L'influence des informations concernant la qualité nutritionnelle et l'impact environnemental sur les perceptions et les comportements des ...

La page est créée Laurent Mallet
 
CONTINUER À LIRE
L'influence des informations concernant la qualité nutritionnelle et l'impact environnemental sur les perceptions et les comportements des ...
L’influence des informations concernant la qualité
   nutritionnelle et l’impact environnemental sur les
perceptions et les comportements des consommateurs

                           Mémoire

                     Gabrielle Plamondon

              Maîtrise en nutrition - avec mémoire
                   Maître ès sciences (M. Sc.)

                        Québec, Canada

                  © Gabrielle Plamondon, 2021
L'influence des informations concernant la qualité nutritionnelle et l'impact environnemental sur les perceptions et les comportements des ...
Résumé
Les habitudes alimentaires peuvent grandement influencer l’état de santé d’une population. Les choix
alimentaires réalisés quotidiennement engendrent également des répercussions sur l’environnement,
notamment sur l’ampleur des changements climatiques. En effet, le secteur de la production
alimentaire serait responsable dans une large proportion des émissions de gaz à effet de serre d’origine
humaine. Cependant, malgré des lignes directrices de santé publique prônant une alimentation saine,
équilibrée et même écoresponsable dans certains pays, dont le Canada, il semble persister certaines
limites à l’adoption de comportements alimentaires en adéquation avec de telles recommandations. Il
va sans dire que les décisions alimentaires individuelles ne sont pas toujours objectives; elles peuvent
être grandement influencées par des facteurs individuels ou externes. Pour encourager la réalisation
de choix alimentaires sains et écoresponsables par la population, la transmission d’informations fait
partie des interventions couramment utilisées pour susciter des changements de comportements. Que
ces stratégies se fassent par le biais d’étiquette conventionnelle ou graphique et simplifiée (par
exemple, des logos de type interprétatif), les informations nutritionnelles et environnementales
influencent-elles les comportements d’achat des consommateurs? L’objectif principal du présent
mémoire est d’évaluer si la provision d’informations portant sur la qualité nutritionnelle et l’impact
environnemental peut exercer une influence favorable sur les comportements alimentaires des
consommateurs, qui se reflèterait notamment par la réalisation de choix alimentaires plus sains et
écoresponsables. Les résultats de ce mémoire suggèrent que le fait de prodiguer des informations
nutritionnelles et environnementales de façon graphique et simplifiée peut contribuer à l’adoption de
comportements alimentaires plus sains et écoresponsables. Les résultats sont favorables et engendrent
de nombreuses perspectives de recherche, notamment en ce qui a trait aux stratégies d’interventions
pouvant potentiellement engendrer des changements de comportements, à la provision d’informations
et au développement d’outils intégrant plusieurs attributs à communiquer aux individus.

                                                   ii
L'influence des informations concernant la qualité nutritionnelle et l'impact environnemental sur les perceptions et les comportements des ...
Abstract
Eating habits can have a major influence on a population’s health. Food choices made in daily life
also have an environmental impact, including climate change. Indeed, food systems are responsible
for a large proportion of human-induced greenhouse gas emissions. However, despite public health
guidelines supporting a healthy, balanced and, in some countries including Canada, eco-friendly diet,
there is still a certain reluctance in the adoption of dietary behaviors in line with such
recommendations. Food decisions are not always objective; they can be highly influenced by
individual or external factors. To encourage the adoption of healthy and eco-friendly food choices by
the population, the provision of information on labels or at the point of purchase is a commonly used
intervention to promote diet-related behavioral change. Whether these informational strategies are
provided through conventional or simplified and graphical labels (e.g., interpretive logos), it is
necessary to understand if nutritional and environmental information influence consumer purchasing
behavior. The main objective of this work is to assess whether the provision of information about
nutritional quality and environmental impact can positively influence consumer food behaviors,
which would be reflected in healthier and more eco-friendly food choices and consumption. The
results of this thesis suggest that the provision of nutritional and environmental information, in a
graphical and simplified manner, can contribute to the adoption of healthier and more
environmentally-responsible food choices. The results are favorable and inform several research
questions, particularly regarding potential intervention strategies to promote behavioral change, the
provision of information and the development of tools that combine or integrate multiple attributes
to be communicated to individuals.

