FEMMES Réussir comme conseillère et veiller au bien-être financier de la clientèle féminine

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FEMMES Réussir comme conseillère et veiller au bien-être financier de la clientèle féminine
FEMMES
et services financiers :
faire carrière et mieux servir

Réussir comme
conseillère et veiller
au bien-être financier
de la clientèle féminine
FEMMES Réussir comme conseillère et veiller au bien-être financier de la clientèle féminine
Table des matières
Présentation............................................................................. 5
Section 1 – Faire carrière

Quelle place pour la diversité dans l’industrie ?
Jean-François VENNE .................................................................. 7

Représentation féminine :
l’industrie financière arrive en milieu de peloton
Léonie LAFLAMME-SAVOIE ...................................................... 10

Finance : savoir, réellement,
faire plus de place aux femmes
Léonie LAFLAMME-SAVOIE ...................................................... 11

Arrêtez de perdre des conseillers talentueux
Michelle SCHRIVER.................................................................... 12

Les conseils de Christine Lengvari à la relève
Pierre THÉROUX......................................................................... 17

Section 2 – Mieux servir

La croissance est chez les femmes
Didier BERT................................................................................. 20

Les femmes affrontent des vents contraires
Leah GOLOB............................................................................... 23

Les femmes s’inquiètent de la qualité du conseil
CONSEILLER.............................................................................. 26

Finances des femmes : à chaque âge ses besoins
Alizée CALZA............................................................................... 27

L’argent : comment briser le tabou ?
Nathalie CÔTÉ............................................................................. 31

Conseillers, il est temps
d’apprendre à parler aux femmes
Léonie LAFLAMME-SAVOIE ...................................................... 33

Conseil financier aux femmes: oubliez le rose
FINANCE ET INVESTISSEMENT ............................................... 35

                                                                       FEMMES
                                                                   FEMMES      et services
                                                                          ET SERVICES      financiers :: faire
                                                                                        FINANCIERS        faire carrière
                                                                                                                carrière et
                                                                                                                         et mieux servir 2
                                                                                                                            mieux servir 2
FEMMES Réussir comme conseillère et veiller au bien-être financier de la clientèle féminine
Section 3 – Témoignages de professionnelles

La dynamo
Richard CLOUTIER..................................................................... 37

L’analytique
Frédéric ROY............................................................................... 41

Sussy Galvez: inspirer le dépassement de soi
Richard CLOUTIER..................................................................... 45

Celle que rien n’arrête
Frédéric ROY............................................................................... 48

La médiatrice
Richard CLOUTIER..................................................................... 52

                                                                       FEMMES
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                                                                          ET SERVICES      financiers :: faire
                                                                                        FINANCIERS        faire carrière
                                                                                                                carrière et
                                                                                                                         et mieux servir 3
                                                                                                                            mieux servir 3
FEMMES Réussir comme conseillère et veiller au bien-être financier de la clientèle féminine
Les auteurs

Didier BERT
journaliste indépendant

Alizée CALZA
journaliste, Conseiller / Finance et Investissement

Richard CLOUTIER
journaliste, Finance et Investissement

Nathalie CÔTÉ
journaliste indépendante

Leah GOLOB
journaliste indépendante

Léonie LAFLAMME-SAVOIE
directrice principale de contenu, Finance et Investissement

Frédéric ROY
spécialiste, Recherche et Développement des affaires,
Finance et Investissement

Michelle SCHRIVER
éditrice adjointe, Advisor Group

Pierre THÉROUX
journaliste indépendant

Jean-François VENNE
journaliste indépendant

Les textes de cet ouvrage ont été sélectionnés et réunis par
Richard Cloutier, journaliste, Finance et Investissement.

                                                          FEMMES
                                                      FEMMES      et services
                                                             ET SERVICES      financiers :: faire
                                                                           FINANCIERS        faire carrière
                                                                                                   carrière et
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FEMMES Réussir comme conseillère et veiller au bien-être financier de la clientèle féminine
Présentation

En 2017, les femmes constituaient 49,5 % des membres de la
­Chambre de la sécurité financière. Cependant, leur proportion varie
 énormément d’un champ de la profession à l’autre.

On ne retrouve pas autant de femmes chez les courtiers en valeurs
mobilières que chez les courtiers en épargne collective ou les ca-
binets spécialisés en assurance, par exemple. Une réalité qui fait
qu’être une femme dans l’industrie comporte toujours son lot de
défis.

