AVRIL 2017 AMÉLIORER LA SURVIE DANS LE CANCER GRÂCE AU NUMÉRIQUE

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AVRIL 2017 AMÉLIORER LA SURVIE DANS LE CANCER GRÂCE AU NUMÉRIQUE
AVRIL 2017
                         AMÉLIORER LA SURVIE DANS LE CANCER
                               GRÂCE AU NUMÉRIQUE

La loi de Moore (en simplifié, le doublement de puissance tous les 18 mois de l’électronique) est
toujours à l’œuvre dans l’informatique (l’ordinateur quantique), les capteurs et réseaux, la
robotique, l’impression 3D, la biologie synthétique, les nanotechnologies et l’intelligence artificielle
créant un espace foisonnant pour la médecine digitale – et cela même si la progression des usages
reste linéaire et celle des législations et des organisations davantage chaotique face à la progression
exponentielle de toutes ces technologies. Cet écosystème est aussi bouleversé par l’intérêt
dorénavant affiché par les GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft), et maintenant les
BATH chinois (Baidu, Alibaba, Tencent, Huawei), pour les domaines de l’e-santé. Ces groupes digital
natives n’ont évidemment pas tardé à mesurer l’avantage dont ils disposent en la matière pour faire
de notre smartphone ou de notre tablette, plus qu’un “doudou électronique”, notre “station
médicale”. Les travaux portent tout autant sur les softwares (applications) que sur les hardwares
(équipements).
Le patient d’aujourd’hui veut choisir son traitement. C’est l’exemple de l’artiste et ingénieur italien
Salvatore Iaconesi, qui a ainsi décidé de partager sa tumeur cérébrale sur le Net : lorsqu’il a été
diagnostiqué avec une tumeur au cerveau, en 2012, refusant d'être un patient passif – “celui qui
attend” –, il a décidé de hacker les scans de son cerveau et de les poster en ligne pour inviter la
communauté mondiale à élaborer une “cure”. Celle-ci a pris forme grâce à des praticiens et plus d'un
demi-million de personnes qui lui ont apporté des conseils médicaux, mais également des clins d’œil
artistiques ou musicaux et autant de soutien émotionnel. Son site – opensourcecureforcancer.com,
est toujours en ligne, et lui-même toujours en vie, réjoui. Un second exemple est donné par Bryce
Olson, un employé d’Intel, qui a vaincu un cancer de la prostate de stade 4 en expérimentant une
approche de soins personnalisée exploitant ses données génomiques. Le séquençage génomique ou
tumoral marque le début d’une nouvelle ère dans le secteur de la santé : celle de la médecine de
précision. Cette approche personnalisée permet d’ajuster les traitements aux besoins et spécificités
de chaque patient, tout en prenant en compte le séquençage génomique de son cancer, son dossier
médical, son style de vie, etc. En janvier 2015, après avoir présenté son programme Precision
Healthcare Initiative, le président Obama déclarait que la médecine de précision constituait une
avancée médicale sans précédent. Et, effectivement, des patients atteints de leucémie ont vu leur
nombre de globules blancs revenir à la normale grâce à un nouveau médicament ciblant un gène
particulier ; ailleurs, dans le cadre par exemple du dépistage du VIH, des tests génétiques aident les
médecins à déterminer les patients les plus susceptibles de répondre positivement à un nouveau
traitement…

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AVRIL 2017 AMÉLIORER LA SURVIE DANS LE CANCER GRÂCE AU NUMÉRIQUE
La société est en train de muter d’une société de “sachants” à une société d’apprenants,
                 il en résulte que les patients eux-mêmes revendiquent dorénavant une part de pouvoir.
                                                                                               Emmanuel FRAYSSE
                                            digitalisateur, enseignant à Sciences Po, Novancia, ISC et aux Gobelins

