LA GESTION DES CARRIERES, FACTEUR DE MOTIVATION DES EMPLOYES DANS LES ENTREPRISES PRIVEES EN COTE D'IVOIRE - EDUCI
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denise coffi DENISE COFFI Doctorante à l’Ecole Doctorale Sciences Sociales de Développement Université Internationale des Sciences Sociales Hampaté Bâ (UISS-HB), dcoffi@hotmail.com LA GESTION DES CARRIERES, FACTEUR DE MOTIVATION DES EMPLOYES DANS LES ENTREPRISES PRIVEES EN COTE D’IVOIRE Revue Africaine d’Anthropologie, Nyansa-Pô, n° 21 - 2016 RESUME Cette étude se propose de décrire les composantes de la politique de gestion des carrières de quatre entreprises ivoiriennes afin d’établir leurs incidences sur l’implication, la mobilisation, la motivation des travailleurs et la production des entreprises. Pour y parvenir, un échantillon de 80 individus volontaires à été prélevé au sein de ces entreprises. A ceux-ci a été administré un questionnaire, auquel a été associée l’étude de documents. Les résultats obtenus ont relevé la présence d’une politique de gestion des carrières caractérisée par l’absence : de politique de participation à la vie de l’entreprise ; de politique claire de développement des compétences ; de politique de l’emploi ; de conditions de travail et de politique de rémunération adéquates ; de politique de reconnaissance des mérites. Mots-clés : Politique, Carrière, Gestion, Entreprise, Motivation ABSTRACT This study aims to describe the components of career management policy in four ivorian companies to determine their impact on the engagement, mobilization, worker motivation and production enterprises. To achieve this, a sample of 80 volunteers was collected within these companies. To these was administered a questionnaire, which was associated study documents. 108 Revue Africaine d’Anthropologie, Nyansa-Pô, N°21- 2016
la gestion des carrieres, facteur de motivation des employes ... The results revealed the presence of a career management policy in companies characterized by absence of: policy of participation in company life; clear policy development skills; policy of employment; working conditions and adequate remuneration policy; merit recognition policy. Keywords: political-career-management-company-motivation INTRODUCTION De nos jours, l’Entreprise est confrontée à des défis fondamentaux : incertitude et fluctuation économique, mutations technologiques, intensification et internationalisation de la concurrence, évolution démographique, nouveaux courants socioculturels… Pour y répondre, elle doit s’appuyer sur de nouvelles logiques et de nouvelles pratiques de Gestion des Ressources Humaines (GRH). Depuis ces dix dernières années, le secteur privé ivoirien fait face à de multiples problèmes : un nombre de plus en plus croissant de départs (licenciements ou démissions), l’indiscipline, les revendications syndicales des travailleurs, la démotivation des salariés, etc. Ces faits ont des conséquences négatives sur la production et la productivité. Par ailleurs, le rapport des salariés au travail a considérablement évolué. Aujourd’hui, ces derniers n’entrent plus dans l’entreprise pour une durée indéterminée. Dès que l’opportunité se présente à eux, ils n’hésitent pas à partir vers d’autres horizons professionnels. Comprendre les nouvelles attentes des salariés dans leur travail et adapter les politiques et pratiques en conséquence est devenu un défi majeur de la fonction des Ressources Humaines en charge des carrières. Pour continuer à exister, les entreprises doivent changer de mode de fonctionnement en passant d’une logique de gestion statique à une logique d’adaptation permanente. Trouver un nouveau sens au travail, proposer un nouveau contrat social plus équilibré, passer d’une gestion de masse à une gestion individualisée des personnes, s’adapter aux métiers plus qu’aux catégories statutaire, donner au manager les moyens de gérer cette évolution de fond sont autant de défis à relever pour les professionnels des Ressources Humaines (Cohen, 2006, p.xviii). Pour faire face à toutes ces exigences, les entreprises privées de Côte d’Ivoire, doivent s’inscrire dans une logique de développement des besoins organisationnels (effectifs et compétences recherchées), Revue Africaine d’Anthropologie, Nyansa-Pô, N°21 - 2016 109
