PEINTURE ANGLAISE L'ÂGE D'OR DE LA DE REYNOLDS À TURNER - DOSSIER PÉDAGOGIQUE - Musée du Luxembourg
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1 _ DOSSIER PÉDAGOGIQUE _ 11 SEPTEMBRE 2019 16 FÉVRIER 2020 L’ÂGE D’OR DE LA PEINTURE ANGLAISE DE REYNOLDS À TURNER
2 Présentation de l’exposition L’exposition L’âge d’or de la peinture anglaise. De Reynolds à Turner a été élaborée par Martin Myrone, conservateur en chef de la Tate Britain et Cécile Maisonneuve, conseiller scientifique à la Rmn – Grand Palais à partir des chefs d’œuvre de la Tate Britain de Londres. Le long règne de George III, qui s’étend de 1760 à 1820, constitue une période décisive de transformation de la société, d’affirmation du pays sur la scène internationale et d’essor artistique et culturel. La volonté de créer une école nationale aboutit à l’émergence de fortes personnalités artistiques. Reynolds, Gainsborough, Stubbs, Turner ou encore Blake : les peintres de cet âge d’or s’expriment dans une étonnante diversité de styles, savent adapter leur production à l’évolution du marché et l’élèvent par la réflexion théorique. L’exposition se compose de 7 sections thématiques : Elle s’ouvre sur les deux figures tutélaires de la période : Joshua Reynolds et Thomas Gainsborough. La deuxième section, Portraits, images d’une société prospère, se concentre sur l’évolution de ce genre majeur de la peinture anglaise. Richard Wilson, La Tamise près de Marble Hill, Twickenham, 1762, huile sur toile, 46,4 x 73 cm, © Tate, London, 2019 Dynasties et familles, images d’un entre-soi : cette partie de l’exposition revient sur l’émergence de nouvelles solutions pour représenter le groupe familial. Le spectacle de la nature : la section est consacrée Sommaire au développement de la peinture de paysage ainsi 2 - Présentation de l’exposition qu’à la peinture animalière. 3 - Pistes pédagogiques Peindre à l’aquarelle : un petit cabinet d’art graphique 4 - Chronologie expose les expérimentations permises par cette technique, 5 - 6 La rivalité Reynolds – Gainsborough en particulier dans la peinture de paysage réalisée sur le motif*. 7 - 8 - Le portrait 9 - La peinture de genre Aux frontières de l’Empire : des toiles surprenantes illustrent 10 - 11 Le paysage l’image que l’empire britannique se donnait de lui-même 12 - Images de l’Empire à travers le travail de peintres-voyageurs. 13 - Le renouveau de la peinture d’histoire 14 - Glossaire La peinture d’histoire, contradictions et compromis : 15 - Bibliographie l’exposition se clôt sur quelques-uns des chefs d’œuvres * Les mots suivis d’un astérisque du romantisme anglais. sont définis dans le glossaire.
