Au coeur de la nature - Raoul Maillet Continuité - Érudit
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Document généré le 19 fév. 2020 10:30 Continuité Au coeur de la nature Raoul Maillet Meubler le dehors Numéro 128, printemps 2011 URI : https://id.erudit.org/iderudit/64361ac Aller au sommaire du numéro Éditeur(s) Éditions Continuité ISSN 0714-9476 (imprimé) 1923-2543 (numérique) Découvrir la revue Citer cet article Maillet, R. (2011). Au coeur de la nature. Continuité, (128), 14–17. Tous droits réservés © Éditions Continuité, 2011 Ce document est protégé par la loi sur le droit d’auteur. L’utilisation des services d’Érudit (y compris la reproduction) est assujettie à sa politique d’utilisation que vous pouvez consulter en ligne. https://apropos.erudit.org/fr/usagers/politique-dutilisation/ Cet article est diffusé et préservé par Érudit. Érudit est un consortium interuniversitaire sans but lucratif composé de l’Université de Montréal, l’Université Laval et l’Université du Québec à Montréal. Il a pour mission la promotion et la valorisation de la recherche. https://www.erudit.org/fr/
V U n e v i l l e AU CŒUR DE LA NATURE Camp de bûcherons dans les années 1930-1940 en Haute-Mauricie Photo : coll. Gordon Kelly Ville lovée entre lacs et forêts, La Tuque fête ses 100 ans en 2011. Une belle occasion de revenir sur son passé. La montagne qui a donné son nom à La Tuque, avant la fondation de la ville. La Brown en 1951 Photo : coll. Réjean Boisvert (coloration Photo : coll. Laurette Gignac Tremblay par Lydie Colaye) par Raoul Maillet voiries avec droits exclusifs et Le passage du père Jacques ■ 47 pourvoiries sans droits Buteux aux chutes de Située dans la partie haute exclusifs émaillent ce vaste Shawinigan, représenté par le du Saint-Maurice, presque à territoire où l’on compte plus peintre Ozias Leduc. mi-course entre Trois-Rivières de 4500 chalets et 8255 lacs. Photo : Claude Gill, coll. Comité et Chambord, La Tuque est Deux communautés atika- de protection des œuvres caractérisée par son milieu mekw s’y trouvent aussi : d’Ozias Leduc, église Notre- naturel et ses vastes forêts par- Obedjiwan et Wemotaci. Dame-de-la-Présentation semées de nombreux plans Au XVIIe siècle, une partie du de Shawinigan d’eau. Son plus important territoire servait de poste de cours d’eau est la rivière Saint- traite à la Compagnie de la formèrent bientôt la tribu des Maurice, qui traverse le terri- Nouvelle-France. La dénomi- Atikamekw, ou « poissons toire du nord au sud et prend nation du lieu a été attestée blancs ». D’un naturel doux, ils sa source dans le réservoir par le marchand voyageur ne cherchaient pas la guerre Gouin. Jean-Baptiste Perrault en 1806, comme les Iroquois, qui ont Comprenant Parent et La qui parlait du « portage de La massacré la quasi-totalité de Croche ainsi que les munici- Tuque » dans ses écrits. Les leur tribu. Pendant près de palités de La Bostonnais et de voyageurs nommaient ce por- deux siècles, la bourgade a été Lac-Édouard, le territoire de tage ainsi à cause d’une mon- plongée dans une profonde l’agglomération de La Tuque, tagne située tout près, dont le léthargie. issue de la fusion de 2006, pic ressemble à une tuque. Après les Atikamekw, les pre- s’étend sur 30 000 km2. À titre Le premier homme à habiter miers arrivants ont été les comparatif, l’agglomération les forêts de La Tuque s’était évangélisateurs, notamment de Montréal couvre environ attribué le nom d’« enfant des le père Jacques Buteux, un 500 km2. Neuf ZEC, 23 pour- bois ». Les enfants des bois jésuite. Depuis longtemps, les CONTINUITÉ 14 numéro cent vingt-huit
