FACULTE DE MEDECINE ET DE PHARMACIE DEPARTEMENT DE MEDECINE GENERALE RECOMMANDATIONS POUR LA THESE D'EXERCICE - Année 2013 2014

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FACULTE DE MEDECINE ET DE PHARMACIE DEPARTEMENT DE MEDECINE GENERALE RECOMMANDATIONS POUR LA THESE D'EXERCICE - Année 2013 2014
FACULTE DE MEDECINE ET DE PHARMACIE
         _________________

DEPARTEMENT DE MEDECINE GENERALE
        _________________

  RECOMMANDATIONS POUR LA THESE
           D'EXERCICE

          Année 2013 - 2014
FACULTE DE MEDECINE ET DE PHARMACIE DEPARTEMENT DE MEDECINE GENERALE RECOMMANDATIONS POUR LA THESE D'EXERCICE - Année 2013 2014
PREAMBULE

Les thésards sont instamment priés de respecter les règles de fond et de forme
indiquées dans ces recommandations.
Ils doivent adresser leur fiche de projet de thèse (FPT), disponible sur Med@tice,
directement par courriel sous format Word à l’adresse suivante : jp.jacquet@ujf-
grenoble.fr. Ils recevront une réponse du conseil scientifique du département de
médecine générale par courriel sous quinzaine. Il est conseillé de demander un
accusé de réception au courriel.

Toute fiche ne correspondant pas au format demandé (compatibilité Word 97®) sera
retournée aux auteurs avant évaluation par le conseil scientifique.

En cas de non respect de ces recommandations, il est nécessaire de le justifier dans
un argumentaire joint à la fiche de projet de thèse.

FORMALITES LEGALES

Les travaux de recherche doivent être conformes aux recommandations éthiques de
la déclaration d’Helsinki et, s’ils le requièrent, doivent avoir été soumis à un comité
de protection des personnes (CPP) ou un comité consultatif d’éthique médicale
(CCEM) et à la CNIL1 (procédure simplifiée en passant par le correspondant
Informatique et Liberté de l’université).

Quand un travail de recherche a été soumis à l’une de ces institutions, il doit en être
fait mention dans la fiche de projet de thèse, une copie de l'avis doit être jointe à la
fiche.

Si l’avis n’est pas rendu, une preuve de la demande, ou selon l’état d’avancement du
travail quel CPP ou CCEM sera sollicité (pour information, adresse du CPP de
Grenoble : cppsudest5@chu-grenoble.fr ; adresse du CCEM du CHU de Grenoble :
PBaro@chu-grenoble.fr).

BIBLIOGRAPHIE

La bibliographie doit être rédigée selon les recommandations internationales de
Vancouver2 mises à jour en octobre 2007 par l’International committee of medical
journal editors : www.icmje.org. Destinées aux auteurs et rédacteurs, elles proposent
des normes de présentation des manuscrits, des règles de responsabilité à
respecter, et édictent les bonnes pratiques en matière de conflits d’intérêt et de
double publication. Les auteurs sont fortement encouragés à les consulter pour
davantage d’information.
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TRAVAUX UTILISANT DES METHODES QUALITATIVES

Il est nécessaire pour ces travaux qu'une triangulation soit réalisée :
        - soit par un co thésard dans le même travail,
        - soit par le co thésard d'un travail connexe, à condition que le thésard fasse
lui aussi la triangulation du travail connexe et que la soutenance de thèse aie lieu en
même temps et avec le même jury,
        - soit par un directeur de thèse expert dans le domaine, préalablement agréé
par le conseil scientifique du DMG.

La notion de saturation doit être justifiée et non seulement affirmée.

Le guide d'entretien doit être joint à la fiche de projet de thèse avant validation de
celle-ci.

PRESENTATION

La thèse doit être présentée sous forme d'article selon les normes ci-dessus. Pour
une présentation différente, imposée par le type ou le thème du travail, un accord
préalable du secteur recherche est nécessaire.

Ces recommandations sont celles de la revue exercer, revue de la médecine
générale (www.exercer.fr). Il est possible d'utiliser un autre format d'article suivant
d'autres recommandations à condition de le justifier.

Deux articles, l'un utilisant des méthodes quantitatives, l'autre des méthodes
qualitatives sont proposés à titre d'exemple à la fin de ce document.

Article de recherche original

C’est la présentation d’un travail scientifique original (qualitatif, quantitatif ou
interventionnel). Il doit avoir moins de 30 000 signes, résumés, tableaux et
références compris, et moins de 20 références bibliographiques. Le plan de l’article
est obligatoirement de type IMRAD (Introduction, Méthode, Résultats And
Discussion). L’article doit être accompagné de 2 résumés structurés en 5
paragraphes (contexte, objectif(s), méthode, résultats, conclusion), le premier en
français (maximum 300 mots), et le second en anglais (maximum 250 mots).
La fin de l’introduction doit préciser la ou les question(s) de recherche ou les objectifs
principaux et secondaires du travail de recherche.
Le style doit être simple et précis. « Le meilleur style de rédaction scientifique est
l’absence de style ». Les phrases doivent être courtes (maximum 35 mots). Dans les
chapitres introduction, méthode et résultats, un travail de recherche se rédige
généralement au passé composé, parfois à l’imparfait, jamais au présent de
l’indicatif, au futur ou au conditionnel. Dans le chapitre « discussion », le temps des
verbes est laissé au libre choix de l’auteur. Il oscille généralement entre le présent et
le passé composé quand le texte se réfère aux résultats du présent travail ou aux
références citées.
Un article de recherche se rédige à la voix passive : jamais de « je », de « nous » ou
de « on ». Les données chiffrées présentées à la fois dans les tableaux et dans le
texte doivent être cohérentes. Il est inutile (car répétitif) de présenter la totalité des
données chiffrées dans le texte du chapitre résultats ET dans les tableaux. Les mots
en latin, en anglais et le petit p, sont toujours en italiques.

