Alberto Comparini, Geocritica e poesia dell'esistenza
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Italies Littérature - Civilisation - Société 23 | 2019 In corpore sano Alberto Comparini, Geocritica e poesia dell’esistenza Milano-Udine, Mimesis Edizioni, 2018, 356 pages. Kim Ferrini Édition électronique URL : http://journals.openedition.org/italies/7846 ISSN : 2108-6540 Éditeur Université Aix-Marseille (AMU) Édition imprimée Date de publication : 2 décembre 2019 Pagination : 453-456 ISBN : 979-10-320-0243-8 ISSN : 1275-7519 Référence électronique Kim Ferrini, « Alberto Comparini, Geocritica e poesia dell’esistenza », Italies [En ligne], 23 | 2019, mis en ligne le 03 mars 2020, consulté le 29 mars 2020. URL : http://journals.openedition.org/italies/7846 Ce document a été généré automatiquement le 29 mars 2020. Italies - Littérature Civilisation Société est mis à disposition selon les termes de la licence Creative Commons Attribution - Pas d'Utilisation Commerciale - Pas de Modification 4.0 International.
Alberto Comparini, Geocritica e poesia dell’esistenza 1 Alberto Comparini, Geocritica e poesia dell’esistenza Milano-Udine, Mimesis Edizioni, 2018, 356 pages. Kim Ferrini RÉFÉRENCE Alberto Comparini, Geocritica e poesia dell’esistenza, Milano-Udine, Mimesis Edizioni, 2018, 356 pages. L’attenzione va posta sulla possibilità che la letteratura ha di rappresentare, con le risorse che le sono proprie, anche i cambiamenti di paradigma che la scienza mette a punto ; la sua prerogativa è quella di costruire narrazioni efficaci, che abbiano cioè effetto sul modo in cui percepiamo la nostra esistenza in relazione a quella degli altri, sul modo cioè in cui abitiamo il nostro ecosistema sociale e biologico. N. Scaffai1 1 L’essai Geocritica e poesia dell’esistenza d’Alberto Comparini a été publié dans la collection « I sensi del testo » de la maison d’édition Mimesis. Il s’agit d’un travail important sur les rapports entre la littérature et la philosophie en Italie au XX e siècle ; le travail est d’autant plus appréciable qu’il porte sur une thématique vivante et in fieri que l’auteur appelle géo-existentialisme (p. 51). 2 Après l’introduction, l’essai se développe en quatre chapitres et s’achève sur un Index des noms cités : les objectifs poursuivis par l’auteur et indiqués dans l’avant-propos sont délicats, car il est toujours risqué de conduire une recherche sur un nouvel instrument d’investigation de la poésie, de la géographie et de l’histoire. En effet, l’objet double du livre est : 1) de construire les bases d’une herméneutique littéraire Italies, 23 | 2019
Alberto Comparini, Geocritica e poesia dell’esistenza 2 fondée sur la géocritique d’école française et allemande, 2) de vérifier, à l’aide du modèle créé dans la première partie du travail, les interférences entre la poésie de Vittorio Sereni et Antonia Pozzi et la philosophie au XXe siècle. L’auteur a préféré un modèle synchronique au lieu d’un modèle diachronique et thématique, pour identifier des relations directes entre texte et contexte et entre littérature et espace. Alberto Comparini propose une narration géocritique où la primauté épistémologique est accordée à la géographie plutôt qu’à l’histoire, en s’inspirant des travaux réalisés dans le cadre de la géocritique française (Henri Lefebvre, André Frémont, Bertrand Westphal), allemande (Martina Löw, Karl Schlögel) et américaine (Edward Soja). Au cœur de l’enquête, il y a l’espace milanais de l’École Banfi, avec Luciano Anceschi et Enzo Paci, et la poésie de l’existence de Antonia Pozzi et Vittorio Sereni. 3 Le premier chapitre, intitulé Geo-esistenzialismo letterario. Storia, teoria, prospettive, explore les étapes de la genèse du rapport entre existentialisme et littérature et développe un modèle géographique fondé sur les villes de Rome, Florence, Milan, Turin et Padoue, dans lesquelles on a vu naître l’existentialisme en Italie, et sur la dialectique entre espace et pensée. L’histoire, la philosophie et l’esthétique redécouvrent leurs racines géographiques, se transformant en formes d’expression de la pensée liées à un lieu. Dans notre cas, cette découverte concrétise l’assimilation de la philosophie de l’existence par les écrivains italiens dans leurs textes poétiques. Entre la chute du Fascisme et le début de la première République, l’existentialisme était devenu un phénomène dans tout le pays. Luciano Anceschi, parmi les disciples d’Antonio Banfi, conçoit la littérature comme une reconfiguration de son identité à travers un dialogue avec l’autre. La mission de l’homme de lettres est de retrouver les fondations de la société civile dans les textes ; la valeur esthétique est un espace avec différentes configurations et l’intellectuel doit saisir l’état de l’art dans sa diversité. 