La liberté de la presse de plus en plus réprimée à Hong Kong - Reforme.net

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Par Sophie Nouaille

La liberté de la presse de plus en
plus réprimée à Hong Kong
Des médias perquisitionnés et fermés comme Stand News, pro-démocratie, des
journalistes arrêtés, la liberté de la presse à Hong Kong est sous le coup d’une
repression qui s’amplifie. De son côté, Pékin condamne ces critiques occidentales
“irresponsables”.

Le média en ligne hongkongais défenseur de la démocratie Stand News a annoncé
mercredi sa fermeture après avoir été visé par des perquisitions et sept
arrestations pour “publication séditieuse”, le dernier épisode en date de la
répression exercée sur la presse locale par les autorités fidèles à Pékin. Ce coup
de filet survient au moment où la communauté internationale s’inquiète de
l’implacable reprise en main à Hong Kong depuis les manifestations pour la
démocratie de 2019.

“Une attaque ouverte contre la liberté de
la presse”
Le Comité pour la protection des journalistes (CPJ) a dénoncé “une attaque
ouverte contre la liberté de la presse déjà en lambeaux à Hong Kong” et Amnesty
international a accusé “les autorités d’instrumentaliser la législation
hongkongaise”. Le chef de la police de sécurité nationale de Hong Kong, Steve Li,
a déclaré que Stand News était accusé d’avoir publié des articles et billets de blog
“séditieux” entre juillet 2020 et novembre 2021. “Ils ont décrit des manifestants à
Hong Kong comme ‘portés disparus’ ou ‘violés’… Ce sont des allégations
malfaisantes sans aucune base factuelle”, a dit M. Li.

Des journalistes menottés
Il a nié que la police s’attaque aux médias, assurant que les publications écrivant
des articles impartiaux n’auraient pas de problèmes. Mercredi à la mi-journée, la
police a été vue sortant des cartons de Stand News. Selon M. Li, des ordinateurs,
téléphones, documents et 500.000 dollars de Hong Kong (56.856 euros) en
espèces ont été saisis. En outre, 61 millions de HKD d’avoirs appartenant à Stand
News ont été gelés, a-t-il ajouté. Plus de 200 agents ont perquisitionné mercredi
au siège de Stand News et aux domiciles de plusieurs de ses employés. Un
journaliste de l’AFP a vu le rédacteur en chef de la publication, Patrick Lam,
conduit menotté à l’intérieur des bureaux de Stand News.

Plusieurs médias visés
Selon les médias locaux, la police a également arrêté l’ex-rédacteur en chef
Chung Pui-kuen et quatre ex-membres du conseil d’administration ayant
démissionné en juin, dont la star de la pop cantonaise Denise Ho, l’avocate et
ancienne membre du Conseil législatif de Hong Kong Margaret Ng ainsi que l’ex-
journaliste de l’Apple Daily Chan Pui-man, épouse de M. Chung. M. Li n’a pas
exclu d’autres arrestations, certaines personnes recherchées ne se trouvant pas
sur le territoire hongkongais. Le rédacteur en chef adjoint de Stand News,
Ronson Chan, également président de l’Association des journalistes de Hong
Kong, a raconté que son domicile avait été fouillé et que du matériel informatique
avait été saisi. Mais il n’a pas été arrêté. “A cause de la situation actuelle, Stand
News va cesser son activité immédiatement et arrêtera d’actualiser son site
(internet) et tous ses réseaux sociaux”, a annoncé la publication.
Stand News protégeait des valeurs
fondamentales
Stand News a également indiqué que tout son personnel avait été licencié, que
son rédacteur en chef Patrick Lam avait démissionné et que le site internet serait
mis hors-ligne prochainement. “Stand News était indépendant au plan éditorial et
se consacrait à protéger les valeurs fondamentales de Hong Kong comme la
démocratie, les droits humains, la liberté, l’Etat de droit et la justice”, a poursuivi
le média, créé en 2014 et nominé en novembre pour le Prix de la liberté de la
presse de Reporters sans frontières (RSF).

