LES METHODES DE LUTTE BIOLOGIQUE OU BIOTECHNIQUE CONTRE LES INSECTES ET ACARIENS NUISIBLES A LA VIGNE - Viticulture

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LES METHODES DE LUTTE BIOLOGIQUE OU BIOTECHNIQUE CONTRE LES INSECTES ET ACARIENS NUISIBLES A LA VIGNE - Viticulture
LES METHODES DE LUTTE BIOLOGIQUE OU BIOTECHNIQUE
 CONTRE LES INSECTES ET ACARIENS NUISIBLES A LA VIGNE

Auteurs :
Gilles SENTENAC Institut Français de la Vigne et du Vin – Beaune, gilles.sentenac@vignevin.com
Denis THIERY Institut National de Recherche Agronomique, UMR Santé Végétale 1065 – Bordeaux,
denis.thiery@bordeaux.inra.fr

Abstract                                  fusion, l’amélioration et la mise         point de méthodes alternatives
                                          au point de méthodes alterna-             de contrôle ainsi que le renfor-
The french conference ‘Grenelle           tives de contrôle des populations         cement des outils et réseaux de
de l’Environnement’ stated a re-          d’organismes nuisibles, ainsi             surveillance des bio-agresseurs.
duction of pesticide use of 2 times       que le renforcement des outils            Dans cette communication, nous
fold in the agriculture for the next      et réseaux de surveillance des            tentons de faire un point sur les
10 years. Following this confe-           bio-agresseurs.                           procédés alternatifs disponibles,
rence, the recent action schedule                                                   ainsi que sur les perspectives de
named ECOPHYTO 2018 listed 8              Nous tentons de faire un bilan            nouveaux moyens de lutte contre
major axes from which 3 encou-            des procédés alternatifs dispo-           les ravageurs qui pourraient se
rage to develop alternative me-           nibles, ainsi que des perspectives        développer en viticulture et donc
thods and to improve and rein-            qui pourraient se développer en           répondre à court ou moyen terme
force management tools and the            viticulture. Nous analysons dans          aux futurs impératifs environne-
monitoring strategies of pest and         cet exposé les succès mais aussi          mentaux. Notre angle sera limité
diseases. We present here the             les échecs et leurs causes ; mais         aux techniques ou méthodes qui
current biological and biotech-           aussi les perspectives d’avenir.          nous semblent présenter un réel
nical tools and approaches used           Nous considérons les insectes             potentiel.
in viticulture. Currently, mating         les plus nuisibles au vignoble : les
disruption with sexual phero-             vers des grappes, les cicadelles,         Nous analysons dans cet exposé
mones, sprays of Bt can be used           les cochenilles et les acariens.          les succès mais aussi les échecs
in France. Biological control may         Le grenelle de l’environnement            et leurs causes ; mais aussi
reveal in future an interesting           est une consultation nationale            les perspectives d’avenir. Nous
method. First assays were done            sous l’égide du ministère de              considérons les insectes les plus
using the egg parasitoid tricho-          l’agriculture, il a pour objectif de      nuisibles au vignoble : les vers
gramma sp., but larval parasi-            définir une stratégie de dévelop-         des grappes, les cicadelles, les
toids can be even more efficient at       pement durable permettant une             cochenilles et les acariens.
controlling pest or vector popula-        lutte efficace contre le réchauf-
tions. We also discuss the novel          fement climatique, une préserva-
techniques which could be deve-           tion de la biodiversité et une ré-
loped soon by applied research            duction des pollutions. Le vote de        État des lieux : des
(e.g. push-pull, sonic disruption         deux projets de loi d’orientation,        réussites et des
in leafhoppers, oviposition deter-        Grenelle 1 et Grenelle 2, seront
ring pheromones, new traps for            nécessaires pour initialiser sa
                                                                                    échecs
monitoring pests).                        mise en œuvre. Les mesures du
                                          plan d’action concernant l’agri-          Les viticulteurs disposent actuel-
                                          culture, et particulièrement la vi-       lement de moyens biotechniques
                                          ticulture, portent dans l’immédiat        ou biologiques pour contrôler les
Introduction                              sur un retrait des produits phyto-        insectes ou acariens. Pour une
                                          sanitaires les plus préoccupants.         compréhension plus aisée on li-
La récente conférence ‘grenelle           Il envisage à court terme la ré-          mitera le vocable de lutte biolo-
de l’environnement’ a fixé comme          duction de moitié des usages des          gique aux méthodes utilisant des
objectif une réduction drastique          pesticides. Suite à cette consul-         organismes vivants pour prévenir
des intrants phytosanitaires pour         tation nationale, le plan ECO-            ou réduire les dégâts causés par
les 10 prochaines années. Suite           PHYTO 2018, publié cet automne            des organismes nuisibles (OILB-
à cette consultation nationale,           par le Ministère de l’agriculture         SROP), le vocable de lutte bio-
le plan ECOPHYTO 2018, publié             et de la pêche fait état de 8 axes        technique aux méthodes basées
cet automne par le Ministère de           prioritaires (Ecophyto 2018). Les         sur l’utilisation de produits issus
l’agriculture et de la pêche fait         axes 2, 3 et 5 de ce plan encou-          d’agents biologiques (ex. mo-
état de 8 axes prioritaires dont 3        ragent explicitement la diffu-            lécules produites par des orga-
encouragent explicitement la dif-         sion, l’amélioration et la mise au        nismes vivants).

