Plaide pour un modèle social solidaire renouvelé ! - L'UNIOPSS - ÉLECTION PRÉSIDENTIELLE 2022
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ÉLECTION PRÉSIDENTIELLE 2022 L’UNIOPSS plaide pour un modèle social solidaire renouvelé !
2 L’UNIOPSS PLAIDE POUR UN MODÈLE SOCIAL SOLIDAIRE RENOUVELÉ !
3 C réée en 1947 et reconnue d’utilité publique, l’Uniopss fédère plus de 35 000 établissements et services dans le domaine de la solidarité et de la santé, regroupés au sein de grandes associations, de fédérations nationales et d’Unions régionales (Uriopss). Forte de cet ancrage territorial et d’une expertise transversale reconnue, l’Uniopss représente les associations dans les secteurs sanitaire, social et médico-social. Elle porte auprès des pouvoirs publics la voix collective des acteurs du privé non lucratif qui accompagnent chaque jour les personnes les plus vulnérables de notre société : personnes âgées, personnes en situation de handicap, de pauvreté, enfants, jeunes en rupture familiale… Au cœur de l’économie sociale et solidaire, elle crée ainsi ce pont indispensable entre les associations et les pouvoirs publics locaux, régionaux, nationaux voire européens, en intégrant les personnes elles-mêmes, pas toujours reconnues ni entendues dans notre société. Le secteur privé NON LUCRATIF permet de défendre en priorité la primauté de la personne et des valeurs telles que la solidarité, l’égalité d’accès aux droits, le res pect et la participation de chacun à un modèle de société solidaire, sans un souci de rentabilité préjudiciable aux personnes en situation de fragilité, de handicap ou d’exclusion. Dans un contexte de tensions, de marchandisation croissante, y compris de l’action sociale, du peu de reconnaissance des corps intermédiaires et à la veille d’élections majeures pour l’avenir de notre pays, il était de notre responsabilité de prendre la parole et de proposer un modèle social, solidaire et renouvelé. Notre projet commun est guidé par le vivre ensemble, l’attention aux plus précaires, en favorisant les conditions d’un juste équilibre entre l’économie, l’environnement et le social. Patrick Doutreligne, PRÉSIDENT DE L’UNIOPSS
4 L’UNIOPSS plaide pour un modèle social solidaire renouvelé ! L a crise provoquée par l’apparition du Covid-19 démontre tous les jours l’importance d’un système de protection Derrière ces enjeux, ce sont les indi- vidus eux-mêmes qui sont directement confrontés à des difficultés au quoti- dien : difficultés d’accès aux profession- nels et aux services, éloignement des institutions, sentiment d’exclusion. sociale solidaire et le besoin d’un Ces tensions affectent aussi des accompagnement des plus vulnérables professionnels des secteurs sanitaire, d’entre nous. La situation, préoccu- médico-social et social, dont pourtant pante pour une part importante de nos l’engagement est exemplaire et reconnu concitoyens, aurait été encore plus de tous pendant cette période. Ceux-ci, dramatique sans les moyens mobilisés au-delà d’une revalorisation salariale, à titre exceptionnel par les pouvoirs qui serait en adéquation avec l’impor- publics et surtout sans ce filet de sécu- tance de leur rôle, doivent bénéficier rité que constitue notre modèle social. d’une reconnaissance de leur statut et Les Français y sont attachés. D’ailleurs, expriment des inquiétudes sur les dans un récent sondage auquel l’Uniopss conditions d’accomplissement de leurs a participé, plus de la moitié des répon- missions, voire une certaine forme de dants affirme sa confiance dans notre découragement. système de protection sociale. Ces tensions enfin, touchent égale- Pourtant, la crise a révélé que ce sys- ment le secteur associatif, dont le rôle tème, élément essentiel de notre pacte de proposition, de plaidoyer, d’initia- républicain, est en danger et de plus en teur d’innovations, essentiels pour faire plus soumis à des fractures, qu’elles société, est mis à mal. Celui-ci est trop soient territoriales, environnementales, souvent cantonné dans des missions de sociales ou économiques. Ces fractures prolongement des services publics et renforcent les inégalités, fragilisent les de compensation du retrait de l’État. plus précaires et mettent à mal l’action indispensable des professionnels qui Alors que l’on voit, dans les territoires, interviennent auprès des plus vulnérables. des formes d’engagement renouvelées dans la société civile, des profession- Notre modèle se retrouve ainsi à la croi- nels compétents et engagés eux aussi, sée des chemins, non seulement de par des territoires créatifs où les associa- les diverses réformes successives qui ont tions se mobilisent avec des citoyens, modifié son architecture et sa volonté des entreprises, des collectivités pu- généraliste, mais aussi par des mouve- bliques, notre système social est en ments importants d’évolution de la société. danger et la solidarité fragilisée.
