L'exposition de la vie privée dans les émissions de télé-réalité
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MURIELLE ORY Laboratoire “Cultures et sociétés en Europe” (UMR du CNRS n° 7043) Université Marc Bloch, Strasbourg L’exposition de la vie privée dans les émissions de télé-réalité D ans le roman 1984 de George occidentale, de Georg Simmel à Erving Orwell, Big Brother est un dis- Goffman, en passant par Norbert Elias, positif de surveillance qui régit s’est au contraire développé sur l’im- la société en faisant intrusion dans la vie portance du secret, de l’intimité, comme privée des individus jusque dans leurs constitutifs du processus d’individua- fantasmes et leurs peurs les plus intimes. lisation et comme condition d’une vie Écrit au lendemain de la Seconde Guerre sociale possible. Et pourtant, cinquante Mondiale, à l’issue de l’expérience nazie, ans après Orwell, Big Brother est devenu et alors que se met en place le rideau de le nom d’une émission de télé-réalité fer destiné à protéger l’expérience sovié- américaine regardée et commentée par tique, le roman fonctionnera pour toute des millions de spectateurs. La transpa- une génération comme le paradigme de rence ne fait plus peur, elle est devenue la société totalitaire privatrice de toutes l’objet d’un spectacle organisé, auquel les libertés individuelles. Telle paraît des milliers de candidats cherchent à la société totalitaire pour le lecteur du contribuer, prêts à exposer au grand roman, mais de l’intérieur du système, et public les aspects les plus intimes de c’est ce qui le fait tenir, le contrôle social leur vie privée. Le paradigme a-t-il fait n’est pas perçu comme une oppression : long feu, le secret et l’intimité ont-ils comme dans Le meilleur des mondes cessé d’être une condition du dévelop- d’Aldous Huxley, autre fiction sociale pement d’une vie individuelle ? Ou bien, représentative des inquiétudes de l’épo- au contraire, l’engouement pour ce type que, le modèle social est accepté comme d’émissions signale-t-il que nous som- un bien par la majorité, et les personna- mes bel et bien entrés dans l’univers du ges du roman qui recherchent un espace Meilleur des mondes ou de 1984 sans caché des regards y sont des déviants davantage nous en rendre compte que les marginaux. L’instance chargée du con- personnages de la fiction ? trôle est d’ailleurs baptisée « Ministère Des sociologues, des psychologues, de l’amour ». des anthropologues se sont penchés sur En contradiction avec les modèles le phénomène. La question ne se pose totalitaires évoqués par ces contre-uto- pas pour les spécialistes des sciences pies, tout un courant de la sociologie sociales dans les termes tranchés d’une 58 RSS33.indb 58 25/04/05 14:56:08
Murielle Ory L'exposition de la vie privée dans les émissions de télé-réalité polémique pour ou contre l’exposition Les programmes de télé-réalité cons- en demeure un principe essentiel. Nom- publique de l’intimité. La télé-réalité tituent une intrusion dans la vie privée et breux sont les programmes qui, depuis révèle les transformations contemporai- personnelle des candidats dans la mesure quatre décennies, promettent aux télés- nes de la notion d’intimité, et à travers elle où ils rapportent des scènes de la vie au pectateurs de parler « pour la première du rapport des individus à eux-mêmes, sein de ce groupe de jeunes – conversa- fois à la télévision » de leur propre vie. aux autres et au monde. Les frontières qui tions, confidences, toilettes et conversa- Tous prétendent montrer enfin l’homme séparent l’espace privé de l’espace public tions téléphoniques en temps limité avec ordinaire tel qu’il se comporte dans son sont certes interrogées, bousculées, mais la famille ou les proches. Cependant, intimité, c’est-à-dire sous un jour vrai. En davantage qu’à leur effacement, c’est François Jost montre que la télé-réalité effet, le sens commun assimile l’intime à des déplacements qu’on assiste, ainsi innove moins sur l’ouverture sur l’inti- de l’individu à une profondeur cachée qu’à des formes de négociation et d’in- mité que sur sa mise en scène. En effet, qui serait du côté de la vérité tandis qu’à terpénétration des deux espaces. la vie privée des acteurs sociaux est au l’autre pôle se situerait la surface, les centre de l’intérêt de la télévision depuis apparences, bien entendu fausses puisque l’émergence de la néo-télévision dans construites en fonction des rôles que doit les années 1980. C’est avec Psyshow, endosser l’acteur social dans l’espace Naissance d’un en 1983, que la psychologie du couple public. dispositif télévisuel ■ devient un spectacle à part entière. Les Cette mise en visibilité de ce qui rapports entre un homme et son épouse y demeurait jusque là de l’ordre de l’inti- En France, l’histoire débute en avril sont mis en scène dans un studio, face à mité traduit une évolution des comporte- 2001, lorsque M6 annonce, à grands ren- un animateur et un psychanalyste. L’ano- ments à l’époque moderne. On pourrait