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Lutte biologique ou biotech-                du nombre d’accouplements en-                l’efficacité obtenue avec la confu-
nique contre les tordeuses de la            traîne celle du nombre d’œufs                sion est comparable à celle d’une
grappe                                      fertilisés et donc de chenilles qui          protection insecticide à la condi-
                                            rappelons-le est le seul stade               tion de recourir à une interven-
Lutte par confusion sexuelle                à l’origine des dégâts. Pour ce              tion insecticide complémentaire
Elle concerne actuellement en               faire on dispose en France 500               lorsqu’on est en présence d’une
Europe Lobesia botrana (Denis et            diffuseurs à l’hectare répartis de           forte pression. Une solution in-
Schiffermüller) et/ou Eupoecilia            manière homogène avec des dif-               téressante consiste alors à dimi-
ambiguella (Hübner). Le principe            fuseurs en tête de rangs assurant            nuer de temps en temps (voire en
de cette méthode repose sur la              une sorte de ceinture. Trois types           première génération) le niveau de
perturbation de la communica-               de diffuseurs sont homologués :              population afin d’augmenter l’ef-
tion sexuelle chez les insectes             RAK1 (cochylis), RAK2 (eudémis)              ficacité de la confusion. Un suivi
(photos 1 et 2). Les femelles d’Eu-         et RAK1+2 (eudémis+cochylis).                des infestations en fin de pre-
démis et Cochylis produisent des            En Suisse, la concentration de               mière génération est donc néces-
bouquets relativement complexes             250 Diffuseurs x ha-1 est parfois            saire pour évaluer la qualité de la
de molécules phéromonales dont              préconisée avec une ceinture ren-            protection, il est également pos-
les composants majoritaires sont            forcée. Jusqu’à 1000 diffuseurs x            sible en 2ème génération mais
respectivement la E7, Z9 acétate            ha-1 sont parfois utilisés comme             beaucoup plus fastidieux.
de dodécadiènyle et la Z 9 acétate          par exemple en production de
de dodécènyle.                              raisins de table en Murcie.                  Cette technique présente des
                                                                                         avantages : efficacité indépen-
La méthode, homologuée en                   Le positionnement des diffuseurs             dante du mode d’application,
France depuis 1995, consiste à              est préconisé avant le début du              absence de classement, respect
saturer l’environnement des tor-            premier vol sur une surface qui              de la faune auxiliaire, et pas de
deuses en phéromones sexuelles              ne peut être inférieure à 5 ha. En           toxicité avérée pour les verté-
de synthèse dans le but de déso-            deçà la probabilité que des fe-              brés. Ses inconvénients sont la
rienter les mâles et de réduire             melles fécondées à l’extérieur du            nécessité de mettre en place une
les accouplements. La réduction             dispositif viennent pondre dans la           lutte collective, de traiter une
                                                       zone protégée est éle-            surface minimale et d’effectuer
                                                       vée et le surcoût dû à            des observations et parfois des
                                                       la zone tampon est trop           traitements      complémentaires.
                                                       conséquent.                       Son coût reste relativement éle-
                                                                                         vé, de l’ordre de 145 à 250 € x
                                                         L’efficacité de cette           ha-1. En 2008, 17 000 ha (source
                                                         méthode dépend de               BASF) étaient traités en confu-
                                                         la densité en insectes          sion sexuelle, les deux tiers étant
                                                         sur le vignoble. Dans           localisés dans les vignobles sep-
                                                         des cas de fortes popu-         tentrionaux avec en tête la Cham-
                                                         lations, les accouple-          pagne suivie par la Bourgogne et
                                                         ments au hasard (sans           l’Alsace, le tiers restant corres-
                                                         l’aide de l’information         pondant aux vignobles de Bor-
Photos 1 : femelle d’Eudémis en position d’appel au      phéromonale) peuvent            deaux, du Languedoc-Roussillon
crépuscule émettant par sa glande abdominale extru-      suffire à générer des           et du Sud-Est.
dée une faible quantité (quelques nanogrammes) de        dégâts. Globalement
E7, Z9 acétate de dodécadiènyle (Image S. Rausher).

Photo 2 : position typique d’accouplement de Cochylis, la femelle recouvre le mâle (Image D. Thiéry).

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Toxines de micro-organismes             (Thrips). Positionné au stade tête      Molécule volatiles attractives
Toxines de Bacillus thuringiensis       noire (mode d’action par contact        pour les femelles :
Berliner (Bt) :                         mais surtout par ingestion), cet        Différentes plantes sont attrac-
La substance active de ce produit       insecticide d’origine naturelle         tives pour l’Eudémis et la Co-
bio-technique est une toxine pro-       présente une efficacité compa-          chylis. Les femelles d’Eudémis
duite par des bactéries gram+ (B.       rable aux références insecticides       sont attirées par différentes
thuringiensis) qui fabrique des         de synthèse, il respecte un grand       plantes hôtes qui peuvent servir
protéines toxiques sous forme           nombre d’auxiliaire, en particu-        de plantes pièges. Différentes
de cristaux. Cette toxine n’agit        lier T. pyri et K. aberrans. Une        plantes peuvent détourner les
que sur les insectes et particu-        seule spécialité est homologuée         femelles de la vigne comme par
lièrement les Lépidoptères. Les         sur vigne, le coût « produit » est      exemple la tanaisie (Tanacetum
cristaux ingérés par les larves         de l’ordre de 36 € x ha-1 (source       vulgare), ou l’urginée fausse
d’insectes sont solubilisés par         Coût des Fournitures 2008).             scille (Drimia maritima) utilisée
le PH alcalin de leur suc digestif,                                             en crête. Des chercheurs grecs
puis les enzymes digestives ac-         Lutte biotechnique à l’aide d’ex-       postulent que le romarin peut
tivent une endotoxine qui tue les       traits ou molécules extraites de        jouer aussi ce rôle (Références
cellules de l’épithélium digestif.      plantes                                 citées dans Thiéry 2008). La fonc-
Il s’ensuit une vacuolisation des       Pyrèthre, pyréthrine :                  tion des arômes de tanaisie a été
cellules et la perforation du tube      Extrait de différentes espèces de       bien étudiée chez l’Eudémis. Cer-
digestif. La chenille meurt entre       chrysanthèmes cet insecticide de        tains des monoterpènes produits
24 et 48h après ingestion des           la famille des pyréthrinoïdes pré-      par cette plante peuvent ainsi être
cristaux. Ce larvicide biologique,      sente une activité neurotoxique,        utilisés comme leurres olfactifs
sélectif de la faune auxiliaire, est    il agit par contact et provoque la      dans des pièges à femelles (voir
homologué en vignoble en pul-           paralysie des insectes. Deux spé-       § 2.1). L’huile essentielle de ta-
vérisation contre les vers de la        cialités ont bénéficié pour l’usage     naisie repousse aussi la ponte de
grappe, son positionnement est          cicadelle de la flavescence dorée       l’Eudémis (Gabel & Thiéry, 1994).