U n e v i l l e Vue du barrage de La Tuque et de l’usine de pâtes et papiers Smurfit-Stone Photo : Tanya Dykstra Longue de 523 km et d’une dénivellation de 400 m, la rivière Saint-Maurice demeure la plus harnachée au monde. De 1917 à 2009, la Shawinigan Water and Power Company (SWP), devenue Hydro- Québec en 1963, y a construit 12 centrales hydroélectriques, dont 6 sont situées entre La Tuque et le réservoir Gouin. Après avoir dompté la rivière et exploité la forêt, on a tenté de maîtriser la puissance des Atikamekw du Saint-Maurice de La Tuque Falls (1910), les- plusieurs routes forestières chutes de la Saint-Maurice. En sollicitaient sa visite. En 1651, quels ont fusionné le 24 mars ainsi que par une nouvelle voie 1908, les frères Brown ont fait le père Buteux a entrepris son 1911 pour former la ville de de contournement de 12,5 km, construire, au pied des chutes premier voyage. Il est parti de La Tuque. inaugurée en novembre 2010 et et de la montagne, une petite Trois-Rivières le 27 mars et a construite au coût de 81,1 mil- centrale hydroélectrique pour voyagé durant trois mois à tra- TIRER PROFIT DE L’EAU lions de dollars. alimenter une scierie. vers des régions où nul Blanc ET DE LA FORÊT ne s’était encore aventuré. Le développement écono- ■ Cette expédition l’a amené mique a été tardif en Haute- jusqu’aux sources mêmes du Mauricie. Les premières FÊTER AVEC CONSCIENCE Saint-Maurice. Il y a rencontré concessions de coupe, pour les La Tuque fête en grand son 100e anniversaire du 24 mars 2011 des tribus du nord à qui il a pins blanc et rouge, datent de au 24 mars 2012. Le comité organisateur a préparé une pro- promis une autre visite pour 1831. À cette époque, on cou- grammation riche et variée dont le point culminant aura lieu l’année suivante, où il comp- pait facilement 600 000 billots du 21 juin au 3 juillet : 13 journées de retrouvailles pendant tait pousser son périple jus- de pin par an. lesquelles se tiendront plusieurs activités et des spectacles gratuits en plein air à la place du Centenaire. qu’à la baie d’Hudson. Le L’entrepreneur W. Greeves a L’organisation des fêtes a permis de sensibiliser les citoyens à missionnaire est revenu à ouvert le premier chantier sur l’importance de préserver leur patrimoine collectif. Pendant Trois-Rivières le 18 juin, la rivière Bostonnais vers les préparatifs, les Latuquois étaient invités à se rendre au après un voyage dont le récit 1828. Les bûcherons prove- quartier général du comité organisateur pour y déposer des fait peur. Peu après avoir enta- naient de la Mauricie et objets anciens, des documents historiques et des photos rela- mé sa seconde expédition, le d’autres régions du Québec. tant l’histoire de leur ville. Cette démarche a suscité un 10 mai 1652, il a été assassiné En 1861, on dénombrait important sentiment de fierté dans le milieu et a permis de par les Iroquois en Haute- 1126 travailleurs forestiers en rassembler de nombreux éléments patrimoniaux. Mauricie. Haute-Mauricie, dont 82,6 % Par la même occasion, les résidants pouvaient redécouvrir Parmi les premières familles venaient de la région. L’exploi- l’histoire de leur ville ainsi que leur patrimoine collectif, car le quartier général du comité organisateur abrite une petite qui se sont établies sur le tation forestière a amené un exposition d’objets et de photos historiques. Ils s’y arrêtaient, territoire de La Tuque à partir soutien important aux familles prenaient quelques minutes pour se remémorer de bons sou- de 1800 figurent les Tessier, déjà établies et a permis la venirs. L’élément vedette de l’exposition est le trophée des les Bourassa, les Comeau, les fondation