LES SALTIMBANQUES ballet - CYCLE PICASSO ET LA DANSE - Théâtre du Capitole
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ballet LES SALTIMBANQUES CHORÉGRAPHIE KADER BELARBI CYCLE PICASSO MUSIQUE SERGIO TOMASSI ET LA DANSE 1
LES SALTIMBANQUES Christophe Ghristi Directeur artistique Claire Roserot de Melin Administratrice générale Ballet librement inspiré de Famille de saltimbanques (Les Bateleurs) de Pablo Picasso (1905). Création à l’Orchard Hall de Tokyo, août 1998 Les danseurs du Ballet du Capitole en répétition. Les Saltimbanques, juin 2021 Re-création pour le Ballet du Capitole, juin 2021 Kader Belarbi Chorégraphie, mise en scène et textes Sergio Tomassi Création musicale et accordéon Coralie Lèguevaque Scénographie Elsa Pavanel Costumes Sylvain Chevallot Lumières Laure Muret Assistante chorégraphe Samuel Mathieu Conseiller théâtral Nouvelle production Ballet du Capitole Les Étoiles, les Solistes et le Corps de ballet Kader Belarbi Direction de la Danse HALLE AUX GRAINS 24, 25 ET 26 JUIN À 20H 27 JUIN À 15H DURÉE DU SPECTACLE : 2H15 (entracte de 15mn compris) 2 3
Picasso et les Saltimbanques Par Annabelle Ténèze, Directrice des Abattoirs, Musée FRAC Occitanie Toulouse En effet, lorsque le personnage d’Arlequin Le jeune artiste espagnol a alors 24 ans apparaît pour la première fois dans la et, il y a peu, il s’est définitivement installé peinture de Picasso, à l’automne 1901, un an en France, à Paris, dans la capitale de l’art après le premier voyage parisien de l’artiste où il loue un atelier au Bateau-Lavoir sur espagnol, il prend place de profil, triste et la Butte Montmartre, le lieu des ateliers pensif, accoudé à une table de bistrot. Sur et des cabarets, le quartier des artistes. un fond de mélancolie, il souligne, après Il se met à les représenter de manière un premier succès pour l’artiste, celui de prolixe, aussi bien en peinture qu’en dessin la réception de son exposition chez le et gravure, ainsi que dans une unique galeriste Ambroise Vollard, un retour sur sculpture, le buste d’un fou au chapeau. soi qui s’exprime dans la tristesse de ses Cependant, loin des spectacles de fêtes œuvres, notamment celle sur la perte de et de leur liesse, c’est principalement son ami Casagemas, qui vient de se suicider, l’envers du décor auquel s’intéresse alors et dans l’introspection visible de ses Picasso. Dans ses différentes créations, personnages de peinture. Picasso apprécie Arlequin apparaît à cheval, avec un singe, pourtant les cabarets, les cafés, barcelonais ou mourant. Il est aussi rejoint par des puis parisiens, et admire la manière acrobates aux membres graciles, des dont ces lieux et la vie exacerbée qui s’y musiciens, notamment des joueurs d’orgue, exprime ont été dépeints par ses maîtres ou encore des bouffons à la silhouette comme Toulouse-Lautrec ou Edgar Degas. alourdie. Faisant traditionnellement, selon Quatre ans plus tard, en 1905, la peinture l’historiographie picassienne, la transition d’Arlequin Au Lapin Agile, aujourd’hui dans entre une période dite bleue et une période la collection du Metropolitan Museum à dite rose, ces œuvres se caractérisent New York, rend hommage à un fameux surtout par la diversité, chromatique cabaret de Montmartre, à la manière de comme de représentations. Ces scènes ont Toulouse-Lautrec. Cependant, bien que néanmoins toutes un point commun : ce soient représentés à ses côtés l’élégante sont les coulisses, le repos, en bref la vie Famille de saltimbanques (Les Bateleurs), Pablo Picasso, Paris, 1905. ©Succession Picasso 2021 Germaine (Laure Gargallo) et le propriétaire ordinaire de personnages extraordinaires. Frédéric Gérard dit Père Frédé qui joue de Le chef-d’œuvre de ce cycle est ainsi la très la guitare, aucun d’entre eux n’interagit avec grande toile de Famille de saltimbanques, À la suite de l’exposition Picasso et le Théâtre primordiales de son art, celle