L'année du médicament : peu de progrès, et des menaces sur l'accès pour tous à des soins de qualité - Prescrire

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L'année du médicament : peu de progrès, et des menaces sur l'accès pour tous à des soins de qualité - Prescrire
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                                 L’année du médicament :
                                 peu de progrès, et des menaces
                                 sur l’accès pour tous à des soins
                                 de qualité
                                                 Points-clés
                                                                                                    Chez les nourrissons atteints d’un
                                             •  En 2015, les progrès thérapeu-
                                             tiques véritables ont encore été
                                                                                                 hémangiome grave ou à risque de
                                                                                                 complications, un médicament est
                                             minimes face au grand nombre de                     parfois justifié. Le dossier d’évalua-
                                             médicaments dangereux ou mal éva-                   tion clinique du propranolol en solu-
                                             lués.                                               tion buvable (Hemangiol°), un bêta-
                                                                                                 bloquant, montre que ce médicament
                                             • Les prix exorbitants de certains
                                             médicaments mettent en danger les
                                                                                                 est plus efficace qu’un placebo, avec
                                                                                                 un profil d’effets indésirables globa-
                                             systèmes de santé solidaires ou                     lement plus acceptable que celui
                                             conduisent parfois à choisir des                    d’un corticoïde oral au long cours, à
                                             options plus risquées pour les                      condition de surveiller attentive-
                                             patients.                                           ment les nourrissons, en début de
                                                                                                 traitement et lors des augmentations
                                             •  Les soignants, les autorités de
                                             santé et les firmes ont chacun des
                                                                                                 de dose (n° 378 p. 246-250).
                                                                                                    En 2015, l’association à doses fixes
                                             responsabilités dans l’accès pour                   lédipasvir + sofosbuvir (Harvoni°) est
                                             tous à des soins de qualité.                        l’association antivirale de premier
                                                      Rev Prescrire 2016 ; 36 (388) : 132-137.   choix à envisager pour les patients
                                                                                                 atteints d’une hépatite C de géno-
                                                                                                 type 1, en raison de son efficacité

                                            E
                                                   n 2015, Prescrire a publié l’ana-             virologique importante et parce qu’il
                                                   lyse méthodique et indépen-                   s’agit du protocole sans interféron le
                                                   dante de 220 dossiers de médi-                mieux évalué. Mais les inconnues
                                             caments, notamment 45 nouvelles                     autour des effets indésirables de ces
                                             spécialités, 31 nouvelles indications               antiviraux sont nombreuses, justifiant
                                             pour des spécialités déjà existantes,               un effort particulier de pharmaco­
                                             et 15 nouvelles copies de substances.               vigilance active (n° 384 p. 732-738).
                                                                                                    Parce qu’il n’est pas hépato-
                                                                                                 toxique, l’acide cholique (Kolbam°)
                                             2015 : quelques progrès,                            est une alternative bienvenue à
                                             souvent modestes                                    l’acide chénodésoxycholique (Xenbilox°)
                                                                                                 dans la xanthomatose cérébrotendi-
                                                Comme les années précédentes,                    neuse, un déficit très rare mais aux
                                             l’analyse des dossiers d’évaluation                 conséquences graves de la synthèse
                                             clinique conduit à faire émerger                    des acides biliaires primaires. L’acide
                                             divers progrès thérapeutiques,                      cholique est probablement efficace
                                             quelques-uns notables, mais la plu-                 dans deux autres déficits de la syn-
                                             part modestes.                                      thèse des acides biliaires primaires
                                                                                                 (le déficit de type 4 et le déficit en
                                               Quelques progrès notables. En                     cholestérol 7-alpha hydroxylase),
                                             2015, 8 médicaments dont les dos-                   d’où le besoin de poursuivre son
                                             siers d’évaluation clinique ont été                 évaluation (n° 386 p. 896-897).
                                             analysés par Prescrire apportent un                    Fin 2014, en France, la perméthrine
                                             progrès thérapeutique notable aux                   en crème à 5 % (Topiscab°), qui fait
                                             patients concernés, mais avec cer-                  partie des premiers choix dans le
                                             taines limites. Ils ont été cotés “Inté-            traitement de la gale, est devenue
                                             ressant” (3 cas) ou “Apporte quelque                disponible en ville dans le cadre
                                             chose” (5 cas).                                     d’une autorisation [suite page 134]

Page 132 • L a R evue P rescrire Février 2016/Tome 36 N° 388

                                          Téléchargé sur prescrire.org le 14/11/2023
                                      Copyright(c)Prescrire. Usage personnel exclusivement
Nouveautés de tous types et arrêts de commercialisation présentés dans Prescrire depuis 10 ans

                        Nature des dossiers                                   2006         2007          2008         2009          2010      2011          2012          2013          2014         2015

 Nouveaux noms de                       présentées aux médecins                  37           38            31            41           36         40            38           49        41 (a)        36 (a)
 spécialités vendues                    et/ou aux pharmaciens                                               (8)         (13)         (11)       (11)          (14)         (18)          (11)           (8)
 en officine
 (dont “copies démasquées”)             “ciblées” pharmaciens                     7             4           11             8           13         20            18           11            11             4
                                        ou grand public                                                     (8)          (5)         (10)       (20)          (15)         (11)          (11)           (4)