3 Pistes pédagogiques L’exposition L’âge d’or Dans le cadre du Parcours stimule l’imaginaire tandis de la peinture anglaise. d’Education Artistique que quelques œuvres De Reynolds à Turner et Culturelle, l’exposition surprenantes peuvent suit une approche « art et permet d’aborder le genre susciter des questions société », qui vise à replacer du portrait sous ses (sur la place des femmes la peinture de l’époque différentes formes, celui et des enfants dans dans son contexte, celui du du paysage ainsi que de les représentations, vigoureux développement la scène de genre. sur la colonisation, sur le industriel, économique et traitement des animaux...) colonial du Royaume-Uni. Enfin, l’exposition, conçue et donner lieu à un travail La visite permet donc comme un véritable voyage sur l’expression ou bien naturellement de tisser des dans une époque éloignée, à des débats d’idées. liens avec un programme d’histoire ou de civilisation britannique. Elle peut aussi être l’occasion d’approfondir un cours sur les Lumières et sur la naissance de la sensibilité romantique au tournant du XVIIIe et du XIXe siècle. Elle offre des rapprochements avec un travail sur la littérature anglaise, extrêmement féconde à cette période, et entre en résonance, entre autres, avec des œuvres de Jane Austen, de Lord Byron, de John Keats, ou encore de Mary Shelley. Petit + : Outre ce dossier pédagogique, vous trouverez sur le site internet du Musée, www.museeduluxembourg.fr un livret-jeux pour les enfants âgés de 7 ans et plus, mais aussi des vidéos, des textes divers ainsi que des conférences enregistrées. Consultez l’onglet « Ressources » pour préparer ou Thomas Gainsborough, Gainsborough Dupont, vers 1770-1775, huile sur toile, prolonger votre visite 44,5 x 36,2 cm, © Tate, London, 2019
4 Chronologie 1727 : mort de George 1er. Naissance de Thomas Gainsborough. 1760 : début du règne de George III. 1763 : le Traité de Paris met fin à la Guerre de sept ans. L’Angleterre est à la tête d’un vaste empire colonial. 1768 : création de la Royal Academy* à Londres. Reynolds en est le premier président. 1773 : Gainsborough, mécontent de la façon dont ses œuvres sont accrochées, les retire de l’exposition de la Royal Academy. 1783 : le traité de Versailles donne l’indépendance à 13 colonies américaines. 1788 : mort de Thomas Gainsborough. 1789 : prise de la Bastille. Joshua Reynolds, Le Colonel Acland 1792 : mort de Reynolds. et Lord Sydney, dit aussi Les Archers, 1769, huile sur toile, 236 x 180 cm, Benjamin West lui succède à © Tate, London, 2019 la tête de la Royal Academy. 1793 : L’Angleterre entre 1805 : victoire des Anglais 1820 : Mort de George III. en guerre contre la France à la bataille de Trafalgar. George IV devient roi. révolutionnaire. Thomas Lawrence devient peintre 1807 : abolition de la Traite 1837 : début du règne ordinaire du roi. négrière dans l’empire la reine Victoria. britannique. 1802 : grâce à la paix d’Amiens, les artistes anglais 1810 : George IV devient se rendent en France et prince-régent. découvrent au Louvre de nombreuses œuvres 1815 : Napoléon est défait rapportées par Bonaparte à Waterloo. de ses campagnes d’Italie.
5 La rivalité Reynolds – Gainsborough Les critiques de la deuxième Cette rivalité se joue moitié du XVIIIe siècle dans un contexte artistique se sont plu à exacerber et historique très riche. la rivalité entre Joshua Rapidement, Reynolds Reynolds et Thomas et Gainsborough se retrouvent Gainsborough, les deux concurrencés par d’autres artistes les plus importants artistes, comme Johan Zoffany de la période. Tous deux (1733 – 1810), Thomas peintres du Roi, membres Lawrence (1769 – 1830), fondateurs de la Royal ou encore George Romney Academy*, ils nourrissaient (1734 – 1802). Cette floraison également de grandes artistique s’explique en partie ambitions artistiques. Tout par le développement d’une en s’admirant mutuellement, bourgeoisie industrielle les peintres ont entretenu et marchande avide de une intense compétition qui reconnaissance sociale, s’est jouée sur le terrain des qui devient une clientèle œuvres, chacun cherchant à à la demande importante. se démarquer et à dépasser La période est aussi marquée Né dans le Devon, au Sud- l’autre par son inventivité par la pensée des Lumières, Ouest de l’Angleterre, Joshua artistique autant que par qui, en valorisant l’individu, Reynolds (1723 - 1792) est son brio technique. modifie profondément les un personnage cultivé et rapports sociaux. ambitieux. Il se forme dans la bibliothèque familiale avant de faire son apprentissage dans un atelier londonien. Il embarque ensuite pour un Grand Tour* en 1749 et passe notamment deux ans à Rome. De retour à Londres, il devient le portraitiste d’une clientèle aristocratique. Très marqué par l’univers du théâtre, il est aussi lié aux milieux politiques et intellectuels de son temps. En décembre 1768, il est élu premier président de la Royal Academy. Il développe ses théories sur l’art à travers quinze discours donnés dans cette institution et publiés par la suite. Joshua Reynolds, Autoportrait, vers 1775, huile sur toile, 73,7 x 61 cm, © Tate, London, 2019