                                                 iii
L'influence des informations concernant la qualité nutritionnelle et l'impact environnemental sur les perceptions et les comportements des ...
Table des matières
Liste des figures .................................................................................................................... vi
Liste des tableaux ................................................................................................................. vii
Liste des abréviations, sigles, acronymes ........................................................................... viii
Avant-propos ......................................................................................................................... ix
Introduction ........................................................................................................................... 1
Chapitre 1 : Problématique ................................................................................................... 3
   1.       Problématique des maladies chroniques ............................................................................. 3
        1.1         Définition et prévalence des maladies chroniques ......................................................................... 3
        1.2         Importance d’une saine alimentation ............................................................................................. 3
   2.       Problématique des changements climatiques et lien avec l’alimentation......................... 4
        2.1         Définition des changements climatiques et leurs principales causes ............................................. 4
        2.2         Survol de l’analyse du cycle de vie des produits alimentaires ....................................................... 5
        2.3         Importance du développement durable en alimentation ................................................................ 6
   3.       Consensus : alimentation saine et écoresponsable .............................................................. 9
   4.       Les prises de décisions et les comportements des individus ............................................ 12
        4.1         Processus de prises de décision des individus.............................................................................. 12
        4.2         Processus de changement de comportement des individus .......................................................... 15
   5.       Les stratégies d’informations ............................................................................................. 16
        5.1     Les stratégies d’informations nutritionnelles ............................................................................... 16
           5.1.1 Informations, étiquettes et logos de qualité nutritionnelle....................................................... 16
           5.1.2 Influence de l’information, des étiquettes et des logos de qualité nutritionnelle sur le
           consommateur ....................................................................................................................................... 19
           5.1.3 Facteurs qui influencent l’utilisation de l’information nutritionnelle...................................... 22
        5.2     Les stratégies d’informations associées à la durabilité ................................................................ 24
           5.2.1 Informations, étiquettes et logos portant sur la durabilité des produits alimentaires .............. 24
           5.2.2 Influence de l’information concernant l’empreinte carbone sur le consommateur ................. 27
        5.3     Combinaison des informations nutritionnelles et environnementales ......................................... 31
   6.       En résumé ............................................................................................................................. 33
Chapitre 2 : Mise en contexte, objectifs et hypothèses ....................................................... 34
   1.       Mise en contexte ................................................................................................................... 34
   2.       Objectifs de l’étude .............................................................................................................. 35
   3.       Hypothèses de recherche ..................................................................................................... 35
Chapitre 3 : [L’influence des informations concernant la qualité nutritionnelle et
l’impact environnemental sur les perceptions et les comportements des consommateurs]
 .............................................................................................................................................. 36
   Résumé.......................................................................................................................................... 37
   Abstract ........................................................................................................................................ 38
   1.       Introduction ......................................................................................................................... 39
   2. Methods ................................................................................................................................. 41
   3.       Results ................................................................................................................................... 46

                                                                               iv
L'influence des informations concernant la qualité nutritionnelle et l'impact environnemental sur les perceptions et les comportements des ...
4.     Discussion ............................................................................................................................. 48
   5.     Strengths and Limitations .................................................................................................. 52
   6.     Conclusion and recommendations ..................................................................................... 53
   References .................................................................................................................................... 54
   Supplementary Materials ........................................................................................................... 63
Chapitre 4. Discussion et conclusion générale................................................................... 66
Annexe A [Est-ce que les consommateurs feraient de meilleurs choix s’ils étaient mieux
informés sur l’alimentation écoresponsable?] ................................................................... 73
Bibliographie........................................................................................................................ 81

                                                                         v
L'influence des informations concernant la qualité nutritionnelle et l'impact environnemental sur les perceptions et les comportements des ...
Liste des figures
Figure 1. L’assiette santé planétaire de la Commission EAT-Lancet et l’assiette du Guide
alimentaire canadien. ......................................................................................................................... 10
Figure 2. Double pyramide inversée de la BCFN. ............................................................................ 11
Figure 3. Différents types d’étiquetage nutritionnel sur le devant de l’emballage utilisés dans le
monde. ............................................................................................................................................... 18
Figure 4. Quelques exemples d’étiquettes carbone utilisées dans le monde. .................................... 27
Figure 5. Experimental design of the study and testing session ........................................................ 59
Figure 6. Proportion of meal choices according to each condition ................................................... 61
Figure 7. French version of the menu presented to participants in GHG score group (i.e., condition
1) ........................................................................................................................................................ 65

                                                                             vi
Liste des tableaux
Tableau 1. Bilan carbone des habitants au Canada ............................................................................. 8
Table 2. Contingency table of the four experimental conditions ...................................................... 59
Table 3. Baseline characteristics of the sample (n=160) ................................................................... 60
Table 4. Odds ratios of the influence of the information over the selection of the chicken meal (i.e.
the likelihood of being influenced by the type of information shown) and interaction between GHG
and nutrition scores effect.................................................................................................................. 61
Table 5. Analysis of the influence of information over food consumption (in grams) and interaction
between GHG and nutrition scores effect.......................................................................................... 62
Table 6. Nutrients to Encourage and Nutrients to Limit in NRn and LIM Subscores (Adam
Drewnowski, 2009; Fulgoni et al., 2009) .......................................................................................... 63
Table 7. Algorithms for the NRn and LIM Subscores of NRF 9.3 Index Score (Adam Drewnowski,
2009; Fulgoni et al., 2009) ................................................................................................................ 63
Table 8. Analysis of the influence of information over food consumption (in kilocalories) and
interaction between GHG and nutrition scores effect ....................................................................... 64

                                                                      vii
Liste des abréviations, sigles, acronymes
ACIA : Agence canadienne d’inspection des aliments
ACV : Analyse du cycle de vie
BCFN : Barilla Center for Food and Nutrition
CH4 : Méthane
CO2 : Dioxyde de carbone
ESCC : Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes
INAF : Institut sur la nutrition et les aliments fonctionnels
GES : Gaz à effet de serre
MCV : Maladies cardiovasculaires
MELCC : Ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques
N2O: Oxyde nitreux
OMS : Organisation mondiale de la Santé
ONUAA : Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture
TCP : Théorie du comportement planifié
TVN : Tableau de valeur nutritive