de nouveaux éta- 24 Heures de La Tuque, une compétition de nage internatio- Tremblay, les Riberdy, les blissements agricoles. Les nale qui était l’un des événements sportifs les plus importants Tousignant, les Lamarche, les vrais bûcherons ne pouvaient au Québec dans les années 1960. Leclerc. vivre hors du bois : draveurs le Les fêtes du centenaire de La Tuque ont leur site Web au Au début du XXe siècle, le ter- printemps, scieurs l’été, chas- www.villedelatuque100ans.com, où les visiteurs peuvent ritoire a été partagé en deux seurs l’automne et bûcherons partager leurs photos. entités municipales : les vil- l’hiver. Aujourd’hui, le terri- Hélène Langlais, coordonnatrice des fêtes du centenaire de La Tuque lages de La Tuque (1909) et toire est toujours sillonné par ■ CONTINUITÉ 15 numéro cent vingt-huit
U n e v i l l e ■ ALLO, LA TUQUE ? Côté transports et communications, La Tuque a bénéficié du service de la poste dès 1902. Le téléphone y a fait son appari- tion en 1908, la même année où le train a enfin relié La Tuque à Parent et Senneterre (CN et Via Rail). L’hebdomadaire L’écho de La Tuque a été publié pour la pre- mière fois en 1939. L’année suivante, les Latuquois ont pu prendre l’autobus et l’avion dans leur ville. La télévision est débarquée dans les salons en 1955, quatre ans avant que la chaîne de radio locale, CFLM, soit en ondes. ■ En 1909, toujours près des (meubles et électroménagers), chutes, a débuté la construc- Matériaux J. E. Tremblay, tion d’une usine de pâtes et Quincaillerie Arthur Harvey et papiers, que les travailleurs H. R. Hillier (vêtements pour allaient appeler simplement hommes et femmes). C’est « le moulin ». Au début, on y également à La Tuque que fabriquait 30 tonnes de papier sont fabriqués les bâtonnets par jour. Dix ans plus tard, destinés à l’industrie de la 170 tonnes. En 2011, les crème glacée, chez les 500 employés de Smurfit- Industries John-Lewis, qui Stone à La Tuque produisent appartiennent au Groupe quelque 1500 tonnes de car- Rémabec. tons divers quotidiennement. Au fil des ans, plusieurs indus- CRÉER, BOUGER, APPRENDRE tries se sont installées à La Tout au long de son histoire, Tuque mais ont dû fermer La Tuque a vibré et rayonné leurs portes pour différentes grâce à sa culture. Musiciens, raisons : Alcan, la Saint- peintres, danseurs, chanteurs, Maurice Knitting, la Cosmo ébénistes et écrivains : les Félix Leclerc en visite à La Tuque, sa ville natale, en 1961 Underwear, Dubois Construc- talents de nombreux citoyens Photo : coll. Société historique de La Tuque et du Haut-Saint-Maurice tion. Malgré les fluctuations ont été reconnus à l’échelle du marché et des périodes dif- locale, provinciale et au-delà de ficiles, plusieurs commerces – nos frontières. Le plus célèbre anciens et nouveaux – conti- d’entre eux est évidemment nuent d’offrir leurs services à Félix Leclerc, né à La Tuque Le matin se lève sur l’un des 8255 lacs que compte le vaste territoire la population, tels qu’Impri- le 2 août 1914. Félix est latuquois. merie Commerciale, Spain ltée demeuré à La Tuque jusqu’en Photo : Christian Hamel