Bryce Olson espère que la médecine de précision pourra un jour transformer le cancer en maladie
gérable. Grâce au séquençage génomique, il vivra peut-être suffisamment longtemps pour en
constater les bénéfices ; il a déjà déjoué tous les pronostics. Les informations relatives à son cas
figurent désormais dans le Collaborative Cancer Cloud, une plateforme analytique de médecine de
précision développée par Intel et le Knight Cancer Institute.1
Can Google solve Death? – Google peut-il résoudre la mort ? Le géant du Web y travaille en tout cas
ardemment. Ce qui est sûr, c’est que d’ici dix, quinze ou vingt ans, tout le vivant sera séquencé. Et si
l’ingénierie des génomes n’est toujours pas complètement maîtrisée, ses progrès sont fulgurants.2 Ce
qui est sûr également, c’est que la lutte contre le cancer constitue l’un des terrains de conquête
privilégiés de la thérapie génique.
#BigData #ArtificialIntelligence, Watson plus fort que Dr House ? En 2016, un centre de recherche
de la faculté de médecine de l'université de Tokyo dirigé par le professeur Arinobu Tojo a utilisé le
supercalculateur pour une aide au diagnostic d'un cas rare de leucémie. En dix minutes, Watson a
trouvé la véritable cause du mal ; les médecins estiment qu'il leur aurait fallu deux semaines pour
arriver au même point, rendant le traitement beaucoup plus incertain. “Spend less time searching
literature and the EMR (electronic medical records), and more time caring for patients. Watson can
provide clinicians with evidence-based treatment options based on expert training by Memorial Sloan
Kettering (MSK) physicians”,3 peut déjà annoncer IBM sur son site Watson for Oncology.
Invitée lors de la dernière édition du festival SXSW (South by Southwest, Austin, États-Unis), Mary
Lou Jepsen, forte d’un CV long comme le bras avec des articulations au MIT Media Lab puis chez
Google X, Facebook Oculus et maintenant au sein d’Openwater, sa propre société (opnwatr.io), a elle
annoncé travailler désormais sur la télépathie. Son pari : mettre au point d’ici peu l’IRM portable.
Décoiffant mais crédible.
Cette session du club souhaite revenir plus en détail sur les progrès réalisés et les perspectives
offertes par le numérique en matière de lutte contre le cancer. Retour sur l’idée du patient connecté.
                                                         ***

1
  Voir l’article de Joyce Riha Linik “Lutter contre le cancer avec la médecine de précision » sur le site de Intel iQ
– iq.intel.fr/lutter-contre-le-cancer-avec-la-medecine-de-precision/
2
  Sur cette ingénierie des génomes, voir la note d’étonnement du club Boussole Nouvelle Vague du 14 avril
2016, “Réflexion et enjeux sur la révolution des biotechnologies”.
3
  Passez moins de temps à chercher toute la littérature, et plus à soigner vos patients. Watson peut fournir aux
cliniciens des options de traitement fondées sur l’expertise des équipes du MSK.
www.ibm.com/watson/health/oncology-and-genomics/

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CONNECTER LE PATIENT : POUR QUOI FAIRE ?
Connecter le patient n’est pas un “gadget” de plus, il s’agit de rendre le patient acteur de sa prise en
charge. La connexion est aussi le moyen d’optimiser sa relation avec le médecin et l’équipe de suivi.
Pour l’Assurance Maladie, elle est également synonyme de diminution des coûts : c’est moins de
visites “inutiles” chez le médecin, et donc également moins de contraintes pour le patient. Mais
surtout, on le sait maintenant, la connexion peut permettre d’améliorer le diagnostic et de délivrer
plus précocement un traitement : elle améliore ainsi la qualité de vie du patient et donc même sa
survie.
D’où est venue l’idée de connecter le patient ? En réalité des mathématiques car ce sont aussi les
mathématiques qui, en cancérologie, expliquent pourquoi le pronostic d’un patient est impossible à
réaliser individuellement mais recourt systématiquement aux séries statistiques. La raison de cette
impossibilité de diagnostic individuel vient du fait que les cellules cancéreuses forment un système
dynamique dont l’évolution au cours du temps suit un modèle chaotique – et ceci justement au sens
mathématique du terme : un système chaotique est imprévisible à long terme car soumis à des
variations même infimes, issues de multiples interactions ; ici, dans le cas du cancer, ce sont toutes
ces interactions entre les cellules hôtes, les cellules immunitaires et les cellules des vaisseaux
alimentant les tumeurs (cellules endothéliales) qui vont moduler la croissance tumorale ; et cela,
différemment selon les individus.