                                              viii
Avant-propos
La réalisation de mon projet de maîtrise a été possible grâce à un partenariat entre l’Université Laval
et le Ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques (MELCC). Ma
participation à ce grand projet faisant appel aux domaines de la santé des populations et du
développement durable en alimentation m’a permis de développer une expertise dans ces disciplines
qui me passionnent énormément ainsi que plusieurs compétences complémentaires. Ces acquis me
seront essentiels tout au long de ma future carrière de nutritionniste dans les champs, je l’espère, de
la santé publique et du développement durable. Ce mémoire représente l’aboutissement du travail que
j’ai accompli durant les cinq sessions qu’ont duré mes études à la maîtrise, malgré les nombreux
obstacles et contretemps rencontrés en cours de route. En effet, bien que la crise de la COVID-19 ait
mis sur pause le projet de recherche peu après son commencement, j’ai pu effectuer le recrutement,
les rencontres avec les participants, les analyses statistiques ainsi que la rédaction de l’article
scientifique sans trop de retard sur l’échéancier initialement prévu. L’article scientifique en question,
dont je suis la première auteure, a été soumis à Food Quality and Preference au mois de septembre
2021. Je tiens d’ailleurs à remercier tous les coauteurs pour leur précieuse collaboration et pour leur
révision du manuscrit : Marie-Ève Labonté, Sonia Pomerleau, Stéphanie Vézina, Sergey Mikhaylin,
Laurence Laberee et Véronique Provencher. Les résultats du projet de recherche ont notamment été
présentés à un symposium, à deux congrès et au séminaire de maîtrise. Ce dernier a suscité l’attention
de plusieurs parties prenantes, entre autres des professionnel(le)s et chercheur(e)s provenant d’autres
institutions québécoises et canadiennes, de même que des représentants d’instance gouvernementale.
Ceci démontre la pertinence du projet et l’intérêt des retombées potentielles des résultats. Bien qu’il
s’agisse d’une étude contrôlée, les résultats sont grandement encourageants et ont entraîné de vives
réactions lors des nombreuses présentations.

En parallèle, j’ai eu l’opportunité durant ma maîtrise de rédiger une revue narrative de la littérature
scientifique pour la revue de l’OPDQ, soit Nutrition – Science en Évolution. Cet article a été accepté
en avril 2021 et sera publié dans l’édition de l’automne 2021. La revue de littérature que j’ai réalisée,
en continuité avec la problématique de ce présent mémoire, a permis la rédaction de cet article dont
je suis l’auteure principale. Ce dernier s’intitule « Est-ce que les consommateurs feraient de meilleurs
choix s’ils étaient mieux informés sur l’alimentation écoresponsable? ». Je tiens d’ailleurs à remercier
Marie-Ève Labonté ainsi que Véronique Provencher, toutes deux coauteures.

                                                   ix
Presque tout au long de mes études au baccalauréat en nutrition, j’ai travaillé dans l’équipe de
recherche de Dre Véronique Provencher, principalement à la réalisation des études sectorielles de
l’Observatoire de la qualité de l’offre alimentaire. Comme j’ai adoré son équipe et ses divers projets,
il ne faisait aucun doute que je souhaitais réaliser ma maîtrise sous sa direction. Je n’aurais
certainement pas eu le même parcours sans Véronique. Malgré le contexte difficile et le télétravail
obligatoire dû à la COVID-19, elle a toujours su démontrer une disponibilité exemplaire ainsi qu’une
compréhension et une écoute irréprochables. Je la remercie donc pour son énorme soutien, j’ai
toujours pu compter sur son aide lorsque j’en avais besoin. Je tiens également à remercier Marie-Ève
Labonté, ma codirectrice de recherche, pour sa présence d’esprit et sa rigueur incomparables, mais
également pour son écoute et sa compréhension. Je tiens évidemment à remercier Sonia Pomerleau,
avec qui j’ai réalisé toute la préparation, le recrutement et les rencontres avec les participants. Il va
sans dire que nous avons fait face à des imprévus et plusieurs obstacles difficiles depuis le mois de
mars 2020, mais nous sommes arrivées à compléter le projet malgré tout. Merci Sonia pour ton
efficacité et ton investissement dans le projet, mais également pour ta présence soutenue jusqu’à ton
congé de maternité. Je souhaite également remercier Sarah Martel et Laurence Laberee qui ont
participé aux étapes de recrutement, de rencontres avec les participants et de saisie des données. Je
souhaite aussi remercier Émilie Martel pour la préparation des repas pour les participants ainsi que
Pierre Gagnon pour son aide et sa patience lors de ma réalisation des analyses statistiques. Par ailleurs,
je souhaite remercier le Gouvernement du Québec et l’Université Laval sans qui le projet n’aurait pu
avoir lieu. Je remercie également le Programme d’appui à la recherche et à la formation (PARF) de
l’Institut sur la nutrition et les aliments fonctionnels (INAF) ainsi que les Fonds de nutrition publique
de l’Université Laval pour les bourses d’études à la maîtrise.

Je désire remercier l’INAF ainsi que tous ses membres. Malgré la réalisation de mes études à la
maîtrise en majeure partie à distance en raison du contexte COVID, il était toujours possible de
ressentir un sentiment d’appartenance envers cette belle famille qu’est l’INAF. Je garderai un très
bon souvenir de mon passage aux études graduées.

