Un été en musique Roger Chamberland - Québec français - Érudit
←
→
Transcription du contenu de la page
Si votre navigateur ne rend pas la page correctement, lisez s'il vous plaît le contenu de la page ci-dessous
Document generated on 02/09/2022 12:57 p.m. Québec français Un été en musique Roger Chamberland Le dialogue pédagogique Number 106, Summer 1997 URI: https://id.erudit.org/iderudit/56464ac See table of contents Publisher(s) Les Publications Québec français ISSN 0316-2052 (print) 1923-5119 (digital) Explore this journal Cite this review Chamberland, R. (1997). Review of [Un été en musique]. Québec français, (106), 94–97. Tous droits réservés © Les Publications Québec français, 1997 This document is protected by copyright law. Use of the services of Érudit (including reproduction) is subject to its terms and conditions, which can be viewed online. https://apropos.erudit.org/en/users/policy-on-use/ This article is disseminated and preserved by Érudit. Érudit is a non-profit inter-university consortium of the Université de Montréal, Université Laval, and the Université du Québec à Montréal. Its mission is to promote and disseminate research. https://www.erudit.org/en/
CHANSON par Roger Chamberland ILLUSTRATION TIRÉE DE LA POCHETTE Of C O C U I U _ flAOU La production québécoise de disques devient de plus en plus importante. Bon an, mal an, on peut compter près d'une centaine de titres. Dans ce contexte, on comprendra aisément qu'il est difficile de faire le tour de tout ce qui paraît, tout au plus peut-on donner quelques pistes, des orientations dans certains styles musicaux, voire le titre d'un album qui vous suivra tout l'été. Cette chronique aura ceci de particulier que j'ai choisi de traiter d'albums qui rendent compte non pas de la vitalité de l'industrie du disque, mais bien plutôt de sa diversité. On passe ainsi de la chanson québécoise française à la musique klezmer, à la chanson québécoise mais d'expression espagnole et, pourquoi pas, à la musique contemporaine. Les cultures de goût au Québec sont très variées, comme on peut le constater dans la musique rock où des artistes étrangers sont reconnus et consacrés au Québec avant de connaître le succès à plus grande échelle. A l'inverse, des artistes québécois exploitant un registre musical exogène, ici le klezmer ou la chanson traditionnelle mexicaine, reçoivent un accueil qui va bien au-delà d'une réception en circuit restreint. Daniel Lavoie /Live au Divan vert d'une nouvelle équipe de musiciens voix, l'interprétation, dans le style du Commençons donc par une valeur qui, visiblement, ont su revamper son concert intime, bien appuyée par ail- sûre : Daniel Lavoie. Il présente 16 piè- répertoire et donner une nouvelle leurs par le piano de Lavoie. Cet album ces de son répertoire dans un album coloration à des pièces qui avaient ne bouleverse rien ni au plan musical, Live, enregistré au Studio le Divan laissé leur marque. Pensons à « Qui ni au plan de l'interprétation ; son vert, mais ne nous trompons pas car il sait », « Y'a des jours de plaine », « Ils intérêt loge plutôt à l'enseigne de la ne s'agit pas d'un enregistrement en s'aiment », « Je voudrais voir New York découverte ou de la réactivation d'un spectacle, comme le laisse entendre le » ou « Tension Attention », pour ne répertoire « classique » de la chanson titre, mais d'une production en studio, nommer que quelques titres qui ont québécoise. Les inconditionnels de ou du moins s'il y avait un public dans connu leurs heures de gloire. Si ces Lavoie y trouveront leur compte, les la salle, celui-ci grands succès étaient por- autres jugeront peut-être la direction s'est fait bien dis- teurs d'un certain style artistique un peu molle, sans tonus. cret. L'intérêt de musical, ils sont traités ici Mon enthousiasme de la première cet album réside de façon dépouillée et de écoute s'est changé en déception, tant dans le fait qu'il manière homogène, mi-jazz, le relief musical des pièces faisait dé- s'agit de nouveaux mi-blues, afin de créer un faut. arrangements et, climat d'écoute sans con- bien sûr, d'une traste et sans rupture. L'at- Alain Simard / Alain Simard nouvelle interpré- mosphère y est plutôt feu- Alain Simard a décidé de donner son tation. Lavoie s'est trée, la musique, en retrait, nom à son premier album, histoire de aussi entouré dégageant clairement la bien signifier qu'il donne une nouvelle 94 QUÉBEC FRANÇAIS ÉTÉ 1997 NUMÉRO 106