5 L’UNIOPSS PLAIDE POUR UN MODÈLE SOCIAL SOLIDAIRE RENOUVELÉ ! 1 UN CLIMAT GÉNÉRAL PRÉOCCUPANT
6 L’UNIOPSS PLAIDE POUR UN MODÈLE SOCIAL SOLIDAIRE RENOUVELÉ ! N otre modèle social est traversé par Mais cette crise de confiance voire de des tendances de fond qui fragilisent défiance, qui était encore cantonnée aux et mettent en péril l’avenir de notre élites politiques, touche désormais tous les système de protection sociale. corps représentant « un pouvoir » et prend diverses formes : mise en cause des respon- sables, du savoir scientifique et de l’exper- Le défi de la montée tise, succès des théories du complot, etc. de l’individualisme Cette défiance généralisée affaiblit le La montée de l’’individualisme, qu’elle s’ex- contrat social qui est à la base de notre prime comme un repli sur soi ou comme l’affir- solidarité et la conviction que la société vien- mation de la primauté de l’individu par rapport dra en soutien en cas de difficultés s’estompe. au groupe et à l’intérêt général, observée au Pour certains, l’État social n’est plus visible et cours des dernières décennies et accélérée la participation individuelle est contestée. depuis plusieurs années, est un défi majeur pour la construction d’un projet de société collectif. Si l’individualisme s’inscrit dans un courant de Le défi de la lutte contre pensée valorisant la volonté d’émancipation, les inégalités sociales tout en reconnaissant l’existence d’une col- lectivité, cette tradition sociologique tend de et territoriales plus en plus vers un glissement de l’autono- Les inégalités territoriales, en particulier mie, vers une requête d’indépendance vis-à- de santé et d’accès aux système de santé, vis du groupe, jusqu’à, pour certains, à l’indif- demeurent trop marquées pour satisfaire férence voire au rejet de l’autre. Renforcée notre idéal républicain d’égalité. par les injonctions des politiques publiques à la responsabilisation, à l’activation des droits, Au contraire de se résorber, mêmes si elles « à prendre en main son destin », cette évolu- se sont longtemps réduites, elles se creusent tion questionne directement notre modèle de de nouveau depuis une dizaine d’années protection sociale. Comment concilier la et contribuent ainsi à accuser ce que l’on volonté d’individus de plus en plus en désaf- a désigné par ailleurs, sous l’expression filiation par rapport au collectif voire en de « fracture territoriale ». sédition, et l’adhésion à un modèle de pro- Elles offrent une nouvelle configuration : tection sociale basé sur la solidarité entre les ces inégalités ne se limitent plus à l’ancienne générations et sur la réduction des inégalités opposition France du Nord/France méridio- des individus dans une communauté de vie ? nale mais se retrouvent à toutes les échelles géographiques selon un dispositif général urbain/périurbain/rural. Le défi de la crise de confiance À ces inégalités territoriales qui trahissent le principe d’une égalité de droits et d’accès L’impression d’un fossé de plus en plus aux droits sur l’ensemble du territoire, le grand entre les représentants et les repré- maintien d’inégalités sociales - en particulier sentés se développe. Dans un contexte où en termes d’espérance de vie - entre les dif- l’hégémonie néolibérale aboutit à multiplier férentes catégories de la population en les formes de gouvernance et où les instances France, questionne sur l’efficacité des poli- électives ne sont plus que des actrices parmi tiques sociales dont l’un des objectifs princi- d’autres, aux côtés des marchés, des agences paux est précisément la solidarité entre les de notation financières, des firmes internatio- différentes catégories de publics et la réduc- nales, des institutions technocratiques, des tion des inégalités. organisations internationales, des réseaux sociaux…, la croyance en la possibilité du poli- Un des leviers pour lutter contre les inéga- tique de « changer la vie » s’amoindrit et la lités passe par le développement des poli- confiance en ses représentants s’amenuise. tiques de prévention dès le plus jeune âge. Politiques de prévention ciblée, en particulier vers les jeunes des familles les plus vulné- rables, et réelles politiques de santé publique, fondées sur la recherche et évaluées. Ces inégalités territoriales et sociales, en per- durant, éloignent toute une partie de la popu- lation dans la croyance d’un État social, d’un modèle qui protègerait l’ensemble de la popu- lation et d’une protection sociale pour corri- ger les inégalités observées dès la naissance.