préconisé au stade tête noire. Il       (Scaphoideus titanus) d’une au-
est utilisé par 30% des viticul-        torisation en 2008 pour une mise        Huile de colza :
teurs en agriculture biologique         sur le marché et une utilisation        Une spécialité commerciale est
(Source ITAB). L’efficacité est         de 120 jours avec une échéance          autorisée en vigne pour l’usage
meilleure sur Eudémis que sur           le 28 août 2008.                        « Stades hivernants des ravageurs »
Cochylis. La faible persistance du
produit, ainsi que la sensibilité de    Huile de neem (Azadirachtine) :         Lutte biologique à l’aide de tri-
la toxine au rayonnement UV est         L’huile de neem dont le principe        chogrammes
un des facteurs limitant la géné-       actif majoritaire est l’azadirach-      Les trichogrammes, micro-Hy-
ralisation de son usage. Le coût        tine est inscrite à l’annexe IIB du     ménoptères appartenant à la fa-
d’un traitement Bt est de l’ordre       règlement CEE 2092/91 concer-           mille des Trichogrammatidae,
de 25 à 30 € x ha-1 (source Coût        nant le mode de production biolo-       présentent une taille le plus sou-
des Fournitures 2008).                  gique de produits agricoles mais        vent inférieure au millimètre. Ce
                                        n’a pas d’autorisation en France.       sont des parasitoïdes oophages
Toxine de Saccharopolyspora             L’azadirachtine est une molécule        de nombreux insectes, en majori-
spinosa Mertz et Yao (Spinosad) :       qui peut être extraite du neem          té des Lépidoptères. Les femelles
La bactérie Saccharopolyspora           (Azadirachta indica), arbre asia-       de trichogrammes pondent dans
spinosa produit des toxines dé-         tique dont l’huile des fruits peut      les oeufs de tordeuses. Elles
nommées spinosynes A et D qui           contenir des teneurs élevées de         peuvent se reproduire par voie
possèdent une très forte activité       cette molécule. Elle présente dif-      sexuée ou par parthenogénèse
insecticide. Une fois absorbé par       férentes actions chez les Lépi-         thélytoque (absence de mâles).
l’insecte, le Spinosad nom com-         doptères : elle est anti appétante      L’œuf hôte est tué très tôt et sert
mercial donné au mélange des            pour de nombreuses espèces de           de nourriture à la larve de tricho-
deux toxines, atteint le système        chenilles, bloque la mue, parfois       gramme. Différentes méthodes
nerveux central où il dépolarise        inhibitrice de la ponte et aussi de     de captures montrent que les
les neurones qui commandent les         la production de phéromone. Les         trichogrammes fréquentent les
muscles moteurs. Il en résulte          premiers essais sur Eudémis et          vignes, du mois d’avril au mois de
une paralysie de l’insecte qui ne       Cochylis se sont pour l’instant         novembre, c’est à dire durant une
peut plus s’alimenter et meurt          révélés décevants. Actuellement         période qui dépasse grandement
(source Dow AgroSciences). Le           les huiles de neem disponibles          la durée du dépôt des pontes des
champ d’activité porte sur les          contiennent des teneurs très va-        tordeuses Cochylis et Eudémis.
Lépidoptères (Cochylis, Eudé-           riables en azadirachtine, ce qui        Environ une dizaine d’espèces
mis, Eulia et Pyrale), les Diptères     est probablement un frein à l’uti-      de trichogrammes ont été trou-
(Drosophile) et les Thysanoptères       lisation de ce produit.                 vées dans les différents vignobles

LES METHODES DE LUTTE BIOLOGIQUE OU BIOTECHNIQUE CONTRE LES INSECTES ET ACARIENS NUISIBLES A LA VIGNE       3
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Européens (Thiéry, 2008), la plu-
part de ces espèces étant géné-
raliste c’est à dire parasitoïdes
d’œufs de plusieurs espèces de
papillons. En France des essais
de lâchers inoculatifs à grande
échelle ont été tentés avec 2 es-
pèces : Trichogramma cacoeciae
Marchal et Trichogramma brassi-
cae Bezdenko . Dans le cadre d’un
projet porté par l’INRA d’Antibes
et de Colmar, le CIVC, le SRPV de
Bourgogne et l’ITV de Beaune des
études ont été conduites de 1995
à 1997 afin évaluer l’efficacité de
ces parasitoïde utilisés comme
agent de lutte biologique contre
les tordeuses des grappes. Plu-
sieurs souches de T. cacoeciae
produites par l’INRA d’Antibes,
ont fait l’objet de lâchers sur
différents sites exempts de pro-
tection insecticide, afin d’éva-
luer leur efficacité. Grâce aux
connaissances du moment (cycle
biologique, besoins thermiques,
modèles de prévision) la coïn-
cidence spatio-temporelle des
lâchers et du dépôt de ponte a
systématiquement été obtenue.
Dans le meilleur des cas, la ré-
duction de dégâts a été de 60 %
par rapport à un témoin non trai-
té (voir graphiques 1 et 2) mais il
faut reconnaître qu’en moyenne
le niveau d’efficacité est insuf-
fisant, non compatible avec les
exigences de la pratique car bien
inférieur et plus irrégulier que
celui obtenu au moyen d’une pro-        Une meilleure connaissance de           lutte contre les acariens phyto-
tection insecticide ou d’une lutte      la dispersion et de la survie des       phages de la vigne en tant que
éco-éthologique.                        trichogrammes en condition              prédateurs de protection. Il s’agit
                                        de plein champ, est nécessaire          de Typhlodromus pyri Scheuten
Plusieurs essais réalisés en Al-        pour espérer améliorer les ré-          (majoritaire dans tous les vi-
sace, en Champagne ou en Bour-          sultats. D’autres espèces de tri-       gnobles sauf ceux du pourtour
gogne ont eu pour objectif de           chogrammes plus adaptées aux            méditerranéen, photo 3), Kampi-
vérifier la pertinence d’utiliser       conditions difficiles du vignoble       modromus aberrans (Oudemans)
des individus provenant de diffé-       (ex : T. evanscens) mériteraient        (espèce prépondérante en région
rentes origines, à développement        aussi d’être étudiées.                  PACA et Languedoc-Roussil-
continu ou ayant subi une dia-                                                  lon), Phytoseius finitimus Ribaga
pause, d’augmenter le nombre            Lutte biologique contre les aca-        (Corse) et Amblyseius andersoni
de lâchers par génération de 3 à        riens phytophages et les thrips         (Chant) (recensé dans quelques
12 tout en maintenant la densité        Les auxiliaires acariphages ma-         situations du Sud-Ouest).
