Conjoncture Logement Prévisions 2019-2020 Un atterrissage sans rupture - BPCE

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Conjoncture Logement Prévisions 2019-2020 Un atterrissage sans rupture - BPCE
Direction Etudes
Conjoncture Logement                                                                                              & Prospective
                                                                                                     Flash n° 312 • Juillet 2019
Prévisions 2019-2020
Un atterrissage sans rupture

 Non-confidentiel                                 Rédaction au 29 juillet 2019          Par Alain Tourdjman et Bertrand Cartier

     SYNTHESE
         1)   Une activité très dynamique pour les transactions dans l’ancien, mais un ralentissement de la promotion
              et de la construction neuve

         2)   Des taux d’intérêt qui se maintiennent à des niveaux historiquement bas, avivant la production de
              nouveaux crédits sans relancer pour l’instant les vagues de rachats/renégociations connues les années
              précédentes

         3)   Dans un contexte économique favorable en 2019 (pouvoir d’achat en hausse, taux de chômage en
              baisse), la solvabilité des ménages reste bonne et soutient la hausse des prix, mais les perspectives sont
              moins positives en 2020

         4)   Pour 2019-2020, un scénario d’atterrissage mais sans rupture de la plupart des variables clés :
              - Les taux d’intérêt devraient remonter très graduellement à partir de niveaux exceptionnellement
                  bas ;
              - Le pouvoir d’achat des ménages devrait ralentir en 2020 après les effets des mesures de soutien de
                  2019 ;
              - Le taux de chômage pourrait continuer de baisser légèrement ;
              - Des prix toujours en hausse, malgré leur ralentissement, s’ajustant avec retard au recul de la
                  solvabilité des ménages ;
              - Des politiques publiques toujours actives, mais réorientant leur soutien dans l’optique d’une
                  modération budgétaire.

         5)   Ainsi le scénario 2019-2020 considère :
              - Une hausse des ventes dans l’ancien de +2,6% en 2019 et une baisse de -2,0% en 2020 ;
              - Une baisse des ventes dans le neuf de -4,2% en 2019 et de -6,4% en 2020 ;
              - Une hausse des prix moyens dans l’ancien de +3,5% en 2019 et de +3,0% en 2020 ;
              - Une hausse des prix moyens dans le neuf de +3,5% en 2019 et +2,5% en 2020 ;
              - Des encours de crédits à l’habitat qui continuent de progresser, mais à un rythme plus faible à partir
                   de 2020 (+6,2% en 2019 et +4,8% en 2020) ;
              - Des taux d’intérêt fixes moyens des crédits à l’habitat maintenus à des niveaux historiquement bas
                   en 2019-2020 mais avec une pression réglementaire et financière à la hausse en fin de période.

         6)   A moyen terme, le marché immobilier sera déterminé par :
              a) La politique monétaire au niveau international ;
              b) La réponse des acteurs à quatre grandes transitions au niveau domestique : énergétique, numérique,
              patrimoniale et territoriale.
Conjoncture Logement Prévisions 2019-2020 Un atterrissage sans rupture - BPCE
Une conjoncture du logement favorable mais sous tension

Un dynamisme                 jusqu’alors          inégalé   des          Les statistiques sur le premier semestre 2019 montrent
transactions                                                            que la croissance du segment de l’ancien observée fin 2018
                                                                        s’est renforcée, atteignant 994 000 transactions annuelles
Après le ralentissement des transactions dans l’ancien                  à mai 2019, soit une progression de +4% sur un an. Restant
entre 2012 et 2014, un redressement s’est opéré en 2015                 à des niveaux mensuels records similaires à ceux observés
(798 000 ventes) et s’est confirmé en 2016 (845 000).                   depuis 2017 (autour de 80 000), ce début d’année
                                                                        enregistre déjà plus de 410 000 transactions sur 5 mois
                                                                        (contre 398 400 sur la même période en 2017 et 392 100
Graphique 1. Les transactions dans l’ancien                             en 2018). 2019 s’oriente donc vers une nouvelle année
                                                                                                              record.
                                                                                                               Si les volumes de
                                                                                                               transactions       se
                                                                                                               situent à des niveaux
                                                                                                               jusqu’à       présent
                                                                                                               inégalés, ils sont à
                                                                                                               rapporter à la taille
                                                                                                               du       parc      de
                                                                                                                          logements
                                                                                                               disponibles        en
                                                                                                               France,           qui
                                                                                                               augmente de 1% en
                                                                                                               moyenne par an et
                                                                                                               qui place la France
                                                                                                               comme étant le pays
                                                                                                               de l’OCDE ayant le
Sources : CGEDD /DGFIP (Fidji et MEDOC), base notariale                                                        plus de logements
                                                                        rapporté à la taille de sa population (546 logements pour
                                                                        1 000 habitants). Le taux de rotation du parc en 2018 se
Avec 964 000 transactions annuelles, l’année 2017                       situe ainsi aux mêmes niveaux hauts qu’au début des
semblait représenter le haut de cycle, affichant ainsi plus             années 2000, ce qui relativise le caractère exceptionnel du
de 110 000 transactions supplémentaires par rapport au                  nombre de transactions depuis 2017.
précédent record établi fin 2016 (lui-même supérieur de
20 000 ventes aux pics de 2005 et 2012). Mais l’année
2018 surprit avec un volume légèrement plus élevé, à
                                                                               Graphique 2. Taux de rotation du parc de logements
965 000 transactions
annuelles.            Ce
dynamisme
extraordinaire        de
l’immobilier ancien
peut se comprendre
comme                une
combinaison de l’élan
positif de la croissance
économique et du
rôle actif du crédit,
bien qu’il n’y ait pas
eu      de     dispositif
gouvernemental
supplémentaire        de
soutien à la demande.                                                                         Sources : CGEDD/DGFIP, base notariale, Insee