Sur un plan plus personnel, je tiens à remercier particulièrement mon conjoint qui m’a soutenu tout
au long de mes études graduées et sans qui le confinement aurait été beaucoup plus difficile. Je
remercie également mes grands-parents, mes parents, mes frères ainsi que mes nièces qui m’ont
appuyé malgré la distance.

                                                    x
Introduction
La prévalence des maladies chroniques, telles que les maladies cardiovasculaires ou le diabète de type
2, est de plus en plus préoccupante d’un point de vue de santé publique au Canada (1). L’importance
d’une saine alimentation dans la prévention et la prise en charge des maladies chroniques est
clairement démontrée dans la littérature scientifique. En effet, une alimentation sous-optimale
représente l’un des principaux facteurs de risque de développer de telles maladies (2). Malgré des
lignes directrices de santé publique prônant une alimentation équilibrée, il semblerait pourtant que la
majorité de la population québécoise suive un régime alimentaire de qualité plutôt médiocre, relatant
une faible adhésion aux recommandations (3). Par ailleurs, outre leurs effets sur la santé, nos choix
alimentaires entrainent également des répercussions considérables sur l’environnement, notamment
en contribuant de façon significative aux changements climatiques. Le secteur de la production
alimentaire serait à lui seul responsable de plus du tiers des émissions de gaz à effet de serre (GES)
d’origine humaine au niveau mondial (4), principal élément en cause lorsqu’il est question des
changements climatiques (5). Par ailleurs, il semble que les changements climatiques et les maladies
chroniques devraient être considérés ensemble pour assurer la cohérence de ce qui est promu par les
politiques publiques auprès des consommateurs (6). Les données probantes suggèrent d’ailleurs
qu’une alimentation saine et une alimentation écoresponsable peuvent très bien s’harmoniser (7-9).
C’est principalement pour cette raison que de plus en plus de pays incluent l’aspect environnemental
dans leurs lignes directrices nutritionnelles (8) et le Canada n’y fait pas exception depuis la sortie de
son nouveau Guide alimentaire en 2019 (10). Malgré tout, il semble que la santé et l’environnement
ne fassent pas réellement partie des considérations prioritaires des individus lorsqu’ils prennent des
décisions alimentaires (11, 12). Bien que prises plusieurs fois par jour, ces décisions ne sont pas
nécessairement objectives ou logiques. En effet, tant des facteurs individuels qu’environnementaux
concourent à influencer la prise de décisions, notamment les biais cognitifs, la structure des
connaissances, les inégalités sociales de santé, le niveau de littératie ainsi que la présence de
nombreuses autres composantes que plusieurs consommateurs semblent prioriser par rapport aux
dimensions nutritionnelles et environnementales (par exemple le prix des aliments, le goût ou la
commodité). Afin d’aider la population à réaliser des choix plus éclairés, tant pour leur propre santé
que pour celle de la planète, le recours à différentes stratégies informationnelles pourrait aider à
renseigner les consommateurs sur le profil nutritionnel des aliments ou des repas offerts sur le marché.
L’aspect environnemental des produits alimentaires représente également une composante de plus en
plus communiquée aux individus pour les aider à réaliser leurs choix. Cependant, les informations

                                                   1
nutritionnelles et environnementales influencent-elles les perceptions et les comportements d’achat
des consommateurs?

La présente étude s’intéresse aux perceptions ainsi qu’aux comportements alimentaires des
consommateurs en réponse à l’exposition aux informations portant sur la qualité nutritionnelle et
l’impact environnemental de leurs divers choix de repas. Elle constitue l’une des phases d’un projet
de plus grande envergure qui s’est déroulé à l’Université Laval en partenariat avec le MELCC et qui
vise notamment un changement favorable dans l’offre et l’environnement alimentaires d’une cafétéria
institutionnelle québécoise.

Ce mémoire est divisé comme suit. Le Chapitre 1 expose les résultats d’une revue de la littérature
portant sur les différents thèmes abordés ci-haut, c’est-à-dire la problématique des maladies
chroniques et celle des changements climatiques, la compatibilité entre une alimentation saine et une
alimentation écoresponsable, la prise de décision et les changements de comportements des individus
ainsi que les stratégies d’informations nutritionnelles et environnementales et leur possible influence
sur les consommateurs. La mise en contexte, incluant une explication plus approfondie du grand
projet de recherche mené avec l’Université Laval et le MELCC, ainsi que les objectifs et hypothèses
du présent projet de recherche seront présentés au Chapitre 2. L’article scientifique relié au projet de
recherche, rédigé en anglais et incluant notamment les résultats de la recherche sera présenté au
Chapitre 3. En bref, l’article porte sur l’étude des perceptions et des comportements des
consommateurs en réponse à l’exposition aux informations portant sur la qualité nutritionnelle,
l’impact environnemental et l’éco-efficience (c’est-à-dire la combinaison des informations
nutritionnelles et environnementales) des repas. Cette étude s’est déroulée à l’INAF de l’Université
Laval entre mars et décembre 2020. Une discussion et une conclusion générale seront présentées au
Chapitre 4 du présent mémoire, dans lesquelles sont incluses une analyse plus approfondie des
résultats de la recherche, leurs retombées potentielles ainsi que les perspectives de recherche qui y
sont associées. Finalement, l’article portant sur la revue narrative de la littérature scientifique
concernant l’alimentation écoresponsable et rédigé pour Nutrition – Science en Évolution, soit la
revue de l’OPDQ, sera présenté en Annexe A du présent document.