forts de publicité, le lancement de Loft nyme voit sa vie privée transposée à n’analyser le succès de la télé-réalité Story, la première émission de télé-réa- l’écran et devient le héros d’un jour, il est qu’au regard du chiffre d’affaire extra- lité, genre télévisuel jusque-là encore celui vers lequel tous les regards se con- ordinaire généré par ces émissions pour inconnu dans notre pays. La formule est centrent. Dans Psyshow, puis dans tous leurs producteurs. Cependant, évoquer directement inspirée de l’émission Big les reality show qui suivront, des incon- les seuls motifs économiques pour tenter Brother lancée par la société de produc- nus participent à l’entreprise télévisuelle de rendre compte de ce phénomène s’avè- tion néerlandaise Endemol. Le succès est en acceptant de donner en spectacle leur re insuffisant. En effet, il serait réduc- immédiat et exceptionnel : chaque soir, intimité lorsqu’ils rejouent leur vie dans teur de considérer les fans de Loana, de en moyenne, 5 millions de téléspectateurs un studio et devant un public. Jean-Pascal ou de Nolwenn comme des regardent cette émission. Quant au grand Avec Loft Story la télévision va encore « idiots culturels » c’est à dire comme les direct en public du jeudi soir, il capte en plus loin dans cette logique de mise en victimes dépourvues d’intelligence d’un moyenne 7,5 millions de spectateurs et scène du dévoilement des secrets de l’in- système libéral qui exploite leur jeunesse une part d’audience de 34,8 % (48,1 % dividu. François Jost montre que, d’une et leur naïveté. chez les moins de 50 ans)1. part, la télé-réalité ne fait plus appel à la Pour reprendre, d’une certaine maniè- La recette de Loft Story est simple : on feintise puisque les candidats ne rejouent re, le paradigme introduit par 1984 d’un place onze candidats dans un espace clos, plus leur rôle sur le plateau mais sont système de la transparence auquel adhè- le Loft, truffé de micros et de caméras, censés vivre leur quotidienneté en direct rent activement les individus – qui y dans les chambres comme dans les dou- et,d’autre part, que ces programmes pro- voient quelque chose de souhaitable, et ches, et on les fait vivre ensemble pendant posent un décor (le Loft, le Château) non d’inquiétant –, il faut se poser la soixante-dix jours. Leurs images sont naturalisant le studio. En effet, « bien que question des motivations de ces derniers. accessibles en direct sur Internet et, tous tout y soit maîtrisé, comme sur un plateau Pourquoi le spectacle de « l’autre » vivant les jours, une émission relate leurs faits de télévision, le décor a les apparences sa vie à la télévision attire-t-il tant de et gestes aux téléspectateurs. Ceux-ci d’un espace privé, au point que le déco- monde ? Quelles motivations poussent peuvent voter pour leur candidat préféré rateur de l’émission peut affirmer que «la les acteurs sociaux à franchir les barrières et le vainqueur se voit attribuer une forte notion de décor perd sa valeur parce que du domaine privé pour observer l’intimité somme d’argent. Par la suite, d’autres tout est vrai»2 ».(F. Jost, 2002, p.73) d’autrui ? Et, comme il ne suffit pas de programmes de télé-réalité apparaissent La télé-réalité ne constitue donc pas s’interroger sur l’intérêt des téléspecta- dans le paysage télévisuel français : Star la première expérience de mise à nu de teurs pour cette mise en scène de l’intime Academy, Popstars, Koh-Lanta, l’Ile de l’individu à la télévision et par là d’ex- puisque, pour qu’il y ait spectacle, il est la Tentation, Opération Séduction qui position de la sphère domestique privée indispensable que certains acceptent de rencontrent le même succès phénoménal. dans l’espace public télévisuel. C’est au s’offrir aux regards, il s’agit également de Le terme de « télé-réalité » entre dans le cours des années 1960 que le terme de dégager les raisons pour lesquelles cer- dictionnaire de la langue française de « télé-vérité » apparaît pour désigner une tains souhaitent à tout prix s’exposer à la l’année 2004, qui le définit comme une certaine façon de parler de la vie des fran- télévision. En effet, pour participer au jeu « émission télévisée où est filmée la vie çais et de la montrer à l’écran. Ce terme et pour remporter la partie, il s’agit pour quotidienne de personnes sélectionnées recouvre des réalités propres à chacune les candidats de devenir visible, d’ « im- pour y participer » (Le Petit Larousse, des époques mais la prétention à resti- pressionner » la caméra par leurs gestes et 2004). tuer le réel en perçant la sphère privée leurs comportements « fascinants ». 59 RSS33.indb 59 25/04/05 14:56:09