Référencement

Les références bibliographiques doivent répondre au standard Vancouver, et doivent
être numérotées en exposant par ordre d’apparition dans le texte2. Une même
référence utilisée plusieurs fois garde le même numéro.
Si la référence provient d’un périodique, citer les six premiers auteurs avec l’(es)
initiale(s) du prénom suivie d’une virgule et le dernier auteur suivi d’un point. Au delà
de 6 auteurs, citer les trois premiers suivis de « et al ». Indiquer ensuite le titre
complet de l’article dans sa langue originale suivi d’un point, puis le nom de la revue
selon l’abréviation de l’index Medicus, non suivi d’un point (si le périodique n’est pas
référencé à l’index Medicus, écrire son titre en entier). Préciser ensuite l’année de
publication suivie d’un point virgule sans espace, puis le numéro du fascicule dans le
volume suivi de 2 points, sans espace, puis la première page avec son nombre entier
et la dernière page abrégée du texte, séparées par un tiret. Une référence se termine
toujours par un point.

Voir les exemples ci-dessous pour les références de revues :

   1. Fleming MF, Barry KL, Manwell LB et al. Brief physician advice for problem
      alcohol drinkers. A randomized controlled trial in community-based primary
      care practices. JAMA 1997;277:1031-7.
   2. Carnelle B, Le Mauff P. Les médecins généralistes connaissent-ils la notion de
      risque cardiovasculaire absolu ? exercer 2006;78:99-102.
   3. Gaede P, Lund-Andersen H, Parving HH, Pedersen O. Effect of a
      multifactorial intervention on mortality in type 2 diabetes. N Engl J Med
      2008;358:581-91.

Les citations de livre ou de chapitre de livre doivent comporter le nom des auteurs, le
titre du livre, le numéro de l’édition, la ville et le nom de la maison d’édition et l’année
de publication selon les deux modèle ci-dessous :

   1. Danowski RG, Chanussot JC. Traumatologie du sport. 7 ed. Paris : Masson,
      2005.
   2. Meltzer PS, Kallioniemi A, Trend JM et al. Chromosome alterations in human
      solid tumors. In: Vogelstein B, Kinzler KW editors. The genetic basis of human
      cancer. New-York: McGraw-Hill, 2002:93-113.
COMMENT PRESENTER SA THESE POUR FAVORISER SA LISIBILITE

Les recommandations qui suivent ont pour but de standardiser la présentation des
thèses en vue de faciliter leur lisibilité, leur identification, leur diffusion et leur
conservation.

Règles de présentation générale

Afin d’assurer une bonne impression de la thèse, il est recommandé de :

   -   Justifier le texte,

   -   Choisir une police classique, sans fantaisie (les polices Arial et Times new
       roman sont les plus courantes) d’une taille suffisante : 12 points en moyenne,

   -   Taper le texte avec un interligne double pour faciliter la lecture,

   -   Ne pas utiliser les polices en gras ou en souligné dans le texte, sauf pour les
       têtes de chapitre et de sous chapitre. Les italiques sont utilisés pour les mots
       latins, anglais, le petit p s’il y en a et les citations des verbatims,

   -   Paginer dès la page de garde et non au début du texte,

   -   Imprimer uniquement en recto,

   -   Laisser une marge de 2,5 cm à gauche et à droite, 1,5 minimum en haut, 2 cm
       minimum en bas ; ne pas utiliser de reliure type spirale.

Page de garde

Elle doit comporter :
    - Le nom de l’établissement
    - Le type de doctorat
    - Le champ disciplinaire dans lequel est soutenue la thèse
    - Le nom et prénom de l’auteur
    - Le titre de la thèse
    - Le nom et prénom du directeur de thèse
    - La date de soutenance
    - Les noms et prénoms des membres du jury

Pages liminaires

   -   Le résumé en français. Il doit être précis et permettre de comprendre le sujet
       abordé (Il est distinct du résumé substantiel en français qui est nécessaire
       dans le cas d’une thèse en cotutelle internationale, si la langue de la thèse
       n’est pas le français.)
       En plus du résumé figurant dans votre thèse, vous devez faire un résumé qui
       apparaitra dans le catalogue su-doc de la bibliothèque universitaire. Ce
résumé doit comporter au maximum 1700 caractères, espaces compris. (Il
       peut être identique à celui inséré dans votre thèse.)

   -   Le titre en anglais

       Le résumé en anglais pour le signalement de la thèse dans des bases de
       données internationales. En plus du résumé figurant dans votre thèse, vous
       devez faire un résumé qui apparaitra dans le catalogue su-doc de la
       bibliothèque universitaire. Ce résumé doit comporter au maximum 1700
       caractères, espaces compris. (il peut être identique à celui inséré dans votre
       thèse)

   -   L’intitulé et l’adresse de l’unité ou du laboratoire de rattachement où la thèse a
       été préparée, s'il y a lieu, s’ils ne figurent pas en page de titre, selon les
       formes prescrites par l’établissement de soutenance.

Sur la première page :

   •   titre, éventuellement sous titre, sans abréviation ni acronyme,
   •   nom et prénom(s) (si composés) en entier des auteurs dans l’ordre de
       publication souhaité avec structure(s) de rattachement numérotées,
   •   indication des éventuels conflits d’intérêt liés au contenu de l’article pour
       chaque auteur,
   •   3 à 4 mots clés.

Sur la seconde page :

   •   résumé structuré en français (300 mots),
   •   abstract structuré en anglais (250 mots).

Sur les pages suivantes :

Les tableaux doivent être présentés à raison d’un par page, après la page des
références bibliographiques, numérotés en chiffres arabes par ordre d’apparition et
légendés.
Les graphiques, schémas, figures, dessins, photos peuvent être présents à raison
d’un par page dans le corps de texte avec légende numérotée en chiffres arabes
dans l’ordre d’apparition.
Afin de respecter le format et de ne pas alourdir l’article, des annexes peuvent être
insérées à la suite des tableaux, numérotées en lettres majuscules par ordre d’appel
dans le texte.
Unités de mesure

   •   Unités de mesure : données cliniques et biologiques en unités métriques (cm,
       g/L, mmHg, mg, kg, kg/m2).
   •   Pour les abréviations et acronymes, en formuler l’intitulé in extenso lors de sa
       première apparition dans le texte avec l’abréviation ou l’acronyme entre
       parenthèses. Par exemple : odds-ratio (OR), risque absolu (RA), Haute
       autorité en santé (HAS), Société française de médecine générale (SFMG).
       Lorsque les acronyme sont écrits au long seule la première lettre du premier
       mot est une majuscule, par exemple : Collège national des généralistes
       enseignants.
   •   Médicaments : utiliser systématiquement la DCI.

