DU CHANGEMENT DANS L'AIR : LES BASES DU FUTUR MARCHE AMERICAIN DU CARBONE - Groupe Caisse des ...
←
→
Transcription du contenu de la page
Si votre navigateur ne rend pas la page correctement, lisez s'il vous plaît le contenu de la page ci-dessous
n°15 • Octobre 2008 DU CHANGEMENT DANS L’AIR : LES BASES DU FUTUR MARCHE AMERICAIN DU CARBONE Cate Hight1 et Gustavo Silva-Chávez2 Depuis leur refus de ratifier le protocole de Kyoto en 2001, les Etats-Unis ont été jugés à la traîne des efforts menés au niveau international pour lutter contre le changement climatique. À ce jour, les Etats- Unis se montrent toujours réticents à signer un accord international contraignant visant à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre (GES), affirmant que leur position ne varierait pas tant que les économies en développement comme la Chine et l’Inde n’accepteraient pas d’adopter également des objectifs en matière d’émissions. De surcroît, l’administration Bush est demeurée opposée à des objectifs ou des plafonds d’émissions nationaux fixés de manière contraignante au niveau fédéral en choisissant de traiter la question des émissions de GES au moyen d’objectifs d’intensité et d’autres mesures non contraignants. En dépit de cette absence d’action au niveau fédéral, un certain nombre d’efforts de réduction des émissions ont été lancés aux Etats-Unis hors du cadre fédéral. Des acteurs privés, des municipalités et des Etats ont été à l’origine d‘initiatives destinées à limiter la progression des émissions et à pousser à l’action le gouvernement fédéral. La présente Etude Climat analyse ces initiatives ainsi que les implications potentielles qu’elles pourraient avoir sur le marché international du carbone. Les auteurs parviennent à la conclusion suivante : alors que des objectifs contraignants de réduction des gaz à effet de serre manquent toujours au niveau fédéral, les Etats-Unis sont parvenus dans leur ensemble à construire les bases nécessaires à la mise en place d’un marché national de permis d’émissions. Certains programmes d’échange américains au niveau des Etats et des régions sont susceptibles d’influencer le marché du carbone au cours des prochaines années ; leur avenir dépend de la vitesse à laquelle sera mise en œuvre une loi fédérale imposant des limites sur les GES. La forme que prendra cette loi est entre les mains du Congrès et du nouveau président qui sera élu le 4 novembre 2008. 1 Cate Hight est chercheuse à la Mission Climat de la Caisse des Dépôts, où elle est spécialisée dans les marchés carbone émergents et dans les opportunités d’interconnexion des systèmes de permis d’émissions existants. cate.hight@caissedesdepots.fr – + 33 1 58 50 98 19 2 Gustavo Silva-Chávez est analyste des politiques relatives au changement climatique au sein du programme Air et Climat de l’Environmental Defense Fund. Il travaille sur les questions internationales liées au changement climatique dans le cadre du protocole de Kyoto, ainsi que sur les initiatives visant à mettre en œuvre un régime climatique mondial pour l’après-2012. gsilva-chavez@edf.org – + 1 202 572 3384 1
Etude Climat N° 15 – Du changement dans l’air : les bases du futur marché américain du carbone REMERCIEMENTS Les auteurs tiennent à remercier toutes les personnes qu’ils ont rencontrées dans le cadre de la préparation de ce rapport, notamment Jos Cozijnsen (avocat, spécialiste des marchés de permis), Denny Ellerman (MIT), Peter Goldmark (Environmental Defense Fund), Jennifer Haverkamp (Environmental Defense Fund), Patrick Hogan (Pew Center on Global Climate Change), Dominic Marcellino (Environmental Defense Fund), Sam Napolitano (US Environmental Protection Agency), Manik Roy (Pew Center on Global Climate Change), et Derek Walker (Environmental Defense Fund), pour leur relecture attentive et leurs critiques constructives. Les auteurs assument l’entière responsabilité des erreurs et omissions éventuelles. 2
Etude Climat N° 15 – Du changement dans l’air : les bases du futur marché américain du carbone SOMMAIRE INTRODUCTION 4 I. UN TOUR D’HORIZON DES EMISSIONS AMERICAINES 4 A. Le premier émetteur au monde par habitant 4 B. Émissions nationales : l’électricité et le transport en tête 5 II. 20 ANS DE POLITIQUE CLIMATIQUE AMERICAINE 9 III. LA MOBILISATION DES ACTEURS PRIVES 11 A. Le Chicago Climate Exchange crée un marché carbone basé sur le volontariat 11 B. Le Climate Registry consigne les données d’émissions à l’échelon national 11 C. United States Climate Action Partnership : l’appel à une contrainte obligatoire sur les GES 12 IV. MUNICIPALITES, ETATS ET REGIONS FIXENT LEURS PROPRES OBJECTIFS EN MATIERE D’EMISSIONS 12 A. Les municipalités relèvent l’engagement Kyoto et lancent des initiatives climatiques locales 12 B. La réponse des Etats par des lois de réduction des GES 13 C. Les partenariats régionaux lanceront les premiers marchés américains obligatoires du carbone 14 V. LA COUR SUPREME INTERVIENT 18 VI. LE CONGRES S’INVITE DANS LE DEBAT SUR LA POLITIQUE CLIMATIQUE 18 A. Une décennie de discussions aboutit à une nouvelle loi sur l’énergie en 2007 18 B. Au Sénat, le changement climatique occupe pour la première fois le devant de la scène 20 C. La Chambre des représentants définit les grandes lignes d’une future loi sur le contrôle des GES 21 VII. LA POLITIQUE PRESIDENTIELLE 22 VIII. QU’ATTENDRE A L’AVENIR ? 23 ANNEXES 24 Annexe 1 – Les principaux émetteurs mondiaux : émissions de CO2, population et tendances de croissance économique (PIB) 24 Annexe 2 – Emissions de CO2 aux Etats-Unis par Etat en 2003 25 Annexe 3 – Initiatives des différents Etats en rapport avec le changement climatique 26 Annexe 4 – Tableau: produit intérieur brut, population et émissions de CO2 par Etat en 2003 27 Annexe 5 – Participants aux programmes régionaux d’échange de GES (au 23 septembre 2008) 28 Annexe 6 – Structure institutionnelle du Congrès américain 29 Annexe 7 – Propositions de marchés de permis déposées au Sénat depuis janvier 2007 31 Annexe 8 – Dispositions initiales du Lieberman-Warner Climate Security Act (S.3036) 32 Annexe 9 – Propositions de cap-and-trade déposées à la Chambre depuis janvier 2007 34 Annexe 10 – Dispositions du projet Dingell-Boucher 35 Annexe 11 – Calendrier politique américain 37 IX. REFERENCES 38 LA RECHERCHE DE LA MISSION CLIMAT 39 3
