COMMENT DÉFINIR LES JOINT-VENTURES DE PLEIN EXERCICE APRÈS L'ARRÊT AUSTRIA ASPHALT ? APPROCHES COMPARATIVES UE / FRANCE - 9 MARS 2018
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SÉMINAIRE ÉCONOMIE ET DROIT DE LA CONCURRENCE 2018, PARIS COMMENT DÉFINIR LES JOINT-VENTURES DE PLEIN EXERCICE APRÈS L'ARRÊT AUSTRIA ASPHALT ? APPROCHES COMPARATIVES UE / FRANCE 9 MARS 2018
Jose Maria CARPI BADIA I Chef d'unité, Support et politique des cas de concentrations, DG COMP, Bruxelles Étienne CHANTREL I Chef du service des concentrations, Autorité de la concurrence, Paris Nathalie JALABERT DOURY I Avocat associée, Mayer Brown, Paris Suivez-nous sur Twitter @Concurrences et rejoignez la conversation #AustriaAsphalt
L’arrêt de la Cour de Justice dans l’affaire Austria Asphalt Josep M. Carpi Badia Chef d’unité, Mergers Case Support and Policy DG COMP, Commission Européenne
Le cadre réglementaire européen
Considérant #20 « Il est utile de définir la notion de concentration de telle sorte qu'elle couvre les opérations entraînant un changement durable du contrôle des entreprises concernées et donc de la structure du marché. Il convient par conséquent d'inclure dans le champ d'application du présent règlement toutes les entreprises communes accomplissant de manière durable toutes les fonctions d'une entité économique autonome. Il convient en outre de traiter comme une concentration unique des opérations qui sont étroitement liées en ce qu'elles font l'objet d'un lien conditionnel ou prennent la forme d'une série de transactions sur titres effectuées dans un délai raisonnablement bref. »
Définition de la concentration : Article 3(1)(b) « Une concentration est réputée réalisée lorsque un changement durable du contrôle résulte [...] de l'acquisition, par une ou plusieurs personnes détenant déjà le contrôle d'une entreprise au moins ou par une ou plusieurs entreprises, du contrôle direct ou indirect de l'ensemble ou de parties d'une ou de plusieurs autres entreprises, que ce soit par prise de participations au capital ou achat d'éléments d'actifs, contrat ou tout autre moyen. »
Définition de la concentration : Article 3(4) « La création d'une entreprise commune accomplissant de manière durable toutes les fonctions d'une entité économique autonome constitue une concentration au sens du paragraphe 1, point b). »
Objet du contrôle « (24) Le règlement sur les concentrations dispose, dans son article 3, paragraphe 1, point b), et paragraphe 2, que l'objet du contrôle peut consister dans l'ensemble ou des parties d'une ou plusieurs entreprises constituant des entités juridiques, dans les éléments d'actifs de ces entités, ou seulement dans certains éléments d'actifs de celles-ci. L'acquisition d'un contrôle par le biais d'éléments d'actifs ne peut être assimilée à une concentration que si ces éléments d'actifs constituent l'ensemble ou une partie d'une entreprise, c'est-à-dire une activité se traduisant par la présence sur un marché et à laquelle un chiffre d'affaires peut être rattaché sans ambiguïté. »
Entreprises Communes — Notion de plein exercice « (92) L'article 3, paragraphe 4, dispose en outre que la création d'une entreprise commune accomplissant de manière durable toutes les fonctions d'une entité économique autonome (c'est-à-dire d'une entreprise commune dite de plein exercice) constitue une concentration au sens du règlement sur les concentrations. Le critère de plein exercice circonscrit par conséquent l'application du règlement sur les concentrations à la création d'une entreprise commune, indépendamment du fait que cette entreprise commune soit totalement nouvelle ou que les parties apportent à l'entreprise commune des actifs qu'elles possédaient auparavant, à titre individuel. Dans ce cas, l'entreprise commune doit remplir le critère de plein exercice pour qu'il y ait concentration. »
