Prestations complémentaires : éliminer les incitations inopportunes
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DOSSIER Prestations complémentaires : éliminer les incitations inopportunes KEYSTONE Le système suisse de sécurité sociale prévoit d’accorder des prestations complémentaires aux personnes dont les besoins vitaux ne sont pas couverts par leurs rentes AVS ou AI. Depuis 2008, les dépenses en faveur des PC sont passées d’environ 1 milliard à 4,7 aujourd’hui. Une des causes de cette ascension réside dans le vieillissement démographique. En fait, ce sont surtout les PC à l’AVS qui augmentent, lorsque les per- sonnes âgées sont en EMS. Le Conseil fédéral veut revoir le système et éliminer les incitations inopportunes. La question intéresse aussi les cantons, car ce sont eux qui supportent la plus grande partie des dépenses. Un des problèmes les plus urgents concerne les retraits en capital du IIe pilier. La réforme prévoit de les réduire. Une enquête de l’Office fédéral des assurances sociales montre la façon dont ce type de retraits se répercute sur les PC.
PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES Éléments clés de la réforme : renforcer les prestations complémentaires dans leur mission principale Ceux qui n’arrivent pas à vivre avec leur rente de vieillesse ou d’invalidité doivent recevoir un soutien. Le Conseil fédéral veut que la révision du système des prestations complémentaires consolide cet élément de base. Il faut, pour cela, améliorer l’utilisation de la fortune propre à des fins de prévoyance et réduire les effets de seuil. Nadine Schüpbach I l y a deux ans à peine, le Conseil fédéral fai- sait savoir qu’il désirait réformer le système des prestations complémentaires (PC) sur di- serrer davantage la ceinture. Ce faisant, on garantit également le fait qu’il ne saurait être question d’un transfert des charges pilier (voir tableau). Sur ces sommes, 45 à 51 millions de francs s’adresseront à la Confé- dération et 107 à 120 millions profiteront vers points. À cette fin, il souhaite avant tout vers l’aide sociale, et donc d’alourdir les aux cantons. À cela s’ajoutent des écono- que la large acceptation du système reste ac- dépenses cantonales. mies dans le système de réductions des quise et que les PC puissent continuer d’as- La réforme des PC n’est donc nullement primes consenties par les cantons, qui se- sumer pleinement leur tâche essentielle, soit un plan d’austérité. Les améliorations pro- ront de l’ordre de 116 millions. En d’autres garantir aux intéressés une existence digne. posées, en ce qui concerne l’utilisation de termes, la réforme offre des perspectives Dans ce sens, la réforme poursuit avant tout la fortune propre à des fins de prévoyance financières à long terme pour la Confédé- les objectifs suivants : et la réduction des effets de seuil, peuvent ration et les cantons. –– maintenir le niveau des prestations : toutefois soulager le système durable- –– améliorer l’utilisation de la fortune ment. En 2014, la Confédération et les can- Protéger le capital du IIe pilier propre à des fins de prévoyance, afin de tons ont dépensé près de 4,7 milliards de En tant que prestations répondant à un réduire le risque d’une dépendance PC francs pour les PC. Au regard de l’évolution besoin, les PC doivent venir en aide de avec l’âge ; démographique, les coûts progressent an- manière ciblée à celles et ceux qui, à dé- –– réduire les effets de seuil et les incita- nuellement dans une fourchette oscillant faut, seraient contraints de vivre sous le tions à rester dans le système des PC. entre 2,3 et 2,5 %. Les réformes prévues minimum d’existence. La réforme doit –– Le projet de loi que le Conseil fédéral a peuvent réduire les dépenses PC de 152 à garantir que les ressources propres des mis en consultation tient équitablement 171 millions de francs en 2022. L’impact fi- assurés soient prises en compte de ma- compte tant des besoins des rentiers, qui nancier dépend de la variante choisie pour nière appropriée dans le calcul de la PC. aspirent à une existence financièrement la limitation des retraits en capital du IIe Les personnes qui, à l’âge de la retraite, assurée, que des soucis des cantons concernant l’augmentation continue des coûts des PC. Mesures de la réforme des PC et conséquences financières en 2022 En millions de francs aux prix de 2015 Pas un plan d’austérité Mesures Conséquences dont dont cantons La tâche principale des PC se résume en financières Confédération une phrase. Leur objectif est d’assurer Retraits en capital du IIe pilier : une vie décente à celles et ceux qui, bé- Variante 1 : exclusion de la partie obligatoire –38 –11 –27 néficiaires d’une rente de vieillesse ou d’invalidité, ne disposent pas des moyens Variante 2 : limitation à 50 % pour la partie obligatoire –19 –5 –14 suffisants pour vivre dignement. Cela im- Démarrage d’une activité lucrative indépendante : –8 –2 –5 plique notamment la possibilité de tenir exclusion du paiement en espèces son propre ménage, de participer à la vie Prise en compte de la fortune dans le calcul de la PC : sociale, et de disposer d’une couverture médicale de base. Les dépenses qui sont Réduction des franchises sur la fortune totale –56 –17 –39 à ce titre reconnues aux intéressés sont Autres mesures –9 –5 –5 déjà calculées au plus près. Au niveau des Réduction des effets de seuil : loyers, elles sont même en partie insuffi- santes. C’est pourquoi le Conseil fédéral Prise en compte intégrale du revenu hypothétique –17 –11 –6 a, en décembre 2014, transmis un mes- Calcul PC de personnes en foyer : sage au Parlement relatif aux montants OFAS / LA VIE ÉCONOMIQUE maximaux pris en compte dans les PC au Prise en compte à la journée de la taxe du foyer –43 –5 –38 titre du loyer. La réforme est conçue de Total issu des mesures (variante 1) –171 –51 –120 telle sorte que les bénéficiaires de telles Total issu des mesures (variante 2) –152 –45 –107 prestations ne soient pas contraints de se 46 La Vie économique 4/ 2016