Du côté des clients, les femmes ont une espérance de vie beau-
coup plus élevée que les hommes. Il n’est donc pas rare qu’elles
survivent à leur conjoint. De plus, elles ont des besoins financiers
particuliers puisqu’elles quittent souvent le marché du travail du-
rant leurs congés de maternité et qu’elles doivent donc rattra-
per ces années où elles ne cotisent pas nécessairement à leur
­épargne-retraite. Servir les clients au mieux de leurs intérêts, c’est
 aussi tenir compte de cette situation.

Ce recueil se veut ainsi un répertoire de textes détaillés traitant non
seulement de ce que vivent les femmes ayant choisi de travailler
dans le milieu financier, mais également des contraintes auxquelles
doit faire face la clientèle féminine. Vous y trouverez aussi des té-
moignages de professionnelles en services financiers d’expérience
qui raconteront comment elles ont bâti leur pratique et leur clientèle.

Nous espérons que cet ouvrage vous aidera à mettre certaines de
vos connaissances à jour tout en vous permettant d’être inspiré par
les histoires de vos consœurs conseillères.

Excellente lecture !

L’équipe de F­ inance et ­Investissement
et de ­Conseiller

                                                      FEMMES
                                                  FEMMES      et services
                                                         ET SERVICES      financiers :: faire
                                                                       FINANCIERS        faire carrière
                                                                                               carrière et
                                                                                                        et mieux servir 5
                                                                                                           mieux servir 5
FEMMES Réussir comme conseillère et veiller au bien-être financier de la clientèle féminine
Section 1 –
Faire carrière

                     FEMMES
                 FEMMES      et services
                        ET SERVICES      financiers :: faire
                                      FINANCIERS        faire carrière
                                                              carrière et
                                                                       et mieux servir 6
                                                                          mieux servir 6
Quelle place pour la
DIVERSITÉ dans l’industrie ?
Jean-François ­VENNE

La composition de la société évolue et les services fi-                      « L’ouverture est une question de valeur, mais aussi une
nanciers ne font pas exception. Quelle place occupe                          stratégie d’affaires, indique ­Jean-François ­Prince. Nous
la diversité dans l’industrie aujourd’hui ? ­Le bon vieux                    souhaitons refléter la diversité de la clientèle afin qu’elle
straight, white, boys’ club ­a-t-il vraiment cédé la place à                 nous choisisse. Nous voulons attirer les meilleurs ta-
une représentation plus équilibrée ?                                                               lents, sans exclure personne. Nous
                                                                                                   visons surtout à éliminer la pensée
 Récemment, un directeur de                                                                        unique. Nous cherchons des gens
 comptes est venu témoigner de                                       En 2020,                      qui réfléchissent différemment. »
 sa bisexualité dans un atelier or-
 ganisé par ­RBC. « ­Impensable il y
                                                                     les femmes                      En 2016, l’institution financière
 a dix ans », souligne ­Jean-François                                devraient                       employait 61 % de femmes, 34 %
 ­Prince, ­vice-président régional, ser-                                                             de représentants des minorités vi-
vices financiers commerciaux, chez                                   représenter                     sibles, 7,2 % de personnes handi-
­RBC. Son travail consiste à approu-
 ver des prêts commerciaux. On est
                                                                     51 % de la                      capées, et 1,4 % d’Autochtones.
                                                                                                     Au ­Québec, les femmes représen-
 loin des ressources humaines. Il est                                population                      taient environ 60 % du comité de
 pourtant responsable de la diversité                                                                direction (contre 42 % au ­Canada).
 chez ­RBC, au ­Québec.                                              canadienne                      Nadine ­Renaud-Tinker y occupe

« ­Chez nous, cette responsabilité
                                                                     et 48 % de la                   d’ailleurs le poste de présidente,
                                                                                                     direction du ­Québec. RBC est la pre-
n’est pas confinée aux ressources                                    population                      mière banque canadienne à avoir
humaines, mais relève des lea-                                                                       nommé une femme à la présidence
ders », ­explique-t-il. RBC compte six                               active. Elles                   de son conseil d’administration
­groupes-ressources sur la diversi-
 té : un pour les femmes, un pour les
                                                                     constituent                     (Kathleen P. Taylor, en 2013).

 personnes handicapées, un pour les                                  49,5 % des                      Où sont les femmes ?
 ­LGBTQ et un pour les ­Autochtones,
  ainsi que deux pour les minorités                                  membres de
  culturelles. La plupart rassemblent
  entre 500 et 1200 employés. Ils
                                                                     la ­Chambre                 Dana ­Ades-Landy, présidente de
                                                                                                 l’Association des femmes en fi-
servent de soutien aux membres du                                    de la sécurité              nance du ­Québec (AFFQ), se réjouit
groupe, informent et sensibilisent les                                                           de voir que les grandes institutions
autres employés, et s’engagent au-                                   financière.*                financières canadiennes comptent
près de la collectivité en organisant                                                            désormais beaucoup plus de femmes
des activités ou en participant à des                                                            à leur conseil d’administration et à
événements tenus dans la société.                                                                leur haute direction, sans toutefois
Toutes les grandes banques canadiennes ont de tels                           atteindre la parité dans la plupart des cas. Près de la
regroupements ou cercles d’employés pour les repré-                          moitié des membres de la ­Chambre de la sécurité fi-
sentants des minorités et les femmes.                                        nancière sont aussi des femmes.