Etude Climat N° 15 – Du changement dans l’air : les bases du futur marché américain du carbone INTRODUCTION Les Etats-Unis sont l’un des plus importants émetteurs de gaz à effet de serre (GES) au monde. Alors qu’ils n’abritent que 5 % de la population mondiale, celle-ci génère environ 20 % des GES produits par l’homme. Les Etats-Unis produisent six fois plus de GES par habitant que la Chine et douze fois plus que l’Inde. Leurs émissions ont encore progressé au cours de la dernière décennie, le pays restant dépendant du charbon pour 50 % de sa production d’électricité et de l’automobile pour la plupart des transports. Les Etats-Unis commencent toutefois à prendre des mesures de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Des acteurs privés ont lancé des initiatives volontaires visant à évaluer la quantité d’émissions qu’ils produisent ; plusieurs d’entre eux mènent des actions de lobbying auprès du gouvernement fédéral afin de mettre en œuvre une politique contraignante destinée à contrôler les émissions de GES. Sans attendre cette politique, des municipalités et des Etats américains lancent actuellement leurs propres initiatives. Ainsi, dix Etats du Nord-est, dans le cadre de la Regional Greenhouse Gas Initiative (RGGI), ont mis aux enchères les allocations initiales du premier marché d’échange de permis d’émissions de GES américain, qui débutera en janvier en 2009. Certains Etats du Midwest et de l’Ouest sont sur le point de leur emboîter le pas en lançant leurs propres programmes d’échange au cours des prochaines années. La Californie, un Etat plus grand que de nombreux pays dans le monde, a adopté une loi visant à établir le premier plan contraignant de réduction des émissions de GES pour l’ensemble de l’économie. Les règlementations nécessaires à la mise en œuvre de ce plan sont bien avancées. Au niveau fédéral, le débat sur la politique climatique a pris de l’ampleur au cours des deux dernières années. En avril 2007, la Cour suprême des Etats-Unis a statué dans l’affaire Massachusetts v. EPA, un contentieux à caractère environnemental qui a affirmé l’autorité du gouvernement fédéral en matière de contrôle des émissions de GES. La politique climatique est devenue fin 2007 une question cruciale au sein du Congrès contrôlé par les démocrates : la loi sur la sécurité climatique (Lieberman-Warner Climate Security Act) a été la première législation proposant un système de permis d’émissions ayant reçu l’approbation de la commission du Sénat sur l’environnement et les travaux publics (Senate Committee on Environment and Public Works). Bien que cette proposition ait été bloquée au Sénat en juin 2008, il est probable qu’elle servira de référence pour de prochaines négociations législatives, de même que la proposition des parlementaires Dingell et Boucher de la Chambre des Représentants. En novembre 2008, les Américains éliront un nouveau président qui interviendra sans doute sur la politique climatique. Les deux candidats, Barack Obama et John McCain, ont dans le passé soutenu les propositions de système de permis de GES et ont indiqué leur intention de poursuivre dans ce sens. Cependant la capacité du prochain président à mettre en œuvre une politique climatique intégrée dépendra du soutien du Congrès. 2009 promet d’être une année intéressante pour les observateurs des marchés du carbone : la RGGI constituera pour les Etats-Unis leur première expérience concrète d’un marché de permis d’émissions de GES obligatoire ; le nouveau président pourrait lancer une initiative de réduction des GES ; et le Congrès continuera à élaborer des propositions législatives détaillées. Le rôle d’un futur système de permis américain sur le marché international du carbone demeure imprécis, de même que la position qu’adopteront les États-Unis dans les négociations internationales sur le climat. I. UN TOUR D’HORIZON DES EMISSIONS AMERICAINES A. Le premier émetteur au monde par habitant Avec à peine 5 % de la population mondiale, les Etats-Unis émettent environ 20 % des GES anthropiques. Ils distancent de loin leurs concurrents pour les émissions de CO2 par habitant. En 2004, ils ont émis près de deux fois plus de CO2 par habitant que la Russie, six fois plus que la Chine et douze fois 1 plus que l’Inde . 1 World Resources Institute, Climate Analysis Indicators Tool (CAIT) Version 5.0, Emissions totales de GES en 2004 (hors utilisation des terres, changements d’affectation des terres et foresterie par manque de données). 4