mythologique lui. L’Arlequin en costume, de nouveau au qui est présentée au public à l’exposition à Toulouse, en 1965, première exposition du Minotaure, mi-homme mi-taureau, si bar, semble avoir l’alcool triste, anticipant de la galerie Serrurier, en février 1905, et thématique sur son travail, l’artiste espagnol souvent réactivée pendant la période une solitude des artistes du rire aussi criarde est aujourd’hui conservée à la National fait don à la Ville d’un immense rideau de surréaliste, et celle de l’Arlequin qui habite sa que celle du clown blanc attablé, le temps Gallery of Art à Washington. Bien qu’elle soit scène réalisé en 1936 pour la pièce de création depuis plusieurs décennies. Alors d’un Soir bleu, peint par Edward Hopper inspirée par la troupe du cirque Médrano, théâtre Le 14 juillet de Romain Rolland. qu’il est présenté en majeur sur la scène quelques années plus tard (1914). situé à l’angle de la rue des Martyrs et du Le personnage central de cette œuvre, de l’Alhambra en 1936, c’est finalement boulevard Rochechouart, l’indistinction du aujourd’hui conservée aux Abattoirs, Musée mourant que le personnage de la commedia Dès la fin de 1904 et tout au long de décor de l’œuvre, un paysage extérieur, - Frac Occitanie Toulouse est le Minotaure, dell’arte gagne enfin le devant du théâtre, l’année 1905, outre Arlequin, un grand contribue à son universalité : elle fait la ou plutôt sa dépouille, habillée d’un costume saltimbanque enfin revenu sur les planches nombre de personnages issus de troupes part belle aux liens de troupe et de cœur, d’Arlequin. Pablo Picasso (1881-1973) fait ici après plusieurs dizaines d’années passées, de saltimbanques, de tous âges, arrivent à l’humanité, y compris dans la gravité l’étonnante synthèse entre deux figures certes sur la toile, mais depuis les coulisses. en nombre dans la peinture de Picasso. des personnages. Les artifices des mises 4 5
en scène sont absents afin de partager Fasciné de longue date par les figures la plus grande intimité possible, celle qui des saltimbanques, Picasso s’engage lui d’habitude nous est travestie et cachée aussi à partir de 1917 dans l’expérience derrière les masques de la comédie. Quel du ballet puis du théâtre. Parade (1917) en contraste entre la bigarrure des costumes constitue le point de départ. En 1916, Jean et la banalité d’une tranche de vie dans Cocteau propose à Picasso de réaliser laquelle bouffon rouge, arlequin, danseuse décors, costumes et rideau de scène du ou enfants se laissent aller au repos ! ballet Parade, qu’il a écrit sur une musique Derrière leurs costumes et leurs poses, loin d’Erik Satie pour le chorégraphe Léonide du monde de la représentation, en famille Massine. Picasso part avec la troupe en et hors de scène, les saltimbanques offrent Europe, suit en Italie les danseurs et les un visage mélancolique. Ils expriment, créateurs. Pendant plusieurs années, dans entremêlés, une marginalité et une ses créations successives pour les ballets normalité, dans laquelle nous pouvons, (Le Tricorne, 1919 ; Pulcinella, 1920 ; Cuadro tous et toutes, nous reconnaître. Picasso Flamenco, 1921 ; Mercure, 1924), le peintre s’y reconnaît-il lui aussi ? Si Arlequin en applique aux arts de la scène aussi bien clown triste devient pour longtemps, pour ses formules cubistes que figuratives, tout lui comme pour d’autres, le symbole de la comme il renoue avec le folklore espagnol solitude de l’amuseur public, le reflet de la et les personnages de la commedia vie d’artiste, le saltimbanque est-il, comme dell’arte. Il allie la conception de rideaux, le souligne l’étude de Jean Starobinski(1), son décors et costumes, à celle d’affiches, livrets alter ego, le double projeté du peintre ? et programmes. A travers ces fécondes collaborations que l’artiste conduit avec le Le destin des artistes oscille-t-il entre rire monde du spectacle vivant, au plus près de et larmes, comique et tragique, attirance lui, avec lui - du moins pendant plusieurs et rejet ? Derrière l’image de séducteur et années -, Picasso, enfin, se fait lui aussi d’amuseur public, le saltimbanque, double enfant de la balle et saltimbanque. métaphorique de l’artiste, cherche et s’inquiète. (1) Portrait de l’Artiste en saltimbanque de Jean Starobinski. Picasso portant un masque de clown, photo de David Douglas Duncan. © Succession Picasso 2021 6 7