*Sources : Statistique Canada et Chambre de la sécurité financière

                                                                                              FEMMES
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                                                                                                 ET SERVICES      financiers :: faire
                                                                                                               FINANCIERS        faire carrière
                                                                                                                                       carrière et
                                                                                                                                                et mieux servir 7
                                                                                                                                                   mieux servir 7
Ces dernières sont pourtant loin d’occuper la place                tant des femmes que des représentants des minorités
qu’elles devraient dans l’industrie des services finan-            culturelles ou de la communauté ­LGBTQ.
ciers, déplore ­Dana ­Ades-Landy. Pour lancer l’en-
semble des entreprises de tous les secteurs sur la voie            « ­Toutefois, nous sommes une coopérative, rappelle
d’un meilleur équilibre ­hommes-femmes, l’AFFQ ré-                 ­Salwa ­Salek, directrice principale, développement or-
clame l’instauration de quotas de femmes aux conseils               ganisationnel et expérience employé. Nous ne pou-
d’administration (CA) et des conséquences pour les                  vons pas imposer des nominations, les gens doivent
firmes qui ne les respectent pas.                                   se faire élire. Il faut que ça vienne de nos grands
                                                                    électeurs. Cela passe par un travail de sensibilisation
Présentement, les entreprises cotées en ­Bourse au                  auprès d’eux, mais aussi de nos employés et de nos
­Canada doivent indiquer aux commissions en va-                     membres. »
 leurs mobilières le nombre de femmes à leur conseil
 d’administration et à la haute direction, et s’expliquer          Le ­Desjardins ­Lab offre à l’année des formations sur la
 lorsque les ratios sont bas. Résultat : en moyenne, à             diversité, auxquelles les employés peuvent assister sur
 peine 14 % des membres des ­CA de ces entreprises                 une base volontaire. L’institution teste aussi, auprès de
 sont des femmes.                                                  ses gestionnaires, un parcours de formations sur les
                                                                   biais inconscients et la diversité au sens large, offertes
« ­On voit bien que ce n’est pas suffisant, puisque les chiffres   sur l’heure du dîner (lunch and learn). « ­Nous voulons
ne changent presque pas, ­dit-elle. Il n’y a souvent même          développer une culture d’entreprise accueillante pour
pas de cibles précises et surtout aucune conséquence               tous », précise ­Salwa ­Salek.
pour les firmes faisant peu de place aux femmes. »
                                                                   Desjardins participe notamment au projet pilote
Dana ­Ades-Landy sait que plusieurs personnes re-                  ­Intégration-Travail-Formation, du ­Bureau d’intégration
chignent lorsqu’il est question de quota. On avance                 des nouveaux arrivants à ­Montréal (BINAM). L’objectif
souvent qu’une entreprise devrait pouvoir choisir le                est de permettre à des immigrants qualifiés résidant à
meilleur candidat ou la meilleure candidate, sans égard             ­Montréal d’acquérir de l’expérience de travail signifi-
à son genre. Un argument qu’elle réfute.                             cative dans de grandes entreprises. Jusqu’à mainte-
                                                                     nant, une quinzaine de personnes arrivées au ­Québec
« ­Il y a bien assez de femmes compétentes pour trou-                depuis moins de cinq ans ont été embauchées dans
ver d’excellentes administratrices », ­soutient-elle. Un             des postes en technologies de l’information (TI) et en
récent sondage réalisé auprès des membres de l’AF-                   services financiers. Elles sont accompagnées tout au
FQ, qui compte plus de 600 cadres supérieures, mon-                  long de leur intégration, tout comme les équipes qui
trait que près de 80 % d’entre elles étaient en faveur               les accueillent.
de quotas.