7 L’UNIOPSS PLAIDE POUR UN MODÈLE SOCIAL SOLIDAIRE RENOUVELÉ ! Le défi de la démocratie Or, sous la pression des mutations de la société, les politiques sociales, dans un souci directe et les limites de la légitime de professionnalisation, se sont démocratie participative trouvées emportées par une vague de nou- Il est aujourd’hui indispensable de renforcer veaux « dispositifs », de programmes et de les espaces d’échange et de dialogue démo- prestations, selon une logique d’empilement, cratiques, dans un contexte où les divisions et de ciblage et de technicisation croissante les mises en conflictualités n’ont jamais été des interventions. aussi poussées au sein de la société dans son Dès lors, la fragmentation actuelle des res- ensemble. Cela a généré des mouvements de ponsabilités engendre pour le travail social un violence, liés à la succession, ces derniers surcroît d’approches spécialisées et compar- mois, de mesures vécues comme portant timentées qui ne facilitent guère les condi- atteinte aux libertés individuelles, au nom, tions d’une vision globale et plus intégrée, notamment, d’un principe de sécurité sani- permettant de dépasser des interventions en taire, et par des mouvements extrémistes en silos, ainsi que la logique de dispositifs et de rupture avec notre pacte républicain. guichets. Leur efficacité est aujourd’hui inter- Les espaces de débats et de démocratie rogée : la pauvreté ne régresse pas et le non participative deviennent une nécessité pour recours aux droits persiste. préserver la paix sociale, le lien relationnel Ces professionnels se trouvent dans un et la possibilité d’une détermination collective questionnement sur le sens de leurs missions des aspirations pour demain, en vue d’un pro- si les procédures prennent le pas sur la rela- jet partagé. La participation reste encore tion humaine d’aide et de soins, si leurs mis- limitée. Alors que l’on peut distinguer trois sions ne permettent pas, malgré leur implica- formes de participation – prendre part, tion, d’améliorer la situation des publics qu’ils contribuer (apporter une part), bénéficier accompagnent. (recevoir une part) – celle-ci reste encore bien souvent bornée à la dernière de ces trois Ce sentiment est renforcé par le fait que les formes et ne permet pas d’assurer une réelle travailleurs sociaux se sentent sommés d’in- co-construction. tervenir sur les conséquences des situations de précarité, voire d’exclusion, sans véritable- En outre, la participation est souvent pré- ment disposer des moyens d’agir sur les sentée comme étant en opposition avec la causes (de l’emploi, du logement...). parole des corps intermédiaires affaiblis, dont le rôle de médiation est sous-estimé. Loin d’être en opposition, la participation Le défi d’une société vient au contraire s’y intégrer et renforcer le inclusive rôle de ces institutions ; elle ne doit donc pas être appréhendée comme la vision d’une La notion de société inclusive, dont l’Uniopss société composée d’individus singuliers aux a pu être porteuse (notion développée par dépens d’organisations intermédiaires, René Lenoir dans « Les exclus » – 1974), est d’associations et de mouvements sociaux, devenue un concept manié à tort et à travers. parfois même de potentiels contre-pouvoirs. Alors qu’elle devrait ambitionner la réduction des inégalités, celle-ci ne permet pas, à l’heure actuelle, la société plus juste que nous appe- Le défi du découragement lons de nos vœux. des professionnels Elle comporte en effet deux écueils : Les professionnels du soin et du travail social D’un côté, elle risque de limiter la prise en jouent un rôle essentiel de prévention et compte des besoins particuliers de chacun. d’amortisseur face à la dureté de la crise et, bien plus que cela, ils participent à la construc- tion des liens humains, de l’insertion et de l’au- tonomie des personnes. Les individus ne sont pas laissés sans ressources ni sans aides. Par-delà l’aide matérielle en tant que telle, l’action des professionnels assure un rôle essentiel d’accompagnement, qui répond aux attentes de soutien relationnel d’individus de plus en plus en proie à des situations d’isolement.
