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LETTRE D’INFORMATION
            JUIN 2016 // N° 16
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               QUELLE PRÉVENTION
               À L’ADOLESCENCE ?

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dossier

ADOLESCENCE
QUELS RISQUES ? QUELLE PRÉVENTION ?
L’adolescence est un temps favorable au chan-                                   L’adolescent∙e apprivoise les métamorphoses de
gement mais elle comporte aussi un risque de                                    son corps, s’approprie sa sexualité, se construit
voir adopter des conduites qui pourraient com-                                  une autonomie et une réflexivité propres, ques-
promettre le développement de l’individu. En                                    tionne sa place au sein de la société et apprend
termes de prévention et d’éducation pour la santé,                              à maîtriser les émotions induites par ces boule-
« l’adolescence représente une ouverture qu’il                                  versements.
convient de ne pas manquer » (Pr P. Jeammet).                                                  UNE BONNE
                                                                                              QUALITÉ DE VIE
Adolescence
                                                                                  La dernière enquête HBSC, réalisée en 2014,
L’adolescence est classiquement définie comme                                     montre que plus de 80 % des jeunes Français∙e∙s
la période de transition entre l’enfance et l’âge                                 de 11 à 15 ans jugent bonne leur qualité de vie
adulte. Elle permet un développement à la fois                                    (OMS, 2016).
individuel et social qui amène le jeune, d’une
part, à se différencier pour devenir un être                                    Adolescence et risque
unique, d’autre part, à s’intégrer pour deve-  Pour l’adolescent∙e, les conduites à risque ren-
nir un être social.L’adolescence se traduit parvoient à la difficulté de l’accès à l’âge adulte.
d’intenses mutations des goûts, des compor-    Elles incarnent des mises à l’épreuve de lui∙elle-
tements, des représentations, des rêves. Le    même en quête d’une certitude sur le sens
jeune cherche sa voie, « entre reproduction de de son existence. Le terme de « conduites à
la trajectoire de ses parents ou de ses pairs et
                                               risque  » relève d’une notion statistique et socio-
expérimentations diverses ». Il se confronte aux
                                               logique. Il ne prend en compte ni la représenta-
autres jeunes parmi lesquels il se constitue untion ni la perception du risque pour le jeune. Le
réseau qui se forge et partage des symboles    risque paraît en effet de peu de poids à celui-ci
identitaires : vêtements, musiques, langage, etc.
                                               au regard de son mal de vivre ou de sa volonté
                                                            de se tester.
          > ADOLESCENCE, L’AGE DES PREMIERES FOIS           Les jeunes actuels expriment sou-
                                                            vent le sentiment d’être dépossédés
                       6E                  3E
    PRODUITS                                                de tout avenir. Les comportements
                FILLES    GARÇONS   FILLES    GARÇONS       à risque deviennent de véritables
                 43 %       55 %     75 %       84 %        « actes de passage », des manières
     ALCOOL
                                                            d’abattre le mur d’impuissance
     IVRESSE     3%          7%      26 %       30 %        ressenti devant un présent vécu
      TABAC      8%         13 %     46 %       52 %        comme une impasse. « Si elle n’est
                                                            pas nourrie de projets, la tempora-
    CANNABIS             1%                2%                21 %               27 %
Expérimentation de substances psychoactives (Source : enquête HBSC 2014)
L’expérimentation est définie comme l’usage au moins une fois au cours de la vie.