Cependant, elle croit que les femmes aussi ont du tra-             Les multiples visages de la diversité
vail à faire. « ­Je trouve encore que trop d’entre elles
se vendent moins bien que les hommes, vantent trop                 Il faut dire que la situation a évolué à divers rythmes
peu leurs bons coups et hésitent à prendre plus de                 pour les différents groupes minoritaires. À elle seule, la
responsabilités, par manque de confiance en elles,                 communauté ­LGBTQ comprend plusieurs différences
­admet-elle. Ça ralentit leur progression. »                       d’identité de genre et d’orientation sexuelle, accueillies
                                                                   avec des degrés variables d’ouverture. Si le fait d’être
                                                                   gai ou lesbienne est assez bien accepté en entreprise,
L’entreprise mosaïque                                              être transsexuel ou queer peut encore provoquer de
                                                                   l’incompréhension et se heurter à des préjugés, admet
Chez ­Desjardins, on est bien conscient du besoin d’amé-           ­Eric ­Ouellet, partenaire ressources humaines, chez
liorer la diversité dans la gouvernance, en y ajoutant              ­BMO ­Groupe financier.

                                                                                   FEMMES
                                                                               FEMMES      et services
                                                                                      ET SERVICES      financiers :: faire
                                                                                                    FINANCIERS        faire carrière
                                                                                                                            carrière et
                                                                                                                                     et mieux servir 8
                                                                                                                                        mieux servir 8
BMO aborde notamment la question de la diversité et             Elle note une évolution depuis son arrivée au ­Québec en
de l’intégration des personnes ­LGBTQ par son groupe            2010, surtout sur les questions d’orientation sexuelle,
­Fierté, que dirige au ­Québec ­Eric ­Ouellet. L’objectif est   mais moins pour les minorités de genre. Elle aimerait
triple : présenter l’image d’un employeur ouvert à ce           qu’il y ait dans le domaine des services financiers des
groupe, offrir des formations et des ateliers, et former        modèles plus diversifiés de leaders qui reflètent la di-
les gestionnaires aux réalités vécues par les ­LGBTQ.           versité sous tous ses angles.
Par exemple, quatre spécialistes sont récemment ve-
nus discuter de l’intimidation des jeunes ­LGBTQ à              « ­Je suis une femme, lesbienne, mère de famille, aussi
l’école, une formation intéressante pour les parents,           entrepreneure et immigrante, c’est tout ça qui fait ma
qu’ils soient gais ou hétérosexuels, dont les enfants           différence, mon identité, ce n’est pas juste un aspect »,
vivent ces difficiles réalités.                                 ­rappelle-t-elle.

Eric ­Ouellet souligne que cer-                                                             Voilà qui confortera la ­Banque
taines situations exigent aussi                                                             ­Nationale dans son approche.
des formations plus spécialisées.                                                            « ­Plutôt que de simplement for-
Par exemple, apprendre à bien                  L’ouverture est une                           mer nos gestionnaires et em-
servir les personnes transgenres.                                                            ployés à certaines formes de
« ­Si une femme se présente de-                question de valeur,                           diversité, nous travaillons sur
vant vous avec des documents                                                                 l’ouverture à la différence en
au nom d’un homme, vous devez                  mais aussi une                                général, explique ­Dimitri ­Girier,
savoir comment réagir, car il y a              stratégie d’affaires.                         conseiller senior diversité et in-
aussi une question de sécurité,                                                              clusion, à la ­Banque ­Nationale.
­illustre-t-il. Il faut s’assurer de           – Jean-François Prince                       Cela signifie lutter contre les
 l’identité de la cliente, sans pour                                                         biais inconscients et développer
 autant lui faire subir de préju-                                                            une saine curiosité et une ouver-
 dices. »                                                                                    ture aux gens différents de soi. »

Claire ­Giroudeau, conseillère en sécurité financière           La ­Banque ­Nationale approche beaucoup d’orga-
chez ­Lafond ­Services financiers, se souvient d’avoir          nismes sur le terrain travaillant auprès des personnes
surtout recruté ses clients dans la clientèle ­LGBTQ à          handicapées, des ­LGBTQ, des nouveaux arrivants et
ses débuts, ce qui est moins le cas aujourd’hui. « Ça           autres minorités pour faire connaître les occasions de
allait dans les deux sens : ils étaient à l’aise en ma com-     carrière chez elle.
pagnie et je pouvais assumer mon identité avec eux »,
­raconte-t-elle.                                                « ­Beaucoup d’études démontrent que la diversité est
                                                                un vecteur important d’innovation et nous y croyons
Au commencement de sa carrière, elle sentait parfois            fermement, ajoute ­Dimitri ­Girier. Les entreprises où les
sa crédibilité subtilement remise en question dans le           directions et les équipes de travail sont plus diversi-
milieu des affaires du fait qu’elle était une femme, les-       fiées prennent aussi de meilleures décisions et, sur-
bienne avec une conjointe. On lui démontrait à l’oc-            tout, gèrent mieux le risque, car ­celui-ci est confronté
casion une légère méfiance, par des regards ou un               à plusieurs points de vue. Dans les services financiers,
manque d’enthousiasme à collaborer avec elle, et elle           c’est un aspect crucial. »
a dû faire ses preuves.
                                                                      Initialement publié dans C
                                                                                               ­ onseiller, en mars 2018
Elle croit que sa situation l’a sensibilisée à la nécessité
d’accueillir les clients avec ouverture d’esprit, sans te-
nir pour acquis qu’ils sont hétérosexuels ou que c’est
l’homme qui connaît mieux les finances d’un couple.