Etude Climat N° 15 – Du changement dans l’air : les bases du futur marché américain du carbone Figure 1 – Émissions de CO2 par habitant des principaux pays émetteurs (2004) 25 tonnes CO2e par personne 20 15 10 5 0 Etats-Unis Russie Japon EU-25 Chine Inde Moyenne mondiale Note : les émissions provenant de l’utilisation des terres, de changements d’affectation des terres et de la foresterie sont exclues par manque de données. Source : World Resources Institute, Climate Analysis Indicators Tool (CAIT) Version 5.0. L’inclusion des émissions de CO2 issues de la déforestation maintiennent les Etats-Unis au rang du plus gros émetteur par habitant au monde : les données les plus récentes, en 2000, montrent que l'Indonésie et le Brésil sont d‘importants émetteurs. Avec respectivement 13,8 et 9,8 tonnes d'émissions de CO2 par habitant en 2000, ils sont bien en deçà des émissions américaines de 19,1 tonnes par habitant. B. Émissions nationales : l’électricité et le transport en tête Comme dans la plupart des pays développés, la production d’électricité, le transport et l’industrie lourde sont responsables de la majorité des émissions de GES aux Etats-Unis. Ces secteurs étant largement dépendants des combustibles fossiles, la majorité de leurs émissions de GES s’effectuent sous forme de dioxyde de carbone (CO2), qui constitue 85 % des émissions américaines de GES. Figure 2 – Émissions primaires de GES aux Etats-Unis par type et par secteur économique (2005) Total = 7 260,4 Mt de CO2e 2 500 Mt CO2e 2 000 1 500 1 000 500 0 Production Transport Industrie Agriculture Tertiaire Residentiel d'énergie Methane Oxide nitreux Gaz fluorés CO2 Source : US EPA Inventory of GHG Emissions and Sinks : 1990 - 2005. 5
Etude Climat N° 15 – Du changement dans l’air : les bases du futur marché américain du carbone Les émissions dues à l’industrie lourde ont reculé au cours de la dernière décennie grâce à l’amélioration des performances énergétiques, à des changements de combustibles et au passage d’une économie industrielle à une économie de services. Néanmoins les émissions de la production d’électricité et du transport continuent de croître. De 1990 à 2005, les émissions de la production d’électricité ont progressé de 31 % et celles du transport de 32 %. Les émissions de GES des Etats-Unis ont atteint 7 260,4 Mt de dioxyde de carbone équivalent (CO2e)2 en 2006, soit 15 % au-dessus des niveaux d’émissions de 1990 et 23 % au-dessus de l’objectif national fixé par le protocole de Kyoto pour 2008-2012. Figure 3 – Tendance d’évolution (en %) des émissions de GES aux États-Unis par secteur (1990-2005) - Indice (1990 = 100) 135 MtCO2e 130 125 120 115 110 105 100 95 90 1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002 2004 2006 Production d'énergie Transport Industrie Agriculture Tertiaire Résidentiel Source : US EPA Inventory of GHG Emissions and Sinks : 1990-2005. Secteur de la production d’électricité : le charbon est roi La production d’électricité américaine Figure 4 – Production d’électricité aux États- dépendant largement des combustibles Unis par source d’énergie (2006) fossiles, une demande croissante d’électricité Production totale = 4,1 milliards de kWh entraîne une hausse des émissions de GES. Renouvelables Pétrole 2% 2% Les Etats-Unis font appel aux combustibles Autres fossiles pour plus de 70 % de leur production Hydro-électrique 1% 7% d’électricité. En 2006, près de la moitié de l’électricité a été Nucléaire produite à partir de charbon, le combustible 19% Charbon fossile le plus intensif en carbone. C’est une 49% source d’énergie abondante et relativement bon marché aux États-Unis, ce qui le rend attractif aux yeux des producteurs d’électricité, dont les émissions de CO2 ne Gaz naturel Source : sont pas actuellement plafonnées. 20% US Department of Energy, EIA Electric Power Annual 2006. 2 L’OCDE définit le dioxyde de carbone équivalent comme une mesure destinée à comparer les émissions de différents gaz à effet de serre sur la base de leur pouvoir de réchauffement global. Le pouvoir de réchauffement global du méthane sur 100 ans s’établit par exemple à 21. Cela signifie que les émissions d’un million de tonnes de méthane équivalent aux émissions de 21 millions de tonnes de dioxyde de carbone. 6
Etude Climat N° 15 – Du changement dans l’air : les bases du futur marché américain du carbone Aux Etats-Unis, les principaux consommateurs d’électricité sont les utilisateurs résidentiels, suivis par le secteur commercial et le secteur industriel. L’amélioration des performances énergétiques de chacun de ces secteurs, conjuguée à la tarification des émissions de CO2, pourrait entraîner une réduction significative des GES émis par la production électrique américaine. Figure 5 – Émissions directes et indirectes de GES par secteur (2005) 2 500 Mt CO2e 2 000 1 500 1 000 500 0 Transport Industrie Agriculture Tertiaire Residentiel Emissions indirectes dues à la consommation énergétique Emissions directes Source : US EPA Inventory of GHG Emissions and Sinks : 1990- 2005. Le secteur des transports : une histoire d’amour avec l’automobile Les émissions de GES du secteur américain des transports sont également en hausse en dépit des améliorations technologiques qui ont réduit les émissions des automobiles au cours des dernières années. La population des États-Unis a progressé de plus de 20 % depuis 1990. Les Américains voyagent davantage et de plus en plus de marchandises sont acheminées dans l’ensemble du pays. De 1990 à 2005, le nombre total de passager-kilomètres a augmenté de 39 % pour atteindre 5 523 milliards de miles (environ 8 886 milliards de kilomètres). Les trajets aériens se sont développés le plus (+ 63 %), après une forte baisse consécutive aux attaques terroristes du 11 septembre 2001. Les déplacements par autoroute et transports en commun ont augmenté de manière significative, de 37 et 21 % respectivement. Le transport ferroviaire passager a par contre baissé de - 11 % entre 1990 et 2005. Figure 6 – Évolution (en %) des passager-kilomètres parcourus par type de transport (1990-2005) Indice (1990 = 100) 170 160 150 140 130 120 110 100 90 80 90 91 92 93 94 95 96 97 98 99 00 01 02 03 04 05 19 19 19 19 19 19 19 19 19 19 20 20 20 20 20 20 Trafic aérien Trafic routier Transport en commun Trafic ferroviaire Tous modes confondus Source : United States Department of Transportation, National Transportation Statistics, décembre 2007. 7
