Langues officielles: pour un aspect réparateur et une nouvelle diplomatie acadienne
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Langues officielles: pour un aspect réparateur et une nouvelle diplomatie acadienne Mémoire de la Société Nationale de l’Acadie présenté au Comité sénatorial permanent des langues officielles dans le cadre de la modernisation de la Loi sur les langues officielles du Canada Société Nationale de l’Acadie 224, rue St-George, Bureau 103 Moncton (Nouveau-Brunswick) E1C 0V1 Tél. : 506.853.0404 Courriel : info@snacadie.org Site internet : www.snacadie.org
Table des matières Introduction .............................................................................................................................. 4 Bref rappel des événements................................................................................................... 5 Sommaire exécutif du mémoire de la SNA «Langues officielles: pour un vrai contrat social» (2019) ........................................................................................................................... 6 Un aspect réparateur ............................................................................................................... 7 Diplomatie ouverte/culturelle ................................................................................................. 8 Conclusion.............................................................................................................................. 10
Introduction 1. La Société Nationale de l’Acadie (SNA) est une fédération à but non lucratif qui regroupe les quatre associations francophones porte-parole des provinces de l'Atlantique, ainsi que les quatre associations jeunesse. La SNA compte également des membres affiliés en Atlantique, au Maine, au Québec, en France et en Louisiane. Son mandat est de représenter le peuple acadien sur les scènes atlantique, nationale et internationale. 2. La SNA salue le travail accompli jusqu’à présent à l’égard d’une meilleure mise en œuvre de la Loi sur les langues officielles du Canada (LLO), notamment la partie VII. La SNA reconnaît que plusieurs membres et associations ont contribué à la réflexion sur la modernisation de la LLO en déposant des mémoires ou en intervenant devant les comités parlementaires au cours des dernières années. 3. En mai 2019, la SNA a dévoilé son mémoire sur la modernisation de la LLO, faisant état de recommandations de la part du peuple acadien. Avec ce mémoire, la SNA a voulu ajouter sa propre voix au concert d’améliorations possibles à considérer par le législateur. 4. Bien que le dépôt d’un projet de loi se fait toujours attendre, la ministre du Développement économique et des Langues officielles, Mme Mélanie Joly, a déposé en février 2021 un livre sur la modernisation de la LLO. 5. La SNA a pris acte du livre de la ministre et est satisfaite de constater que bon nombre de recommandations formulées dans son mémoire «Langues officielles: pour un vrai contrat social» (2019) ont été retenues. 6. La SNA remercie le Sénateur René Cormier et le Comité sénatorial permanent des langues officielles d’inviter l’organisme porte-parole officiel du peuple acadien à soumettre un mémoire afin d’alimenter le travail des parlementaires d’ici le dépôt du projet de loi gouvernemental modifiant la Loi sur les langues officielles prévues plus tard cette année. 7. Le présent document fait écho au mémoire que nous avons présenté en 2019. Nous tâcherons d’attirer l’attention des législateurs à deux aspects occultés par le livre, soit l’élément réparateur et de la diplomatie ouverte/culturelle.
Bref rappel des événements Voici un bref rappel des événements en lien avec l’effort de modernisation en cours de la LLO. ★ Avril 2017 - Le comité sénatorial permanent des langues officielles débute une étude et une série de consultations des communautés de langues officielles en vue de la modernisation de la LLO; ★ Mars 2018 - La Fédération des communautés francophones et acadienne présente son mémoire sur la modernisation de la LLO; ★ Avril 2018 - La Fédération acadienne de la Nouvelle-Écosse dépose son mémoire sur la modernisation de la LLO; ★ Avril 2018 - La Société de l’Acadie du Nouveau-Brunswick dépose son mémoire sur la modernisation de la LLO; ★ Juin 2018 - Le premier ministre Justin Trudeau s’engage à moderniser la LLO, précisant que cela serait fait avant les élections de septembre 2019; ★ Mai 2019 - La SNA présente son mémoire sur la modernisation de la LLO, «Langues officielles: pour un vrai contrat social»; ★ Juin 2019 - Le comité sénatorial permanent des langues officielles conclut ses consultations, présente son treizième et dernier rapport en lien avec la modernisation de la LLO et soumet ses recommandations au gouvernement fédéral; ★ Octobre 2019 - Le premier ministre Justin Trudeau affirme que la modernisation est réalisable d’ici avril 2020; ★ Juin 2020 - La ministre des langues officielles, Mme Mélanie Joly, déclare que son gouvernement ne modernisera pas la LLO avant 2021; ★ Février 2021 - La ministre des langues officielles du Canada dévoile son livre «Français et anglais: vers une égalité réelle des langues officielles»; ★ Mai 2021 - Le comité sénatorial permanent des langues officielles invite les parties prenantes à proposer des mémoires afin d’alimenter la réflexion des législateurs en vue du dépôt d’un projet de loi.