8 L’UNIOPSS PLAIDE POUR UN MODÈLE SOCIAL SOLIDAIRE RENOUVELÉ ! Ainsi, si les hommes sont égaux en droits, il n’en demeure pas moins vrai qu’ils ne sont Le défi de l’avenir pas des copies conformes d’un modèle unique. Une société inclusive est une société de la protection sociale consciente que l’égalité formelle – en droits – Au cours de son histoire, notre système de n’assure pas l’égalité réelle – dans les faits. protection sociale a pris en charge de nou- Si des situations identiques appellent des veaux risques et s’est progressivement uni- réponses identiques, les citoyens les moins versalisé pour tenir compte des évolutions de armés et les plus vulnérables nécessitent des la société française. Néanmoins, il existe réponses spécifiques. encore de nombreuses insuffisances et des De l’autre, elle risque de servir de prétexte et pans entiers sont à construire. légitimer une limitation des moyens attribués Ainsi, encore de nombreuses personnes à la prise en compte de ces spécificités et du restent en dehors des dispositifs d’aide besoin particulier des plus fragiles d’entre et de prise en charge de l’assurance chômage. nous. Inclure dans le milieu ordinaire les plus Dans un autre domaine, les dispositifs de lutte vulnérables doit être accompagné des moyens contre la pauvreté n’ont pas empêché l’appari- permettant à ces derniers d’y accéder. tion d’une nouvelle forme de précarisation des De plus, une société réellement inclusive jeunes. Enfin, certaines personnes en situation suppose de modifier le référentiel des poli- de handicap restent sans solution dans tiques publiques pour des parcours plus l’accompagnement nécessaire pour vivre. fluides, mettant fin à celles conçues en silos et En outre, de nouveaux risques appa- en envisageant une cohérence à la fois infra raissent, et le lien entre les questions envi- territoriale mais aussi entre des dispositifs ronnementales et sociales n’est pas pris en nationaux et locaux. compte à l’instar des autres risques, les vic- Enfin, la société inclusive doit se conjuguer times des inégalités sociales sont plus expo- avec le principe de l’autodétermination des sées aux inégalités environnementales. personnes et le pouvoir d’agir de chacun et L’exemple de l’augmentation des prix du car- ainsi de décider pour lui-même de son envie burant au nom de la politique plus écologique d’être et de participer à la société en tant que en est l’illustration et – faut-il le rappeler –, citoyen. a servi de déclencheur au mouvement des En d’autres termes, derrière la notion de Gilets jaunes. C’est pourquoi, pour reprendre société inclusive, se joue la capacité à lier dans une expression fortement utilisée ces derniers un même temps des dispositifs pour tous, temps, il n’y a pas lieu d’opposer mais de trai- tout en maintenant les moyens spécifiques ter à la fois les problématiques des fins de pour que chacun puisse jouir des mêmes mois et de la fin du monde. droits effectifs. Enfin, le débat sur son coût et donc son financement, ainsi que la logique de finance- ment assurantiel individuel, posent la ques- tion du maintien de son caractère solidaire. Tout ceci affaiblit considérablement notre modèle et notre système de protection sociale, de même que la confiance dans la pérennité de la solidarité entre les individus. Ces différents défis, auxquels les politiques sociales sont confrontées, pèsent sur les soins, l’accompagnement et la prise en charge des personnes les plus vulnérables, ainsi que sur l’action quotidienne des professionnels sani- taires, sociaux et médico-sociaux. Ils se traduisent tous les jours par des tensions sur le terrain.
