SOLS, DÉPÔTS MEUBLES ET GÉOLOGIE EN PLACE - AMÉNAGEONS
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Sols, dépôts meubles et géologie en place AMÉNAGEONS RÉVISION DU SCHÉMA D’AMÉNAGEMENT ET LE FUTUR ! DE DÉVELOPPEMENT
Sols, dépôts meubles et géologie en place Ville de Gatineau – Service de l’urbanisme et du développement durable MAI, 2011
PRÉAMBULE En accord avec les obligations prévues à la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme, la Ville de Gatineau procède à la révision de son schéma d’aménagement et de développement du territoire. Elle a adopté un programme de travail prévoyant 4 étapes : l’élaboration du portrait du territoire et d’un cadre d’analyse préparant à la découverte d’enjeux de développement, l’établissement des scénarios de développement et le choix d’un scénario préférentiel, le premier projet de schéma et le second projet de schéma. Ces étapes se dérouleront jusqu’en 2013; elles seront suivies du processus d’entrée en vigueur du schéma en 2014. L’exercice de révision du schéma est, par ailleurs, empreint d’une approche axée sur des préoccupations de développement durable, selon les intentions que la collectivité gatinoise sera appelée à privilégier pour le futur et pour le bien des générations à venir. Afin de favoriser la réflexion lors des consultations publiques prévues à toutes les étapes d’élaboration de la révision du schéma, le portrait thématique du territoire est dressé. Le présent document fait partie d’une série portant sur plusieurs sujets illustrés succinctement, bien que se voulant suffisamment développés pour enrichir les pistes de réflexion et jeter les bases d’une participation constructive et essentielle de la population au déroulement de l’exercice.
1. INTRODUCTION 6 2. HISTORIQUE GÉOLOGIQUE DE LA RÉGION D’OTTAWA-GATINEAU 8 2.1 La préhistoire en bref 8 2.2 Témoignage de la préhistoire dans notre géologie locale 9 2.3 Notre région aujourd’hui 10 3. FORMATION ET STRATIFICATION DU SOL 11 4. LES RESSOURCES DU SOUS-SOL DE GATINEAU 12 4.1 Les substances minérales de surface 12 4.2 Les substances minérales 13 4.3 Le pétrole et le gaz naturel 13 4.4 Les sites géologiques exceptionnels 14 4.5 La soustraction du territoire à la désignation sur carte, à l’exploration et à l’exploitation minière 14 5. LES CONTRAINTES À L’OCCUPATION DU SOL RELIÉES AU SOUS-SOL 15 5.1 Les zones à risque de mouvement de masse 15 5.2 Dommages lors de séismes 16 5.3 La formation d’ocre ferreuse 16 5.4 Sites contaminés 17 6. CONCLUSIONS ET SUGGESTION DE PISTES DE RÉFLEXION 18 7. BIBLIOGRAPHIE 19
Sols, dépôts meubles et géologie en place 6 1. introduction En plus de supporter nos pieds, nos routes et nos fondations de bâtiments, le sol et le sous-sol représentent le témoin de l’histoire géologique de notre région. De cette histoire ont émergé le relief, le panorama, l’hydrographie, l’intérêt stratégique et économique ainsi que la biosphère du territoire à l’intérieur duquel nous vivons tous. Bien que le calendrier géologique leur donne une apparence d’immuabilité, le sol et le sous-sol constituent des systèmes en constante motion et en évolution qui se déplacent horizontalement et verticalement. Ces mouvements emmagasinent puis relâchent occasionnellement des quantités presque incalculables d’énergie; ils doivent demeurer sous constante surveillance pour la planification municipale et la sécurité civile. Pour cette raison, l’identification des contraintes naturelles reliées aux sols, notamment les zones à risque élevé de mouvement de masse, a toujours fait partie du contenu obligatoire d’un schéma d’aménagement. Révision du schéma d’aménagement et de développement
Sols, dépôts meubles et géologie en place Par ailleurs, même si à Gatineau les mines et carrières sont presque toutes fermées aujourd’hui, l’exploitation des ressources du sol fait partie de notre héritage patrimonial et industriel et, encore aujourd’hui, suscite l’intérêt. Enfin, les années 1990 ont vu s’inscrire un nouveau sujet à l’agenda des sciences de la terre : les sols contaminés, d’abord introduit par le ministère du Développement durable, de l’environnement et des parcs (MDDEP) via une politique en 1988 et maintenant devenu une obligation réglementaire depuis 2003. Gatineau compte près de 350 sites dont l’histoire ancienne ou future est marquée par la gestion de sites contaminés, incluant des sites qui ont été réhabilités, des sites qui sont actuellement contaminés et devront faire l’objet d’un plan de réhabilitation ou, encore, des sites qui, en raison des nouvelles dispositions réglementaires, devront faire l’objet d’une caractérisation avant tout changement d’usage ou qui doivent surveiller périodiquement la qualité des eaux souterraines. La présente section a donc pour but de concilier tous ces objectifs : résumer notre passé géologique, présenter notre socle rocheux, nos dépôts meubles et nos sols, apprécier l’avenir de l’exploitation de nos ressources minérales et, enfin, identifier les contraintes au développement reliées à la condition et l’évolution du sol et du sous-sol. 7 1 Fait référence aux personnes nées entre 1946 et 1966 au Canada. Révision du schéma d’aménagement et de développement
