Les nanotechnologies et les risques de santé

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Les nanotechnologies et les risques de santé
Ci-après Extraits conséquents du mémoire de stage de Marie-Claire
Tchangna, diplômée en maîtrise de droit public et qui a effectué son stage Master II en
Droit de la Santé au Réseau Santé-Environnement de France Nature Environnement.
Son rapport a été finalisé fin août 2008.
                                 José Cambou, Pilote du Réseau Santé-Environnement de FNE

Université de Toulouse I sciences sociales                      Année universitaire 2007-2008
UFR Droit 2, rue du doyen G. Marty,

31042 Toulouse

              Les nanotechnologies et
                       les risques de santé

Mémoire présenté en vue de l’obtention du Master II en Droit de la Santé par :

                        Marie-Claire TCHANGNA

Sous la direction de    Jean-Marie CROUZATIER

                                                                                           1
Sommaire

1 – Introduction

2 – Définition et application des nanotechnologies

      2.1 – Définition des nanotechnologies et types de nanoparticules

      2.2 – Les applications des nanotechnologies

3 – Les impacts sanitaires directs et différés des nanotechnologies et les
questions d’éthique

      3.1 – Sphère toxicologique et risques sanitaires des nanotechnologies

      3.2 – Sphère écotoxicologique des nanoparticules et risques
      environnementaux

      3.3 – Les nanotechnologies et la question d’éthique

4 – Réglementation et institution actuelles en nanotechnologie : quelle
efficacité ?

      4.1 – Les aspects réglementaires et juridique en nanotechnologies

      4.2 – L’insuffisance du droit positif en nanotechnologies et la nécessité
      d’une adaptation de ce droit pour combler les lacunes juridiques et
      complémentaires

5 – Conclusion

6 – Références documentaires

7 – Annexe : transparents utilisés lors d’une conférence « Les nanos,
une chance, un risque ? » 23/06/2008

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1- INRODUCTION

[…] Les nanotechnologies représentent un enjeu économique majeur et tous les pays
développés y investissent des sommes de plus en plus importantes. Alors que certaines
applications sont déjà sur le marché, les risques associés à ces nouvelles technologies et
aux nouveaux produits qu'elles génèrent sont encore mal connus.
Beaucoup de questions se posent sur l'impact environnemental des processus de
production, sur les problèmes de transport, de stockage et de cycle de vie des
nanomatériaux, peu de données sont disponibles sur leur interaction avec les systèmes
vivants, de sorte qu'il est difficile d'évaluer aujourd'hui le danger potentiel qu'ils
représentent pour la santé humaine.
Le monde des nanosciences et des nanotechnologies - le « nanomonde » - recouvre les
objets de taille nanométrique dont certains phénomènes et effets sont inattendus. Ces
spécificités leur ouvrent un large éventail d’applications et même si certaines sont déjà
autour de nous, leur potentiel de développement est considérable. Les nanotechnologies
consistent à produire et utiliser des éléments à l’échelle du nanomètre – le milliardième
de mètre, soit l’équivalent de ce qu’est un grain de riz pour la terre-, une échelle où leurs
propriétés physicochimiques sont très différentes de celles connues à l’échelle métrique.
Elles constituent ainsi une rupture technologique majeure et sont à l’origine des
innovations spectaculaires      dans plusieurs domaines dont celui de la santé. Les
nanotechnologies et les nanoparticules sont considérées comme l’objet de la prochaine
révolution industrielle ; la recherche y est en très forte croissance et tous les pays
industrialisés y voient la possibilité de développement et des applications dans une
multitude de domaines ainsi que des retombées économiques potentielles colossales. Ce
nanomonde ou encore monde de l’infiniment petit qui s’ouvre est riche de promesses et
de marché. Plusieurs pays dans le monde entier (USA, Japon, les pays d’Europe. . .) ont
lancé des programmes importants de développement et certaines entreprises utilisent
déjà les nanotechnologies- elles sortent progressivement des laboratoires pour rentrer
dans les usines et chez les consommateurs-. Mais, les nanoparticules que ces produits
pourraient rejeter à court ou à long terme dans le corps humain ou dans l’environnement
soulèvent des craintes importantes : leur taille passe-partout        (aucun filtre usuel de
notre corps humain ne pourrait les arrêter) et leur forte réactivité chimique potentielle
font craindre des diffusions incontrôlées et des toxicités non anticipées ;les
nanoparticules démontrent des propriétés chimiques et physiques très importantes, d’où
la nécessité de savoir quels sont leurs propriétés biologiques et les interactions avec le
corps humain ? Autrement dit, quels sont les impacts des nanotechnologies sur la santé
humaine ?
Malheureusement, une très faible proportion des recherches sur les nanoparticules
s’intéresse à leurs risques pour la santé de la population générale. Or, les applications
ont d’ores et déjà des incidences dans la vie de la population en générale, d’où la
question de savoir quelle jurisprudence et quelle réglementation s’appliquent dans le
cadre des nanotechnologies à l’heure actuel et quels sont les mesures de vigilance et de
surveillance mises en œuvre pour protéger la population générale des éventuels risques
de santé liés aux nanotechnologies ? Autrement dit, Compte tenu de la réalité effective
des nanos dans nos vies quotidienne actuelles, quels encadrements                juridique et
réglementaire aujourd’hui s’appliquent aux nanotechnologies et dans quelle mesure leur
efficacité est-elle réelle ?
[…]
Les nanotechnologies sont au croisement de plusieurs disciplines scientifiques et sont
source de controverse, et les application des nanotechnologies dans les différents
domaines sont à l’origine des effets directs et différés des nanoparticules sur la santé,
d’où la nécessité de définir les nanotechnologies et leurs champs d’application, de
déterminer les impacts de ces nanotechnologies sur la santé, et enfin d’étudier les règles
législatives et réglementaires qui encadrent cette nouvelle technologies afin d’en
déterminer l’efficacité.
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2 -     DEFINITION ET APPLICATIONS DES NANOTECHNOLOGIES