Références :

       1.     http://www.ethique.inserm.fr/inserm/ethique.nsf/0f4d0071608efcebc125
       709d00532b6f/581a33c06c1a8563c12576580043abcd/$FILE/Diaporama.pdf
       (consulté le 30 novembre 2012)
       2.     International committee of medical journal editors. Uniform
       requirements for manuscripts submitted to biomedical journals: writing and
       editing for biomedical publication. Version mise à jour en octobre 2007.
       www.icmje.org
Recherche                                                                                               Précarité

1. Interne en
médecine
générale
                   Mesurer les gradients sociaux dans l’accès
2. Département
de médecine
                   aux soins de prévention
générale –
Grenoble           Audit clinique auprès de 671 patients
3. Programme
Précarité-         Measuring the impact of social gradients on the access
Inégalités de
santé              to prevention care. A clinical audit with 671 patients
                                     Chloé Pilod1,2, Dominique Lagabrielle2, Catherine Sass3, Alain El Sawy2,
                                              Guillaume Royer de Véricourt2, Jean-Jacques Moulin3

                   exercer 2011;96:40-6.                                                                             chloe.pilod@yahoo.fr

                   Background. Social inequalities in health can be defined as the gradient in morbidity and mortality
                   related to socio-professional categories. These inequalities remain a major concern in France. Reducing
                   them is mainly a matter of public policy based on social determinants, but primary care practitioners are
                   also involved. However, a preventive approach may be more effective than a curative one to reduce these
                   inequalities. To characterize the population in this field, a subjective approach of social vulnerability
                   appears to be more accurate than the usual socio-professional classification.
                   Objective. To compare the relevance of socio-professional categories to that of social vulnerability as
                   measured by the EPICES score in order to assess social gradients in the access to prevention care.
                   Method. Access to prevention care was measured by a combined tool including antitetanic vaccination
                   and cancer screening (colorectal, breast, cervix). Social characteristics were studied through the EPICES
                   score and usual social data.
                   Results. In spite of unfavourable social characteristics (38 % of the population were socially vulnerable
                   according to EPICES), the rate of the population having performed antitetanic vaccination and cancer
                   screening was high, 84.9 %, 83.7 %, 90.7 % and 91.8 % respectively. In these conditions, one rather low
                   social gradient was measurable, (antitetanic vaccination) and only with the EPICES score.
                   Conclusion. This local study highlights a better access to prevention care than in the overall population
                   and the absence of a social gradient in the distribution of the three cancers’ screening. Conducting this
                   study on a larger scale might help to determine other prevailing factors and analyse the exact impact of
                   GPs’ commitment.

 Mots-clés         Introduction                                                 déterminants est la moins bonne aptitude des personnes
 Inégalités                                                                     de condition sociale modeste à recourir efficacement au
 sociales de       Les inégalités sociales de santé1 se définissent comme       système de soins. Même si la réduction de telles inéga-
 santé             l’ensemble des écarts de morbidité et de mortalité           lités dépend essentiellement des politiques menées par
 Accès aux Soins   entre groupes sociaux hiérarchisés dans l’échelle des        l’État, les professionnels de santé ont un rôle à jouer dans
 Prévention        professions, des revenus ou de l’accès au savoir. Malgré     les populations les plus concernées en leur facilitant
 Score EPICES      les importants progrès biomédicaux, les données épi-         l’accès aux soins, notamment en termes de prévention.
                   démiologiques convergent pour montrer que les per-
                                                                                Caractérisation de la position sociale
                   sonnes les plus vulnérables socialement sont celles qui
                   cumulent les plus grands risques d’altération de santé       Les déterminants classiques de la position sociale pour
                   au cours d’une existence statistiquement plus brève que      mesurer les inégalités de santé sont constitués des carac-
                   la moyenne. En France, l’espérance de vie d’un homme         téristiques socioéconomiques selon l’INSEE : la catégo-
                   à 35 ans est fortement liée à sa position sociale2. Entre    rie socioprofessionnelle (CSP), le niveau d’études et les
                   1982 et 1996, le nombre moyen d’années restant à             revenus sont des critères démographiques objectifs.
                   vivre à l’âge de 35 ans parmi les ouvriers masculins était   Cependant, à l’échelon de la personne, il est établi que
                   de 6,5 ans inférieur à celui des ingénieurs.                 la fragilité sociale, plus subjectivement évaluable, est for-
                   Les inégalités sociales de santé s’expliquent par plu-       tement corrélée à une perception négative de la santé,
                   sieurs facteurs plus ou moins indépendants3. Un des          indépendamment des variables socioéconomiques4,5.