Atelier Van Lieshout, Commune bed, aquarelle sur papier. Collection Frac Alsace. © Klaus Stöber L’une des critiques récurrentes3 for- tateur-voyeur entre par effraction dans mulées à l’encontre de ces émissions est Des conduites la sphère privée d’autrui en tirant du le brouillage des frontières entre l’espace pathologiques ? ■ plaisir du spectacle de l’intimité, tandis privé et l’espace public induit par leur que le candidat-exhibitionniste éprouve dispositif, qui place les candidats sous S’agit-il de voyeurisme ? Le terme est une jouissance à s’exposer sur la scène l’œil des caméras de façon quasi perma- souvent lancé comme une explication publique. Dès lors, l’interpénétration des nente, de nuit comme de jour. Il y a par suffisante. Symétriquement, on invoque espaces public et privé est perçue comme exemple, pour Alain Ehrenberg (1995), l’exhibitionnisme des candidats dans la une pathologie du social. une tendance actuelle de l’homme ordi- mesure où les personnes filmées sont Cette lecture, volontiers polémique, naire à la « publicisation » de la vie privée volontaires. Selon certains journalistes, doit être nuancée. D’une part, l’homme et de l’intimité qui constitue un danger nous assisterions, avec Loft Story, « à éprouve un plaisir, repérable chez tout pour la démocratie, puisque les frontières une poussée d’exhibitionnisme généra- un chacun dans certaines proportions, à qui séparent les domaines privé et public lisée (…) à laquelle répond une véri- observer autrui et à s’exhiber devant lui. tendent à s’effriter. Il nous faut examiner table envie de voir ». L’engouement du Le voyeurisme stricto sensu, comme per- cette tendance, qui peut aussi être inter- public pour ces émissions correspondrait version, repose sur le fait de voir sans être prétée comme le révélateur d’une attente au « triomphe du voyeurisme » et Loft vu : or, en l’occurrence, les participants sociale plus générale : il s’agit de voir Story marquerait « la fin d’un tabou » sont conscients d’un dispositif auquel ils l’autre se comporter, agir et réagir pour en France4. Dans cette perspective, le sont candidats. D’autre part, il est impos- inventer sa propre vie. phénomène de la télé-réalité résulterait sible de concevoir la perversion sans faire d’une pathologie touchant tout aussi bien référence à une norme. D’un point de vue les téléspectateurs que les candidats qui sociologique, cette norme réside dans le souhaitent participer à ces émissions. Il consensus social et on l’analysera davan- y aurait perversion parce que le téléspec- tage comme une déviance par rapport à 60 Revue des Sciences Sociales, 2005, n° 33, “Privé – public : quelles frontières ?” RSS33.indb 60 25/04/05 14:56:10
Murielle Ory L'exposition de la vie privée dans les émissions de télé-réalité la tendance centrale du groupe auquel le et à la télévision de l’existence de sa fille ductibles, bien au-delà des critiques sur la déviant appartient. Mais cette tendance qu’elle maintenait cachée jusque là : médiocrité des programmes de « télé-réa- à observer l’autre vivre et à s’exposer à « Pour moi, ça a été le monde qui lité » et la « télé-poubelle. » (N. Heinich, ses yeux n’est, pour les sciences sociales, s’écroule parce que depuis que je l’ai 2002, p.84) pas pathologique, car selon l’époque ou eue et que je l’ai placée je m’en suis Dans l’histoire, les frontières entre selon les cultures, elle sera interdite ou jamais vantée et même mes meilleurs l’espace intime et l’espace public se sont tolérée, dénoncée comme perversion ou amis et mes petits amis de l’époque ne le déjà déplacées en raison d’une volonté considérée comme normale : « Un bref savaient pas… et là, la France entière le de contrôle social, de souhait de trans- retour en arrière, ne serait-ce que vers savait et je ne voulais pas que les gens le parence des rapports humains ou d’un la génération de nos parents et de nos sachent… Je veux dire, mon histoire c’est besoin de résoudre des problèmes psy- grands-parents, montre que le sentiment la mienne, c’était mon passé, c’était ma chiques en les formulant verbalement de la pudeur est loin d’être immuable et vie privée, c’était à moi ! » (au prêtre, au psychanalyste ou encore que les jugements d’exhibitionnisme ou On connaît le phénomène des person- aujourd’hui à la télévision). Aloïs Hahn de voyeurisme sont précisément liés à nes qui ont installé une webcam, reliée montre qu’à partir du XIIe siècle le péché un moment de l’histoire. » (S. Tisseron, à Internet, au centre de leur domicile, n’est plus seulement perçu à travers les 2001, p.48.) offrant ainsi le spectacle permanent de actes extérieurs, réellement accomplis C’est parce qu’aujourd’hui la nudité leur vie privée aux internautes qui visitent par l’individu mais aussi à partir de ses est entrée dans les mœurs et qu’elle n’est leur site. Même ces prosélytes de la trans- intentions, de ses pensées sans même plus génératrice de honte que voir les parence se réservent toujours une pièce que la faute soit commise. « On en arrive fesses d’un candidat de ces émissions ou un endroit qui les protègent physique- ainsi à une socialisation des mouvements sur son écran n’est plus un spectacle cho- ment des regards. De même, les candidats de l’âme et à un contrôle social de la quant. Une telle scène relève de la provo- des émissions de télé-réalité revendiquent conscience, ce