9 L’UNIOPSS PLAIDE POUR UN MODÈLE SOCIAL SOLIDAIRE RENOUVELÉ ! 2 DES ZONES DE TENSION
10 L’UNIOPSS PLAIDE POUR UN MODÈLE SOCIAL SOLIDAIRE RENOUVELÉ ! En outre, la multiplicité des lieux de décision, Tensions autour du rôle dans un même territoire, nuit à la fluidité des de l’accompagnement social parcours de la personne et renforce la politique et conséquences sur les en silos. Enfin, la non–corrélation voire la concur- rence qui peut parfois exister entre des disposi- conditions de travail tifs nationaux et des approches territoriales Chaque jour, les professionnels de l’accom- nuisent fortement à l’action des professionnels pagnement social sont confrontés à des ten- et par là même à l’efficacité des accompagne- ments des personnes vulnérables. sions dans leurs activités. Tensions d’une part entre l’injonction de normalisation et d’inclu- sion, et la reconnaissance de l‘altérité et de l’unicité de la personne accompagnée ; ten- Tensions autour de la sions, d’autre part, entre des besoins sociaux participation des citoyens croissants et des contraintes budgétaires et et du rôle des corps managériales de plus en plus fortes. Les professionnels doivent combiner des intermédiaires interventions trop encadrées dans des dis- Alors que la participation citoyenne est de plus positifs normés établis et la nécessité de en plus mise en avant, en particulier au niveau prendre en compte les besoins spécifiques, local, celle-ci se conjugue parfois avec une ten- la demande propre, le désir de la personne dance à la remise en question des corps inter- accompagnée. médiaires, de leur légitimité à porter la parole des personnes directement concernées. Cet En outre, le développement d’une politique affaiblissement de la légitimité des représen- managériale et budgétaire basée sur le New tants de la société civile conduit à une perte de Public Management transfère des critères de reconnaissance de la dimension politique des gestion et d’évaluation propres au monde acteurs associatifs dans la mise en œuvre de la marchand à des professions dont la valeur solidarité, par les pouvoirs publics mais aussi par ajoutée, principalement humaine, n’est pas une partie de la population. opérationnelle. Les tensions et les normes de productivité augmentant, un sentiment de Ainsi, peuvent émerger des initiatives perte de sens de la mission s’est développé et citoyennes, plus ou moins organisées, ignorant, la question du bien-être des salariés au travail s’opposant ou rejetant les organisations qui tra- devient un sujet central de préoccupation. ditionnellement les représentaient. Il peut s’en suivre une perte d’une dynamique collective Cette situation a été renforcée par la crise permettant de relier et de coordonner les sanitaire. En effet, les travailleurs sociaux sont constats et les propositions issues de la partici- au cœur de la crise mais restent invisibles, au pation des citoyens. niveau national et local. C’est bien la partie la plus vulnérable de la population, qui a été la plus touchée par la crise, celle prise en soin, Tensions dans le lien entre accompagnée, soutenue par les soignants et les travailleurs sociaux. Le travail social est un économie, social pilier essentiel à la cohésion sociale et à la et environnement solidarité envers les plus vulnérables. Le développement durable s’appuie sur Par ailleurs, la précarisation du travail social 3 piliers : l’économique, le social et l’environne- et de ses professionnels, a révélé un phéno- mental. Si celui-ci entend répondre aux besoins mène latent d’uberisation du travail social, qui des générations présentes sans compromettre interroge aussi bien les conditions de travail la capacité des générations futures, en proposant que le niveau et la constance de la qualité de un modèle de développement vivable, viable et équitable, force est de constater que nous l’accompagnement. ne sommes pas encore arrivés à ce modèle de développement et que des tensions entre ces 3 pôles existent. Tensions autour des lieux de décisions avec le maillage L’action sociale et la protection sociale sont encore évaluées comme des coûts à rationali- territorial ser et non comme des investissements, géné- La crise provoquée par le Covid-19 a mis en rateurs d’une valeur sociale et sociétale. Le lien lumière les tensions existantes dans la conduite entre économie et environnement reste encore et la prise de décision des politiques territoriales perçu, même si des évolutions conceptuelles se mais aussi dans le lien entre les politiques font jour, comme la limitation par des contraintes environnementales du développement de décentralisées et les politiques nationales. l’activité de production et de consommation Pour les personnes accompagnées, il demeure et donc d’emploi. Enfin, le lien entre environne- profondément injuste et inexplicable d’être, en ment et social est encore trop caractérisé par fonction de son lieu d’habitation, soumis à des une alternative entre l’urgence immédiate et différenciations de traitement et pour les profes- l’urgence à moyen terme. sionnels, de valorisation salariale.