40                 exer cer la r evue française de médecine générale                                                   Volume 22      N° 96
Précarité                                                                                              Recherche

C’est pour prendre en compte ce caractère multidimen-              le tétanos était de 70 % chez les femmes et 73 % chez
sionnel de la précarité qu’a été construit le score                les hommes, avec une tendance à diminuer avec l’âge
« EPICES » (Évaluation de la précarité et des inégali-             (60 % chez les plus de 65 ans). Cette enquête montrait
tés de santé dans les centres d’examens de santé).                 que la couverture vaccinale déclarée était plus impor-
Il comporte 11 questions binaires (tableau 1), permet-             tante chez les sujets ayant un niveau d’éducation élevé,
tant de positionner une personne sur un axe de pré-                les cadres et professions intermédiaires, et dans les
carité, dont l’échelle a été fixée de 0 (absence de pré-           ménages à revenus élevés.
carité) à 100 (précarité maximum).                                 Le dépistage du cancer colorectal repose sur le test
Cet indicateur individuel a été ensuite généralisé dans            Hemoccult® tous les 2 ans chez les sujets âgés de 50 à
le réseau des Centres d’examens de santé (CES) des                 74 ans. Initialement, le taux de participation moyen
Caisses primaires d’assurance maladie. Il permet de                s’élevait à 42 % en Isère avec un taux plus élevé chez
distinguer les personnes précaires des non précaires               les femmes que chez les hommes. Les hommes de
selon des seuils établis à partir des données des CES :            50-54 ans se faisaient moins dépister et les femmes de
암 30 pour les plus de 25 ans, et 37 pour les 16-25 ans6.           60-64 ans davantage12. Depuis 2004, la participation
Un lien statistiquement significatif score-dépendant a             est en progression constante13, avec des taux respec-
été mis en évidence entre les valeurs d’EPICES et cer-             tivement de 48 % chez les femmes et de 43 % chez
tains modes de vie, le niveau d’accès aux soins et l’état          les hommes en 2008.
de santé7. Une récente étude portant sur la souffrance             Le programme du dépistage organisé du cancer du
psychique et le risque suicidaire, dans un échantillon             sein offre un examen clinique des seins et une mam-
représentatif des Français majeurs, a permis de connaî-            mographie biennaux aux femmes âgées de 50 à 74 ans.
tre la distribution des valeurs d’EPICES pour la popu-             D’après l’Institut de veille sanitaire en 2008, près de
lation française8.                                                 2 285 000 femmes ont bénéficié de ce dépistage, soit
                                                                   52,5 % de la population cible. Il y a un nombre impor-
Soins de prévention : définition et gradients
                                                                   tant de mammographies faites en dehors du programme
sociaux
                                                                   organisé14 (au moins 10 % de la population cible). En
Parmi la grande diversité des soins de prévention, la vac-         Isère, le taux de participation pour 2008 était de 47 %
cination antitétanique se caractérise par sa pertinence            par rapport à la population INSEE13.
pour évaluer la qualité de la tenue du dossier médical9.           Le dépistage du cancer du col de l’utérus repose sur
Les dépistages des cancers du col utérin, du sein et du            le frottis cervicovaginal triennal, recommandé aux
côlon ont un service médical rendu reconnu pour réduire            femmes de 25 à 65 ans. Le baromètre cancer 2005 de
la mortalité évitable10.                                           l’Institut national de promotion et d’éducation pour la
Lors d’une enquête11 en 2002, la proportion de sujets              santé (INPES) montrait que 81 % des femmes concer-
âgés de plus de 16 ans correctement vaccinés contre                nées déclaraient avoir fait un frottis au cours des

Questions                                                                                      Oui              Non
1. Rencontrez-vous parfois un travailleur social ?                                            10,06               0
2. Bénéficiez-vous d’une assurance maladie complémentaire ?                                   -11,83              0
3. Vivez-vous en couple ?                                                                      -8,28              0
4. Êtes-vous propriétaire de votre logement ?                                                  -8,28              0
5. Y a-t-il des périodes dans le mois où vous rencontrez de réelles difficultés financières
   à faire face à vos besoins (alimentation, loyer, EDF, etc.) ?                              14,80               0

6. Vous est-il arrivé de faire du sport au cours des 12 derniers mois ?                        -6,51              0
7. Êtes-vous allé au spectacle au cours des 12 derniers mois ?                                 -7,10              0
8. Êtes-vous parti en vacances au cours des 12 derniers mois ?                                 -7,10              0
9. Au cours des 6 derniers mois, avez-vous eu des contacts avec des membres
   de votre famille autres que vos parents ou enfants ?                                        -9,47              0

10. En cas de difficultés, y a-t-il dans votre entourage des personnes sur qui
    vous puissiez compter pour vous héberger quelques jours en cas de besoin ?                 -9,47              0

11. En cas de difficultés, y a-t-il dans votre entourage des personnes sur qui
    vous puissiez compter pour vous apporter une aide matérielle ?                             -7,10              0

Constante                                                                                     75,14
Tableau 1. Les 11 questions du score EPICES6
Calcul du score : chaque coefficient est ajouté à la constante si la réponse à la question est oui.

Volume 22      N° 96                                               exer cer la r evue française de médecine générale          41
Recherche                                                                                               Précarité