Le développement des sciences nous a amenés à un point de convergence où les
technologies de pointe sont à l’étape de la manipulation d’atomes et de molécules
individuels. Alors que la définition même des nanotechnologies est encore ambiguë
dans l’esprit de la grande majorité de la population générale, ses applications sont déjà
multiples et de grandes envergures dans le monde actuel. Ses domaines d’applications
s’accroissent au fil des jours et peuvent causer un changement radical réel dans la vie
quotidienne des hommes.          Pour comprendre l’influence que pourraient avoir ces
nouvelles technologies dans nos vies, il est primordial de bien cerner le concept de
« nanotechnologies » et d’en déterminer ses différentes applications.

    - DEFINITION DES NANOTECHNOLOGIES ET TYPES DE NANOPARTICULES

Les nanotechnologies constituent un très vaste domaine d’application, or les
nanoparticules ont des propriétés spécifiques dont la maîtrise n’est pas encore affirmée ni
par les chercheurs scientifiques, ni par les utilisateurs de celles-ci. Il serait nécessaire de
bien cerner les contours des nanotechnologies pour une bonne appréhension des
spécificités que représentent les nanoparticules.

2.1.1 – Qu’est ce que les nanotechnologies ?
Déjà utilisée dans plusieurs secteurs industriels – construction, électronique, transport,
pharmacie et cosmétique, agriculture, médecine…- une technologie émergente             se
propose de régler le problème de la pollution, soigner le cancer, sauver le monde de la
crise énergétique obtenir des ordinateurs surpuissants... : les nanotechnologies ; qu’en
est-il exactement ?

2.1.1.1 – Historique et définition

Le terme nanotechnologie fut utilisé, la première fois en 1974, par Norio Tanigushi. Il fut
toutefois popularisé par K. Eric Drexler dans les années 80, lorsque celui-ci introduisit le
terme « manufacture moléculaire ». Richard Feynman a été le premier scientifique à
avancer l’idée qu’il serait bientôt possible, pour l’homme, de transformer la matière au
niveau atomique.
Le terme nano (du grec nanos qui signifie « nain ») est un préfixe, qui placé devant une
unité la divise par le facteur 10-9. Un nanomètre correspond donc à un milliardième de
mètre ; en pratique, il indique une petitesse extrême à tel point d’ailleurs qu’une
nanostructure doit être agrandie plus de 10million de fois avant que nous puissions
apprécier aisément ses détails minutieux à l’œil nu.
On peut donc définir les nanotechnologies comme étant la création et l’utilisation de
matériaux, d’instruments et de systèmes portant sur la matière de l’ordre d’1 à 100
nanomètres. Les nanotechnologies désignent des disciplines où la matière est manipulée
à l’échelle atomique et moléculaire pour créer de nouveaux matériaux et procédés. Ce
n’est pas simplement l’étude de l’infiniment petit, c’est l’application pratique de ces
connaissances. Il y a deux chemins qui mènent au nanomonde : la fabrication
moléculaire, qui passe par la manipulation d’atomes individuels (construction à partir de
la base), et l’ultra miniaturisation, qui produit des systèmes de plus en plus petits.
Les nanomatériaux sont des matériaux composés ou constitués de nanoparticules. Une
nanoparticule quant à elle est un assemblage de quelques centaines à quelque milliers
d’atomes, conduisant à un objet dont au moins l’une de ses dimensions est de taille
nanométrique (1à 100nm).

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Il existe des nanoparticules produites par des processus naturels appelées en général
particules ultra fines (provenant des combustions diverses), mais les nanotechnologies
font appel aux nanoparticules intentionnellement produites par l’homme.

2.1.1.2 – La diversité des nanoparticules

Il existe une multitude de nanoparticules ; des nanoparticules naturelles et celles
intentionnellement produites par l’homme, à cause de leurs multiples usages et de leur
dégradation, on les retrouve dans l’environnement et même dans le corps humain.

Les nanoparticules d’origine naturelle et / ou anthropique
Elles   se retrouvent mélangées dans l’atmosphère. Celles-ci, appelées en général
particules ultrafines, proviennent de combustions diverses, la plupart d’origine
anthropique ou de réactions entre composés gazeux (réactions gaz/solide) avec par
exemple formation de chlorure d’ammonium (suite à la réaction entre l’acide
chlorhydrique et l’ammoniac), de sulfates, de nitrates, de constituants organiques, etc.
Les nanoparticules atmosphériques correspondent en général à un aérosol avec un
spectre granulométrique étendu, qui déborde celui des nanoparticules, qui constituent la
partie inférieure du spectre. Les virus qui se trouvent à l’origine dans le domaine des
nanoparticules, sont fixés sur d’autres particules en général plus grosses. Le dépôt actif
du radon (ou de gaz de fission) a fait l’objet de nombreuses études en liaison avec la
radioprotection dans les mines d’uranium. Non fixé sur l’aérosol atmosphérique, il
correspond à des particules d’environ 1,5 nm.
Les nanoparticules, appelées il y a encore quelques années particules ultra fines,
constituent une grande partie de l’aérosol atmosphérique, lorsque la concentration est
mesurée en nombre par unité de volume. Elles se forment lors des combustions, la
proportion de nanoparticules dépendant de la nature et la qualité de la combustion.
Une combustion complète du carbone donne essentiellement du gaz carbonique. Les
particules émises lors des combustions sont constituées de carbone non brûlé, mais aussi
des impuretés du combustible. Les moteurs Diesel, la combustion de la biomasse, la
fumée de cigarette ont ainsi une part importante, mais variable, des particules émises
dans le domaine des nanoparticules.