denise coffi des aspirations individuelles et de fidélisation des employés dont elles disposent, par un système de management reposant sur une bonne politique de gestion des carrières. Des études ont été menées ces dernières années pour montrer le lien entre la gestion des carrières, la motivation des employés et la performance des entreprises. Ces études convergent toutes vers les mêmes observations et montrent que la fonction RH doit accélérer le mouvement et passer d’une conception centrée sur la gestion à une conception centrée sur la création de valeurs. Dans cette option, la fonction RH est élevée au rang de fonction clé de l’entreprise à fort impact stratégique (Cohen, 2006, p.3). En effet, chaque être humain porte en lui un besoin d’être « considéré », écouté, pris au sérieux, et cela d’autant plus que son statut professionnel est modeste (Jues, 2006, p.33). Aussi, les politiques de personnel qui doivent être retenues sont celles les plus susceptibles de développer la compétence, la motivation, et la créativité du personnel afin de lui donner le désir d’être associé à la marche de l’entreprise. Ces évolutions posent la problématique de la gestion des carrières dans les entreprises privées de Côte d’Ivoire et leurs incidences sur la motivation des employés et la vie de l’entreprise. Aussi, notre étude a-t-elle pour but d’analyser les composantes de la politique de gestion des carrières de quatre entreprises privées ivoiriennes afin d’y déceler les faiblesses, et de mettre en relief leurs impacts sur l’implication, la mobilisation, la motivation des travailleurs. 1. FONDEMENTS THÉORIQUES 1.1 Définitions de la motivation L’étymologie du mot Motivation vient du latin motivus qui veut dire mobile et du latin movere qui signifie se mouvoir, être en mouvement, se déplacer. Ainsi, l’étymologie même du mot renvoie à l’idée de mouvement. Il existe de nombreuses définitions de la motivation. Certaines mettent l’accent sur ses causes quand d’autres mettent l’accent sur l’intensité que l’individu déploie pour atteindre ses objectifs. La motivation au travail est ainsi décrite par certains chercheurs comme une énergie qui détermine un type de comportement particulier 110 Revue Africaine d’Anthropologie, Nyansa-Pô, N°21- 2016
la gestion des carrieres, facteur de motivation des employes ... (Porter et Lawler, 1968). Pour d’autres chercheurs, la motivation est liée à la satisfaction de besoins. Cette approche a été rendue célèbre par des auteurs comme Maslow, Herzberg, Alderfer. Roussel (2000) définit la motivation au travail comme un processus qui active, oriente, dynamise et maintient le comportement des individus vers la réalisation d’objectifs attendus. Il explique que la preuve la plus palpable de la motivation est l’ensemble des efforts déployés dans le travail, dirigés avec intensité et de manière persistante vers des objectifs attendus par l’organisation. 1.2 GRH et Motivation : théories et résultats empiriques Comme le rappelle Maugeri (2008), en gestion, le terme motivation serait apparu pour la première fois aux Etats-Unis, au cours des années 1930, dans le domaine du marketing. A l’origine, il était utilisé pour rendre compte du comportement d’achat des consommateurs. Aujourd’hui, la recherche constante de productivité au sein des organisations ont conduit de nombreux chercheurs à s’intéresser au lien entre politiques et pratiques de Gestion des Ressources Humaines et Motivation. Pour MacDuffie (1995), une des plus probables voies menant à l’amélioration du rendement est d’avoir un personnel motivé. Ndao (2012), dans son article sur la contribution de la GRH à la réalisation de la motivation au travail, a exposé des théories qui interviennent directement dans la relation Pratiques de GRH- Motivation. Il s’agit notamment de l’approche universaliste des Ressources Humaines, la philosophie humaniste (le personnalisme), la théorie de l’autodétermination (Deci et Ryan, 1985, 2000), les théories de la justice organisationnelle (Greenberg, 1990) et de l’équité (Adams, 1965), la théorie de la fixation des objectifs (Locke et al, 1981). D’autres chercheurs ont également mis en évidence l’impact que pouvait avoir les politiques et pratiques RH sur la motivation du personnel. Ainsi Brown et al (2009) ont montré que les processus de recrutement et de formation exercent directement un effet sur la motivation du personnel. De même, Guest (1997) a mis en évidence les effets de certaines pratiques de GRH, notamment la promotion interne ou la planification des carrières, sur la motivation des Revue Africaine d’Anthropologie, Nyansa-Pô, N°21 - 2016 111