DOSSIER treprises1, les mesures en question ne de- vraient pas peser sur l’économie. En revanche, aucune limitation n’est prévue au chapitre des versements en ca- pital pour l’acquisition d’un logement. Cette forme de retrait ne pose aucun pro- blème aux PC, du fait que le capital concer- né reste acquis sous la forme d’une pro- priété immobilière. Une prise en compte appropriée de la fortune La réforme des PC entend garantir que les assurés aient d’abord recours, de manière appropriée, à leurs propres ressources fi- nancières avant de solliciter l’octroi de PC. Dans cet ordre, ce sont notamment les franchises sur la fortune totale qu’il im- porte d’adapter. Ainsi, pour les personnes seules, le Conseil fédéral propose de pas- ser de 37 500 à 30 000 francs, et pour les couples de 60 000 à 50 000 francs. Pour leur part, les franchises prévues sur les immeubles appartenant et servant d’habi- tation aux bénéficiaires de PC resteraient inchangées. Dans le même temps, une limite an- nuelle à la consommation de fortune de- KEYSTONE vrait voir le jour. Sans obligation légale ou Les prestations complémentaires doivent autre raison impérative, une personne ne permettrent de mener une vie décente. devrait désormais plus être autorisée à La participation à la vie sociale en fait partie. au plus tard à l’entrée dans une maison de consommer plus de 10 % de sa fortune par retraite, le plus souvent liée à des frais très année. Les dépenses qui iraient au-delà de élevés pour les personnes concernées, que cette limite interviendraient dans le calcul peuvent toucher une rente AVS pleine et des capitaux même plus importants sont de la PC à titre de fortune dessaisie. Grâce la prévoyance professionnelle, ne sont en appelés à disparaître rapidement. Dans à cette mesure, il est possible d’agir contre général pas tributaires de PC, du moins un cas comme dans l’autre, la rente man- une consommation inconsidérée de la for- tant qu’elles ne doivent pas entrer dans un quante doit alors être compensée par des tune, propre à augmenter le montant des EMS. C’est pourquoi il conviendra de pré- PC, ce qui renchérit inutilement la charge PC octroyées. server le capital du IIe pilier jusqu’à l’âge financière de l’État. C’est la raison pour la- de la retraite, pour le verser ensuite sous quelle le Conseil fédéral propose d’exclure Réduire les effets de seuil et les forme de rente. le versement de l’avoir de vieillesse sous En fait, même des assurés qui ne per- forme de capital pour l’ensemble de la par- incitations négatives çoivent pas leur IIe pilier sous forme de tie obligatoire, ou du moins à raison de la Qu’il entre ou sorte du système des PC, rente, mais d’avoir, peuvent en principe moitié de celle-ci. l’assuré voit quasiment toujours son re- subvenir à leurs besoins par leurs propres Les assurés qui font appel au capital du venu disponible se modifier. Ces effets de moyens jusqu’à l’épuisement du capital. IIe pilier pour entamer une activité indé- seuil peuvent poser problème si une per- Au moment où celui-ci est versé, une per- pendante courent le risque de perdre tout sonne qui touche une rente AI et des PC sonne ignore en général combien de temps ou partie de celui-ci en cas d’échec. Les PC se retrouve en meilleure situation finan- elle va encore vivre. Elle prend ce faisant le seront alors sollicitées pour combler en cière qu’avant l’invalidité. La question se risque que le capital retiré ne suffise pas partie les lacunes de la prévoyance. C’est pose aussi lorsqu’une sortie du système jusqu’à la fin de ses jours, et ce même s’il a ainsi que le Conseil fédéral envisage d’ex- des PC détériore nettement la situation été utilisé à des fins de prévoyance exclusi- clure également, dans la prévoyance pro- vement. Ce danger n’est pas de mise dans fessionnelle obligatoire, la possibilité du 1 Les avoirs de prévoyance versés pour entamer une le cas d’une rente versée à vie. Ce sont sou- paiement en espèces de la prestation de activité indépendante n’ont représenté, en 2013, que quelque 5 % du volume total des nouveaux crédits vent de petits avoirs qui sont précisément sortie pour démarrer une activité lucra- bancaires en faveur des indépendants et des entreprises versés sous forme de capital, de sorte qu’ils tive indépendante. Dans la mesure où les employant jusqu’à neuf salariés. Une partie de ces 5 % concerne de surcroît des avoirs surobligatoires, lesquels disparaissent très vite même s’ils sont uti- avoirs du IIe pilier ne jouent qu’un rôle mar- pourront continuer à être versés sous le régime de la lisés de manière très consciencieuse. C’est ginal dans le financement de nouvelles en- réglementation prévue. La Vie économique 4/ 2016 47
PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES nancière de l’intéressé. L’effet de seuil va fi de la PC tient compte d’un revenu hypothé- prime effective si le montant de celle-ci à l’encontre de la recherche d’emploi, étant tique. Selon le droit en vigueur, ce dernier est inférieur à la prime moyenne. En outre, donné que l’allocataire n’y trouve aucun est pris en compte au même titre que s’il le calcul de la PC ne devrait dorénavant intérêt. Il importe dès lors que la réforme était effectivement réalisé. Autrement dit, plus tenir compte que des taxes journa- des PC réduise dans la plus large mesure après déduction d’une franchise, le solde lières inhérentes aux jours effectivement les effets de seuil. est comptabilisé à raison de deux tiers seu- facturés pour le foyer. Cela évitera des su- De nos jours, les bénéficiaires de PC lement dans les revenus. Ce faisant, l’inci- rindemnisations également au chapitre en touchent dans la plupart des cantons un tation à faire un usage maximum de sa ca- question. montant qui est au moins égal à celui de pacité de gain s’en trouve diminuée. C’est La procédure de consultation sur le pro- la prime moyenne de l’assurance-maladie pourquoi les revenus hypothétiques de- jet de réforme des PC s’est achevée le 18 cantonale ou régionale. De la sorte, des PC vraient à l’avenir être pris en compte inté- mars dernier. Les résultats sont en cours modestes se retrouvent fortement majo- gralement dans le calcul de la PC. d’analyse. Le Conseil fédéral veut adop- rées en conséquence. Il en résulte des ef- ter le message sur la réforme d’ici la fin fets de seuil tant lors de l’entrée que lors de Éviter les sur indemnisations de cette année, pour que les délibérations la sortie du système. Dans le même temps, parlementaires puissent débuter en 2017. cette réglementation a pour conséquence La prime pour l’assurance obligatoire des que des personnes au bénéfice de cette soins fait partie de la couverture des be- garantie de PC minimale se voient dispo- soins vitaux. Elle s’intègre donc aux dé- ser d’un revenu disponible plus élevé que penses reconnues dans le calcul de la PC. les autres bénéficiaires. Afin de limiter ces Sous l’empire du droit en vigueur, le mon- effets indésirables, il est proposé d’abais- tant pris en compte correspond toujours ser le montant minimal de la PC au niveau au montant de la prime moyenne déter- de la réduction de prime la plus élevée des- minante du canton ou de la région. Pour tinée aux personnes sans droit aux PC ou à éviter des surindemnisations, les cantons l’aide sociale. doivent avoir la possibilité de prendre en Nadine Schüpbach Pour les personnes qui ne font pas usage considération, dans leurs calculs, non pas Juriste, Office fédéral des assurances sociales (Ofas), Berne de leur capacité de gain maximale, le calcul le montant de la prime moyenne, mais la Prestations complémentaires : beaucoup d’inducteurs et peu d’inhibiteurs de coûts Depuis des années, la démographie, les mutations structurelles et la politique sociale font augmenter les dépenses liées aux prestations complémentaires. La marge de manœuvre pour réduire les coûts est très étroite. Les assurances sociales doivent réagir. Carlo Knöpfel L es dépenses globales de la Confédération et des cantons au titre des prestations complémentaires (PC) de l’AI et de l’AVS se Toujours plus de personnes très âgées en foyer de l’espérance de vie, le nombre de per- sonnes très âgées augmentera fortement ces prochaines années. Actuellement, on sont fortement accrues ces dernières années. Trois facteurs conditionnent cette progres- peut encore supposer que c’est surtout la Après la réforme de la péréquation et de la ré- sion des dépenses : le changement démo- période entre la fin de l’activité profession- partition des tâches (RPT), elles ont augmen- graphique, les mutations structurelles sur nelle et le début de la fragilisation qui s’al- té de 1 milliard de francs entre 2008 et 2014, le marché du travail et la politique sociale longera, et non pas la phase de soins3. Du pour atteindre aujourd’hui 4,68 milliards. Les fédéraliste2. L’évolution de la courbe dé- point de vue des prestations complémen- dépenses des cantons ont, en particulier, ac- mographique est marquée par un net dé- taires, cela signifie deux choses. Première- cusé des hausses sensibles (voir illustration). placement du poids respectif de chaque ment, du fait que le besoin de soins se dé- Si l’on considère leur affectation, ce sont sur- groupe d’âge. Étant donné l’allongement place vers un âge plus avancé, le nombre de tout les dépenses pour les prestations com- personnes devant solliciter des PC dès leur 2 Conseil fédéral, Prestations complémentaires à l’AVS/ plémentaires de l’AVS qui ont pris l’ascenseur. AI – Accroissement des coûts et besoins, Berne, 2013. Voir Les PC de l’AI, elles, tendent à stagner1. également Schaltegger Christoph et Leisibach Patrick, 3 Gasser Nadja, Knöpfel Carlo et Seifert Kurt, Agile, puis Analyse der Kostentreiber in den Ergänzungsleistungen – fragile, étude sur la transition du troisième au quatrième Fakten, Probleme, Lösungsmöglichkeiten, expertise réalisée âge chez les personnes vulnérables, Pro Senectute 1 Office fédéral des assurances sociales, Statistiques des sur mandat de l’Union patronale suisse, 2015, Lucerne. Suisse, Zurich, 2015, p. 18ss. prestations complémentaires à l’AVS et à l’AI 2013, Berne, 2014. 48 La Vie économique 4/ 2016