Les réactions “gaz solide” qui sont des réactions chimiques ou photochimiques entre gaz,
avec un produit des réactions sous forme particulaire, donnent majoritairement des
particules dans le domaine des nanoparticules. Ces réactions se produisent dans
l’atmosphère avec des gaz d’origine naturelle, comme les terpènes ou l’isoprène, des
composés du soufre, etc., ou avec des gaz provenant des émissions anthropiques
comme le dioxyde de soufre qui donne des sulfates, les oxydes d’azote des nitrates, etc.
On peut ajouter à cette catégorie le dépôt actif de gaz radioactif comme le radon qui, non
fixé, donne des particules de l’ordre du nanomètre.
Les nanoparticules peuvent aussi se former par condensation d’une vapeur. La dimension
des particules formées dépend de la super saturation de la vapeur. Des sels comme le
chlorure de sodium, les métaux, des oxydes métalliques, chauffés à des températures de
quelques centaines de degrés ont été largement utilisés comme générateurs d’aérosols
ultrafins, avec des dimensions de particules recouvrant l’ensemble du domaine des
nanoparticules, c’est-à-dire entre 1 et 100 nm.
Les nanoparticules ont aussi été obtenues par pulvérisation d’une solution liquide d’un sel
puis évaporation du liquide des particules.
Les nanoparticules se forment donc de façon fréquente dans notre environnement, de
façon naturelle ou consécutivement aux actions humaines. La fabrication de
nanoparticules a été largement utilisée pour l’étude expérimentale des particules
d’aérosol et la vérification des théories.

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Les nanoparticules manufacturées provenant des nanotechnologies
Elles correspondent en général, au départ, à des particules dont le spectre est mono
dispersé, c’est-à-dire centré sur une dimension avec une dispersion faible. Selon leur
nature et leur forme on distingue différentes catégories de nanoparticules
manufacturées :
   -    Nanoparticules manufacturées (ou intentionnelles) :     Nano objets de forme et
taille contrôlées conçus pour remplir une fonction (ex. : les dendrimères, polymère de
structure bien définie).
     - Métaux, semi-conducteurs, oxydes métalliques, carbone, polymères composites.
Céramiques, nanosphères, fils, aiguilles, tubes, enveloppes, anneaux, plaquettes (ex. :
nanotubes de carbone)
      - Molécules (fullerènes) et complexes : Agrégats moléculaires ou atomiques non
traités ou enrobés (nanotechnologie appliquée à de nombreux produits : cosmétiques,
médicaments, textiles, électronique, optique, afficheurs, etc.…) : matériaux
nanostructurés ; matériaux mésoporeux (zéolites artificielles) ; nanomatériaux greffés ;
nanomatériaux interactifs (ou intelligents).
 Quelle que soit leur origine, les nanoparticules présentent des propriétés physiques
communes qui dépendent notamment de leurs dimensions.

2.1.1.3 – Les principaux secteurs du nanomonde (ou champ d’application des
nanos) actuellement

Alors que les chercheurs s’investissent encore à comprendre les possibles réactions des
nanoparticules, les nanotechnologies ont déjà un impact sur la santé des personnes et de
l’environnement dans des domaines aussi divers que les nouveaux aliments, les
instruments médicaux, les revêtements chimiques, les kits personnels de test médical,
les capteurs des systèmes de sécurité, les unités de recyclage de l’eau pour les vols
spatiaux habités, les consoles de jeux vidéo et les écrans de cinéma à haute résolution.
Elles sont également présentes dans des objets usuels comme des vêtements, des
produits cosmétiques et des crèmes solaires. On distingue actuellement trois secteurs
principaux dans le nanomonde :
    • La nanoélectronique. Elle s’inscrit dans le prolongement de la microélectronique,
        plus particulièrement pour les ordinateurs, mais à des échelles nettement plus
        petites. Le marché mondial de la nanoélectronique représente des centaines de
        milliards d’euros et cette industrie est la force vive qui anime aujourd’hui le
        développement des nanotechnologies. La nanoélectronique permet de créer des
        ordinateurs et des transistors beaucoup plus puissants, utilisables en téléphonie,
        dans les voitures, les appareils électroménagers et la multitude d’autres
        applications industrielles ou grand public actuellement contrôlées par des
        microprocesseurs.
    • La nanobiotechnologie. Elle combine l’ingénierie nanométrique et la biologie pour
        manipuler des organismes vivants ou construire des matériaux inspirés des
        systèmes moléculaires biologiques. Ces systèmes combinés fourniront des
        biocapteurs, des biomatériaux et de nouvelles générations de biopuces1* pour
        traiter des maladies graves, notamment le cancer et les pathologies cardiaques.
        Ces systèmes produits par l’ingénierie biologique, sous forme d’implants,
        permettront d’administrer des médicaments intelligents ou d’introduire de
        nouvelles cellules pour réparer les tissus endommagés.
    • Les nanomatériaux. Il s’agit de contrôler précisément, aux dimensions
        nanométriques, la morphologie de substances ou particules en vue de construire
        des matériaux nanostructurés. La fabrication de nanostructures produit des
        matériaux aux propriétés nouvelles ou perfectionnées qui servent à fabriquer des
        panneaux solaires, des revêtements anticorrosion, des outils plus durs et plus

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    Désigne un processeur qui peut repérer l'ADN grâce à une sonde.