de capsules à l’hectare à 500. Ces      jeurs appartiennent à la famille        Ces Phytoseiidae ou typhlo-
aménagements n’ont pas permis           des Phytoseiidae qui comprend           dromes dans le langage verna-
d’obtenir une efficacité techni-        à ce jour plus de deux mille es-        culaire, représentent une réelle
quement et économiquement               pèces décrites (De Moraes et            alternative à l’utilisation des aca-
acceptable. Pour l’instant, cette       al., 2004). Seules quelques unes        ricides, ils assurent une régula-
technique ne constitue pas une          d’entre elles sont considérées          tion naturelle des Tetranychidae
alternative à la lutte chimique.        comme jouant un rôle dans la            : Panonychus ulmi (Koch), Eote-

LES METHODES DE LUTTE BIOLOGIQUE OU BIOTECHNIQUE CONTRE LES INSECTES ET ACARIENS NUISIBLES A LA VIGNE         4
LES METHODES DE LUTTE BIOLOGIQUE OU BIOTECHNIQUE CONTRE LES INSECTES ET ACARIENS NUISIBLES A LA VIGNE - Viticulture
tranychus carpini (Oudemans) et          la flavescence dorée, peut consti-     Malgré cette réelle activité des
Tetranychus urticae Koch, des            tuer une impasse technique             parasitoïdes autochtones, les es-
Eriophyidae : Calepitrimerus vi-         puisque pour cet usage il n’y a        sais de lutte biologique par aug-
tis (Nalepa) et Colomerus vitis          pas à ce jour, d’insecticide sé-       mentation mettant en œuvre 10
(Pagenstecher). La prédation du          lectif homologué. Toutefois sans       lâchers successifs de 270 A. ato-
thrips Drepanothrips reuteri Uzel        que l’on puisse considérer qu’il       mus adultes/ha chacun, ou 9 lâ-
complète le spectre d’action de T.       s’agisse d’une règle, des suivis       chers successifs de 1730 A. ato-
pyri.                                    de populations effectués au sein       mus adultes/ha chacun, n’ont pas
La connaissance des effets non           de périmètres de lutte obligatoire     été couronnés de succès. Nous
intentionnels des produits phyto-        (Bourgogne, Aquitaine, Midi-Py-        ne disposons pas actuellement
pharmaceutiques sur T. pyri, K.          rénées) ont montrés que les Phy-       de moyen d’action pour augmen-
aberrans et P. finitimus est sans        toseiidae se maintenaient ou se        ter dans les situations qui le jus-
nul doute à l’origine d’une amé-         rétablissaient.                        tifient, le taux de parasitisme des
lioration significative de la situa-                                            œufs d’ E. vitis.
tion faunistique du vignoble.
                                         Lutte biologique contre les ci-        Lutte biologique contre Scaphoi-
                                         cadelles Empoasca vitis Göth,          deus titanus
                                         Scaphoideus titanus Ball               Grace à un soutien financier de
                                         Lutte biologique contre Empoas-        l’ONIVINS, l’INRA - Unité de Lutte
                                         ca vitis                               Biologique du Centre de Sophia
                                         Les auxiliaires qui participent à la   Antipolis a mené une prospection
                                         régulation des populations de la       en 2001 et 2002 dans la région des
                                         cicadelle des grillures sont nom-      Finger Lakes, région d’origine
                                         breux : Salticidae, Chrysopidae,       de S. titanus, afin d’identifier les
                                         Dryinidae, Pipunculidae, Myma-         auxiliaires spécifiques à cet Hé-
                                         ridae. Celui qui sans nul doute a      miptère. Le bilan des recherches
Photo 3 : femelle de Typhlodromus pyri   une action primordiale est le pa-      d’agents de lutte biologique fut
Scheuten - Ph. IFV – G. Sentenac         rasitoïde oophage de la famille        positif (Malausa, 2003), avec la
                                         des Mymaridae : Anagrus atomus         mise en évidence de relations
En effet une utilisation rationnelle     Linné (Sentenac, 2004). Bien que       faisant intervenir des Dryinidae
des produits phytosanitaires aux         son action ne soit pas régulière       : Lonchodryinus flavus Olmi,
effets non intentionnels connus          d’une année à l’autre, A. atomus       Anteon masoni Olmi, Gonatopus
est une condition nécessaire au          peut être à l’origine d’un taux        peculiaris Brues, Esagonatopus
maintien ou au rétablissement du         élevé de parasitisme des œufs          perdebilis Perkins, Esagonatopus
potentiel antagoniste naturel des        d’Empoasca vitis, au mieux, 78         niger Fenton, des Pipunculidae et
acariens phytophages. Lorsque            % des œufs de première généra-         des Mymaridae du genre Polyne-
les Phytoseiidae de protection           tion, 68 % des œufs de seconde         ma. Ces parasitoïdes introduits
sont présents sur vigne, l’acaro-        génération, sont naturellement         en quarantaine ont fait l’objet de
cénose offre un équilibre stable         parasités (voir graphique n°3).        beaucoup d’efforts pour tenter
au sein duquel les tétranyques                                                  d’en pérenniser l’élevage en la-
et les phytoptes n’ont plus le
statut de ravageurs. Pour per-
mettre aux Phytoseiidae de se
maintenir ou de recoloniser le
vignoble afin d’exercer pleine-
ment leur rôle d’agents naturels
de régulation des populations
d’acariens phytophages un sché-
ma décisionnel a été proposé aux
viticulteurs (Kreiter et Sentenac,
1995). Ce dernier permet d’éta-
blir un programme de traitement
en adéquation avec les besoins
phytosanitaires locaux tout en
limitant autant que faire se peut
l’emploi de spécialités ayant un
effet toxique vis à vis des typhlo-
dromes de protection. La lutte
obligatoire contre Scaphoideus
titanus Ball, cicadelle vectrice de

LES METHODES DE LUTTE BIOLOGIQUE OU BIOTECHNIQUE CONTRE LES INSECTES ET ACARIENS NUISIBLES A LA VIGNE        5
LES METHODES DE LUTTE BIOLOGIQUE OU BIOTECHNIQUE CONTRE LES INSECTES ET ACARIENS NUISIBLES A LA VIGNE - Viticulture
boratoire, malheureusement ef-              Lutte biologique contre les                 État des recherches
       forts restés vains, aucune espèce           cochenilles farineuses (Pseu-               plus ou moins avancées
       n’a pu être maintenue en élevage.           dococcidae)
       Dans ces conditions, l’étude a été          Les stratégies mises à la dispo-            et perspectives
       orientée vers un parasitoïde au-            sition des viticulteurs pour lutter
       tochtone mis en évidence en 2003            contre les cochenilles farineuses           Amélioration des techniques
       en Languedoc-Roussillon : Gona-             reposent sur l’emploi d’insec-              de piégeage et des relations
       topus clavipes (Thunberg) (photo            ticides neurotoxiques. En l’ab-             captures dégâts.