                                                                  -2-
Une divergence entre offre et demande pour la
promotion immobilière                                                    A, Abis et B1), alors que les réservations d’appartements
                                                                         en zone B2 et C sont tombées en 10 ans de 24% à 10% du
L’immobilier neuf a connu en 2018 une demande toujours
                                                                         total des ventes de logements collectifs en France. Cette
soutenue et un ralentissement de l’offre. Les ventes de                  concentration des aides, de la production et des
logements neufs dans la promotion privée se sont                         anticipations de hausses des prix sur les zones tendues
maintenues à des niveaux historiquement élevés (32 220                   pourrait avoir le double effet de soutenir la demande déjà
ventes en moyenne par trimestre, contre 32 660 en 2017)                  forte sur ces zones mais aussi d’entretenir voire
et supérieurs aux précédents pics constatés en 2006 et                   d’accélérer la hausse des prix.
2007. Ce dynamisme sans précédent observé depuis 2 ans
s’explique en partie par le succès du dispositif Pinel : la part         A la différence de la stabilité des ventes, les mises en vente
des investisseurs personnes physiques s’est élevée à 54%                 connaissent un ralentissement depuis le second semestre
en 2017 et à 50% en 2018. Comme par le passé, lorsque                    2018 qui se poursuit début 2019. Le premier trimestre
cette part est égale ou supérieure à 50% des réservations,               2019 affiche des mises en vente en forte baisse de -31%
les ventes annuelles dépassent nettement les 100 000                     par rapport au premier trimestre 2018, à 23 867, et une
unités. De ce point de vue, les années 2015-2018 (dispositif             baisse en cumul annuel de -12% à 114 197. Cette tendance
Pinel) s’inscrivent dans la ligne des années 2003-2007                   globale devrait se poursuivre sur les prochains trimestres.
(dispositif Robien/Borloo) et 2009-2011 (dispositif                      Elle s’explique d’abord par la pénurie d’offre de foncier,
Scellier).                                                               renforcée par la prudence des élus en matière d’octroi de
                                                                         permis de construire en période pré-électorale. Par ailleurs
La fin de l’éligibilité au dispositif Pinel pour les zones B2 et         la stratégie des promoteurs face aux évolutions du marché
C le 15 mars 20191 a contribué au maintien de volumes de                 du neuf alimente ce ralentissement. En effet, le résidentiel
ventes importants en 2018. Comme pour le T1 2018, la                     neuf perd une partie de son soutien via le resserrement
part des investisseurs au T1 2019 se situe à 46%, un niveau              des aides au logement lié notamment aux changements
bas en comparaison des autres trimestres, s’expliquant en                des conditions d’octroi et du zonage pour les dispositifs
partie par un effet d’essoufflement après une fin d’année                PTZ et Pinel, ainsi qu’aux effets induits de l’évolution
marquée par un impératif de bouclage des projets avant
                                                                         imposée au modèle économique du monde HLM.
l’arrêt partiel du dispositif Pinel. Pressentie fin 2017 et
actée fin 2018, cette réforme contribue au recentrage de
la promotion privée sur les zones les plus tendues (zones                Les stocks de logements neufs ont largement dépassé
                                                                         courant 2017 la barre symbolique des 100 000 unités à
Graphique 3. La promotion immobilière                                    laquelle ils étaient accrochés depuis 4 ans et ont atteint un
                                                                                                               plateau       historique
                                                                                                               courant 2018 autour
                                                                                                               de 117 000. Grâce à la
                                                                                                               vitalité de la demande
                                                                                                               et au ralentissement
                                                                                                               de l’offre, l’année
                                                                                                               2018 s’est conclue
                                                                                                               avec un stock en
                                                                                                               réduction à 110 550
                                                                                                               logements proposés à
                                                                                                               la vente, un niveau
                                                                                                               cependant supérieur
                                                                                                               de 2% à celui de fin
                                                                                                               2017.       Dans       la
                                                                                                               continuité du T4
                                                                                                               2018, le premier
                                                                                                               trimestre          2019
Sources : SDES, ECLN                                                                                           confirme le niveau

1
 A condition que le projet ait fait l’objet d’une demande                signature de l’acte d’acquisition soit intervenue avant le
de permis de construire avant le 31/12/2017 et que la                    15 mars 2019

                                                                   -3-
toujours élevé des stocks mais en réduction à 105 860                  fin 2018, représentant seulement 3,7% de l’ensemble des
unités (-7% sur un an). Cette baisse devrait persister sur les         stocks (contre 4% un an auparavant). De plus, les stocks
prochains trimestres avec le ralentissement de la                      d’appartements en cours de construction ont également
construction qui induit une moindre alimentation des                   eu tendance à se réduire. Par conséquent, seuls les stocks
stocks et avec des délais d’écoulement proches de 10 mois
                                                                       en projet ont augmenté depuis le T1 2016 (+42%).
au T1 2019 (9,6 mois pour les appartements et 11,7 mois
                                                                       Néanmoins, avec cette part de stocks plus facilement
pour les maisons).
                                                                       arbitrable si nécessaire, la variable d’ajustement des
                                                                       annulations est davantage utilisée. Dès lors, si le volume
Si le total des stocks d’appartements se situait au T3 2018            important des stocks peut être source de risque en cas de
à des niveaux au plus haut, les stocks achevés sont quant à            retournement de marché, sa part arbitrable est plus
eux au plus bas sur 10 ans. Après avoir atteint en 2014 les            rassurante quant à la capacité des acteurs à gérer le
6 000 logements collectifs achevés, l’encours n’a fait que             ralentissement en cours.
diminuer, pour finalement tomber à près de 3 700 unités

La construction continue de ralentir
Les mises en chantier totales ont connu un rebond entre
2015 et 2017. Cette orientation positive, tirée tant par le            restent stables fin mai 2019 sous leur niveau moyen de
logement collectif que par l’individuel pur, a permis                  longue période, légèrement en baisse depuis 2014 à 5 mois
d’observer fin 2017 des niveaux élevés de mises en                     pour le logement individuel, et inférieurs à 11 mois pour le
chantier comparables aux volumes importants de 2010-                   logement collectif depuis 2016.
2011, à 430 000 unités. L’année 2018 aura été l’année du
retournement, avec un ralentissement du nombre
d’autorisations annuelles (-7% sur un an en décembre                   A fin mai 2019, le taux d’annulation des permis de
2018) qui a alimenté le recul des mises en chantier (-4%).             construire accordés au cours des 3 derniers mois est en
                                                                       légère baisse depuis août 2018 pour les maisons
Les niveaux restent cependant élevés en termes
                                                                       individuelles à 11,5%, à un niveau inférieur à sa moyenne
historiques.
                                                                       de long terme. En comparaison, le taux d’annulation pour
                                                                       les logements collectifs se situe sur une tendance
La première partie de l’année 2019 laisse augurer une                  haussière depuis 2016 à 16,8%, un niveau supérieur à sa
accentuation de la tendance baissière de la construction.              moyenne de longue période (15,8%).
Le recul des autorisations de construire (-9% en glissement
annuel à fin mai) alimente progressivement la baisse des
mises en chantier (-5% sur la même période). Alors que la                                  Graphique 4. La production de logements
demande de la part des
ménages se maintient
toujours à des niveaux
élevés, l’approche des
élections     municipales
(mars 2020) et le déficit
de terrains à construire
impactent négativement
le renouvellement de
l’offre. De plus, cette
tendance         baissière
s’inscrit     dans      un
contexte de pilotage des
stocks à la baisse par les
promoteurs. Face à une
demande dynamique,                                                         Sources : SDES, Sit@del2, données arrêtées à fin mai 2019 en cumul
les délais de mises en chantier                                                                                                        annuel