denise coffi employés. La gestion des carrières apparaît comme un facteur déterminant dans la motivation des employés. 1.3 Gestion de carrière Le lexique des Sciences Sociales, définit la carrière comme l’évolution des statuts et des rôles, honneurs, responsabilités, liés à la vie professionnelle (Grawitz, 2004). La gestion des carrières est un élément fondamental de la politique d’emploi des organisations. On distingue généralement la planification des carrières et la gestion des carrières. Dans la planification, le salarié tente de gérer sa carrière individuellement ; dans la gestion des carrières, l’entreprise envisage les réponses possibles à des besoins futurs. Les deux processus sont cependant liés : un salarié qui considère que l’organisation ne lui permet pas de suivre son plan de carrière la quittera certainement. Pour Martory et Crozet (2013), la gestion des carrières, ou de développement du potentiel humain de l’entreprise, vise à atteindre le meilleur équilibre possible entre les besoins en hommes des structures, les attentes à l’égard du travail et, les potentiels et aspirations des personnels. Pour Peretti (2005), gérer les carrières, c’est prendre en compte à la fois les besoins de l’entreprise et les potentiels et souhaits de chaque salarié. Malgré son caractère individuel, la gestion des carrières doit donc non seulement répondre aux besoins des organisations mais également à ceux des individus (besoins d’évoluer, besoins d’autonomie, employabilité, etc.). 2. APPROCHE MÉTHODOLOGIQUE 2.1 Technique de recueil des données Pour la réalisation de notre étude, nous avons opté pour deux techniques de recueil de données: la recherche documentaire, et le questionnaire. La recherche documentaire a consisté en la consultation de plusieurs ouvrages, mémoires, revues spécialisées et différents sites internet se rapportant au système de management (politiques de personnel et programmes de management) et à la motivation au travail. Le questionnaire a eu pour but d’avoir des informations sur les politiques de carrière mise en place par chaque entreprise. Il est composé de cinq catégories : la reconnaissance des 112 Revue Africaine d’Anthropologie, Nyansa-Pô, N°21- 2016
la gestion des carrieres, facteur de motivation des employes ... mérites, la participation à la vie de l’entreprise, le développement des compétences, la politique d’emploi, les conditions de travail. 2.2 Population d’étude et échantillonnage Les populations enquêtées font partis de l’effectif de quatre entreprises privées situées à Abidjan et Bouaké, Yamoussoukro et Korhogo, appartenant à des secteurs d’activités différents (Industrie du tabac, Industrie du savon, industrie du coton, ramassage d’ordures).Ces entreprises emploient plus de 500 employés chacune. Les critères de sélection des entreprises sont les suivants : la nature juridique de l’entreprise, les effectifs, le secteur d’activité et la situation géographique. Face à la méfiance, à la réticence des employés et à la peur des représailles de la part de leurs hiérarchies, nous avons prélevé l›échantillon de l’étude à partir d›un groupe de volontaires (échantillonnage volontaire). Ce qui nous a permis d’obtenir 80 employés repartis comme suit (cf. Tableau n°1). Tableau n°1 : Répartition des échantillons par entreprise Catégorie ORG 1 ORG 2 ORG 3 ORG 4 TOTAL Cadre 02 01 03 02 08 Agent de Maîtrise 03 03 05 05 16 Employés 07 10 07 06 30 Ouvrier 08 06 05 07 26 Total 20 20 20 20 80 Source : Données de l’enquête 2.3 Techniques d’analyses statistiques Le traitement statistique des données s’est fait grâce à l’application Excel. 3. RÉSULTATS - La politique de reconnaissance des mérites L’enquête révèle que 69% des travailleurs considèrent qu’ils ne sont pas traités avec équité contre 31% qui affirment le contraire. Sur la politique de reconnaissance des mérites, 72% des enquêtés Revue Africaine d’Anthropologie, Nyansa-Pô, N°21 - 2016 113