6 Le développement des expositions publiques dès le début des années 1760 permet aux artistes d’exposer leurs œuvres et favorise l’émulation entre eux, tout en formant le goût des acheteurs. La fondation de la Royal Academy en 1768, par décret du roi, vient encore amplifier le phénomène. Offrant à la fois des occasions d’exposition régulières et une formation structurée, cette institution permet l’émergence d’une série de peintres bientôt reconnus internationalement. Soutenus par la Royal Academy, les peintres anglais cherchent à créer une école nationale. Pour cela, ils développent leurs recherches dans différentes directions, suivant leurs affinités (leur goût pour le paysage par Thomas Gainsborough riches commanditaires. exemple), mais aussi en (1727-1888) est originaire Il se familiarise avec fonction des demandes du Suffolk, à l’Est de les œuvres des maîtres d’une clientèle nouvelle, l’Angleterre. Très jeune, il anciens en visitant les issue des couches montantes est envoyé en apprentissage collections des environs. de la bourgeoisie, et qui à Londres, où il s’inscrit Il se montre en particulier apprécie particulièrement probablement à la très admiratif de la peinture les portraits et les scènes St Martin’s Lane Academy de Van Dyck. Personnalité de genre. C’est ainsi fondée par William plus discrète que son rival, que plusieurs genres Hogarth. Reconnu pour Gainsborough compte parmi picturaux connaissent des sa peinture de paysage, les membres fondateurs renouvellements formels Gainsborough comprend de la Royal Academy. Il sans précédent. pourtant rapidement que s’implique cependant moins seul le portrait lui permettra que Reynolds dans cette de gagner sa vie. En 1759, institution et cesse même, il s’installe dans la ville un temps, d’y envoyer des thermale de Bath, où il se toiles, estimant qu’elles y constitue une clientèle de sont mal accrochées. Johan Zoffany, Thomas Gainsborough, vers 1772, huile sur toile, 19,7 x 17,1 cm, © Tate, London, 2019
7 Le portrait Le portrait est un genre majeur en Angleterre, surtout depuis que les querelles religieuses du XVIe siècle ont fait disparaître les commandes ecclésiastiques et rendu risquées les représentations historiques. C’est d’abord dans ce domaine que, dès les années 1760, se développe un style proprement anglais, fortement influencé par l’Europe du Nord, et en particulier par Anton Van Dyck (1599-1641), qui fit une carrière très importante en Angleterre. Le portrait aristocratique, inspiré du portrait royal, le plus souvent en pied et d’une taille qui se rapproche de la grandeur nature, se caractérise par son hiératisme. S’il s’étend progressivement à la bourgeoisie, il garde pour objectif de montrer le statut social élevé de son commanditaire. Joshua Reynolds est l’inventeur d’une solution nouvelle pour ce type de portrait, présentant la figure dans statut social ne disparaît pas On voit ici le tout jeune des environnements entièrement, elle se coule Comte de Carlisle, revêtu spectaculaires (naturels ou désormais dans un naturel d’un costume somptueux architectural) et lui donnant savamment mis en scène, à mettant en valeur son cordon une grandeur un peu travers des représentations de chevalier du Chardon, une intemporelle. chargées d’intimité. distinction prestigieuse qui vient de lui être remise. Dans la seconde moitié du Sa pose un peu détournée, XVIIIe siècle, on assiste à Joshua Reynolds, Frederick Howard, un bras en avant, évoque l’émergence d’une sensibilité 5e comte de Carlisle, 1769, huile l’Apollon du Belvedere, tandis sur toile, 240 x 147,5 cm nouvelle pour l’individu, qui © Tate, London, 2019 qu’il descend les marches se traduit dans les portraits d’une architecture grandiose. par une attention plus grande Le petit chien, ajouté aux portée à l’expression de la pieds du modèle par la suite, subjectivité du modèle. Si vient donner un peu de vie la volonté d’affirmation d’un à cette image d’apparat.