Mais John Lee, l’adjoint de la cheffe de l’exécutif hong-kongais Carrie Lam, a
affirmé que les personnes arrêtées étaient des “éléments malfaisants (…) abusant
de leurs fonctions (…) d’employés de médias”. Pendant les manifestations de
2019, plusieurs journalistes de Stand News avaient eu maille à partir avec la
police. Dans un épisode resté célèbre, une de ses reporters avait filmé en direct
l’attaque ultraviolente réalisée par un groupe d’individus masqués contre des
manifestants pour la démocratie dans une station de métro, continuant à filmer
alors que les assaillants s’en prenaient à elle. Stand News était la cible ces
derniers mois de vives critiques des autorités. C’est le deuxième média local
réduit au silence par les autorités.

Réduire les derniers médias indépendants
au silence
En juin, le journal défendant la démocratie Apple Daily avait fermé après le gel de
ses actifs et l’arrestation de ses principaux dirigeants, en vertu d’une nouvelle loi
drastique sur la sécurité nationale imposée par Pékin en juillet 2020. Plusieurs
opposants hongkongais ayant fui à l’étranger ont condamné les arrestations de
mercredi. “Le Parti communiste chinois continue à poursuivre les journalistes et
médias qui osent le contredire et dire la vérité”, a tweeté l’opposant Nathan Law,
en exil au Royaume-Uni. “Stand News représente un des derniers vestiges du
journalisme indépendant à Hong Kong et nous ne sommes pas sûrs qu’il puisse
survivre à cette répression”, a estimé pour sa part Brian Leung, un représentant
du mouvement Hong Kong Democracy Council, dont le siège est aux Etats-Unis.
L’Association des journalistes de Hong Kong et le Foreign Correspondent Club,
qui représentent respectivement les journalistes locaux et étrangers, se sont
déclarés “profondément préoccupés”.

Réactions de l’Union européenne
Le porte-parole de la diplomatie de l’Union européenne, Peter Stano a dénoncé
une “poursuite de la détérioration de la liberté de la presse” à Hong Kong. Ces
“perquisitions (…) montrent une fois de plus que la loi sur la sécurité nationale et
d’autres dispositions sont appliquées de manière arbitraire et sélective pour lutter
contre les voix critiques”, a estimé le ministère allemand des Affaires étrangères.

Deux nouveaux journalistes ont été inculpés de “sédition” jeudi à Hong Kong
après l’opération de police de la veille contre le site d’information pro-démocratie
Stand News, qui a déclenché une vague internationale de réprobation. La Chine,
quant à elle , a dénoncé jeudi des critiques “irresponsables” des pays
occidentaux.

Sophie Nouaille avec AFP

Par Sophie Nouaille
Promotion du Hijab : le Conseil de
l’Europe retire sa campagne
Une campagne promouvant la liberté en Europe en mettant en avant le port du
Hijab et censée lutter contre les discriminations, lancée par le Conseil de l’Europe
la semaine dernière, a été retirée devant la polémique suscitée en France.

Lancée jeudi dernier par le Programme pour l’inclusion et la lutte contre les
discriminations, géré par le Conseil et cofinancé par l’Union européenne, cette
campagne proposait des portraits de plusieurs jeunes femmes, voilées sur une
seule moitié de l’image.
Un message en anglais indiquait notamment: “Beauty is in diversity as freedom is
in hijab” (“la beauté est dans la diversité comme la liberté est dans le hijab”).

La campagne a provoqué une vive
polémique
Passée dans un premier temps relativement inaperçue, elle a fini par déclencher
une vive polémique, de l’extrême droite au gouvernement.
“L’islam est l’ennemi de la liberté. Cette campagne est l’ennemie de la vérité”, a
tweeté le polémiste Eric Zemmour, probable candidat à la présidentielle,
dénonçant un “djihad publicitaire”. “Cette communication européenne en faveur
du voile islamiste est scandaleuse et indécente alors que des millions de femmes
se battent avec courage contre cet asservissement”, a lancé de son côté Marine
Le Pen, candidate du Rassemblement national.