denise coffi affirment qu’elle n’est pas assez développée (elle n’est basée sur aucun critère valable) contre 28% qui affirment le contraire. Sur la politique de promotion, 62% des enquêtés affirment qu’il s’agit plus d’accroissement des responsabilités que de promotion contre 38% qui affirment le contraire. - La politique de participation à la vie de l’entreprise La majorité de personnes interrogées pense qu’elles ne participent pas à la prise de décision avec leur supérieur (75%). Seulement 25% disent participer effectivement à la prise de décision. 63% des enquêtés affirment communiquer peu au sein des entreprises, notamment avec leurs supérieurs, contre 37% qui affirment le contraire. 75% des enquêtés assurent qu’ils n’ont jamais été pris en compte par les encadrements en entreprise. Ce qui n’est pas l’avis des 25% restants. - Le développement des compétences 65% des enquêtés déclarent bénéficier de politique de développement des compétences dans leur carrière, contre 35% qui déclarent ne pas en bénéficier. 60% des enquêtés affirment avoir bénéficié de formation subventionnée par le FDFP, contre 40% qui disent ne pas en bénéficier. 84% des enquêtés affirment que les formations subventionnées par le FDFP n’aboutissent pas à des politiques de promotion, avis que ne partagent pas 16% des enquêtés. 44% des enquêtés affirment que les politiques de développement individuel dans les entreprises restent insatisfaisantes et inadéquates. Ceci n’est pas l’avis de 56% des enquêtés. - La politique d’emploi 77% des enquêtés affirment ne pas avoir reçu de fiche de poste dès leur embauche dans l’entreprise. Seulement 23% reconnaissent en avoir reçu. 71% des enquêtés affirment ne pas avoir une définition claire de leurs tâches contre seulement 29% qui disent le contraire. 75% des enquêtés affirment que les postes occupés ne sont pas en adéquation avec leurs catégories professionnelles et leurs qualifications. Seulement 25% disent le contraire. 77% des enquêtés assurent ne pas être évalués sur leurs performances. Seulement 23% assurent le contraire. 114 Revue Africaine d’Anthropologie, Nyansa-Pô, N°21- 2016
la gestion des carrieres, facteur de motivation des employes ... - Les conditions de travail 36% des enquêtés affirment être confrontés à une insuffisance de moyens pour accomplir leurs tâches. Ce qui n’est pas l’avis de 64%. 77% des enquêtés affirment être mal équipés pour faire leur travail. Ce qui n’est pas l’avis de 23%. 58% des enquêtés affirment que les horaires de travail sont partiellement convenables ; avis que ne partage pas 42% des enquêtés. 57% des enquêtés affirment travailler dans des conditions d’hygiène et de sécurité partiellement convenables. 68% des enquêtés affirment que leur condition de travail a une incidence négative sur leur état de santé. Ce qui n’est pas l’avis de 32% des enquêtés. - Politique de rémunération 69% des enquêtés affirment que la politique de rémunération pratiquée par leur entreprise n’est pas en adéquation avec leur condition de travail. Ces enquêtés pensent que leur salaire est inférieur aux salaires moyens, notamment les manœuvres, les ouvriers et les agents de maîtrise. Ce point de vue n’est pas partagé par 31% des enquêtés restant. 4. DISCUSSION DES RÉSULTATS En regard de certaines incertitudes, gérer les carrières c’est penser à l’ensemble des activités entreprises par un manageur pour suivre et diriger le cheminement professionnel de ses employés, dans (ou en dehors) une organisation spécifique, de façon à leur permettre d’atteindre le plus haut niveau possible de compétence et de réussite, hiérarchiquement ou socialement, compte tenu de leurs aptitudes et de leurs qualifications. Selon Peretti (2012), gérer sa carrière, ce n’est pas seulement changer d’emploi pour un autre plus rémunérateur ou comprenant plus de responsabilité, c’est aussi penser à la nécessité de faire des choix organisés et articulés en fonction de ses aptitudes, de ses compétences et de ses aspirations personnelles. L’avancement d’une carrière suppose que l’employé concerné connaisse, au cours de sa vie professionnelle, des changements en termes de mobilité interne ou externe (Peretti, 2012, p.118-119). Les mutations et les promotions sont bénéfiques pour le travailleur et l’entreprise. La mutation, souvent, assimilée à une Revue Africaine d’Anthropologie, Nyansa-Pô, N°21 - 2016 115