4 Dans la littérature étrangère les rapports entre littérature et existentialisme n’ont pas manqué : Rosario Assunto souligne cette relation d’échange grâce au travail de Dostoïevski, de Kafka, de Gabriel Marcel et de Jean-Paul Sartre. Selon Assunto, il est possible de surmonter la crise de la conscience moderne et de créer un espace philosophique et littéraire (il définit Dostoïevski comme un « ami spirituel de Kierkegaard »). 5 La littérature existentialiste consiste en un retour aux sources : reprendre l’existence signifie récupérer le sens et la matrice empirique et corporelle de soi dans l’histoire. En effet, en suivant la perspective d’Heidegger, on expérimente la vérité à partir d’une expérience qui a une valeur existentielle. Après la Seconde Guerre mondiale, l’historiographie italienne identifie une date symbolique, 1971, année de la publication de Poetica dell’essere. Cesare Pavese d’Elio Gioanola, pour le commencement de l’interprétation existentialiste des ouvrages des écrivains italiens. L’existentialisme n’est pas extérieur à l’œuvre mais en fait partie intégrante : « in quella lettura era soprattutto l’esistenzialismo heideggeriano, ricco di aperture all’ontologia, capace di farmi superare le interpretazioni storicistiche all’epoca dominanti, sia in versione idealistico-crociana sia in versione materialistico-marxista » (p. 34). Toutefois, l’existentialisme a un caractère métamorphique et il convient, par conséquent, d’approuver de nouvelles versions des théories de l’existence. 6 Après une période de monopolisation par l’histoire et par le temps, on voit naître une définition d’espace indépendant et rempli de matière signifiante (on parle de la qualité et de la nature des espaces). Les conditions nécessaires de cette redéfinition sont Italies, 23 | 2019
Alberto Comparini, Geocritica e poesia dell’esistenza 3 l’affaiblissement progressif du caractère historique traditionnel et le découplage entre temps et progrès. Bien que l’analyse de l’espace soit encore fragmentée et difficile à atteindre, l’espace commence à émerger d’une matière aussi hétérogène que le temps pendant le Postmodernisme (cf. Remo Ceserani, D’improvviso molti parlano di postmoderno: ma cos’è? dans Raccontare il postmoderno, Bollati Boringhieri, 2013, p. 29.). 7 Pour comprendre l’étude de Comparini sur les intersections géographiques entre littérature et philosophie, il faut être bien conscient que : « Costruire una matrice geografica intorno a un fenomeno storico-letterario permette di individuare i cardini di uno specifico evento, il fulcro attorno al quale gli esistenzialismi ruotano ; esso assurge così a punto di incontro, sincronico e spaziale, tra filosofia della storia e storia della letteratura, e a chiave di volta per il passaggio da una critica storicizzante a una critica spazializzante » (p. 45). Pour ce faire, premièrement, l’auteur explore l’entrée de la philosophie de l’existence à Rome (conférence sur la poésie de Friedrich Hölderlin avec Martin Heidegger le 2 avril 1936), Milan (c’est surtout Antonio Banfi qui a diffusé un savoir-faire en matière d’existentialisme dans l’Université), Turin (étude sur les rapports entre existentialisme et marxisme relatifs à la philosophie de l’histoire) et Padoue (Luigi Stefanini a introduit la philosophie de Heidegger en Italie et il a été l’auteur de la première étude italienne sur l’existentialisme). Ces espaces géométriques sont les paramètres des espaces anthropologiques où l’existentialisme a modifié le discours littéraire. 8 Cette philosophie approfondit l’existence du réel et de l’actualité de l’être. Au centre de ces espaces géométriques il y a l’individu qui devient catégorie fondamentale pour la compréhension de l’être : « Questa singolarità della parola poetica come agente e collettore delle istanze dell’uomo nel campo della filosofia dell’esistenza costituisce il baricentro di questo spazio geometrico, dove letteratura e filosofia sono latori della cifra antropologica dell’essere » (p. 95). Le moi peut connaître la réalité à partir de la conscience de soi : selon Antonio Banfi, c’est le modèle d’interprétation qui peut résoudre la crise de la raison (crise comme rénovation). Cette dernière situation sera également traitée en ce qui concerne la littérature selon les étudiants d’Antonio Banfi, Antonia Pozzi et Vittorio Sereni. Par conséquent, il est impossible de comprendre les deux poètes sans faire face à la philosophie existentialiste et phénoménologique de Banfi. 9 On trouve les interférences les plus évidentes entre phénoménologie et existentialisme dans l’œuvre Parole d’Antonia Pozzi : il s’agit d’un journal lyrique qui suit l’existence empirique et poétique de la poétesse (« non per astratto ragionamento, ma per un’ esperienza che brucia attraverso la mia vita, per una adesione innata, irrevocabile, del più profondo essere, io credo, Tullio, alla poesia », p. 128). 