Unanimité politique pour désapprouver
les visuels
“Ceci n’est pas un campagne de propagande des Frères musulmans mais du
Conseil de l’Europe”, a ironisé de son côté le député souverainiste Nicolas
Dupont-Aignan, toujours sur Twitter.
A droite, la présidente de la Région Île-de-France Valérie Pécresse a elle aussi fait
part de sa “stupeur”, estimant que le voile n’était “pas un symbole de liberté mais
de soumission”.
Prétendant à l’investiture des Républicains pour 2022, le maire de Nice Eric
Ciotti a dénoncé une “promotion du voile islamique” et une “négation de nos
racines judéo-chrétiennes, de notre civilisation, de l’esprit des Lumières”.
Quant au chef de file des sénateurs LR, Bruno Retailleau, il a estimé que le
Conseil de l’Europe promouvait “désormais ouvertement la soumission aux
mœurs islamistes”.
La campagne a également fait réagir à gauche, l’ancienne ministre des Droits des
femmes, la sénatrice socialiste Laurence Rossignol, estimant que “dire que la
liberté est dans le hijab” revenait à “en faire la promotion”. L’ancien Premier
ministre PS, Manuel Valls, l’a lui jugée “choquante, ahurissante et dangereuse”.
Au sein du gouvernement, la secrétaire d’Etat chargée de la Jeunesse Sarah El
Haïry a indiqué sur LCI que la France avait “fait part de sa désapprobation
extrêmement vive, d’où le retrait de cette campagne dès (mardi)”.
“Ces tweets ont été retirés et nous allons réfléchir à une meilleure présentation
de ce projet”, a confirmé dans un communiqué transmis à l’AFP le Conseil de
l’Europe, l’organisation paneuropéenne basée à Strasbourg.

Un projet européen de lutte contre les
discriminations
Ils “faisaient partie d’un projet conjoint” du Conseil et de l’Union européenne
lancé en 2019 contre la discrimination, dont l’objectif est “de sensibiliser à la
nécessité de respecter la diversité et l’inclusion et de combattre tout type de
discours de haine”, a encore justifié le Conseil.
Les tweets “reflétaient les déclarations faites de manière individuelle par des
participants dans l’un des ateliers du projet et ne représentent pas la position du
Conseil de l’Europe ou de sa Secrétaire Générale” Marija Pejčinović Burić, a
encore assuré l’organisation.

Si la Commission européenne a bien contribué à financer à hauteur de 340.000
euros l’ensemble du projet, qui s’efforce d’associer “jeunes et organisations de la
société civile” à des ateliers et campagnes de sensibilisation, le Conseil de
l’Europe “joue un rôle de chef de file” et Bruxelles “n’a pas validé les éléments”
controversés, a déclaré mercredi un porte-parole de l’exécutif européen.
Pour autant, la Commission appelle à prendre en considération “les autres
actions” de ce programme contre les discours haineux, a-t-il ajouté. “Notre
position est extrêmement claire: les femmes doivent pouvoir porter ce qu’elles
veulent, selon les lois du pays où elles vivent”, a insisté un second porte-parole de
l’institution.

Sophie Nouaille avec AFP

Par Rédaction Réforme

Libres ou solidaires
Le pasteur Jean-Paul Morley interpelle librement, à travers ce texte, notre goût
pour la liberté en même temps que notre sens de la solidarité.

L’exigence toujours croissante de libertés individuelles, m’étonne et m’inquiète.
Pourquoi, en ces malheureux temps de Covid, de confinements et de couvre-feu,
cette revendication de libertés individuelles devient-elle une obsession majeure ?
Elle n’a pourtant jamais été une priorité absolue, il y a toujours eu des lois.

Libertés individuelles et bien commun
Trois exemples : la guerre ; l’automobile ; les vaccins. En situation de guerre – le
Ciel nous en préserve longtemps… – depuis plus d’un million d’années et
l’apparition des pré-sapiens, tous les hommes et souvent les femmes sont
réquisitionné(e)s, disponibles pour tuer et être tué(e)s, sans avoir le choix. Les
“libertés individuelles” n’existent plus.

L’invention de l’automobile s’est rapidement suivie d’un code de la route, ses
obligations et ses interdictions. Tout conducteur doit réussir une épreuve et
suivre des règles impératives, au risque de la maréchaussée, de sa vie et de celle
des autres. Les “libertés individuelles” du conducteur n’existent plus guère.

En France, onze vaccins sont obligatoires pour chaque nouveau-né, malgré les
craintes et les réticences exprimées par un pourcentage de Français sans
équivalent dans le monde. Là encore, les “libertés individuelles” n’existent plus.

Enfin, concernant le Covid, n’est-il pas étonnant que les “libertés individuelles”
s’opposent au vaccin, face à une épidémie qui tue par millions ? Autant
d’exemples où les libertés individuelles se heurtent à la solidarité et au bien
commun.