     3 dernières années et 5,8 % déclaraient ne jamais en          de la secrétaire d’accueil, vu en visite à domicile, vu par
     avoir eu. Les femmes avec couverture médicale com-            un remplaçant ou consultant à nouveau durant la
     plémentaire déclaraient effectuer plus souvent un frot-       période de l’étude.
     tis que les autres (OR = 2,5 ; p < 0,01). Il en était de      Le recueil de données a été réalisé à l’aide d’un auto-
     même pour les femmes vivant en couple (OR = 2,3 ;             questionnaire anonyme, remis par la secrétaire au
     p < 0,001), celles ayant un niveau baccalauréat (OR =         patient, rempli en salle d’attente (ou avec la secré-
     1,6 ; p < 0,01) ou supérieur, et enfin celles ayant une       taire en cas d’illettrisme), puis complété par le méde-
     activité professionnelle (OR = 1,5 ; p < 0,001)15.            cin lors de la consultation. Ce questionnaire compor-
     L’objectif principal de la présente étude était de connaî-    tait 3 volets. Le premier concernait la situation socio-
     tre la pertinence des différents outils de caractérisation    professionnelle : sexe, âge, nombre d’enfants à charge,
     sociale, pour mesurer les gradients sociaux dans la           CSP, situation par rapport à l’emploi, type d’emploi,
     distribution des soins de prévention. L’objectif secon-       prestations sociales telles que Couverture médicale
     daire était de caractériser cette distribution en pratique    universelle (CMU), Revenu minimum d’insertion (RMI),
     de médecine générale selon les données sociales des           Allocation parent isolé (API), Allocation adulte handi-
     patients.                                                     capé (AAH), et niveau d’études. Le second regroupait
                                                                   les 11 questions du score EPICES. Le troisième était l’ou-
     Méthode                                                       til composite pour l’accès aux soins de prévention.
                                                                   Les données ont été saisies dans Access® 2003.
     Cadre de l’étude                                              L’exploitation des données a été faite par le CETAF à
     L’étude s’est déroulée dans un cabinet de médecine            l’aide du logiciel SPSS version 15.0. Les caractéristiques
     générale en Isère, où travaillent 3 médecins généra-          de la population précaire selon EPICES ont été compa-
     listes à temps plein. Ce cabinet est implanté dans un         rées à celles de la population non précaire par des
     quartier défini comme périmètre d’action de niveau            tests de Chi-2 et de Pearson. Pour les soins « vaccina-
     prioritaire 1 pour le Contrat urbain de cohésion sociale      tion », le risque de ne pas être à jour a été comparé
     2007-2010. L’étude a été conduite en collaboration            en analyse multivariée par régression logistique avec
     avec le CETAF (Centre technique d’appui et de forma-          les variables niveau d’études, invalidité, CMU, nombres
     tion des centres d’examens de santé) qui vise à promou-       d’enfant, précarité selon EPICES. Pour l’Hemoccult®
     voir et coordonner les politiques et les pratiques de         l’analyse multivariée a été faite par régression logistique
     prévention en matière de santé publique dans les CES.         en intégrant les variables nombre d’enfants, précarité
                                                                   selon EPICES, âge, activité professionnelle, retraite ou
     Outils de mesure
                                                                   bénéfice de minima sociaux.
     L’outil de mesure composite comprenait la vaccina-
     tion antitétanique (documentée dans le dossier infor-         Résultats
     matique ou le carnet de vaccination), le dépistage
     du cancer colorectal, du sein et du col, et le score          Caractéristiques socioéconomiques
     EPICES. Pour chacun de ces actes, le motif de non-            et vulnérabilité sociale EPICES
     réalisation a été recherché par 5 propositions: « je ne
     savais pas qu’il fallait », « j’ai oublié », « j’ai peur de   La population étudiée comprenait 671 patients.
     la piqûre/du résultat », « ça n’a pas d’intérêt » ou          12 patients répondant aux critères d’inclusion ont
     « ça va me coûter trop cher » à l’aide d’un question-         refusé de participer.
     naire patient.                                                Les résultats ont porté sur 659 sujets dont 59,5 % de
     En cas de non-réalisation, le médecin indiquait si, dans      femmes. L’âge moyen de la population était de 48,4 ans.
     le dossier médical, il était noté que l’information sur       Le niveau d’études ne différait pas selon le genre. En
     la nécessité de cet acte avait été donnée au patient.         revanche, la CSP était différente avec une majorité
     L’absence de cette note dans le dossier valait comme          d’employés chez les femmes (48,5 % vs 26 % chez les
     « information de faire le soin » non donnée au patient.       hommes) et d’ouvriers chez les hommes (34,3 % vs
                                                                   7,2 % chez les femmes). Les retraités représentaient
     Protocole
                                                                   28,2 % de la population et les personnes en invalidité
     La participation à l’étude a été proposée à tous les          2,3 % avec une prédominance masculine (p = 0,016
     patients âgés de plus de 16 ans consultant au cabinet         et 0,04 respectivement). Les chercheurs d’emploi
     entre le 15 septembre et le 31 octobre 2008. Les critères     (5,2 % de la population) étaient plus fréquemment
     d’inclusion étaient : être né avant le 1er septembre 1992,    des femmes (p = 0,05), voire exclusivement pour les
     avoir déclaré un médecin traitant du cabinet avant le         personnes au foyer. Le taux de bénéficiaires de la CMU
     1er juillet 2008 et accepter de participer. Les critères de   était de 6,5 %, et 4,7 % de la population recevaient
     non-inclusion étaient : patient consultant en l’absence       au moins un minima social (RMI, AAH ou API).

42   exer cer la r evue française de médecine générale                                                   Volume 22     N° 96
Précarité                                                                                          Recherche

                                       Étude Suicide 20088                                      CES 2007
                                Saint-Martin      Rhône-          Population          Population            Rhône-
                                  d’Hères          Alpes            entière             entière              Alpes
                                n = 572 (%)     n = 149 (%)     n = 1 922 (%)      n = 503 008 (%)      n = 34 598 (%)
               1,0 (0-7,10)        15,5             16,1              14,2               18,1                 17,0
              2,0 (7,1-16,6)       20,0             21,5              23,8               19,0                 18,6
Quintiles
EPICES       3,0 (16,6-30,2)       23,8             25,5              25,0               21,8                 21,5
             4,0 (30,2-48,5)       24,6             28,2              23,9               21,6                 23,0
              5,0 (48,5-100)       16,1              8,7              13,1               19,4                 19,9
Tableau 2. Comparaison des scores EPICES avec d’autres populations