Etude Climat N° 15 – Du changement dans l’air : les bases du futur marché américain du carbone En dépit de ce regain de popularité pour les voyages en avion, les Américains continuent à privilégier la voiture pour la plupart de leurs déplacements. Le nombre de passager-kilomètres par autoroute a atteint 7 860 milliards (4 885 miles) en 2005, 8 fois le nombre de kilomètres parcourus par avion et 88 fois la distance parcourue en transports en commun. En 2005, le transport passager ferroviaire n’a représenté que 8 milliards (0,09 %) de passager-kilomètres. L'autoroute reste le moyen de transport le plus populaire des Etats-Unis mais la hausse des prix de l’essence en 2007 et 2008 poussent les Américains à conduire moins. Ainsi la distance parcourue par l’ensemble des véhicules en mai, en général un mois propice aux excursions aux Etats-Unis, a diminué 3 de 3,7 % entre 2007 et 2008 . La crise économique actuelle pourrait également conduire à une baisse du pouvoir d'achat des consommateurs, et donc à une baisse de la consommation d'essence. Figure 7 – Passager-kilomètres aux Etats-Unis par type de transport (2005) Total = 8 886 milliards Transports en commun Aérien 1% 11% Routier 88% Source : United States Department of Transportation, National Transportation Statistics, décembre 2007. Le transport intérieur de marchandises a augmenté en même temps que le transport de passagers. De 1990 à 2005, le fret a augmenté de 25 % pour atteindre 7 300 milliards de tonne-kilomètres (soit 4 537 milliards de tonne US-miles). Si la quantité de fret en tonne-kilomètres demeure inférieur au nombre de passager-kilomètres, le transport de fret progresse rapidement dans plusieurs types de transport. De 1990 à 2005, c’est le transport par rail qui a enregistré la croissance la plus forte (+ 63 %), suivi par le transport par camion (+ 52 %) et le fret aérien (+ 51 %). Le transport de pétrole et de gaz naturel par pipeline est resté relativement stable à cause des contraintes d’infrastructures (+ 5 % seulement). Le transport maritime a nettement chuté sur la même période de - 29 %. Figure 8 – Evolution (en %) du nombre de tonne-kilomètres de fret aux Etats-Unis par type de transport (1990-2005) - Indice (1990 = 100) 180 160 140 120 100 80 60 90 91 92 93 94 95 96 97 98 99 00 01 02 03 04 05 19 19 19 19 19 19 19 19 19 19 20 20 20 20 20 20 Aérien Routier Ferroviaire Maritime Pipeline (pétrole et gaz) Tous modes confondus Source : United States Department of Transportation, National Transportation Statistics, juillet 2007. 3 US Department of Transportation, Federal Highway Administration, Traffic Volume Trends, mai 2008. 8
Etude Climat N° 15 – Du changement dans l’air : les bases du futur marché américain du carbone Le transport par rail et par camion représente plus de deux tiers du transport intérieur de fret aux Etats- Unis. Le fret aérien n’a compté que 25,7 milliards de tonne-kilomètres (16 milliards de tonne US-miles) en 2005 (0,3 % du total). Figure 9 – Nombre de tonne-kilomètres parcourus par le fret aux États-Unis par type de transport (2005) Total = 7 300 milliards Pipeline (pétrole et Routier gaz) 29% 20% Maritime 13% Ferroviaire 38% Source : United States Department of Transportation, National Transportation Statistics, juillet 2007. II. 20 ANS DE POLITIQUE CLIMATIQUE AMERICAINE Les Etats-Unis ont manifesté peu d’empressement à adopter une politique fédérale contraignante limitant les émissions de gaz à effet de serre, tout en prenant part activement depuis des dizaines d’années au dialogue international sur le changement climatique. Ils ont joué un rôle important dans les recherches consacrées au changement climatique dans les années 1960 et 1970 en finançant généreusement des chercheurs pour étudier cette question et diffuser les informations recueillies. Après le succès des négociations de Montréal sur la pollution par l’ozone à la fin des années 1980, les Etats-Unis ont proposé la création d’un groupe de travail international comparable sur le climat, qui, en 1988, est devenu le Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat (GIEC). Le premier rapport d’évaluation du GIEC, publié en 1990, a servi de base à la création de la Convention- cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC), ouverte à signature en 1992 à la Conférence des Nations Unies sur l’Environnement et le Développement de Rio de Janeiro (Brésil). La CCNUCC a engagé les gouvernements signataires à un « objectif non contraignant » de réduction des concentrations atmosphériques de gaz à effet de serre et a reconnu que les nations développées (Annexe I) et en développement assumeraient des « responsabilités communes mais différenciées » dans les efforts de réduction des émissions de GES. A cette époque, le président des Etats-Unis, George H.W. Bush, soutenait une action internationale sur les GES ; son administration considérait qu’un système de permis d’émissions constituait une solution viable au problème du changement climatique. Le président Bush a présenté pour approbation le traité de la CCNUCC au Sénat américain, seule instance possédant la capacité constitutionnelle de ratifier les traités. Le traité a été approuvé par deux tiers du Sénat et a été signé par le Président en octobre 1992. Après l’entrée en vigueur de la CCNUCC en 1994, les parties signataires ont entamé une série de réunions annuelles (Conférences des parties ou COP), pour évaluer les progrès réalisés au regard des objectifs de la Convention. Lors de la première conférence (COP1) à Berlin en 1995, les parties ont adopté le « mandat de Berlin » exemptant les pays non-Annexe I d’assumer des obligations d’émissions contraignantes. A la COP2 à Genève en 1996, les négociateurs américains ont accepté d’assumer « des objectifs [d’émissions] à moyen terme contraignants » avec les autres parties de l’Annexe I. Les sénateurs américains ont considéré que les accords négociés à Berlin et à Genève sortaient nettement du cadre de la CCNUCC qu’ils avaient ratifiée en 1992. En 1997, ils ont unanimement approuvé la résolution Byrd-Hagel4 pour limiter les engagements susceptibles d’être pris à l’avenir par les négociateurs américains sans accord préalable du Sénat. 4 e Résolution Byrd-Hagel, S.RES 98, 105 Congrès américain. 9