                                                                                FEMMES
                                                                            FEMMES      et services
                                                                                   ET SERVICES      financiers :: faire
                                                                                                 FINANCIERS        faire carrière
                                                                                                                         carrière et
                                                                                                                                  et mieux servir 9
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REPRÉSENTATION
FÉMININE:
l’industrie en milieu de peloton
Léonie LAFLAMME-SAVOIE

Deux émetteurs sur trois provenant de l’industrie des    Fait intéressant, la proportion de postes d’adminis-
services financiers comptent au moins une femme au       trateurs occupés par des femmes chez les émetteurs
sein de leur conseil d’administration (C.A.), selon un   sondés est passée de 11 % lors de la première année
récent rapport des ­Autorités canadiennes en valeurs     du sondage à 15 % durant la quatrième année.
mobilières (ACVM).
                                                                              Selon le sondage, plus la capitali-
Ce palmarès est dominé par le sec-                                            sation boursière de l’émetteur est
teur manufacturier et le secteur du                                           élevée, plus la proportion de postes
commerce de détail, où 89 % et
                                              Plus la                         d’administrateurs occupés par des
84 %, respectivement, des émetteurs          ­capitalisation                  femmes est élevée. Ainsi, elle est de
sondés ont des femmes à leur C.A.                                             11 % chez les émetteurs ayant une
L’industrie de la biotechnologie et           boursière de                    capitalisation boursière de moins
du pétrole et gaz arrivent en fin de                                          de 1 G$ alors qu’elle grimpe à 25 %
liste avec, toutes les deux, 56 % des
                                              l’émetteur est                  pour les émetteurs ayant une capita-
émetteurs ayant des femmes au C.A.            élevée, plus la                 lisation boursière de plus de 10 G$.

Il est important de spécifier que les         proportion de                   Par ailleurs, seulement 4 % des émet-
­ACVM n’ont pas tenu compte des                                               teurs interrogés avaient une femme
 banques canadiennes dans leur
                                              postes d’ad-                    comme chef de leur direction. Qua-
 rapport : « ­Les grandes banques ca-         ministrateurs                   torze pour cent des émetteurs comp-
 nadiennes, qui appartiennent à un                                            taient une femme au poste de chef
 secteur ayant été un précurseur en           occupés par                     des finances, et 66 % des émetteurs
 matière de diversité, ne sont pas vi-                                        avaient au moins une femme à leur
 sées par nos examens, écrivent les
                                              des femmes                      haute direction. De plus, 42 % des
 ­ACVM. Les six grandes banques               est élevée.                     émetteurs sondés avaient adopté
  comptaient en moyenne 38 % de                                               une politique sur la représentation fé-
  femmes à leur conseil, selon les                                            minine à leur conseil d’administration.
  circulaires de sollicitation de procu-
  rations déposées en 2018 pour l’exercice terminé le    Pour produire ce rapport, les ­ACVM ont examiné un
  31 octobre 2017. »                                     échantillon de 648 émetteurs établis en ­Alberta, au
                                                         ­Manitoba, en ­Saskatchewan, en ­Ontario, au ­Québec,
Au total, 15 % des postes d’administrateurs étaient      au ­Nouveau-Brunswick et en ­Nouvelle-Écosse.
occupés par des femmes, 66 % des émetteurs son-
dés comptaient au moins une femme à leur C.A., et                   Initialement publié sur le site de Finance et
218 émetteurs sur 648 ne comptaient aucune femme                                 Investissement, en mars 2019
à leur C.A. Finalement, 29 % des postes d’administra-
teurs vacants ont été pourvus par des femmes.