DISTRIBUTION Sergio, l’accordéoniste Sergio Tomassi Pépa, la ballerine Natalia de Froberville Véra, la dompteuse Marlen Fuerte Castro Violetta, l’écuyère Saki Isonaga Dora, la funambule Julie Charlet Gigi, la clown Kayo Nakazato Les Acrobates filles : Rosalia, la jeune fille aux fleurs Alexandra Surodeeva Anita, la jeune fille à la boule Solène Monnereau Olympia, la jeune fille au ballon Sofia Caminiti Les Femmes de Majorque : Benedetta Louise Coquillard Beatriz Joana Torello Greta Marie Varlet Le gros Bouffon, el Tío Pepe Don José Ramiro Gómez Samón Le vieux Saltimbanque, Dessins de costumes par Elsa Pavanel Pepe la Matrona Rouslan Savdenov Arlecchino Simon Catonnet Pierrot Eneko Amorós Zaragoza Achille, le clown Alexandre Ferreira Les Zanni : Marcello Amaury Barreras Lapinet Alessio Philippe Solano Les Acrobates garçons : Oleg Timofyi Bykovets Alexis Minoru Kaneko Roberto Jérémy Leydier Ludo Baptiste Claudon 8 9
Questions à Kader Belarbi à propos des Saltimbanques Fasciné par la toile de Picasso peinte en 1905, Famille de saltimbanques (Les Bateleurs), Kader Belarbi a eu envie de créer un ballet à partir de ce tableau de la « période rose » et de la 5ème des Élégies de Duino de Rainer Maria Rilke, émouvante méditation sur ce chef d’œuvre du Maître espagnol. Pour évoquer l’aléatoire, le dérisoire de ces pénitents en maillots et leur errance entre Terre et Ciel, Kader Belarbi a souhaité s’entourer de la scénographe Coralie Lèguevaque, de la costumière Elsa Pavanel, du compositeur et accordéoniste Sergio Tomassi et du concepteur lumières Sylvain Chevallot. Pour que le Ballet du Capitole fasse son cirque ! 1 - Comment vous est venue l’idée de tribu des saltimbanques balade son âme exilée concevoir une pièce chorégraphique à dans la condition foraine et dans l’existence partir d’une toile de Picasso ? errante, entre terre et ciel. J’imagine que de leurs rencontres et des passions humaines Lors d’une visite de la National Gallery of exprimées, ils créent leur propre monde puis Art de Washington, j’ai été émerveillé par la s’évanouissent sur les routes et les chemins. toile de Picasso, Famille de saltimbanques. Ce tableau a immédiatement résonné en Je cherche en eux toute une humanité moi et j’ai décidé de m’en inspirer pour une drolatique, fantasque, glorieuse, dérisoire et création chorégraphique. Après différentes poétique, selon les métamorphoses du corps recherches et lectures, j’ai découvert la de ces pénitents en maillots et leur relation aux 5ème des Élégies de Duino, composée par objets du monde. Ils sont tributaires des objets Rilke sur cette œuvre de Picasso. J’avais convoqués, ils en jouent et ils s’en évadent, désormais la matière nécessaire pour créer oscillant entre virtuosité technique, risque un ballet. D’emblée, j’ai su que ce ne serait et dérision. Sur la piste, tout s’interpénètre : pas un ballet narratif mais une séquence de les postures, les draperies, les mouvements, « collage » où des scènes et des numéros les variations, les jeux de corps, les libres se succéderaient, jonglant entre ombre et cavalcades, les prodiges, l’illusion et les lumière, entre peur, rire et émerveillement. cœurs fous de ces bateleurs nomades. La piste devient un «no man’s land» où entre et sort, d’un côté ou d’un autre, une ménagerie 2 - Qu’évoque pour vous ce tableau de d’artistes. Picasso ? Picasso disait : «…Je les peins comme je Picasso aimait le cirque et les acrobates. Ce les vois, mais aussi comme je les rêve». J’ai qui me touche dans cette toile, ce sont les souhaité partir sur les routes et les chemins à saltimbanques offrant la vérité de ce qu’ils leur rencontre. sont. Proche, interdite, présente, absente, la Les danseurs du Ballet du Capitole en répétition. Les Saltimbanques, juin 2021 10 11