       4). Sa présence a été confirmée             sence d’alternative, nous avons             Les pièges sexuels utilisés contre
       lors d’un inventaire faunistique            évalué en conditions de plein               les vers de grappes sont main-
       réalisé de 2004 à 2007 sur plu-             champ l’activité biologique du              tenant au point et largement
       sieurs sites viticoles de Bour-             prédateur Chrysoperla lucasina              utilisés. Outre leur facilité d’uti-
       gogne,      Languedoc-Roussillon            (photo 5) à l’égard d’une popula-           lisation, ils présentent l’inconvé-
       et Provence Alpes Côte d’Azur,              tion de Pseudococcidae compo-               nient de capturer uniquement les
       d’autres parasitoïdes ont égale-            sée d’ Heliococcus bohemicus et             mâles. Ils sont normalement uti-
       ment été mis en évidence, deux              de Phenacoccus aceris. Les lâ-              lisés comme marqueurs de dé-
       Dryinidae : Gonatopus lunatus               chers de printemps effectués sur            but de génération des tordeuses
       Klug et Anteon pubicorne (Dal-              les formes hivernantes de coche-            et la lecture des dynamiques de
       man), un Pipunculidae du genre              nilles en reprise d’activités, se           captures renseigne l’estimation
       Eudorylas. Les taux de régu-                sont révélés efficaces (Sentenac,           des dates de ponte. Toutefois de-
       lation relevés sont très faibles,           2008).                                      puis quelques années plusieurs
       généralement nuls ou voisins de                                                         vignobles ont régulièrement des
       1 %, exceptionnellement appro-                                                          problèmes avec l’interprétation
       chant les 5 %. Le parasitoïde le                                                        des résultats fournis par cet ou-
       plus couramment rencontré est                                                           til. On observe par exemple de
       G. clavipes, son élevage présente                                                       plus en plus souvent des pièges
       des contraintes : faible fécondité,                                                     qui commencent à capturer les
       mortalité importante à tous les                                                         mâles après l’observation des
       stades de développement, durée                                                          premiers oeufs. En outre aucune
       d’incubation des cocons non pré-                                                        corrélation entre niveau de cap-
       visible. Celles-ci sont peu com-                                                        ture et intensité des dégâts n’a
       patibles avec les objectifs d’une           Photo 5 : Prédation in situ d’une femelle   pu être établie ni chez Cochylis
       lutte biologique par augmenta-              de Pseudococcidae par une larve de Chry-    ni chez Eudémis. Un ancien outil
       tion. Suite à trois années d’étude,         soperla lucasina - Ph. IFV – G. Sentenac    apparu en 1919 a été récemment
       de 2005 à 2007, il s’avère que G.                                                       amélioré. Le piège alimentaire
       clavipes n’est pas un agent de              La régulation opérée sur la géné-           attire en majorité des jeunes
       lutte biologique efficace contre            ration n de cochenilles farineuses          femelles, vierges ou en début
       S. titanus. La lutte biologique             se répercute sur la génération              d’activité de ponte (Thiéry et al,
       par augmentation contre S. tita-            n+1. En présence de fourmis et              2006). Les essais conduits depuis
       nus au moyen de ce parasitoïde              de femelles de P. aceris, il est né-        quelques années en vignobles
       ne constitue pas une alternative            cessaire de placer un anneau de             de Cognac, des Pyrénées-Orien-
       satisfaisante dans la mesure où             glu sur le tronc des ceps afin de           tales ou du Bordelais montrent
       elle n’a pas permis d’obtenir un            protéger les larves de C. lucasi-           des niveaux de captures impor-
       niveau de régulation supérieur à            na d’une agression qui leur serait          tants, mais aussi que les dates
       celui que présente le parasitisme           fatale. L’unique lâcher réalisé en          de début de captures permettent
       naturel.                                    période estivale n’est pas opérant          pratiquement toujours d’antici-
                                                   : les proies potentielles de petite         per de quelques jours les dates
                                                   taille sont trop diluées dans le            de ponte d’Eudémis (Thiéry et al,
                                                   feuillage et donc peu prédatées             2006). Des résultats intéressants
                                                   par les larves de chrysopes dont            ont aussi été obtenus en surveil-
                                                   les captures sont aléatoires.               lance des populations en Raisin
                                                   Le prix d’une boîte de quinze               de table en vallée du Rhône (Rey-
                                                   larves de C. lucasina étant de 5.50         naud et Thiéry, 2007).
                                                   € ht, la lutte biologique contre les
                                                   Pseudococcidae mettant en œuvre             Actuellement nous pensons que
                                                   ce prédateur généraliste ne peut            le développement du croisement
                                                   raisonnablement s’envisager que             de la lecture du piège sexuel et
                                                   sur des surfaces restreintes, li-           alimentaire peut permettre une
Photo 4 : G. clavipes parasitant une larve de S.
                                                   mitées aux foyers qui doivent être          meilleure évaluation des dates de
titanus - Ph. IFV – G. Sentenac                    repérés le plus tôt possible.               ponte chez l’Eudémis.