                                                                       FEMMES
                                                                   FEMMES      et services
                                                                          ET SERVICES      financiers : :faire
                                                                                        FINANCIERS        fairecarrière
                                                                                                                carrièreetetmieux servir 10
                                                                                                                            mieuxservir   10
Finance : savoir, RÉELLEMENT,
faire plus de place aux femmes
Léonie ­LAFLAMME-SAVOIE

Comment s’assurer qu’il y ait davantage de femmes dans            ­ NB ­BMO. Je me rappelle que lorsque j’étudiais pour
                                                                  F
le secteur des fonds négociés en ­Bourse (FNB) et, plus           obtenir mon titre de ­CFA tout en travaillant 60 heures
largement, en finance en général ? ­En adoptant des po-           par semaine, je n’aurais jamais réussi sans l’aide de
litiques favorisant la conciliation ­travail-famille et en ren-   mon conjoint pour cuisiner, faire le ménage et s’occu-
dant le congé de paternité obligatoire, selon trois pané-         per du chien ! »
listes interrogés lors de l’événement ­Inside ­ETF ­Canada
qui se déroulait les 21 et 22 juin 2018 à M  ­ ontréal.           Pour progresser dans leur carrière, les femmes ont
                                                                  donc non seulement besoin de pouvoir concilier tra-
  « L’industrie financière change très rapidement, et             vail et famille dans leurs propres fonctions profession-
  lorsqu’une femme termine son congé de maternité,                nelles, mais également que leur conjoint ait, de son
  il peut être difficile pour elle de réintégrer ses fonc-        côté, la marge de manœuvre nécessaire au travail afin
  tions. Certains pays exigent que les hommes prennent            de les aider.
  leur congé de paternité », souligne ­Florence ­Narine,
­vice-présidente senior et chef des produits chez                 « ­Lorsque ma femme a eu notre deuxième enfant, j’ai
 ­Placements ­AGF, une des conférencières réunies dans            décidé de ne pas aller au travail avant 10 h 00 chaque
le cadre du déjeuner de ­Women in ­ETFs, une organi-              matin afin de l’aider pendant six semaines pour lui
sation qui compte près de 300 membres au ­Canada.                 permettre de récupérer de sa césarienne, raconte ­Atul
                                                                  ­Tiwari, directeur général et chef de ­Placement ­Vanguard
Cette pratique, mise en place dans des pays comme la               ­Canada. Elle pouvait se reposer alors que je préparais
­Finlande, la ­Norvège, la ­Suède et l’Allemagne, permet            notre fils aîné pour l’école. Pendant six semaines, je
de réduire les biais inconscients qui désavantagent les             n’ai pas eu de réunion le matin avant 10 h 00. »
femmes au moment de l’embauche.
                                                                   Les femmes ­elles-mêmes ont aussi un rôle à jouer
« ­Lorsqu’elles pensent à engager une femme, certaines             dans leur progression dans le secteur, rappelle
entreprises peuvent être tentées de se demander tout               ­Florence ­Narine : « ­Les hommes ont tendance à dire oui
de suite combien de congés de maternité la candidate              ­sur-le-champ et à trouver par la suite comment ils vont
prendra. En obligeant tout le monde à quitter le tra-              y arriver. C’est quelque chose que les femmes doivent
vail temporairement pour élever ses enfants, on réduit             apprendre à faire. On ne peut pas jouer à la loterie
l’influence des biais inconscients », ajoute ­Florence             après que le billet gagnant ait été tiré. Il peut arriver
­Narine.                                                           qu’elles hésitent et, le temps qu’elles se décident, l’op-
                                                                   portunité a disparu. »
Selon une étude commandée par la ­Banque de
­Montréal, les femmes sont six fois plus susceptibles                    Initialement publié sur le site web de ­Finance et
 que les hommes de s’absenter du travail pour prendre                                        ­Investissement, en juin 2018
 soin de quelqu’un, de dire non à une promotion ou
 d’emménager avec la personne de qui elles doivent
 prendre soin.

« Ça peut avoir une influence incroyable sur la carrière
d’une femme. Elles ont besoin d’avoir un réseau pour
les soutenir, indique ­Erika ­Toth, ­vice-présidente chez

                                                                                  FEMMES
                                                                              FEMMES      et services
                                                                                     ET SERVICES      financiers : :faire
                                                                                                   FINANCIERS        fairecarrière
                                                                                                                           carrièreetetmieux servir 11
                                                                                                                                       mieuxservir   11
Arrêtez de perdre des
conseillers TALENTUEUX
Michelle SCHRIVER

Les ­services-conseils et le secteur de la construction     suffisante à la santé des travailleurs. La construction
ont quelque chose en commun, et ce n’est pas seule-         souffre de mauvaises perceptions de la part du public
ment leurs habiletés respectives dans l’édification de      quant à son professionnalisme et à ses fonctions. Ça
fondations solides.                                         ne vous rappelle rien ?