3 – Que pensez-vous de la relation entre Barbara, Juliette Gréco, Charles Aznavour ou capables de faire jaillir des exploits et des vivre l’événement présenté. Tout sera visible. danse et cirque ? Serge Lama et est également compositeur prodiges et de projeter l’émotion. Au fil des Le dos, la face et le profil sont aussi importants. de musiques de films et de danse. Le son de tableaux, ce sont des humeurs aux nuances Les personnes existent derrière la prouesse La danse et le cirque sont intimement liés l’accordéon semblait évident et l’instrument, subtiles qui s’enchaîneront et feront de la physique et technique. L’irruption de l’exploit par l’expression du corps, à travers leurs pluriel dans ses doigts, offre un jeu savoureux. présence de cet accordéon singulier l’une des se fondra dans un registre de jeu de la vie spécificités techniques et leurs mises en scène Cet artiste est l’accord parfait entre la plus forces du spectacle. et des passions humaines, en conférant au respectives et communes. Le mouvement belle des alchimies musicales et une présence spectacle une valeur rituelle et poétique. chorégraphique et le geste acrobatique en «live» ! se mêlent dans les deux disciplines. Des Ce spectacle se veut une ode au spectacle 5 – Quelle forme prendra Les Saltimbanques ? similitudes de critères apparaissent comme L’accordéon a été choisi car il est un instrument vivant, fait de chair, de sang et de sueur, le vocabulaire (variation, adage, porté…), les insolite pour mettre en relief l’action Un grand livre d’images enchanteresses du pour un supplément d’âme, à l’opposé d’une figures (le saut…) ou l’esthétique (le tutu de chorégraphique. Communément appelé cirque apparaîtra avec un joyeux brassage des société « bluffée » par les écrans, la vitesse et l’écuyère inspiré de celui de la sylphide…). “piano à bretelles“, il est un instrument très genres où se côtoieront danseurs, acrobates, la technologie. Il me semble que la recherche de la danse physique, avec son souffle caractéristique chanteurs, musiciens, parleurs… Être illusionniste avec du merveilleux et dans la virtuosité et la performance du qui signe la présence de l’interprète. Dans l’espace du cercle s’inscrira une trois bouts de ficelles, n’est-ce pas cela, le cirque développe des corps plus fluides L’accordéoniste devient alors sur scène un succession de tableaux, des moments de cirque ? De manière inattendue, les danseurs avec élégance et beauté. Les influences et acteur saltimbanque comme les autres. vie anodins s’exposeront, des visions se prendront encore des chemins de traverse et les échanges artistiques de l’un et de l’autre succéderont. Une évocation d’épisodes Véritable homme-orchestre, l’accordéoniste cette fois, le Ballet du Capitole fera son cirque ! nourrissent la maîtrise d’exécution, la qualité de vies, des corps engagés dans leurs peut aussi bien exécuter le rythme, la mélodie d’interprétation et transforment l’écriture et les Propos recueillis par Carole Teulet et l’harmonie. L’instrument unique, sensible et manifestations dérisoires et glorieuses. formes de représentations. virtuose à la fois, transporte d’un état musical Le lieu circulaire deviendra un espace proche Mais attention ! Il n’est pas question de créer à un autre. L’accordéon peut évoquer par son du public où l’enjeu et le travail seront de faire une œuvre de cirque mais bien d’en transposer simple timbre un contexte, une atmosphère, l’univers par le geste chorégraphique. Les une chaleur et une présence voire un esprit sauts prodigieux des