Pour le score EPICES, 572 sujets (87 %) ont répondu aux                            Odds Ratio        IC95 %           p
11 questions et 55 ont répondu à 10 questions. Pour           Invalidité               2,85       0,92-8,86      0,07
ces derniers, la réponse à la question manquante n’a pas
                                                              CMU                      2,06       0,98-4,32      0,06
modifié leur classification en « précaire/non précaire ».
                                                              Nombre d’enfants
Le score EPICES a donc été étudié qualitativement pour        à charge                                           0,03
627 sujets soit 95 % de la population inclue.
                                                               1 à 2 enfants           1,91       1,18-3,09      0,01
Le pourcentage des patients précaires selon EPICES
                                                               3 enfants et plus       1,73       0,79-3,79      0,17
ne différait pas selon le genre. Il était de 38,6% pour
                                                              Précaires EPICES         1,75       1,10-2,78      0,02
les 572 sujets et de 38,3 % en ajoutant les 55 sujets
répondeurs partiels.                                          Tableau 3. Variables explicatives du non-rappel de la
La plupart des variables différaient selon la précarité       vaccination antitétanique
EPICES. La répartition selon les classes d’âge était dif-
férente (p < 0,001) avec une sous-représentation des          ayant les scores les plus élevés avaient tendance à être
plus jeunes (5,4 % vs 15,2 %) et une sur-représenta-          plus nombreuses dans la population incluse que dans
tion des plus de 65 ans (29,2 % vs 16 %) chez les sujets      la population générale8, mais moins que dans la popu-
précaires par rapport aux non précaires.                      lation des CES qui sélectionnent des sujets en situation
Il en était de même pour le niveau d’études (p < 0,001),      de vulnérabilité sociale (tableau 2).
la CSP (p < 0,001) et la situation par rapport à l’em-
                                                              Caractéristiques d’accès aux soins
ploi. Les sans diplôme étaient plus fréquents chez les
                                                              de prévention
personnes précaires (44,2 % vs 16,7 %) alors que les
niveaux d’étude supérieurs au baccalauréat l’étaient          Vaccination antitétanique
moins (12 % vs 36,2 %). Les ouvriers et les personnes
sans CSP étaient plus fréquents chez les personnes            Le taux de prophylaxie antitétanique atteignait 84,9 %
précaires (respectivement 27,1 % vs 12,6 % et 27,5 %          sans différence significative selon le genre. Il ne diffé-
vs 16,1 %) alors que les cadres et professions intermé-       rait pas en fonction de la CSP. En revanche, en analyse
diaires l’étaient moins (7,4 % vs 24,7 %). Les per-           univariée, le taux de non-rappel était plus élevé chez
sonnes en activité professionnelle et les étudiants pré-      les personnes précaires (20,2 % vs 12,1 %, p = 0,006)
dominaient chez les personnes non précaires (respec-          avec des motifs invoqués différents : le plus souvent
tivement 57,1 % vs 37,5 %, p < 0,001 et 6,2 % vs              « ne savait pas » (43,8 %) alors que l’oubli chez les per-
2,1 %, p = 0,017). Inversement les retraités, les chô-        sonnes non précaires (41,3 %) était le plus fréquent.
meurs et les chercheurs d’emploi étaient significati-         En analyse multivariée, une variable explicative du
vement plus nombreux chez les personnes précaires             non-rappel était la précarité selon EPICES : OR = 1,75 ;
(respectivement 33,3 % vs 24,3 %, p = 0,014, 5,4 %            IC95 = 1,10-2,78, p = 0,019 (tableau 3).
vs 1 %, p = 0,01 et 7,5 % vs 3,4 %, p = 0,02). Enfin,         Hemoccult®/coloscopie
les bénéficiaires de prestations sociales étaient plus
nombreux chez les personnes précaires (11,3 % avaient         83,7 % des patients concernés étaient à jour, sans
au moins un minima social vs 1%, p < 0,001). Tous les         différence significative selon le genre. Les taux de non-
bénéficiaires du RMI étaient classés dans le groupe           réalisation de l’Hemoccult® ne différaient pas selon
des personnes précaires.                                      la précarité. Les personnes non à jour étaient plus fré-
Dans cette étude, le score EPICES moyen était de 26,5         quemment des 50-54 ans (p = 0,001), par opposition
avec une distribution en quintiles comparable à celle         aux retraités. En analyse multivariée, le seul facteur
observée dans la population des CES. Les personnes            indépendant était le statut de retraité significative-

Volume 22    N° 96                                            exer cer la r evue française de médecine générale            43
Recherche                                                                                             Précarité

     ment associé à un moindre risque : OR = 0,19 ; IC95 =      L’accès aux soins de prévention
     0,06-0,61, p = 0,005. Il n’y avait pas de différence
     significative selon la CSP.                                Dans une population dont les caractéristiques sociales
     Mammographie                                               pouvaient laisser présager un accès difficile au dépistage
                                                                (plus de 38 % de précaires selon EPICES), il y a des taux
     90,7 % des femmes concernées avaient fait une mam-         de dépistage organisé des cancers du côlon, du sein et
     mographie dans les 30 derniers mois. Le taux de non-       du col utérin très élevés, respectivement de 83,7 %,
     réalisation était de 12,3 % chez les personnes pré-        90,7 % et 91,8 % ainsi qu’un taux de vaccination anti-
     caires contre 6,3 % chez les non précaires (ns).           tétanique de 84,9 %. Ces résultats sont nettement plus
     Frottis cervicovaginal                                     élevés que ceux observés dans la population générale.
                                                                       Les hypothèses explicatives peuvent être abor-
     91,8 % des femmes concernées                                                          dées à partir du patient ou du
     avaient réalisé un frottis cervicova-                                                    médecin. Côté patient, la
     ginal dans les 3 années pré-                                                              population inclue a été
     cédentes. Le taux de non-                                                                 observée dans la salle d'at-
     réalisation ne différait pas                                                              tente d’un cabinet médical
     selon la précarité EPICES.                                                               et a donc une aptitude au
     Informations                                                                           recours aux soins. De plus,
     complémentaires en                                                                cette population était sélectionnée
     cas de non-distribution                                                           par la déclaration d’un médecin du
     des soins                               to
                                                  li a                                   cabinet comme médecin traitant.
                                           Fo
                                                                                               Côté médecin, ils étaient
                                       ©