 Nouveaux noms de spécialités vendues seulement à l’hôpital                                   18            24           11            21          8             9                     18 (b)        20 (b)
                                                                                 12                                                                                           8
 (dont “copies démasquées”)                                                                   (1)           (2)          (3)           (0)       (3)           (2)                        (5)           (3)

 Compléments de gamme (formes, dosages, présentations)                           40           26            20           25            17         20           14            15             9             7
 de médicaments déjà commercialisés

 Changements du libellé du RCP                                                   77            74           88            66           64         57            54           62            44            50
 (dont nouvelles indications)                                                  (46)          (47)         (47)          (31)         (28)       (29)          (30)         (32)          (26)          (31)

 Changements de nom                                                               8             6            9           13            14          5             5           18            12             0

 Changements de composition                                                       4             2            0             0            1          0             1            0             0             0

 Changements divers                                                              28           15            18             7           10         20           13            15             7             9

 Arrêts de commercialisation pour raisons de
                                                                                  2           14             3             3            9         16             9           17            11             0
 pharmacovigilance

 Arrêts de commercialisation pour autres raisons                               166           120           117          164           102       182           112           101            88            98

 Réanalyses “avec plus de recul”                                                  1             2            1             1            3          1             1            2             4             0

 ATU (autorisation temporaire d’utilisation) ou RTU
                                                                                  0             0            1             6            0          0             4            0             3             0
 (recommandation temporaire d’utilisation)

 Hors AMM                                                                         0             1            1             0            1          2             0            1             1             1

 Nombre total de dossiers présentés                                            382           320           324          345           291       371           278           292          249           225

a- Dont : 10 non commercialisées au 31 décembre 2014 ; 16 au 31 décembre 2015.
b- Dont : 2 non commercialisées au 31 décembre 2014 ; 4 au 31 décembre 2015.

                          Cotations des nouvelles spécialités et des nouvelles indications dans Prescrire depuis 10 ans (a)

                         Cotation Prescrire                                   2006         2007          2008         2009          2010      2011          2012          2013         2014          2015

 Bravo                                                                            1             1            0             0            0          0             0            0             1             0

 Intéressant                                                                      1             2            0             0            1          0             1            0             2         3 (b)

 Apporte quelque chose                                                            8           14             6             3            3          3             3            6             5         5 (c)

 Éventuellement utile                                                            31           27            25           14            22         13           14            12            15           15

 N’apporte rien de nouveau                                                       69           79            57           62            49         53           42            48            35           43

 Pas d’accord                                                                    17           15            23           19            19         16           15            15            19        15 (d)

 La Rédaction ne peut se prononcer                                                8             3            9             6            3          7             7            9            10         6 (e)

 Total                                                                         135           141           120          104            97         92           82            90            87           87