                                                   2
Chapitre 1 : Problématique

1. Problématique des maladies chroniques

    1.1 Définition et prévalence des maladies chroniques

Selon l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), les maladies chroniques représentent des
affectations de longue durée qui évoluent habituellement lentement (13). Ces maladies dites non
transmissibles incluent notamment les maladies cardiovasculaires (MCV), le diabète, l’hypertension,
certains cancers, les affectations respiratoires chroniques, etc. (14). Selon l’Enquête sur la santé dans
les collectivités canadiennes (ESCC) de 2016, 44 % des Canadiens de plus de 20 ans auraient au
moins une des 10 affectations chroniques les plus courantes, telles que l’hypertension, le diabète,
certains troubles cardiovasculaires, etc. (1). Plus précisément, selon Santé Canada, 25 % de la
population adulte canadienne souffrirait d’hypertension, 11 % de diabète, 8 % de cardiopathie
ischémique pour ne nommer que ceux-là (1). Selon l’OMS, les maladies non transmissibles
représenteraient la première cause de mortalité et d’incapacité au niveau mondial (15). De plus, il
était estimé en 2016 que 88 % de tous les décès au Canada avaient pour origine des maladies non
transmissibles, parmi lesquelles 25 % provenaient de MCV et 31% de cancers (16). En effet, les
problèmes cardiaques représentaient la seconde cause de mortalité, se situant tout juste après le
cancer, et constituent l’une des causes principales d’hospitalisation au pays (17). Par ailleurs, l’obésité
fait partie des facteurs de risque de plusieurs maladies chroniques, tels que le diabète de type 2,
certaines MCV et certains cancers (18), tandis que plus d’une personne sur quatre au Canada souffrait
d’obésité en 2018 (19).

    1.2 Importance d’une saine alimentation

Plusieurs habitudes de vie représentent des facteurs de risque modifiables de développer des maladies
chroniques. En effet, jusqu’à 80 % des principales maladies chroniques pourraient être évitées par
une amélioration des habitudes de vie, ce qui inclut entre autres une amélioration de l’alimentation
(20). Une alimentation sous-optimale (par exemple une consommation trop élevée en sodium, une
alimentation insuffisante en fruits, en grains entiers, etc.) représente un important facteur de risque
de développer des maladies non transmissibles et serait même la cause d’un décès sur cinq au niveau
mondial (2).

                                                    3
Selon Santé Canada, une alimentation saine se traduit entre autres par le fait de consommer une
variété d’aliments sains tous les jours, plus précisément de « mange[r] des légumes et des fruits en
abondance, des aliments à grains entiers et des aliments protéinés [et de choisir] plus souvent les
aliments protéinés d’origine végétale » (21). Cependant, malgré ces lignes directrices de santé
publique qui prônent une alimentation équilibrée, il semblerait que les Canadiens québécois aient une
adhésion limitée aux recommandations, la majorité suivant un régime alimentaire de qualité plutôt
médiocre selon l’étude PREDISE réalisée en 2018. Notamment, près de 80 % des québécois auraient
une consommation insuffisante de fruits et légumes (3). Considérant tous ces éléments, il semble
important d’agir au niveau populationnel pour prodiguer les bons outils aux individus afin de favoriser
l’adoption de comportements alimentaires en adéquation avec une saine alimentation.

2. Problématique des changements climatiques et lien avec l’alimentation

    2.1 Définition des changements climatiques et leurs principales causes

Les changements climatiques font partie d’un ensemble de changements environnementaux plus
généraux à l’échelle mondiale, ces derniers incluant notamment la perte de biodiversité et la
dégradation des sols. Ces changements se caractérisent par une modification à long terme des
conditions météorologiques, et se reflèteraient principalement par une augmentation du nombre de
catastrophes naturelles, telles que des canicules et des conditions climatiques extrêmes. Ils
représentent donc une menace importante à la santé publique, notamment en raison du fait que la
production alimentaire sera déstabilisée à long terme. Les changements climatiques sont d’ailleurs
reconnus comme l’un des problèmes environnementaux les plus urgents à régler aujourd’hui (5, 22-
24). Bien que des facteurs naturels puissent contribuer aux changements climatiques, leur principale
cause est l’activité humaine, qui entraîne une augmentation importante des GES dans l’atmosphère.
En effet, la population brûle des combustibles fossiles pour le transport, l’industrie, l’utilisation
domestique et l’agriculture, ce qui rejette entre autres du CO2 dans l’atmosphère, un GES qui y
demeure longtemps. En prime, le fait de convertir en terres agricoles des puits de carbone, c’est-à-
dire des réservoirs qui absorbent et séquestrent le CO2, par exemple des forêts, contribue à
l’augmentation du CO2 atmosphérique (5, 24). Par ailleurs, le méthane (CH4) provenant surtout de
l’élevage du bétail et l’oxyde nitreux (N2O) provenant principalement de l’épandage d’engrais azotés
pour la culture font également partie des GES notables (24, 25). La contribution de chaque GES au
réchauffement de la planète varie en fonction du type de gaz. C’est notamment pour cette raison qu’il

                                                  4
a été établi de produire une mesure normalisée, exprimant la contribution relative en termes d’un
même score d’impact exprimé en une unité commune pour tous les contributeurs. Pour les GES
contribuant aux changements climatiques par exemple, cet impact peut être calculé en termes de
kilogrammes d’équivalent CO2 (kg éq CO2), mieux connu sous le terme d’« empreinte carbone » (25,
26). Grâce à cela, il est possible de calculer une empreinte carbone par unité d’intérêt, par exemple
pour un produit ou encore un service particulier (25).