denise coffi nouvelle embauche (recherche de profil, aptitudes, motivation, effet recherchés), permet d’améliorer la qualité du travail et du résultat, la formation des employés et le développement de l’entreprise. 4.1 La politique de participation à la vie de l’entreprise En ce qui concerne les politiques de participation à la vie de l’entreprise, les organisations enquêtées ne sont pas exemptes de reproches. En effet, la politique de participation à la vie de l’entreprise y apparait comme problématique. Selon les employés, la politique des ressources humaines ne favorise pas la participation des travailleurs à la vie de leur entreprise. La majorité des personnels interrogés estiment ne pas participer à la prise de décision par la hiérarchie. Ce qui sous-entend l’absence de communication verticale au sein de ces entreprises. D’ailleurs, comme l’affirment les travailleurs, « les opinions des subalternes n’ont jamais été prises en compte ». Les employés se sentent ainsi exclus des projets et de la vie de l’entreprise. Ils n’ont pour tâche que l’exécution des ordres sans avis. Ce qui est démotivant, démobilisant, frustrant ; conduisant ainsi progressivement au désengagement. Or, la communication verticale devait être capitale dans l’engagement des travailleurs en vue de la réalisation des objectifs de ces entreprises. Elle est ce qui donne vie à l’entreprise, ce qui met en mouvement et en interaction les différents facteurs et acteurs de la production. D’une part, elle permet à l’employeur de connaître ses employés et d’autre part à ceux-ci de contribuer, par des actions motivées, à une meilleure production. Elle influence ainsi le comportement des travailleurs et leur efficacité au travail. La définition des attributions, la description des tâches, les procédures de travail, les instructions écrites et orales, les prises de décisions, l’entretien d’évaluation, l’information du personnel sont les conditions d’une bonne politique de participation à la vie de l’entreprise (Gnapka, 2011, pp.162-163). En effet, communiquer et partager avec le personnel sur la vie de l’entreprise renforce leur sentiment d’appartenance et leur fidélité à celle-ci. Rassembler les salariés autour de valeurs communes et d’un projet commun est un objectif que toute organisation devrait poursuivre. Faire comprendre la stratégie de l’entreprise et y faire adhérer le personnel est aujourd’hui indispensable à la performance économique. Il est donc 116 Revue Africaine d’Anthropologie, Nyansa-Pô, N°21- 2016
la gestion des carrieres, facteur de motivation des employes ... essentiel de regrouper les salariés autour d’une volonté stratégique de l’entreprise pour soutenir la réalisation de ces différentes actions. Ils se sentiront ainsi concernés par la vie et l’avenir de leur entreprise (Malaval et al, 2012, p. 528). 4.2 La politique de développement des compétences en entreprise Le développement des compétences, par la formation du personnel, est un investissement sûr pour l’entreprise et une source de motivation certaine pour les travailleurs. Elle permet aux entreprises d’accroître les compétences et la productivité de leurs personnels, en augmentant la qualité de leurs produits et de leurs services. Les travailleurs des entreprises enquêtées affirment ne bénéficier de formation prise en charge par le FDFP, qu’après de longues périodes de luttes, de grèves et de revendications. Aujourd’hui, bien qu’acquises, ces formations ne permettent pas de bénéficier de promotion. Pour certains employés, leurs entreprises évitent les plans de formation