DOSSIER départ à la retraite n’est plus que de 10 %. Cette proportion restera faible, même si le nombre de bénéficiaires de prestations complémentaires passant de l’AI à l’AVS ne diminuera guère ces prochaines an- nées. Deuxièmement, les PC allouées à des retraités concernent surtout des pen- sionnaires en foyer, dont les rentes et la fortune ne suffisent plus à financer un tel séjour. Le nombre de personnes très âgées se trouvant dans cette situation va donc s’accroître, bien que l’entrée en maison de retraite intervienne à un âge toujours plus avancé et que la durée de séjour tende à raccourcir. Dans ces circonstances, les cantons et les communes ont tout intérêt à ce que les personnes âgées restent le plus longtemps possible dans leur propre logement. Tou- tefois, il faut pour cela que le système d’as- sistance et de soins à domicile soit bien développé et coordonné. Dans un avenir prévisible, les proches ne pourront en ef- fet plus apporter aux aînés la même aide qu’aujourd’hui. Les familles se rétrécissent. Les enfants, les beaux-fils et les belles- filles sont souvent actifs jusqu’à l’âge de la retraite. La distance physique entre les parents et leurs descendants est toujours plus grande. Il faut également continuer à promouvoir de nouvelles formes d’habitat, comme les logements encadrés. La loi sur les prestations complémentaires doit pré- voir davantage de flexibilité dans le finan- cement de telles structures. Aujourd’hui, ni la Confédération ni les cantons ne s’es- timent responsables de ce domaine qui se situe à mi-chemin entre l’appartement tra- KEYSTONE ditionnel et l’hébergement en EMS. Les mutations structurelles font progresser les dépenses. Pour les jeunes peu qualifies, le revenu assuré ne suffit souvent pas, en cas d’invalidité. Les jeunes peu qualifiés forment un groupe à risque Prestations complémentaires selon leur affectation Les mutations structurelles sur le marché du travail sont le deuxième facteur qui in- Les prestations complémentaires sont versées à des personnes invalides ou âgées, qui vivent à la maison ou dans un foyer, mais dont les rentes ne suffisent pas à couvrir les coûts liés à l’âge et aux soins. Les fluence l’évolution des dépenses au titre dépenses moyennes varient selon le type d’affectation. Les PC destinées aux bénéficiaires de rentes AI en des prestations complémentaires. Elles institution sont les plus élevées. Elles dépassent 47 000 francs par an. Quant aux personnes âgées séjour- créent une situation particulièrement diffi- nant dans des foyers, elles touchent en moyenne à peine 36 000 francs par an. Les prestations complémen- cile pour les personnes dont les capacités taires allouées aux retraités restés dans leur propre logement sont nettement plus basses : ceux qui ont besoin d’un complément à leur rente reçoivent un peu plus de 6300 francs par an. Par contre, les invalides sont limitées. Les jeunes adultes sans quali- vivant à domicile touchent environ 10 200 francs. fication professionnelle ou très faiblement qualifiés ont beaucoup de peine à trouver Prestations complémentaires pour les personnes à la maison et en EMS un emploi qui leur assure le minimum vi- 2014 À la maison En EMS tal. En outre, ils présentent un risque ac- Total en Nombre En % Dépenses par Total en Nombre En % Dépenses par cru d’invalidité psychique4. De ce fait, le millions de de per- personnes, millions de de per- personnes, nombre de rentres octroyées en raison de francs sonnes en francs francs sonnes en francs maladies psychiques continue d’augmen- PC de l’AVS 913,2 144 103 47 6337 1753,0 48 753 16 35 957 ter – contrairement à la tendance enregis- PC de l’AI 934,5 91 050 30 10 264 1032,2 21 814 7 47 318 4 OCDE, Santé mentale et emploi: Suisse, Publications de l’OCDE, Paris, 2014. OFAS, STATISTIQUE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES À L’AVS ET À L’AI 2014 / LA VIE ÉCONOMIQUE La Vie économique 4/ 2016 49
PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES Enfin, le nouveau régime de finance- Évolution des dépenses au titre des prestations complémentaires, total et selon la ment des soins, entré en vigueur en 2011, a source fixé la participation maximale des assurés 5000 En millions de francs aux coûts. Il oblige les cantons à trouver avec leurs communes une solution pour le OFAS, STATISTIQUES DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES À L’AVS ET 4500 financement restant des séjours en EMS. 4000 On peut bien sûr se demander si les PC 3500 sont l’instrument approprié pour finan- cer l’assistance et les soins tant à domicile 3000 qu’en institution. Un débat, actuellement À L’AI (2014) / LA VIE ÉCONOMIQUE 2500 en cours, porte sur les autres formes pos- sibles de financement5. Toutefois, aucune 2000 proposition susceptible de réunir un sou- 1500 tien majoritaire n’est en vue pour l’instant. 1000 La dynamique qui guide l’évolution 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 des dépenses en matière de PC fait appa- raître clairement que la révision du régime Total des dépenses Contribution de la Confédération Contribution des cantons actuel ne dispose que d’une marge de manœuvre extrêmement mince pour frei- trée pour la totalité des nouvelles rentes AI. 2008 et le nouveau régime de finance- ner cette évolution, surtout si une réduc- Ce sont surtout de jeunes adultes qui dé- ment des soins en 2011. Depuis sa 5e ré- tion des prestations est exclue. Ce sont pendent des prestations complémentaires. vision, l’assurance-invalidité se conçoit plutôt les assurances sociales situées en En effet, les salaires modestes qu’ils ont comme une agence de réinsertion. D’un amont des PC qui seront mises à contri- touchés antérieurement ne leur assurent côté, cela a permis d’alléger la charge des bution, en particulier l’assurance-invalidi- que de faibles rentes AI. De plus, les rentes prestations complémentaires. De l’autre, té, l’assurance-maladie ainsi que le premier du deuxième pilier sont pratiquement l’abolition des rentes complémentaires et et le deuxième pilier de la prévoyance vieil- inexistantes dans leur cas. du supplément de carrière ont nettement lesse. Si rien ne change dans le système de Le supplément de carrière, qui faisait accru le taux de