Sommaire exécutif du mémoire de la SNA «Langues officielles: pour un vrai contrat social» (2019)1 La SNA est d’avis que la modernisation de la LLO ne peut plus attendre. Après 50 ans de sa mise en œuvre, nous constatons que: Les communautés linguistiques vivant en situation minoritaire ne bénéficient pas de toutes les chances et des privilèges dont dispose la communauté linguistique majoritaire: 1. Certaines institutions fédérales font preuve de laxisme ou d’évitement face à leurs responsabilités prescrites par la législation en place; 2. Sans aspect coercitif, il n’y a aucun réel sentiment d’urgence pour les institutions fédérales à mettre en oeuvre leurs obligations en vertu de la LLO; 3. La LLO ne tient pas compte des retards historiques causés par le traitement inégal des deux communautés de langues officielles; 4. Il revient toujours aux minorités de langues officielles de faire respecter leurs droits, ce qui les dissuade de les revendiquer pleinement; 5. L’absence de marqueurs de performances nuit à l’avancement et à l’orientation de l’approche des institutions fédérales. Ainsi, une LLO modernisée viendra s’appuyer sur ces 6 positions claires de la SNA: 1. La LLO sera la pierre angulaire du contrat social canadien; 2. La LLO sera claire et spécifique dans les obligations qu’elle prescrit; 3. La LLO comportera des mesures coercitives pour être pleinement respectée; 4. La LLO comprendra un aspect réparateur; 5. La LLO permettra une interprétation généreuse des droits des communautés de langues officielles; 6. La LLO établira et fera respecter des cibles précises. La LLO doit être modernisée. Ce contrat social doit être affirmé pour que sa fondation puisse faire foisonner le vivre ensemble des collectivités qui ont fondé et bâti ce pays. En élargissant la portée des droits que cette loi confère, le Canada contribuera pleinement au rapprochement et au dialogue entre les communautés de langue officielle. Reconnaissons aux communautés de langues officielles du Canada le droit d’être traitées d’égal face aux institutions de leur pays. 1 Langues officielles: pour un vrai contrat social, Société Nationale de l’Acadie (2019) https://snacadie.org/images/PDF/4.3.4_-_Memoire_SNA_LLO_2019.pdf
Un aspect réparateur 8. Comme nous l’avions souligné dans notre mémoire, la LLO doit s’assurer de tenir compte des torts historiques et des défis actuels du milieu minoritaire. Depuis son instauration, la LLO n’a pas été appliquée de manière constante et égale au sein de l’appareil fédéral, créant des iniquités entre communautés de langues officielles qui se sont accentuées au fil des années. 9. De la même façon que la Cour suprême a reconnu le principe réparateur en matière de droits scolaires dans les causes Mahé c. Alberta et dans Arsenault-Cameron c. Île-du-Prince-Édouard, les institutions fédérales doivent redoubler d’efforts pour rattraper le temps perdu, s’il y a lieu, dans leurs champs d’intervention. 10. L’inaction d’une institution fédérale, qui a pour effet d’accentuer le problème ou de creuser l’écart entre les ambitions des communautés et les idéaux de vitalité et d’épanouissement, ne doit pas lui permettre de s’esquiver ou de s'acheter du temps. Un programme national qui a exclu ou complètement fait fi de la réalité communautaire depuis 10 ans doit non seulement rectifier le tir, mais aussi appuyer davantage les communautés afin de rattraper le retard occasionné. 11. Si l’institution n’avait pas failli à la tâche d’entrée de jeu, les disparités entre la communauté minoritaire et la majorité seraient moindres. L’égalité de statut, de droit et de privilège signifie que les communautés linguistiques ont droit en même temps, dans leur langue ou pour la vitalité de leur communauté, aux mêmes bénéfices dont profitent le reste des Canadiens. 12. La proposition de réforme des langues officielles présentée par la ministre Joly identifie l’égalité réelle comme l’un des piliers de la réforme. Nous estimons qu’il faudrait y ajouter l’aspect réparateur et l’aspect quasi constitutionnel de cette loi fondamentale.