     L’analyse des différentes explica-                                                         sensibilisés aux actions de
     tions fournies par les patients                                                            prévention. Un des méde-
     concernant la non-réalisation                                                             cins est membre du Comité
     du soin selon la vulnérabilité                                                  départemental de lutte contre le can-
     sociale n’a pas été possible du                                                  cer et d’une association de médecins
     fait d’effectifs insuffisants. Sur                                               généralistes actifs en santé publique.
     l’ensemble des patients n’ayant                                                 Un autre a réalisé différents travaux
     pas réalisé au moins un soin de                                            d’évaluation des soins sur le lien Santé-
     prévention, la notion d’information                        Précarité au sein des Centres de santé de Grenoble.
     donnée par le médecin sur la nécessité de faire le soin    Des médecins généralistes motivés peuvent jouer un
     ne variait pas selon la vulnérabilité.                     rôle déterminant dans l’accès aux soins préventifs d’une
                                                                population, même lorsque celle-ci a des caractéristiques
     Discussion                                                 sociales limitant (théoriquement) l’aptitude à y recourir.
                                                                Contribution à la compréhension des inégalités
     Caractérisation de la vulnérabilité                        sociales d’accès aux soins de prévention
     sociale
                                                                Cette étude conduite auprès d’une population recru-
     Cette étude corrobore la relation statistiquement          tée en salle d’attente tend à valider l’hypothèse selon
     significative entre le score EPICES et les caractéris-     laquelle la réduction des inégalités sociales d’accès
     tiques socioéconomiques de l’INSEE (CSP, niveau            aux soins de prévention passe d’abord par un bon
     d’études) mais aussi d’autres facteurs socio-environ-      accès aux soins de première ligne. Ici, le fort taux de
     nementaux comme l’âge, la situation par rapport à          dépistage des 3 cancers n’a pas de gradient social
     l’emploi et les minima sociaux. Par rapport à la CSP,      objectivé sur un effectif relativement modeste. Ce
     la pertinence de cet outil pour mesurer des gradients      résultat diverge d'une précédente étude locale16 en
     sociaux d’accès aux soins n’a pas été vérifiée sauf        médecine générale qui montrait des facteurs prédic-
     pour la vaccination antitétanique. Pour cette vaccina-     tifs d’échappement au dépistage du cancer du sein, tels
     tion, le score EPICES permet d’objectiver un gradient      que l’âge supérieur à 63 ans, la CSP (commerçante,
     tandis que la CSP ne le permet pas. Sur ce critère, la     activité manuelle salariée ou profession artisanale),
     caractérisation de la vulnérabilité sociale par le score   l’absence de mutuelle, l’origine étrangère, et le com-
     EPICES semble donc plus sensible que les outils clas-      portement du médecin (absence de proposition ou
     siques de position sociale. Cependant, ce « score outil    « malentendu » généraliste/gynécologue). Des travaux
     de recherche » est difficilement applicable en pra-        similaires sont donc nécessaires sur des effectifs plus
     tique clinique.                                            importants afin d’expliquer ces divergences.

44   exer cer la r evue française de médecine générale                                                 Volume 22     N° 96
Précarité                                                                                        Recherche

Concernant la vaccination, l’importance d’une adap-          Conclusion
tation de l’information aux caractéristiques culturelles
des populations précaires, en invalidité et/ou bénéfi-       Les inégalités sociales de santé sont un objet privilégié
ciaires de la CMU est soulignée. Les personnes en            d’étude et de préoccupation en France. Les différentes
invalidité sont le plus souvent polypathologiques, ren-      politiques de santé jusqu’alors mises en œuvre profitent
dant le suivi préventif plus difficile (probable oubli de    plus largement aux personnes issues de groupes sociaux
la part du patient et du médecin).                           favorisés. De par ses spécificités, le médecin généraliste
Dans le dépistage des cancers, l’étude souligne une          est certes témoin mais peut aussi être acteur dans la
donnée déjà connue en particulier pour le cancer colo-       réduction des inégalités. Cette étude souhaitait mettre
rectal12 : des efforts sont à soutenir dans la population    en relation deux éléments indépendants : la caractéri-
des actifs, notamment les hommes de 50 à 54 ans. Les         sation de la position sociale des personnes concernées,
motifs de non-recours aux soins (absence d’intérêt,          et l’identification de soins de prévention pertinents
méconnaissance) qui n’ont pu être analysés ici par           pour réduire la mortalité évitable et accessibles à une
insuffisance d’effectifs devront être vérifiés sur des       mesure de distribution effective. Or, les gradients sociaux
populations plus importantes.                                attendus n’ont pas été objectivés sauf pour la vaccina-
Cette étude conduit à formuler l’hypothèse (à vérifier)      tion antitétanique. Pour ce soin, le score individuel de
selon laquelle renforcer les messages de prévention          précarité EPICES est plus sensible que les caractéris-
dans une population précarisée permettrait d’amélio-         tiques socioéconomiques classiques de l’INSEE pour
rer le taux de dépistage. En effet ici, l’information don-   mesurer des gradients sociaux de santé. Le score EPICES
née aux patients n’ayant pas accédé à un soin ne dif-        permet de définir une population plus vulnérable que
fère pas selon la précarité EPICES et l’accès aux soins      la population générale. Cependant, malgré les carac-
de prévention paraît meilleur que dans la population         téristiques sociales défavorables de la population étu-
générale.                                                    diée, les taux de couverture vaccinale antitétanique et
Dans le domaine de l’équité des soins, la question           de dépistage recommandés des 3 cancers sont très
dépasse le simple champ biomédical. L’ajout du regard        supérieurs aux moyennes nationales. Ainsi, l’accès aux
des sciences humaines mène à une analyse des normes,         soins primaires et l’engagement professionnel dans le
croyances et valeurs sous-jacentes des différents            domaine de la prévention, au service de patients aux
acteurs, influençant le recours des patients mais aussi      conditions de vie modestes, semblent devoir être les
la démarche préventive des médecins. Les pratiques           deux éléments constitutifs d’une éventuelle politique
médicales sont guidées par des logiques plus ou moins        visant à la réduction des inégalités sociales de santé.
implicites expliquant les écarts entre recommandations,      Différencier l’impact de l’un par rapport à l’autre est une
images officielles et pratiques de terrain17.                piste pour des travaux ultérieurs.