danseurs, l’envol des sacré. Doté d’un grand spectre de sonorités, ballerines, mais aussi leurs chutes, permettent il est puissance, souffle et couleurs qui ainsi d’évoquer la virtuosité comme la fragilité envahissent l’espace. des artistes de cirque. Cette fragilité de Toutes ses nuances inspirent la partition l’acrobate-danseur, en équilibre entre grâce musicale dans un brassage de styles où se et chute, défiant autant la gravité que la côtoient emprunts au répertoire classique, dureté d’une vie errante avec ses incertitudes tradition du cirque avec force présence de du lendemain, c’est bien sûr celle de notre cuivres et de percussions et création originale. condition humaine. Incidemment, elle fait Mais ce ne sera pas pour autant une soirée écho à cette crise que nous traversons tous « au son de l’accordéon ». Pour répondre aux actuellement, mais qui s’avère particulièrement exigences de l’écriture chorégraphique, Sergio cruelle pour les artistes et le spectacle vivant. Tomassi utilise ici un système très particulier dont il a été un des précurseurs et même un des développeurs : son accordéon Victoria équipé 4 - Pour la musique (composition et MIDI est relié à des samplers via une émission interprétation), vous avez fait appel à votre HF numérique, ce qui lui permet, en véritable collaborateur de Toulouse-Lautrec, le grand homme-orchestre, d’émettre les sonorités accordéoniste Sergio Tomassi. Pourquoi ? de toutes sortes d’instruments y compris des Sergio Tomassi est un complice et un percussions. Vous verrez un accordéon mais compagnon musical. Il a été l’accompagnateur, vous entendrez un orchestre ! La musique le chef d’orchestre ou le directeur musical de ne servira pas d’accompagnement ; elle sera grands noms de la chanson française comme indissociable de la danse des saltimbanques, Les danseuses du Ballet du Capitole en répétition; Les Saltimbanques, juin 2021. Au premier plan, Natalia de Froberville et Saki Isonaga. 12 13
La Cinquième des Élégies de Duino Rainer Maria Rilke (1875 – 1926) Rainer Maria Rilke passa l’été 1915 à Munich, dans la maison de l’écrivaine Hertha Koenig, à qui appartenait alors la peinture de Picasso Famille de saltimbanques. Quatre mois durant, Rilke travailla en compagnie de ce «Picasso» dont il se fit même le gardien. C’est cette toile de Picasso qui inspira à l’écrivain sa Cinquième Élégie de Duino (achevée en 1922), considérée comme l’une des plus grandes contributions à la poésie allemande du XXème siècle. Les Élégies de Duino sont des poèmes intensément religieux et mystiques qui pèsent la beauté et la souffrance de l’existence. Décrites comme une métamorphose du «tourment ontologique» de Rilke et un «monologue passionné sur la réconciliation avec l’existence humaine», elles discutent de thèmes comme les limites et l’insuffisance de la condition humaine, la fracture Costume d’Arlecchino par Elsa Pavanel de la conscience humaine, la solitude de l’homme, la perfection des anges, la vie, la mort, l’amour, la tâche du poète... Au fil des élégies, Rilke chante sa plainte, posant maintes et maintes questions dont l’une, essentielle, est de savoir comment échapper au factice de notre condition. Dans Famille de saltimbanques, Picasso représente six personnages au milieu d’un paysage désertique et il est impossible de dire s’ils arrivent ou s’en vont, commencent ou terminent leur représentation. Toujours en voyage et sans domicile fixe, ils sont d’une nuance plus fugace que le reste d’entre nous... Rilke décrit ces personnages se tenant sur un «tapis usé» pour suggérer la solitude et l’isolement ultimes de l’homme dans ce monde incompréhensible, pratiquant leur profession de l’enfance à la mort comme des jouets mus par une volonté inconnue. Les saltimbanques sont à la fois proches de nous et lointains, dans l’incommunicabilité, comme statufiés dans «la grande majuscule de la Ramiro Gómez Samón, Ballet du Capitole. Répétition Les Saltimbanques, juin 2021. présence». 14 15