Diplomatie ouverte/culturelle 13. La diplomatie culturelle, ou plus largement la démocratie ouverte, est un axe qui a été malheureusement négligé depuis trop longtemps par Ottawa et qui s’avère de la plus grande importance pour le peuple acadien, ses industries culturelles et artistiques et leur rayonnement à l’international. Le cheminement international du peuple acadien montre la voie à suivre pour le renouvellement de la politique de démocratie culturelle au Canada. 14. Comme fer de lance de la diplomatie publique, à laquelle participent intégralement les créateurs, la société civile et les peuples de la diversité canadienne, la diplomatie culturelle peut être définie comme « une approche qui utilise l’échange des idées, des valeurs, des traditions et d’autres aspects de la culture ou de l’identité » pour promouvoir les intérêts nationaux. Intégrée stratégiquement et systématiquement à la politique étrangère canadienne, « la culture peut servir à influencer l’opinion publique étrangère et, par le fait même, à obtenir l’appui à l’égard des politiques étrangères d’un pays. »* C’est donc une composante plus subtile, mais non moins cruciale et transversale, de la diplomatie. 15. Or, ni l’Acadie, ni le Canada ne sont étrangers à la diplomatie culturelle. Avec un peu de recul, il est même évident que nous en avons beaucoup tiré profit, notamment pour créer et entretenir des partenariats, bâtir notre réputation et promouvoir nos produits et nos intérêts culturels, certes, mais aussi politiques et commerciaux, sur la scène internationale. 16. La diplomatie culturelle se trouve à l’épicentre du projet national acadien depuis un siècle et demi. C’est en tissant des liens avec la francophonie, notamment le Québec, la France et la Francophonie internationale que nous sommes affirmés comme peuple à l’intérieur de la fédération canadienne et que nous nous sommes projetés collectivement sur la scène internationale dès les années 1960, au moyen d’ententes d’échanges et de collaboration dans les domaines universitaire, professionnel et artistique nous avons consolidé notre présence internationale. Plus récemment, les 25 dernières années ont donné lieu à des progrès formidables : soulignons les cinq éditions du Congrès mondial acadien, créé en 1994 ; l’établissement de partenariats entre la SNA et la Louisiane, le Québec, Saint-Pierre et Miquelon et la Belgique ; l’adhésion de la SNA à l’Organisation internationale de la Francophonie ; enfin la création de la Stratégie de promotion des artistes acadiens sur la scène internationale (SPAASI) et de l’Office de la mobilité international en Acadie (OMIA). La diplomatie culturelle, c’est la pierre angulaire de notre place dans le monde et de nos rapports avec celui-ci.
17. Plus important encore, l’internationalisation de l’Acadie contemporaine coïncidait avec le tournant culturel de la diplomatie canadienne. Il fut une époque, de 1995 à 2005, où les valeurs et la culture constituaient l’un des trois piliers de la politique étrangère du Canada, aux côtés de la croissance économique ainsi que de la paix et de la stabilité mondiales. L’année 2005 marque toutefois le début du déclin de la diplomatie culturelle canadienne. Des projets jusqu’alors financés par Ottawa, comme Routes commerciales et le Programme de diplomatie ouverte (PDO), ont été abolis. 18. Il nous semble aussi que cette forme de diplomatie repose essentiellement sur deux bases complémentaires : d’une part l’ouverture à ces pratiques des instances canadiennes, dont les Affaires mondiales et les ambassades et l’appui gouvernemental à la société civile, peuples et premières nations composant la diversité canadienne. Conséquemment, il doit aussi s’instaurer entre le gouvernement, la société civile et le milieu culturel des pratiques collaboratives vouées au développement culturel international. Enfin, il y aurait lieu d’instituer de nouveaux partenariats entre Patrimoine Canada et Affaires mondiales Canada, afin d’appuyer ces démarches. 19. Enfin, c’est dans sa mise en œuvre que l’on pourra juger de l’efficacité de la réforme, avec la participation effective des différents ministères. Ce ne sont pas les seuls, mais les ministères de Patrimoine canadien et des Affaires mondiales peuvent appuyer les communautés de langue officielle par le redéploiement d’une politique de diplomatie culturelle.
Conclusion Nous vivons dans une société de droit. Lorsqu’une loi est adoptée par une assemblée démocratiquement élue, elle gouverne la société en établissant des balises et des règles. Une loi peut être vue comme le sommet d’une pyramide qui exprime l’intention politique et administrative d’une société libre et démocratique. Cette loi doit être pleinement respectée, tant par les citoyens que par les administrations publiques qui les mettent en œuvre. De par le titre même du livre2 de la ministre du Développement économique et des Langues officielles, le gouvernement fédéral reconnaît également une iniquité à être corrigée entre les communautés de langues officielles. L’intention de la LLO à sa création en 1968 était-elle d’assurer une équité entre les communautés de langues officielles? Nous estimons que oui, mais ces efforts ont été minés jusqu’à présent par l’inaction de l’appareil fédéral, ignorant délibérément, largement et de manière disproportionnée, l’application de cette loi quasi constitutionnelle, permettant l’exacerbation de ces iniquités sur plusieurs décennies. Nous ne pouvons prétendre moderniser la LLO sans tenir compte de ces faits et de son intention initiale. Cette modernisation doit contenir des éléments réparateurs à l’intention des communautés francophones en milieu minoritaire. Les Acadiens et Acadiennes ont été très patients face au processus de modernisation de la LLO. L’urgence de cette modernisation a été soulignée à maintes reprises, ce mémoire en étant la plus récente expression. Nous attendons maintenant le dépôt d’un projet de loi: il est temps d’agir. 2 Français et anglais: vers une égalité réelle des langues officielles au Canada, Patrimoine canadien https://www.canada.ca/content/dam/pch/documents/campaigns/canadians-official-languages-act/lo-fr- 2021.pdf
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