Sols, dépôts meubles et géologie en place 2. Historique géologique de la région d’Ottawa-Gatineau Notre région compte dans son sous-sol des unités rocheuses qui sont parmi les plus vieilles de la planète et compte également des pans entiers d’histoire qui ont disparu, en proie à des épisodes d’érosion de plusieurs millions d’années. 2.1 La préhistoire en bref Les indices d’origine géologique et astronomique démontrent que l’âge approximatif de la Terre est d’environ 4,6 milliards d’années. Les principaux actes de cette longue histoire sont : • Le précambrien, qui couvre les premiers 88 % de l’histoire de la planète et qui comprend la formation de la Terre, la formation de la Lune, la formation d’une croûte terrestre stable (il y a environ 4,04 milliards d’années), l’apparition des cyanobactéries et de la photosynthèse, la stabilisation du cycle du carbone et celle de la tectonique des plaques, la formation et la rupture du supercontinent Rodinia; • Le paléozoïque, qui dure de 542 à 251 millions d’années : comme l’étymologie de son nom l’indique (« ancienne vie »), cette ère est marquée par l’apparition de nombreuses espèces animales à coquille dure et des grandes forêts primitives, par le développement des premiers reptiles sophistiqués et des conifères; un nouveau supercontinent, Pangée, se forme et son impact sur la superficie côtière et le climat provoque progressivement la plus importante extinction massive de notre Histoire, ce qui clôt l’ère; • Le mésozoïque, qui dure de 251 à 65,5 millions d’années : cette ère est marquée par la stabilisation 8 de nouveaux écosystèmes, par la rupture de Pangée dans les continents que nous connaissons aujourd’hui, par le règne des dinosaures et l’apparition des mammifères; cette ère est marquée par une différenciation du climat et une colonisation des terrains plus secs par les conifères; sa fin correspond à l’extinction des dinosaures, dont les seuls descendants sont aujourd’hui les oiseaux; • Le Cénozoïque, notre ère géologique actuelle, est marquée par la création du courant marin circumpolaire antarctique, par un refroidissement climatique global, par la dominance des mammifères et l’apparition d’homo sapiens; plus récemment, une série d’épisodes glaciaires a profondément marqué notre région et se fait encore sentir aujourd’hui : même si la dernière calotte glaciaire s’est retirée depuis 11 000 ans, le continent n’a pas encore complètement corrigé la déformation causée par son poids. Comme sous-entendu en introduction, notre sous-sol local ne comporte pas de témoignages de toutes ces ères géologiques. Certaines périodes d’érosion en ont retiré d’importants segments. En bref, notre région comprend les vestiges de trois âges distincts et, à certains endroits, le voisinage entre ces différentes unités peut être observé à l’œil nu. Notre région est grandement façonnée par la présence d’unités ignées du bouclier canadien. Notre région abrite aussi la portion la plus occidentale des basses-terres du Saint-Laurent, composées de nombreuses successions de roches sédimentaires . Révision du schéma d’aménagement et de développement
Sols, dépôts meubles et géologie en place 2.2 Témoignage de la préhistoire dans notre géologie locale Suivant la plus récente glaciation et, surtout, l’épisode postglaciaire, une série de dépôts meubles se sont accumulés, sur lesquels se sont successivement formés nos sols. Voici brièvement la succession historique de notre géologie locale. Nos roches les plus anciennes sont des marbres, des quartzites et des granites qui surplombent avec évidence le parc de la Gatineau. Lors de la formation de Rodinia, ces roches ont été compressées, fissurées par du magma et métamorphisées. Lorsque la compression a cessé, ces montagnes précambriennes – la province de Grenville du bouclier canadien – ont commencé à subir une lente érosion qui se