de peur d’être confronté à des problèmes de promotion et de rémunération. Ainsi, la politique de développement individuel dans ces entreprises reste insatisfaisante et inadéquate. Or, il est désormais prouvé que le développement des compétences est une valeur ajoutée qui favorise l’adaptation et la flexibilité des individus face aux défis à relever. Elle contribue à la planification stratégique et à la concrétisation de la mission de l’organisation, ainsi qu’à l’accroissement des connaissances et habilités des employés ; créant ainsi les conditions d’adaptation au travail et le développement de carrière. La politique de développement individuel permet, entre autre, de décrire avec suffisamment de détail, les tâches, les responsabilités, les résultats attendus, les conditions de travail et les caractéristiques spécifiques du poste. La description doit, donc, être rédigée pour que toute personne occupant un poste, puisse comprendre ce à quoi ou pourquoi il est promue ou embauché. Autrement dit, on cherche à décrire ce que fait le salarié, comment et pourquoi, il le fait et ce qu’implique le travail (Peretti, 2012, p. 56). Revue Africaine d’Anthropologie, Nyansa-Pô, N°21 - 2016 117
denise coffi 4.3 La politique de l’emploi La politique d’emploi semble floue dans les quatre entreprises enquêtées. Les travailleurs disent ne pas avoir reçu de fiche de poste au moment de leur embauche dans la structure. Ils n’ont donc pas de définition claire de leurs tâches. De plus, il apparaît que les postes occupés ne sont pas en adéquation avec les catégories professionnelles et les qualifications. Cette situation d’inadéquation ne peut qu’impacter le rendement et l’évaluation de la performance des travailleurs. Concernant l’évaluation, elle devrait être l’outil essentiel de l’analyse des performances du personnel, en misant sur le maintien de satisfaction au travail, tout en favorisant la progression professionnelle et personnelle. Ce qui n’est pas évident dans les cas des entreprises enquêtées. Au lieu de constituer un outil motivation et de développement individuel et/ou collectif, l’évaluation a souvent été assimilée à un instrument de punition, de chantage pour certains patrons via l’attribution de notes très peu objectives. 4.4 Conditions de travail et Politique de rémunération Les conditions de travail ne sont pas reluisantes dans les entreprises enquêtées. En effet, les travailleurs sont confrontés à une insuffisance de moyens et aux mauvais équipements pour accomplir leurs tâches. Ils estiment d’ailleurs que les horaires de travail, les conditions d’hygiène et de sécurité ne sont pas toujours conformes aux normes en vigueur. Ces conditions de travail ont des incidences négatives sur l’état de santé des salariés : risque physique et psychologique, avec des effets immédiats et futurs. En cas d’accident, ils ont un coût social et économique : interruption de l’activité, absentéisme, démotivation, abandon (Duchamp et Guery, 2006, p. 112). Par ailleurs, la rémunération qui devait apparaitre comme une source de motivation compensatrice ne l’est pas. En la matière, beaucoup d’efforts restent à faire. La politique de rémunération pratiquée par ces entreprises n’est pas en adéquation avec les conditions de travail. Pour les employés, les salaires sont nettement inférieurs aux salaires moyens, notamment pour les manœuvres, les ouvriers et les agents de maîtrise. 118 Revue Africaine d’Anthropologie, Nyansa-Pô, N°21- 2016
la gestion des carrieres, facteur de motivation des employes ... 