a- Les lecteurs intéressés par les résultats des années 1981 à         d- Il s’agit :                                                        liés à la ménopause (n° 384 p. 728-729) (non commercialisé en
2005 peuvent les retrouver dans le n° 213 p. 59 et le n° 269           – de l’alogliptine seule (Vipidia°) ou associée avec la metformine    France au 4 janvier 2016) ;
p. 142. Ce tableau comprend les nouvelles spécialités (hormis          (Vipdomet°) dans le diabète de type 2 (n° 379 p. 326-327) (non        – du régorafénib (Stivarga°) dans les tumeurs stromales diges-
les copies) et les nouvelles indications ainsi que les réanalyses      commercialisée en France au 4 janvier 2016) ;                         tives en échec thérapeutique (n° 380 p. 413) ;
“avec plus de recul”.                                                  – du bévacizumab (Avastin°) dans le cancer épithélial de l’ovaire     – du sorafénib (Nexavar°) dans les cancers différenciés de la
b- Il s’agit :                                                         résistant aux sels de platine (n° 383 p. 656-657) ;                   thyroïde (n° 384 p. 731) ;
– de l’acide cholique (Kolbam°) dans 3 déficits héréditaires de        – de l’association bupropione + naltrexone (Mysimba°) dans            – de la télavancine (Vibativ°) dans les pneumonies nosoco-
la synthèse des acides biliaires primaires : la xanthomatose           l’obésité (n° 380 p. 406-412) (non commercialisée en France au        miales liées à une souche de Staphylococcus aureus résistante
cérébrotendineuse, le déficit de type 4, le déficit en cholestérol     4 janvier 2016) ;                                                     à la méticilline (n° 379 p. 335-338) (non commercialisée en
7-alpha hydroxylase (n° 386 p. 896-897) (non commercialisé en          – du cabozantinib (Cometriq°) dans les cancers médullaires de         France au 4 janvier 2016) ;
France au 4 janvier 2016) ;                                            la thyroïde (n° 383 p. 650-653) (non commercialisé en France          – de la venlafaxine (Venlafaxine Abbott°) dans les épisodes
– de l’association lédipasvir + sofosbuvir (Harvoni°) dans l’hépa-     au 4 janvier 2016) ;                                                  dépressifs majeurs et la prévention des récidives, la phobie
tite C chronique quand les patients sont infectés par un HCV-1         – du défibrotide (Defitelio°) dans la maladie veino-occlusive         sociale, l’anxiété généralisée, le trouble panique (n° 379 p. 344).
(n° 384 p. 732-738) ;                                                  hépatique (n° 380 p. 418-419) ;                                       e- Il s’agit :
– de la solution buvable de propranolol (Hemangiol°) dans les          – du dénosumab (Prolia°) dans l’ostéoporose masculine (n° 385         – de l’élosulfase alfa (Vimizim°) dans la mucopolysaccharidose
hémangiomes graves des nourrissons (n° 378 p. 246-250).                p. 806) ;                                                             de type IV (n° 386 p. 898-899) ;
c- Il s’agit :                                                         – de l’eltrombopag (Revolade°) dans la thrombopénie chez              – de l’idélalisib (Zydelig°) dans la leucémie lymphoïde chronique
– du daclatasvir (Daklinza°) dans l’hépatite C chronique quand         les patients atteints d’hépatite C (n° 378 p. 250-251) ;              et le lymphome folliculaire (n° 385 p. 808-809) ;
les patients sont infectés par un HCV-3 ou un HCV-4 (n° 384            – de l’association éthinylestradiol + gestodène en dispositif         – de l’ipilimumab (Yervoy°) dans le mélanome métastasé ou
p. 738-739) ;                                                          transdermique (Lisvy°, ex-Apleek°) dans la contraception fémi-        inopérable (n° 376 p. 95) ;
– du kétoconazole (Kétoconazole HRA°) dans le syndrome de              nine (n° 383 p. 647-648) (non commercialisée en France au             – de l’association lédipasvir + sofosbuvir (Harvoni°) dans l’hépa-
Cushing endogène (n° 386 p. 887-890) ;                                 4 janvier 2016) ;                                                     tite C chronique quand les patients sont infectés par un HCV-3
– du pasiréotide (Signifor°) dans l’acromégalie en échec théra-        – du misoprostol en dispositif vaginal (Misodel°) dans le déclen-     ou un HCV-4 (n° 384 p. 732-738) ;
peutique (n° 385 p. 807-808) ;                                         chement artificiel du travail (n° 383 p. 655-656) (non commer-        – du lénalidomide (Revlimid°) dans certains syndromes myélo-
– de la perméthrine en crème à 5 % (Topiscab°) dans la gale            cialisé en France au 4 janvier 2016) ;                                dysplasiques (n° 375 p. 8) ;
(n° 384 p. 726-727) ;                                                  – de l’omalizumab (Xolair°) dans l’urticaire chronique spontanée      – du ponatinib (Iclusig°) dans les leucémies avec chromosome
– du rituximab (Mabthera°) dans les polyangéites graves (n° 376        (n° 377 p. 174-175) ;                                                 Philadelphie (n° 377 p. 176-181).
p. 96).                                                                – de l’ospémifène (Senshio°) dans les troubles vulvovaginaux

                                                                                                                  L a R evue P rescrire Février 2016/Tome 36 N° 388 • Page 133

                                                                         Téléchargé sur prescrire.org le 14/11/2023
                                                                     Copyright(c)Prescrire. Usage personnel exclusivement
Ouvertures                              L’année du médicament