                                                                 -4-
Le levier du crédit est un véritable soutien de la                  l’habitat n’ont cessé de reculer sur cette même période. La
demande actuelle                                                    part renégociée/rachetée des crédits à l’habitat est de
Dans la continuité de l’année 2017, la bonne tenue de               17,8% en mai 2019 (contre 19,1% un an plus tôt) et se situe
l’immobilier en 2018 s’est appuyée principalement sur la            à des niveaux mensuels comparables sur l’ensemble du S1
faiblesse des taux d’intérêt qui, après être légèrement             2019. De même, la seule part des rachats de crédits
remontés en 2017, ont baissé sur 2018 pour atteindre un             externes est ainsi passée de 23,6% en 2017 à 9,5% de la
point bas en décembre à 1,48% pour les crédits à taux fixes         production en 2018, et se maintient à ce niveau début
à long terme (données Banque de France, proxy d’un TEG).            2019.
Par la suite le taux débiteur moyen a continué de
descendre sur les cinq premiers mois de 2019 vers 1,46%             Face à des taux débiteurs de plus en plus bas, la probabilité
en mai, soit un nouveau plus bas historique. A titre de             que les ménages ayant un intérêt à renégocier/faire
comparaison, les taux débiteurs ont été divisés par 2               racheter leur crédit augmente. Cependant, la combinaison
depuis la mi-2014 et par 4 depuis fin 2002.                         d’un volume conséquent de crédits ayant déjà été (parfois
                                                                    plusieurs fois) renégociés/rachetés sur la période récente
                                                                    et un fort volume de production de crédits à l’habitat
Dans un contexte de double hausse des prix et des                   devraient limiter en nombre et en part l’impact d’une
transactions qui s’est poursuivie en 2018, l’encours de             nouvelle vague de renégociations/rachats. Selon l’agence
crédits à l’habitat des ménages résidents a atteint 1 120           de notation canadienne DBRS, 30% du stock de crédits à
milliards d’euros à fin 2018, en hausse de +5,8% sur un an.         l’habitat à fin avril 2017 avaient été accordés sur les 12
Le taux de croissance de l’encours se maintient à des               derniers mois. Ce phénomène a renforcé l’impact négatif
                                                                    sur le taux de marge nette de l’encours lié à la baisse des
niveaux au plus haut depuis 2012, en hausse de +6,3% sur
                                                                    taux à la production des nouveaux crédits (réduisant ainsi
un an à mai 2019. Sur les 5 premiers mois de 2019, la
                                                                    le taux d’intérêt moyen de l’encours).
production mensuelle est en moyenne de 19,6 G€ et
s’établit depuis le début de l’année à 97,8 G€ (contre
87,8 G€ sur la même période en 2018, avec une part
similaire de rachats/renégociations). Le contexte de taux                                      Graphique 5. Le crédit à l’habitat
ainsi que la politique
de          distribution
volontaire             et
raisonnée             des
banques         (critères
d’octroi stables depuis
mai 2018) devraient
maintenir en 2019 la
croissance             de
l’encours      et       la
production de crédits
nouveaux       à      des
niveaux élevés, tant en
comparaison
historique depuis 2012
que géographique par                                                                                      Source : Banque de France
rapport à la plupart pays de la zone euro.

La baisse tendancielle des taux a entraîné deux vagues
importantes de rachats/renégociations survenues courant
2015 et en 2016-2017, avec un pic à 62% de la production
mensuelle en janvier 2017. Cette part est ensuite tombée
à des niveaux inférieurs à 20% depuis le début de l’année
2018, alors même que les taux d’intérêt des crédits à

                                                              -5-
Les prix continuent d’augmenter et attaquent la                    contre +3,0% en Ile-de-France hors Paris. Alors que Paris
solvabilité des ménages                                            connaît un ralentissement du rythme annuel de ses
                                                                   hausses de prix dans le collectif (+7,6% en glissement
Entre 1996 et 2008, les prix des logements en France ont
                                                                   annuel au T1 2018), la région Ile-de-France hors Paris voit
évolué parallèlement, sans qu’il y ait de véritables
                                                                   son rythme de croissance augmenter (+2,8% au T1 2018).
disparités en termes de dynamisme selon les zones
                                                                   L’aménagement du Grand-Paris amène une valorisation
géographiques. La crise financière aura rebattu les cartes
                                                                   forte de zones autrefois moins dynamiques, notamment
en amenant une profonde transformation dans la
                                                                   dans les villes devant accueillir sur les prochaines années
structure des prix de l’immobilier français au fur et à
                                                                   l’ouverture d’une nouvelle gare ou station de métro.
mesure des années. L’abondance de liquidités, la baisse
des taux, l’allongement des durées, l’assouplissement des
conditions d’octroi et la recherche de rendements positifs          Graphique 6. Prix moyens au m² appartements anciens en
ont alimenté la demande ainsi que des tendances                                           2018 et évolution entre 2010-2018
spéculatives localisées sur des
zones dites « tendues » (à travers
notamment l’immobilier neuf très
concentré en zone urbaine).