bénéficiaires de PC dans la sécurité sociale, le Conseil fédéral pré- naguère augmenter la rente AI avec l’âge, a l’assurance-invalidité. voit que les dépenses au titre des PC conti- été supprimé en 2008 dans le cadre de la nueront d’augmenter pour s’établir à 7,88 5e révision de l’AI. Cette abolition contribue Les assurances sociales mises à milliards de francs d’ici 20356. également à une dépendance à long terme envers les prestations complémentaires. contribution 5 Gasser Nadja et al. (2015), p. 123ss. 6 Conseil fédéral, Vue d’ensemble des perspectives de finan- C’est pourquoi il faut saluer les efforts par- Les négociations sur la RPT ont conduit cement des assurances sociales jusqu’en 2035, Berne, 2013. ticuliers déployés par l’assurance-invalidi- à adopter une nouvelle clé de répartition té pour améliorer l’insertion de ce groupe entre la Confédération et les cantons pour à risque sur le marché du travail. À long les prestations complémentaires annuelles. terme, une telle évolution de l’AI se tradui- Depuis lors, la Confédération finance 5/8 ra par un allègement des dépenses au titre des PC versées aux personnes vivant à des prestations complémentaires. domicile. Les 3/8 restants sont à la charge Le troisième facteur est la politique so- des cantons. En outre, ces derniers sont te- ciale elle-même. La situation de la Confé- nus d’assumer l’intégralité des prestations dération et des cantons en matière de dé- complémentaires pour les séjours en insti- Carlo Knöpfel penses a surtout été marquée par la 5e tution ainsi que les frais liés à la maladie et Professeur de politique sociale et de travail révision de l’AI, la révision totale de la loi au handicap, si les moyens des personnes social, Haute école spécialisée de la Suisse du Nord-Ouest, Bâle sur les prestations complémentaires en âgées ne suffisent pas. 50 La Vie économique 4/ 2016
DOSSIER Prestations complémentaires et retraits du IIe pilier Un tiers des personnes qui ont perçu pour la première fois des prestations complémentaires en 2014 avaient, à un moment ou un autre, retiré du capital de leur IIe pilier. De tels retraits sont possibles pour divers motifs, mais ils se font la plupart du temps lors du départ à la retraite. Urs Portmann «A près avoir perdu son capital LPP à la Bourse, un rentier reçoit des presta- tions complémentaires. » « Un couple de re- prestations de la prévoyance profession- nelle sous forme de rente, cette dernière est imputée au revenu déterminant. La si- d’exécution des PC – principalement can- tonaux (voir encadré) – que l’Office fédé- ral des assurances sociales a obtenu une traités se paie un tour du monde avant de tuation est différente lorsqu’ils demandent première vue d’ensemble. L’enquête por- recourir aux PC. » Ces dernières années, des que les prestations LPP leur soient versées tait sur toutes les demandes de prestations histoires de ce genre, parues dans la presse, en une seule fois sous forme de capital. Le complémentaires à l’assurance-vieillesse ont alarmé la population. L’Office fédéral des calcul du revenu déterminant repose alors (PC à l’AVS) déposées en 2014. Sur un total assurances sociales a donc décidé de faire sur le capital encore disponible après dé- de 29 400 demandes déposées, 10 100, soit analyser les liens entre le retrait en capital duction d’une franchise1. Normalement, 35 %, ont été refusées, tandis que les or- et l’octroi de prestations complémentaires un dixième de cette somme est pris en ganes d’exécution des PC ont reconnu un (PC). L’étude avait pour but d’examiner les compte comme revenu annuel détermi- droit aux PC à l’AVS dans 19 300 cas. conséquences de l’un sur l’autre et de déter- nant. Or, la fortune peut fondre rapidement miner le nombre de personnes devant recou- en cas d’achats coûteux, de pertes sur les Davantage de retraits en capital rir aux PC après avoir épuisé leur IIe pilier. Ses placements ou de frais médicaux. Une fois résultats doivent permettre de prendre des le capital consommé, le revenu imputable chez les jeunes retraités mesures susceptibles d’améliorer le système est nul et le risque de devoir recourir aux Sur ce total, 33 % environ des demandeurs des PC et son acceptation dans la population. PC augmente. avaient retiré du capital du IIe pilier pour Avant de réaliser l’étude, on ignorait un motif quelconque (voir tableau). Cette Influence du revenu sur combien de bénéficiaires de PC avaient proportion diffère beaucoup en fonction précédemment retiré du capital de pré- de l’âge auquel une personne soumet sa le montant des prestations voyance professionnelle, pour quels motifs demande de PC. Plus de 50 % des jeunes Le calcul servant à fixer le montant des PC et à quelle hauteur. C’est grâce à une en- retraités avaient retiré au moins une fois du tient compte des rentes du IIe pilier, mais quête sommaire menée auprès d’organes capital d’une caisse de pension, tandis que aussi de la fortune et donc des retraits en 1 La franchise est de 37 500 francs pour les personnes chez les retraités âgés de 80 ans et plus ce capital. Pour les retraités qui perçoivent les seules et de 60 000 francs pour les couples. chiffre n’était que de 12 %. Motifs de perception d’un capital du IIe pilier chez les bénéficiaires de PC à l’AVS STATISTIQUE DES PC, OFAS, ENQUÊTE SUR LES RETRAITS EN CAPITAL 2,3% 12,5% 3,1% 17% 52% / LA VIE ÉCONOMIQUE 13.1% Retrait au moment de la retraite Démarrage d’une activité indépendante Dissolution d’un compte de libre passage Acquisition d’un logement Départ définitif de la Suisse Autres motifs KEYSTONE (Nombre de nouveaux bénéficiaires de PC à Passer d’une vie de luxe aux prestations complémentaires ? Celui qui retire une partie de sa fortune du II e l’AVS ayant perçu un capital du IIe pilier en 2014, pilier, le fait principalement à la retraite. Couple à Sila Maria. N = 6300) La Vie économique 4/ 2016 51
PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES Cette différence s’explique principale- avaient obtenu un versement en capital au 10 millions de francs en 2014 sur les PC. La ment par le fait qu’une proportion moindre moment de la retraite. Le montant médian suppression des versements en espèces de personnes âgées disposent d’une pré- de ces versements était de 95 500 francs. pour commencer une activité lucrative voyance professionnelle et que les pos- Une grande partie des retraits ont été ef- indépendante aurait permis, quant à elle, sibilités de retrait en capital étaient limi- fectués quelques années seulement avant d’économiser 2 millions de francs. Le po- tées par le passé. Les jeunes retraités sont, le dépôt de la demande de PC. Le montant tentiel d’économies représente en tout quant à eux, plus souvent assurés à la pré- de l’avoir de vieillesse est étroitement lié 4,5 % des dépenses annuelles consenties voyance professionnelle et plus nombreux au laps de temps qui s’écoule entre le re- au titre des nouvelles PC. Cela n’est qu’un à profiter des nouvelles possibilités de re- trait du capital et la première perception de constat momentané, fondé uniquement trait en capital. La valeur médiane des re- PC. Les jeunes retraités, qui ont eu recours sur les nouveaux cas de PC. Si le compor- traits était de 90 000 francs ; la moitié aux PC les deux premières années après le tement observé ne change pas à l’avenir, étaient donc supérieurs et l’autre moitié in- départ à la retraite, ont retiré un capital de les retraits en capital occasionneront à férieurs à ce montant. prévoyance de 40 000 francs en moyenne. long terme des dépenses encore plus im- Les retraités plus âgés, qui se sont vu at- portantes, car les jeunes retraités, qui per- Retrait en capital lors du tribuer des PC six à onze ans après avoir çoivent plus souvent leur prévoyance pro- pris leur retraite, ont perçu des montants fessionnelle sous forme de capital, auront départ à la retraite au moins trois fois plus importants. Ce fait besoin de PC pendant plus longtemps. Dans quelles circonstances et pour quels n’a rien d’étonnant, puisque le droit aux Quelles différences les bénéficiaires de motifs2 les assurés ont-ils perçu un capital prestations complémentaires naît notam- PC présentent-ils par rapport aux autres du IIe pilier ? Comme le montre l’illustra- ment lorsque le capital a beaucoup dimi- retraités ? Selon l’Enquête suisse sur la po- tion, 52 % l’ont fait au moment du départ nué. Chez les jeunes retraités, où les ver- pulation active (Espa), 67 % des jeunes re- à la retraite, 13 % ont retiré du capital pour sements en capital sont moins élevés, cette traités4 perçoivent des prestations de la commencer une activité professionnelle situation se produit assez rapidement. LPP sous forme de rente, de capital ou des indépendante et 17 % en cas de dissolution Chez les retraités plus âgés, il s’écoule plus deux lorsqu’ils partent à la retraite. Dans le d’un compte de libre passage. Seuls 3 % se de temps entre le retrait du IIe pilier et le groupe des personnes ayant déposé une sont servis du capital de prévoyance pour premier versement de prestations complé- première demande de PC en 2014, cette pro- financer un logement. Le départ définitif mentaires. L’entrée dans une maison de re- portion était de 58 % pour la même tranche de la Suisse, dans 2 % des cas, est aussi un traite est un autre événement obligeant les d’âge5. Il est certes logique que les nou- motif négligeable. retraités âgés à recourir aux PC, malgré un veaux bénéficiaires de PC soient propor- Deux motifs sont prépondérants : les re- bon revenu et le versement d’un capital im- tionnellement moins nombreux à toucher traits en capital au moment du départ à la portant. des prestations LPP, mais leur quote-part retraite et les versements en espèces pour La valeur médiane des versements en reste néanmoins assez élevée. Par rapport commencer une activité lucrative indépen- espèces pour démarrage d’une activité lu- aux autres retraités, ceux qui sont tribu- dante. D’ailleurs, c’est dans ces cas que le crative indépendante est de 50 000 francs, taires de PC retirent plus souvent leurs pres- projet de réforme des PC3, actuellement en et donc sensiblement inférieure à celle des tations de prévoyance sous forme de capi- consultation, prévoit de nouvelles règles. retraits en capital au moment de la retraite. tal et plus rarement sous forme de rente. La Parmi les personnes qui ont perçu des PC L’étude a recensé 900 cas de ce type par- principale différence entre les retraités bé- pour la première fois en 2014, près de 3400 mi les personnes bénéficiant de PC pour la néficiaires de PC et les autres réside toute- 2 Lorsqu’une personne a fait plusieurs retraits pour des motifs première fois en 2014. Par rapport aux sa- fois dans le montant des prestations de la différents, le montant le plus élevé a été retenu pour l’étude. lariés, les personnes ayant exercé une acti- prévoyance professionnelle. Le capital et les 3 Révision partielle de la loi fédérale sur les prestations com- vité indépendante doivent plus souvent re- rentes des bénéficiaires de PC sont nette- plémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité. courir aux PC dans les cinq années suivant ment plus modestes, ce qui explique