11 L’UNIOPSS PLAIDE POUR UN MODÈLE SOCIAL SOLIDAIRE RENOUVELÉ ! 3LES PROPOSITIONS DE L’UNIOPSS
12 L’UNIOPSS PLAIDE POUR UN MODÈLE SOCIAL SOLIDAIRE RENOUVELÉ ! P arce qu’elles sont présentes sur l’en- semble des territoires et interviennent Des réponses de qualité chaque jour auprès des publics fragiles et vulnérables, les associations de soli- aux besoins sociaux darité et de santé peuvent porter une vision de Le rappel de ces spécificités des associations société et des politiques sociales, sanitaires et de solidarités et de santé montre qu’elles sont médico-sociales. Par leur existence même, elles des acteurs particuliers, dont l’évaluation ne font projet de société. Elles ont un rôle d’alerte par doit être établie sur les seuls critères écono- leur ancrage dans la réalité sociale. Elles sont légi- miques et de rentabilité financière. A ce titre, les times, historiquement et politiquement, pour por- évolutions des réponses aux besoins sociaux et ter la voix des personnes accompagnées et de leurs modes de financement par le développe- leur famille, comme celle des professionnels. ment et la généralisation d’appels à projets ins- crivent les associations dans un système Par leur adaptabilité et leur réactivité elles concurrentiel. Celui-ci exclut les organisations inventent des réponses et innovent en perma- de petite taille, privilégie une politique du prix nence, au plus près des besoins. Cette capacité plutôt que de la qualité dans les réponses asso- doit être reconnue et soutenue. L’innovation ciatives, peut préférer la recherche de « parts de sociale ne peut être une injonction, ne peut se marché » pour atteindre l’équilibre budgétaire déployer dans un cadre hyper normatif, ne peut au détriment du développement d’une réponse être soumise à une logique strictement concur- de qualité aux besoins sociaux identifiés. rentielle. Le secteur associatif est aussi en responsa- bilité dans l’emploi, pour des professionnels qui PROPOSITION peuvent y trouver du sens, mais à la double Promouvoir la co-construction condition que les politiques publiques portent avec les acteurs du social dans l’élabora- des projets ambitieux pour l’emploi de ce sec- tion des besoins sociaux, mettre fin à un teur et que les associations elles-mêmes système de réponses à ces besoins puissent mener à bien les transformations aboutissant à une concurrence vers le nécessaires du management. moins disant. Il présente un mode d’action singulier à soute- nir, pouvant combiner de manière générale le politique, la gestion, le professionnalisme et l’engagement. La primauté de la personne Il permet de conjuguer alternative écono- Les personnes accueillies, prise en soins ou mique et activation de la démocratie et contri- accompagnées, constituent notre première prio- bue ainsi, avec d’autres acteurs de l’ESS, à une rité : respect, dignité, bien-être, chaleur humaine lutte contre la perte de confiance dans le pro- et lien social sont les boussoles de notre action grès économique, l’emploi, le travail. auprès de chacune de ces personnes. Pour une C’est aussi une école de l’engagement, des bonne qualité de leur accompagnement, une solidarités et de la citoyenneté, qui permet de meilleure reconnaissance et une attention ren- relier des individus à des projets collectifs, de forcée au bien-être et à la motivation des sala- participer à la construction du débat public, de riés, mais aussi des bénévoles, des aidants et faire vivre la démocratie. Les associations des familles sont tout autant décisives. constituent également un vecteur essentiel du pouvoir d’agir des personnes elles-mêmes. PROPOSITION Poser comme prioritaire la quali- té des soins et de l’accompagnement de la personne, ainsi que la reconnaissance des personnes intervenantes, pour éva- luer les actions dans le médico-social, le social et le sanitaire.