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lité adolescente s’écrase sur un présent éternel           Les modes d’alcoolisation se sont transformés :
qui rend indépassable la situation douloureuse. »          les jeunes boivent moins souvent mais de façon
(David Le Breton)                                          intense et en groupe lors des fêtes de fin de se-
Exister ne suffit pas ; l’adolescent∙e veut se sentir      maine. L’ivresse induit une dissociation : il s’agit
exister. Pour lui∙elle-même et dans le regard des          en quelque sorte de « disparaître », à soi comme
autres. Les conduites à risque sont aussi traver-          au monde, et de ne conserver aucun souvenir
sées par les connotations sociales du genre. Elles         de ce temps. Un temps ouvert sur le risque :
deviennent, chez les filles, résonance de leur             chutes, accidents, rapports sexuels non consen-
mal-être, chez les garçons, exposition de soi.             tis et/ou sans usage du préservatif.
« La culture de l’intensité, de l’excès et de l’accès      La consommation de cannabis s’inscrit elle aussi
immédiat à l’objet du désir » (Jean-Pierre Cou-            le plus souvent dans des épisodes festifs. Elle
teron) dans laquelle baignent les adolescent∙e∙s           relève d’une sociabilité adolescente exaltant le
banalise l’exploration de sensations fortes, que           plaisir et la convivialité.
ce soit par l’expérimentation de produits, la
pratique de sports à risque ou la plongée dans                   La dimension sociale
« l’univers hypersensoriel des consoles de jeux ».          de la consommation de drogues est trop souvent
Consommation et abus de psychotropes                        négligée dans les politiques de prévention.
peuvent permettre au jeune d’exprimer son au-                                       (Stéphane Legleye)
tonomie vis-à-vis de ses parents, de tester ses
limites, voire de se sentir valorisé par ses pairs.        Adolescence et prévention
Qu’il s’agisse de supporter un environnement               Les politiques de prévention doivent être glo-
anxiogène, de faciliter les relations sociales,            bale, conçues à un niveau sociétal, s’adresser
d’améliorer ses performances, d’exprimer ou de             à tous les âges et s’efforcer d’échafauder des
cacher ses émotions ou de « faire la fête », les           environnements favorables à la santé. Mais il est
substances psychoactives semblent apporter                 important que soit proposée aux adolescent∙e∙s
une solution. Malgré les risques socio-sanitaires          une prévention adaptée, pertinente et efficace.
associés à leur usage, certaines d’entre elles             L’éducation pour la santé doit permettre à
(tabac, alcool, cannabis) sont largement expéri-           l’adolescent∙e de traverser plus facilement
mentées, parfois dès les « années collège », leur          ce passage d’un âge à un autre en lui fournis-
consommation précoce pouvant conduire à un                 sant les éléments d’information et de réflexion
usage problématique.                                       nécessaires à la prise de décision qui sous-tend
                                                           ses comportements. Il s’agit d’accompagner le
             > 1ER RAPPORT SEXUEL                          jeune dans ses découvertes, de le sensibiliser
                                                           aux différentes influences qui pèsent sur lui, de
   ÂGES          13 ANS      15 ANS      17 ANS
                                                           favoriser le développement de ses compétences
   FILLES         4%          22 %        58 %             psychosociales, c’est-à-dire de son aptitude à
                                                           répondre aux exigences de la vie quotidienne,
 GARÇONS          14 %        37 %        60 %
                                                           à interagir avec son entourage et à adopter des
(Source : Enquête Inserm, 2013)