Bien que le Canada compte environ 0,5 % de la population mondiale, il produit près de 2 % du total
des émissions de GES, ce qui classe les Canadiens parmi les plus gros producteurs de GES par
habitant à l’échelle mondiale (27). Entre 1990 et 2019, les émissions de GES ont augmenté de plus
de 21 % au pays (28). Aux termes de l’Accord de Paris en 2015, le Canada s’était pourtant engagé à
atteindre la carboneutralité d’ici 2050, avec pour cible intermédiaire une réduction de 30 % sous les
niveaux de 2005 d’ici 2030 (29). Les émissions de GES au Canada ne sont pas répertoriées
précisément pour l’ensemble de la chaîne alimentaire, mais plutôt par secteur économique global
(28), l’agriculture à elle seule produisant environ 10 % (24). Mondialement, une récente évaluation
de 1990-2015 rapporte que le secteur alimentaire serait responsable de plus du tiers des émissions de
GES d’origine humaine (4). Parmi ceux-ci, 71 % proviendraient de l’agriculture et de l’utilisation des
terres, bien qu’il y ait des différences notables entre pays (4). Cependant, les pays les plus émetteurs,
tels que le Canada, feraient état d’une plus faible contribution des systèmes alimentaires à leurs
émissions globales de GES (4). Par ailleurs, d’autres composantes de durabilité existent pour évaluer
l’impact de la production alimentaire, telles que l’utilisation des terres ou de l’eau (empreinte
écologique et hydrique). Il est toutefois bien établi que l’empreinte carbone fournit une représentation
équitable du réel impact environnemental (30). C’est d’ailleurs de loin la composante
environnementale la plus utilisée dans la littérature (31), et les cibles gouvernementales des pays sont
majoritairement établies dans l’optique d’une réduction des émissions de GES (32).

    2.2 Survol de l’analyse du cycle de vie des produits alimentaires

Avant d’arriver dans l’assiette du consommateur, chaque aliment passe dans la chaîne
d’approvisionnement alimentaire. Une empreinte carbone est ainsi générée pour la production de
chaque aliment en fonction de son cycle de vie. Le système alimentaire englobe tous les aspects de la
production, de l’entreposage, du transport et distribution, de la transformation et de l’emballage, de

                                                   5
la commercialisation, de la consommation et de l’élimination des aliments (33). L’impact
environnemental généré par chaque aliment peut s’évaluer grâce à une analyse de son cycle de vie
(ACV) lié aux aspects du système alimentaire indiqués précédemment (34). Plusieurs logiciels
utilisant diverses bases de données existent pour calculer cette empreinte carbone, en fonction du
pays où l’on se trouve et d’où proviennent les aliments consommés, notamment le logiciel Open LCA
ainsi que la base Ecoinvent (35, 36). Bien que les données liées au cycle de vie des aliments puissent
énormément varier d’un pays à l’autre, Ecoinvent fournit des données internationales, et elle
représente d’ailleurs la plus grande base de données d’inventaire de cycle de vie transparente au
monde (36).

    2.3 Importance du développement durable en alimentation

Plus de 20 ans après l’émergence du concept d’alimentation durable (37), l’Organisation des Nations
Unies pour l’alimentation et l’agriculture (ONUAA) a apporté cette définition : « les régimes
alimentaires durables représentent les régimes à faible impact environnemental qui contribuent à
l'alimentation, la sécurité alimentaire et à une vie saine pour les générations présentes et futures. Les
régimes alimentaires durables sont respectueux de la biodiversité et des écosystèmes, culturellement
acceptables, accessibles, économiquement équitables et abordables; adéquats sur le plan nutritionnel,
favorisant une bonne santé; tout en optimisant les ressources naturelles et humaines. » [traduction
libre] (38). Spécifiquement en ce qui a trait à l’aspect environnemental de cette définition de la
durabilité, les choix alimentaires réalisés à l’échelle individuelle peuvent exercer une influence
importante sur les enjeux collectifs que représentent les changements climatiques, considérant
l’impact important du secteur de la production alimentaire en termes d’émissions de GES (4).

Pour cette raison, beaucoup d’études ont été réalisées pour déterminer à quoi correspond une
alimentation durable d’un point de vue environnemental, ou écoresponsable, plus précisément une
alimentation dont les aliments consommés produiraient moins d’émissions de GES. Une revue
systématique de 2016 a démontré qu’une réduction de 70 % des émissions de GES pourrait être
atteinte en permutant l’alimentation typique occidentale par des choix alimentaires plus durables (39).
Dans la majorité des scénarios évalués par cette revue, la production d’émissions de GES pour les
produits alimentaires était plus importante pour la viande rouge, les autres types de viandes, les
produits laitiers puis les aliments d’origine végétale respectivement, lorsque ces aliments sont