       LES METHODES DE LUTTE BIOLOGIQUE OU BIOTECHNIQUE CONTRE LES INSECTES ET ACARIENS NUISIBLES A LA VIGNE                 6
LES METHODES DE LUTTE BIOLOGIQUE OU BIOTECHNIQUE CONTRE LES INSECTES ET ACARIENS NUISIBLES A LA VIGNE - Viticulture
Le concept du push-pull appli-
qué aux vers de la grappe.
Des recherches ont permis de
caractériser des molécules pré-
sentes à la surface des œufs
dissuadaient la ponte des autres
femelles (Thiéry & Gabel, 1993 ;
Gabel & Thiéry, 1996). Ces mo-
lécules sont des acides gras et
esters dérivés et dissuadent ef-
ficacement la ponte. Toutefois
comme toute méthode répulsive,
elle n’exprime tout son potentiel
que lorsqu’on laisse aux femelles
                                        Schéma 1 : Exemple de gestion de stratégie de gestion du comportement de ponte
de papillons des cibles non trai-       telle qu’elle peut être proposée sur les vers de la grappe (Eudémis, Cochylis ou
tées. Ce concept ne sera vraiment       Eulia). Les grappes sont rendues dissuasives en les vaporisant par exemple avec des
efficace sur de grandes surfaces        phéromones dissuasives de ponte et des leurres de ponte imprégnés de stimulants
qu’en complétant la méthode             pourraient être accrochés dans les rangs de vigne. Une évolution consiste à augmen-
par une attraction des tordeuses        ter aussi l’attractivité à distance de ces leurres en leur faisant diffuser des arômes de
vers d’autres sites distants des        pièges alimentaires.
grappes afin que les femelles y
concentrent les pontes. L’objectif      certains vignobles (ex Sauternais             pectives en viticulture et mérite
est concrètement de rendre les          au printemps 2005) et jusqu’à                 des études conséquentes à large
grappes répulsives et de rendre         80% des chenilles (Marchesini                 échelle dans un futur proche.
attractifs et stimulants des sites      et Della Monta, 1994). Il semble
non sensibles aux dégâts (Sché-         aussi avoir un rayon d’action                 Adjonction de phagostimulants
ma 1).                                  important, est actif dès le prin-             aux formulations de Bt.
                                        temps et s’adapte bien sous dif-              L’adjonction de stimulants ali-
L’UMR Santé végétale INRA de            férents climats (Xuéreb & Thiéry,             mentaires des chenilles a été
Bordeaux travaille actuellement         2006). Nous avons travaillé ces               tentée afin d’augmenter la prise
à la caractérisation de stimulants      dernières années à décrypter la               de nourriture, et donc la dose
de ponte de l’Eudémis permettant        biologie et le comportement de                de Bt ingérée par les chenilles.
de réaliser des leurres de ponte.       cette espèce et d’un autre para-              Les essais ont porté principale-
D’autres substances très dissua-        sitoïde larvaire (Dibrachys cavus             ment sur les sucres. Un intérêt
sives ont aussi été expérimen-          (Walker), Chuche et al., 2006). Un            immédiat est de toute évidence
tées. Des phytoecdystéroides ont        autre parasitoïde présent dans                d’augmenter l’activité des formu-
montré des activités anti ponte         les vignobles chauds semble                   lations Bt contre la Cochylis que
appliqués à des doses très faibles      très efficace, il s’agit d’un diptère         l’on suspecte avoir un compor-
sur les grappes (Callas et al.          (Phytomyptera nigrina (Meigen))               tement alimentaire différent de
2006).                                  ( photo 7)(Thiéry et al., 2006). Le           l’Eudémis. Globalement les avan-
                                        développement d’une lutte bio-                cées sur l’adjonction de phagos-
Lutte biologique contre les tor-        logique avec ces différents auxi-             timulants aux formulations Bt se
deuses de la grappe au moyen            liaires utilisés soit isolément soit          sont montrées décevantes.
de parasitoïdes larvaires et            en combinaison au cours de la
nymphaux ou de prédateurs               saison présente de réelles pers-
Au moins une vingtaine d’es-
pèces d’insectes parasitent les
larves de vers de grappes et les
contrôlent naturellement, avec
des efficacités variables (Thiéry,
2008). Quelques parasitoïdes de
chenilles ont un très fort poten-
tiel de contrôle et méritent une
attention particulière (Thiéry et
al, 2001). Le plus fréquemment
rencontré dans les vignobles
Européens est un Hyménoptère
(Campoplex capitator (Aubert))
(photo 6). Il peut détruire plus Photo 6 : Campoplex capitator, Ph. IFV – G. Sentenac            Photo 7 : Phytomyptera nigrina, ph.
de la moitié des chenilles dans                                                                  D. Thiéry

LES METHODES DE LUTTE BIOLOGIQUE OU BIOTECHNIQUE CONTRE LES INSECTES ET ACARIENS NUISIBLES A LA VIGNE                     7
Augmentation du contrôle na-            sont décevants en vignobles.            sipylus (Walker) (photo 8) est en
turel biologique par gestion de         L’efficacité dépendra évidement         cours d’évaluation. Des cocci-
l’agrosystème.                          du nombre de mâles que l’on est         nelles prédatrices de Pseudococ-
Il a été montré que beaucoup            capable d’attirer, et qui reste ac-     cidae et de Coccidae seront à
d’insectes parasitoïdes ou préda-       tuellement faible, ainsi que des        l’étude dans un proche avenir, en
teurs voient leur efficacité amé-       taux d’accouplement. En outre           principe dès 2009.
liorée par la présence de fleurs        cette technique ne sera efficace
leur apportant nectar ou pollen,        que si les mâles attirés par le
voire des secrétions extra florales     polymère traité à la phéromone
(voir différents exemples dans          de synthèse présentent ensuite
Thiéry, 2008). Il faut toutefois se     un comportement normal d’ac-
limiter à ce qu’on appelle la biodi-    couplement avec les femelles, ce
versité fonctionnelle, c’est-à-dire     qui reste à démontrer.
se focaliser sur les auxiliaires qui
ont un rôle majeur de régulation        Contrôle des cicadelles au moyen
des populations de bioagres-            de la communication acoustique.