D’une part, les prix dans le neuf ont
continué de croître courant 2018
(+3% sur un an pour les
appartements). D’autre part, la
moyenne des prix dans l’ancien en
France métropolitaine a dépassé
au T4 2017 les très fortes
valorisations de 2007-2008 et à
partir du T3 2018 les records
historiques de 2010-2011. Ainsi la
croissance des prix moyens dans
l’ancien en France s’établit à +3,0%
sur un an au T1 2019 (après +3,3%
en 2018). Bien que le prix moyen
des maisons anciennes soit sur une
tendance haussière, il n’a dépassé
                                                                          Source : Les Prix Immobiliers, calculs de BPCE direction Etudes &
ni les niveaux élevés de 2007-2008, ni le record de 2011.
                                                                                                                                Prospective
Par contre le prix moyen des appartements en France
métropolitaine est allé bien au-delà des niveaux de 2007-
2008 et a même dépassé au T1 2018 son précédent record             A l’image de Paris et de la région Ile-de-France, cette
de 2011.                                                           tendance à la hausse des prix dans les grandes villes
                                                                   françaises est en train de changer de dynamique. D’une
                                                                   part, la croissance des prix des appartements conserve un
Dans ce contexte, les grandes métropoles françaises                rythme soutenu mais connaît un ralentissement dans les
connaissent pour la plupart une croissance soutenue des            grandes villes. Par exemple entre le T4 2017 et le T4 2018,
prix sur un an au T2 2019, exceptés principalement Reims,          Paris passe de +8,7% à +5,9%, Lyon de +9,6% à +7,7% et
Pau, Mulhouse, Dunkerque et Saint-Etienne (selon les               Marseille de +5,4% à +1,8%. D’autre part, les aires
données LPI-Seloger). Les notaires constatent de leur côté         métropolitaines observent un maintien voire une
que les prix progressent sur un an au T1 2019 de +9,5%             accélération du rythme de croissance de leurs prix. Ainsi la
pour les appartements lyonnais, de +4,7% pour les maisons          hausse autrefois concentrée dans les grandes villes se
lilloises, et de +1,8% au T4 2018 pour les appartements            diffuse récemment de manière plus large à leur zone
marseillais. Concernant Paris, le prix des appartements a          d’influence, avec une dynamique plus marquée dans les
augmenté de +6,5% en glissement annuel au T1 2019                  espaces urbains que ruraux. Hors Ile-de-France, l’évolution

                                                             -6-
des prix des maisons en région se trouve sur une tendance                 Graphique 7. Indice des prix des logements anciens en
haussière depuis le T1 2017, à +2,5% au T1 2019. Cette                                            France (base 100 au T1 1996)
croissance se renforce par exemple en région Auvergne-
Rhône-Alpes (+4,5%
au T1 2019 contre
+2,5% au T1 2018),
dans les Hauts-de-
France        (+1,9%
contre +1,2% un an
plus tôt) et en PACA
(+3,4% au T4 2018
contre +1,4% au T4
2017). De manière
plus spécifique, la
dynamique des prix
des appartements va
croissante des zones
peu tendues (+1,0%
                                                                                                             Sources : Notaires-Insee
sur un an au T1 2019 pour les agglomérations de moins de
10 000 habitants et zones rurales) aux centres-villes
d’agglomération de plus de 10 000 habitants (+3,3%).

Les critères d’octroi des crédits retrouvent leurs
niveaux d’avant-crise
Avec un marché du crédit immobilier dynamisé par les taux            L’allongement de la durée des crédits combiné à
bas, caractérisé par la solidité structurelle du profil des          l’aplatissement de la courbe des taux a permis aux
emprunteurs et de son modèle de financement, le risque               ménages d’emprunter plus sans que le total de leurs
de crédit demeure limité selon l’ACPR. Les critères d’octroi         charges récurrentes (y compris les remboursements de
se sont tout de même graduellement assouplis jusqu’en                crédits) rapporté à leurs revenus n’augmente
2018, pour rejoindre parfois leurs niveaux atteints en               drastiquement. Le taux d’effort moyen a ainsi légèrement
2007-2008.                                                           progressé pour la 3ème année consécutive à 30,1%, restant
                                                                     en deçà de son plus haut niveau observé en 2009 à 31,6%.
                                                                     Cette hausse reflète seule la croissance des crédits au taux
Le prêt moyen a augmenté de manière continue depuis
                                                                     d’effort supérieur à 35%, qui sont principalement le fait
2009 pour atteindre 170 187 euros en 2018 (soit une
                                                                     d’acquéreurs déjà propriétaires, donc de ménages
hausse de +5% sur un an, supérieure au rythme de
                                                                     disposant de revenus et d’une surface financière plus
croissance des prix). Cette hausse est tirée par les
                                                                     importants que des primo-accédants.
propriétaires déjà acquéreurs (+6% sur la période), et
moins par les autres profils (+1,7% pour les primo-
accédants). La durée moyenne des crédits a retrouvé en               L’augmentation continue des prix en France et la pleine
2018 ses niveaux hauts précédemment observés en 2008.                utilisation du levier du crédit ont accru pour la troisième
La durée moyenne des crédits aux primo-accédants est                 année consécutive le taux d’endettement des
ainsi montée à 22,1 ans (soit +6 mois par rapport à 2017),           emprunteurs (équivalent du LTI, loan-to-income2). Ce
                                                                     rapport entre le montant moyen du prêt à l’octroi et les
et celle des acquéreurs déjà propriétaires à 20,8 ans (+5
                                                                     revenus annuels de l’emprunteur a atteint 5,2 années en
mois).
                                                                     2018 (+4 mois par rapport à 2017). Hors rachats de crédits
                                                                     externes, cette hausse s’explique par les acquéreurs déjà

2
 Taux d’endettement ou LTI (loan-to-income ratio) : valeur
du montant total du crédit en années de revenus

                                                               -7-
propriétaires (5,5 ans en moyenne) et par les primo-                     Stabilité Financière (HCSF) a augmenté par deux fois le taux
accédants (5,6 ans en moyenne). De même, la LTV3 à                       du coussin de fonds propres contracycliques (CCyB), pour
l’octroi a progressé pour la 4ème année consécutive pour                 le porter à 0,5% avec une entrée en vigueur au 2 avril 2020
atteindre son plus haut niveau historique à 87,3%. La                    (précédemment fixé à 0,25% entre le 1er juillet 2019 et le 2
hausse a été tirée en premier lieu par les primo-accédants,
                                                                         avril 2020).
dont la LTV moyenne a augmenté de 190 points de base en
2018 à 90,4%. Ce taux très élevé est cependant à relativiser
pour le marché français. En effet, ce critère demeure                     Graphique 8. Evolution des conditions d’octroi entre 2003
secondaire pour les banques qui se concentrent davantage                                               et 2018 (base 100 en 2007)
sur la capacité de remboursement de l’emprunteur plutôt
que sur la valeur, fluctuante, de l’actif financé.