orientation à sa carrière qui s'est faite dant puisque le groupe, imprégné par Bien sûr, Lhasa de Sela chante en espa- jusqu'à maintenant dans l'ombre de les contrastes de cette musique, où la gnol, mais les paroles sont données en Mitsou, Marianne et Nanette Work- mélancolie le dispute à la gaieté, a espagnol, en français et en anglais dans man. Auteur-compositeur pour ces composé cinq pièces à l'esprit klezmer. le livret d'accompagnement. Peu im- artistes, Simard a décidé d'interpréter Difficile d'identifier ce qui appartient à porte d'ailleurs le sens des paroles car lui-même ses chansons ; le résultat est la tradition et ce qui relève de la nou- l'expressivité de la voix et la musique fort intéressant. Onze chansons, dont veauté, tant Denis Hébert, le pianiste- laissent déjà entendre ce qui est chanté. sa plus connue jusqu'à maintenant arrangeur également compositeur, a Dès la première écoute, on est emporté « Tant que la musique sera bonne », respecté la ligne mélodique de cette par la richesse de cet album, par la voix nous permettent de découvrir des musique que des groupes comme et par la musique exotique à souhait. textes qui puisent leur thématique à Bratsch ou John Zorn ont contribué à Que dire maintenant de son spectacle ? même le quotidien, les petits et les faire connaître. L'album, comme le grands faits d'une existence où spectacle, nous transporte dans un Claude Vivier /Schônberg Ensemble. l'amour, la musique et les états d'âme univers où règne un esprit de fête et de Asko Ensemble, dirigés par Reinbert sont au rendez-vous : « Je suis étrange/ joie de vivre. de Leeuw J'ai jamais pleuré/ pour les mêmes De la musique populaire allons main- raisons/ que l'ensemble/ jamais fris- La Llorona / Lhasa de Sela tenant à la musique contemporaine sonné devant la télé/ en aucune cir- De l'Europe de l'Est, passons mainte- afin de souligner la parution d'un constance » (« Étrange »). Remarquable nant au Mexique tout en restant au album consacré à la musique de par ses paroles, mais aussi par ses musi- Québec avec l'album de Lhasa de Sela. Claude Vivier, l'un des compositeurs ques souvent inventives, parfois près D'origine mexicano-américaine, Lhasa québécois les plus intéressants. Né en de ce que fait Thomas Fersen en de Sela chante depuis un bon moment 1948, Vivier est mort assasiné à Paris France, cet album donne une touche dans des estaminets choisis de Mon- en 1983 non sans avoir laissé derrière particulière à la musique populaire au tréal où elle séduit avec sa musique et lui une œuvre fascinante et accessible Québec trop souvent homogène. Entre sa voix un peu rude. À la manière de qui devrait réconcilier ceux et celles le rock et la ballade, Martin Talbot, qui Raoul, elle interprète des chansons du qui jugent la musique contemporaine a assuré les arrangements, a su trouver folklore mexicain, réarrangées, et des difficile d'accès. Reinbert de Leeuw le son qu'il fallait pour mettre ces pièces de son crû : des onze pièces que dirige le Schônberg Ensemble et le pièces en évidence. Nul doute qu'il compte l'album, elle en a écrit huit. Le Asko Ensemble qui interprètent s'agit d'un auteur-compositeur-inter- passage de l'une à l'autre se fait « Prologue pour prète sur lequel nous devrons doréna- dans la plus grande harmonie un Marco vant compter. car Yves Desrosiers, le Passons maintenant à d'autres maître-d'œuvre de ce univers musicaux que nous avons disque a réussi un moins l'habitude de fréquenter. travail remarqua- ble, tout comme Raoul / Coolklez les musiciens, Sur un autre registre, le groupe Raoul Desrosiers en interprète la musique klezmer, cette tête, Mario musique traditionnelle juive qui nous Legaré, Fran- vient de ce qui constituait l'Europe de çois Lalonde l'Est et qui témoigne de l'âme slave. En et quelques quelques mois à peine, le groupe s'est autres invi- constitué un public fidèle qui va s'élar- tés, qui se gissant, si l'on se fie à leurs spectacles sont laissés qui jouent presque toujours à guichets porter par fermés. Il faut dire que les quatre musi- cette musique ciens, originaires de Montréal, inter- et ont créé prètent avec un rare brio ces musiques une atmos- traditionnelles. Pas tout à fait cepen- phère singulière. QUÉBEC FRANÇAIS ÉTÉ 1997 NUMÉRO 106 95