« (91) L'article 3(1)( b), prévoit qu'une concentration est réputée réalisée lorsqu'une ou plusieurs entreprises acquièrent le contrôle de l'ensemble ou de parties d'une autre entreprise. [...] Comme pour la prise de contrôle exclusif d'une entreprise, cette acquisition du contrôle en commun entraînera un changement de la structure du marché, même si, d'après les plans des entreprises acquéreuses, l'entreprise acquise ne serait plus considérée comme de plein exercice après l'opération (par exemple parce qu'elle vendra exclusivement à l'entreprise fondatrice). De ce fait, une opération impliquant plusieurs entreprises qui acquièrent auprès de tierces parties le contrôle en commun d'une autre entreprise ou de parties d'une autre entreprise remplissant les critères énoncés au point 24 constitue une concentration conformément à l'article 3(1)( b), sans qu'il soit nécessaire de considérer le critère de plein exercice. »
Deux tests juridictionnels possibles La cible constitue une La cible constituera une entreprise, c'est-à-dire une entreprise commune activité se traduisant par la accomplissant de manière présence sur un marché et à durable toutes les fonctions laquelle un chiffre d'affaires d'une entité économique peut être rattaché sans autonome, c'est-à-dire d'une ambiguïté entreprise commune dite de plein exercice Article 3(1)(b) du Règlement Article 3(4) du Règlement Point 24 de la Communication Point 92 de la Communication juridictionnelle juridictionnelle
La jurisprudence Austria Asphalt
Affaire C-248/16 Austria Asphalt & Co vs. Bundeskartellanwalt Demande de décision préjudicielle formée par la Cour suprême d’Autriche
« L’opération consistant à faire passer une entreprise existante, ou une partie d’entreprise existante, soumise jusqu’alors au contrôle unique d’un groupe, sous le contrôle commun de ce même groupe et d’un autre groupe, indépendant de ce premier groupe, ne constitue une concentration entre entreprises au sens de l’article 3 du règlement [sur les concentrations] que si l’entreprise commune qui procède de cette transaction accomplit de manière durable toutes les fonctions d’une entité économique autonome. »
« L’article 3 du règlement [sur les concentrations], doit être interprété en ce sens qu’une concentration n’est réputée réalisée à l’issue du changement de la nature du contrôle exercé sur une entreprise existante, qui, antérieurement exclusif, devient conjoint, qu’à la condition que l’entreprise commune issue d’une telle opération accomplisse de manière durable toutes les fonctions d’une entité économique autonome. »
Interprétation et conséquences
Test juridictionnel applicable à différentes constellations de cas d’acquisition de contrôle conjoint et opérations sur des entreprises communes
Passage du contrôle unique au contrôle commun (l’ancien propriétaire demeure société mère)
Création d’une entreprise commune totalement nouvelle (“Greenfield JV”)
Création d’une entreprise commune avec apport d’actifs (“Greenfield JV”)
Remplacement d’une société mère dans une entreprise commune
Ajout d’une société mère dans une entreprise commune
Acquisition du contrôle commun auprès de tierces parties (l’ancien propriétaire ne demeure pas société mère)
Conséquences de l’arrêt Austria Asphalt 9 mars 2018 Étienne Chantrel, Chef du service des concentrations, Autorité de la concurrence
Les opinions exprimées ici n’engagent que leur auteur et ne sauraient engager l’Autorité de la concurrence. 1
I. Le traitement des entreprises communes en droit des concentra2ons II. L’arrêt Austria Asphalt de la CJUE III. De nombreuses configura2ons par2culières 1
I. Le traitement des entreprises communes en droit des concentra2ons • Pour le cas français, les règles sont très similaires à celles de la Commission. • Article L. 430-1 du code de commerce : la création d’une entreprise commune ne constitue une concentration que si elle peut être qualifiée « de plein exercice ». • La pratique décisionnelle se réfère souvent à la communication consolidée pour déterminer ce qui est ou pas une « création ».