Etude Climat N° 15 – Du changement dans l’air : les bases du futur marché américain du carbone Cette résolution affirmait que « les objectifs contraignants de limitation des émissions et les échéanciers pour les Parties de l’Annexe I » ainsi que l’exemption accordée aux pays en développement étaient « incompatibles avec la nécessité d’une action internationale sur le changement climatique et […] inadaptés sur le plan environnemental. » Par ailleurs, le Sénat affirmait qu’il ne ratifierait pas un accord (1) comportant des engagements d’émissions pour les pays industrialisés sans dispositions semblables pour les pays en développement ou (2) entraînant un grave préjudice pour l’économie américaine. La résolution du Sénat, votée cinq mois seulement avant la conférence de Kyoto, a fortement pesé sur la position des négociateurs américains à Kyoto. Leurs tentatives d’introduire dans les discussions des engagements pour les pays en développement n’ont pas été couronnées de succès. Le protocole de Kyoto a comporté des objectifs d’émissions contraignants pour les pays industrialisés, sans engagements quantitatifs pour les pays en développement. Le président Clinton décida de ne pas soumettre le traité au Sénat pour ratification, dans la mesure où il savait qu’il serait rejeté. En 2001, le président George W. Bush affirma qu’il ne demanderait pas la ratification du protocole de Kyoto au Sénat et qu’il ne mettrait pas en œuvre les objectifs de Kyoto au cours de son mandat. La même année, il annonça son propre plan relatif au changement climatique, un programme volontaire basé sur des « objectifs d’intensité » en GES et sur le développement technologique, plutôt que sur des limites contraignantes d’émissions de GES. Le plan Bush cherche à réduire de 18 % entre 2002 et 2012 l’intensité5 en GES de l’économie américaine par des engagements volontaires du secteur industriel. Comme le montre la Figure 10, cet objectif est moins ambitieux que la tendance d’amélioration de l’efficacité observée aux Etats-Unis entre 1990 et 2005, de l’ordre de 22 %. Figure 10 – Émissions de CO2 pour 1 000 dollars de Produit intérieur brut (année 2000) Émissions par « objectif d’intensité » (Président Bush) contre scénario « business-as-usual » 0,22 MtCO2 pour 1000$ dollars US (année 2000) 0,20 0,18 Plan Bush: 18% de réduction de l'intensité 0,16 carbone entre 2002-2012 0,14 Scénario au fil de l'eau : 22% de réduction de l'intensité carbone entre 2002-2012 0,12 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 Intensité carbone observée Intensité carbone ciblée par le plan Bush US trend 1990-2005 Tendance 1990-2005 Source : US Department of Energy, Energy Information Administration. Toutefois, une bonne part de l’amélioration de l'intensité en gaz à effet de serre observée aux Etats-Unis ces 15 dernières années ont résulté d'initiatives lancées par des organismes fédéraux. Par exemple, le programme d’étiquetage Energy STAR, un partenariat volontaire lancé en 1992 entre fabricants, Agence américaine pour la protection de l’environnement (US Environmental Protection Agency - EPA) et Département américain de l'Energie, a abouti à des améliorations de l'efficacité évitant 37 Mt d’émissions de GES en 2006. Le projet de lutte contre les émissions de méthane du Département américain de l'Agriculture a contribué à réduire de 11 % par rapport à 1990 ces émissions en 2005, malgré une croissance du PIB de 55 %. En outre, l'EPA travaille avec l'industrie pour réduire les émissions des gaz à fort pouvoir de réchauffement global (gaz perfluorés, hydrofluorocarbonés et hexafluorure de soufre). Ce partenariat volontaire a contribué à réduire les émissions de ces gaz sous leurs niveaux de 1990. 5 L’intensité en GES est le rapport des émissions de GES divisées par la production de richesses (PIB). 10
Etude Climat N° 15 – Du changement dans l’air : les bases du futur marché américain du carbone III. LA MOBILISATION DES ACTEURS PRIVES À l’heure où les Etats-Unis n’ont pas encore adopté une politique fédérale contraignante pour les émissions de gaz à effet de serre, plusieurs acteurs privés se préparent à une limitation future des émissions. Un certain nombre d’initiatives privées visant à poser les bases des marchés américains de GES ont été lancées ces dernières années. Le Chicago Climate Exchange (CCX) et le Climate Registry sont des initiatives volontaires d’entreprises américaines en l’absence d’une politique fédérale contraignante. Le Climate Action Partnership américain (US CAP) est une initiative lancée par les entreprises et les ONG environnementales en faveur de la mise en œuvre d’une limitation fédérale contraignante des émissions de GES aux États-Unis. A. Le Chicago Climate Exchange crée un marché carbone basé sur le volontariat Le Chicago Climate Exchange (CCX) a instauré en 2003 le premier marché d’échanges de permis d’émissions américain basé sur le volontariat. Il a été établi comme un « programme