Une dérive de la culture des droits
individuels?
Alors je me demande pourquoi, aujourd’hui, ces “libertés individuelles”
deviennent absolues, comme une obsession, surtout parmi les nouvelles
générations. Exemple : le refus brutal de la limitation de vitesse à 80 km/h sur les
routes secondaires, qui a bloqué une décision propre à sauver des vies et
diminuer la pollution. Pourquoi, aujourd’hui, cette obsession des libertés
individuelles, jusqu’à l’absurde et contre la solidarité collective ? Comme si cette
revendication était évidente, universelle et de tous temps, alors qu’à ma
connaissance elle n’a jamais été l’impératif majeur d’aucune communauté
humaine ni d’aucune Constitution politique ? On pourrait évoquer la dérive d’une
culture des droits de l’individu, la pression de l’idéologie et de l’économie
libérales, l’influence galopante des réseaux sociaux, ou encore la marée du
consumérisme…

Mais, au-delà de ces réponses spontanées, ne s’agirait-il pas d’une peur ? La
grande peur face à l’avenir de la planète et de l’humanité ? Une réaction, peut-
être inconsciente, devant cet avenir sombre et angoissant, déjà en partie
inéluctable. On pressent collectivement, on sait déjà, qu’on ne s’en sortira pas
sans graves restrictions de libertés individuelles, sans larmes et sans douleur.
Alors, inconsciemment, on réagit d’avance pour occulter cette évidence, et peut-
être sauver tout ce qui peut l’être en libertés individuelles. Quitte à risquer de
reculer pour mieux subir : on voit bien combien, déjà, les gouvernements ont de
mal à prendre les décisions nécessaires.

Liberté, fraternité, solidarité…
Et pourtant : c’est uniquement en acceptant de restreindre nos libertés
individuelles au profit de la solidarité et de la fraternité, de l’acceptation de
sacrifices également répartis, que l’humanité pourra survivre sans trop de
violences, de souffrance et de drames. Nous aurons terriblement besoin de vivre
un amour du prochain augmentant à mesure de l’augmentation des contraintes.

Cette nécessité ne ressemble-t-elle pas étrangement à l’Évangile de Jésus de
Nazareth ?

Jean-paul Morley

Par Laure Salamon
La culture en colère attend la
réponse du Conseil d’État
Le monde de la culture en colère dénonce une différence de traitement injuste
entre les lieux culturels, les lieux cultuels et les commerces non-essentiels. Le
Conseil d’État doit rendre son arbitrage mercredi.

Théâtres, cinémas, salles de spectacle et musées étant fermés jusqu’au 7 janvier,
le monde de la culture est en colère. La semaine dernière, un cinéma à Caen a
projeté un film dans une… église pour manifester son mécontentement. De
nombreuses organisations professionnelles du spectacle vivant et du cinéma ont
déposé des recours auprès du Conseil d’État. Ce dernier doit rendre ses
arbitrages, mercredi 23 décembre, sur la fermeture des cinémas et théâtres.

D’ici là, le Conseil d’État examine la demande. Ce lundi, le représentant du
ministère de la Santé, Charles Touboul, était entendu. Il a expliqué que le
gouvernement faisait une «balance» entre les impératifs sanitaires et «l’intérêt
économique et social». Il a aussi souligné qu’aucune étude ne prouvait que les
lieux culturels étaient plus propices aux contaminations. Il a en revanche rappelé
les risques encourus pour les personnes dans les espaces clos.

Lieux culturels et lieux cultuels
Le monde de la culture dénonce une différence de traitement entre lieux culturels
et lieux cultuels. L’enjeu n’est pourtant pas le même. «La liberté de culte» est une
liberté fondamentale d’une autre nature, a rappelé le représentant du ministère
de la Santé, Charles Touboul. «Les activités de loisirs, de culture et de sport sont
traitées de la même façon».

À l’audience, lundi, les avocats des organisations culturelles ont plaidé sur la
différence de traitement entre les lieux cultuels et lieux culturels, en insistant sur
le fait que la fermeture des théâtres et salles de concert étaient contraire à quatre
libertés fondamentales : liberté d’entreprendre, liberté d’association, liberté
artistique et principe d’égalité avec les autres commerces.