poursuit à ce jour. Durant la majeure partie de l’ère paléozoïque, notre région était une plage tropicale puis le fond d’un océan, résultant en une importante sédimentation et accumulation fossilifère jusqu’à la fermeture de l’océan lors de l’accrétion du supercontinent Pangée. Un événement important marque l’histoire de notre région durant l’ère mésozoïque : la formation du graben1 1 Graben : fossé tectonique d’effondrement entre deux d’Ottawa-Bonnechère. Les conséquences de ce graben sont doubles : tout d’abord la dépression 9 abrite une portion des roches sédimentaires de l’érosion – donnant ainsi les basses terres du failles normales. Saint-Laurent – et elle marque notre relief de façon franche avec le bouclier canadien, comme en témoigne l’escarpement d’Eardley. Révision du schéma d’aménagement et de développement
Sols, dépôts meubles et géologie en place 2 Relèvement isostatique : Au cours du dernier 1,6 million d’années (Cénozoïque récent), l’Amérique du Nord a été mouvement vertical d’une croûte continentale pour compenser un recouverte de grandes calottes glaciaires : des inlandsis. La dernière a surplombé notre région changement de masse (l’équilibre de 20 000 à 11 000 ans avant notre ère. Les glaciers ont sculpté et façonné les unités les plus isostatique n’est pas encore complètement atteint en Amérique dures et en ont érodé plusieurs autres. De plus, le continent enfoncé sous le poids de la glace du Nord). s’est vu affecté, suivant le retrait de la calotte, d’une importante invasion marine : la mer de 3 Alluvions : dépôts et débris plus ou Champlain (l’eau était salée). moins gros (sable, vase, gravier, etc.) transportés par l’eau courante. Avec le relèvement isostatique2 du continent, le relèvement du bouclier canadien a chassé la 4 Till : accumulation de débris de mer et a d’abord formé le lac Lampsilis (dont les vestiges forment actuellement le lac Saint- roches entraînés puis abandonnés Pierre), puis a progressivement emprisonné les eaux dans le bassin versant du fleuve Saint- Laurent tel que nous le connaissons. Au plan plus local, cette évolution se démarque par deux périodes relativement distinctes, soit le fleuve proto-Outaouais (qui a donné aux basses terres une couverture de dépôts de plage ou d’alluvions3 fluviaux) et la rivière actuelle. Il est à noter que l’érosion provoquée par l’écoulement fluvio-glaciaire a presque entièrement érodé toute trace des dépôts glaciaires qui sous-tendaient les inlandsis : seules quelques traces de till4 demeurent sur le territoire (il y en a davantage dans les villes voisines, plus au nord, où le bouclier canadien offrait un meilleur abri contre l’érosion). 10 2.3 Notre région aujourd’hui Au plan de la géologie et de la géomorphologie (i. e. la roche et les dépôts meubles non consolidés), Gatineau représente donc un amalgame de quatre grands éléments : • de la roche précambrienne du bouclier canadien, qui souvent est en affleurement ou couverte par moins de deux mètres de dépôts; • des strates de roches sédimentaires encaissées dans un graben; elles aussi affleurent par endroits; • des argiles marines (appelées LEDA en anglais) sur toute la superficie occupée par la mer de Champlain qui fut soulevée au-dessus du fleuve proto-Outaouais; • des alluvions de plage ou d’écoulement fluvial dans les basses terres qui comptent pour la très grande majorité de notre bassin d’urbanisation. Une carte géomorphologique du territoire de Gatineau est reproduite en annexe 1. Révision du schéma d’aménagement et de développement
Sols, dépôts meubles et géologie en place 3. Formation et stratification du sol Les sols qui surplombent les unités minérales décrites précédemment ne sont pas qu’un simple héritage de processus structuraux ou sédimentaires, mais bien un ensemble de processus physiques, chimiques et biologiques en constante évolution. En fait, on peut définir un sol comme étant une couche superficielle, meuble, de la croûte terrestre, issue de l’érosion de la roche sous- jacente, enrichie par de l’activité organique et modifiée par l’infiltration d’eau. Techniquement, un sol s’étend en profondeur jusqu’au niveau où la roche demeure consolidée. Pour en différencier les différents processus, un sol est divisé en quatre différents horizons (qui ne sont pas toujours présents) : • Horizon organique (O) : accumulation des débris végétaux à la surface du sol (communément appelé humus); • Horizon A : mélange de matière organique et inorganique, soit par illuviation7 , soit par le brassage mécanique des animaux vivant dans le sol (vers, insectes); • Horizon B : strate inorganique enrichie par illuviation7 et où la dégradation de la roche mère est complète; • Horizon C : la dégradation de la roche mère y est incomplète et la matière inorganique en garde plusieurs caractéristiques. 5 11 Illuviation : accumulation, dans une couche de sol, de substances déposées par l’infiltration des eaux. Révision du schéma d’aménagement et de développement