pilote » permettant aux émetteurs américains de se familiariser avec l’échange de quotas de GES avant la mise en place d’une politique fédérale de limitation des émissions. Les membres du CCX prennent des engagements volontaires de réduction d’émissions et paient une cotisation qui leur permet d’avoir accès à la plate- forme d’échange du CCX. Ils acceptent de plafonner leurs émissions en deux temps : en Phase I (2003- 2006), la réduction de leurs émissions devait être d’au moins 1 % par an et atteindre une réduction totale de 4 % en dessous des niveaux de référence en 2006. La Phase II (2007-2010) oblige les émetteurs à réduire d’ici à 2010 leurs émissions de 6 % par rapport aux niveaux de référence.6 Pour atteindre leurs objectifs, les membres du CCX peuvent échanger leurs quotas d’émissions entre eux. Ils peuvent également acheter des crédits compensatoires générés par certains projets qualifiés : réduction de méthane d’origine agricole, minière ou de décharge, gestion du carbone des sols agricoles ou des prairies, foresterie, énergies renouvelables et élimination des substances destructrices de l’ozone. En Phase I, la majorité des membres du CCX ont dépassé leurs objectifs de réduction des émissions. Les émissions du groupe ont baissé de 9 % en 2003, 12,1 % en 2004, 9,7 % en 2005 et 5,9 % en 2006 pour atteindre une réduction totale des émissions de 128 Mt de CO2e. En 2007, 23 Mt de CO2e ont été échangées sur la plate-forme du CCX. À l’heure actuelle, ce système d’échange compte plus de 400 membres avec un niveau de référence global en matière d’émissions égal à 365 Mt de CO2e, soit environ 5 % des émissions américaines. Néanmoins le CCX sera probablement préempté lorsqu’un système fédéral d’échanges de quotas sera mis en place. En outre, difficile de savoir combien de projets de compensation autorisés par le CCX respecteront les futures normes fédérales. B. Le Climate Registry consigne les données d’émissions à l’échelon national Le Climate Registry (TCR) a été lancé en mars 2007 afin de standardiser la méthodologie de mesure et de vérification des émissions de GES. Il a été créé sur le constat d’un certain nombre de registres de CO2 créés au niveau des Etats et des régions, notamment le California Climate Action Registry, qu’ils pouvaient utiliser leurs ressources et leurs connaissances de manière plus efficace en mettant en place un seul et unique registre standard pour l’ensemble des 50 Etats américains. L’objectif du TCR est d’harmoniser le reporting et de former une banque de données fiables sur les émissions de GES susceptible d’être utilisée pour de futurs programmes de réduction des GES. Il s’appuie sur l’outil baptisé « Emissions Tracking System » actuellement utilisé par l’Agence de protection de l’environnement américaine (Environmental Protection Agency - EPA) pour consigner les émissions de SO2, de NOx et de 7 CO2 produites par le secteur des services aux collectivités. 6 Le niveau de référence de la Phase I du CCX est la moyenne des émissions annuelles de 1998 à 2001. Le niveau de référence de la Phase II est la moyenne des émissions annuelles de 1998 à 2001 ou les émissions de la seule année 2000. 7 Comme l’exige la loi Fiscal Year 2008 Consolidated Appropriations Act qui sera votée en décembre 2008, l’EPA devra consolider un programme de reporting obligatoire d’ici juin 2009 compatible avec le Climate Registry. 11
Etude Climat N° 15 – Du changement dans l’air : les bases du futur marché américain du carbone L’adhésion au TCR s’effectue sur la base du volontariat. Les inscrits s’engagent à calculer leurs émissions selon un Protocole de Reporting Général standardisé, outil basé principalement sur les normes internationalement reconnues développées par le World Resources Institute et le World Business Council for Sustainable Development. De surcroît, les membres inscrits au TCR doivent faire vérifier leurs émissions par des organismes indépendants pour garantir leur exactitude et rendre compte de leurs émissions au registre via le Climate Registry Information System (CRIS) accessible au public sur Internet. Au 12 septembre 2008, 277 rapporteurs dans 41 Etats des Etats-Unis, 12 provinces et territoires canadiens et 6 États du Mexique participent au TCR. Le conseil d’administration du TCR se compose de représentants des pouvoirs publics de chaque Etat et de membres provinciaux. Le financement du TCR est assuré par les cotisations des membres rapporteurs ainsi que par des subventions des pouvoirs publics et des fondations caritatives. C. United States Climate Action Partnership : l’appel à une contrainte obligatoire sur les GES En janvier 2007, l’United States Climate Action Partnership (USCAP) a été la première coalition de grandes entreprises américaines et d’ONG à demander la mise en œuvre de contraintes fédérales sur les émissions de GES. Ce groupe comprend 32 membres8, dont des entreprises de premier plan comme Shell, Chrysler et General Electric ainsi que des ONG environnementales telles que Pew Center on Global Climate Change, l’Environmental Defense Fund et le National Ressource Defense Council. Il fait pression sur le Congrès pour mettre en place un système de permis d’émissions de GES intégré et contraignant dont l’objectif serait de réduire les émissions de 60 à 80 % à l’horizon 2050 par rapport aux niveaux de 2007. La position de l’USCAP indique que les entreprises américaines et les ONG anticipent les contrôles de GES dans un proche avenir et qu’elles souhaitent faire partie intégrante du dialogue politique à l’heure où le Congrès élaborera une politique contraignante en matière de gaz à effet de serre. IV. MUNICIPALITES, ETATS ET REGIONS FIXENT LEURS PROPRES