Les acteurs et actrices du monde de la culture manifestent pour dénoncer
l’injustice de traitement depuis les annonces gouvernementales de maintenir les
commerces non-essentiels ouverts pour permettre aux consommateurs de faire
leurs achats de Noël. «C’est un choix économique qui est fait» sans être assumé
publiquement, a dénoncé à l’audience le directeur du théâtre du Rond-Point, Jean-
Michel Ribes, insistant sur «l’aspect thérapeutique du théâtre et du cinéma».

Garder l’espoir d’un redémarrage
Pour Capucine Keller, soprano et administratrice d’une compagnie et d’un festival
de musique baroque, «nous donnons du bonheur aux gens, il est dommage que
cela ne semble pas suffisamment essentiel.» Les musiciens comme beaucoup
d’autres acteurs du monde culturel s’interrogent sur leur avenir : les
financements seront-ils au rendez-vous ? Le public reviendra-t-il au spectacle ?
«C’est une situation difficile car nous ne savons ce qu’il adviendra, nous
travaillons dans le vide. Pouvons-nous garder espoir dans le futur ?» La chanteuse
soliste garde la foi et pas seulement en son métier mais en Dieu. De confession
protestante, comme vous le lirez bientôt dans un portrait de Réforme, Capucine
Keller a confiance et garde cette espérance que les projets pourront redémarrer
dans le monde d’après.

Le gouvernement, en choisissant de miser sur l’économie, n’a pas vraiment
rassuré le monde de la culture qui aimerait avoir des garanties sur le soutien de
l’État pour la suite.

Laure Salamon avec AFP

Ajout du 23 décembre 2020

Mercredi 23 décembre, le juge des référés du Conseil d’État a estimé que “la
fermeture de ces lieux culturels n’est justifiée que par la récente dégradation du
contexte sanitaire et les incertitudes qui pèsent sur son évolution à court terme.
Dans un contexte plus favorable, leur fermeture nepourraitêtre maintenue au seul
motif qu’il existe un risque de transmission du virus aux spectateurs.”
Par Laure Salamon

100 protestants signent une
tribune pour défendre la liberté
Dans une tribune publiée le 2 décembre, 100 protestants, pasteurs et membres de
différentes Églises protestantes, défendent la liberté sous toutes ses formes :
liberté de croire, liberté de circuler, liberté d’informer, liberté de manifester…

Une tribune intitulée « Le courage des libertés », signée par 100 protestants,
pasteurs et membres de plusieurs Églises protestantes, a été publiée le 2
décembre sur un blog hébergé par Médiapart. Dans ce texte engagé, les
signataires demandent aux élus et aux responsables du pays de renoncer aux
politiques liberticides qui construiraient une société de la surveillance et de la
méfiance envers les migrants, les journalistes, les magistrats, les manifestants, les
militants, les croyants et les non-croyants… « Ces hommes et ces femmes ne sont
pas à considérer comme potentiellement nuisibles à la République », rappelle la
tribune. Certains de ces croyants parlent à partir de leurs expériences
personnelles car ils sont investis en tant que chrétiens et/ou citoyens dans des
associations.

Ils appellent aussi à être « vigilants à ce que la croyance ne soit pas cantonnée
dans la sphère privée » et à ce qu’« aucune interprétation de la loi 1905 ne
permette la stigmatisation d’individus ». Ils soulignent enfin l’importance de la
neutralité de l’État par rapport à l’égalité de traitement des individus.

Prendre la parole publiquement
Joël Dahan, pasteur de l’Église protestante unie du Bergeracois, a élaboré ce
texte avec ses collègues de la pastorale de Dordogne. De leurs discussions sur
l’actualité, ils sont arrivés à la conclusion qu’ils devaient dire publiquement leur
désaccord et leur crainte par rapport aux projets et propositions de loi qui sont
actuellement dans le débat parlementaire.

« Nous ne sommes pas les seuls à nous inquiéter de ce qui est discuté au
parlement. La preuve, les rapporteurs de l’ONU aussi interpellent la France. Il
nous semblait important de dire que nous réagissons en tant que chrétien et
citoyen », explique Joël Dahan.