Sols, dépôts meubles et géologie en place 4. Les ressources du sous- sol de Gatineau L’Histoire du Québec a été marquée par l’exploitation de ses ressources minérales et la région ne fait pas exception. Le grès qui façonne les murs du Parlement et ceux du Musée canadien de la nature provient de carrières de la région et les autres unités sédimentaires de moins grande valeur ont été concassées pour produire la chaux nécessaire à la production de ciment. Dans les filons minéraux du bouclier canadien, qui ont été exploités du milieu de XIXe siècle au milieu du XXe siècle, des entreprises minières ont extrait des métaux, tels le plomb, le fer, le molybdène, le zinc et l’argent, ainsi que des minéraux industriels, tels le feldspath, l’apatite, le mica, le graphite, le quartz et la brucite. Aujourd’hui, l’exploration, l’extraction et le raffinage des ressources minérales sont encadrés par la Loi sur les mines du Québec. La présente section sera donc scindée selon les mêmes cadres de gestion que la Loi, soit les substances minérales de surface, les substances minérales, les hydrocarbures, les sites géologiques exceptionnels et la soustraction du territoire au régime d’exploration et d’exploitation minière. 4.1 Les substances minérales de surface La Loi sur les mines distingue les substances minérales de surface parce que l’État en abandonne les droits au profit du propriétaire du sol (il en est de même pour l’eau souterraine et la couche arable). Ces substances comprennent la tourbe, les ressources des roches sédimentaires et celles des dépôts meubles (p. ex. : sables et graviers). Gatineau n’a jamais compté de grandes tourbières (alors que, dans la région d’Ottawa, celles d’Alfred sont encore exploitées et celles de la Mer Bleue 12 sont conservées au niveau international), mais, par contre, elle a supporté plusieurs carrières et sablières, dont quatre demeurent en exploitation à ce jour. Les sites, actuels et anciens, représentent un défi bien à eux : la cicatrice que l’exploitation laisse sur le sol. Historiquement, l’orientation gouvernementale fut d’utiliser toute carrière ou sablière de plus 3 mètres de profondeur pour établir des dépôts de matériaux secs, mais l’activité a fait l’objet d’un moratoire en décembre 1995 et est maintenant interdite depuis le 19 janvier 2006. Tout réaménagement – ou aussi tout abandon – de ces sites demandera donc à la fois de la créativité, pour implanter un nouvel usage qui peut composer ou s’harmoniser avec la dépression dans le sol et des parois quasi-verticales, et un souci constant du maintien de la sécurité. De fait, il faut aussi rappeler que la plupart des excavations de carrière sont inondées par des résurgences après leur fermeture et que, aussi tentant que puisse être le lac d’une carrière, ce n’est pas un lieu de baignade adéquat ou sécuritaire. Révision du schéma d’aménagement et de développement
Sols, dépôts meubles et géologie en place 4.2 Les substances minérales Par opposition aux substances de surface, l’État garde tous ses droits sur les substances minérales qui occupent notre sous-sol. La dernière mine qui aurait opéré à Gatineau serait celle de l’Ottawa Silica and Sandstone Company qui exploitait le grès quartzeux à côté du lac de la mine – maintenant connu sous le nom de lac Un affleurement de sable Beauchamp – pour produire du quartz. Les opérations ont cessé à la fin de la deuxième guerre bitumineux exposé dans mondiale lorsque l’opération a cessé d’être rentable. une carrière de Trinidad Aujourd’hui, quiconque désire inscrire un droit minier de prospection sur le territoire de Gatineau et Tobago (formation L’Enfer, datant du doit formuler une demande de désignation sur carte. Le cadre légal fait en sorte que les villes sont Pliocène) consultées si la demande se situe à l’intérieur du périmètre d’urbanisation mais, en bout de piste, c’est le Ministre provincial qui octroie ou non le claim, d’une durée de deux ans. 4.3 Le pétrole et le gaz naturel Si on retourne examiner la stratigraphie de notre faciès rocheux, à la page 2, force est de constater qu’aucune