Polo », « Bouchara », « Zipangu » et OnomatOpoiia I Jean-Louis Daulne « Lonely Child », quatre pièces, En terminant, il y a un album qu'il composées à peu près à la même est difficile de passer sous silence époque (1978-1981) et qui sont fort puisqu'il se démarque de la produc- représentatives du style Vivier privi- tion actuelle : il s'agit de celui de légiant, comme le souligne Alain Jean-Louis Daulne, qui nous vient de Poirier, l'un des auteurs du livret Belgique. L'originalité de la musique d'accompagnement, « un sens har- d'OnomatOpoiia tient « au parti-pris monique inouï aux timbres comple- musical axé sur l'univers de la voix, xes (...) et l'essence vocale. Il s'agit celui des onomatopées, du souffle, d'œuvres pour petit orchestre et voix des rythmes et des bruits naturels ». d'hommes et de femmes qui témoi- Daulne produit avec son corps des gnent des préoccupations de Vivier, mais qui font aussi état de souvenirs de voyages, des souvenirs musicaux s'entend. La subtilité de cette musi- que ne peut qu'émouvoir tant le drame intérieur qui y est exprimé est profond alors que l'interprétation permet de saisir toute la richesse et la subtilité de ces compositions. Dolorès I Jean-Louis Murat Même s'il est peu connu au Québec, Jean-Louis Murat con- naît une très bonne carrière en France. Son disque Dolorès, qu'il est venu lancé au dé- but du printemps, sons qui ont tôt fait de mérite le détour. Sous se fondre avec ceux des une pochette provo- instruments afin de créer cante à souhait — du des atmosphères à la fois genre de celle qu'on jazzée, rap, africaine, aurait peine à croire voire plus simplement qu'elle ait été produite rock. Ce travail ne serait au Québec — Murat rien sans la voix et les raconte en douze textes de Daulne qui se chansons la perte d'un amour dont on ne se remet jamais tout à jouent du langage au même titre que la musi- que con- Jean fait. « Fort Alamo », que l'on a entendu sur les ondes, est crète qu'il produit affecte Leloup représentatif du climat de l'album et la musique des ins- du style de l'artiste. Murat récite ses truments. Le résultat textes plus qu'il ne les chante sur n'en est que plus une musique qui sert d'accompagne- ment plus qu'elle n'appuie les paro- les. C'est d'ailleurs à ce niveau que heureux car le ma- riage entre l'innovation et la tradition est une Arthur H. réside l'intérêt principal de Dolorès : réussite sur toute la ligne. tous écrits par Murat, les textes sont C'est le premier album du comme autant d'aveux sur une rela- lauréat du prix Québec/Wallo- tion qui a mal fini et dont les traces nie-Bruxelles 1996 et il ne fait semblent indélébiles : « Pas de mots/ nul doute que le passage de cet Plus de mots de sensations/ Rien artiste zaïro-belge sur nos scènes de neuf/ Plus de rêves à partager » devrait confirmer son talent. (Margot). L'ambiance du disque est Le choix et la diversité ne marquée par cette rupture et s'en- manque pas, l'essentiel est tend comme l'expression d'un écor- de choisir la bonne musi- ché vif. que au bon moment. 96 QUÉBEC FRANÇAIS ÉTÉ 1997 NUMÉRO 106