« Nous craignons aussi les dégâts collatéraux sur les libertés religieuses,
poursuit-il. Au nom de la lutte contre l’islamisme et le terrorisme, nous avons
peur des répercussions, notamment pour nos associations partenaires. Par
exemple, s’il fallait que certaines structures protestantes ou avec des références
chrétiennes, du secteur social, médico-social ou de l’éducation populaire soient
obligées de changer leur statut, de renoncer à leurs références ou d’arrêter leur
aumônerie pour être plus neutre. C’est l’État qui doit être neutre. »

« Risque de dérive »
Joël Dahan donne un autre exemple avec les mesures prises pour lutter contre les
financements étrangers des mosquées. « Ces mesures nous empêcheront-elles
demain de recevoir des financements d’Églises sœurs pour soutenir un projet
d’Église ici ? Les Églises veulent continuer à être solidaires les unes des autres
dans le monde. L’arsenal juridique actuel est suffisant pour empêcher les dérives.
Il ne faut pas aller plus loin. Il y a un très grand risque de dérive au niveau de la
liberté. Ces outils mis en place nous inquiètent vraiment car ils pourraient
devenir des armes dangereuses sous un autre gouvernement. »

Les signataires de la tribune ne veulent pas donner de leçons, juste partager leurs
convictions sincères qu’ils relient clairement à l’Évangile. « Nous devions
partager publiquement ce que nous pensions à l’intérieur de nos Églises sur ce
que nous observons autour de nous », conclut le pasteur.

Le texte se termine avec une adresse aux élus et responsables politiques pour
qu’ils aient « le courage de répondre à la violence et aux peurs sans renoncer aux
libertés qui fondent une démocratie ».

Par Rédaction Réforme

Des masques à démasquer
Chaque jour, Réforme invite à une méditation en lien avec l’actualité ;
Aujourd’hui, le pasteur Jean-Philippe Lepelletier invite à « tomber les masques ».

Les masques ne sont pas seulement un accessoire devenu indispensable
avec la crise sanitaire. Ils nous accompagnent, dans leur version
métaphorique, depuis toujours… Une réflexion du pasteur Jean-Philippe
Lepelletier.

« Mais, comme il est écrit : “Lorsqu’on se tourne vers le Seigneur, le voile
est enlevé.” Or le Seigneur, ici, c’est l’Esprit ; et là où l’Esprit du Seigneur
est présent, là est la liberté. Nous tous, le visage dévoilé, nous
contemplons en Christ, comme dans un miroir, la gloire du Seigneur ;
ainsi, nous sommes transformés pour être semblables au Seigneur, et
nous passons d’une gloire à une gloire plus grande encore. Voilà en effet
ce que réalise le Seigneur, qui est l’Esprit. », 2 Corinthiens 3.16-18

Depuis quelques semaines, dans les commerces, dans les transports, dans les
cultes, un élément est venu se rajouter à nos vies pour devenir un indispensable :
notre masque. Parfois jetable, parfois en tissu, parfois personnalisé, tout le monde
s’affiche désormais avec un masque pour protéger son prochain et soi-même.

Et pourtant, il est encombrant, il empêche de respirer les uns, donne des maux de
crâne aux autres, et embue les lunettes de certains. Il transforme notre rapport
aux autres, en créant de fait une distance relationnelle, nécessaire à la protection.

De masques en masques…
Nous devrions pourtant y être habitués, car nous avons toujours porté des
masques pour nous protéger. Ces derniers sont peut-être plus psychologiques ou
métaphoriques, mais ils restent des masques. Le masque de la réputation, de la
fierté, du statut social : chacun se cache derrière ses propres masques qui voilent
nos vies. Nous les avons tellement intégrés que nous croyons qu’ils font partie de
notre être profond, au point que même notre relation à Dieu est faussée par eux.

Et pourtant, les écritures bibliques pourraient être considérées comme le récit
global de Dieu qui se démasque, qui se dévoile petit à petit pour abolir toute
distance entre lui et l’humain. L’Évangile est une invitation à laisser de côté nos
masques intérieurs pour vivre en Vérité devant Dieu, pour contempler sa gloire
dans le miroir. Il est aussi une invitation pour nous à rechercher cette communion
en vérité avec l’autre, même derrière nos masques.

Jean-Philippe Lepelletier, pasteur de l’UEPAL
Par Rédaction Réforme

De la liberté d’être soi-même, sans
prédestination ni déterminisme
Réforme propose quotidiennement une méditation. Aujourd’hui, la liberté d’être
soi-même, à l’abri de toute prédestination ou fatalité, avec Gilbert Grezet.

La Bible semble parfois nous mettre face à une forme de prédestination.
Comment le comprendre ? Une réflexion du pasteur adventiste Gilbert
Grezet.

