légales, réglementaires, pouvant engendrer des sanctions
        légales ou règlementaires, des pertes financières ou des atteintes à la réputation.
38.     Cette exigence de conformité à la loi est un élément fondamental de l’octroi et du
        maintien de l’autorisation d’exercer nécessaire à la banque pour exister, en effet elle
        constitue un des constituants permettant une gestion irréprochable au sens de l’article 3
        al.2 let. c LB.51 La FINMA a d’ailleurs rendu une décision dans laquelle elle déclare que

50
     C. SUHR BRUNNER, P. PORTMANN, p. 1041.
51
     Ibidem p. 1041.

                                                  19
les exigences en matière de compliance, en tant que concept et en tant que fonction,
      découlent directement des exigences organisationnelles visées à l’article 3 al.2 let. c
      LB.52 Elle précise également, dans cette même décision, qu’un comportement en affaires
      approprié suppose de la part des personnes chargées d’administrer et de gérer la banque
      qu’elles donnent elles-mêmes l’exemple et soutiennent une culture d’entreprise
      encourageant la compliance. Dans une autre décision, l’autorité de surveillance de
      l’époque, la CFB, avait aussi déclaré que la condition de l’organisation adéquate pouvait
      être remise en cause lorsque le service compliance ne satisfaisait pas à ses fonctions,
      dans la prise en compte des aspects réglementaires et de la prise en compte de risques, et
      par là même la condition de l’activité irréprochable pouvait être remise en question.53
39.   Afin d’assurer la compliance au sein de l’établissement, chaque banque doit créer un
      département se concentrant sur tout ce qui attrait à la fonction compliance, dont la
      responsabilité incombe à la direction.
40.   Concernant les tâches dévolues à la fonction compliance, elles sont nombreuses et
      comprennent entre autres la tâche d’appui et de conseil en matière d’application et de
      surveillance du respect des normes, puis d’évaluation annuelle du risque de compliance
      lié à l’établissement et la création d’un plan d’action centré sur le risque préalablement
      défini, ainsi que les modifications ultérieures relatives à l’évaluation du risque de
      compliance. Elle fournit également un appui à la direction en cas de manquements
      graves constatés en matière de compliance en la conseillant sur les instructions à donner
      ou les mesures à prendre.54
41.   Dans sa fonction liée au risque compliance, juridique et de réputation, le département
      compliance doit veiller à ce que toutes les normes légales, réglementaires ou de toutes
      autres niveaux soient respectées au sein de l’établissement. L’accomplissement de cette
      tâche nécessitera une interaction avec le département IT de l’établissement. En effet,
      dans différents domaines du droit, comme par exemple en matière de lutte contre le
      blanchiment d’argent, la loi pose des exigences liées au domaine informatique. Le
      compliance officer devra de ce fait collaborer étroitement avec le département IT afin de
      s’assurer que le système informatique fonctionne correctement et soit conforme aux

52
   Décision non publiée de la FINMA du 9 octobre 2009.
53
   Bulletin CFB 47, p. 20; Bulletin FINMA 1/2010, p. 45.
54
   Circulaire FINMA 08/24 cm108-112.

                                                     20
exigences légales. A cet effet, le département compliance identifiera les exigences
      légales auxquelles la banque doit se conformer et discutera avec le département IT des
      mesures techniques à prendre afin que ces exigences soient remplies (pensons à titre
      d’exemple, aux procédures à mettre en place pour l’application de la réglementation
      fiscale américaine FATCA qui se repose sur les procédures informatiques, etc…).

               v. Au niveau risk management
42.   La notion de gestion des risques ou risk management est une notion rarement utilisée de
      manière autonome, mais en général toujours en lien avec celle de système de contrôle
      interne. La circulaire FINMA 08/2455 définit la gestion des risques comme étant la
      gestion et la restriction complètes et systématiques des risques sur la base de
      connaissances économiques et statistiques. Elle comprend l’identification, la mesure,
      l’évaluation, la gestion et l’établissement de rapports sur des positions-risques
      individuelles ou agrégées. La gestion des risques est assurée, aux niveaux
      organisationnels appropriés, au moyen de méthodes adéquates qui tiennent compte des
      particularités de l’établissement. De cette définition, on comprend donc que la gestion
      des risques se rapporte à des méthodes et à des processus et non pas à un organe sociale
      au sens du Code des obligations suisse. A défaut d’être un organe, la gestion des risques
      est toutefois une véritable fonction à part entière, à l’instar de la fonction compliance, à
      la tête de laquelle doit être nommé un responsable, le risk manager.56
43.   La gestion des risques fait ainsi partie du système de contrôle interne que chaque
      établissement bancaire est tenu d’avoir. Elle implique la désignation de personnes en
      charge de ce processus, plus particulièrement en charge de l’identification, de la
      surveillance et de la prise de mesures relatives aux risques spécifiques aux activités de la
      banque, mais également aux risques globaux.57
44.   Cette personne aura également pour tâche de communiquer aux employés de
      l’établissement les risques identifiés par le Conseil d’administration et la manière dont
      ces risques seront monitorés et surveillés.

55
   Cm 126.
56
   C. TAGOUO, p. 601.
57
   C. LOMBARDINI p. 70 N. 92.

                                               21
b. Du point de vue externe
45.      L’établissement bancaire, en plus de devoir répondre à certaines exigences quant à son
         organisation interne, doit également respecter certaines règles concernant des aspects
         que nous pouvons qualifier d’externes à son organisation. Ainsi que nous le verrons,
         l’établissement est souvent confronté à des règles nécessitant pour lui de devoir régler
         certains aspects de son organisation vis-à-vis de problématiques externes.

                    i. Le cas de l’outsourcing
46.      Un point essentiel de l’organisation de la banque est celle de savoir si l’établissement
         souhaite externaliser certaines de ses prestations. Il y a externalisation ou outsourcing,
         lorsqu’une entreprise charge une autre entreprise, le délégataire, d’assurer pour elle de
         manière indépendante et durable une prestation de services. L’externalisation doit
         concerner des prestations de services essentielles.58 Dans le domaine bancaire, la
         délégation de prestations de services à une entreprise tierce fait l’objet d’une
         réglementation spéciale, en l’occurrence la circulaire FINMA 08/7.
47.       La circulaire FINMA 08/7 concernant l’externalisation d’activités dans le secteur
         bancaire précise qu’on entend par prestations de services essentielles, les prestations de
         services qui peuvent en particulier avoir un effet sur la détermination, la limitation et le
         contrôle des risques, notamment, opérationnels et juridiques, ainsi que des risques
         susceptibles de ternir sa réputation.59
48.      Dans le cas d’activités externalisées, le risque de fuite ou de vol d’information, et par là
         la violation du secret bancaire est décuplée. En effet, la banque décide d’elle-même de
         transmettre volontairement à des tiers des données pouvant susciter l’intérêt de
         personnes externes à celle-ci. De plus, en cas d’outsourcing à l’étranger le risque de
         perte de maîtrise se voit également coupler avec un risque d’accès et de saisie des
         données par une autorité étrangère ce qui augmente les risques pour l’établissement
         faisant recours à cette pratique.
49.      En soi l’externalisation de prestations de services n’est pas soumise à autorisation de
         l’autorité de surveillance, elle est néanmoins soumise à certains principes devant être

58
     Externalisation par les banques, FINMA, version du 1er avril 2009.
59
     Circulaire FINMA 08/7 cm 2.

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