OBJECTIFS EN MATIERE D’EMISSIONS Outre ces initiatives volontaires, plusieurs municipalités et États américains mettent actuellement en œuvre des politiques destinées à réduire les émissions de gaz à effet de serre sur leurs territoires. Ces politiques ont des ambitions sensiblement différentes, certaines ne proposant que des objectifs généraux sans mesures détaillées sur les moyens d’y parvenir ; mais les initiatives les plus novatrices d’Etats ou de villes ont pour objectif de modifier au plan régional l’utilisation de l’énergie, les réseaux de transport et la gestion des infrastructures. Certains Etats ont même transcrit dans la loi leurs objectifs de réduction des émissions en chargeant des agences d’Etat d’élaborer des plans de réduction d’émissions dans toute une série de secteurs économiques. A. Les municipalités relèvent l’engagement Kyoto et lancent des initiatives climatiques locales Le 16 février 2005, jour de l’entrée en vigueur du Protocole de Kyoto pour les 141 nations signataires, le maire de Seattle (État du Washington), Greg Nickels, a lancé l’Accord des Maires américains pour la protection du climat (US Mayors’ Climate Protection Agreement). Cette initiative a pour but d’inciter au minimum 141 municipalités américaines à adopter l’objectif Kyoto des Etats-Unis, une réduction de 7 % des émissions de GES sur la période 2008-2012 par rapport à 1990. Au 1er octobre 2008, les maires de 884 villes de 50 Etats, représentant plus de 25 % de la population des Etats-Unis, ont signé cet accord. Outre la volonté d’atteindre les objectifs de réduction des GES, les maires adhérents s’engagent également à faire pression sur l’exécutif de leur Etat et sur le gouvernement fédéral pour voter des lois rendant obligatoires la réduction des gaz à effet de serre. 8 Au 24 septembre 2008. 12
Etude Climat N° 15 – Du changement dans l’air : les bases du futur marché américain du carbone Il apparaît que peu de signataires de l’Accord atteindront l’objectif de Kyoto en 2012. Toutefois, cette démarche a incité plusieurs municipalités à lancer des politiques de réduction des émissions de GES. Ces initiatives concernent l’amélioration des performances énergétiques des bâtiments et des flottes de transports municipaux, le développement des réseaux de transport en commun et des énergies renouvelables, de nouvelles normes d’efficacité pour les bâtiments commerciaux et résidentiels, des incitations fiscales aux réductions d’émissions supplémentaires ainsi que la mise en place de plans de développement urbain favorisant la marche plutôt que l’utilisation de véhicules. Aux côtés des municipalités les plus innovantes comme Seattle (Washington) et Portland (Oregon), la municipalité d’Austin (Texas) est un exemple de ville américaine ayant lancé un programme complet destiné à réduire les émissions de gaz à effet de serre à l’échelon local. Le plan de protection du climat d’Austin (Austin Climate Protection Plan) a été lancé en février 2007 avec pour objectif la suppression des émissions de dioxyde de carbone pour la plupart des activités municipales à l’horizon 2020. Ce plan en 5 volets vise (1) à approvisionner l’ensemble des installations municipales avec de l’énergie 100 % renouvelable et de rendre la flotte de transport municipale neutre en carbone d’ici à 2020 ; (2) de réduire sa consommation énergétique de 700 MWh grâce à des mesures d’économie et d’amélioration de la performance énergétique et de couvrir 30 % de l’ensemble des besoins énergétiques d’Austin à partir d’énergies renouvelables en 2020 ; (3) d’améliorer la performance énergétique de toutes les nouvelles maisons individuelles de 60 % et d’accroître l’efficacité énergétique de tous les bâtiments commerciaux neufs de 75 % d’ici à 2015 ; (4) de créer une équipe municipale d’action climatique afin de dresser l’inventaire des émissions de GES à l’échelle de la municipalité et de recommander des mesures de réduction des émissions dues à certaines activités, notamment au transport, à l’occupation des sols et à la gestion des déchets ; et (5) d’aider les personnes et les entreprises à devenir « neutres en carbone » en leur informant des moyens de suivi et de compensation de leurs émissions. Austin travaille actuellement à l’inventaire de ses émissions pour fixer des objectifs concrets de réduction. La municipalité collabore également avec d’autres villes et avec le Climate Registry pour normaliser la méthodologie de contrôle et de reporting des émissions. Les informations relatives à l’empreinte actuelle des émissions d’Austin ne sont pas encore disponibles. Toutefois, la municipalité transmet les émissions annuelles de ses centrales thermiques au California Climate Action Registry. Ces émissions, de 5,5 Mt en 9 2006 , représentent environ 80 % des émissions municipales, que l’on estime à quelques 7 Mt par an. Les changements apportés par l’Austin Climate Action Plan joueront peut-être un rôle important dans la réduction de l’intensité des gaz à effet de serre de l’économie de la ville. Cela étant, la capacité de la ville – et de ses homologues dans l’ensemble du pays – à réduire ses émissions en valeur absolue reste incertaine. Avec la poursuite de l’expansion des villes américaines, dont Austin, la demande en énergie devrait encore augmenter et avec elle les émissions de CO2. B. La réponse des Etats par des lois de réduction des GES Outre les initiatives proprement municipales, plusieurs Etats américains mettent en œuvre sur leur territoire des politiques de réduction des émissions de GES et se préparent aux conséquences prévues du changement climatique. 39 Etats ont publié ou sont en train de préparer des « plans d’action climat » pour réduire leur contribution au changement climatique. 