  [suite de la page 132] de mise sur le      indésirables différent de celui du              nylestradiol + gestodène sous forme de
marché (AMM). Auparavant, ce                 traitement de référence. C’est le cas           dispositif transdermique (Lisvy°,
médicament était accessible depuis           de l’enzalutamide (Xtandi°) qui ne              ex-Apleek°) a été autorisée pour la
2013, uniquement à l’hôpital, dans           semble pas avoir une meilleure                  contraception chez les femmes (non
le cadre d’une autorisation tempo-           balance bénéfices-risques que l’abi-            commercialisée en France au 4 jan-
raire d’utilisation (ATU) nominative.        ratérone (Zytiga°) dans le cancer de            vier 2016) (n° 383 p. 647-648).
L’AMM, la mise à disposition en ville        la prostate métastasé. Mais son pro-
et le remboursement par la Sécurité          fil d’effets indésirables surtout
sociale facilitent l’accès à ce médica-      constitué de bouffées de chaleur, de            Évaluation clinique a minima
ment qui est une alternative à la            diarrhées, de troubles neuropsy-                et AMM prématurées
prise orale d’ivermectine (Stromec-          chiques, de convulsions, d’hyperten-
tol°) (n° 384 p. 726-727).                   sions artérielles, de neutropénies, de            Depuis plusieurs années, Prescrire
   Depuis fin 2014, une AMM enca-            chutes et de fractures, en fait une             constate que de nombreux médica-
dre l’utilisation du kétoconazole (Kéto-     alternative parfois utile à l’abiratérone       ments sont autorisés dans l’Union
conazole HRA°) chez certains patients        qui expose surtout à des effets indé-           européenne alors que leur évaluation
atteints d’un syndrome de Cushing,           sirables      minéralocorticoïdes               clinique est minime ou inadaptée.
situation dans laquelle sa balance           (œdèmes, hypertensions artérielles,             Ainsi, en 2015, 6 cotations “Ne peut
bénéfices-risques est favorable, sous        hypokaliémies) (n° 383 p. 653-654).             se prononcer” ont été attribuées par
réserve d’une surveillance hépatique                                                         Prescrire, dont 4 concernent des médi-
et surrénalienne, et d’une prise en             Encore trop de nouveautés                    caments de cancérologie (lire la note e
compte des nombreuses interactions           trop dangereuses. En 2015,                      du tableau Cotations page 133).
médicamenteuses (n° 386 p. 887-              15 nouvelles spécialités ou nouvelles             Le constat est le même aux États-
890).                                        indications sont plus dangereuses               Unis d’Amérique : selon des cher-
   Quant au pasiréotide (Signifor°)          qu’utiles (cotation “Pas d’accord”) à           cheurs étatsuniens, trop d’AMM
dans l’acromégalie, et au rituximab          cause d’une efficacité modeste,                 sont accordées de manière hâtive,
(Mabthera°) dans les polyangéites            incertaine, voire non démontrée,                sur des données d’évaluation trop
graves, il s’agit de nouvelles options       alors que leurs effets indésirables             faibles. Cela concerne particulière-
après échec d’autres traitements             connus ou suspectés sont graves.                ment les domaines de la cancérologie
(n° 385 p. 807-808, n° 376 p. 96).              Ainsi, plusieurs antitumoraux ont            et des maladies orphelines, et les cas
                                             été autorisés dans divers cancers mal-          de procédure accélérée d’AMM
   Des progrès minimes, à propo-             gré une balance bénéfices-risques               (n° 384 p. 782).
ser à certains patients en expo-             défavorable. Il s’agit notamment d’an-
sant leurs limites. En 2015,                 titumoraux agissant sur l’angiogenèse              Absence d’aveugle et évaluation
15 nou­veaux médicaments ou nou-             et la croissance tumorale tels que le           biaisée. Les essais cliniques compara-
velles indications pour des médica-          cabozantinib (Cometriq°, non commer-            tifs versus un médicament de réfé-
ments déjà existants ont été cotés           cialisé en France au 4 janvier 2016)            rence ou versus un placebo aident à
“Éventuellement utile” par Prescrire.        dans les cancers médullaires de la thy-         évaluer la balance bénéfices-risques
Ils sont une option supplémentaire,          roïde (n° 383 p. 650-653), le régorafé-         d’un médicament dans une situation
même si elle n’est pas majeure, pour         nib (Stivarga°) dans les tumeurs stro-          donnée. Pour réduire le risque de biais
certains patients. Ces médicaments           males digestives en échec                       et ainsi apporter des résultats du meil-
sont utilisés parfois en complément          thérapeutique (n° 380 p. 413), le sora-         leur niveau de preuves possible, il
d’autres traitements de premier              fénib (Nexavar°) dans les cancers dif-          importe que les essais soient menés en
choix, ou dans des situations sans           férenciés de la thyroïde (n° 384                double aveugle, c’est-à-dire que ni le
option thérapeutique acceptable.             p. 731) et le bévacizumab (Avastin°)            patient ni les investigateurs ne sachent
   Ainsi, par exemple, les indications       dans les cancers épithéliaux de l’ovaire        si le patient reçoit le médicament testé
de certains médicaments parfois              résistants aux sels de platine (n° 383          ou le comparateur (n° 377 p. 180). Or,
utiles chez les adultes ont été éten-        p. 656-657).                                    des dossiers d’évaluation clinique y
dues aux enfants : l’éculizumab (Soli-          Une 5e gliptine, l’alogliptine (Vipi-        compris ceux concernant des médica-
ris°) dans l’hémoglobinurie paroxys-         dia°), a été autorisée dans l’Union             ments destinés au traitement de mala-
tique nocturne, une maladie                  européenne (non commercialisée en               dies graves reposent sur des essais non
génétique rare potentiellement mor-          France au 4 janvier 2016), alors que            aveugles, ce qui influence notamment
telle (n° 375 p. 11) ; le darunavir          le manque de preuves d’efficacité               la notification des effets indésirables
(Prezista°) associé avec le ritonavir        clinique de ces hypoglycémiants, le             au cours de l’essai. Cela a été le cas par
(Norvir°) en traitement de 1re ligne         peu d’effet sur la glycémie et leurs            exemple pour l’afatinib (Giotrif°) dans
chez les enfants à partir de l’âge de        effets indésirables, devraient                  le cancer bronchique non à petites
3 ans infectés par le HIV, ce qui en         conduire à les écarter des soins                cellules, ou le paclitaxel lié à l’albumine
fait une alternative à l’association à       (n° 379 p. 326-327).                            (Abraxane°) dans le cancer du
doses fixes lopinavir + ritonavir (Kale-        Alors que le surcroît de risques             pancréas métastasé (n° 376 p. 89,
tra°) (n° 381 p. 505).                       thromboemboliques avec les proges-              p. 92-93, p. 97-98).
   Certains médicaments sont une             tatifs de 3e génération tels que le                Autre défaut majeur retrouvé fré-
option en raison d’un profil d’effets        gestodène est établi, l’association éthi-       quemment dans des essais cliniques