qu’ils leur départ à la retraite. y fassent recours. Bénéficiaires de PC à l’AVS ayant 4 A savoir des personnes qui sont parties à la retraite il y a préalablement retiré un capital du Un potentiel d’économies cinq ans au plus. 5 Nous disposons seulement d’informations sur les per- IIe pilier réside chez les indépendants et sonnes qui perçoivent des PC pour la première fois en 2014 et non pas sur l’effectif complet des bénéficiaires Âge du Retrait en capital du les retraités de PC du même âge. Cette comparaison illustre néan- moins les principales différences. bénéficiaire* IIe pilier Limiter les retraits en capital permettrait STATISTIQUE DES PC, OFAS, ENQUÊTE SUR LES RETRAITS EN CAPITAL / Non Oui de réduire les dépenses en PC. En effet, au Total 67,3 32,7 moment où celles-ci sont demandées, le capital perçu précédemment est pour ainsi Jusqu’à 64 ans 48,0 52,0 dire épuisé. Si, à la place de ce capital, une 65–69 ans 44,8 55,2 rente avait été allouée, celle-ci continuerait 70–74 ans 53,1 46,9 d’être versée et serait imputée au revenu 75–79 ans 62,9 37,1 déterminant, ce qui réduirait d’autant le montant des PC ou les rendrait superflues. LA VIE ÉCONOMIQUE 80 et + 87,7 12,3 S’il n’y avait eu aucun versement en capi- Urs Portmann tal au moment de la retraite, la Confédéra- Expert scientifique à l’Office fédéral des * Âge du bénéficiaire lorsqu’il perçoit pour la première assurances sociales (Ofas), Berne fois des PC (19 300 personnes en 2014). tion et les cantons auraient pu économiser 52 La Vie économique 4/ 2016
DOSSIER La réforme des prestations complémentaires n’est pas suffisante à elle seule Les directeurs cantonaux des affaires sociales estiment qu’il faut contenir la hausse des coûts des prestations complémentaires, sans pour autant en réduire le niveau. Pour cela, il faut aussi agir dans le domaine du IIe pilier et du financement des soins. Peter Gomm soins dont elle a besoin augmente lui aussi. De ce fait, les personnes dépendantes qui ont épuisé leur fortune et qui ont besoin de PC s’accroît continuellement. En troisième et dernier lieu, d’autres as- surances sociales ont réduit leurs presta- tions et de nouvelles tâches se sont ajou- tées à celles qui existent déjà, alimentant elles aussi la hausse des coûts : en vertu de la RPT, les cantons supportent également une partie des dépenses occasionnées par les prestations individuelles de l’AI. Les 5e et 6e révisions (premier volet) de l’AI ont introduit et renforcé le principe « La réa- daptation prime la rente », tout en préci- sant les conditions d’octroi des presta- tions. Ces nouveautés concernent surtout des personnes atteintes dans leur santé, mais qui n’ont manifestement pas droit à une rente d’invalidité. Ces personnes ne reçoivent plus de rente AI, ce qui entraîne un transfert des coûts vers l’aide sociale. De nombreux rentiers dont les prestations ont été réduites à la suite de ces révisions et qui ne perçoivent en conséquence plus qu’une rente partielle doivent désormais demander des PC. KEYSTONE Les cantons doivent en outre suppor- Une grande partie des prestations complé- ter des charges croissantes dans le do- mentaires sont accordées lors de l’entrée en maine des soins : en révisant la loi sur l’as- D epuis la dernière révision de la loi en EMS. Une assurance obligatoire des soins est surance-maladie en 2010, le législateur a actuellement en discussion. 2008, réalisée en même temps que la opté pour un « modèle de financement pu- réforme de la péréquation financière et de blic » plutôt que pour un « modèle d’assu- la répartition des tâches (RPT), les coûts que tiers AVS et à 44 % des bénéficiaires de l’AI. rance », de sorte que le financement des les prestations complémentaires (PC) font Depuis l’entrée en vigueur de la RPT, les can- soins n’a cessé de se complexifier. Dans supporter à la Confédération et aux cantons tons prennent en charge deux tiers des coûts le secteur résidentiel, la hausse des coûts ont fortement progressé. Ils ont même enre- qu’elles occasionnent. des PC a pour cause principale la RPT, le lé- gistré certaines années une augmentation à Dans une étude consacrée à l’évolu- gislateur ayant sous-estimé l’évolution fu- deux chiffres. Le nombre de personnes qui, tion de ces coûts, l’Office fédéral des as- ture en matière de soins. du fait de leur âge ou d’une invalidité, ont surances sociales (Ofas) a calculé que les besoin de ces prestations pour s’en sortir fi- PC atteindraient au total 5,5 milliards de Maintenir les prestations sous nancièrement a augmenté, car les rentes du francs en 2020, si rien ne change d’ici là. premier pilier (AVS) ou de l’assurance-invali- condition de ressources dité (AI) ne suffisent souvent plus à subvenir Transfert de compétences La hausse des charges occasionnées par à leurs besoins de base. Les chiffres parlent les PC à l’AVS et à l’AI est un phénomène d’eux-mêmes : en douze ans, le total annuel Plusieurs facteurs expliquent la hausse des inquiétant qu’il s’agit de contenir. Les avis des dépenses au titre des PC a augmenté de coûts enregistrée depuis 2008. En premier sont toujours unanimes à ce sujet. Des 50 %, pour atteindre 4,7 milliards de francs. lieu, la population s’accroît. En deuxième réformes doivent impérativement être Ces prestations sont versées à 12 % des ren- lieu, elle vieillit constamment et le coût des engagées pour que les cantons puissent La Vie économique 4/ 2016 53
PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES continuer à fournir les PC, indispensables à solution équilibrée s’impose tant pour les jourd’hui souvent fournies par la collectivi- la couverture des besoins vitaux. Ces pres- montants de fortune librement disponibles té et cette tendance se poursuivra. De nos tations essentielles ne doivent donc pas que pour l’imputation du revenu. jours, l’admission dans un EMS ou une ins- revêtir un caractère facultatif. Il faut par La CDAS estime aussi qu’il faut abaisser titution pour personnes handicapées est ailleurs éviter de combiner divers régimes la prime de référence pour l’assurance-ma- entrée dans les mœurs. Or, si ces services d’aide : la personne qui perçoit des PC doit ladie et dissocier les PC de la réduction in- sont un choix de société, ils ne sont pas pouvoir subvenir à ses besoins vitaux sans dividuelle de prime (RIP), afin que les can- gratuits pour autant. dépendre d’autres prestations, comme tons puissent davantage assumer leur La diversité des intérêts en présence l’aide sociale. fonction de pilotage de la politique sociale et les enjeux financiers sont tels qu’il sera S’il est essentiel de conserver aux PC, en déterminant tant les primes que les ré- sans doute difficile de trouver rapidement instrument important et efficace, leur ca- ductions individuelles. une solution. Plutôt que de tout miser sur ractère de prestations sous condition de de grands chantiers, nous devrions en pa- ressources, certaines modifications s’im- Assurance obligatoire des soins : rallèle poursuivre dans une voie qui s’avère posent toutefois à d’autres égards. Il y a en toujours payante : celle des changements effet lieu d’adopter des mesures pour main- une option à examiner à petite échelle, même s’ils ne permettent tenir le niveau des PC et freiner la hausse Deux mesures importantes en lien direct pas de résoudre les problèmes d’un seul des coûts dans les domaines qui s’y prêtent. avec les PC dépendent d’autres branches coup. Autant le dire tout de suite : la révi- Selon la Conférence des directrices et d’assurance, plus précisément du IIe pilier sion de la loi sur les prestations complé- directeurs cantonaux des affaires sociales et du financement des soins. S’agissant de mentaires ne règlera pas à elle seule la (CDAS), le train de mesures que le Conseil la première, la CDAS est convaincue que sa question des coûts. fédéral a soumis à consultation fin 2015 capacité de prévoyance doit être amélio- La CDAS donne ses suffrages au projet tient compte de ces circonstances : conju- rée. À cette fin, il faut élargir le cercle des du Conseil fédéral, qui fait coup double : guée à la suppression des effets de seuil et assurés et supprimer les incitations qui fa- il dote les PC – un instrument dont l’im- des fausses incitations, l’amélioration de cilitent le retrait de l’avoir de vieillesse sous portance sociale n’est plus à démon- la capacité de prévoyance optimalise plu- forme de capital. trer – d’une assise financière saine grâce sieurs composantes essentielles des PC. Dans la grande majorité des cas, les PC à un vaste éventail de mesures et contri- commencent à être versées au moment de bue à endiguer l’augmentation des coûts. Franchises sur la fortune : des l’admission en EMS ou durant le séjour. De- Conscients de leur mission, les cantons as- puis l’introduction du régime actuel de fi- sumeront leur part de responsabilité dans seuils excessifs qui accroissent les nancement des soins, les PC font peser le dispositif de sécurité sociale et contri- coûts sur de nombreux cantons, et aussi sur de bueront à son financement. Il incombe à Le relèvement des franchises sur la fortune nombreuses communes – qui participent toutes les parties intéressées d’apporter a été l’une des principales mesures du nou- souvent à leur financement –, des charges leur concours en fonction de leur capacité. veau régime de financement des soins, en- élevées et difficilement supportables. Dès Le mérite de tout système de sécurité so- tré en vigueur en 2008. En conséquence, le lors, la CDAS plaide pour un renforcement ciale bien rodé va au-delà de la réduction nombre d’ayants droit a augmenté et le pa- de la prévoyance individuelle pour les per- des risques et de l’aide aux personnes en trimoine des bénéficiaires est préservé au sonnes nécessitant des soins. Elle estime détresse : il favorise la prospérité sociale et profit de leurs héritiers, ce qui explique en qu’il est temps de s’attaquer à la question compense notablement les inégalités. grande partie la hausse des coûts des PC. d’une assurance obligatoire pour les soins Il est donc nécessaire de revoir ces fran- de longue durée. L’un des buts de la po- chises à la baisse. En outre, la CDAS rejette litique sociale reste de garantir aux per- l’idée d’une imputation systématique des sonnes âgées une vie digne, autonome et revenus hypothétiques, comme celui résul- libre de soucis matériels, à des coûts sup- tant du taux d’activité potentiellement réa- portables. Les PC y contribuent. lisable selon l’AI. Une partie des personnes concernées devraient alors recourir à l’aide Freiner l’augmentation des coûts sociale en plus des PC. Pour la Conférence, il faudrait examiner d’autres solutions per- La société confie toujours davantage de Peter Gomm mettant d’éviter les effets négatifs sur l’in- tâches et de charges aux pouvoirs publics : Conseiller d’État soleurois et président de citation au travail et de favoriser l’intégra- les prestations assumées par la famille il la Conférence des directrices et directeurs cantonaux des affaires sociales (CDAS) tion des personnes au bénéfice de l’AI. Une y a quelques décennies encore sont au- 54 La Vie économique 4/ 2016
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