20 États ont annoncé des objectifs de réduction des GES, 42 ont réalisé l’inventaire de leurs émissions de GES et 41 ont créé ou sont affiliés à des registres d’émissions10. La Californie (voir plus bas) élabore actuellement un système d’échanges de permis de GES couvrant l’ensemble de son économie et la Floride vient d’annoncer qu’elle allait développer un programme comparable pour la production d’électricité. D’autres Etats lancent des programmes de réduction de leurs émissions de GES. Ces plans intègrent des mesures d’amélioration des performances énergétiques, d’économies d’énergie, de promotion des énergies renouvelables, d’amélioration des transports, d’optimisation de l’occupation des sols et des plans de gestion des déchets ainsi que des forêts et des terres agricoles. 9 Source : reporté par Austin Energy dans le California Climate Registry. 10 Cf. Annexe 3 : carte indiquant les Etats dans lesquels des initiatives climatiques ont été mises en œuvre. 13
Etude Climat N° 15 – Du changement dans l’air : les bases du futur marché américain du carbone L’Etat de Californie élabore actuellement l’un des plans d’adaptation et d’atténuation au changement climatique les plus sophistiqués des Etats-Unis. Cet Etat constitue la huitième économie mondiale et le 15e plus gros émetteur de GES, avec un volume d’émissions annuel de 469 millions de Mt de CO2e en moyenne entre 2002 et 200411. En septembre 2006, la Californie a promulgué la première loi aux Etats- Unis destinée à contraindre à des réductions de GES. Le California Assembly Bill 32 (AB 32) exige de l’Etat une réduction d’ici à 2020 de ses émissions de GES à leurs niveaux de 1990 ; il charge l’agence California Air Resources Board (CARB) du développement du cadre réglementaire nécessaire. L’AB 32 charge l’Etat d’adopter d’ici au 1er janvier 2009 un plan complet permettant d’atteindre le niveau de réduction des émissions requis. En juin 2008, le CARB a publié un « Draft Scoping Plan » proposant des mesures applicables aux principaux secteurs de l’économie californienne qui permettra à l’État d’atteindre son objectif de réduction d’émissions. Les mesures réglementaires pour réduire d’ici à 2020 les émissions pour les porter aux niveaux de 1990 sont les suivantes : (1) étendre et renforcer les programmes existants de performance énergétique ainsi que les normes applicables aux bâtiments et aux appareils électriques ; (2) élever la part des énergies renouvelables dans le bouquet énergétique à 33 % ; (3) mettre en place des normes pour des voitures propres et un carburant à faible teneur en carbone et (4) lancer un système de permis de GES couvrant des sources importantes d’émissions. La Californie envisage de mettre en œuvre l’ensemble de ces mesures au plus tard en 2012. La structure du marché d’échanges doit être validée par le CARB au 1er janvier 2011. Le programme le plus vaste actuellement envisagé plafonnerait 85 % des émissions totales de GES produites en Californie à 365 Mt de CO2e en 2020, soit 147 Mt (29 %) en dessous des projections « au fil de l’eau » des émissions pour cette même année. L’Etat élaborera la structure du marché d’échange de permis en coopération avec les autres Etats membres de la Western Climate Initiative (WCI), programme régional d’échange de carbone (voir plus bas). La Californie soutient les recommandations finales de la WCI, qui établiraient un programme couvrant le secteur de l’électricité, les grandes sources fixes de combustion, la production et la transformation des combustibles fossiles ainsi que les émissions provenant des processus industriels et de la gestion des déchets (les émissions du secteur des transports devraient être ajoutées ultérieurement). Les discussions se poursuivront en 2009 et 2010 et incluront des débats publics en particulier sur la mise aux enchères, la compensation, et l’allocation des revenus générés par le programme. L’importance du programme d’échange californien pour le marché international du carbone dépendra des conditions d’échange et de compensation qui seront déterminées dans les deux prochaines années. Comme l'exigent les règles de la Western Climate Initiative, la Californie devra mettre aux enchères au moins 10 % des allocations en 2012 et 25 % en 2020 ; l’utilisation de crédits compensatoires ne pourra pas représenter plus de 49 % des réductions d’émissions. Les législateurs californiens, avec leurs homologues d'autres juridictions, soutiennent le passage à 100 % d’enchères dès que possible ; et ils souhaitent commencer le marché d’échanges en mettant aux enchères bien plus que 10 % des quotas. C. Les partenariats régionaux lanceront les premiers marchés américains obligatoires du carbone Plusieurs Etats ont signé des accords régionaux dans lesquels ils acceptent d’être partenaires d’autres Etats – tant au sein des Etats-Unis qu’au Canada et au Mexique – pour atteindre des objectifs communs de réduction des GES. 23 Etats sont des participants à part entière et 9 autres Etats (plus le district de Columbia) sont placés au rang d’observateurs de trois programmes : la Regional Greenhouse Gas Initiative (RGGI) pour les Etats du Nord-est, la Western Climate Initiative (WCI) et le Midwest Regional Greenhouse Gas Reduction Accord12. Bien que ces accords divergent de par leurs objectifs et leur champ d’application, ils cherchent tous à réduire des émissions dans le cadre d’un système d’échanges de permis. 11 California Air Resources Board, Draft AB 32 Scoping Plan Document, juin 2008, p. 6. 12 Cf. Annexe 5 pour une liste complète des membres participant à la RGGI, à la WCI et à l’Accord du Midwest. 14
Vous pouvez aussi lire