« Celui qui est mauvais, qu’il continue à faire le mal ! Celui qui aime ce
qui est impur, qu’il continue à aimer ce qui est impur ! Mais celui qui est
bon, qu’il continue à faire le bien ! Et celui qui vit pour Dieu, qu’il
continue à vivre pour Dieu ! », Apocalypse 22,11

Pour cette réflexion, je me permets de vous proposer un verset biblique vraiment
difficile, inquiétant même ! Décidément, oui, il semble que même la Bible soit en
accord avec cette maxime : « on ne prête qu’aux riches », dont les conséquences
sont parfois difficiles, comme nous l’avons vu précédemment.

Celui qui est mauvais, qu’il continue à faire le mal ! Mais celui qui est bon, qu’il
continue à faire le bien ! Est-ce vraiment si déterminé ? Coulé dans le marbre à
tout jamais… Et la liberté, alors ?

Ni prédestination, ni hasard
Même si cela contrarie un esprit épris de liberté, force est de reconnaître que
parfois, le confinement et la peur du virus ont mis les humains en face d’un quitte
ou double… Certains n’aimaient pas trop Dieu, et encore moins les églises. On
peut presque parier qu’ils ne les aiment plus du tout aujourd’hui. Alors qu’à
l’opposé, certains croyants se sont réfugiés dans leur vie de foi et de prière pour
résister aux peurs ou au découragement.

Quoi qu’il en soit, je veux garder à l’esprit cet autre verset du même livre de la
Bible : « Voilà : je me tiens à la porte et je frappe. Si quelqu’un entend ma voix et
ouvre la porte, j’entrerai chez lui, je mangerai avec lui et il mangera avec moi. »
(Apocalypse 3,20).

Cette offre est permanente et universelle. Soyons reconnaissant(e)s !

Gilbert Grezet, pasteur de l’Église adventiste en Suisse

Par Joan Charras-Sancho

Redevenir des esclaves du monde
d’avant ?
Réforme propose chaque jour une réflexion en lien avec l’actualité. Aujourd’hui,
se libérer de tout ce qui rend esclave, par Joan Charras-Sancho.

L’homme moderne se rêve ne homme libre mais ne demeure-t-il pas
esclave de certains fonctionnements ? La théologienne Joan Charras-
Sancho invite à faire le point.

« Mais à présent que vous avez connu Dieu, ou plutôt que vous avez été
connus de Dieu, comment retournez-vous à ces faibles et pauvres
rudiments, auxquels de nouveau vous voulez vous asservir encore ? Vous
observez les jours, les mois, les temps et les années ! Je crains d’avoir
inutilement travaillé pour vous. », Galates 4,8-11

Combien ces exhortations, en Galates 4 sont percutantes pour notre « après
confinement » ! J’en retiens deux questions : tout d’abord, de quoi notre présence
au monde dit « d’avant » était-elle l’esclave ? Quelles pouvaient être ces forces
sans pouvoir et misérables dont parle l’épître ?

Esclave moderne
On devine, dans le contexte, qu’il s’agissait des dieux païens dont le culte pouvait
être mortifère voire meurtrier. Si je transpose cela à mon quotidien, qu’est-ce que
je sacrifie dans mon éthique de vie pour suivre le rythme généré par
l’accélération de nos modes de vie ? Je donne un exemple (sans les exemples c’est
souvent abstrait) : décider, en conseil municipal, de bétonner des espaces pour
construire des pistes cyclables… sans prévoir d’arbres pour les protéger du
soleil ! On obtient alors une situation intenable avec, d’une part, le label « ville
amie des cyclistes » et l’impossibilité de les utiliser en pleine canicule.

Le passage de l’épître se termine avec un questionnement ouvert : tous les efforts
pour sortir de ce monde de paradoxes épuisants sont-ils inutiles ? On attribue à
Martin Luther la phrase suivante : « S’il ne me restait qu’un jour à vivre, je
planterai un pommier », et je la complète : « que je planterai en bordure de piste
cyclable ! »

Retrouvez également cette chronique sur YouTube :
Par Florence Blondon

Confinés, mais libres et actifs au
service des autres
Comme chaque jour, Réforme vous invite à une méditation en lien avec l’actualité.
Aujourd’hui, liberté et service, par Florence Blondon.

La grâce nous met en liberté, et cette liberté nous pousse au service des
autres. Une réflexion de la pasteure de l’ÉPUdF Florence Blondon.