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RÉFLEXIONS ET FORMATIONS :
UNE ÉQUIPE EN MOUVEMENT
Comment rester proche des jeunes tout en oc-                                    Formations
cupant sa place de professionnel·le ? Comment                                   Prenant en compte les dernières recomman-
mobiliser des références culturelles qui appar-                                 dations en promotion de la santé, l’ensemble
tiennent à leur monde ? Comment adapter sa                                      de l’équipe s’est formée au développement
pratique en prenant en compte les évolutions                                    des compétences psycho-sociales. Elle a aussi
sociétales ? Autant de questions auxquelles sont                                bénéficié d’une formation du Centre Huber-
confrontées les professionnel·le·s de la jeunesse.                              tine Auclert afin d’intégrer l’éducation à l’éga-
Pornographie, jeux vidéo, religion, sexisme,                                    lité femmes-hommes dans l’éducation pour la
violence, etc. : les comportements des jeunes                                   santé.
cristallisent souvent les inquiétudes des adultes.
Entre méconnaissances, réalités et représenta-                                  Cafés de l’animation
tions, cette sensation de décalage entre géné-                                  S’appuyant sur l’intervention de sociologues,
rations peut constituer un frein au contact avec                                d’experts de structures associatives ou insti-
les adolescent·e·s.                                                             tutionnelle , les Cafés de l’animation combinent
L’équipe du Crips Île-de-France bénéficie de                                    découvertes et réflexions lors d’un rendez-vous
différents temps d’échange et de formation                                      mensuel.
pour garantir à tous ses membres une culture                                    Comprendre pourquoi les intervenant·e·s
commune, leur permettre d’actualiser leurs                                      doivent parler d’âge légal du consentement et
connaissances et de réfléchir à leur posture,                                   non de « majorité sexuelle  », interroger la trans-
enfin leur donner les moyens de développer                                      mission des normes lorsqu’ils·elles disent aux
de nouvelles techniques pédagogiques.                                           jeunes que le porno n’est pas la réalité, ques-
                                                                                tionner les liens entre sexisme et racisme dans
Échanges de pratiques                                                           le rap, identifier les enjeux autour de l’identité
Indispensables pour rompre l’isolement et                                       et de la mise en jeu des féminités et masculi-
contribuer au partage, ces temps permettent                                     nités, concevoir un vocabulaire qui donne envie
une prise de recul sur les pratiques tant en                                    aux adolescent·e·s de faire le point sur leurs
favorisant la réflexion qu’en échangeant mé-                                    consommations, comprendre la religion comme
thodes et techniques d’animation pour gérer                                     l’une des dimensions de la personne, savoir
les problématiques de terrain. L’interactivité,                                 comment sont accueilli·e·s les jeunes en CPEF,
l’implication des jeunes qui ne consomment pas,                                 réfléchir aux nouvelles formes de prévention
la gestion de la « violence », l’appui sur les dif-                             des consommations de drogues, positionner les
férences : autant de sujets qui ont mis à jour la                               femmes musulmanes comme actrices de leur
diversité des savoir-faire et des outils employés.                              vie, appréhender en quoi et de quoi les enquêtes
                                                                                quantitatives sont représentatives.

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Autant de questions qui ont pu émerger lors de           À travers ces exercices testés in vivo, l’équipe
ce programme annuel pendant lequel l’équipe              s’interroge sur ses représentations et identifie
s’est réunie autour :                                    les liens entre stigmatisation et vie affective et
• de thématiques qui interpellent les adultes tels      sexuelle.
  que « Rap et sexisme ? », « Femmes et islam »,         (1) L e planning Familial 75, Du Côté des femmes,
  « Jeunes et porno  », « Lois et sexualité »,               Le Relai 77, OPPELIA, La Corde Raide-UDSM
• de visites de lieux ressources valorisés auprès       (2) Observatoire Régional de Santé d’Île-de-France
  des jeunes (Centre de Planification et d’Édu-          (3) N  otion absente du droit français et pouvant
                                                               renforcer les représentations des publics
  cation Familiale-CPEF, Consultation Jeunes                   sur une sexualité qui serait interdite.
  Consommateurs-CJC),
• de réflexions autour des données épidémiolo-                    L’ÉQUIPE D’ANIMATION
  giques d’usage de drogues disponibles en Île-                   DU CRIPS ÎLE-DE-FRANCE
  de-France et sur les approches en prévention               Une quarantaine de personnes partent à la
  des consommations.                                         rencontre des jeunes de toute l’Île-de-France.
                                                             Assurant la mise en œuvre des projets des pôles
                                                             scolaire et 13-25 ans / publics spécifiques, ces
Temps d’expérimentation                                      professionnel·le·s sont issu·e·s des secteurs du
Initiés en juin 2015, ces temps de mises en pra-             médico-social, de l’éducation, de la prévention.
tiques ont pour objectif l’adaptation de tech-               Chaque personne qui rejoint l’équipe bénéficie de
niques d’animation de pédagogie critique de la               formations socle.
norme développées en Suède. À contre-cou-                    La complémentarité des profils apporte une
                                                             richesse d’expériences et de réflexions permettant
rant de la pédagogie employée majoritairement                une meilleure adaptation à la diversité des publics
en France, celle-ci focalise sur les normes invi-            rencontrés.
sibles et non sur les personnes qui s’en écartent.