8 • Focus • privé et arborent des la conversation piece poses qui se veulent Issue des portraits de naturelles. Cette solution, groupe de la tradition inventée par Reynolds, a hollandaise, la conversation été largement déclinée piece a pour caractéristique par ses successeurs. de représenter plusieurs Avec Gainsborough, qui personnages liés par des appréciait par-dessus tout relations personnelles la peinture de paysage, les (de famille ou d’amitié) figures sont situées dans plutôt que sociales. Ces un environnement naturel figures sont disposées et la conversation devient de manière apparemment une véritable synthèse entre informelle, dans un décor portrait et paysage. Dans ce portrait de famille en forme de conversation, nous voyons, réunis autour d’une petite table, Mr Dalton, bibliothécaire du roi, son épouse, et la nièce de cette dernière que le couple, qui n’avait pas d’enfants, a adoptée lorsqu’elle a perdu ses parents. Chacun est absorbé par une occupation domestique : la femme tient un ouvrage d’aiguilles tandis que la fillette étudie le dessin sous la férule de son oncle, qui domine la scène et fixe le spectateur. Le jeu des regards et des mains expriment l’affection qui unit cette famille. Johan Zoffany, Mr et Mrs Dalton avec leur nièce Mary de Heulle, vers 1765-68, huile sur toile, 90,8 x 71,1 cm, © Tate, London, 2019
9 La peinture de genre Ce type de peinture, qui met Richard Arkwright, qui doit souvent en scène des enfants sa fortune à l’invention d’une ou des animaux dans des machine à filer le coton, a saynètes pleines de vie, vise demandé à Joseph Wright à charmer le spectateur en of Derby (1734 – 1797) faisant appel à sa sensibilité. de réaliser le portrait des Les enfants font ainsi l’objet membres de sa famille de portraits à part, dans pour orner les murs de des œuvres qui mettent sa nouvelle demeure. Les en avant la tendresse et la enfants sont représentés à drôlerie du monde enfantin, l’extérieur, en plein jeux. Vêtus et qui sont des témoignages simplement, ils semblent d’une considération nouvelle éduqués selon les principes pour cette période de la vie. développés par Rousseau L’enfant n’est plus seulement dans son traité Emile ou De le maillon d’une lignée, l’éducation (1762), ouvrage mais depuis les écrits de dont un passage relate une Joseph Wright of Derby, Les Trois Jean-Jacques Rousseau, il expérience pédagogique Enfants de Richard Arkwright avec est considéré comme une autour … d’un cerf-volant ! un cerf-volant, © Tate, London, 2019 véritable personne, digne d’intérêt en soi. George Stubbs (1724 – 1806) est un autodidacte, convaincu de la supériorité de la nature sur la tradition artistique. Passionné par l’anatomie animale, il va jusqu’à étudier des carcasses de chevaux pour mieux comprendre la morphologie de ces animaux et tirera un ouvrage de ces études. Sensible à l’individualité de ses sujets, il fait de ses peintures des portraits qui insistent aussi bien sur les particularités La peinture de genre se La peinture animalière, physiques que psychologiques développe en réponse à un pratiquée notamment par de ses modèles. marché en pleine expansion. George Stubbs, connaît En effet, la nouvelle classe ainsi un développement sans bourgeoise reprend à précédent. Chevaux de race son compte les usages et chiens de chasse font aristocratiques et recherche l’objet de véritables portraits de quoi couvrir les murs des qui plaisent aux riches George Stubbs, Couple de luxueuses demeures qu’elle amateurs, très attachés à Foxhounds, 1792, huile sur toile, se fait construire. leurs animaux. 101,6 x 127 cm, © Tate, London, 2019
10 Le paysage Longtemps peu valorisé Avec la Révolution française Ces artistes sillonnent le dans la hiérarchie des genres, et les guerres qui l’ont territoire britannique et souvent la spécialité de suivie, les déplacements réalisent des nombreuses peintres mineurs, le paysage en Europe sont devenus études peintes directement servait principalement plus difficiles. Les artistes sur le motif*. Ils utilisent d’arrière-plan à l’action dans anglais se sont donc tournés pour cela l’aquarelle*, qui la peinture d’histoire, ou bien, vers leur territoire national nécessite un équipement peu pris en tant que tel, assurait et cette contrainte est encombrant mais permet de une fonction documentaire. bientôt devenue le terreau subtiles variations de couleurs. Au XVIIIe siècle, on assiste au de définition d’une identité Grâce à cette technique, les développement du paysage britannique. La campagne peintres cherchent à rendre comme un genre en soi, anglaise en particulier est les plus infimes