unité du Dévonien ou du Carbonifère ne subsiste dans notre sous-sol, ce qui, à toutes fins pratiques, élimine tout espoir de trouver des gisements conventionnels d’hydrocarbures ou de charbon. Cependant, le Canada est un pays fort riche en gisements non conventionnels d’hydrocarbures, Deux formations notamment des sables bitumineux et des gaz de schiste8. La question devient donc de savoir si la de schistes (Italie): région pourrait abriter une telle réserve. la schistosité donne à la roche Un sable bitumineux est, comme son nom l’indique, un dépôt meuble qui est un mélange de l’apparence de sable, d’argile, d’eau et de bitumen, une forme d’hydrocarbures condensés très visqueuse. minces feuillets. Plusieurs unités sont recensées de par le monde et l’utilisation du Bitumen par la civilisation humaine remonte aussi loin que le Néandertal. 13 Les plus importantes réserves de sable bitumineux au monde sont au Canada (formations d’Arthabaska, de Peace River, de Cold Lake et des iles Melville) et au Venezuela. Les formations géologiques qui les recèlent sont toutes relativement récentes, dans l’ère Cénozoïque (juste avant les grandes glaciations). Le gaz naturel a, lui aussi, son réservoir géologique non conventionnel. Certaines formations de schiste6 peuvent avoir un contenu organique assez élevé (0,5 % à 25 %) selon l’origine de leurs sédiments (p. ex. des plantes ou algues enfouies avec le silt). À faible profondeur, l’activité bactérienne peut faire fermenter cette matière en un méthane biosynthétique. À plus 6 Schiste : roche sédimentaire ou forte profondeur, la chaleur présente lors de la genèse de la roche peut aussi produire de petits métamorphique terrigène fissile (qui se fractionne en minces hydrocarbures, surtout le méthane et l’éthane thermogéniques. Contrairement aux réservoirs couches) dont les particules sont traditionnels, où les hydrocarbures flottent par-dessus l’eau dans une formation perméable, les principalement composées de silt et d’argile; lorsque sa genèse gaz de schistes restent en place où ils sont, en raison de la perméabilité trop faible du médium est uniquement sédimentaire, les rocheux. géologues canadiens préfèrent utiliser le terme « shale ». Révision du schéma d’aménagement et de développement
Sols, dépôts meubles et géologie en place La nature fissile des schistes permet cependant d’induire un nombre de failles avec de l’eau sous pression – la fracturation hydraulique – pour en accroître la perméabilité au gaz. Il devient donc possible de faire la prospection des formations schisteuses qui ont un potentiel économique : • elles se fractureront tout en résistant à la pression induite lors de la fracturation, ce qui requiert un haut taux de silice; • elles contiennent un réservoir gazier avec une pression élevée (les gaz peuvent être « dilués » à l’intérieur d’un grand volume de roche) – les formations les plus prometteuses sont dites Le shale d’Utica, en « surpression »; fissuré horizontalement • le gaz sera relativement dépourvu d’impuretés (les gaz thermogéniques peuvent contenir (diaclase), dans la région de Fort Plain (NY). du CO2 qui doit être extrait). Les principales zones de gaz de schiste au Canada, selon le rapport thématique de l’Office national de l’énergie, sont les bassins de Horn River et de Montney (Colombie-Britannique), le groupe du Colorado (Alberta et Saskatchewan) et les formations d’Utica (Québec) et de Horton Bluff (Nouveau-Brunswick et Nouvelle-Écosse). La seule formation québécoise qui tient son nom de la ville d’Utica, dans l’État de New-York, n’est présente qu’au sud du fleuve Saint-Laurent. Aucun effort d’exploration ou puits de forage n’est à entrevoir à Gatineau. 4.4 Les sites géologiques exceptionnels Le Ministre, selon la Loi sur les Mines, peut désigner un site géologique exceptionnel… l’équivalent minéral d’une zone de conservation naturelle. Aucun site du genre n’est désigné à Gatineau. mais cela ne veut pas dire que notre région est dépourvue de géologie intéressante. Un éventuel circuit 14 d’interprétation géologique pourrait mettre en valeur les sites suivants : Tableau 3 – Sites d’intérêt pour l’interprétation géologique 7 Stromatolithes : calcaire laminé Site Propriétaire Particularité géologique formé en eau peu profonde par Parc du Lac-Beauchamp, à côté du chemin Faille de discordance entre les formations du bouclier des colonies bactériennes où Ville de Gatineau dominent les cyanobactéries. d’accès au pavillon (741, boul. Maloney Est) canadien et des basses-terres du Saint-Laurent 