                                                  Journée mondiale contre l’homophobie et la transphobie,
                                                          animation dans les locaux du Crips le 17 mai 2016

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INTERVENIR
AUPRÈS DE JEUNES EN INSERTION
Dans le cadre de sa mission de prévention, le                                  Une règle qui soulage certains jeunes craignant
Crips réalise auprès des jeunes en insertion                                   un « repérage » des consommateur·trice·s. Il
des séances de sensibilisation afin de les aider                               s’agit aussi de « respecter la parole de l’autre »,
à développer les compétences nécessaires pour                                  un exercice pas si évident pour des jeunes qui
adopter des choix favorables à leur santé.                                     obéissent plutôt à l’adage : « Plus je parle fort,
                                                                               plus j’ai raison. »
Des jeunes de 16 à 25 ans en dynamique
d’insertion sociale et professionnelle                                         La place
Ces interventions s’adressent à des jeunes de                                  et le respect de chacun·e dans la relation
16 à 25 ans en dynamique d’insertion sociale                                   Un brainstorming autour de l’expression « vie
et professionnelle dans diverses structures :                                  affective et sexuelle » permet de faire émerger
École de la deuxième chance (E2C), Établisse-                                  les préoccupations des adolescent·e·s. Au be-
ment pour l’insertion dans l’emploi (Epide), mis-                              soin, l’animateur·trice utilise quelques cartes des
sions locales des dispositifs « Avenir Jeunes »                                jeux Info/intox ou Ado sexo qui proposent des
et « Garantie Jeunes ».En décrochage scolaire                                  affirmations sur lesquelles les participant·e·s
parfois depuis plusieurs années ou sortis d’école                              sont invité·e·s à réagir. La séance traite des re-
avec un très faible niveau de qualification, ces                               lations filles/garçons, de la place et du respect
jeunes y bénéficient d’un soutien pour se réin-                                de chacun dans la relation, des stéréotypes
sérer dans la société et accéder à un emploi. Il                               de genre. Leur vision dichotomique des rôles
s’agit de restaurer leur confiance et leur estime                              sexuels cantonnent les filles dans le paraître et
de soi à travers un travail sur le savoir-être, une                            les garçons dans l’agir. Elles cherchent à proté-
formation générale comprenant la maîtrise des                                  ger leur « réputation » ; ils cherchent à affirmer
savoirs de base (lire, écrire, compter, etc.), un                              leur « virilité  ».
parcours citoyen (stages, actions concrètes) et                                Lorsque les orientations sexuelles, dont l’ho-
la mise en œuvre d’un projet professionnel.                                    mosexualité, sont abordées, un rappel à la loi
                                                                               anti-discrimination est parfois nécessaire. Mais
Un cadre d’intervention                                                        l’intervenant·e s’efforce surtout de faire prendre
précis et rassurant                                                            conscience aux jeunes que des propos railleurs
Une intervention s’adresse à un groupe mixte                                   bloquent la parole de l’autre et peuvent le bles-
de 15 à 20 personnes et dure deux heures.                                      ser.Il·Elle aborde pour terminer la contraception,
Elle traite de la vie affective et sexuelle ou des                             les infections sexuellement transmissibles et
consommations de drogues ou des deux thé-                                      leur dépistage. Il·Elle fournit des informations
matiques. L’animateur·trice de prévention pose                                 sur les modes de transmission, les symptômes
des règles de fonctionnement dont la première                                  et parle des structures auxquelles il est possible
souligne que « l’on ne parle pas de sa vie privée ».                           d’avoir recours : Cegidd1, planning familial, etc.

6   C R IPS INFOS // L ETTR E D’ IN FO RMAT IO N // J U IN 20 1 6 // N ° 1 6
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le Crips en actions