Page 134 • L a R evue P rescrire Février 2016/Tome 36 N° 388

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Les médicaments “orphelins” : le grand détournement

    Cette année, Prescrire a observé une              Dérives. Depuis 15 ans, on assiste à un         Certaines maladies rares représentent
 forte augmentation du nombre de nou-              marché des médicaments “orphelins” en           cependant un marché attractif pour plu-
 veaux médicaments dits orphelins ou de            plein développement. Mais les progrès           sieurs firmes en même temps. Ainsi, en
 nouvelles indications dans lesquelles un          qu’ils apportent aux patients sont variables.   2015 : deux vasodilatateurs de plus, le
 médicament “orphelin” a été autorisé : 17         Certains médicaments “orphelins” sont           riociguat (Adempas°) et le macitentan
 en 2015, contre 6 en 2014 et 9 en 2013.           même à écarter des soins. Par exemple, en       (Opsumit°), ont été autorisés dans l’hy-
    Le statut de médicament “orphelin” existe      2015 : le défibrotide (Defitelio°) est trop     pertension artérielle pulmonaire alors qu’ils
 dans l’Union européenne depuis l’année            incertain dans la maladie veino-occlusive       n’apportent rien de plus par rapport au
 2000. Il a pour objectif de favoriser la mise     hépatique (n° 380 p. 418-419) ; ou encore,      bosentan (Tracleer°) et au sildénafil (Reva-
 sur le marché de médicaments destinés à           deux inhibiteurs de tyrosine kinases, le        tio°) (n° 379 p. 339-340, n° 381 p. 498-
 des patients atteints de maladies rares,          cabozantinib (Cometriq°) (n° 383 p. 650-        499) ; deux anticorps monoclonaux anti-
 avec un seuil établi à 5 individus ou moins       653) et le sorafénib (Nexavar°) (n° 384         CD20, l’obinutuzumab (Gazyvaro°) et
 atteints pour 10 000 habitants (n° 380            p. 731), qui sont plus dangereux qu’utiles      l’ofatumumab (Arzerra°), ont été autorisés
 p. 457-461, n° 382 p. 619-620). Il y aurait       dans certains cancers de la thyroïde.           pour le traitement de patients atteints de
 environ 6 000 à 7 000 maladies rares                 Certaines firmes se positionnent même        leucémie lymphoïde chronique, sans pro-
 connues dans le monde, surtout d’origine          exclusivement sur des marchés très étroits      grès décisif par rapport au rituximab (Mab-
 génétique, touchant entre quelques                et récupèrent des niches laissées par les       thera°), un autre anticorps monoclonal anti-
 dizaines et plusieurs milliers de personnes.      firmes qui se sont positionnées avant elles.    CD20 disponible depuis de nombreuses
                                                   Ainsi, un an après l’autorisation de la spé-    années (n° 380 p. 414-417).
    Avantages réglementaires et finan-             cialité Orphacol° (acide cholique) dans
 ciers. Les firmes qui développent un médi-        deux déficits rares en acides biliaires, une        En somme. La mise à disposition de
 cament “orphelin” bénéficient d’avantages         demande d’AMM européenne a été dépo-            médicaments dont la balance béné-
 notables, notamment un processus d’auto-          sée pour la spécialité Kolbam° (acide cho-      fices-risques est favorable pour des
 risation de mise sur le marché (AMM) accé-        lique) dans trois autres déficits rares en      patients atteints de maladies rares jusque-
 lérée, des dossiers de formats souvent            acides biliaires (n° 386 p. 896-897). Cette     là sans recours est un progrès. Toutefois,
 limités (AMM conditionnelles, dossiers            substance, qui est aussi utilisée à grande      les stratégies de maximisation de rentabi-
 principalement bibliographiques) et une           échelle comme émulsifiant alimentaire, est      lité commerciale des firmes autour du sta-
 exclusivité de commercialisation pendant          commercialisée comme médicament au              tut de médicament “orphelin” ont conduit à
 10 ans après l’AMM.                               prix de 139 euros à 175 euros la gélule de      modifier les dynamiques de recherche, où
    Les médicaments “orphelins”, de par leur       250 mg selon les spécialités, avec une          de petites niches concentrent de manière
 nature, apportent d’autres avantages finan-       évaluation clinique quasi inexistante.          inefficiente les ressources de recherche et
 ciers aux firmes : des essais cliniques plus         Après quelques temps, certains médica-       développement (n° 380 p. 457-461). Les
 petits et donc en général moins coûteux ;         ments “orphelins” se retrouvent autorisés       firmes utilisent ces mécanismes pour
 des prix de vente très élevés du fait de          dans plusieurs indications. Cela agrandit       demander des prix exorbitants, exercer des
 l’absence ou presque d’alternative théra-         leur part de marché sans pour autant            pressions pour réduire les exigences règle-
 peutique et du faible nombre de patients          entraîner une baisse notable de leur prix.      mentaires, très loin d’une recherche visant
 concernés, ce qui limite fortement le pou-        Par exemple : le lénalidomide (Revlimid°)       à répondre aux besoins sanitaires de la
 voir de négociation des régimes d’assu-           est autorisé dans certains myélomes mul-        population.
 rance ; des coûts marketing réduits du fait       tiples et dans certains syndromes myélo-                                         ©Prescrire
 du nombre restreint de spécialistes dont          dysplasiques (n° 375 p. 8) ; le pasiréotide
 dépendent les prescriptions.                      (Signifor°) est autorisé dans le syndrome
                                                   de Cushing et dans l’acromégalie en situa-
                                                   tion d’échec (n° 385 p. 807-808).