                                                   6
considérés en termes de poids (39). Toujours selon les auteurs de cette revue, les efforts pour réduire
l’impact environnemental de l’alimentation doivent être axés sur la réduction des aliments d’origine
animale dans les sociétés qui en consomment le plus, mais plusieurs études ont démontré qu’une
réduction substantielle des émissions était possible sans nécessairement les exclure totalement (39).
Deux autres revues systématiques et une méta-analyse ont également établi que le bœuf et l’agneau
sont les aliments qui produiraient le plus d’émissions, en raison de la fermentation gastrique produite
lors de leur digestion (32, 40). Les légumes racines, les autres légumes, les fruits, les céréales et les
légumineuses font partie des aliments qui en produiraient le moins selon Clune et coll. et
Wickramasinghe et coll. Les produits laitiers se situent de part et d’autre de la courbe, les produits
concentrés tels que le beurre, le fromage et la crème auraient un impact plus important que le lait. Les
autres aliments tels que les œufs, la volaille, les poissons, les fruits de mer et le riz auraient un impact
intermédiaire (40). Il peut toutefois y avoir certaines variations en fonction des méthodes de
production, des régions considérées, des méthodes de transport ou encore des rendements annuels
(40).

Par ailleurs, un groupe de chercheur du Johns Hopkins Center for a Livable Future aux États-Unis a
scruté les habitudes alimentaires et d’approvisionnement de 140 pays pour calculer notamment leurs
émissions de GES (41). Pour le Canada, leurs résultats démontrent qu’une alimentation 100 % végane
à l’échelle nationale, c’est-à-dire excluant tous les aliments d’origine animale, produiraient près de
cinq fois moins d’émissions de GES qu’actuellement, pour une alimentation incluant 2300 calories
et 69 g de protéines par jour. Entre ces deux extrêmes se trouvent notamment une alimentation avec
peu ou sans viande rouge, le pesco-végétarisme (végétarisme incluant les poissons et fruits de mer)
et l’alimentation low food chain (végétarisme dont les seuls aliments d’origine animale permis sont
les petits poissons se trouvant au bas de la chaîne alimentaire, les mollusques bivalves et les insectes)
produisant des émissions de GES en ordre décroissant respectivement (41, 42) (voir Tableau 1).

                                                     7
Tableau 1. Bilan carbone des habitants au Canada
                                       Émissions de
       Type d’alimentation
                                       GES (kg/hab)
            Actuelle                      1385
       1 jour sans viande                 1312
      Peu de viande rouge                 1259
     Pas de produits laitiers             1119
     Lacto-ovo-végétarisme                 874
      Pas de viande rouge                  755
       Pesco-végétarisme                   712
           2/3 végane                      648
        Low food chain                     317
             Végane                        280
Reproduction du tableau de 100 degrés disponible au : https://centdegres.ca/ressources/alimentation-et-protection-de-la-
planete-par-ou-commencer-pour-reduire-le-bilan-carbone-de-nos-assiettes

Dans un autre ordre d’idée, les pertes et le gaspillage alimentaires dans l’ensemble du système
alimentaire représenteraient entre le cinquième et le tiers de ce qui est produit (43-45) dépendamment
s’ils sont considérés en termes de masse ou d’énergie. Les étapes de la production animale et de la
consommation représentent des étapes critiques à cet effet (45). Pour faire face aux défis
environnementaux actuels et pour réduire les émissions de GES à long terme, les pratiques de
production ainsi que le comportement des consommateurs jouent donc un rôle crucial dans l'efficience
des systèmes alimentaires (45). Ceci inclut une réduction de la consommation de produit d’origine
animale, une diminution du gaspillage alimentaire ainsi qu’un évitement de la surconsommation
alimentaire en général (45). Tous ces facteurs sont essentiels à considérer et permettront d'orienter les
changements pour une optimisation de l’utilisation des ressources axée vers une alimentation
écoresponsable.

En définitive, les données probantes portant sur l’alimentation écoresponsable semblent toutes
converger : la réduction ou même l’élimination de la viande et des produits laitiers aurait le plus grand
impact pour réduire les émissions de GES; les aliments d’origine animale exercent de façon générale
un impact plus important sur l’environnement; mais l’acceptabilité des consommateurs et des
producteurs est importante à considérer pour assurer la pérennité de ces changements (6). Il semble
d’ailleurs que les consommateurs aient un niveau de préoccupation modérément élevé en ce qui a
trait à l’aspect durable de leur alimentation (46). Cependant, il semble que cette préoccupation tend à
s’accroître depuis plusieurs années chez les consommateurs de pays industrialisés (47).

                                                           8
3. Consensus : alimentation saine et écoresponsable

Selon la littérature scientifique et grise, il semble exister une certaine concordance entre une
alimentation saine et une alimentation écoresponsable. Certains auteurs suggèrent même que les
changements climatiques et la saine alimentation devraient désormais être considérés ensemble lors
du développement des recommandations nutritionnelles pour assurer la cohérence de ce qui est promu
par les politiques publiques auprès des consommateurs (6). D’ailleurs, de plus en plus de pays tiennent
compte de l’impact environnemental des aliments dans leurs lignes directrices nutritionnelles. Le
Brésil a été un pionnier, mais également l’Allemagne, la Suède ainsi que le Qatar (8). Ici au pays, la
sortie du Guide alimentaire canadien en 2019 est également venue renforcer ces deux enjeux
prioritaires, soit la saine alimentation et le développement durable (10). En effet, bien que les
recommandations demeurent axées sur la santé, Santé Canada a pris quelques mesures en adéquation
avec le développement durable, en soulignant que les choix alimentaires peuvent avoir un impact sur
l’environnement. Les nouvelles lignes directrices des recommandations permettent donc à la fois
d’améliorer les apports alimentaires de la population générale tout en diminuant l’impact
environnemental de ses choix, notamment en augmentant la consommation d’aliments d’origine
végétale et en diminuant la consommation de ceux d’origine animale (48).