 LA THÉORIE DU CHAOS
 Un concept fascinant pour l’oncologie
 En mathématiques, la théorie du chaos étudie le comportement des systèmes dynamiques qui
 sont très sensibles aux conditions initiales, un phénomène généralement illustré par l'effet
 papillon : des différences infimes dans les conditions initiales (comme des erreurs d'arrondi dans
 les calculs numériques) entraînent des résultats totalement différents pour de tels systèmes,
 rendant en général toute prédiction impossible à long terme. Théorie d’excellence dans les
 domaines de l’astrophysique, de l’économie, de la psychologie du développement ou de
 l’écologie, la théorie du chaos est donc également celle qui explique l’évolution d’un cancer.
 Mais la théorie du chaos renferme elle-même un grand nombre de sous-modèles qui sont connus
 et ont été démontrés dans divers domaines. L’un d’entre eux est la modèle Lotka-Volterra, aussi
 désigné sous le terme de “modèle proie-prédateur” qui, en oncologie, incite à chercher parmi les
 cellules interagissant dans le cancer lesquelles seraient les plus pertinentes à suivre pour détecter,
 évaluer et observer la dynamique à l’œuvre. Les diagrammes issus de ces observations dessinent
 la trajectoire de dynamique de ces cellules. Ainsi, dès 2014, il est apparu qu’au sein des quatre
 types de cellules à l’œuvre dans un cancer (cellules hôtes, cellules immunitaires, cellules
 endothéliales et cellules cancéreuses), la meilleure variable à suivre serait non pas les cellules
 cancéreuses mais les cellules hôtes : en l’occurrence le patient lui-même et ses symptômes.
                                              “Topologie et observabilité d’un modèle chaotique de cancer ”
      Christophe Letellier, Fabrice Denis & Luis A. Aguirre, Non Linéaire Publications, CORIA UMR 6614, 2012

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Dans un système cancéreux proie-prédateur, régi par la théorie du chaos,
                           l’observabilité de la proie, les cellules hôtes, peut être le meilleur indicateur
                                                                               de la dynamique tumorale.
                                                                                     Dr Fabrice DENIS, PhD,
                                                              oncologue à la clinique Victor Hugo du Mans,
                                   président du Syndicat national des radiothérapeutes oncologues – SNRO,
                                         chercheur associé au CORIA CNRS UMR 6614 (Université de Rouen)

        L’OBSERVABILITÉ MATHÉMATIQUE
        Appliquée au modèle clinique du cancer du poumon
        Le cancer peut se résumer en une seule donnée : moins 10 % de taux de survie à 5 ans, sous
        traitement. Toutefois, 90 % des récidives sont attachées à des symptômes…
        Mais ces récidives surviennent rarement le jour d’une visite de surveillance, et plus
        communément entre deux visites programmées à trois ou six mois d’intervalle.
        Par ailleurs, ces visites qui consistent en un examen radioscopique, coûteux, agressif pour
        l'organisme, sont souvent anxiogènes pour le patient, et finalement inutiles en cas de non
        récidive.
     Partant de là, l’idée est d’appliquer la théorie de l’observabilité mathématique au modèle
      clinique du cancer, en d’autres mots détecter la récidive non pas en s’intéressant à la tumeur
      et à sa croissance mais à l’impact de cette tumeur et de cette récidive sur l’hôte via
      l’apparition des premiers symptômes.
En 2013, lors d’une première étude sur ces mêmes tumeurs, le Dr Fabrice Denis et ses collègues de
l’Institut interrégional de cancérologie Jean-Bernard du Mans avaient établi qu’une autosurveillance
hebdomadaire de six paramètres cliniques (poids, fatigue, perte d’appétit, douleur, essoufflement,
toux) est un outil fiable de suivi du cancer du poumon, permettant de repérer une récidive cinq à six
semaines plus tôt en moyenne qu’avec les examens d’imagerie programmés. Depuis lors, les patients
soignés pour ces cancers au centre Jean-Bernard se voient proposer systématiquement l’application
Moovcare. C’est ce qui a permis une nouvelle étude pilote monocentrique et non randomisée, qui a
été effectuée sur 98 patients : la moitié d’entre eux étaient suivis classiquement (avec des rendez-
vous réguliers avec l'oncologue et des scanners), l’autre moitié étaient suivis par l’application. Le
constat est le taux de survie à un an était de 27 % supérieur dans le groupe suivi par l’application.
Enfin, une première étude cette fois multicentrique (sur 5 établissements) et randomisée de phase III
a été organisée. Son critère était spécifiquement celui de la survie, avec 220 patients attendus et
devant être répartis par tirage au sort en deux groupes. Le groupe “sans application” recevait un suivi
avec un scanner au moins tous les trois mois ; le second groupe, “avec application” ne devait passer
un scanner de surveillance que si l’application le suggérait. L’étude était donc très ambitieuse. Les
résultats se sont inscrits dans le prolongement des premières études : +26 % de survie à un an (75 %
dans le groupe avec application contre 49 % dans l’autre) et une médiane de survie de 19 mois dans
le second groupe contre 12 mois dans le premier. La fin de l'étude a été décidée prématurément sur