U n e v i l l e ■ 1926. Il a ensuite entamé son Tuque vient aussi de rénover cours classique à Ottawa avant son centre de ski alpin, situé de travailler à Trois-Rivières, en plein cœur de la ville. L’EXPOSITION DU CENTENAIRE en France, à Vaudreuil, puis il Le tourisme à La Tuque a Montée par la Société historique de La Tuque et du Haut- s’est installé à l’île d’Orléans débuté dans les années 1950, Saint-Maurice, l’exposition du centenaire sera présentée au jusqu’à sa mort, le 8 août 1988 d’abord par la simple construc- Complexe culturel Félix-Leclerc du 1er mai au 31 août. à 8 h (!). La Ville de La Tuque tion d’un kiosque touristique et Les visiteurs pourront y admirer des objets centenaires, des photos anciennes, des vêtements sacerdotaux de grande valeur, a donné son nom à la polyva- par la formation d’une équipe des vases sacrés, des uniformes de police et de musiciens de lente (1974) et au complexe de bénévoles qui s’occupait de fanfare, des habits religieux, des meubles antiques, des culturel (2000). L’ancien slo- l’accueil des touristes et de la modèles miniatures illustrant la vie à une autre époque, etc. gan de la région, « Le Haut- planification de leurs activités. Un plan de la ville de La Tuque en 1932 sera exposé, alors Saint-Maurice, un p’tit bonheur Au fil des ans, un site touris- qu’un tableau indiquera à chaque visiteur les événements sur- à l’état pur », rappelait aussi tique important s’est dévelop- venus à La Tuque ou sur le territoire le jour de sa naissance. l’une des plus célèbres chan- pé : le Parc des chutes de la ■ sons de l’auteur-compositeur- Petite rivière Bostonnais. Le interprète. promeneur, qu’il soit de la Si La Tuque se fait un point ville ou de l’extérieur, peut y cière Louise Lacoursière), le d’honneur d’encourager le découvrir un éventail d’infra- Centre d’interprétation de la développement culturel, elle a structures et d’activités, traite des fourrures et le aussi toujours privilégié la pra- notamment le Centre d’inter- Circuit du coureur des bois. tique des sports. En toute sai- prétation de la nature (ani- La Tuque fête son centenaire son, les citoyens peuvent maux naturalisés), les sentiers cette année, mais son histoire s’adonner à leur activité favo- d’interprétation de la forêt, le est loin de s’arrêter. Plusieurs rite à quelques kilomètres Centre d’interprétation de la projets seront réalisés sous seulement du centre-ville. rivière Saint-Maurice (qui peu afin d’accroître son dyna- Dans la région, des centaines compte une superbe collec- misme et d’en faire un terri- de kilomètres de sentiers tion de bateaux miniatures toire d’aventures et de décou- entretenus attirent un grand réalisés par Arnold Fay), une vertes, au cœur de la nature et nombre de motoneigistes. Des tour d’observation de 21 m, le la nature au cœur. événements majeurs mar- Centre Félix-Leclerc (qui ■ quent plusieurs pages du dévoile en photos la vie de Raoul Maillet est président de la calendrier latuquois : la l’artiste en devenir à La Société historique de La Tuque et Classique internationale de Tuque), le Circuit thématique du Haut-Saint-Maurice. canots de la Mauricie (fin Félix-Leclerc (basé sur son Vue aérienne du secteur août), le Festival de chasse premier roman Pieds nus dans de Lac-Édouard (fin octobre), la course de l’aube), le Centre Anne- Source : Larry Bernier quads 12 heures d’endurance Stillman-McCormick (basé sur de La Tuque (en mai), etc. La la trilogie écrite par la roman- ■ À LIRE La Société historique de La Tuque et du Haut-Saint- Maurice publie deux ouvrages à l’occasion du centenaire. D’abord, La Tuque. Un siècle d’histoire, un volume de 1088 pages qui se penche notamment sur l’occupation du territoire, la vie écono- mique, les industries, la reli- gion et le tourisme. Puis, La Tuque. Histoires de familles, qui relate, au fil de ses 925 pages, des histoires de familles atikamekw, euro- Les chutes de la Petite rivière Bostonnais et la tour d’observation du péennes, pionnières et latuquoises. parc adjacent Info et commande : 819 523-8200 ■ Photo : Pierre Lahoud CONTINUITÉ 17 numéro cent vingt-huit
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