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résistants, des purificateurs d’air photocatalytiques, des instruments médicaux
        plus durables, des catalyseurs chimiques et des composants pour l’industrie des
        transports. En outre, de nouveaux matériaux seront disponibles pour des produits
        et des applications optiques, électroniques ou encore pour le stockage d’énergie
Dans tous ces domaines de recherche, qui se recouvrent partiellement, on retrouve les
mêmes outils utilisés pour mesurer et manipuler des structures "ultra petites", les
microscopes à résolution nanométrique ; et les nanoparticules sont différemment
utilisées de part et d’autre ; néanmoins, celles-ci présentent des spécificités particulières
dont les applications pourraient être dangereuses pour la santé humaine et
l’environnement dans lequel nous vivons.

2.1.2 – Spécificités des nanoparticules manufacturées

Les nanoparticules manufacturées ont des mécanismes                  de biodégradation,
bioaccumulation et des effets mutagènes ; ce qui les rend uniques de ce fait à cause de
leur grande surface spécifique, de leur grande réactivité de surface. Les propriétés sont
donc différentes à l’échelle nanométrique par rapport à l’échelle macro métrique, d’où le
problème de leurs effets sur la santé de l’homme.

2.1.2.1 – Définitions et origine des nanoparticules

Une nanoparticule est un corps ayant une dimension de l'ordre de 100nm ou moins »
Propriétés uniques qui différencient les nanoparticules des matériaux d'origine,
typiquement développés à une échelle critique de 100nm ». Les « nouvelles propriétés »
mentionnées sont entièrement dépendantes du fait qu'à l'échelle des nanoparticules, les
attributs physiques de celles-ci sont différents des propriétés du matériau d'origine. Ceci
implique que les attributs les plus importants définissant leurs caractéristiques sont la
taille de ces dites particules. [...] Les définitions deviennent assurément plus difficiles
pour les matériaux qui ne sont pas semblables à des sphères, comme les nanotubes de
carbone par exemple. L'un des buts à atteindre sur ces matériaux et de les transformer
en longs tubes ; loin de l'échelle des nanoparticules en longueur, ils ont un diamètre de
l'ordre de 3nm pour un tube renforcé, ils ont donc des propriétés qui les distinguent des
autres allotropes de carbone et peuvent dans ce cas être considérés comme des
nanomatériaux. [...]

2.1.2.2 – Les propriétés particulières des nanomatériaux et des nanoparticules
et leurs utilisations

Etant donné que les nanomatériaux et les nanoparticules sont tellement petits, ils
disposent d’une surface de contact relativement grande à l’égard de leur volume. Cela
fait que les nanomatériaux et les nanoparticules sont particulièrement réactifs. Les
nanomatériaux et les nanoparticules possèdent des propriétés chimiques et de surface
particulières.
Dans les nanomatériaux et les nanoparticules, des phénomènes quantiques dominent les
propriétés des matériaux. De ce fait, les nanomatériaux et les nanoparticules ne suivent
pas les lois de la mécanique classique, mais plutôt celles de la mécanique quantique. Le
terme « quantique » indique que ces matériaux et particules peuvent uniquement
échanger de l’énergie dans des quantités déterminées. Cela influence beaucoup leurs
propriétés optiques, électriques et magnétiques, ce qui fait que ces matériaux diffèrent
dans une grande mesure des matériaux avec la même composition chimique, mais de
plus grandes dimensions
A cause de ces spécificités, des développements prometteurs dans les nanosciences et la
nanotechnologie suscitent de grandes attentes au sein de différents secteurs tels que la
médecine, l’agriculture, l’industrie, l’alimentation et la technologie de l’environnement.

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- LES APPLICATIONS DES NANOTECHNOLOGIES

Le monde des nanotechnologies s'ouvre à nous en-dessous de 100 nanomètres, soit
cinquante mille fois moins que l'épaisseur d'un cheveu. À cette échelle, les matériaux ont
des propriétés particulières. Cela ouvre grand les portes à de nouvelles applications, mais
aussi à de nouvelles menaces. Les nanotechnologies représentent vraisemblablement le
nerf de la prochaine révolution technologique. En émergence depuis la fin des années 90,
leurs percées vont bouleverser tous les champs technologiques et scientifiques. Les
nanotechnologies et les nanosciences ont la particularité scientifique par rapport aux
autres champs que celles-ci opèrent à des dimensions nanométriques, où la matière que
l’on manipule présente de nouvelles propriétés jusqu’alors inutilisées. […]

2.2.1 – La nature pluridimensionnelle des nanotechnologies

Malgré l’insuffisance des recherches sur les risques que constituent les nanotechnologies,
celles-ci s’appliquent aussi bien dans le secteur industriel que thérapeutique. […]