seurs. Les travaux concernant la        La confusion sonore de la com-
vigne sont en fait assez rares (voir    munication sexuelle n’est pas
références dans Thiéry 2008). Le        une idée nouvelle chez les cica-
                                                                                photo 8 : femelle d’H. bohemicus parasitée par
couvert végétal entre les rangs de      delles (Saxena & Kumar, 1980).          E. sipylus.Ph. IFV – G. Sentenac
vigne peut fournir des conditions       Ces auteurs interrompaient la
microclimatiques favorables aux         communication entre partenaires
auxiliaires résidant dans le vi-        en générant des sons de 200Hz.          Activité insectivore des auxi-
gnoble. Les auxiliaires de petite       Dans un travail très récent, Ma-        liaires vertébrés
taille semblent particulièrement        zzoni et collaborateurs (2008)          Peu d’informations sont dispo-
favorisés, ex : les Trichogrammes       montrent que Scaphoideus ti-            nibles au sujet des prédateurs
(Remund et Boller, 1991) ou Orius       tanus utilise des fréquences            insectivores tels que les oiseaux
sp. (Altieri, 1998). Nous ne dispo-     de l’ordre de 900Hz lors de ses         et les Chiroptères. Dans un pre-
sons actuellement pas de profils        comportements sexuels et que            mier temps nous nous intéresse-
culturaux clairs favorisant les ef-     la rencontre des sexes peut être        rons à ces derniers. Les espèces
fets bénéfiques des auxiliaires et      facilement perturbée en jouant          de chauves-souris européennes
nous manquons en fait de recul          sur les fréquences sonores. Dif-        sont quasiment toutes stric-
afin de juger du rôle exact de la       férentes équipes de recherche           tement insectivores. A ce titre
gestion du vignoble sur l’efficaci-     étudient actuellement les possi-        peut-on considérer ces mam-
té du contrôle biologique.              bilités d’une confusion sonore.         mifères comme des auxiliaires
                                        Dans un autre travail récent sur        des cultures en général, de la
L’‘Attract and kill’                    Empoasca vitis, la cicadelle verte,     vigne en particulier ?
Cette méthode est actuellement          l’ingestion de pousses de thé           Pour répondre à cette question,
en expérimentation contre les           traitées à l’huile de neem pertur-      nous allons entreprendre une
vers de la grappe. Elle est dé-         bait l’émission de vibrations par       étude préliminaire visant à identi-
rivée de l’arboriculture où elle        le mâle et reduisait la durée du        fier, au moyen de détecteurs à ul-
donne de bons résultats en par-         comportement d’accouplement             trasons portatifs, les espèces de
ticulier contre le carpocapse des       (Zhao Dong Xiang et al., 2005).         chauves-souris qui fréquentent
pommes ou la tordeuse orientale                                                 et chassent dans le vignoble. Si
du pêcher. Son principe consiste        Lutte biologique contre les             les premiers résultats obtenus
à imprégner un polymère de              cochenilles (Coccidae et Pseu-          l’autorisent, une recherche por-
phéromone, fabriquant ainsi des         dococcidae)                             tant sur leur régime alimentaire
fausses femelles en déposant            Dans le cadre d’un programme            ainsi que sur les éléments favori-
sur les sarments des gouttes de         soutenu financièrement par Vi-          sants leur présence pourra alors
ce polymère. Cet appât sexuel           niflhor, L’’INRA - Unité Expé-          être abordée au cours des années
est traité avec un insecticide de       rimentale de Lutte Biologique           suivantes. Les premiers travaux
contact afin de tuer les mâles.         – Centre de Sophia Antipolis et         effectués en 2008 montre que
Une évolution de la méthode             l’Institut Français de la Vigne et      huit espèces de chauves-souris
consiste à proposer des appâts          du Vin – Unités de Beaune et de         fréquentent le vignoble de Côte
sexuels sous forme de poudre            Colmar se proposent de mettre           d’Or.
à action insecticide de contact à       au point des méthodes de lutte
action lente en cherchant à em-         biologique contre les cochenilles
poisonner les femelles lors de          présentes sur vigne. Ainsi le pa-
l’accouplement. Actuellement les        rasitoïde spécifique d’Heliococ-
résultats de ces deux méthodes          cus bohemicus Sulc, Ericydnus

LES METHODES DE LUTTE BIOLOGIQUE OU BIOTECHNIQUE CONTRE LES INSECTES ET ACARIENS NUISIBLES A LA VIGNE             8
Conclusion                                     Attraction of Dibrachys cavus (Hymenopte-        biologique par augmentation. MONDIAVITI,
                                               ra, Pteromalidae) to its host frass volatiles.   1-2 décembre 2004 : 25-37
Hors situation de lutte obliga-                Journal of Chemical Ecology, 32 : 2721-          Sentenac G., 2008 – Chrysoperla lucasina
toire, ces vingt dernières années              2731.                                            (Lacroix) agent de lutte biologique contre
ont été le témoin d’une réduction              De Moraes G.J., Mc Murty J.A., Denmark           les cochenilles farineuses sur vigne He-
significative du nombre de traite-             H.A.,Campos C.B. 2004- A revised catalog         liococcus bohemicus Sulc et Phenacoccus
ments phytosanitaires visant les               of the mite family Phytoseiidae (pdf); Zoo-      aceris (Signoret). AFPP – In 8 ème Confé-
ravageurs de la vigne, tant par                taxa 434 : 1-494                                 rence Internationale sur les Ravageurs en
la mise en application de la lutte             Gabel, B. and Thiéry, D. 1994 - Non-host         Agriculture. Montpellier. 22 et 23-X-2008.
raisonnée que par l’adoption des               plant odor (Tanacetum vulgare; Asteracea)        Thiéry, D. 2005 - Les vers de la grappe. Les
rares méthodes de lutte alterna-               affects the reproductive behaviour of Lobe-      connaître pour s’en protéger. Guides tech-
tives disponibles. Il est nécessaire           sia botrana Den. et Schiff. (Lepidoptera         niques, Vignes et vins international publica-
de maintenir cette dynamique qui               Tortricidae). Journal of Insect Behaviour        tions, Bordeaux, France.