qui n’était pas possible au cation mais n’est plus considérée comme eux aussi leur besoin de maintenir une même degré antérieurement. » (A. Hahn, relevant des relations entre un exhibi- zone d’ombre sur leur « intimité psychi- 1986, p. 55) Nous pouvons donc ima- tionniste et un voyeur dans la mesure que ». Selon S. Tisseron, il existerait un giner, avec N. Heinich, qu’un jour « la où les normes fixant la réalité de ces besoin fondamental chez l’homme de dis- frontière excrémentielle » soit elle aussi termes se sont transformées. L’étiquetage tinguer un « espace intime » d’un « espace remise en cause. Il s’agirait alors de exhibitionniste-voyeuriste peut donc, à public » et les candidats de ces émissions désobéir à une règle sociale et culturelle partir de là, être remis en cause. Rien ne évoquent fréquemment cette idée d’une au nom de « l’éthique de l’authenticité ». permet de fonder une « pathologisation » limite à ne pas franchir. Ainsi, Nathalie Pour l’auteur, l’art contemporain montre des transgressions de l’intimité. Heinich remarque que « sur le plateau de déjà un attrait pour la transgression qui Loft Story, il y avait des caméras partout, correspond à une « valorisation morale du sauf dans les toilettes. (…) Il vaut la peine refus des contraintes et des conventions, de se demander pourquoi. Car que se au premier rang desquelles les frontières Un renoncement à serait-il passé si ce même lieu de la plus entre public et privé, dont le réglage s’est l’intimité qui n’est que extrême intimité avait été rendu public ? » progressivement opéré au cours du pro- partiel ■ (N. Heinich, 2002, p.284) Au cours des années 1970 le corps cessus de « civilisation ». » (N. Heinich, 2002, p.84) est exposé aux regards et les individus Dès lors, filmer l’intérieur des toilet- Le renoncement des candidats à leur transgressent ce qui demeurait jusque-là tes en même temps que les personnes intimité n’est d’ailleurs que très partiel. les frontières de la nudité corporelle au qui les utilisent ne constituerait pas une Ainsi, malgré les promesses de la chaîne, nom d’un rapprochement avec la nature provocation gratuite de la part de ces la dimension proprement sexuelle est très et d’une plus grande transparence entre émissions mais une transgression des peu présente dans les émissions. Si la êtres humains. Les années 1980 sont cel- interdits motivée, « justifiable par des plupart des lofteurs conservent un maillot les de la confession télévisuelle et l’on arguments moraux invoquant l’intérêt de bain lorsqu’ils prennent leur douche, assiste alors à un dévoilement des pen- général » qui annoncerait une avancée une partie de leur vie psychique est aussi sées intimes jusque-là réservées au psy- vers moins d’opacité dans les rapports volontairement maintenue cachée. Serge chanalyste et au prêtre. Dans les années entre les individus, ou vers une réappro- Tisseron parle de « l’exaltation des for- 1990, la sexualité devient un spectacle priation du corps. mes non visibles de l’intimité » (S. Tis- qui se propage à la télévision à travers seron, 2001, p. 51) lorsque les candidats la multiplication des films pornographi- revendiquent « avoir droit à un jardin ques. Il est vrai toutefois que jusqu’à pré- secret ». sent jamais l’intimité de l’individu dans La réception par les Ainsi, lors d’un reportage sur Loana, les lieux d’aisance n’a été exposée5. « Il téléspectateurs ■ « Loana : entre gloire et blessure », pré- y a là une forme extrême d’humiliation, senté dans l’émission Sans aucun doute, dont la mise en œuvre dans le cadre de De l’avis de certains téléspectateurs, Loana évoque la révélation dans la presse l’émission aurait probablement suscité la mise en scène de l’intimité d’autrui des réactions de rejet massives et irré- leur permet d’élargir le champ de leur 61 RSS33.indb 61 25/04/05 14:56:11
compréhension du monde, de remettre en « Je ne sais pas mais… ce n’est peut- sions de télé-réalité incitent à une confes- cause leurs préjugés à travers l’explora- être pas un mal de voir ce que les gens sion des secrets de la vie intime qui est tion d’autres modes de vie. C’est l’un des font chez eux… enfin ça fait peur et ça elle-même exposée à la télévision. Pour arguments qu’ils avancent pour expliquer peut donner lieu à beaucoup d’abus André Vitalis, c’est la légitimité même qu’ils regardent les programmes de télé- mais… je ne sais pas… je pense aux du secret qui est ici remise en question réalité6 : enfants battus par exemple… il faut que puisque la mise a nu des individus peut « En reprenant Loft Story, ce n’est pas quelqu’un intervienne même si c’est de être approuvée par les acteurs sociaux qui bien, mais tu as quand même un espèce de l’extérieur… ce n’est pas parce que ça se la considèrent comme une avancée pour regard sur des jeunes même si l’ensemble déroule au sein de la famille et que l’on la démocratie. est artificiel… il y a quand même des a pas le droit d’y mettre son nez que l’on Cependant, si les téléspectateurs con- moments ou