2.2.1.1 - Les applications industrielles des nanotechnologies

Au niveau industriel, elles sont présentes dans l’agroalimentaire, dans le textile et dans
l’aéronautique, les produits d’usage quotidien sont de plus en plus incorporés de nanos
La Commission européenne définit les nanoaliments (“nanofood”) comme tout aliment
où les nanotechnologies ont été utilisées pour la culture, la production, le traitement ou
le conditionnement, (ce qui ne signifie pas qu’il s’agisse d’aliments modifiés à l’échelle
atomique, ou produits par des nanomachines). L’ensemble de la chaîne agroalimentaire
serait concernée : de la culture des végétaux au conditionnement et à l’absorption des
aliments en passant, bien évidemment, par l’élevage des animaux.
En agriculture, les promoteurs des nanotechnologies prétendent réduire l'utilisation de
pesticides et l'amélioration des cultures et de l'élevage. Une étude récente faite par
Cientifica montre qu'il y a déjà 150 applications des nanotechnologies dans l'industrie
agroalimentaire, principalement dans les grands groupes tels que : Nestlé, Kraft, Heinz et
Unilever. Avec les applications des nanotechnologies émergentes, les aliments sont de
plus en plus conditionnés dans des emballages "futés" et pourraient détecter les
éventuelles détériorations et la présence de contaminants pathogènes. Des possibilités
d’ajustement de la couleur, de la saveur ou des apports nutritionnels en fonction du goût
de chaque consommateur. […]
Les nanocomposites tels que les bouteilles de bière composées de nanoparticules de
nano-argile plus légère et plus résistantes qui réduiraient la perte du CO2 contenu dans
la bière et les emballages alimentaires composés de nanoparticules sont aussi des
exemple concrets d’application des nanotechnologies dans l’agroalimentaire.
Les nano-gestion de la production agricole avec l’utilisation des puces injectables pour
assurer le suivi des animaux et les nanocapteurs et dispositifs d’administration de
médicament pour les animaux font de l’industrie agroalimentaire un secteur de
développement des nanotechnologies. Le nombre de ces produits sur le marché en
France     reste pour l'instant relativement faible, mais des grosses industries
agroalimentaires dépensent de plus en plus d'argent pour la recherche et le
développement des applications aux procédés agroalimentaires, la sécurité alimentaire et
les emballages. Malgré les dangers potentiels de             toutes ces applications les
nanotechnologies s’étendent aussi dans l’industrie du textile et des produits d’usage
quotidien.

De plus en plus, la population est exposée aux nanos ; l’utilisation d’éléments 10 000 fois
plus petits qu’une fibre normale, permettent la confection de nouveaux matériaux et de
nouvelles structures offrant des propriétés physiques, chimiques et biologiques nouvelles
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- couleur, force, résistance, chaleur, conductivité, réactivité chimique – et tout ceci de
retrouve dans les produits de première nécessité utilisés par l’homme.

Dans le domaine du textile, les nanotechnologies permettent de modifier les procédés de
fabrication et les produits industriels. Les nanofibrilles utilisées dans le domaine du textile
sont dix fois plus petites en diamètre que les fibres textiles traditionnelles. Ces
nanofibrilles procurent de nouvelles propriétés au tissu. […]

L’électronique est un secteur où l’échelle nanométrique est l’étape suivante dans le
domaine de l’infiniment petit, domaine de cette industrie. […]

Dans le cadre de l’environnement, on pourra éventuellement fabriquer des membranes
de filtration nanométriques, auxquelles on peut donner des propriétés chimiques
particulières (oxydantes par exemple). L’application visée est la purification de l’eau.
L’autre application phare pour l’environnement, mais aussi pour la chimie, est
l’amélioration des procédés de catalyse des réactions chimiques. […]

Bien que les risques liés aux nanos soient réels, les applications des nanotechnologies
dans le domaine industriel sont très diversifiées et en pleine expansion, elles s’étendent
aussi dans d’autres domaines comme le domaine thérapeutique.

2.2.1.2 – Les applications thérapeutiques et médicales des nanotechnologies

Les applications des nanotechnologies dans le domaine thérapeutiques sont en pleine
expansion même s’il est clair que beaucoup de questions restent sans réponses quant
aux impacts des nanos sur la santé humaine. Au niveau des soins de santé les
applications des nanotechnologies sont observables par les nouveaux médicaments
basés sur des nanostructures, des systèmes de diffusion des médicaments qui ciblent des
endroits précis dans le corps, des matériaux de remplacement biocompatibles avec les
organes et des fluides humains, des kits d’autodiagnostic pouvant être utilisés à domicile,
des senseurs pour des laboratoires tenant sur une puce, et des matériaux pour la
régénération des os et des tissus. […]

2.2.2 – Les formes existantes de nanoparticules

La diversité des applications des nanotechnologies explique l’existence de plusieurs
formes existantes de nanoparticules. Bien que les nanotechnologies portent sur les
nanoparticules intentionnellement produites (nanoparticules manufacturées), il existe
d’autres nanoparticules produites soit par des processus naturels soit à l’occasion
d’activités d’origine humaine.
     L’ensemble des nanoparticules peut se décrire en fonction de différents paramètres :
  • leurs sources (naturelles et/ou anthropiques),
  • leurs dimensions et leurs formes,
  • leur composition chimique (particules carbonées, particules organiques, sulfates,
nitrates, particules métalliques ou céramiques, polymères et autres).
[…]
La mise en circulation des nanoparticules dans l’environnement
La diffusion de nanoparticules manufacturées dans l’environnement contribue à la
pollution de cet environnement dans lequel on vit. Le cycle de vie des nanomatériaux est
peu connu puisque qu’on a aucune donnée sur le mode de dégradation de ceux-ci, ils
constituent un danger permanent pour la santé de l’homme ; la possible mutation des
nanoparticules augmente aussi les incertitudes et met la population générale dans un
état d’insécurité.

