Éditorial Kumari Beck Université Simon-Fraser

 
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Comparative and International Education / Éducation
comparée et internationale

 Volume 50 | Issue 1

 December 2021

Éditorial
Kumari Beck
Université Simon-Fraser
Eva Lemaire
Université de l’Alberta
Elaine Teng
Université de la Colombie-Britannique

Recommended Citation
Beck, K., Lemaire, E. & Teng, E. (2021). Editorial. Comparative and International Education/Éducation comparée et
internationale. 50(1). https://doi.org/10.5206/cieeci.v50i1.14559
Éditorial, décembre 2021

Bienvenue dans un nouveau numéro de la revue Éducation comparée et internationale, qui arrive
à la fin d’une autre année qui a été, à travers le monde, difficile, et marquée par les vicissitudes
pandémiques de toutes sortes, par les catastrophes naturelles engendrées par le changement
climatique ainsi que par l’incertitude et l’imprévisibilité. La revue Éducation comparée et
internationale s’est engagée à traiter un éventail de sujets plus large dans les domaines
universitaires couverts par la revue afin d’inclure des approches et des analyses liées à l’équité et
à la décolonisation. Nous sollicitons également des articles qui portent sur des méthodologies et
des cadres de travail théoriques nouveaux et innovants, ainsi que des articles qui portent sur des
contextes d’enseignement variés (au niveau élémentaire, secondaire et postsecondaire) reflétant
les perspectives du Sud. Nous souhaitons enfin faire une plus grande place aux réalités et
perspectives autochtones. Nous continuerons à aborder les questions de migration et
d’établissement des populations migrantes et immigrées, à aborder les sujets ayant trait à la race,
aux liens entre langues et cultures, aux étudiants internationaux, aux analyses de programmes
d’enseignement internationaux, ainsi que, plus généralement, aux analyses de politiques
d’enseignement de la maternelle à la 12e année et au niveau postsecondaire, et ce dans divers
contextes à travers le monde.

Ce numéro met en valeur des articles qui abordent l’inégalité et la marginalisation de diverses
manières: on y trouve une analyse rare des expériences d’éducateurs LGBTQ travaillant à
l’étranger, un regard critique sur la façon dont le néolibéralisme et le colonialisme érodent les
valeurs et les principes de l’apprentissage international et interculturel dans l’enseignement de la
maternelle à la 12e année et dans l’enseignement supérieur. Ce numéro porte également sur le
positionnement périphérique des programmes d’anglais académique dans les universités, sur la
réception particulière du concept d’éducation à la citoyenneté globale dans un contexte autre
qu’occidental, mais aussi sur le manque de prise en compte des spécificités propres aux élèves
doués dans différentes provinces du Canada.

Informé par le concept de paysage frontalier de Brambilla (2015), un concept théorique qui
informe la compréhension des identités et du passage des frontières, Robert Mizzi, Clea Schmidt
et Gustavo Moura portent, dans l’article « La complexité au sein de la diversité : une exploration
de la vie des éducateurs LGBTQ internationaux », un regard fascinant sur les réalités vécues par
des éducateurs internationaux lesbiennes, gais, bisexuels, trans et queers (LGBTQ) qui travaillent
dans des pays non-occidentaux. Dans cette étude qualitative, les auteurs ont interviewé 23
éducateurs LGBTQ à propos de leurs expériences d’enseignement à l’étranger, et les résultats
incluent des perceptions dans les identités changeantes des participants dans le contexte
international, sur l’appartenance, l’éthique de travail comme marqueur de sécurité personnelle, sur
les initiatives queers et la motivation des étudiants. Une contribution significative à l’analyse est
la notion de « paysage d’appartenance » qu’avancent les auteurs afin de théoriser le flux et la
fluidité des frontières et de l’appartenance. Cette étude soulève des considérations importantes
telles que les implications négatives et même dangereuses de « sortir du placard » dans certains
contextes internationaux. Elle insiste sur les conséquences néfastes, sur le plan émotionnel, que
subissent ces éducateurs qui doivent garder leur identité secrète. Les auteurs suggèrent que, les
éducateurs LGBTQ étant parmi les plus marginalisés dans leur secteur, ceux d’entre eux qui
travaillent à l’étranger sont particulièrement vulnérables : ils apportent donc des recommandations
pour les administrateurs de programmes internationaux.

Dans « Repenser et réinventer l’enseignement interculturel dans les institutions postsecondaires :
une approche critique et anticoloniale », Carrie Karsgaard propose une réflexion sur la mise en
place d’un programme extrascolaire interculturel dans une institution postsecondaire canadienne
en utilisant des approches critiques et anticoloniales. Les tensions auxquelles elle a fait face en
élaborant un programme d’enseignement interculturel tendant vers la justice et l’équité sociale et
des objectifs éthiques reflètent la façon dont le travail interculturel dans les institutions
d’enseignement supérieur est dominé par le discours d’internationalisation néolibéral. Selon
Karsgaard, cet état de fait montre le besoin de découpler l’enseignement interculturel des
approches de l’internationalisation du marché actuel et d’utiliser l’enseignement interculturel
comme moyen pour résister au colonialisme dans les institutions d’enseignement supérieur et le
renverser.

Dans « Politiques d’internationalisation de l’enseignement public et discours néolibéraux au
Canada : Analyse informée par les écrits de Stephen Ball », Abdelhady Elnagar se sert des idées
de « la politique comme texte » et de « la politique comme discours » de Stephen Ball pour analyser
les motivations néolibérales qui sous-tendent les politiques d’internationalisation de
l’enseignement de la maternelle à la 12e année au Canada. Elnagar avance que cette approche
néolibérale de l’enseignement de la maternelle à la 12e année, ainsi que l’accent mis sur
l’internationalisation qui est évident dans les politiques canadiennes, créent des inégalités entre les
écoles privées et publiques, et entre les districts scolaires au Canada. Il suggère que soit davantage
questionnée la façon dont cette approche néolibérale de l’enseignement, de la maternelle à la 12e
année, cause des inégalités.