Ainsi, mis à part les indicateurs de taux d’effort, le reste des
conditions d’octroi a rejoint ou dépassé les niveaux
d’avant-crise. Cet assouplissement qui concerne
l’ensemble des emprunteurs, associé à la forte vitalité du
crédit qui alimente le niveau d’endettement des ménages,
pose question concernant la soutenabilité des tendances
observées actuellement. A fin 2018, le niveau de
sinistralité demeure très faible sur le stock, les entrées en
douteux ont touché un point bas au T4 2018 et le coût du
                                                                                                         Sources : Banque de France, ACPR
risque reste négligeable en dessous de sa moyenne depuis
2006. Dans une logique de prévention, le Haut Comité à la

         Scénario 2019-2020 : vers un ajustement progressif

La politique monétaire anime les dynamiques de                           La      situation      économique      française     est
l’immobilier résidentiel                                                 conjoncturellement favorable à la demande immobilière,
Le contexte économique en ce début 2019 est teinté de                    avec une baisse continue du taux de chômage, une hausse
fortes incertitudes au niveau mondial (sortie du Royaume-                du taux d’activité, un moral des ménages qui remonte et
Uni de l’Union Européenne, tensions commerciales entre                   une croissance du PIB qui résiste bien face aux tensions
les Etats-Unis et la Chine, ralentissement économique                    internationales. La demande de la part des ménages est
global en cours, …). Pour contrebalancer ces points de                   très dynamique, même si elle perd en intensité.
tension, les politiques monétaires mises en œuvre par les                Cependant l’offre nouvelle de logements continuera de se
grandes banques centrales restent résolument en soutien                  réduire.
des économies domestiques par leur accommodation
sans précédent dans l’histoire, que ce soit en niveau                    Dans ce contexte, la politique publique en France est
absolu (cas de la zone euro) ou en niveau relatif par                    soumise à des tensions contradictoires. D’un côté, la
rapport à la position de l’économie dans le cycle (Etats-                baisse du coût d’émission de sa dette (dont des taux OAT
Unis). La crainte d’une nouvelle crise et la quête du retour             10 ans négatifs en juillet 2019) incite l’Etat à profiter de
de l’inflation (exprimée à travers l’activisme des banques               cette aubaine pour emprunter auprès des investisseurs en
centrales) laissent présager le maintien sur les prochains               quête d’actifs perçus comme « sans-risque ». D’un autre
trimestres d’une politique de taux très bas, voire de                    côté, la tendance haussière de la dette publique rend
nouvelles interventions sur les marchés (telles que les                  nécessaire une gestion budgétaire plus saine dans le
TLTRO).                                                                  temps, voire des actions drastiques pour tenir

3
 LTV (loan to value ratio) : ratio entre le montant du prêt
principal et la valeur d’achat du bien

                                                                   -8-
l’engagement politique pris vis-à-vis de l’Union                     crédits de plus de 25 ans qui se maintient sur le premier
Européenne de respecter les traités de stabilité.                    semestre 2019 à 40% de la production, soit un niveau
Alors que la politique budgétaire devient graduellement              équivalent à ce qui avait été observé 11 années
moins favorable au logement, la politique monétaire                  auparavant sur le premier semestre 2008. Cette hausse
devrait renforcer son poids dans la dynamique des                    de la distribution des crédits de longue durée a été
marchés immobiliers, et ce plus encore si la progression             permise par la forte baisse des taux qui donne la
des salaires se poursuit à un rythme lent. Le levier du              possibilité aux ménages de s’endetter sur plus long terme
crédit demeure le principal soutien de la solvabilité des            sans que le coût de la dette n’explose. Cette situation
ménages, même s’il contribue à entretenir, autant qu’il              permet de resolvabiliser une partie des ménages et de
compense, la hausse continue des prix de l’immobilier en             soutenir l’offre à destination des primo-accédants, dont
France, entraînant une augmentation de l’endettement                 les ménages de moins de 35 ans. Avec la réorientation du
des ménages. Le financement est de ce fait un facteur de             PTZ vers les zones denses (de A à B1), les primo-accédants
résilience déterminant de l’immobilier résidentiel à                 et les ménages modestes qui utilisaient fortement ce type
travers trois dimensions : une baisse des taux ayant                 de dispositif en zones moins tendues (B2 et C) perdront
atteint un plus bas historique (1,46% en mai 2019), un               une partie de ce soutien à l’accession, qui ne sera pas
allongement des durées au plus haut (20 ans et 3 mois au             totalement compensée par l’accès moins coûteux aux
T2 2019) et une réduction des taux d’apport. Cependant,              prêts du secteur libre.
en cas de rupture (ralentissement de la demande                      Alors qu’une poursuite de la baisse des taux d’intérêt
solvable/intéressée lié notamment à des prix trop élevés,            accordés sur les crédits à l’habitat serait de nature à
revirement des politiques monétaires, renforcement des               déséquilibrer le modèle de revenus des banques, les
politiques    macro-prudentielles/nouvelle     régulation            épisodes récents d’élargissement du spread « OAT 10 ans
bancaire), il est peu probable qu’un autre facteur                   - taux débiteur moyen des crédits à l’habitat » pourraient
(politique publique ou hausse des revenus) prenne le                 se normaliser. Par rapport aux années passées, le retour
relais.                                                              de ce spread à des niveaux supérieurs à 80 points de base
                                                                     pourrait devenir durable sous la pression de politiques
                                                                     macro-prudentielles, surtout si l’OAT reste à des niveaux
La situation en Suède est illustrative des effets produits
                                                                     très bas (voire négatifs). Cette situation ne laisserait à
par les politiques macro-prudentielles engagées sur le
                                                                     court terme qu’une marge limitée à de nouvelles baisses
marché immobilier face à la hausse de l’endettement des
                                                                     des taux des crédits à l’habitat, suscitées par la vive
ménages. Ces dispositifs pris au fil des années (LTV capée
                                                                     concurrence que se livrent les établissements bancaires
en 2011, hausse de la pondération des risques sur les
                                                                     entre eux, ou sous la pression des courtiers et des
crédits hypothécaires en 2014, élargissement des
                                                                     banques en ligne.
exigences d’amortissement en 2014 et 2016 pour les
crédits ayant une LTV supérieure à 50%, nouvelles                       Graphique 9. Taux des crédits à l’habitat et OAT 10 ans
exigences
d’amortissement pour
les prêts ayant un LTI
supérieur à 450%
depuis mars 2018,
coussin contra-cyclique
en capital amené à
2,5%) ont participé en
2018 au recul des prix
immobiliers et à la
chute        de       la
construction.