variations favorisé par les échanges devenue un sujet d’inspiration atmosphériques qu’ils avec l’étranger, notamment majeur, à tel point que des observent. L’aquarelle a aussi lors des Grand Tour* au cours artistes étrangers, français contribué à libérer la touche desquels les peintres se notamment, viennent y des peintres, déjà rendue familiarisent avec les vedute séjourner à partir de 1815. très fluide et suggestive par italiennes. Gainsborough. En grande partie autodidacte, terriens aimaient à afficher un vol de corbeaux, le ciel gris John Constable (1776-1837) leurs demeures, ce tableau occupe une place majeure fut invité à Malvern Hall pour y est, semble-t-il, à l’initiative dans la représentation. réaliser des portraits. Bien que du peintre qui appréciait s’inscrivant dans la tradition beaucoup les environs et des vues de maisons de les représenta à plusieurs John Constable, Malvern Hall, campagnes, par lesquelles reprises. Animé par des coups Warwickshire, 1809, huile sur toile, les riches propriétaires de pinceau vigoureux et par 51,4 x 76,8 cm, © Tate, London, 2019
11 • Focus • imaginaire autour de cet les taches « accident ». Cette méthode, Alexander Cozens, Une tache : d’Alexander Cozens théorisée dans l’ouvrage A composition de paysage, © Tate, London, 2019 Lassé de voir les jeunes New Method of Assisting the apprentis peiner à reproduire Invention in Drawing Original avec précision les œuvres et Compositions of Landscape les paysages qui leur étaient (Nouvelle Méthode pour donnés comme modèles, le secourir l’invention dans le peintre aquarelliste Alexander dessin des compositions Cozens (1717 – 1786) a originales de paysage), publié élaboré une méthode de sous forme de brochure en création originale. Il s’agissait 1785, a donné des résultats de partir d’une tache faite au tout-à-fait étonnants et a hasard sur le support, notamment inspiré Joseph et de construire un paysage Wright of Derby.
12 Images de l’Empire La perte des colonies En effet, si les commandes Les peintres voyageurs américaines en 1783 se multiplient à l’époque représentent les paysages pousse les Britanniques à dans les îles britanniques, exotiques en combinant un accroître la partie orientale nombreux sont les artistes intérêt documentaire pour leur empire. De nombreux qui peinent à sortir du lot le territoire local avec les peintres anglais quittent et à vivre de leur peinture. techniques classiques alors les îles britanniques Les colonies offrent une de la peinture de paysage. pour les différentes colonies, forte demande de peintures Ils reprennent les modèles à la fois attirés par le goût qui reprennent les grands de Claude Lorrain des expéditions lointaines modèles en vogue dans la (1600 – 1682) et de Nicolas et par la possibilité de se métropole. Poussin (1594 – 1665), confronter à un marché neuf. insérant notamment des figures de bergers ou de Avec son neveu William, femmes au premier plan Thomas Daniell (1749 – 1840) Thomas Daniell, Pont près de de leurs œuvres. s’est engagé dans plusieurs Rajmahal, Bihar, 1827, huile sur toile, 97,8 x 137,2 cm, © Tate, London, 2019 grandes expéditions à travers Ces représentations chargées le territoire indien. Il en a d’exotisme dissimulent rapporté de nombreux dessins soigneusement les réalités sur lesquels s’appuie pour difficiles de la colonisation réaliser ses peintures, y et en particulier la pratique compris après son retour en de l’esclavage. On peut Angleterre en 1794. Avec ce néanmoins y déceler certaines pont vénérable dévoré par la réalités de la complexe société végétation, il combine une vision coloniale, comme dans pittoresque* du patrimoine l’œuvre d’Agostino Brunias indien avec la tradition de la (1730 – 1796), un peintre peinture de paysage. italien qui a fait carrière à Rome et est parti soudain à la Dominique. Dans les Caraïbes, Dans cette vision idéalisée il réalise essentiellement des de la vie dans les plantations représentations de ces sociétés Agostino Brunias, Scène de danse caribéennes, un groupe dans les Caraïbes, vers 1767 – 1796, coloniales, qui sont très de femmes s’adonne à la huile sur toile, 50,8 x 66 cm, appréciées des riches planteurs © Tate, London, 2019 danse, accompagné d’un et commerçants anglais. petit orchestre de rue. Leurs vêtements (corsets et turbans en particulier) traduisent les métissages entre cultures africaine et européenne. La scène n’est pas située avec précision mais la nature luxuriante évoque bien le décor des Caraïbes. Si ces femmes sont, comme il est vraisemblable, des esclaves, Brunias n’en fait rien paraître dans cette scène de divertissement joyeux.