                                                                        NOS INTERVENTIONS
Être attentif·ve·s les un·e·s aux autres
Côté consommations, l’animateur·trice propose
                                                                            EN CHIFFRE
                                                              En 2015, le programme de prévention des
au groupe de réfléchir à ce qu’est une drogue.                conduites à risques auprès des jeunes de 16 à 25
Que possèdent en commun les produits ? Que                    ans en insertion a touché 1 651 jeunes dans 42
signifie pour eux·elles « faire la fête » ?                   structures réparties dans toute l’Île-de-France.
C’est l’occasion d’évoquer la banalisation de
« l’alcoolisation du samedi soir », du joint quoti-       sûr, du retour, de « celui·celle qui conduit car
dien. « Pour une bonne part de ces jeunes, boire          il·elle ne boit pas ». Il·Elle insiste sur l’importance
tous les jours c’est être alcoolique mais fumer du        de ne pas rester seul·e donc d’être attentif·ve·s
cannabis tous les jours, ce n’est pas être dépen-         les un·e·s aux autres.
dant. » L’occasion de réfléchir aux motivations           Le travail de resocialisation qu’ils ont entamé
à consommer, à l’influence des pairs et aux               permet d’ailleurs aux jeunes de comprendre
pressions du groupe. L’occasion aussi de donner           qu’ils ont besoin de diminuer leur consomma-
conscience des quantités d’alcool ingérées, de            tion pour mieux intégrer un cadre : « Je ne me
déconstruire des idées reçues du genre : « mé-            saoule pas le dimanche car le lundi j’ai besoin de
langer un soda à l’alcool en réduit les effets », de      ma tête. »
sensibiliser aux effets du cannabis sur l’atten-          L’animateur·trice évoque enfin les CJC2 et laisse
tion et la mémorisation. Avec l’abus et l’ivresse,        à disposition dépliants et brochures ainsi que
sont abordés le consentement dans la relation             des préservatifs masculins et féminins.
sexuelle, l’usage du préservatif.
                                                          (1) C entre gratuit d’information, de dépistage et de
L’intervenant·e parle de la conduite à tenir en
                                                              diagnostic
cas de malaise, voire de coma éthylique et, bien          (2) Consultation jeunes consommateurs

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du côté des associations

LE BUS DE FIL SANTÉ JEUNES SUR HABBO
LE VIRTUEL AU SERVICE DE LA PRÉVENTION SANTÉ
Au sein du dispositif Fil Santé Jeunes, nous or-                                de santé et les amener à discuter entre eux. De
ganisons deux fois par semaine un tchat en par-                                 cette manière nous sortons d’un savoir qui serait
tenariat avec le jeu en ligne Habbo, un monde                                   transmis de manière verticale, des profession-
virtuel dans lequel les adolescents simulent la                                 nels vers les jeunes, et tentons une transmission
vie réelle.                                                                     horizontale avec des partages d’expériences et
Réseau social pour les plus de 13 ans, Habbo,                                   l’apprentissage de l’altérité des points de vue sur
visité chaque mois par des millions de jeunes,                                  un même sujet.
propose à ses membres - inscrits gratuitement
- de créer un avatar. Ce personnage les repré-                                  Sur leur terrain
sente dans un monde virtuel où ils décorent                                     Les adolescents ne viennent pas nous chercher,
leur appartement, jouent, se prélassent sur des                                 nous sommes sur leur terrain, et le principe du
plages au sable fin pixélisé, dansent dans des                                  bus est engageant. Nous sommes là pour en-
discothèques, et discutent avec d’autres parti-                                 courager les débats et répondre aux multiples
cipants.                                                                        questions.
                                                                                L’action de prévention, de ce fait, est plus
Une action de prévention online                                                 concrète pour les « habbos » qui peuvent s’ap-
L’équipe de Fil Santé Jeunes intervient dans                                    proprier dans leurs propres expériences (ac-
Habbo en tant qu’acteur de prévention en santé.                                 tuelles, fantasmées ou à venir) la prévention de
Ses animateurs, également sous la forme d’ava-                                  leur santé au quotidien.
tars, proposent des débats de vingt minutes à
dix adolescents - appelés « habbos » - dans un                                  Une mise en mouvement des émotions
espace dédié : un bus virtuel.                                                  Ces discussions évoquent davantage des
Les « habbos » s’y rendent pour échanger au-                                    groupes de parole qu’un tchat puisqu’aux mes-
tour d’un thème proposé par les professionnels                                  sages écrits par les participants s’ajoutent les
de santé de Fil Santé Jeunes (psychologues,                                     mouvements, de groupe ou individuels, des ava-
médecins ou sages-femmes). Nous traitons dif-                                   tars. Ceux-ci peuvent en effet choisir leur place,
férents sujets tel que : la puberté, les IST (Infec-                            s’asseoir, se déplacer, boire un thé... À la manière
tion sexuellement transmissible), l’amour, leurs                                des émoticônes, ces actions offrent un espace
éventuelles consommations, les conduites à                                      de créativité pour exprimer ses émotions ou sa
risques, le handicap, les violences...                                          solidarité. Comme lors d’une session d’échange
Le temps de débat est court, et intense. Nous ne                                où un « habbo » fait part d’une expérience de
pouvons pas entrer dans des problématiques                                      harcèlement au collège. Ce jeune a alors déplacé
individuelles. Ce n’est d’ailleurs pas le but de                                son avatar dans un coin du bus. Les autres ont
ces échanges. Nous souhaitons ici faire connais-                                décidé de se mettre autour de lui pensant que
sance, leur montrer ce qu’est un professionnel                                  l’isolement peut, en soi, aggraver les blessures