Coralie Lèguevaque Scénographie Dessin et maquettes des décors par Coralie Lèguevaque Dans son costume d’architecte et de peintre, armée d’une règle et les mains barbouillées, Coralie Lèguevaque avance pas à pas. Elle ne cesse de construire et de déconstruire les propositions scénographiques afin de choisir celles qui se révéleront les plus pertinentes. Son artisanat est magnifié par la magie théâtrale en vue de servir une libre exploration de l’imagination et de la poésie. «Pablo Picasso aimait le cirque et son atmosphère. Il s’est attaché à peindre dans leur vie quotidienne le monde des saltimbanques, qu’il représentait par des figures de clowns, d’acrobates, d’arlequins et de gens du cirque. Famille de saltimbanques est l’un de ses tableaux les plus célèbres de sa période rose : dans un paysage désolé, ces personnages, formant une troupe et pourtant si seuls, écartelés entre misère et grâce, entre ciel et terre, nous assaillent d’impressions contraires. La scénographie va jouer de cette dualité. Tout au long du spectacle, les danseurs vont porter, hisser, affaler une grande toile rugueuse, aux couleurs terrestres et crayeuses ; cette toile sera manipulée pour devenir, tour à tour, campement, cirque, tapis… Mais, les saltimbanques marcheront aussi sur les cieux. Entre terre et ciel, flotteront des ballons, taches de couleurs vives, permettant de construire des espaces et des objets, dérisoires et merveilleux. La configuration du grand espace circulaire de la Halle aux grains nous invite sur la piste, où les numéros des saltimbanques se dessinent et se dévoilent, parfois dans des actions simultanées. La ronde des spectateurs plonge un regard sans barrières sur un cirque dansé.» 16 17
Elsa Pavanel Costumes Avec sa longue expérience du ballet, de l’opéra, du théâtre et du cirque, Elsa Pavanel joue de son précieux talent et offre la pertinence d’une réflexion inspirée. Grâce à sa connaissance du costume en mouvement, son artisanat habille les corps dansants de l’intérieur vers l’extérieur, et vice-versa. De fil en aiguille, les personnages se révèlent. «Les costumes évoquent la palette de couleurs inspirée par le tableau de Picasso, Famille de saltimbanques. Ils sont teints, peints et patinés. Sous le regard des spectateurs, la troupe dévoile son quotidien entre habillage et déshabillage de vêtements usés et de costumes de lumière, entre montage et démontage d’accessoires, de décors et de numéros. La troupe des saltimbanques surgit avec son attirail et ses baluchons, révélant des silhouettes singulières, dépareillées. Se dévêtant à vue, ils découvrent leurs tenues de dessous. Affublés de ces collants et académiques teints et peints, ils démarrent une séance d’entraînement et de répétitions pour leurs prodigieux numéros et leurs triomphales parades à venir. Les danseurs de piste sont en perpétuelles métamorphoses. Certains numéros d’ensemble et les grandes parades sont l’occasion de rehausser les habits, parfois désuets, d’ajouts brillants et colorés pour faire admirer les prouesses des artistes. Sous les yeux éblouis des spectateurs, en cercle autour des saltimbanques, et dans une succession de scènes et de numéros insolites, défile une ménagerie d’artistes aux figures étranges, inattendues et merveilleuses.» Dessins de costumes par Elsa Pavanel 18 19