10 Enzo Paci, un autre élève de Banfi, a étudié la complexité de la réalité à travers le raisonnement philosophique, alors qu’Antonia Pozzi a choisi la poésie pour faire la même chose, en concrétisant la relation duale entre sujet qui connaît et l’objet réel. Dans les études de critique littéraire, le suicide de la poétesse est souvent rappelé mais sous un jour différent par rapport à la juste conception philosophique : pour Husserl la mort est une limite, pour Heidegger la mort est la base de la certitude, mais pour Pozzi la mort est une expression lyrique de la présence du sujet – non seulement humain – dans le temps et dans l’espace, « […] la morte diventa un istante privilegiato di conoscenza » (p. 51). Pour Sereni aussi, la mort participe à l’action humaine, en tant que phénomène auquel l’homme tend pour toute la vie. Italies, 23 | 2019
Alberto Comparini, Geocritica e poesia dell’esistenza 4 11 Dans la dernière partie du livre, Alberto Comparini se consacre entièrement à la poésie de Vittorio Sereni, analysée entre phénoménologie, existentialisme, relationalisme et nihilisme. Pendant la conférence sur l’École de Milan organisée par la Maison de la Culture (vidéo Youtube : SCUOLA DI MILANO – alle radici della Casa della Cultura, 2016), Stefano Raimondi mentionne Giancarlo Vigorelli (Carte d’identità, 1989) qui décrit Sereni comme quelqu’un qui brûle de vie. Sa poésie n’a pas la négativité et les influences littéraires des autres écrivains. La rigueur obstinée du rationalisme critique de Banfi est intégrée et sauvegardée par les paroles pleines de pragmatisme : les événements quotidiens sont ralliés au principe variable du réel. À partir du premier recueil, Frontiera, le moi s’incarne dans le temps et successivement devient capable d’accueillir le “tu” de l’autre, le toi des choses, en empêchant l’adoration du moi lyrique et une anesthésie de la parole, surtout dans la période poétique après 1965. Sereni écrit un essai significatif sur le rapport entre lyrisme et expérience, Esperienza della poesia (1950) où il affirme que dans le monde réel la poésie connecte l’histoire et l’esthétique. Cela est évident surtout dans Diario d’Algeria, où la lyrique dialogue régulièrement avec la composante éthique de la dimension collective et l’horizon philosophique de la dimension individuelle. En outre, le territoire de la guerre – pendant la Seconde Guerre mondiale Vittorio Sereni a été prisonnier en Algérie – est un espace de mort (espace principal qui accueille les personnages avec qui le moi lyrique dialogue dans Strumenti umani) mais en même temps riche d’idées pour les intuitions existentialistes de l’auteur : dans un état d’incertitude le sujet prend conscience de la possibilité de se réaliser par le biais de la poésie. Dans Strumenti umani le dialogue est une condicio sine qua non, « il cui sopravalore trova predicato di esistenza nella voce dei morti e nella relazione che l’io riesce a instaurare con loro sul piano poetico e filosofico » (p. 316). La parabole philosophique accompagne toutes les œuvres de Sereni, Frontiera (1941), Diario d’Algeria (1947), Strumenti umani (1965) et Stella variabile (1981), et elle est accompagnée, à son tour, par une poésie des choses ; dans sa dernière œuvre, Sereni prend part à la phénoménologie du monde selon un nihilisme méthodique où la variation et la contradiction des choses deviennent l’espace diachronique du XX e siècle et où l’être perd le privilège de créer le réel. 12 Comparini opte pour un balayage poétique et temporel : « ci permetterà di verificare a livello testuale come la riflessione estetica di Sereni abbia prodotto un sistema letterario dove la postura lirirca dell’io si articoli lungo piani fenomenologici ed esistenzialisti, secondo alcune coordinate filosofiche che dialogano direttamente e indirettamente con i testi di Banfi, Husserl, Paci […], attraverso i quali il poeta luinese ha espresso la propria esperienza, come uomo e come poeta, della fenomenologia e della filosofia dell’esistenza » (p. 160). 13 Le livre d’Alberto Comparini s’inscrit fort bien dans le cadre des nouvelles approches interdisciplinaires de recherche dans l’étude sur la littérature italienne. Espérons que cet intérêt de la critique textuelle pour l’herméneutique philosophique sera l’occasion de découvrir des nouveaux instruments d’investigation. Italies, 23 | 2019
Alberto Comparini, Geocritica e poesia dell’esistenza 5 NOTES 1. Letteratura e ecologia, Carocci editore, 2018, p. 41. AUTEURS KIM FERRINI Aix Marseille Université, CAER, Aix-en-Provence, France Italies, 23 | 2019
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