13 L’UNIOPSS PLAIDE POUR UN MODÈLE SOCIAL SOLIDAIRE RENOUVELÉ ! Le respect L’égalité dans l’accès de la non-lucrativité aux droits Les personnes morales constituant notre Notre réseau s’attache à rendre concret et réseau n’ont jamais, par nature, pour objectif de effectif le principe républicain de l’accès aux générer des profits financiers pour rémunérer droits égal pour tous, au-delà des complexi- des investisseurs. Les excédents d’exploitation tés liées aux évolutions technologiques ou qu’elles peuvent réaliser sont toujours conser- des mises à l’écart de fait, qui bloquent cet vés par cette même personne morale et réin- accès à de trop nombreuses personnes du fait vestis, pour innover et améliorer la qualité de de leur âge, de leur handicap ou de leur situa- l’accompagnement des personnes directement tion sociale. Nous promouvons une protec- concernées. Notre action n’est donc jamais tion sociale solidaire et collective effective déterminée par un objectif lucratif de rémuné- pour tous les individus. ration du capital ou d’investisseurs. Notre prio- rité est la création de valeur sociale. PROPOSITION S’assurer de l’effectivité des droits PROPOSITION en levant les freins technologiques, Reconnaitre la spécificité associa- administratifs, territoriaux à leur accès. tive et renforcer un mode de régulation basé sur la création de valeur sociale. La participation de tous à la société La solidarité Les personnes accompagnées par notre Sous toutes ses formes les plus diverses, réseau de solidarité sont des citoyens. Elles l’action de nos adhérents et du réseau est issue visent à être actrices de leur propre accompa- d’un mouvement de solidarité de femmes et gnement, avec leur pouvoir d’agir. Elles doivent d’hommes à l’égard d’autres femmes et d’autres pouvoir participer à l’ensemble de la vie de hommes plus vulnérables ou plus en difficulté. notre société. Nous nous efforçons de rendre Ce mouvement est l’exact contraire d’un effectifs cette volonté et ce principe, par le égoïsme indifférent. Il conduit à l’action pour développement de la participation au sein des affirmer la place de toute personne dans le associations et par la contribution active de corps social et bâtir une société réellement celles-ci à la vie démocratique. inclusive, bienveillante, solidaire et durable. De même, acteurs essentiels de l’État social, les soignants et travailleurs sociaux doivent être reconnus à leur juste rôle et au-delà de la reva- PROPOSITION lorisation financière, l’attractivité de ces métiers Construire une société inclusive est une priorité. Celle-ci doit s’inscrire dans une fondée sur les besoins des personnes les politique globale visant à rendre également plus fragiles et vulnérables. attractifs les territoires dans lesquels ils se situent (dont les territoires ruraux). C’est bien toute une palette d’outils et de mesures qu’il s’agit de mobiliser notamment : la formation des professionnels tant au niveau initial que tout au long de la carrière, l’amélioration de la qualité de vie au travail, l’équilibre vie privée/vie pro- fessionnelle, la mobilité géographique, des lieux d’exercice adaptés, la prévention des risques, la facilitation d’accès à un logement. Mais c’est aussi au secteur associatif de tra- duire son engagement et ses valeurs, en s’adap- tant pour permettre la participation des per- sonnes qu’elles accompagnent et qu’elles emploient dans la gouvernance et la prise de décision en leur sein. PROPOSITION Reconnaitre et valoriser le travail des soignants et des intervenants sociaux et médico-sociaux.
14 L’UNIOPSS PLAIDE POUR UN MODÈLE SOCIAL SOLIDAIRE RENOUVELÉ ! Le renforcement des Enfin, parce que certains politiques publiques vers les domaines doivent être exclus plus fragiles, avec l’exigence, dans tous de la concurrence économique, les domaines des politiques publiques, d’avoir une régulation sur des pans économiques jugés pour objectif principal l’amélioration de la vitaux devrait être instaurée. C’est déjà le cas situation des populations les plus précaires et la dans certains domaines comme dans le réduction des inégalités. Dans certains pays, la logement (encadrement des loyers, tarifs généralisation des études d’impact des réglementés) ou dans la santé (tarif opposable). conséquences des mesures proposées sur les 10 % les plus pauvres se développe. Nous proposons qu’elle soit instaurée en France. PROPOSITION Sanctuariser et réguler les secteurs sociaux essentiels (logement, santé, dépendance) afin de sortir d’une PROPOSITION logique privilégiant la seule économie Généraliser les études d’impact de marché et ainsi empêcher les effets préalables à la présentation de projets de d’éviction en fonction des revenus. loi sur les conséquences pour les 10 % les plus précaires de la population.
15 L’UNIOPSS PLAIDE POUR UN MODÈLE SOCIAL SOLIDAIRE RENOUVELÉ !
L’UNIOPSS PLAIDE POUR UN MODÈLE SOCIAL SOLIDAIRE RENOUVELÉ ! UNIOPSS 15 Rue Albert – CS 21306 – 75214 Paris cedex 13 Tél. 01 53 36 35 00 – contact@uniopss.asso.fr www.uniopss.asso.fr
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