Sergio Tomassi Sylvain Chevallot Création musicale et Accordéon Lumières Toutes ses facettes évoquent Créateur lumières dans les do- le saltimbanque : Sergio Tomassi maines aussi variés que le cirque, a été directeur musical, chef d’or- les marionnettes, le théâtre et la chestre et accompagnateur des danse, Sylvain Chevallot s’épa- grands noms de la chanson fran- nouit dans l’inconnu et s’enthou- çaise (Juliette Gréco, Barbara, siasme de ce nouvel enjeu que Serge Lama...), compositeur pour constitue Les Saltimbanques. le cinéma et la danse. Le son de « La piste prend une dimension ins- l’accordéon semblait évident et trumentale où se traitent les enjeux l’instrument pluriel, entre ses des points de vue et des regards doigts, est un jeu exquis. Sergio dans une ronde de spectateurs. Tomassi est l’accord parfait entre Le cercle délimite un espace de les plus belles alchimies musi- scène qui s’offre sans barrière au pu- cales et une présence vivante sur blic. De la figure du cercle découle scène. la sphère, la circularité, élément très présent dans la danse. «La musique en direct est toujours Cette utilisation de la configuration un plaisir rare et intense. L’accordéon circulaire de la Halle aux grains ne est un apport instrumental insolite permet pas un éclairage classique et pour mettre en relief l’action choré- impose un dispositif de lumières qui graphique. Communément appelé doit être travaillé principalement par “piano à bretelles“, il est un instru- la hauteur. S’ajoute un élément scé- ment très physique, avec son souffle nographique d’importance, la toile caractéristique qui signe la présence manipulée par les danseurs tout au de l’interprète. L’accordéoniste de- long du spectacle. Le traitement de vient alors sur scène un acteur sal- cette toile révélera un aspect chaleu- timbanque, comme les autres. Véritable homme-orchestre, l’accordéoniste peut aussi bien reux par les variations de la couleur exécuter le rythme, la mélodie et l’harmonie. L’instrument unique, sensible et virtuose à la blanche. Le jeu des lumières convoquera aussi des ombres portées et elle apparaîtra et fois, transporte d’un état musical à un autre. L’accordéon peut évoquer par son simple timbre disparaîtra entre transparence et opacité. un contexte, une atmosphère, une chaleur et une présence, voire un esprit sacré. Doté d’un En opposition, le sol, imprimé de nuées et différemment mis en lumière, fera apparaître lieux, grand spectre de sonorités, il est puissance, souffle et couleurs qui envahissent l’espace. îlots ou pistes dans des tons plus froids. Les couleurs s’exposeront d’elles-mêmes par les Toutes les nuances de l’accordéon inspirent la partition musicale dans un brassage de styles costumes singuliers et insolites des saltimbanques, entre ombre et lumière. où se côtoient emprunts au répertoire classique, tradition du cirque avec force présence de L’exploitation du lieu circulaire et de la lumière permettront d’être en perpétuel mouvement cuivres et de percussions et création originale. La musique ne sert pas d’accompagnement, comme les danseurs avec leur bric-à-brac du monde. Les parfums du cirque d’antan surgi- elle est indissociable de la danse des saltimbanques aux corps sensibles et savants, ca- ront dans la lumière d’aujourd’hui, dans une évocation poétique entre réalisme et onirisme, pables de faire jaillir des exploits et des prodiges et de projeter l’émotion. Au fil des tableaux, laissant au public toute la liberté de son imaginaire. » ce sont précisément des humeurs aux nuances subtiles qui s’enchaînent et font de la pré- sence de l’accordéon l’une des forces du spectacle.» 20 21
Solène Monnereau Ballet du Capitole. Les Saltimbanques, juin 2021. Alexandre Ferreira Kayo Nakazato et Alexandre Ferreira répètent les clowns Ballet du Capitole. Les Saltimbanques, juin 2021. 22 23
LE BALLET DU CAPITOLE CHORÉGRAPHIE MUSIQUE Kader Belarbi Stéphane Dalle Raúl Rodríguez Bey Directeur Maître de ballet Pianiste Kader Belarbi Sergio Tomassi Étoiles Chorégraphie, Création musicale mise en scène & accordéon & textes Julie Charlet Natalia de Davit Ramiro Froberville Galstyan Gómez Samón Solistes SCÉNOGRAPHIE COSTUMES LUMIÈRES Marlen Fuerte Alexandra Rouslan Philippe Solano Castro Surodeeva Savdenov Demi-Solistes Florencia Kayo Tiphaine Juliette Thélin Timofiy Minoru Kaneko Coralie Elsa Sylvain Chinellato Nakazato Prévost Bykovets Lèguevaque Pavanel Chevallot Sofia Caminiti Louise Carlotta Georgina Saki Isonaga Kaho Kato Solène Coquillard Di Monte Giovannoni Monnereau MAÎTRE CONSEILLER Corps de ballet ASSISTANTE DE BALLET CHORÉGRAPHE THÉÂTRAL INVITÉ Penelope Joana Torello Marie Varlet Eneko Amorós Martin Amaury Barre- Simon Catonnet Scarian Zaragoza Arroyos ras Lapinet Baptiste Rafael Fernán- Jérémy Leydier Matteo Manzoni Alexandre Nicolas Claudon dez Ramos De Oliveira Laure Muret Samuel Mathieu Ferreira Rombaut Vincent Chaillet Surnuméraires Lian Sánchez Charley Austin Castro 24 25