Ces deux articles analysent la façon dont les approches instrumentales de l’internationalisation de
l’enseignement fondées sur l’économie (l’enseignement supérieur pour Karsgaard et de la
maternelle à la 12e année pour Elnagar) ont résulté dans des inégalités au sein du système. Un
manque de réflexivité critique dans l’application de ces politiques d’internationalisation, dans
chacun de ces secteurs, a ainsi résulté dans la marginalisation de certains groupes. Les deux auteurs
appellent donc à repenser les approches de l’internationalisation, à remettre en question une
approche qui soit principalement centrée sur les avantages économiques. Ils invitent enfin à
remettre de l’avant, dans ces situations, des objectifs pédagogiques qui puissent permettre de
répondre à ces inégalités. Le thème de la marginalisation se poursuit dans l’article suivant.

Les programmes d’anglais académique (AA) sont devenus plus courants dans les institutions
postsecondaires canadiennes et ils s’adressent à des étudiants internationaux ainsi qu’à des
étudiants canadiens dont l’anglais n’est pas la première langue. Comme les auteurs, Scott Roy
Douglas et Michael Henry Landry l’affirment, ces programmes, en conjonction avec d’autres
formes de soutien, sont proposés comme porte d’entrée dans les institutions d’enseignement
supérieur comme alternative aux tests de compétence linguistique en anglais. Dans leur article «
Les programmes de cours d’anglais académique : tendances clés à travers les universités
canadiennes », les auteurs étudient le positionnement et l’utilisation des programmes d’anglais
académique dans des universités anglophones au Canada et ils schématisent les tendances
générales. À partir des sites Web des programmes d’AA de 50 universités canadiennes, les auteurs
ont recueilli des données sur les universités offrant ces programmes, sur les crédits universitaires
associés, les tarifs demandés, la longueur du programme, ainsi que les exigences de compétences
en anglais pour y accéder. L’une des découvertes intéressantes est que les programmes d’AA, dont
la majorité est composée de cours non-crédités, occupent un rôle de service et ne sont pas souvent
reconnus comme discipline à part entière dans l’université. Cette analyse fournit un survol critique
de la légitimité des programmes d’AA dans les institutions, dévoilant une marginalisation de leur
rôle au sein des institutions et par extension, des étudiants qui y sont inscrits.

Avec leur article « Perception et compréhension du concept de "citoyenneté mondiale" par des
enseignants en formation : une comparaison Kazakhstan-Suisse », Myriam Radhouane,
Abdeljalil Akkari et Assem Temirova mettent en lumière un contexte rarement mis de l’avant dans
les revues académiques nord-américaines, soit le contexte kazakh. Les auteurs, dans une étude
exploratoire comparant les perspectives de futurs enseignants en Suisse et au Kazakhstan, mettent
en évidence le manque de familiarité des étudiants en éducation par rapport à l’éducation à la
citoyenneté globale. Ils nous invitent également, par leur analyse, à réfléchir à la manière dont ce
concept présenté comme universaliste peut pénétrer différemment le milieu universitaire à
l’international; offrant un autre regard sur les enjeux d’iniquité et de marginalisation qui tissent un
fil conducteur entre les articles publiés dans ce numéro.

Un autre angle pour penser les enjeux d’équité et de marginalisation est celui proposé par Philippe
Tremblay et Jeanne Verreault-Tremblay dans leur article « Les élèves doués et talentueux au
Canada : une étude comparative. » Les auteurs s’intéressent en effet au champ de la douance qui,
selon eux, « a fait l’objet d’une attention accrue au cours de ces dernières années en éducation
comparée », bien que, soulignent-ils, la littérature en français dans le domaine reste moindre.
Tremblay et Verreault-Tremblay nous proposent ainsi, dans notre deuxième article en français, un
tour d’horizon des provinces et territoires à travers le Canada pour faire un portrait quant à la
manière dont les besoins des élèves doués et talentueux sont pensés et adressés dans différents
milieux scolaires. Avec cet article, ces auteurs nous rappellent que l’éducation inclusive se doit
aussi de s’intéresser aux élèves qui démontrent de forts potentiels d’apprentissage.

Pour conclure ce numéro, nous mettons en lumière une critique du livre de Leigh-Anne Ingram, «
L’enseignement de la citoyenneté démocratique dans les contextes non-occidentaux : les
implications pour la théorie et la recherche ». Le thème abordé dans ce livre soutient les efforts
que fait la revue Éducation comparée et internationale pour inclure des perspectives venant de
contextes non-occidentaux et donc, pour accroître notre champ d’enseignement comparatif et
international.

Au cours d’une année qui a eu pour conséquence une charge de travail plus lourde pour les
universitaires et un besoin accru de bien-être, nous reconnaissons le temps supplémentaire et les
efforts déployés par les uns et les autres pour maintenir la publication des revues. Dans ce contexte,
nous tenons à remercier nos réviseurs et nos auteurs. Et à vous tous, lecteurs, auteurs et réviseurs,
nous souhaitons nos meilleurs vœux pour une saison des fêtes reposante.

Eva Lemaire,
Université de l’Alberta
Rédactrice en chef, version française
Kumari Beck,
Université Simon-Fraser
Rédactrice enchef, version anglaise

Elaine Teng,
Université de la Colombie-Britannique
Adjointe à la rédaction
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