ces jeunes communiquent doit laisser des choses comme ça… je ne firment, comme nous l’avons vu, cette et échangent et sur le fond leur commu- sais pas… » (Noémie/23ans/étudiante en analyse ils la contredisent en même nication elle existe, elle est bien réelle, maîtrise d’histoire de l’art). temps : elle est naturelle même si ils n’auraient Noémie remet là en cause la sépara- « … Le point positif… c’est peut- pas les mêmes types de relations… mais tion entre la sphère domestique et celle du être de faire réfléchir sur ce qu’on voit dans leur communication, ils fonction- politique, entre la famille et la cité, sépa- à la télé… on voit comme on peut se nent avec leurs mots, leurs idées… par ration qui est inscrite dans la Déclaration faire manipuler… et ces émissions sur exemple le fameux : « Tu vois ce que je des droits de l’homme et est à la base de la vidéosurveillance ça m’a fait pen- veux dire » à chaque bout de phrase est notre système démocratique7. Elle pointe ser à 1984… c’est vrai que là on peut bien réel, ça existe… et tu as un regard de la sorte toute l’ambiguïté du contrôle se poser des questions… on y arrivera sur des jeunes que tu ne fréquentes pas, social des activités individuelles : risque sûrement… mais pourquoi je pense à ça que tu connais pas forcément (…) c’est du glissement vers un monde orwellien, maintenant… parce qu’il y avait juste- instructif parce que je peux voir comment d’un côté ; nécessité, de l’autre, de ne pas ment une évolution… je crois que c’était des jeunes que je ne connais pas vivent, pour autant abandonner la sphère domes- pour les lycées, tu sais, les lycées qu’on comment ils s’expriment. » (Eric/40 ans/ tique à l’exercice privatif du pouvoir par place sous vidéosurveillance… oui, c’est inspecteur des écoles/marié/père de deux le plus fort (nécessité qui légitime depuis le genre d’émissions qui fait réfléchir… » enfants). déjà plusieurs décennies l’intervention (Odile/44 ans/institutrice dans une école « (…) Non, si j’aimais c’est aussi sociale pour prévenir et sanctionner les publique/mariée/mère de deux enfants). parce que je voyais des jeunes… j’ai violences conjugales et familiales). « Mais c’est vrai aussi que ça peut plus l’habitude… comme ça je comprends Un certain nombre de lois garantis- donner lieu à plein d’excès… d’être vu plus les jeunes d’aujourd’hui… parce sent aux citoyens le droit d’observer, de tout le temps au nom de la sécurité… que maintenant il y a un décalage avec comprendre et d’évaluer les décisions c’est à la mode ça l’insécurité… je sais moi (rire)… c’est bien pour les vieux de que prennent les gouvernants aussi bien pas… c’est vrai que ça me fait peur… voir des jeunes qui vivent… » (Odile/75 que leurs conduites. Il existe un lien c’est pas normal… » (Noémie/23 ans/étu- ans/retraitée). entre démocratie, l’obligation de rendre diante en maîtrise d’histoire de l’art). Cette mise en spectacle de l’intimité compte et l’accès à une information sur Les téléspectateurs sont donc loin dans les médias peut donc être accueillie l’action des pouvoirs publics. Cepen- de la représentation orwellienne d’une favorablement dans la mesure où l’in- dant l’ouverture des institutions se heurte masse idéologiquement manipulée : ils trusion des caméras dans l’espace privé, régulièrement à un autre principe démo- sont conscient du risque, ils sont partagés jusqu’à présent opaque aux regards exté- cratique, celui du respect de la vie privée sur le bienfait pour la démocratie de l’in- rieurs, permet de remettre en question les des individus. Ce conflit permanent entre trusion de la sphère publique et politique catégories établies. Pour les personnes transparence et droit à la vie privée per- au sein de l’espace privé. En effet, s’ils y adultes ou plus âgées, ces programmes met de cerner une tension propre aux voient, d’une part, un moyen de connaî- leur donnent le sentiment d’accéder aux régimes démocratiques en matière d’in- tre, par procuration, d’autres façons de modes de vie des plus jeunes c’est-à-dire formation. vivre leur existence et de limiter les abus de rester en contact avec une frange de la Si le politique a été, progressivement de pouvoir au sein de l’espace privé, ils population qu’ils estiment mal connaître. dans l’histoire, soumis à des règles et a perçoivent, d’autre part, à travers cette Pour d’autres, instaurer plus de trans- un devoir de transparence les sphères du ingérence les excès d’une société de sur- parence dans le domaine privé, qui est privé et de l’intime ont été délaissées. veillance. également un lieu de pouvoir, de rapport Dès lors, « introduire des règles et plus de de force et de domination, marque même transparence comme cela a été fait dans le une avancée vers la démocratie. En effet, monde politique ou réinscrire la famille en remettant en cause les frontières tra- ou la conjugalité dans une représentation ditionnelles entre espace public et espace démocratique de la société, apparaît dès privé on rend visibles les faux-semblants lors comme un progrès. La démocratie et les mensonges qui règnent dans la ne concerne pas que la politique mais sphère privée : doit être élargie à l’ensemble de l’univers privé » (A. Vitalis, 2002, p. 2). Les émis- 62 Revue des Sciences Sociales, 2005, n° 33, “Privé – public : quelles frontières ?” RSS33.indb 62 25/04/05 14:56:12