  Résumé
  Contexte. Les inégalités sociales de santé se définissent comme le gradient de morbimortalité selon la caté-
  gorie socioprofessionnelle. En France, ces inégalités restent préoccupantes. Si elle relève essentiellement des
  politiques publiques sur des déterminants sociaux, leur réduction concerne aussi directement la pratique de
  la médecine générale. Or, la démarche préventive paraît en théorie plus efficace que la démarche curative pour
  lutter contre ces inégalités. Pour caractériser les populations concernées, l'approche subjective de la vulné-
  rabilité sociale semble plus pertinente que la classique distribution par catégories socioprofessionnelles.
  Objectif. Comparer la pertinence de la catégorie socioprofessionnelle à celle du score de vulnérabilité sociale
  EPICES pour mesurer les gradients sociaux de distribution des soins de prévention.
  Méthode. L’accès aux soins de prévention a été approché par un outil composite comportant la vaccina-
  tion antitétanique et le dépistage de 3 cancers (côlon, sein et col utérin). Les caractéristiques sociales ont
  été étudiées par le score EPICES et les caractéristiques sociales classiques.
  Résultats. Malgré des caractéristiques sociales défavorables (38 % de la population vulnérable selon
  EPICES), les taux de couverture vaccinale antitétanique et de dépistage des 3 cancers étaient respectivement
  de 84,9 %, 83,7 %, 90,7 % et 91,8 %. Il a été possible de mesurer un seul gradient social, modeste, pour
  la vaccination et uniquement grâce à EPICES.
  Conclusion. Cette étude locale met en évidence un meilleur accès aux soins de prévention que dans la
  population générale et l'absence de gradient social dans la distribution du dépistage de trois cancers.
  Étendre ailleurs cette exploration permettrait de mieux caractériser ces résultats qui pourraient être attribués
  à l’implication des médecins généralistes concernés.

Volume 22     N° 96                                          exer cer la r evue française de médecine générale             45
Recherche                                                                                                                Précarité

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                                                                                                                                                     © Fotolia

46   exer cer la r evue française de médecine générale                                                                   Volume 22        N° 96
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     Prise en charge de la femme victime
     de violences conjugales par les médecins
     généralistes : une étude qualitative
                                  Hélène Canuet1, Isabelle Belin2, Guillaume Henry3                                     1. Assistant
                                                                                                                        CRRF, Le
     exercer 2010;92:75-81.                                                                c_helene_1@hotmail.com
                                                                                                                        Normandy
                                                                                                                        Granville,
                                                                                                                        UFR Caen
     Contexte. Les violences conjugales sont un problème de santé publique dans lequel le médecin généra-               2. Médecin
     liste a un rôle important à jouer. Les objectifs de l’étude étaient triples : analyser les représentations des     remplaçant
     médecins sur le phénomène de violence conjugale, établir un état des lieux de la prise en charge de la             3. Département
     femme victime, et évaluer le ressenti des médecins face aux violences conjugales.                                  de médecine
                                                                                                                        générale,
     Méthode. Étude qualitative à l’aide d’entretiens individuels semi-dirigés avec des médecins généralistes           UFR Caen
     de Basse-Normandie.
     Résultats. 21 médecins ont été interviewés. Leurs représentations des violences conjugales étaient
     proches de celles de la population générale. L’écoute était essentielle pour les médecins, mais elle était
     entachée d’un sentiment d’impuissance. Ils étaient mal à l’aise devant les violences conjugales. Ce malaise
     s’exprimait par le doute, la méfiance, le sentiment d’impuissance et la banalisation. Les difficultés étaient
     centrées sur l’ambivalence de la femme victime, les contraintes de l’exercice, mais peu sur les barrières
     personnelles des médecins.
     Conclusion. Une sensibilisation des médecins paraît nécessaire pour améliorer la prise en charge des
     femmes victimes. Elle doit passer par une formation, axée non seulement sur l’acquisition de connaissances
     théoriques et pratiques, mais aussi sur le développement d’un savoir-être devant les violences conjugales.
     Les médecins généralistes sont mal à l’aise dans les consultations avec les patientes victimes de violences
     conjugales.

     Introduction                                             évaluant les représentations qu’ont les médecins           Mots-clés
     La violence conjugale est « un processus évolutif au     généralistes du phénomène de violence conjugale, la        Connaissance
     cours duquel un partenaire exerce, dans le cadre         prise en charge de la femme victime, et leur ressenti      Violence
     d’une relation privilégiée, une domination qui           face à ce phénomène.                                       domestique
     s’exprime par des agressions physiques, psycholo-                                                                   Épouse
                                                                                                                         maltraitée
     giques, sexuelles, économiques. Elle se distingue du
     simple conflit entre époux ou concubins par le carac-    Méthode                                                    Médecine
                                                                                                                         générale
     tère inégalitaire de la violence exercée par l’un des    La présente étude a utilisé la technique des entre-
     deux partenaires qui veut dominer, asservir, humilier    tiens individuels semi-dirigés6. Un guide d’entretien
     l’autre »1.                                              (encadré 1) a préalablement été construit. Il conte-
     La violence conjugale est considérée comme un            nait les grandes thématiques liées au sujet : défini-
     problème de santé publique. L’enquête ENVEFF2 a          tion des violences conjugales, facteurs favorisants, la
     fourni les premiers chiffres « officiels » en France :   femme victime, le dépistage et la prise en charge
     1 femme sur 10 est victime de violences conjugales.      d’une femme victime, le ressenti des médecins. Le
     Les conséquences sur la santé des femmes sont            recrutement était basé sur le principe de
     nombreuses : traumatiques, psychiatriques, gynéco-       l’échantillonnage raisonné, cherchant à obtenir un
     logiques, létales3,4. Les publications récentes1,5 ont   ratio hommes/femmes équilibré et des secteurs             Les auteurs
     pointé le rôle important du médecin dans le repérage     géographiques socialement différents dans les             déclarent n’avoir
                                                                                                                        aucun conflit
     et l’accompagnement des femmes victimes. Elles ont       départements de la Manche et du Calvados.
                                                                                                                        d’intérêt
     aussi souligné la mauvaise connaissance du phéno-        21 médecins généralistes ont été interviewés par          concernant les
     mène par les médecins et leur vécu difficile4. La        2 personnes entre janvier et juin 2006. Ils ont été       données publiées
     présente étude a tenté d’explorer ces données en         choisis soit au hasard dans l’annuaire soit dans le       dans cet article.

     Volume 21    N° 92                                       exer cer la r evue française de médecine générale                        75
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