13 Le renouveau de la peinture d’histoire Le genre de la peinture pendant quelques temps A côté de la violence des d’histoire, plutôt délaissé les déplacements sur passions telle qu’elle apparaît en Angleterre, est investi le continent, tandis que notamment dans la poésie, de façon nouvelle au l’Angleterre accueille de la peinture anglaise du début début du XIXe siècle. La nombreux aristocrates du XIXe siècle est aussi fin du règne de George III français en exil. Parallèlement romantique lorsqu’elle cherche est en effet marquée par se fait sentir une sensibilité à exprimer la charge sublime* les bouleversements nouvelle, plus inquiète, de certains éléments naturels. historiques qui secouent que l’on appellera bientôt C’est ainsi que les paysages l’Europe après la Révolution romantisme*. La peinture mettent en valeur des sites française. Les guerres s’empare désormais de exceptionnels, pittoresque. napoléoniennes empêchent sujets littéraires ou bibliques. Le paysage tourmenté devient alors le reflet d’une âme inquiète. Henry Fuseli, Le rêve du berger, inspiré du « Paradis perdu » de Milton, 1793, huile sur toile, 154,3 x 215,3 cm, © Tate, London, 2019 D’origine Suisse, Henry Fuseli (de son vrai nom Johann Heinrich Füssli, 1741 - 1825) découvre la poésie de John Milton à Zurich, pendant ses études classiques. Cette scène onirique, dans laquelle le rêve est une bouffée de clarté au cœur des ténèbres, a une portée fantastique et sombre à la fois. Les vues de sommets permettent d’exprimer avec justesse le sentiment de la grandeur un peu écrasante de la Nature qui peut s’emparer de l’homme face à son spectacle. Le paysagiste Joseph William Mallord Turner (1775 – 1851), qui aimait beaucoup voyager, a rempli de nombreux carnets lors de ses séjours dans les Alpes. Joseph Mallord William Turner, Chamonix et le Mont Blanc depuis les versants de Montenvers, 1802, mine de plomb, aquarelle et gouache sur papier, 32 x 47,5 cm, © Tate, London, 2019
14 Glossaire Aquarelle : technique picturale composée de pigments finement broyés et dilués dans l’eau, l’aquarelle a longtemps servi à réaliser de minutieux décor. Sa transparence, qui la différencie de la gouache, opaque, offre au peintre une grande liberté mais ne permet pas la retouche. Conversation piece : portrait de groupe présenté comme une réunion informelle, tenue dans un décor intimiste. Esquisse : c’est une première étude préparatoire pour une œuvre. Si elle ne présente pas le caractère abouti de l’œuvre finale, elle en donne déjà quelques-unes des grandes lignes. Grand Tour : long voyage Romantisme : mouvement Sublime : par sa qualité effectué par les jeunes littéraire et artistique qui poussée à l’extrême, le hommes des plus hautes s’est développé au début du sublime transcende le beau. classes de la société XIXe siècle en opposition à Son spectacle provoque européenne, et notamment l’idéal classique. Les œuvres des sentiments intenses, tels britannique, afin de parfaire romantiques mettent en que l’admiration, le respect leur éducation et d’affiner avant l’émotion, l’imagination, ou même une certaine leur goût artistique. la force du doute face crainte liée à son aspect aux valeurs de raison et incommensurable. Pittoresque : est qualifié de morale qui prévalaient de pittoresque ce qui jusqu’alors. Sur le motif : se dit d’une mérite d’être peint, ce qui peinture réalisée en plein constitue un bon sujet de Royal Academy of Arts : air, face à son sujet, le plus peinture par son aspect créée par George III en souvent un paysage. frappant ou charmant. 