Murielle Ory L'exposition de la vie privée dans les émissions de télé-réalité Modèles de s’exposent volontairement Jean-Claude une question collective » (A. Ehrenberg, Kaufman s’est penché sur les processus 1995, p. 14). En effet, « la concurrence comportements et contemporains de construction identitaire entre spectacle de réalité et politique extension de soi… ■ où Ego se cherche dans un va-et-vient porte secondairement sur l’action insuf- entre le personnel et le collectif, le public fisante des institutions. Les promoteurs Les candidats des programmes de et le privé, le secret et le dévoilement. La de spectacle de réalité se légitiment du télé-réalité sont consentants, et même confusion des frontières entre l’espace constat que les institutions sont défaillan- demandeurs : ils désirent être vu dans leur public et l’espace privé, comme celles tes et que la télévision a un rôle à jouer quotidienneté et confient volontairement qui distinguent la réalité de la virtualité, pour limiter ces dysfonctionnements. » leurs secrets à la caméra. Houcine dans le rend compte de l’une des transformations (A. Ehrenberg, 1995, p. 297) « Confessionnal », lors du «prime-time», anthropologiques propres à la modernité La crise du modèle républicain et de le 18 octobre 2002 : dont le phénomène de la télé-réalité est l’État-Providence a eu pour conséquen- « (…) parfois c’est très dur… mais je une manifestation visible. ce une action politique moins efficace voulais que le public sache que je voyais « L’individu n’est pas une donnée que pendant les Trente-Glorieuses. Les pas beaucoup mon fils… que mon his- anthropologique constante. Il constitue normes et le cadre symbolique étaient toire n’a pas été facile (…) » un système complexe qui se transforme alors construits dans l’espace public, et Les candidats qui participent à ces dans les différents contextes historiques. les demandes privées (c’est-à-dire les émissions sont même sélectionnés parmi Nous assistons aujourd’hui à une muta- demandes de sens) étaient prises en char- plusieurs milliers d’autres postulants. tion majeure, qui s’accélère avec l’arrivée ge dans cet espace. Or, le fait que cette Quelles sont les motivations qui les pous- de nouveaux supports technologiques : configuration ait été largement ébranlée sent à entreprendre cette démarche tout à ego se construit de plus en plus par des amène à une généralisation de l’incer- fait volontaire de mise en visibilité de soi extériorisations diverses, des traces de soi titude, et ce manque de lisibilité de la et de son intimité et pour quelles raisons qui tendent notamment à se démultiplier société rend floues les frontières entre tant de téléspectateurs trouvent-ils de sous forme d’images. L’individu a désor- espace public et espace privé. D’où un l’intérêt à ce spectacle ? mais la vertu d’élargir physiquement son processus généralisé de privatisation du D’une part, si les programmes de télé- être (ce qui l’incline à espérer folle- public – l’individu doit prendre sur lui réalité rencontrent un tel écho, c’est que, ment qu’il pourrait ainsi vivre plus). » toutes les tensions qui parcourent le corps tout en conservant leur mission distrac- (J.-C. Kaufmann, 2001a, p. 2) social – et de publicisation du privé qui tive, ils répondent à une demande de nor- Ce que pointe J-C Kaufmann c’est que conduit au traitement public des problè- mes et de règles. En effet, ils proposent nous avons tous les moyens de nous élar- mes privés car ceux-ci ne sont plus gérés aux téléspectateurs, notamment aux plus gir, de nous étirer par des extériorisations par l’instance politique. jeunes, des modèles de conduites et de de nous-mêmes sous la forme d’images A. Ehrenberg est ici rejoint par comportements qu’ils peuvent éprouver (appareils photo, caméscope, webcam, et J.-C. Kaufmann, puisque l’un des élé- par la suite dans leur vie quotidienne. maintenant grâce à la télévision qui met ments qui peut expliquer cette envie « Moi, je sais pas mais je regarde parce sur la scène publique la vie de l’homme d’observer l’autre gérer sa vie est que… je sais pas, je regarde comment ils ordinaire). Et en même temps, nous cher- qu’aujourd’hui l’identité n’est plus don- font, comment les filles se fringuent… chons à résoudre nos interrogations sur le née traditionnellement par la société, j’aime bien parce qu’on voit comment ils monde qui nous entoure en observant ces mais qu’elle doit être construite par cha- sont entre eux, c’est cool parce que c’est programmes et les scènes de la quotidien- cun, qu’elle s’apparente à une œuvre que comme nous, entre jeunes… » (Julie/14 neté qu’ils diffusent. tous doivent entreprendre et réussir. Pour ans/collégienne). « Se montrer et regarder : la télévision Dany-Robert Dufour « la postmoder- Ces émissions jouent un rôle dans le (ainsi qu’Internet) constituent l’interface nité, démocratique, correspond en effet processus de l’apprentissage social dans parfaite entre ces deux mouvements qui à l’époque où l’on s’est mis à définir la mesure où les thèmes abordés, princi- se complètent parfaitement et enclenchent le sujet par son autonomie, notamment palement les relations familiales et les une véritable dynamique » (J.