« Mes frères, vous avez été appelés à la liberté ; seulement, que cette
liberté ne devienne pas un prétexte pour vivre selon les désirs de votre
propre nature ; par amour, faites-vous plutôt serviteurs les uns des autres.
Car toute la loi est accomplie dans une seule parole, celle-ci : Tu aimeras
ton prochain comme toi-même. », Galates 5,13-14

Chaque soir à 20 heures nombre d’entre nous sont à la fenêtre ou sur leur balcon
pour applaudir, chanter, encourager les soignants, les invisibles, toutes celles et
ceux grâce à qui nous continuons à vivre de manière confortable, malgré le
manque de liberté. Celles et ceux qui sont au service.

Paul nous parle de liberté et de service de l’autre, deux termes antinomiques.
Quelle est donc cette liberté à laquelle nous sommes appelés ? Dans un contexte
de confinement, il peut être salutaire de s’interroger à ce sujet. Il ne s’agit
certainement pas de la liberté de circuler, la liberté de faire ce que nous voulons.
Il s’agit de faire l’expérience de l’amour de Dieu qui nous délivre, même lorsque
nous sommes confinés.

La liberté nous appelle au service des
autres
Cette liberté nous est offerte par grâce, elle nous sort de notre condition de
pécheur, de la haine, de la peur, de tout ce qui nous enferme. Elle nous ouvre à
l’amour. Le paradoxe de cette liberté, c’est qu’elle nous appelle à nous mettre au
service des autres ! Désormais nous ne sommes plus enfermés dans notre
agressivité, notre égoïsme, nous nous découvrons capables de tourner notre
regard vers le monde. Et de découvrir qu’aimer, servir rend libre ! Même confinés
nous pouvons être au service, cela demande parfois de l’inventivité, c’est aussi
cela être libre, ne pas se laisser enfermer dans nos habitudes, accueillir
l’inattendu.

Continuons à aimer, à nous mettre au service de notre prochain, c’est le remède
gratuit et sans cesse renouvelable à tous les maux qui nous enferment.

Par David Guiraud
Lecture: “Sans la liberté”, de
François Sureau
Dans cet essai, François Sureau dénonce les atteintes multiples de l’État et de la
société moderne à la liberté de conscience.

Avocat et écrivain, François Sureau est aussi ce précieux “lanceur d’alerte” qui,
depuis plusieurs années, s’attache à dénoncer la perte insidieuse de ce qui fonde
la vitalité d’une démocratie et la raison d’être de ses citoyens: leur liberté. Paru
dans la nouvelle collection “Tracts”, lancée par Gallimard, ce texte ramassé d’une
cinquantaine de pages, à l’écriture subtile et puissante, met pleinement en
lumière les multiples abus dont l’État et la société moderne se rendent coupables
au détriment de la liberté de conscience de chacun, quelle que soit sa condition.
Les exemples abondent. Rabotage en règle de la liberté de penser et d’écrire, de
manifester et d’agir. Atteinte silencieuse faite à l’intégrité des personnes au
prétexte d’une douteuse efficacité politique exigée par les sondages face aux
soubresauts d’une société en transformation. Peur grandissante des gouvernants
soumis à l’individualisme bêlant, légiférant dans l’urgence pour contrer un
improbable risque jusqu’à bafouer sans état d’âme les principes mêmes de la
Constitution. “Nous assistons sans mot dire au remplacement des libertés par le
culte des droits”, destinés essentiellement à punir le voisin.

Ellul n’est pas loin, cité au côté de Simone Weil, pour rappeler combien la
technique et ses armées de l’ombre soumettent l’humain plus que l’inverse. Ce
paternalisme étatique vide progressivement de son sens toute notion de
fraternité, instillant le doute quant à la capacité même du citoyen à exercer un
jugement et alimenter le nécessaire débat d’opinions qui forge une société
vivante. C’est ainsi, subrepticement, que fleurissent les pires tyrannies. Le lecteur
protestant appréciera cet appel à la responsabilité individuelle et à l’esprit de
résistance contre cette nouvelle forme du syndrome de Stockholm qui nous voit
nous “exprimer avec les mots de nos maîtres, cependant que ces maîtres ne
survivent que dans leur docilité à nos passions”.

Sans la liberté, François Sureau, Gallimard, 64 p., 3,90 €.
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