8 Rive de l’Outaouais à l’est du pont Marmite : dépression cylindrique CCN Colonie de stromatolithes7 dans une formation rocheuse Champlain (0, boul. Lucerne) causée par l’érosion d’un courant d’eau tumultueux ou en Boulevard des Allumettières, au sud et près Ville de Gatineau Marmite8 tourbillons. de la sortie de l’autoroute 50 4.5 La soustraction du territoire à la désignation sur carte, à l’exploration et à l’exploitation minière Sous le cadre légal actuel, la Ville de Gatineau peut, via son schéma d’aménagement, invoquer l’article 30 de la Loi sur les mines et ainsi demander que le Gouvernement du Québec entérine une soustraction d’une partie de son territoire du régime légal minier, autant pour l’exploration que pour le permis d’exploitation qui pourrait s’ensuivre. Cette opportunité, qui existe depuis au moins 1987, n’a jamais été exploitée auparavant, mais pourrait être envisagée dans le prochain schéma d’aménagement Révision du schéma d’aménagement et de développement
Sols, dépôts meubles et géologie en place 5. Les contraintes à l’occupation du sol reliées au sous-sol Cette section va décrire la problématique reliée à quatre contraintes : le risque de glissement de terrain, la déformation lors de tremblement de terre, la formation bactériologique d’ocre ferreuse et les sites contaminés ou potentiellement contaminés. 5.1 Les zones à risque de mouvement de masse Au sens géologique, on peut différencier deux mécaniques de mouvements gravitaires de masses de sol : • Le glissement de terrain, où le terrain qui glisse garde sa consistance et sa toponymie; • La coulée argileuse, où l’argile se liquéfie par excès d’eau – ce phénomène est particulièrement menaçant dans nos argiles marines. La base des connaissances géotechniques et des paramètres nécessaires (i. e. pente, résistance au cisaillement, teneur en eau, etc.) pour évaluer un risque de décrochement ou une liquéfaction est connue depuis longtemps et a fait l’objet de premières études dédiées dans la région dès les années 1980. Des cartes de risques de mouvement de masse ont été décrétées aux schémas d’aménagement antérieurs. Un mot sur la liquéfaction des argiles marines. Comme ces argiles se sont formées en milieu salin, elles ont une capacité de rétention d’eau extrêmement élevée mais, avec le lessivage progressif du sel, leur structure est devenue plus lâche, un peu comme une gelée. Si cette argile est perturbée par une charge accrue en eau ou une vibration (qui 15 peut provenir d’un séisme ou de simples travaux d’excavation, par exemple), elle peut se liquéfier. Le danger de ce type de glissement de terrain réside dans le fait qu’aucune stabilisation de pente ne se produit : il devient donc très difficile de prédire jusqu’où la liquéfaction aura lieu. On a recensé les traces de pas moins de 250 glissements de terrain, petits ou grands, récents ou anciens, dans un rayon de 60 km autour d’Ottawa. Certains de ces événements comptent parmi les désastres naturels les plus meurtriers de notre histoire, notamment celui de Notre-Dame-de- la-Salette, en 1908, qui a fait 33 morts. La prévention contre la liquéfaction des argiles est, sans conteste, un mandat de premier plan de la planification durable dans notre région. Révision du schéma d’aménagement et de développement
Sols, dépôts meubles et géologie en place 5.2 Dommages lors de séismes En raison de l’activité dans la zone séismique de l’ouest du Québec et de l’importance de sa population, la région d’Ottawa-Gatineau représente le troisième plus grand risque de blessures ou de mortalité découlant d’un tremblement de terre au Canada (après Vancouver et Montréal). S’il est vrai que, pour la communication générale, l’échelle de Richter est suffisante pour décrire la magnitude d’un tremblement de terre, pour un ingénieur ou un séismologue, la réalité est autrement plus complexe : un tremblement génère un train d’ondes où l’amplitude, la période, la durée et la vitesse de propagation sont toutes variables. Ce train d’ondes cumule des ondes primaires p et s (qui traversent le manteau terrestre) et des ondes secondaires de Love et de Raleigh (qui voyagent via la surface terrestre). Pour s’assurer de la résistance d’un bâtiment à un tremblement de terre, le Code national du bâtiment (CNB), qui est le pilier de notre règlement de construction, fournit des exigences normatives de résistance à certaines accélérations spectrales. À cette fin, l’édition 2005 du CNB se base sur une statistique nommée Vs30, qui représente la vitesse de l’onde de cisaillement s à une profondeur de 30 mètres dans le sol. Le Code définit des classes de comportement de sol, classées A à F, pour les fins de prévention dans le design des fondations. Les sols de type E, qui représentent des faciès d’argile marine, sont ceux qui requièrent le plus de précaution. 