-C. Kauf- juridique, et où l’on s’est mis à donner rapports avec les pairs qui sont suscep- mann, 2001a, p. 4) du sujet parlant une définition autoré- tibles de comporter des difficultés pour férentielle » (R-D Dufour, 2001, p. 16). l’adolescent, sont ceux qui impliquent À partir de là, la séparation entre l’espace personnellement le jeune téléspectateur. public et l’espace privé est entièrement Il n’y a donc pas de « curiosité malsaine » …dans un contexte remise en cause puisque « l’univers de ou de voyeurisme à proprement parler, de d’incertitude ■ la vie privée et du quotidien est devenu la part d’un téléspectateur qui observe, une nouvelle frontière ouvrant sur des non pas un spectacle défendu, mais la Une autre thèse, celle d’Alain Ehren- horizons sans fin. Alors que la planète- mise en image du fonctionnement des berg, est que la télévision relationnelle terre découvre ses limites, la plongée règles sociales qui régissent son monde et exprime l’imprécision des frontières analytique dans le monde intime n’en est les relations qu’il entretient avec lui. entre le public et le privé. Cette impré- qu’au début de ses explorations » (J-C Pour tenter d’expliquer les motivations cision résulte du fait que par le recul du Kaufmann, 2001b, p. 95). Selon Kauf- des candidats de ces programmes qui politique « la subjectivité est devenue mann les médias sont amenés à occuper 63 RSS33.indb 63 25/04/05 14:56:13
un rôle central dans cette plongée : « [Ils] bien, si l’on veut, privatisation du public Bibliographie ont pour mission essentielle la diffusion et publicisation du privé, mais c’est aussi du savoir et des techniques permettant le parce que l’espace public est devenu Dufour Dany-Robert (2001), « Cette nouvelle condition humaine : Les désarrois de l’indi- management de soi » (J.-C. Kaufmann, davantage un espace de la présentation vidu-sujet », Le Monde Diplomatique, Février 2001b, p. 236). de soi et de l’interrogation sur soi qu’un 2001. L’absence de normes certaines et con- espace de confrontation d’argumentaire » Ehrenberg Alain (1995), L’individu incertain, Cal- sensuelles gérant l’espace privé et intime (J. Roman, 2003, p.50). Nous avons alors mann-Lévy, Paris. peut apporter le doute en ce qui concerne affaire, avec la télé-réalité, à ce qui appa- Hahn Aloïs (1986), « Contribution à la sociologie la manière de mener sa vie. Ne plus dis- raît davantage comme une recomposition de la confession et autres formes institutionna- tinger clairement ce qui est bien de ce qui et un reformatage de l’espace intime. lisées d’aveu : Autothématisation et processus est mal peut nous amener à nous intéres- L’espace public semble se rapprocher des de civilisation », Actes de la recherche en ser à la façon dont les autres vivent et individus et se fondre en eux. En effet, le sciences sociales, n°62/63, juin 1986. Heinich Nathalie (2002), « À l’aise dans la déci- gèrent leur existence. Nous pouvons ainsi privé ne voit pas sa substance se modifier livisation », Sociétés et Représentations, n°14, comprendre l’intérêt des téléspectateurs même s’il est fréquemment exposé dans septembre 2002. pour la vie privée de l’autre tandis que les l’espace public, et de la même manière Jost François (2002), L’Empire du loft, La Dispute / candidats, en s’exposant, peuvent gagner, l’espace public le reste malgré une défi- Snédit, Paris. en retour, une forme de revalidation et nition malaisée de ses limites. Ainsi, si Kaufmann Jean-Claude (2001a), « Voyeurisme ou de réassurance d’une identité incertaine. certains perçoivent, à travers les trans- mutation anthropologique ? », Le Monde, 11 C’est ce « besoin d’expression du moi formations de l’espace public, un effon- mai 2001. intime » qui explique pour J-C Kauf- drement des frontières qui séparent le Kaufmann Jean-Claude (2001b), Ego : Pour une mann l’engouement du public pour les domaine public et le domaine privé on sociologie de l’individu, Nathan, Paris. Roman Joël (2003), « Privé et public : le brouillage programmes de télé-réalité. peut aussi soutenir que la télévision se télévisuel », Esprit, n°293, mars-avril 2003. La télévision relationnelle constitue penche sur des questionnements qui n’ont Tisseron Serge (2001), L’intimité surexposée, Edi- donc un procédé spécifique pour tenter rien de négligeable puisqu’ils portent sur tion Ramsay, Paris. de répondre aux questions qui se posent à le sens de l’être-soi, de l’être-ensemble, Vitalis André (2002), « L’exposition de la vie