évaluant notamment des antitumo-                   rafénib (Stivarga°) dans les tumeurs             permet d’évaluer un éventuel progrès
raux : certains protocoles prévoient               stromales digestives après échec thé-            thérapeutique en termes d’efficacité
que les patients du groupe compara-                rapeutique (n° 380 p. 405, 413) ;                ou d’effets indésirables (n° 382
teur reçoivent l’antitumoral dès le                l’essai du sorafénib (Nexavar°) dans             p. 565-569). C’est ce qui intéresse
constat d’une aggravation de leur                  les cancers différenciés de la thyroïde          avant tout les soignants et les patients.
cancer. Cela revient à évaluer un                  (n° 384 p. 731).                                    Dans les faits, nombreux sont les
protocole au lieu du nouveau médi-                                                                  dossiers d’évaluation clinique cen-
cament, ce qui masque générale-                      Évaluation versus traitement                   trés sur un seul essai comparatif ver-
ment les différences sur des critères              de référence : trop peu respectée.               sus placebo, alors qu’un traitement
d’évaluation solides tels que la mor-              La comparaison du nouveau médica-                de référence existe. Par exemple :
talité. Par exemple : l’essai du régo-             ment versus traitement de référence              l’aripiprazole injectable à libéra-

                                                                               L a R evue P rescrire Février 2016/Tome 36 N° 388 • Page 135

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Ouvertures                              L’année du médicament