Spectacles d'été Lire Pour faire durer l'instant J'ai déjà d i t beaucoup de bien des a l b u m s de Jean Leloup et d ' A r t h u r H. et je serais t e n t é de renchérir en parlant de leur spectacle respectif. LiiisLmt nicmc NOUVELLES • ROMANS • ESSAIS Du premier, o n dirait qu'il s'agit d'une p r e s t a t i o n o ù l'énergie brute c u l m i n e à t o u t instant et qui ne laisse que peu d'espace pour que le spectateur puisse récupérer. A u Capitol en m a i dernier, il a d o n n é une Gilles PELLERIN p e r f o r m a n c e de plus de 2 heures et d e m i , d o n t un rappel q u i a duré Nous aurions un petit genre Publier des nouvelles plus de t r e n t e m i n u t e s !, d u r a n t laquelle il a interprété des chansons Essai, 221 pages ; 24,95 $ puisées dans ses t r o i s a l b u m s avec une p r é d o m i n a n c e des pièces d u Cette réflexion originale sur le D ô m e , s o n plus récent disque. Les chansons se succédaient à u n genre de la nouvelle, sous l'angle r y t h m e d'enfer, Leloup préférant la m u s i q u e au discours, mais cela de la poétique, de la didactique, de i m p o r t a i t peu dans u n c o n t e x t e o ù régnait l'esprit de fête. C'est ce la critique et du marché, tourne au plaidoyer pour la lecture et la littérature. côté festif que l'on retient ; à la différence de bien d'autres spectacles « [cet] essai explore les grandeurs d'un genre où d o m i n e l'aspect de célébration quasi-liturgique de la chanson, ici, mineur [...] : un grand texte ne se mesure pas l'auditeur est entraîné dans un feu roulant de chanson o ù l'éclairage, à son seul nombre de pages. » le son et l'atmosphère générale de la salle sont en parfaite symbiose. Pierre Monette, Voir Hans-Jurgen GREIF À l'inverse, A r t h u r H. se présente sur scène avec son piano et ses Solistes musiciens et ouvre ses t e x t e s de chansons sur de plus vastes ensem- Nouvelles, 227 pages; 24,95 $ bles qui sont c o m m e a u t a n t de mises en s i t u a t i o n . S'il interprète les ax [...] un produit québécois [à] la mécanique allemande, c'est-à-dire pièces de son a l b u m Trouble-fête, il ne néglige pas pour autant ses d'une extrême précision et d'une autres chansons, mais les passe au crible de nouveaux a r r a n g e m e n t s rigueur sans faille. » musicaux mieux adaptés à sa nouvelle équipe de musiciens. A r t h u r Pierre Cayouette, Le Devoir H., c o m m e Jean Leloup, sait créer une ambiance et c o m p o s e r un uni- vers o ù chacune des chansons est c o m m e un é l é m e n t d ' u n m o n d e Le fantastique même Une anthologie québécoise i m a g i n é q u ' i l présente aux spectateurs. A la différence d u premier, o ù Rassemblée et présentée les jeux de lumières accentuent le caractère à la fois halluciné mais par Claude GRÉGOIRE aussi très réaliste des pièces, A r t h u r H. procède à partir d ' u n système 238 pages ; 14,95 $ POCHE simple de lumières - des soucoupes lumineuses de diverses d i m e n - Plutôt que les images fantastiques sions placées derrière le g r o u p e - qui s e m b l e n t refermer la scène sur canoniques, cette anthologie propose elle-même. Avec leur habit noir et leur chemise blanche, les m u s i - des thèmes et motifs éminemment contem- ciens d ' A r t h u r H. d o n n e n t l'impression d ' u n certain classicisme que porains : altérations spatio-temporelles, double, rêve. vient d é m e n t i r leur p r e s t a t i o n . Pour ceux qui l'auraient m a n q u é lors de son dernier passage en m a i , vous pourrez vous reprendre lors des Jean Pierre GIRARD Francofolies de M o n t r é a l en août prochain. Pour Leloup, c'est à sur- Haïr ? veiller. Nouvelles 167 pages ; 19,95 $ « [...] il y a le style Girard [...] le texte progresse par accumulations, par avancées des détails vers l'essentiel, par accélérations et ralentissements, comme s'il X accompagnait les personnages dans leur quête du sens. » Robert Chartrand, Le Devoir Légende dorée Pierre OUELLET Roman, 212 pages, 24,95 $ « [...] une plongée non assistée au fond de tout ce que le mot « dieu » [...] dit d'absence affolante. » Julie Sergent, Le Devoir Georges DESMEULES et Christiane LAHAIE Les classiques québécois Coll. « Connaître » 112 pages ; 9,95 $ POCHE Les classiques québécois dresse le portrait des grandes figures mytho- logiques qui traversent notre production romanesque de 1837 à maintenant. QUÉBEC FRANÇAIS ÉTÉ 1997 NUMÉRO 106 97
Vous pouvez aussi lire