I. Le traitement des entreprises communes en droit des concentra2ons • Caractéristiques pour pouvoir être qualifiée d’entreprise de plein exercice : communication consolidée de la Commission européenne (points 94 à 100) et lignes directrices de l’Autorité de la concurrence (points 54 à 56). • Principe : « accomplir de manière durable toutes les fonctions d’une entité économique autonome ». •Faisceau d’indices : – ressources suffisantes – activité allant au-delà d’une fonction spécifique pour les sociétés mères – pas totalement tributaire des sociétés mères pour ventes et achats – durable
II. L’arrêt Austria Asphalt de la CJUE Le cas • Centrale de mixage d’asphalte de Mürzzuschlag, appartenant à Teerag Asdag, filiale de Porr • Austria Asphalt, filiale de Strabag prend 50% • Pas une entreprise de plein exercice Ø Les juridicEons autrichiennes se demandent si c’est une concentraEon au sens du règlement no 139/2004 .
II. L’arrêt Austria Asphalt de la CJUE Question préjudicielle : « 14. (…) L’article 3, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 4, du [règlement no 139/2004] doit-il être interprété en ce sens que le passage d’un contrôle unique à un contrôle commun sur une entreprise déterminée, à l’occasion duquel l’entreprise exerçant auparavant seule le contrôle conserve une participation en exerçant conjointement un contrôle, n’entraîne une concentration que si l’entreprise [dont le contrôle est modifié] présente de manière durable toutes les fonctions d’une entité économique autonome ? 15. Par sa question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 3, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 4, du règlement no 139/2004 doit être interprété en ce sens qu’une concentration n’est réputée réalisée à l’issue du changement de la nature du contrôle exercé sur une entreprise existante, qui, antérieurement exclusif, devient conjoint, qu’à la condition que l’entreprise commune issue d’une telle opération accomplisse de manière durable toutes les fonctions d’une entité économique autonome.»
II. L’arrêt Austria Asphalt de la CJUE Enjeux de la question : • Est-on soumis à l’article 3, paragraphe 1, sous b) ? Ø pas de test de l’entreprise de plein exercice • Est-on soumis à l’article 3, paragraphe 4, sur la création d’une entreprise commune ? Ø test de l’entreprise de plein exercice La cour a considéré que le libellé de l’article 3 ne suffisait pas à trancher entre ces deux interpretations, il faut s’intéresser à la finalité et à l’économie générale du règlement (considérants 5, 6, 8 et 20).
II. L’arrêt Austria Asphalt de la CJUE Décision : « 22. Ainsi, comme il ressort du considérant 20 dudit règlement, la notion de concentration doit être définie de telle sorte qu’elle couvre les opérations entraînant un changement durable du contrôle des entreprises concernées et donc de la structure du marché. Aussi, s’agissant des entreprises communes, celles-ci doivent être incluses dans le champ d’application du même règlement si elles accomplissent de manière durable toutes les fonctions d’une entité économique autonome. »
II. L’arrêt Austria Asphalt de la CJUE Décision : « 28. Il s’ensuit que, au regard des objectifs poursuivis par le règlement n°139/2004, l’article 3, paragraphe 4, de celui-ci doit être interprété comme se référant à la création d’une entreprise commune, c’est-à-dire à une opération à l’issue de laquelle une entreprise contrôlée en commun par au moins deux autres entreprises apparaît sur le marché, sans qu’il importe que cette entreprise nouvellement contrôlée en commun ait existé avant l’opération en cause. »
II. L’arrêt Austria Asphalt de la CJUE Décision : « L’article 3 du règlement (CE) n°139/2004 du Conseil, du 20 janvier 2004, relatif au contrôle des concentrations entre entreprises (« le règlement CE sur les concentrations »), doit être interprété en ce sens qu’une concentration n’est réputée réalisée à l’issue du changement de la nature du contrôle exercé sur une entreprise existante, qui, antérieurement exclusif, devient conjoint, qu’à la condition que l’entreprise commune issue d’une telle opération accomplisse de manière durable toutes les fonctions d’une entité économique autonome. »
III. De nombreuses configura2ons par2culières • La Cour s’est prononcée à l’occasion d’une configuration particulière, mais bien d’autres cas sont envisageables. • Important, autant que possible, de rechercher la convergence entre la pratique européenne et la pratique nationale.
III. De nombreuses configura2ons par2culières • Pour les diverses configurations possibles, la question peut se trancher au cas par cas. • Cette jurisprudence ne change rien pour de nombreux cas de figure !
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