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Les      nanoparticules  d'oxyde de titane (TiO2)        utilisées dans les matériaux de
    construction comme des peintures autonettoyantes et aussi les filtres solaires physiques
    dans les cosmétiques se retrouvent dans les eaux de ruissellement. Ces nanoparticules
    sont du fait de la dégradation ou du lessivage. On les trouve en effet en quantités
    relativement élevées dans les eaux usées des façades et elles parviennent à travers les
    canalisations dans les eaux de surface où elles sont fortement diluées et donc fort
    difficilement décelables. C’est le cas des textiles anti odeur et anti transpirant vendus
    dès à présent […], au cours des lavages ces tissus laissent s’échapper des nanoparticules
    utilisées lors de la fabrication qu’on retrouve ainsi dans l’environnement via les eaux
    usées.
    L’utilisation des crèmes solaires contenant du dioxyde de titane est également un mode
    de diffusion des nanoparticules dans l’environnement car ces crèmes (qui ne restent pas
    à l’infini sur les peaux des personnes qui les utilisent) se retrouvent après une toilette
    dans le cycle de l’eau. Par de diverses voies les nanoparticules se retrouvent donc dans
    l’environnement. […]

3        -   LES IMPACTS           SANITAIRES DIRECTS ET DIFFERES DES

         NANOTECHNOLOGIES ET LES QUESIONS D’ETHIQUE

    Après l’utilisation des produits contenant des nanoparticules, celles-ci se retrouvent dans
    les déchets. C’est le cas des emballages alimentaires fabriqués avec des nanoparticules
    «pour conserver les aliments pendant une longue durée » qui après sont retrouvées
    dans les sacs poubelles au même titre que tout autre déchet alimentaire.
    Les nanoparticules utilisées pour la fabrication des bouteilles plastiques plus légères
    contenant des boissons (bouteilles de bière par exemple), vidées de leur contenu après
    consommation sont jusqu’à présent traitées comme des déchets ordinaires. Plusieurs
    nanoparticules utilisées pour des produits domestiques sont ainsi contenues dans des
    déchets et traitées comme telle.
    Même si les nanotechnologies représentent un enjeu considérable sur le plan économique
    et social et des bénéfices attendus notamment en matière de santé et de protection de
    l’environnement, l’émergence de ces technologies soulève des interrogations fondées au
    sujet de leur impact sur la santé.
    L’exposition aux nanoparticules a, certes, toujours existé. L’air que nous respirons
    contient des quantités très importantes de particules ultrafines naturelles, cependant,
    l’industrialisation des nanotechnologies change la donne puisqu’une très grande quantité
    de nanofibres et de nanoparticules aux propriétés physico-chimiques très diverses, voire
    nouvelles, est, de plus en plus, produite. Les risques sanitaires qui découlent de cette
    nouvelle ère concernent aussi bien les travailleurs du secteur, qui peuvent être exposés
    de manière chronique à des quantités importantes de nanoparticules, que la population
    générale dont l’exposition est plus indirecte. Malgré leur possible transformation ou
    amélioration de la vie dans divers domaines, l’émergence des nanotechnologies
    constitue des risques majeurs et peut être irréversibles pour la santé et l’environnement.

       3.1 - SPHERE TOXICOLOGIQUE ET RISQUES SANITAIRES DES NANOTECHNOLOGIES

    En raison de leur taille extrêmement réduite, les nanoparticules possèdent une grande
    surface spécifique et une forte mobilité, elles sont ainsi très réactives à leur
    environnement ; or les applications des nanotechnologies à l’heure s’accroissent et les
    dommages potentiels pour la santé sont multiples.

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Comme des essais sur l'animal l’ont démontré, des nanoparticules fabriquées
volontairement peuvent irriter les voies respiratoires. On n’est pas encore en mesure de
déterminer l’ensemble des dangers pour la santé associés aux nanoparticules. Une
évaluation des risques se fondant classiquement uniquement sur la base de la
concentration massique ne semble pas pertinente, car les effets observés ne dépendent
pas proportionnellement de la masse. On ne peut pas non plus établir un rapport direct
entre le nombre de particules et leurs effets. La nature, la surface spécifique, la structure
et la composition chimique de la surface de ces particules jouent un rôle essentiel dans
les possibles effets sur la santé. Il faut par conséquent considérer chaque type de
particule individuellement. Outre leurs interactions avec l’organisme humain, les
nanoparticules de certains matériaux (p. ex. substances inflammables ou ayant une
action catalytique) sont susceptibles de présenter des risques d'incendie ou d'explosion
liés à des réactions chimiques involontaires. Les voies d’expositon du corps humain aux
nanoparticules sont multiples et leurs impacts sur la santé humaine peuvent par ricochet
être très accrus et divers.

3.1.1 – Les impacts des nanotechnologies sur la santé

Même si les avancées potentilles apportées par les nanotechnologies dans le domaine de
la santé peuvent donner beaucoup d’espoirs, beaucoup d’inquiétudes ont vu le jour
concernant les propriétés des nanoparticules que les chercheurs même s’efforcent à
maîtriser et à exploiter. La toxicité des nanoparticules est due à plusieurs facteurs alors
que des centaines de produits d’usage quotidien issus des nanotechnologies inondent
déjà les étalages de nos supermarchés et que de plus en plus, sont en projet de
nouveaux usages dans les domaines très sensibles à la vie de l’homme.

3.1.1.1 – Les voies d’exposition du corps humain aux nanoparticules

La toxicité des nanoparticules est effective sans être cernée; à cause de leurs dimensions
microscopiques (visibles au microscope à effet tunnel), celles-ci sont susceptibles de
passer partout. Compte tenu de la réelle utilisation des nanoparticules par certaines
industries et de la quantité des produits nanos déjà en circulation, la population générale
est potentiellement exposée aux nanotechnologies par diverses voies. Celles-ci sont au
nombre de trois, du fait de leur exposition permanente à l’environnement extérieur.