pri- la subjectivité de l’homme contemporain et donc sur la manière de co-exister dans vée dans les médias », Premier colloque fran- et c’est à travers elle que l’on peut cerner l’espace public. co-mexicain, Mexico, 8 avril-10 avril 2002, les tensions qui parcourent le monde La mise en spectacle de soi est par http://www.cerimes.fr/colloquefrancomexi- moderne et les manières qui s’offrent ailleurs le signe d’une incertitude sur soi, cain/actes/pdf/vie_privee.pdf aux acteurs pour les gérer. Dans un con- d’un besoin de reconnaissance par l’autre, texte d’indétermination qui reporte sur et les programmes de télé-réalité permet- l’individu des responsabilités relevant tent, autant aux candidats de l’émission auparavant de l’action publique chacun qu’aux spectateurs, de valider et de légi- est invité, sinon sommé, d’être l’expert timer un choix de vie. Ainsi, les candi- le plus avisé de sa propre vie, et cette dats qui s’exposent aux regards essaient nouvelle exigence de mise en avant de d’exister davantage, de se mouvoir dans soi impose de faire connaître à tous le une identité plus large et les spectateurs contenu de cette expertise. Les émissions qui observent l’intimité d’autrui cher- de télé-réalité se présentent comme « des chent à améliorer leur compréhension des programmes de médiation » de tous les normes de comportement qu’ils devront échanges sur l’intimité. Ils fournissent adopter à leur tour dans les multiples un lieu public pour ces transactions et situations de la vie quotidienne. D’où offrent du sens à chacun sur les pro- cette « curiosité ordinaire », pour repren- blèmes rencontrés dans les rapports à dre l’expression de J.-C. Kaufmann, de la autrui. En effet, l’émotion, le partage part des téléspectateurs puisqu’il s’agit mais aussi la concurrence permanente aujourd’hui de se construire soi-même, entre les candidats, tous ces thèmes qui et si possible de s’inventer. Nous sommes sont largement présents dans ces émis- amenés à construire seuls notre vérité et sions, sont en mesure de prendre la place à définir qui nous sommes réellement. du sens qui structure le monde pour les Et grâce aux programmes de télé-réalité téléspectateurs. l’individu n’est pas totalement délaissé Si l’espace public télévisuel se com- puisque ce qu’ils lui proposent est une pose principalement d’individus qui met- observation directe : voir les autres pour tent en scène leur intimité il est aussi comprendre et être en mesure d’agir. réservé aux interrogations existentielles ou psychologiques qui sont susceptibles d’être celles des téléspectateurs. On peut dire, avec Joël Roman, qu’« il y a donc 64 Revue des Sciences Sociales, 2005, n° 33, “Privé – public : quelles frontières ?” RSS33.indb 64 25/04/05 14:56:15
Murielle Ory L'exposition de la vie privée dans les émissions de télé-réalité Notes 1. Sondage Sofres pour Le Monde, 19 mai 2001. 2. Le Monde, 16 juin 2001 3. Les reproches adressés à ces programmes par la presse et les milieux intellectuels sont en effet multiples : brouillage des frontières entre espace public/privé, cer- tes, mais aussi entre réalité et fiction, éloge de l’exclusion publique lorsque les téléspectateurs éliminent l’un des candi- dats, facilité d’accès à la célébrité et à la notoriété publique… 4. « Le triomphe du voyeurisme » par Jacque- line Remy, Jean-Sébastien Stehli, Denis Jeambar et Gilbert Charles, L’express, 03/05/2001. 5. N.Heinich cite les quelques exceptions de l’expérience des camps de concentration et du bizutage. 6. Nous avons réalisé neuf entretiens qualita- tifs avec des téléspectateurs de différentes générations (la plus jeune avait 9 ans, la plus âgée 75 ans), hommes et femmes, en couple, famille ou célibataire : Odile/75 ans/retraitée/veuve ; Odile/44 ans/ insti- tutrice/mariée et mère de deux enfants ; Éric/40ans/inspecteur des écoles/marié et père de deux enfants ; Luc/25 ans/archi- tecte/célibataire ; Noémie/23 ans/étudiante en maîtrise de l’art/célibataire ; Bastien/20 ans/étudiant en BTS Vente/célibataire ; Caroline/18 ans/lycéenne en terminal STT/célibataire ; Julie/14 ans/collégienne en quatrième ; Amélie/9 ans/écolière au CM1. Les catégories socioprofessionnel- les sont plutôt aisées et tertiaires. Sans avoir la représentativité d’un “échan- tillon”, ce groupe de personnes se signale par des opinions qui sont relativement indépendantes de l’âge, du sexe, de la situation conjugale et familiale, et de la CSP : ce sont ces propos qui ont retenu notre attention. 7. « Nul ne sera l’objet d’immixtions arbi- traires dans sa vie privée, sa famille, son domicile ou sa correspondance, ni d’at- teintes à son honneur et à sa réputation. Toute personne a droit à la protection de la loi contre de telles immixtions ou de telles atteintes. » ; (Article 12 de la Déclaration universelle des droits de l’homme adopté par l’Assemblé générale des Nations Unies dans sa résolution 217A (III) du 10 décembre 1948.) 65 RSS33.indb 65 25/04/05 14:56:15
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