5.3 La formation d’ocre ferreuse En milieu agricole, la formation d’ocre ferreuse est connue depuis environ 25 ans – des dépôts 16 ferrugineux colmataient des drains agricoles. Depuis environ 2006-2007, le problème semble cependant se manifester également en milieu résidentiel. L’ocre ferreuse est un dépôt d’hydroxyde de fer. Sa source peut être chimique (l’oxydation de fer ferreux réduit dans le sol en présence d’air) ou microbiologique (résultat de l’action de ferrobactéries). Son impact sur les propriétés résidentielles peut être considérable car elle peut obstruer les pompes des drains français ou en colmater les canalisations. De plus, si la source est microbiologique, le phénomène sera permanent – il n’est pas possible d’extraire le fer du sol et d’enlever l’eau et l’air à 100 %. Les dépôts meubles sableux avec une quantité de silt (et particulièrement les sables silteux) semblent propices à la formation parce que, avant la construction, l’environnement souterrain est étanche et le fer est réduit : du fer ferreux dissout dans l’eau et dans le sol. Dès l’excavation pour la fondation, l’air accède au médium et le milieu réducteur devient oxydant : le fer ferreux devient ferrique (rouille) et sa solubilité chute significativement. Révision du schéma d’aménagement et de développement
Sols, dépôts meubles et géologie en place 5.4 Sites contaminés C’est le Ministère du développement durable, de l’environnement et des parcs (MDDEP) qui est responsable de la Politique de protection des sols et de réhabilitation des terrains contami- nés. Cette dernière fournit l’encadrement nécessaire pour préserver l’intégrité des sols et de l’eau souterraine. Elle établit les priorités d’intervention et offre différents moyens pour évaluer et gérer la contamination d’un terrain. En plus d’utiliser des critères spécifiques, elle encadre l’évaluation et la réhabilitation par analyse et gestion des risques. Toute évaluation de risque doit être réalisée conformément aux Lignes directrices pour la réalisation des évaluations de risque toxicologique à la santé humaine, rédigées en collaboration avec le ministère de la Santé et des Services sociaux, et à la Procédure d’évaluation du risque écotoxicologique, élaborée par le Centre d’expertise en analyse environnemental du Québec. Le projet de loi 72 (Loi modifiant la Loi sur la qualité de l’environnement et d’autres dispositions législatives relativement à la protection et à la réhabilitation des terrains), adopté en mai 2002, est entré en vigueur le 1er mars 2003. Ce projet de loi a pour objet l’établissement de nouvelles règles visant la protection des terrains ainsi que leur réhabilitation en cas de contamination. Elle permet l’application des grandes orientations de la Politique de protection des sols et de réhabilitation des terrains contaminés. Le Règlement sur la protection et la réhabilitation des terrains fixe les valeurs limites pour une gamme de contaminants et détermine les catégories d’activités industrielles visées. Il établit, pour certaines d’entre elles, les conditions dans lesquelles un contrôle de la qualité des eaux souterraines à l’aval hydraulique des terrains est nécessaire. Le Règlement sur l’enfouisse- ment des sols contaminés encadre l’aménagement, l’exploitation, la fermeture et le suivi post- fermeture des lieux d’enfouissement de sols contaminés. Enfin, le Règlement sur l’évaluation 17 et l’examen des impacts sur l’environnement précise les cas où les sites d’enfouissement et les procédés de traitement doivent faire l’objet d’une évaluation environnementale Sous forme de répertoire, le Ministère compile des renseignements généraux et techniques sur des terrains contaminés par des activités industrielles et commerciales ou par des déverse- ments accidentels. Non exhaustive, la liste répertorie les cas portés à l’attention du ministère du Développement durable, de l’Environnement et des Parcs. En plus de ces renseignements, le Ministère compile de l’information sur des lieux qui sont caractérisés par la présence, sur le terrain, de dépotoirs de résidus industriels, d’anciens dépotoirs municipaux, de dépôts de ré- sidus de pâtes et papiers, d’aires d’accumulation de résidus miniers, de lieux d’enfouissement ou de cellules de confinement de résidus de sols contaminés. La Ville de Gatineau doit quant à elle tenir un registre des sites contaminés, dont l’information lui parvient du MDDEP. Révision du schéma d’aménagement et de développement