4.5 La politique de reconnaissance des mérites En dehors de toutes ces considérations affairantes à la gestion des carrières des employés des entreprises enquêtées, le facteur à considérer comme profondément démotivant, annihilant les désirs d’accompagner une entreprise, est celui de la reconnaissance des mérites. L’enquête révèle que les travailleurs estiment ne pas être traités équitablement. La reconnaissance des mérites des employés n’est pas assez prise en compte dans la politique de développement des entreprises. Elle est, selon eux, inéquitable et fondée sur aucun critère valable. D’ailleurs, il ne leur est pas indiqué les référentiels de calcul de leur salaire. Ce qui contribue à renforcer la méfiance entre la hiérarchie et les employés. Pour certains, ils n’ont pas connu d’augmentation de salaire depuis la date de leur embauche. Pour d’autres, les primes sont données, mais à ceux qui ne le méritent pas ; d’autant que les critères sont méconnus de tous. La politique de rémunération d’une entreprise doit être définie, construite et gérée de façon transparente et compréhensible, en respectant une certaine cohérence entre les différents impératifs dans l’intérêt de l’entreprise et de l’employé. Pour atteindre cet objectif, de nombreux systèmes de rémunération ont été élaborés pour les entreprises (Gnakpa, op cit, p.116). L’évocation de dysfonctionnements dans le management des ressources humaines traduit la démotivation qui gagne les employés des entreprises enquêtées: départ volontaire, abandon de poste, revendication. CONCLUSION Cette étude nous a permis d’analyser la politique de gestion des carrières de quatre entreprises privées en Côte d’Ivoire. Toutefois, elle comporte des limites. La population de l’étude constitue la première d’entre elles. En effet, l’étude portant sur les politiques et pratiques en matières de gestion de carrières, il aurait été intéressant de pouvoir interroger également les responsables des Ressources Humaines des différentes entreprises concernées sur leurs politiques, afin de les comparer aux perceptions des salariés. Par ailleurs, nous avons choisi un champ géographique et sectoriel élargi ; effectuer l’étude dans un seul champ sectoriel Revue Africaine d’Anthropologie, Nyansa-Pô, N°21 - 2016 119
denise coffi nous aurait permis d’effectuer des comparaisons intéressantes entre les différentes organisations. Enfin la taille de notre échantillon (80 personnes) et la technique d’échantillonnage basée sur le volontariat ne permettent pas la généralisation de nos résultats. Les résultats de cette étude montrent que, dans l’ensemble des organisations enquêtées, les salariés ne perçoivent pas les effets de véritables politiques et pratiques de gestion de carrières. Le système d’appréciation qui aurait permis de réunir les informations nécessaires pour construire les différents programmes (promotion, rémunération, formation) et prendre les décisions concernant les carrières des salariés est défaillant. Le système d’entretien annuel d’appréciation n’est pas respecté. Ces entretiens sont pourtant fondamentaux car ils permettent notamment l’amélioration de la communication au sein de l’organisation ainsi que la rationalité dans la prise de décision. Dans les quatre entreprises, l’employabilité des salariés, ne semble pas être la priorité de la Direction. En effet, selon Peretti (2005, p.98), l’absence de formation et de mobilité fonctionnelle, qu’elle soit géographique ou hiérarchique, sur une longue période, augmente les risques d’inemployabilité des travailleurs. Mettre en place un plan de carrière motivant qui tienne compte de l’avenir du personnel ainsi que de ces capacités de développement est un facteur qui fidélise et stimule les travailleurs. Il est donc important de développer des réflexes novateurs et originaux de gestion des carrières afin de fidéliser ses travailleurs (notamment les meilleurs). Le dispositif à mettre en place doit prévoir un système de mobilité intérieur adapté capable non seulement de motiver mais aussi de développer et de maintenir les compétences du futur. REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES ALDERFER Clayton, 1969, « An empirical test of a new theory of human needs », Organizational Behavior and Human Performance, 4, 2, p.142-175. BLAKE Robert et MOUTON Janes, 1987, La 3e dimension du management, Paris, Editions d’Organisation. BROWN Jillian, ELLIOTT Statia, CHRISTENSEN-HUGHES Julia, LYONS Sean, MANN Sara et ZDANIUK Agnès, « Mise en œuvre des pratiques de GRH à des fins d’augmenter la productivité du secteur canadien du tourisme », Conseil Canadien des ressources humaines en Tourisme, 2009, pp.1-17. 120 Revue Africaine d’Anthropologie, Nyansa-Pô, N°21- 2016
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