   tion prolongée (LP) (Abilify Main-           Ainsi, par exemple, en 2015, des             die veino-occlusive hépatique est
tena°) n’a pas été comparé à un              observations d’hyponatrémies graves             d’environ 72 000 euros hors taxe
autre neuroleptique injectable LP            ont été imputées à l’aliskirène                 pour 21 jours de traitement d’un
dans la schizophrénie (n° 378 p. 252-        (Rasilez°), un antihypertenseur inhi-           patient de 70 kg (n° 380 p. 418-419).
253) ; le macitentan (Opsumit°) n’a          biteur de la rénine, qui n’a pas d’effi-           La dépense médicamenteuse men-
pas été comparé au bosentan                  cacité clinique démontrée sur les com-          suelle avec l’acide cholique (Kolbam°)
(Tracleer°), le vasodilatateur de réfé-      plications de l’hypertension artérielle,        dans certains déficits en acides biliaires
rence dans l’hypertension artérielle         alors qu’il a exposé à un surcroît d’ac-        est d’environ 20 000 euros pour un
pulmonaire, et de surcroît commer-           cidents cardiovasculaires et d’insuffi-         adulte de 60 kg, avec prise continue
cialisé par la même firme (n° 381            sances rénales dans un essai clinique           du médicament (n° 386 p. 896-897).
p. 498-499) ; le peginterféron bêta-1a       versus placebo (n° 381 p. 506).                    En acceptant de payer au prix fort
(Plegridy°) n’a pas été comparé à un            Des risques graves ont été notifiés          ces médicaments, les autorités de
interféron bêta non pégylé, le traite-       avec certains hypoglycémiants d’ef-             santé jouent le jeu des firmes alors
ment “de fond” de référence de la            ficacité clinique non démontrée sur             qu’elles ont le pouvoir de stopper
sclérose en plaques (n° 386 p. 886).         les complications du diabète en                 cette dérive délétère.
                                             regard d’un profil d’effets indési-                Les choix commerciaux de certaines
   Sous-évaluation des effets                rables disproportionné, notamment :             firmes conduisent les pouvoirs publics
indésirables. Les autorisations de           obstructions intestinales et douleurs           à recourir à des options plus risquées
nouveaux antiviraux dans l’hépa-             articulaires invalidantes avec les glip-        pour les patients, à l’instar du bévaci-
tite C chronique se succèdent, avec          tines ; acidocétoses surtout chez des           zumab (Avastin°) utilisé en injections
des dossiers d’évaluation particuliè-        patients diabétiques de type 2 avec             intravitréennes dans la dégénéres-
rement pauvres concernant les effets         les gliflozines (n° 383 p. 665 et               cence maculaire liée à l’âge (DMLA)
indésirables. À cet égard, le dossier        p. 673 ; n° 386 p. 905).                        avec un prix nettement moins élevé,
d’évaluation de l’association à doses           Face au trop peu de connaissances            mais avec plus d’effets indésirables
fixes lédipasvir + sofosbuvir (Harvoni°)     sur les effets indésirables lors de l’oc-       que le ranibizumab (Lucentis°) (lire
est illustratif (n° 384 p. 732-738). Ce      troi de l’AMM et au laxisme des auto-           dans ce numéro p. 155-156 et n° 378
dossier n’a pas apporté de nouvelles         rités de santé vis-à-vis des données            p. 255-262).
données pour évaluer les éventuels           indigentes fournies par les firmes, il
effets indésirables cardiaques et            est important que patients et soi-
musculaires du sofosbuvir (Sovaldi°)         gnants notifient les effets indésirables        Évaluations par l’EMA : des
qui était déjà commercialisé. Les            des médicaments aux systèmes natio-             trous de mémoire dangereux
effets indésirables de cette associa-        naux de pharmacovigilance, afin que             pour les patients
tion ont été évalués de manière              les risques graves de certains médica-
comparative chez seulement                   ments soient mieux connus. Il importe             Dans le cadre d’une demande
155 patients, alors que le nombre de         aussi de s‘organiser pour écarter des           d’AMM européenne centralisée, la
patients atteints d’hépatite C chro-         soins les médicaments à balance béné-           Commission d’autorisation de mise
nique est estimé à environ 170 mil-          fices-risques défavorable.                      sur le marché (CHMP) de l’EMA, où
lions dans le monde. L’Agence euro-                                                          tous les États membres de l’Union
péenne du médicament (EMA) n’a                                                               européenne sont représentés, émet
pas été regardante, allant jusqu’à           Prix exorbitants : menace                       un avis sur le médicament. Pour cela,
indiquer à partir de ces données             pour l’accès aux soins                          elle s’appuie en particulier sur l’ana-
indigentes que l’association d’antivi-       et la sécurité des patients                     lyse des agences du médicament de
raux ne semblait pas exposer à plus                                                          deux États membres qui endossent
d’effets indésirables qu’un place-              Dans la lignée du sofosbuvir, les prix       cette responsabilité pour tous les
bo (1). Un comble !                          des nouveaux antiviraux dans l’hépa-            États membres. L’avis est rendu,
                                             tite C commercialisés dans l’Union              après vote des États membres, auprès
  Découverte post-AMM de                     européenne en 2015, atteignent des              de la Commission européenne qui
risques graves. Sur la base d’une            sommets : 12 à 24 semaines de trai-             octroie ou non l’autorisation. L’auto-
évaluation clinique très fragile,            tement sont vendues environ 50 000              risation s’impose à tous les États
l’AMM garantit aux firmes un droit           à 100 000 euros avec l’association              membres de l’Union européenne. Les
de commercialisation trop rarement           lédipasvir + sofosbuvir (Harvoni°), et          avis divergents doivent être exposés
remis en cause. Au fil du temps, les         environ 67 000 à 134 000 euros avec             dans le rapport public d’évaluation
connaissances des effets indésirables        l’association daclatasvir (Daklinza°)           (EPAR).
d’un médicament s’étoffent. Si sa            + sofosbuvir (Sovaldi°) (n° 384 p. 732-
balance bénéfices-risques, incertaine        739, n° 379 p. 341-342).                          Associations coupe-faim : dan-
lors de l’évaluation initiale, devient          Les prix des médicaments autorisés           ger. En 2015, l’association à doses
clairement défavorable, le médica-           dans des maladies rares sont aussi              fixes bupropione + naltrexone (Mysim-
ment devrait être retiré du marché,          démesurés (lire aussi l’encadré                 ba°) a ainsi été autorisée dans l’Union
ce que font rarement les autorités de        page 135). Ainsi, par exemple, la               européenne après avis favorable de
santé (lire dans ce numéro                   dépense médicamenteuse avec le                  l’EMA (n° 380 p. 406-412). Cette
pages 138-146).                              défibrotide (Defitelio°) dans la mala-          association d’un amphétaminique et