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du côté des associations

dues au harcèlement. Cette dynamique donne               de prendre de la distance avec ce qui perturbe
aussi aux professionnels des indications pré-            ou bloque. Comme lors de cette session de
cieuses sur ce qui peut parfois gêner, déranger          discussion sur l’arrivée des poils, où les jeunes
certains jeunes qui, par les mouvements de               parlent librement, entre eux et avec nous, et
leurs avatars, expriment l’agitation que pro-            posent facilement leurs questions. Dans le vir-
voquent des sujets intimes comme les prises              tuel se comparer à un Yéti n’est ni gênant, ni
de risques (IST, grossesse non-prévue, etc.) par         honteux.
exemple.                                                 Et si un adolescent semble en difficulté ou a en-
                                                         core des questions à l’issue des échanges, nous
L’avatar soutient mieux le regard                        l’orientons vers le dispositif Fil Santé Jeunes,
Comme nous le confirme l’expérience de Fil               soit sur la ligne téléphonique au 0800 235 236,
Santé Jeunes dans l’aide à distance, nous                soit par tchat ou mail afin de prendre le temps
constatons que les jeunes ont souvent du mal à           de l’écouter, l’informer et l’orienter vers des pro-
soutenir le regard et peuvent être paralysés par         fessionnels près de chez lui s’il le souhaite. Nous
celui que les autres portent sur eux. Le virtuel         nous appuyons également sur les articles et
leur permet d’affirmer leur parole sans cette            dossiers mensuels d’information et de préven-
crainte d’un jugement immédiat de leur appa-             tion de notre site www.filsantejeunes.com.
rence en mutation.                                                                          Capucine Dubois
Pour certains, la puberté faisant vaciller les fon-                            Coordinatrice média-sociaux
dations de leur identité, l’avatar tel un soi-exté-                     Ecoutante-Rédactrice, Psychologue
riorisé permet d’être au monde différemment et                                              Fil Santé Jeunes

                                                      C RIPS IN FO S // LET T R E D ’I N FO R M ATI O N // J U I N 2 0 1 6 // N °1 6   9
la parole à ...