1768, cette institution avait Cette catégorie esthétique, pour objectif la promotion largement théorisée par des arts visuels (peinture, les Britanniques, remplace gravure, sculpture, progressivement dans toute architecture) à travers l’Europe l’idéal de beauté l’organisation d’expositions, George Romney, Tom Hayley sous les traits de Robin Goodfellow, 1789 classique dans le paysage de débats et d’un – 92, huile sur toile, 75,6 x 63,5 cm, à la fin du XVIIIe. enseignement spécifique. © Tate, London, 2019
15 Bibliographie Autour de l’exposition Jeunesse • Dir. Martin Myrone, De Gainsborough • Mallette pédagogique Le Portrait dans l’art, à Turner : l’âge d’or de la peinture anglaise, Rmn – Grand Palais, 2018 Rmn – Grand Palais, 2019 • Mila Boutan, Turner et moi, • Hélène Ibata, De Gainsborough à Turner : Rmn – Grand Palais, 2010 l’âge d’or de la peinture anglaise (journal), • Rosie Dickins, L’art du portrait, Rmn – Grand Palais, 2019 Usborne, 2018 • Amandine Rabier, L’âge d’or de la peinture • Claude Eveno, Regarder le paysage, anglaise (1760-1820) : Gainsborough, Giboulées / Gallimard Jeunesse, 2006 Reynolds, Turner... (carnet d’expo), Gallimard / RMN-Grand Palais, 2019 Pour approfondir Références générales • La peinture anglaise (1830-1900) : de Turner à Whistler : exposition, Lausanne, • L’âge d’or de l’aquarelle anglaise Fondation de l’Hermitage, du 1er février (1770-1900) : catalogue d’exposition, au 2 juin 2019, la Bibliothèque des arts Fondation de l’Hermitage, Lausanne, 22 / Fondation de l’Hermitage, 2019 janvier-24 mai 1999, la Bibliothèque des arts • Bernard Cottret, Histoire de l’Angleterre, / Fondation de l’Hermitage, 1999 Taillandier, 2019 • De Gainsborough à Turner : l’âge d’or • Alain Jaubert, J.M.W. Turner : les carnets du paysage et du portrait anglais dans les secrets, Cohen & Cohen éditeurs, 2016 collections du musée du Louvre : catalogue • Alain Merot, Du paysage en peinture dans d’exposition, musée d’art et d’archéologie, l’Occident moderne, Paris, Gallimard, 2009 Valence, 29 juin – 28 septembre 2014, Silvana Editoriale, 2014 • Michel Baridon, Naissance et Renaissance du paysage, Arles – Actes Sud, 2006 • Maria Teresa Caracciolo, Le romantisme, Citadelles & Mazenod, 2013 • Ruth Dangelmaier, Thomas Gainsborough, Place des Victoires, 2017 • Armand Dayot, La peinture anglaise : de ses origines à nos jours, Hachette – BNF, 2016 • Cara D. Denison, Evelyn J. Phimister, Stephanie Wiles, Le grand siècle du paysage : De Gainsborough à Ruskin, Ludion, 1994 • Sebastian Schütze, Maria Antonietta Terzoli, William Blake : la divina commedia di dante : tous les dessins, Taschen, 2017 • Pierre Watt, Constable, Hazan, 2002 Joseph Wright of Derby, Les Trois Enfants de Richard Arkwright avec une chèvre, © Tate, London, 2019
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