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un total de 133 patients ; c’est un comité indépendant d’experts qui a pris cette décision à l’issue
d’une évaluation intermédiaire particulièrement positive.
Ces résultats ont été présentés en juin 2016 au congrès annuel de la Société américaine d’oncologie
clinique (ASCO), à Chicago et viennent de faire l’objet d’une publication scientifique.4 À l’échelle
mondiale, l’application permettrait de réduire le nombre de décès annuels de 250 000.
L’algorithme analyse le report sur 12 paramètres cliniques qui sont combinés entre eux et envoie
immédiatement un message à l’oncologue, ce qui permet d’avancer les dates de visite pour proposer
plus rapidement les traitements adéquats. Plus tôt la récidive est détectée, meilleur est l'état général
du patient qui peut dès lors recevoir un traitement plus intensif et plus long – en un mot, optimal.
Dans le processus classique d’intervention, le traitement n’est optimal que dans un tiers des cas du
fait de l’état général des patients, le plus souvent dégradé par la récidive.
L’application Moovcare est développée par la société franco-israélienne SIVAN Innovation.

Le champ des études préliminaires et de l’étude de phase III avait également été élargi à la détection
d’autres problèmes de santé potentiellement graves (pneumonie, embolie pulmonaire, abcès, etc.).
Au total, les résultats transmis par l’application ont fait état : d’une récidive du cancer dans 71 % des
cas ; d’une complication sévère dans 20 % des cas ; d’un problème moins sévère dans 9 % des cas.
Mais 100 % des alertes ont correspondu à un problème. Le résultat à retenir est le suivant : les
récidives peuvent être détectées entre deux visites systématiques dans trois quarts des cas chez les

4
 Denis F, Lethrosne C, Pourel N et al. Randomized trial comparing a web-mediated follow-up to routine
surveillance in lung cancer patients. J Natl Cancer Inst 2017, 109, djx029.

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patients munis de l’application contre un tiers des cas seulement chez les patients non munis de
l’application.

                                    L’approche d’alerte inaugure une nouvelle ère du suivi des cancers,
              dans laquelle les patients échangeront des informations en continu avec leur oncologue,
                         bien au-delà des visites programmées. En bref, une ère de suivi personnalisé.
                                                                                        Dr Fabrice DENIS
Le dispositif permet également de mieux mesurer la réponse au traitement. Il n’est donc pas exclu de
le mettre à l’œuvre seul dans les pays en développement ne disposant pas de scanners pour le suivi
de leurs patients. L’organisme est finalement un excellent scanner.
Enfin, cela est évident, la qualité de vie du patient (et de sa famille) s’en trouve considérablement
améliorée.

 LES AVANTAGES
 En termes d’organisation et de coûts
 Le suivi en continu permet de diviser par deux le nombre de scanners et de PET scans par patient
 et par an, avec aussi autant d’anxiété en moins pour les patients, et notamment la disparition de
 l’anxiété “calendaire”, appelée la scanxiety. Les patients ne sont plus incités à appeler leur
 médecin avec lequel ils communiquent chaque semaine par le biais de l’application.
 Le temps de gestion des informations pour le médecin ou son assistant est estimé à 15 minutes
 par semaine pour 60 patients en cours de suivi et en équivalent temps plein une infirmière peut
 suivre jusqu’à 3 000 patients.