 C’est plutôt leur manque de femmes. On estime              De telles prémisses erronées et persistantes renvoient
 qu’au ­Canada, les travailleurs de la construction         le manque de présence des femmes dans l’industrie
 comptent 12 % de femmes, et les conseillers, de 20 à       aux femmes ­elles-mêmes en suggérant qu’il est cau-
 25 %. Les femmes constituent à peu près 47 % de la         sé par leur faible intérêt. Ce qui peut faire échouer la
­main-d’œuvre canadienne.                                   suppression des véritables obstacles à cette industrie
                                                            pour les femmes.
On pourrait penser que le manque de femmes dans le
secteur de la construction s’expliquerait par les risques   Alors qu’une foule de recherches appuient l’avantage
qui y sont liés, tels que les conditions climatiques dif-   concurrentiel de la diversité, les entreprises qui déter-
ficiles et les taux de blessures élevés, ce qui n’attire    minent les obstacles et qui les surmontent ont beaucoup
pas les femmes connues pour être prudentes. De fa-          à gagner d’une plus grande participation des femmes.
çon identique, on pourrait attribuer la faible présence
des femmes dans les services financiers à leur manque
d’intérêt pour ce sujet. Par exemple, dans de nom-          Refléter la réalité
breux sondages, les femmes s’évaluent comme moins
compétentes en matière de finances que les hommes           Les diplômés canadiens qui visitent la page carrières
ne se considèrent.                                          de ­PwC ­Canada y verront une diversité de visages et
                                                            une déclaration sur la priorité de la diversité et de l’in-
Cependant, un tel raisonnement est fondé sur des pré-       clusion chez ­PwC, ainsi que de l’information sur une
misses erronées. Les études sur le                                           variété de programmes connexes,
risque révèlent davantage de nuances                                         portant entre autres sur les femmes
parmi ceux qui prennent des risques                                          et le leadership, les professionnels
que les généralisations liées au genre          Comment                      noirs, les professionnels en début de
ne pourraient suggérer, ainsi que               l’industrie                  carrière, les personnes de la com-
des biais dans la mesure du risque.                                          munauté ­GLEE (gays, lesbiennes et
Et la différence entre les hommes et            peut attirer                 tous les autres) et du réseau ­DAWN
les femmes dans l’­auto-évaluation                                           (réseau d’invalidité, de capacité et de
de leurs connaissances financières              davantage de                 ­bien-être).
pourrait résulter d’une confiance ex-           femmes, et
cessive de la part des hommes.                                                 Quand des candidats professionnels
                                                les garder.                    vérifient les postes sur le site web
Dans un article sur l’emploi d’un                                              de ­PwC ­Indonésie, ils découvrent
plus grand nombre de femmes,                                                   une page qui fait la promotion de la
­Construction ­News décrit une indus-                                          conciliation ­travail-vie personnelle et
 trie qui ne se résume pas à des habitacles pleins de       présente une salle d’allaitement pour les employées –
 courants d’air, de la maçonnerie et une attention in-      une initiative qui semble refléter les défis du pays en

                                                                            FEMMES
                                                                        FEMMES      et services
                                                                               ET SERVICES      financiers : :faire
                                                                                             FINANCIERS        fairecarrière
                                                                                                                     carrièreetetmieux servir 12
                                                                                                                                 mieuxservir   12
matière de soins de santé, mais aussi normalise les be-      « ­Comprenez-vous ce que nous venons de faire ? » a de-
soins des femmes en milieu de travail.                       mandé un membre masculin de l’équipe de direction.
                                                             Sallie ­Krawcheck, impressionnée, écrit : « ­Nous avons
Lorsque ­PwC ­Allemagne a voulu attirer davantage de         fait marche arrière et nous les avons promus tous les
femmes à sa pratique de conseil, la firme a créé des         deux. De plus, nous avons fait venir un coach exécutif
événements de type « salon carrière » à divers endroits :    […] pour nous rendre plus conscients de ces biais. »
sélection d’étudiants en se basant sur leur curriculum
vitae, fréquentation des événements pour parler avec         Le livre de ­Sallie ­Krawcheck note aussi des biais contre
des femmes dans l’entreprise. Dès 2016, la firme a rap-      les femmes ambitieuses et raconte l’histoire d’un direc-
porté une hausse du nombre de candidates (33 %) et           teur de banque qui supposait à tort qu’aucune femme
de recrutements d’étudiantes (42 %).                         n’était intéressée par un poste relevant du ­PDG. Le
                                                             meilleur : ce directeur de banque était une femme.