                                •   par ingestion
   •   par inhalation

                                                            •   au travers de la peau

                                                                                          11
L’entrée des nanoparticules dans l’organisme par le tractus intestinal
La consommation des produits issus des nanotechnologies favorise l’entrée dans le
corps des nanoparticules par voie intestinale.
L’épithélium intestinal diffère des autres du fait de sa fonction primaire d’absorption des
substances exogènes. Il est depuis longtemps connu que des particules peuvent passer à
travers la barrière épithéliale de la lumière intestinale. Concernant les nanomatériaux,
différents travaux ont été réalisés afin de faciliter l’absorption des médicaments. Une
étude a montré l’importance de deux facteurs dans la pénétration des nanoparticules :
leur taille et leur charge électrique. Ces nanoparticules peuvent donc franchir la barrière
du mucus et une fois cette barrière franchie, les nanoparticules peuvent pénétrer dans
les vaisseaux lymphatiques et les capillaires Une étude de Jani et Al montre qu’en
utilisant les nanotubes de carbone (diamètre moyen 1,4 nm, marqués à l’iode 125,
administrés par gavage chez la souris), dès trois heures, on retrouve un marquage aux
niveaux pulmonaire, rénal et osseux. Ceci revêt une importance particulière dans le cadre
des effets potentiels des nanoparticules sur la santé. C’est le cas des pâtes dentifrices
contenant des nanoparticules, déjà vendues sur le marché, qui sont utilisées par la
population en général et certaines de ces nanoparticules peuvent être avalées. En plus,
les produits alimentaires contenant des nanoparticules comme des huiles actives anti
cholestérol permettent aux nanos de se retrouver dans l’organisme via l’alimentation.

L’entrée des nanoparticules dans l’organisme par la peau
La peau est protégée par une couche de cellules mortes, l’épiderme, sous lequel se
trouve une autre couche, le derme, constituée de cellules vivantes, innervées et
vascularisées, et où se trouve des glandes productrices d’une sécrétion protectrice : le
sébum. L’épiderme, lorsqu’il est en bon état, constitue une efficace barrière à la
pénétration des particules. Les expériences montrent néanmoins qu’il existe un gradient
de taille ; plus leur diamètre est petit, meilleur va être leur pénétration à travers
l’épiderme. Il est important de noter que l’épiderme est facilement altéré (coupures,
piqûres…) ; ce qui pourrait contribuer à une plus profonde pénétration des
nanomatériaux en cas d’exposition.
La pénétration dans l’organisme des nanomatériaux est due à l’utilisation des produits
cosmétiques les contenant (lait de toilette, sérum, crème solaire…).

L’entrée des nanoparticules dans l’organisme par l’appareil respiratoire
Les nanoparticules peuvent aussi potentiellement entrer dans le corps par la voie de
l’appareil respiratoire constitué des voies aériennes supérieures (assurant le flux d’air
dans les poumons), et les alvéoles pulmonaires (assurant les échanges gazeux entre l’air
et le sang). Dans les voies aériennes supérieures, les nanomatériaux peuvent être piégés
par le mucus et ensuite pris en charge par les cils présents à la surface de certaines
cellules de l’épithélium des voies aériennes, pour être ainsi évacués vers la bouche. Si les
nanomatériaux atteignent le poumon au plus profond, le système d’élimination impliqué
fait intervenir les macrophages alvéolaires qui incorporent les nanoparticules et sont à
leur tour éliminés de l’organisme, en partie dans les sécrétions respiratoires. Ces deux
mécanismes (épuration mucociliaire et alvéolaire) visent à éliminer les nanomatériaux
des endroits où ils peuvent causer des dommages et être potentiellement toxiques. En
cas de « débordement » de ces mécanismes de protection, l’inhalation des
nanomatériaux pourrait alors entraîner le développement d’une inflammation excessive
et la destruction des tissus pulmonaires comme cela a été observé avec les filtres
d’amiante. On peut s’attendre également à un passage dans l’organisme des
nanomatériaux entrant par la voie pulmonaire et donc à leur potentielle distribution aux
différents organes.

Concernant l’élimination des nanomatériaux, peu de données sont disponibles, et elles
sont parfois contradictoires montrant encore une fois le champ vierge des connaissances
sur les effets des nanomatériaux sur la santé.

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L’exposition professionnelle aux nanoparticules
Les nanoparticules peuvent aussi accéder à l’organisme par la manipulation des
nanoparticules qui peuvent ainsi être inhalées ou absorbés. Les travailleurs constituent le
premier groupe exposé aux nouvelles productions nano technologiques. […]

3.1.1.2 – Les déterminants des effets des nanoparticules sur la santé
Si on fait une analogie avec les particules ultrafines de la pollution atmosphérique, on
peut considérer que les effets des nanomatériaux sur la santé sont en relation avec leur
taille, nombre et/ou surface, forme et composition, ces paramètres sont souvent
corrélés. En dépit de ces connaissances et des risques avérés, l’application des nanos va
crescendo dans le domaine thérapeutique et médical…

Le paramètre « taille » est souvent associé au paramètre « surface », c’est-à-dire que
pour une même « quantité » de particules administrées, plus la taille est petite, plus la
surface totale est grande. Dans le domaine de recherche des particules ultrafines de la
pollution atmosphérique, plusieurs travaux in vivo chez l’animal ont montré que
différents paramètres tels que l’afflux des polynucléaires dans les poumons, la
modification de la perméabilité de l’épithélium pulmonaire, ou encore l’accumulation dans
les ganglions lymphatiques, sont corrélés à la surface totale des particules administrées.
Cette relation est probablement due au fait que plus la taille des particules est petite,
plus leur réactivité surfacique est grande.