L’allongement de la
durée moyenne des
                                                                                                         Source : Banque de France
crédits à l’octroi a été tiré principalement par la part des

                                                               -9-
Graphique 10. Stratégie Logement du Gouvernement

                                                                                      Source : Synthèse BPCE direction Etudes & Prospective

Un scénario central avec des                   disparités              la solvabilité rejaillissent en général sur les quantités avant
territoriales qui se renforcent                                        d’affecter les prix avec retard et que le soutien au crédit
                                                                       ne devrait pas être remis en cause à court terme.
Le scénario central se situe dans la perspective d’une
                                                                       Cependant, cette hausse des prix immobiliers sera aussi
remontée très graduelle des taux longs de l’Etat français
                                                                       différenciée selon les zones géographiques. Les grandes
au cours des années à venir à partir de niveaux
                                                                       villes (où l’effet de pénurie lié à la métropolisation exerce
extrêmement bas (0,30% en 2019 et 0,60% en 2020). Le
                                                                       une force de rappel) devraient continuer à connaître en
rythme sera guidé par les politiques monétaires qui
                                                                       moyenne des dynamiques de prix importantes mais en
resteront accommodantes. Dans cette perspective, les
                                                                       ralentissement face à la contrainte de solvabilité qui
taux débiteurs continueraient de baisser courant 2019,
                                                                       s’exprimera de manière plus exacerbée sur ces localités
puis remonteraient lentement sur les années suivantes
                                                                       prisées. Les espaces autour des zones tendues (où un
tout en restant à des niveaux très bas. La durée moyenne
                                                                       effet de report s’observe) connaîtraient plutôt une
à l’octroi resterait en parallèle élevée tant que les taux
                                                                       évolution des prix vers le niveau de leur cœur
débiteurs seront au plancher, tirée par une part toujours
                                                                       géographique. Et les territoires plus détendus (qui
très importante de crédits d’une durée supérieure à 25
                                                                       correspondent à la majorité de la France) pourraient subir
ans (autour de 35%).
                                                                       un ralentissement, voire une baisse des prix. Ce
                                                                       phénomène de désertification des villes petites et
Le maintien à moyen terme du niveau de solvabilité des                 moyennes s’observe dans de nombreux pays de l’OCDE
ménages passe par un recul en valeur réelle des prix dans              (Allemagne, Grande-Bretagne, Etats-Unis, Japon, …) en
l’ancien. Or ces prix continueront de croître cette année à            lien avec des facteurs structurels (métropolisation,
un rythme un peu plus élevé qu’en 2018, soit +3,5% dans                décroissance, vieillissement de la population,
l’ancien et le neuf, avant de ralentir progressivement à               désindustrialisation, …). Ses effets pourraient se renforcer
partir de 2020 (+3% dans l’ancien et +2,5% dans le neuf).              sur les territoires fragiles si aucune disposition n’est prise
Ce recul serait graduel dans la mesure où les tensions sur             par les gouvernements pour infléchir ces tendances.

                                                              - 10 -
Tableau de prévisions 1. Construction
                                                            2008    2009    2010    2011    2012    2013    2014    2015    2016    2017    2018    2019    2020
Mises en chantier (en milliers)                              399     346    414     431      383    358     337     346     383     437     418     398     390
                                          Variations (en %) -18,4   -13,3    19,5     4,1   -11,1    -6,5    -5,8     2,6    10,6    14,1    -4,2    -4,9    -1,9
          locatif privé (en milliers)                        58      46      60      76       62     48      45      50      56      67      56      52      48
          locatif social (en milliers)                       68      80      98     105      100     95      98     100     100     105      98      98     103
          locatif intermédiaire (en milliers)                 2       4       2      2        2       3       4      5        7       8       9      10      13
          accession (en milliers)                            256     206    235     230      204    198     177     176     201     235     233     220     210
          autres (rés. second.,… ; en milliers)              15      11      19      18       16     14      14      15      18      22      22      18      16
dont Collectif (dont log. en résidence ; en milliers)        183     172    208     218      197    187     192     203     226     262     253     243     242
dont Individuel (en milliers)                                216     174    205     213      186    172     145     144     157     175     165     155     149
                                                                                                        Source : Prévisions BPCE direction Etudes & Prospective

Le projet de loi ‘Energie et Climat’ en cours d’adoption                              Ce scénario se traduirait par un ralentissement des mises
devrait accentuer l’effet de la métropolisation en                                    en chantier sur 2019-2020, en particulier celles destinées
renforçant l’asymétrie entre logement individuel et                                   à l’accession (hors logement social). A l’inverse de la
collectif, ainsi qu’entre zones denses et rurales, qui sont                           tendance globale, le locatif intermédiaire, encore peu
marquées par de fortes disparités en termes de coûts                                  développé en France et faisant l’objet d’un besoin fort,
énergétiques. L’objectif visé par la loi serait d’accélérer la                        pourrait voir ses mises en chantier augmenter de manière
rénovation énergétique des logements en 3 étapes entre                                continue et progressive sur les années à venir. En effet, le
2020 et 2028, afin d’améliorer la qualité du parc existant:                           retour des investisseurs institutionnels attesté par les
d’abord par une phase d’incitation et d’information                                   promoteurs en 2019 représenterait une opportunité de
(2020-2021), puis par une phase d’obligation (à partir de                             développement pour ce segment du marché locatif. Dans
2022) et à compter de 2028 par une phase de sanction.                                 un contexte de rendements faibles des produits de taux
Les sanctions seront différenciées selon le cas du                                    et d’aversion au risque, les Institutionnels s’intéressent au
propriétaire (occupant ou bailleur), du logement                                      logement qui offre un bon équilibre entre un risque
(individuel ou en copropriété) et de la zone (tendue ou                               maîtrisé (actif physique, rendant un service lié à un besoin
non). Concernant le secteur locatif, les incitations pour le                          présent) et un rendement positif (fortement supérieur en
propriétaire à engager des travaux prendraient la forme                               moyenne aux autres actifs peu risqués). Dans un scénario
d’une impossibilité de louer un bien en dessous d’un seuil                            de moyen-long terme, ils se protègent ainsi via des
de performance énergétique, et d’un blocage des loyers                                investissements dans des actifs immobiliers contre un
pour un bien ayant une performance supérieure ou égale                                retour lent mais graduel de l’inflation, face à une offre
à 331 kWh par m² et par an en énergie primaire. A partir                              actuelle d’actifs à taux d’intérêt très bas même à long
de 2028, dans le cas d’une vente de bien dont les travaux                             terme (telles que l’OAT 10 ans à des niveaux négatifs ou
nécessaires n’auraient pas été réalisés, la mention du                                l’OAT 30 ans sous les 1% fin juillet). Cependant ce
non-respect de cette obligation sera visible dans les                                 redémarrage reste à se confirmer en 2020 et pourrait se
publicités relatives à la vente (et aussi à la location).                             concentrer uniquement sur le segment du neuf, lié à
D’autres conséquences du non-respect de cette                                         l’éclatement de la propriété en France. En effet, cette
obligation devront être définies par le Parlement en 2023                             spécificité française rend très difficile le regroupement
dans une loi à venir. Ces dispositions devraient accentuer                            d’un nombre suffisant de logements anciens pour des
les écarts de valorisation et les disparités d’anticipation de                        Institutionnels qui acquéraient par le passé de forts
prix à long terme selon le type d’habitation, l’âge du bien                           volumes concentrés localement.
et la situation géographique. La seule solution pour éviter
ce potentiel surcoût pour le propriétaire serait d’engager
                                                                                      Le secteur HLM ne devrait pas, de son côté, prolonger sur
des travaux, mais cette décision pourrait aussi s’avérer
                                                                                      les prochaines années la tendance baissière des mises en
très onéreuse : de manière absolue pour des ménages
                                                                                      chantier. L’Etat français, dans une perspective de
ayant de faibles revenus et de manière relative pour des
                                                                                      modération budgétaire, a acté depuis 2018 une baisse des
biens situés dans des zones détendues (avec une faible
                                                                                      aides aux logements (APL) aux locataires du secteur, tout
probabilité de hausse de prix et de plus-value à la
                                                                                      en imposant aux bailleurs de réduire les loyers demandés.
revente).
                                                                                      Cette « réduction du loyer de solidarité » (RLS) représente
                                                                                      pour les bailleurs sociaux un manque à gagner de 900