Dans une même optique, la Commission EAT-Lancet, une fondation internationale à but non lucratif
ayant créé une plate-forme de données scientifiques mondiales pour la transformation des systèmes
alimentaires, a sorti son rapport en 2019 (49). Ce rapport définit des objectifs scientifiques mondiaux
en matière de régimes alimentaires sains et de production alimentaire durable. Concrètement, la
Commission recommande entre autres « [des] changements substantiels vers des régimes alimentaires
essentiellement à base de plantes », c’est-à-dire « plus d’un doublement de la consommation
d’aliments sains tels que fruits, légumes, légumineuses et noix, jointe à une réduction de plus de 50
% de la consommation d’aliments moins sains, tels que les sucres ajoutés et la viande rouge
(principalement dans les pays les plus développés où celles-ci sont fort élevées) » (7). Leur rapport
énumère notamment des cibles scientifiques concrètes en termes de catégories et de quantités
d’aliments pour une santé planétaire. Leur assiette santé planétaire ressemble d’ailleurs à l’assiette du
Guide alimentaire canadien, toutes deux présentées à la Figure 1 (7, 10). L’adoption de régimes
alimentaires sains provenant de systèmes alimentaires durables permettrait de protéger notre planète
tout en améliorant la santé des individus (7).

                                                   9
Figure 1. L’assiette santé planétaire de la Commission EAT-Lancet et l’assiette du Guide alimentaire canadien.
   (La Commission EAT-Lancet, 2019; Santé Canada, 2019, Reproduction de la version disponible au https://guide-
   alimentaire.canada.ca/fr/conseils-pour-alimentation-saine/utilisez-assiette-du-guide-alimentaire-canadien-pour-
                                                     preparer/ .)

Selon l’OMS, une alimentation saine à faible impact environnemental inclut « une variété d’aliments
– en mettant l’accent sur les aliments d’origine végétale (fruits, légumes, grains entiers et
légumineuses) et sur les aliments produits localement, préparés à la maison – et qui fournit juste la
quantité nécessaire de calories. Elle inclut des poissons et fruits de mer de source durable, des
quantités modérées de lait et de produits laitiers (ou leurs alternatives) et des quantités modestes de
matières grasses et huiles, principalement de source végétale.                  Elle est limitée en viande (si
consommée), principalement la viande rouge ou transformée, et limitée en produits transformés riches
en gras, sucre ou sel. Elle n’inclut pas de boissons sucrées. » [traduction libre] (9).

Selon l’ONUAA, la diète méditerranéenne, qui contient majoritairement des aliments d’origine
végétale et de petites quantités d’aliments d’origine animale, serait la diète qui se rapprocherait le
plus des recommandations de santé publique de l’OMS (8). D’ailleurs, le Barilla Center for Food
and Nutrition (BCFN), une organisation de recherche non gouvernementale et à but non lucratif a
créé une double pyramide alimentaire inversée à l’effigie de la diète méditerranéenne, en démontrant
que les aliments les plus nutritifs pouvaient également représentés ceux ayant l’impact
environnemental le plus faible (par kg) (8). Celle-ci est présentée à la Figure 2. Elle fait l’objet de

                                                         10
mises à jour fréquentes et il en existe aujourd’hui plusieurs versions adaptées à la diète de plusieurs
cultures.

                                 Figure 2. Double pyramide inversée de la BCFN.
                             (Figure tirée du site Web de la Barilla Foundation, 2021,
                     https://www.barillacfn.com/en/dissemination/double_pyramid_2010/. )

En revanche, il existerait deux groupes d’aliments pour lesquels un conflit subsiste entre nutrition et
environnement : les produits laitiers faibles en gras ainsi que les poissons et fruits de mer, qui
fournissent tous deux des nutriments essentiels, mais qui exercent une pression importante sur
l’environnement (50). Mis à part ces deux groupes d’aliments de base, les données probantes semblent
suggérer une concordance considérable entre une diète saine et écoresponsable, qui se reflète
d’ailleurs aujourd’hui dans les recommandations en matière de saine alimentation au Canada, mais
également dans celles de plus en plus de pays. Cependant, l’enjeu demeure complexe lorsqu’il est
question de repas ou même d’aliments transformés qui impliquent plusieurs ingrédients.

Par ailleurs, malgré le fait que les consommateurs québécois semblent depuis quelques années de plus
en plus sensibilisés à l’importance de s’adonner à des comportements et réaliser des choix plus
responsables au quotidien (51), il semble que la santé et l’environnement ne se reflètent pas toujours
dans les considérations prioritaires pour la plupart des individus lorsqu’ils prennent des décisions
alimentaires (11, 12). Bien que prises plusieurs fois par jour, ces décisions ne sont pas nécessairement

                                                     11
Vous pouvez aussi lire