 JEAN SPIRI
 PRÉSIDENT DU CRIPS ÎLE-DE-FRANCE

 LE NUMÉRIQUE
 AU CŒUR DE L’ACTION DE PRÉVENTION DU CRIPS ÎLE-DE-FRANCE
 Le numérique ouvre d’immenses potentiali-                                      ponibles, dans les domaines de l’information, de
 tés en matière de santé, que ce soit en termes                                 la prévention, de l’éducation thérapeutique, de
 d’autonomisation et de montée en compé-                                        l’aide au diagnostic. Comment trouver la bonne,
 tences du patient dans la gestion de sa maladie,                               celle qui ne sera pas contre-productive ? Cette
 de personnalisation de la santé, d’observance                                  question est essentielle car l’emploi d’internet
 du traitement, de télédiagnostic, de gestion des                               pour rechercher des informations relatives à la
 épidémies, d’exploitation des données et bien                                  santé est très fréquent (plus de 40% des inter-
 sûr en termes de prévention, ce qui intéresse en                               nautes tous âges confondus).
 premier lieu le Crips.
                                                                                En cela, le Crips doit faire du volet numérique
 L’utilisation du numérique en prévention                                       un axe fort et transversal sur toutes ses thé-
 auprès des jeunes possède des avantages évi-                                   matiques d’action. Des projets très intéressants
 dents :                                                                        ont d’ores et déjà abouti, notamment la webapp
 • « coller » à leurs usages quotidiens, notam-                                Tony jeune gay, qui doit être encore améliorée,
   ment de leur smartphone, lieu d’information                                  ou l’application Entr’L. Il nous faut maintenant
   et de sociabilisation, lieu également d’intimité ;                           pousser plus loin la réflexion sur ces outils car, si
 • développer un sentiment de responsabilisation                              des applications spécifiques sont utiles pour des
   et d’implication de ces jeunes concernant leur                               publics cibles très précis, il convient désormais
   propre santé ;                                                               de concevoir des outils généraux et person-
 • pouvoir créer des communautés horizontales                                 nalisables. Le Conseil régional d’Île-de-France
   de transmission de l’information sans passer                                 nous y invite au travers de la création d’un i-
   par un schéma traditionnellement plus verti-                                 Pass contraception qui a vocation à devenir un
   cal.                                                                         portail général santé jeunesse. Le Crips pren-
                                                                                dra toute sa part à l’élaboration d’un tel portail
 De ce fait, le défi n’est pas celui de la mise en                              qui permettra à chaque jeune Francilien de se
 libre-service de l’information pour ces jeunes                                 constituer son propre parcours d’information et
 mais bien de sa qualité, tant en termes de fonds                               de prévention.
 que de possibilités concrètes de personnalisa-
 tion (compréhension, appropriation, utilisation
 via des services de géolocalisation pour identi-
 fier des structures ressources…). Un exemple ?
 Il existe plus de 100 000 applications santé dis-

10   C R IPS INFOS // L ETTR E D’ IN FO RMAT IO N // J U IN 20 1 6 // N ° 1 6
focus sur...

LES ADOLESCENTS ET LE NUMÉRIQUE

Les données ci-dessous sont tirées de l’enquête         Plus des trois quarts des 12-17 ans (79 %)
sur les « Conditions de vie et les aspirations »,       fréquentent les réseaux sociaux.
réalisée par le CRÉDOC1 en juin 2015.                   • 30 % pour faire de nouvelles rencontres.
                                                        • 77 % pour s’informer sur l’actualité.
Équipement                                              • 88 % pour se divertir.
• 97 % des 12-17 ans vivent dans un foyer équipé      • 92 % pour partager des photos ou des vidéos.
  d’un ordinateur et 68 % dans un foyer équipé          • 96 % pour entretenir les liens avec leurs
  de plusieurs ordinateurs.                               proches.
• 42 % vivent dans un foyer équipé d’une
  tablette tactile.                                     Santé et TIC2
• 98 % bénéficient d’une connexion internet.          Près d’un sur cinq des 12-17 ans interrogés (18 %)
• 93 % possèdent un téléphone mobile.                 a recherché des informations sur la santé dans
• 81 % possèdent un smartphone.                       le mois précédant l’enquête.
                                                        Plus d’un sur trois (37 %) « voient un intérêt » à
Usage                                                   porter un objet connecté qui analyse les mouve-
Tous les 12-17 ans utilisent internet, dont 85 %        ments et calcule les calories dépensées.
quotidiennement.
À partir de leur téléphone mobile,                      (1) C entre de recherche pour l’étude et l’observation
• 25 % téléphonent via Hangouts, etc.                       des conditions de vie
                                                        (2) T echnologie de l’information et de la communica-
• 38 % cherchent un endroit par géolocalisation .
                                                              tion
• 41 % échangent des messages via Hangouts,
  etc.
• 41 % consultent leurs courriels.
• 80 % naviguent sur internet.
• 81 % téléchargent des applications.
Plus de la moitié des adolescents (59 %)
écoutent ou téléchargent des vidéos, des films
et des séries sur internet ; la presque totalité
d’entre eux (94 %) écoutent ou téléchargent de
la musique.
Ils sont 46 % à laisser sur internet des notes,
des commentaires ou des évaluations mais
seulement 20 % à les consulter. 39 % d’entre
eux font plutôt confiance aux avis laissés par les          Baromètre du numérique édition 2015 / CRÉDOC,
utilisateurs.                                             Collection des rapports n° R325, décembre 2015, 170 p.