                                                                             - 11 -
millions d’euros en 2019, qui devait atteindre initialement                           d’intégration). En contrepartie, le secteur du HLM s’est
1,5 milliard d’euros dès 2020. Face aux risques de                                    engagé à construire 110 000 logements sociaux par an, un
ralentissement de la construction et aux effets de                                    chiffre ambitieux en comparaison des constructions
débordement à l’ensemble du secteur induits par cette                                 estimées en 2016 et 2017 (respectivement 97 600 et
mesure, le Gouvernement a proposé de réduire le                                       104 900 logements, représentant environ 24% du total
montant global des économies demandées au monde                                       des logements mis en chantier sur ces deux années).
HLM à 950 millions par an et de revenir partiellement au
taux de TVA préférentiel (à 5,5%, uniquement pour le
logement très social financé par le PLAI – prêt locatif aidé
Tableau de prévisions 2. Promotion et ventes immobilières
                                                            2008    2009    2010    2011    2012     2013     2014    2015    2016    2017    2018     2019    2020
Promotion immobilière (hors instit. en milliers)             76      102    109      99       84       85      83     100     128     130      128     123     115
                                         Variation (en %)   -38,8    34,8     6,9    -9,2   -15,0       1,0    -2,3    20,6    27,3     2,2     -1,9    -4,2    -6,4
         dont appartements (en millers)                        65      90      97      89       76       77      76      92     117     120      119     114     107
         dont maisons (secteur groupé, en milliers)            10      12      12      10        8        8       7       8      11      10        9       9       8
Maisons individuelles (secteur diffus ; en milliers)         121     128    146     133      131       99      98     111     134     135      120     109     102
                                         Variation (en %)   -23,7     5,6    13,9    -8,6     -2,0   -24,3     -1,2    13,3    20,6     1,0   -11,3     -9,0    -6,0
Transactions dans l'ancien (en milliers)                     673     594    775     801      708      720     694     798     845     964      965     990     970
                                         Variation (en %)   -16,8   -11,7    30,5     3,4   -11,6       1,7    -3,6    15,0     5,9    14,1      0,1     2,6    -2,0
                                                                                                          Source : Prévisions BPCE direction Etudes & Prospective

Dans le neuf, la fin du PTZ en zone B2 et C le 31 décembre                            buts visés par le gouvernement pourrait être de
2019 devrait accentuer le repli de la maison individuelle                             permettre aux organismes HLM de récupérer des marges
en secteur diffus, avec des ventes qui tomberaient en                                 pour renforcer leurs fonds propres, tout en soutenant
2020 à près de 100 000 unités (contre 120 000 en 2018).                               l’accès à la propriété des ménages. De plus, c’est aussi une
De son côté, l’effet « Pinel » qui a joué fortement jusqu’en                          réponse face à la situation observée depuis quelques
2018 devrait voir son impact se réduire en 2019-2020                                  années en France où le taux de rotation des logements
(notamment avec le retour potentiel ou acté de                                        sociaux a fortement chuté, s’expliquant en partie par une
l’encadrement des loyers dans certaines villes comme à                                paupérisation des locataires. De plus il s’agit d’inciter les
Paris et à Lille), avant de connaître un rebond probable en                           bailleurs sociaux à se détacher progressivement de leur
2021 en anticipation de sa disparition au 31 décembre                                 ancien parc pour se tourner vers la construction et la
2021. Le retour des investisseurs institutionnels évoqué                              gestion d’un stock renouvelé. Cependant cette gestion
ci-dessus pourrait inciter le gouvernement à ne pas                                   transitoire d’un parc hétérogène en termes de statut
reconduire, ou du moins de manière moins active, les                                  d’occupation présentera de nouvelles difficultés pour les
dispositifs de défiscalisation initiés depuis 1984 avec le                            organismes HLM qui devront composer dans le cadre de
dispositif Quilès-Méhaignerie. Les aides fiscales avaient                             copropriété. Pour faire face à cette problématique, l’Etat
été notamment mises en place pour pallier le retrait des                              propose une application différée du statut de copropriété,
investisseurs institutionnels, dont la détention de                                   allant jusqu’à 10 ans à partir de la vente du 1er lot,
logements est passée d’environ 1 200 000 en 1984 à                                    permettant aux nouveaux accédants à la propriété d’HLM
250 000 aujourd’hui (soit moins de 4% du parc locatif                                 de s’habituer au système juridique de la copropriété sans
privé). Si les investissements dans le logement neuf par les                          être soumis à certaines de ses contraintes, notamment
Institutionnels se confirment, l’Etat aura la possibilité de                          financières.
se mettre en retrait, et donc de réduire son empreinte
sans créer de distorsion sur un marché qui était jusqu’à
                                                                                      Dans l’ancien, les transactions vont rester en 2019-2020 à
présent porté très fortement par les incitations fiscales
                                                                                      des niveaux records sans équivalent depuis 1960, en lien
aux particuliers.
                                                                                      avec une vitesse de rotation du parc qui va rester élevée
                                                                                      sur la période et avec un accès au crédit toujours
En parallèle, le Gouvernement souhaite faciliter                                      favorable. Leur volume augmenterait sur l’année de +3%
l’accession à la propriété des HLM dès le 1er janvier 2020,                           pour s’établir à 990 000 transactions, avant de reculer
à travers la vente annuelle d’1% du parc national de                                  légèrement en 2020 à 970 000 (soit -2%). Le dispositif
logements HLM (soit 45 000 logements par an). Un des                                  Denormandie lancé le 1er janvier 2019 devrait avoir un