Le dispositif est en attente du marquage CE et devrait aussi rapidement obtenir de la Haute Autorité
de santé son inscription sur la liste des traitements remboursables. C’est aussi le premier dispositif
logiciel à avoir été évalué comme un médicament avec le niveau de preuves requis. Son déploiement
international s’effectuera dès juin prochain, avec SIVAN Innovation qui finance les études cliniques.
Enfin, les applications seront progressivement étendues à d’autres cancers, toujours sur des
principes d’Evidence-Based Medecine (médecine basée sur les preuves). Ces principes pourront
également être mis en œuvre dans le suivi de maladies auto-immunes, en pratique le suivi de toutes
les maladies chroniques symptomatiques, et bientôt sûrement en amont pour la détection précoce
de pathologies (cancers des fumeurs, coronaropathies, etc.), voire un jour pour le ralentissement du
vieillissement.
L’idée est présomptueuse mais non sans fondement : une littérature déjà forte de plus de 500
articles scientifiques suggère que dès l’âge de 40 ans des fragilités ou pré-fragilités sont détectables
dans l’organisme qui permettraient d’évaluer assez précisément l’espérance de vie en bonne santé
de l’individu ; parmi elles la vitesse d’un pas. Attention de ne pas descendre en-dessous du 0,8 mètre

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par seconde (vitesse au niveau médian de l’espérance de vie selon une étude du Dr Stephanie
Studenski de l’Université de Pittsburg, cette mesure étant d’ailleurs valable tant pour les femmes que
pour les hommes) ! Vivre en forme jusqu’à 120 ans : la science et le business sont ensemble en train
de forcer le chemin sinon vers l’immortalité, du moins vers une longévité améliorée.

 RETOUR SUR LA PERTINENCE DES SYMPTÔMES
 “Vous êtes fumeur, vous toussez depuis plus de trois semaines : consultez immédiatement votre
 médecin” : le message a fait l’objet d’une campagne d’affichage au Royaume-Uni, à l’issue de
 laquelle le taux de cancer du poumon de stade précoce (I et II) a été augmentée.
 En d’autres mots, sur un seul symptôme – une toux traînante –, le taux de cancer du poumon
 curable a été augmenté de 3 %. Quand bien même un certain nombre de patients ont consulté à
 cette occasion leur généraliste pour rien, le bilan avantages-coûts de la campagne est amplement
 positif.
 Référence – Ironmonger L et al. An evaluation of the impact of large-scale interventions to raise public
 awareness of a lung cancer symptom. Br J Cancer 2014, DOI:10.1038/bjc.2014.596

        APPLICATIONS D’E-SANTÉ
        Des conditions d’évaluation qui restent à créer
En se contraignant à réaliser une étude multicentrique de phase III randomisée, le dispositif
MoovcareTM a tenu de rester dans le cadre conventionnel des essais thérapeutiques à l’instar d’un
médicament. L’évaluation a pris au total six ans. Cependant il ne laisse aucun doute que les
guidelines d’évaluation vont devoir être revus afin d’être plus réactifs et plus appropriés à des
applications logicielles. SIVAN Innovation et l’Institut Jean-Bernard du Mans travaillent sur cette
question en collaboration avec des équipes américaines ayant elles-mêmes conçu des applications de
surveillance médicale. L’objectif est notamment d’éviter les essais randomisés, longs, onéreux et en
l’espèce totalement inadaptés, pour concentrer les essais sur des études à un bras, qui seront
enrichies au fur et à mesure de leur déploiement par le recours à des données de big data, à des
cohortes historiques ou à des résultats d’études cliniques publiées (EMR). La méthode devrait
permettre de valider beaucoup plus rapidement un nouveau dispositif pour des applications définies.
Elle est aussi plus proche des souhaits des patients d’aujourd’hui, de plus en plus réticents à se prêter
à des essais randomisés, parfois même remis en cause par les praticiens et les résultats de la “vraie
vie”.
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L’e-santé n’est pas là seulement pour réduire les coûts, bien heureusement. L’e-santé n’est pas là
non plus uniquement pour des dispositifs hypersophistiqués. Elle est là surtout pour faire progresser
la médecine, les pratiques et les conditions de prise en charge d’un patient informé et responsabilisé
– et finalement améliorer la survie. Avec des applications telles que MoovcareTM, l’objet est de

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mettre la révolution numérique au service de l’examen clinique et de la relation entre le patient et
son médecin, tout simplement.
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                                         rédactrice en chef de la revue Prospective Stratégique

                                                                                                  8
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