                                                     C RIPS IN FO S // LET T R E D ’I N FO R M ATI O N // J U I N 2 0 1 6 // N °1 6   11
JEUNES FRsanAtéNdesCIjeuLInesEN    S
POUR LA SAmaNtionTÉet deDpréES
                             vention du sida et pour la
                                                              . Voi ci la nouvelle si-
                                                                           , ce 20 juin.
Centre régional d’infor                                                                 e générale de notre association
                                      s, depuis le vote de l’Assemblé                                           structure, une évolu-
gnification de l’acronyme Crip                                    vol  ont é de développement de notre
                             cor   res   pon     d  à  une                                                          en Île-de-France.
Cette évolution de nom                                       act    ivité act   uelle et les besoins des jeunes
                            re   hist  oire    ,  not  re                                                        mission historique de
tion cohérente avec not                                         ,  par   un   approfondissement de notre
                                              mie    r  lieu
 Ce développement pas       se,  en    pre                                                                    cipaux porteurs du plan
                                            s   Île-  de-    Fra     nce   va ainsi devenir l’un des prin
 lutte contre le VIH/sid   a.  Le   Crip                                                                           seil régional le 17 juin
                                                   », don     t   le  prin  cipe a été acté en séance du Con
 « Pour une Île-de-Fra    nce   san    s sida                                                                     0 ainsi que la fin de la
                                              ché     d’at   tein    dre   le  « 90-90-90 » onusien en 202
  dernier, et qui a pour  obj ect   if affi                                                                     d’hui, près de la moitié
                          en  Île-   de-   Fra    nce     à   l’ho   rizo n 2030. Rappelons que, aujour
  transmission du VIH                                                                     territoire francilien.
                                        ination sont découverts sur le                                               thématique d’inter-
  des nouveaux cas de contam                                   ext   ens  ion   du périmètre de notre champ
                              se   aus   si   par    une                                                       vrant auprès d’eux. Cen-
  Ce développement pas                                               des   professionnels franciliens œu
                         jeu  nes    com      me     aup     rès                                                      r sur l’ensemble du
   vention, auprès des                                               le  et  les addictions, nous allons travaille
                                                e  et  sex     uel
   trés jusqu’alors sur la vie   affe    ctiv                                                                     et de l’impact de notre
                            se   »,  per   me      ttan   t  ain    si un   renforcement de la cohérence
   champ « santé jeunes
    action.                                                                                                  s les territoires. Pour cela,
                                              obj   ect   if   de     tou cher tous les jeunes, sur tou
    Enfin, nous devons    avo   ir  pou    r                                                                         les acteurs locaux et
                            uité    ter   rito   rial e   de      nos    act  ions, nous nous appuierons sur
    nous veillerons à l’éq                                                                   ils numériques.
                                            mieux les potentialités des out                                    c le soutien de l’ensemble
    nous veillerons à exploiter au                                 itim  e  soit-il, ne sera efficace qu’ave
                           aus   si  coh   ére     nt  et   lég
     Ce développement,
                                                 tifs, médicaux, institution-
     des acteurs de santé, associa
                                            de ces thématiques, il existe
     nels, politiques. Sur nombre
                                              acteurs de terrain engagés,
     déjà bien des actions et des
                                             . Le Crips n’est pas là pour
      professionnels et associatifs
                                             n plus pour les aider à avoir
      se substituer à eux mais bie
                                                    de la Région. En matière
      une résonance sur l’ensemble
                                             serait une grave erreur. C’est
      de santé, faire cavalier seul
                                                  caces et pourrons répondre
       ensemble que nous serons effi
                                                      Franciliens.
       aux besoins de santé des jeunes
                                                                  Jean Spiri
                                         Président du Crip s Île- de- France

                                         CRIPS INFOS
                                         Lettre d’information pour les élus franciliens et l’ensemble de nos partenaires
                                         Centre régional d’information et de prévention du sida et pour la santé des jeunes (Crips Île-de-France).
                                         14 rue Maublanc, 75O15 Paris
                                         Tél. : O1 56 8O 33 33 / www.lecrips-idf.net / info@lecrips.net / Twitter / Facebook
                                         Directeur de publication : Michel Bourrelly
                                         Crédit photo : Crips Île-de-France / Création et impression : Arlys
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