                                                                             - 12 -
impact marginal sur 2019-2020. Sa portée dépendra                                          ménages de revenir vers des villes petites/moyennes
d’abord de la manière dont se saisiront les ménages « à                                    actuellement peu dynamiques. Dès lors c’est surtout la
patrimoine » de ce dispositif (lié au coût de la rénovation                                cohérence, l’ambition et l’efficacité des programmes
et à leur volonté de louer). En particulier, la question de                                « cœurs de ville » et leur capacité à créer une dynamique
leurs anticipations de valorisation et de rendement sera                                   collective dans ces zones qui faciliteront ou limiteront le
cruciale alors que l’offre, contrairement au Pinel, ne sera                                développement des opérations « Denormandie »,
pas encore structurée autour d’acteurs facilitant sa                                       aujourd’hui structurellement bridées par les effets de la
diffusion. Sa réussite tiendra aussi à la volonté des                                      métropolisation.
Tableau de prévisions 3. Prix de l’immobilier
                                                             2008     2009     2010     2011     2012      2013      2014      2015      2016     2017     2018     2019     2020
Neuf France appartement (€ / m²)                             3 338    3 359    3 557    3 745    3 843     3 849     3 834     3 874     3 955    3 964    4 085    4 228    4 334
         Variation des prix du neuf appartement (en %)          2,1      0,7      5,9      5,3       2,6       0,2     -0,4        1,0      2,1      0,2      3,0      3,5      2,5
Ancien France ensemb le (en %)                                -3,7     -4,1     7,6      3,7      -2,0      -1,8      -2,5      -0,5      1,5      3,2      3,3      3,5      3,0
                                         dont IdF (en %)       -1,7     -5,0     12,1      8,6      -1,0      -1,7      -2,1      -0,9      2,6      4,7      4,3      4,5      4,2
                                    dont Province (en %)       -4,7     -3,7      5,7      1,5     -2,4      -1,9      -2,7      -0,2       1,0      2,7      3,0      3,1      2,6
Appartement France ancien (Indice b ase 100 T1 2008)          97,4     94,0    103,2    109,8    108,2     106,4     103,8     102,7     104,3    108,8    112,6    116,8    120,8
                                         Variation (en %)      -1,9     -3,5      9,7      6,4     -1,4      -1,7      -2,4      -1,1       1,6      4,3      3,5      3,7      3,4
maison France ancien (Indice b ase 100 au T1 2008)            94,7     90,3     95,7     97,6      95,1      93,3      90,8      90,9     92,2     94,5     97,6    100,5    102,8
                                         Variation (en %)      -5,2     -4,6      6,0      1,9     -2,5      -1,9      -2,6        0,1      1,4      2,5      3,3      3,0      2,3
                                                                                                                 Source : Prévisions BPCE direction Etudes & Prospective

Les taux d’intérêt toujours très bas devraient continuer à                                 conditions d’octroi assouplies, des taux d’intérêt toujours
faire baisser le nombre de prêts associés à une opération                                  bas et la forte part des crédits aux durées supérieures à
de crédit immobilier, sans revaloriser les dispositifs                                     20 ans. Le dynamisme des transactions dans l’ancien et la
réglementés (PC, PAS, PPEL) qui trouveront cependant un                                    hausse des prix devraient alimenter en 2019-2020 la
relais à travers les ménages qui, pour diverses raisons,                                   demande de crédits des ménages et la hausse de
n’arrivent pas à emprunter grâce à un prêt du secteur                                      l’encours. Un mouvement sensible de désendettement
libre (TAEG dépassant le taux d’usure, en lien par exemple                                 des ménages n’est pas à l’ordre du jour, car cela
avec la santé et/ou l’âge des emprunteurs). La Banque de                                   supposerait une forte baisse des prix et un recul global des
France a d’ailleurs remonté légèrement en juin 2019 les                                    transactions qui ne sont pas anticipés sur la période
seuils d’usure pour les crédits à taux fixes d’une durée de                                considérée. L’effet d’aubaine via le levier du crédit, actif
10-20 ans, et ceux de 20 ans et plus. Il pourrait s’agir d’un                              depuis 2015 et renforcé par le sentiment que celui-ci n’est
premier signal envoyé aux banques afin de reconsidérer                                     que temporaire, a conduit les ménages d’une part à
leur politique de baisse continue des taux en réaction à la                                renégocier leurs crédits et d’autre part à accélérer
forte concurrence qui prévaut sur le marché du crédit                                      l’acquisition d’un bien immobilier. Avec la baisse des taux
immobilier.                                                                                qui se poursuivrait de manière limitée en 2019 pour
                                                                                           s’interrompre en 2020 sans remettre en cause les niveaux
                                                                                           très bas, l’indicateur de rachats/renégociations de la
La forte hausse de l’encours de crédits à l’habitat en 2017
                                                                                           Banque de France se maintiendrait autour d’une part de
et 2018 devrait se poursuivre en 2019, à un rythme de
                                                                                           20% de la production. L’encours de crédit progressera
+6,2% sur l’année. Elle sera portée par une production
                                                                                           moins vite à partir de 2020, à +4,8% sur un an, en lien avec
importante de nouveaux crédits, soutenue par des
                                                                                           la baisse des ventes dans l’ancien ainsi que dans le neuf.
Tableau de prévisions 4. Crédits à l’habitat
                                                             2008     2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020
Encours (en milliards d'€)                                    703      731 795 843 870 903 923 958 992 1 053 1 114 1 183 1 240
                    Variation d'encours (en milliards d'€)      57       27   65   48   27   33   20   36   34   60   61   69   57
                              Variation d'encours (en %)       8,8      3,9 8,9 6,0 3,2 3,7 2,2 3,9 3,5 6,1 5,8 6,2 4,8
Taux Immo moyen (PFIT>1an)                                    4,8      4,5 3,7 3,8 3,9 3,2 3,0 2,3 1,9 1,6 1,5 1,4 1,4
OAT 10 ans (en %)                                            4,23     3,65 3,12 3,32 2,54 2,20 1,67 0,84 0,47 0,81 0,78 0,30 0,60
                                                                                                                 Source : Prévisions BPCE direction Etudes & Prospective

                                    Contacts : Alain TOURDJMAN / Alain.tourdjman@bpce.fr
                                         Bertrand CARTIER / Bertrand.cartier@bpce.fr

                                                                                 - 13 -
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