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d’un antagoniste des récepteurs              Déremboursements de                            Réagir collectivement
opioïdes, à visée amaigrissante, expose      médicaments plus dangereux
des patients obèses ou en surpoids à         qu’utiles : moins de patients                     L’évaluation des médicaments per-
de nombreux risques, pour la perte de        exposés aux risques                            mettant d’obtenir une autorisation de
quelques kilos seulement. Les agences                                                       mise sur le marché reste trop souvent
française et irlandaise du médicament           Quand un médicament à balance               un simulacre, restreinte au minimum
ont émis des avis négatifs contre l’au-      bénéfices-risques défavorable est mis          administratif. Trop de patients espèrent
torisation de cette association, mais la     ou maintenu sur le marché euro-                des progrès de traitement, mais sou-
décision européenne s’impose aussi à         péen, l’absence de prise en charge de          vent sans connaissance des risques qui
ces pays. L’AMM de Mysimba° montre           la dépense médicamenteuse par les              sont pris.
le peu de mémoire de l’EMA puisque           systèmes nationaux de santé soli-                 Ainsi, les antiviraux de l’hépatite C
c’est ce type de décision du désastre        daires est une mesure bienvenue,               continuent d’affluer, sans évaluation
sanitaire lié à l’autorisation dans          comme pis-aller, pour limiter l’expo-          comparative appropriée, sans organi-
divers pays européens du benfluorex          sition des patients aux effets nocifs          sation de l’évaluation des associa-
(ex-Mediator°). Pourtant, en 2013,           du médicament.                                 tions optimales et sans évaluation
l’EMA avait fait preuve de prudence             En France, la Commission de la              adaptée des effets indésirables. Il est
en se prononçant contre l’autorisation       transparence de la Haute autorité de           inacceptable que leurs prix s’alignent
de deux autres médicaments de l’obé-         santé (HAS) a notamment pour mis-              sans grande discussion sur celui du
sité, la lorcasérine (Belviq° aux États-     sion d’évaluer et de réévaluer le ser-         sofosbuvir dans une entente, appa-
Unis d’Amérique) et l’association            vice médical rendu (SMR) des médi-             remment générale, pour ponctionner
phentermine + topiramate (Qsiva°)            caments en vue d’un remboursement              les fonds de la solidarité nationale.
(n° 364 p. 132-136).                         par la Sécurité sociale ou d’un agré-             L’Agence européenne du médica-
                                             ment à l’usage dans les établissements         ment protège plus les firmes que les
  Simples modifications du RCP               de soins. Lors d’une réévaluation, une         patients : avis favorable à l’autorisa-
plutôt que retraits du marché.               cotation à la baisse du SMR d’un               tion de médicaments peu évalués,
L’identification de risques graves           médicament conduit à une baisse de             absence d’attention aux lacunes
après la mise sur le marché d’un             son taux de remboursement. Quand               d’évaluation des effets indésirables.
médicament, le retrait ou le projet          le SMR est coté “insuffisant”, le médi-           Il est notable que l’ANSM, et
de retrait par une agence du médi-           cament devrait ne plus être rembour-           d’autres agences nationales du médi-
cament d’un État membre pour des             sable et devrait être radié de la liste        cament, ont pris à plusieurs reprises
raisons de pharmacovigilance,                des médicaments agréés aux collecti-           le parti de l’intérêt des patients. Dans
conduisent à la réévaluation du              vités. Outre le déremboursement,               certains cas, la France a persévéré
médicament à l’échelle européenne            l’inscription éventuelle sur la liste des      dans ses choix de protéger les patients
par l’EMA. Mais souvent à l’issue de         médicaments en libre accès ou une              contre quelques médicaments nocifs
cette procédure, les décisions pro-          baisse du prix, sont des facteurs qui          par le biais de l’absence de rembour-
tègent surtout les firmes au détri-          influent sur la prescription ou la vente       sement par la Sécurité sociale, ou par
ment des patients, les autorités de          du médicament.                                 un déremboursement, à défaut d’un
santé se contentant d’amender le                Ainsi, suite à des avis de la Com-          retrait du marché.
résumé des caractéristiques du médi-         mission de la transparence, en 2015,              Dans le marché mondialisé des
cament (RCP) par l’ajout de                  ont été déremboursés en France :               médicaments, les avancées pour les
contre-indications, de précautions           – les spécialités à base de kétoprofène        patients restent peu fréquentes, et
d’emploi, de mises en garde, etc.            en gel (Ketum° gel ou autre), un               l’innovation réside surtout dans des
  Plusieurs exemples analysés par            anti-inflammatoire non stéroïdien              stratégies commerciales et finan-
Prescrire au cours de l’année 2015 le        qui expose à un surcroît de photo­             cières des firmes.
montrent. Ainsi, la diacéréine (Art 50°      sensibilisations par rapport aux                       Synthèse élaborée collectivement
ou autre) n’a pas été retirée du mar-        autres (n° 377 p. 181) ;                                               par la Rédaction,
                                                                                                         sans aucun conflit d’intérêts
ché alors que 9 États membres, dont          – les spécialités à base de ranélate de                                       ©Prescrire
la France, y étaient favorables en rai-      strontium (Protelos°) dont les effets
son d’effets indésirables dispropor-         indésirables sont disproportionnés
                                                                                            Extraits de la recherche documentaire Prescrire.
tionnés en regard d’une efficacité cli-      au regard de son efficacité modeste            1- EMA - CHMP “Public assessment report for
nique non démontrée (n° 375 p. 12).          dans l’ostéoporose (n° 377 p. 181) ;           Harvoni. EMA/702742/2014” 25 septembre 2014 :
  Les risques de réactions cutanées          – les “antiarthrosiques” d’action              80 pages.
                                                                                            2- EMA - PRAC “Revised assessment report -
graves et de réactions anaphylactiques       lente à base de chondroïtine (Chon-            Ambroxol and bromhexine containing medicinal
avec l’ambroxol (Surbronc expectorant        drosulf° ou autre), de diacéréine (Art         products. EMEA/PRAC/800767/2015” 10 sep-
ambroxol° ou autre) et la bromhexine         50° ou autre), de glucosamine (Volta-          tembre 2015 : 62 pages.
(Bisolvon°), des mucolytiques d’effi-        flex° ou autre) ou d’insaponifiables
cacité clinique non démontrée, ont           d’avocat et de soja (Piasclédine°), pas
seulement fait l’objet d’une mise en         plus efficaces qu’un placebo et aux
garde dans les RCP et les notices, mal-      effets indésirables parfois graves
gré l’opposition justifiée de 11 États       (n° 380 p. 420).
membres (2) (n° 381 p. 503).

                                                                        L a R evue P rescrire Février 2016/Tome 36 N° 388 • Page 137

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