La forme conditionne les effets biologiques des particules et par ricochet des
nanoparticules aussi. Pour les fibres, leur biopersistance est un mécanisme important,
car plus elles restent longtemps dans les cellules et les tissus, plus leurs effets
biologiques peuvent être importants. Les fibres ont une biopersistance plus longue que
les particules sphériques. En effet, la capacité des cellules phagocytaires à éliminer les
particules dépend en autres de leur longueur. Des macrophages contenant des fibres plus
longues que leur propre diamètre ne sont pas mobiles et ne peuvent pas éliminer les
fibres du tissu. La façon dont les fibres se cassent conditionne également leur
biopersistance. Les fibres (comme l’amiante) se cassent longitudinalement, ce qui ne
facilite pas leur élimination. En revanche, des fibres amorphes qui se cassent
perpendiculairement à leur axe principal peuvent être éliminées plus facilement.

La composition des particules est un paramètre conditionnant leurs effets biologiques. La
production de radiaux libres d’oxyde (molécules très réactives pouvant moduler différents
processus biologiques), est un mécanisme important. Le contenu en métaux de
transition, tels que l’aluminium, est important de ce point de vue, car ils catalysent la
production d’espèces radicalaires. Il faut ainsi noter qu’en cas de décomposition des
différents constituants des nanomatériaux, c’est la toxicologie classique de ces différents
constituants qui prédomine, et donc détermine les effets biologiques.

3.1.2 – Les effets des nanomatériaux sur la santé

Les applications des nanotechnologies s’accroissent tous les jours, alors que leurs effets
sur la santé deviennent de plus en plus alarmants ; ceux-ci sont divers. Paradoxalement
très peu de moyens sont mis en jeu pour l’étude des risques que portent ces
technologies innovantes et pourtant l’usage des produits nanos par les populations
s’accentue au fur et à mesure que de nouveaux produits nanos voient le jour.           Les
effets des nanoparticules sur la santé sont divers et sont susceptibles de toucher
plusieurs organes vitaux du corps. Ces effets varient selon le type de nanoparticules mis
en cause.

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3.1.2.1 – Les effets des nanomatériaux sur le système cardiovasculaire, le sang
et le cœur

D’après les connaissances toxicologiques actuelles, les nanoparticules de l’air se déposent
dans les voies pulmonaires, notamment dans le poumon profond, en proportion
nettement supérieure à celle de particules de plus grosse taille. Plus l’activité physique
est importante, plus le dépôt pulmonaire est grand.
Les études épidémiologiques ont démontré l’accroissement du risque d’infarctus des
sujets exposés à une forte concentration atmosphérique de particules, une fréquence du
rythme cardiaque élevée et une variabilité du pouls plus faible :
- Les inflammations du poumon dues aux particules portent atteinte à la fonction de
l’endothélium, au potentiel thrombotique, à l'équilibre fibrinolytique et à l’activité des
plaques athéromateuses qui endommagent les plaques et provoquent des thromboses.
 - Des particules pénètrent dans les interstices et/ou causent les inflammations sur les
terminaisons de nerf autonomes qui perturbent le rythme cardiaque.
  - Des particules arrivent dans le flux sanguin et ont une influence directe sur
l'endothélium, sur des plaques et sur la thrombogénèse.

Une série d'études de différentes nanoparticules (diesel, polystyrène) introduites dans les
poumons a montré une formation de caillots accrue dans les vaisseaux sanguins
périphériques. Une fois dans le cycle de sang, des nanoparticules peuvent interagir avec
l'endothélium de support et avoir des conséquences sur des facteurs de coagulation de
l'endothélium. En outre, on a montré dans une étude (lapins) que des nanoparticules
peuvent porter atteinte à la stabilité des Plaques. Des Particules Ambiantes Concentrées
(Concentrated Ambient Particles - CAPs) peuvent atteindre le cœur par le flux sanguin et
interagir directement avec les cellules du muscle cardiaque et autres tissus. L'exposition
à ces nanoparticules chez le rat a provoqué un stress oxydatif, des réactions
inflammatoires ainsi la nécrose et l’apoptose du tissu cardiaque. Certaines nanoparticules
causent des granulomes, de la fibrose et des réactions tumorales au niveau pulmonaire.

D’après les travaux les plus récents d’Oberdorster et de sa fille Eva sur un poisson, les
nanoparticules pourraient même parvenir au cerveau en suivant le trajet du nerf olfactif.

3.1.2.2 – Les effets des nanomatériaux sur la rate, foie et système réticulo-
endothélial et d’autres effets potentiels

Le système réticulo-endothélial couvre la totalité de la structure de défense de la rate, du
foie et les ganglions lymphatiques. Dans ces organes les macrophages entourent les
vaisseaux, interagissent avec le sang et peuvent ainsi capter des particules des
nanoparticules qui transitent dans le sang. Plusieurs études montrent des effets toxiques
au niveau des reins.

Impact sur le fœtus
Chez le rat, une étude d'inhalation de particules de diesel a montré des signes de toxicité
pour l'embryon. Il n’est pas clairement démontré s’il s’agit d'une réaction indirecte due à
une inflammation des poumons ou à des particules provenant du placenta ou bien d’une
réaction directe de l'embryon à des nanoparticules. Il est donc nécessaire d'étudier
davantage les conséquences des nanoparticules sur les fœtus.

Gamètes
Des études récentes ont montré les effets toxiques des nanoparticules au niveau de la
génotoxicité ; il est possible que les nanoparticules présentes dans le sang puissent aussi
atteindre les ovocytes ou les spermatozoïdes et générer un risque potentiel pour les
futures naissances.

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