Sols, dépôts meubles et géologie en place 6. Conclusion et pistes de réflexion Le sol et le sous-sol de Gatineau représentent un support physique, un réservoir de ressources, une opportunité éducative et une source de contraintes de premier plan. Ce n’est pas un sujet où les actions à prendre sont toujours laissées à l’entière discrétion de la Ville, mais un certain nombre d’initiatives peuvent être soumises à la population pour fins de réflexion : Question 1 : Comment le schéma d’aménagement devrait-il encadrer les zones d’extractions ? Question 2 : Est-ce que Gatineau doit tenter de soustraire une partie de son territoire de la désignation sur carte, l’exploration et l’exploitation minière et, dans l’affirmative, quelle portion du territoire? Question 3 : Est-ce que Gatineau devrait établir et entretenir un circuit d’interprétation géologique sur son territoire? Question 4 : Est-ce que Gatineau devrait tenir davantage compte des risques associés aux particularités du sous-sol gatinois, comme ceux reliés aux tremblements de terre et à la présence d’ocre ferreuse ? Question 5 : Est-ce que Gatineau devrait se doter d’un plan d’action visant la réhabilitation de terrains contaminés stratégiques pour le développement ? 18 Révision du schéma d’aménagement et de développement
7. Bibliographie ADAMS, J. et S. HALCHUK. Fourth generation seismic hazard maps of Canada: Values for over 650 Canadian localities intended for the 2005 National Building Code of Canada, fichier ouvert CGC 4459, 2003, 91 pages et annexes. CONSEIL NATIONAL DE RECHERCHE DU CANADA. Les sols d’assise expansibles et contractiles, digeste 84F archivé au site Internet http:// www.nrc-cnrc.gc.ca CROWE, Heather et coll. Development of Vs30 and fundamental site period maps for seismic hazard estimation in Ottawa, On, manuscrit RNC no 20090081, 2009, 8 pages et références. DIX, Georges R. et Zuhor AL RODHAN. « A new geological framework for the middle Ordovician Carillon formation (uppermost Beekmantown Group, Ottawa embankment): onset of Taconic foreland deposition and tectonism within the Laurentian platform interior » , publié au Canadian Journal of Earth Sciences 43, 2006, pp. 1367-1387. DIX, Georges R. et coll. « The Potsdam-Beekmantown Group boundary, Nepean Formation type section (Ottawa, Ontario) : a cryptic sequence boundary, not a conformable transition », publié au Canadian Journal of Earth Sciences 41, 2004, pp. 897-902. GÉO-OUTAOUAIS. Colonie de stromatolites à Gatineau, extrait du site Internet http://geo-outaouais.blogspot.com. GÉO-OUTAOUAIS. Discordance et glaces à Gatineau, extrait du site Internet http://geo-outaouais.blogspot.com. GÉO-OUTAOUAIS. Gaz de schiste à Ottawa : chiche!, extrait du site Internet http://geo-outaouais.blogspot.com. GÉO-OUTAOUAIS. Lac Beauchamp : un peu d’histoire, extrait du site Internet http://geo-outaouais.blogspot.com. GÉO-OUTAOUAIS. Marmite des Allumettières, extrait du site Internet http://geo-outaouais.blogspot.com. LAJOIE, Paul G. Étude pédologique des comtés de Gatineau et de Pontiac Québec, 1962, 96 pages, annexe et lexique. LAJOIE, Paul G. Glacio-isostasie et évolution de l’argile marine (Champlain) et des matériaux parentaux des sols sur le bouclier Laurentidien et sur les terrasses anciennes et actuelles de la rivière des Outaouais et du fleuve Saint-Laurent, 2009, 42 pages et bibliographie. MDDEP. Les enjeux environnementaux de l’exploration et de l’exploitation gazières dans les Basses-terres du Saint-Laurent, octobre 2010, 46 pages et annexe. OACIQ. L’ocre ferreuse – alerte à la bactérie mangeuse de fer, 2007, fiche technique extraite du site Internet http://www.oaciq.com. OFFICE NATIONAL DE L’ÉNERGIE. L’ABC du gaz de schistes au Canada, novembre 2009, 23 pages. PRÉVOST, CLÉMENT ET LAURIOL, Bernard. « Variabilité de l’érosion actuelle et holocène : le cas des marbres de Grenville en Outaouais québécois », publié dans Géographie physique et Quaternaire, vol. 48, no 3, 1994, pp. 97-304. RÉGIE DES BÂTIMENTS DU QUÉBEC. L’ocre ferreuse – des réponses à vos questions, extrait du site Internet http://www.rbq.gouv.qc.ca. RESSOURCES NATURELLES CANADA. Géopanorama d’Ottawa et de Gatineau, extrait du site Internet http://www.geoscape.nrcan.gc.ca.
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