INSTITUTO CERVANTES www.toulouse.cervantes.es Profitez ÉQUIPE DE PRODUCTION Kathy Dubuisson-Tailhades activités culturelles de vos spectacles Régie générale de production TOUTE L’ANNÉE Raúl Rodríguez Bey > Projections cinéma, expositions arts visuels, rencontres en toute sérénité ! Études musicales littéraires, débats et conférences, spectacles vivants... Frédérique Vivan Régie Plateau - Régie du Ballet cours d’espagnol > En présentiel et en ligne, tous niveaux VOTRE ARRIVÉE > Cours intensifs, pour entreprises CONDUITE TECHNIQUE > Formations éligibles au CPF • Nous ouvrirons les portes 1h avant chaque représentation pour éviter Paul Heitzmann bibliothèque-médiathèque hispanique Régie technique du Ballet une attente trop longue et les > 18 000 fonds (livres, journaux…) attroupements à l’entrée de la salle. Olivier Larcher et Patrick Friedrich > 2 100 films et documentaires • Le port du masque est obligatoire Machinerie > 1 000 CD de musique dès votre entrée. David Daydé et Guillaume Haushalter DELE • Du gel hydro-alcoolique sera à votre Lumières > Diplômes d’espagnol disposition. Jennifer Eleb-Pène • Les vestiaires seront fermés. Pupitre Marianne Levasseur 31, rue des Chalets Accessoires DANS LA SALLE 31000 Toulouse Gwladys Aragon Tél : 05 61 62 80 72 • Le port du masque reste obligatoire. Habillement cursos.tou@cervantes.es • Une place libre doit être conservée Muriel Roman-Dassain entre chaque personne ou groupe Maquillage de personnes. Nos équipes d’accueil Thierry Le Gall feront le maximum pour vous Perruques positionner au mieux et le plus à Jean-Baptiste Parisot proximité de votre place initiale. Son • Durant les entractes, veillez à limiter Arnaud Payen vos déplacements. Vidéo • Une fois la représentation terminée, nous vous remercions de rester assis jusqu’au signal de sortie donné par nos équipes d’accueil. CRÉDITS Couverture : Le Gros Bouffon, maquette par Coralie Lèguevaque, 2021. Photos de répétitions p2, 10, 13, 14, 21, 22, 23 : ©David Herrero p4 : Famille de saltimbanques(Les Bateleurs), Dramaturgie, textes Carole Teulet Pablo Picasso, Paris, 1905. Huile sur toile, Mise en page et réalisation Laetitia Laloi 212,8 X 229,6 cm. Washington, National Gallery Impression Toulouse Métropole of Art. ©Succession Picasso 2021. Crédit de reproduction : Iberfoto, Bridgeman Images. Contact Diffusion Antoine de Froberville p7 : Picasso portant un masque de clown, antoine.defroberville@capitole.toulouse.fr photo de David Douglas Duncan, Harry Ransom 05 81 91 74 68 Center, The University of Texas at Austin©. Dessin et maquettes p16, 17 : ©Coralie Lèguevaque Licence d’entrepreneur de spectacle n°1-1.1093249, n°2- Dessins costumes p9, 15, 17, 18, 19 : 1093253, n°3-1093254 RCS TOULOUSR B 387 987 811. ©Elsa Pavanel 26 27
21 SAISON 22 opera LA GIOCONDA AMILCARE PONCHIELLI WOZZECK ALBAN BERG LA FLÛTE ENCHANTÉE WOLFGANG AMADÉ MOZART CARMEN GEORGES BIZET N°licences : 1-1.1093249, 2-1093253, 3-1093254 RCS TOULOUSE B 387 987 811 Crédit Antoine Fontaine - STUDIO PASTRE PLATÉE JEAN-PHILIPPE RAMEAU JENŮFA L’Emotion LEOŠ JANÁČEK LE BARBIER DE SÉVILLE partagEe GIOACCHINO ROSSINI ballet TOULOUSE-LAUTREC KADER BELARBI TOILES ÉTOILES A. NAJARRO, C. SOTO, H. WANG ET S. RAMIREZ DAPHNIS ET CHLOÉ THIERRY MALANDAIN 05 61 63 13 13 THEATREDUCAPITOLE.FR
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