aboutira dans les années à venir               7:149-157                                        Thiéry, D. 2008- Les tordeuses nuisibles à
à une palette de méthodes non                  Gabel, B. and Thiéry, D. 1996 - Oviposition      la vigne, in Ravageurs de la vigne, Féret,
polluantes pour l’environnement                response of Lobesia botrana females to           Bordeaux.
et ne présentant pas de risques                long-chain free fatty acids and esters from      Thiéry, D. and Gabel, B. 1993 – Interspecific
pour le viticulteur. La viticulture            its eggs. Journal of Chemical Ecolology, 22,     avoidance of egg-associated semiochemi-
doit aussi se préparer à accep-                161-171.                                         cals in four tortricids. Experientia , 49, 998-
ter l’usage de méthodes à effets               Kreiter S. et Sentenac G. 1995 – Gestion des     1001.
parfois partiels pour contrôler les            populations d’auxiliaires : recolonisation       Thiéry, D. and Xuéreb, A. 2003 - Relative
bio-agresseurs. La combinaison                 naturelle ou introduction de phytoseiides        abundance of several larval parasitoids of
de différentes méthodes com-                   en vignobles ? Compte rendu de la journée        Lobesia botrana on different varieties of
plémentaires au cours du cycle                 d’informations sur les auxiliaires entomo-       grapes. IOBC/wprs Bulletin, 26,135-139
du bioagresseur sera certaine-                 phages, Valence 15-XI-1995,F. Leclant and        Thiéry, D. and Xuéreb, A. 2004 - Vers une
ment une voie d’avenir ; comme                 J.-N. ,Reboulet éds. Pub. Paris : 49-63.         lutte biologique contre Eudémis (Lobesia
par exemple le push pull (cf infra)            Malausa J-C., Nusillard B., Giuge L.,2003.       botrana). In: Conf. Mondiaviti Bordeaux, 47-
ou des lâchers combinés d’auxi-                Bilan des recherches sur l’entomofaune           52.
liaires intégrés dans des plans                antagoniste de Scaphoideus titanus en            Thiéry, D., Rétaud, P., Dumas-Lattaque, L.
d’aménagements écologiques du                  Amérique du Nord en vue de l’introduction        2006- Piégeage alimentaire de l’Eudémis
vignoble. Elles seront utilisées en            d’auxiliaires en France. Phytoma La Dé-          de la vigne. Un outil intéressant et perfor-
fonction de leur adaptation aux                fense des Végétaux n° 564, 24-27.                mant pour la description de la dynamique
conditions du vignoble (notion de              Marchesini, E. and Della Monta, L.D. 1994        des vols et des pontes. Phytoma – La dé-
lutte de précision).L’avenir passe             - Observations on natural enemies of Lobe-       fense des végétaux, 592 : 27-30.
aussi par l’apport d’innovations               sia botrana (Den. et Schiff.) (Lepidoptera,      Thiéry, D., Xuéreb, A., Villemant, C., Sente-
dans le domaine de la diffusion                Tortricidae) in Venetian vineyards. Bolletin     nac, G., Delbac, L., Kuntzman, P. 2001 - Lar-
ou de l’application de média-                  Zoologica Agraria Bachicoltura, 26: 201-         val parasites of vineyards tortricids: a brief
teurs chimiques régulateurs de                 230.                                             overview from 3 french vine growing areas.
comportements. La recherche et                 Mazzoni V., Presern J., Lucchi A. and Vi-        IOBC/wprs bulletin, 24,135-142.
le développement devront ainsi                 rant-Doberlet M. 2008- Reproductive              Thiéry, D., Yoshida, T., and Guisset, M. 2006-
étroitement collaborer pour que                strategy of the neartic leafhopper Scaphoi-      Phytomyptera nigrina (Meigen)( Diptera,
les marges de progression soient               deus titanus Ball. (Hemiptera Cicadelli-         tachinidae) parasite of the first generation
réelles.                                       dae). Bulletin of Entomological Research,        of the European grapevine moth larvae in
Toutefois il serait illusoire d’oc-            in press                                         several vineyards of the Roussillon area.
culter les inévitables coûts de                Reda Abd el Monsef, A.I. 2004- Biological        Tachinid times, 19, 1-4.
certaines de ces méthodes d’ave-               control of grape berry moths Eupoecilia          Thiéry D., Retaud P., Dumas Lattaque L.
nir, et ce point doit être intégré en          ambiguella HB. and Lobesia botrana Den.          2006 –Piégeage alimentaire de l’Eudémis
amont dans une stratégie de dé-                et Schiff. (Lepidoptera Tortricidae) by using    de la vigne : un outil intéressant et perfor-
veloppement de méthodes nou-                   egg parasitoids of the genus trichogramma.       mant pour la description de la dynamique
velles.                                        Thesis Universität Giesen, 103p. http://geb.     des vols et des pontes. Phytoma, 592, 27-
                                               uni-giessen.de/geb/volltexte/2004/1469/          30.
                                               pdf/IbrahimReda-2004-03-29.pdf                   Reynaud C. et Thiéry D. 2007- Eudémis sur
Références                                     Saxena K.N., and Kumar H. 1980-Interrup-         raisin de table. Piégeage alimentaire et
                                               tion of acoustic communication and mating        sexuel : le duo gagnant. L’arboriculture, 620
Callas D, Thiéry D, Marion- Poll F (2006) -    in a leafhopper and a planthopper by aerial      & 621. 44-46.
20-hydroxyecdysone deters oviposition and      sound vibrations picked up by plants. Expe-      Zahao Dong Xiang, Gao Jinglin, Xu Hanhong
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moth, Lobesia botrana. Journal of Chemical     Sentenac G., 2004 – Les antagonistes natu-       fluence of neem to accoustic communica-
Ecology, 32, 2443-2454.                        rels de la cicadelle des grillures Empoasca      tion of tea leafhopper Empoasca vitis. Jour-
Chuche, J., Xuéreb, A. and Thiéry, D. 2006 –   vitis Goethe. Étude de faisabilité d’une lutte   nal of Tea Science, 25, 136-140.

LES METHODES DE LUTTE BIOLOGIQUE OU BIOTECHNIQUE CONTRE LES INSECTES ET ACARIENS NUISIBLES A LA VIGNE                                 9
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