Biais et culture d’entreprise                                Un tel manque de promotion et d’opportunités peut
                                                             mener à une attrition considérée comme résultant du
Aussi éclairés que nous puissions penser être en tant        choix des femmes pour la conciliation ­travail-vie per-
que société, les biais implicites – tant de la part des      sonnelle plutôt que pour l’avancement.
hommes que des femmes – restent enracinés. « ­Nous
n’associons pas les femmes à la finance et à l’inves-        Les données de ­Mercer sur le marché mondial montrent
tissement », particulièrement en milieu à valeur nette       que les taux de départ des femmes quittant les ser-
élevée, dit ­Sarah ­Kaplan, professeure de gestion stra-     vices financiers en milieu de carrière sont non seule-
tégique et directrice de l’Institute for ­Gender and the     ment plus élevés que ceux des hommes, mais aussi de
­Economy de l’École de gestion ­Rotman, à l’Université       20 à 30 % supérieurs à ceux des autres industries. En
 de ­Toronto.                                                revanche, les hommes des services financiers arrivés
                                                             au même niveau de carrière sont aussi susceptibles
Cette perception façonne le recrutement et les promo-        ou moins susceptibles de quitter leurs employeurs que
tions lorsque les descriptions de poste et les évalua-       leurs homologues des autres industries.
tions ont un langage non inclusif, tel que « doit avoir
une présence imposante », ­dit-elle.                         Camilla ­Sutton, présidente et ­PDG de ­Women in
                                                             ­Capital ­Markets, rapporte que les recherches de son
Si vous croyez être à l’abri de tels biais, ­repensez-y.      entreprise indiquent que les femmes deviennent frus-
                                                              trées dans les quatre premières années d’emploi.
Dans son livre ­Own ­It : ­The P
                               ­ ower of W
                                         ­ omen at ­Work,     « ­Habituellement, la frustration atteint un point culmi-
­Sallie ­Krawcheck, cofondatrice et ­PDG de ­Ellevest, ra-    nant lors de la cinquième année, bien avant qu’elles
conte que l’équipe de haute direction de son ancien           aient pensé à avoir des enfants », ­dit-elle.
employeur passait en revue les candidats au poste de
directeur général : un homme et une femme. Alors que         La frustration est indicatrice du fait d’être moins res-
tous deux étaient décrits avec des mots identiques,          pectée au travail, de recevoir un salaire inférieur, d’avoir
tels que « dynamique », et avaient une performance           moins d’opportunités, et de ne pas réussir à considérer
égale, l’homme était loué, et la femme, blâmée. En fait,     ses gestionnaires comme des modèles. « ­Sur la liste
la performance de la femme était principalement mise         des choses frustrantes, la conciliation ­travail-vie per-
sur le compte d’un marché fort ; celle de l’homme était      sonnelle est beaucoup plus bas, dit ­Camilla ­Sutton.
attribuée à ses actes.                                       Nous ne voyons pas d’écart dans l’ambition. »

                                                                             FEMMES
                                                                         FEMMES      et services
                                                                                ET SERVICES      financiers : :faire
                                                                                              FINANCIERS        fairecarrière
                                                                                                                      carrièreetetmieux servir 13
                                                                                                                                  mieuxservir   13
De même, dans un sondage fait en 2015 pour ­PwC, le          La cible qui visait la présence de 33 % de femmes par-
motif le plus courant pour lequel les femmes du millé-       mi les membres du conseil a été atteinte plus tôt que
naire œuvrant dans les services financiers ont quitté        prévu. L’écart salarial (non corrigé) entre les hommes
leur dernier employeur était le manque d’avancement          et les femmes dans toute la firme est passé de 43 % à
professionnel (34 %). Le désir d’une plus grande conci-      16 %, avec des cibles continues (l’écart salarial corrigé
liation ­travail-vie personnelle n’a été cité que par 13 %   a été supprimé en 2013).
des femmes.
                                                             De telles recherches montrent qu’il faut aborder la ques-
                                                             tion du leadership et la culture d’entreprise pour retenir
Étude de cas : l’exploitation minière                        les femmes, dit ­Camilla ­Sutton. Par exemple, afin d’offrir
                                                             aux femmes les mêmes opportunités qu’aux hommes, il
Quand la minière australienne ­St. Barbara a tenté           faudrait utiliser des critères uniformes pour que les can-
d’employer davantage de femmes, elle a mis au point          didats soient en adéquation avec les postes. « ­Les firmes
des stratégies pour neutraliser les principaux obsta-        qui sont très transparentes sur leur manière d’accorder
cles : perception de l’industrie, un réservoir en baisse     des promotions et sur les critères qu’elles utilisent pour
de femmes qualifiées, et des postes                                              les promotions ont en général un
sur le site qui exigent de passer du                                             meilleur équilibre ­hommes-femmes »,
temps loin de la famille.                                                        ­dit-elle.
                                                 Le nombre
Selon un rapport gouvernemental, les                                                De même, ­Barbara ­Stewart, titulaire
clés de la réussite étaient l’établisse-         de femmes                          de la charte ­CFA et chercheure sur
ment des cibles et l’évaluation afin             recrutées a                        les femmes et la finance, affirme que
de se concentrer sur les objectifs et                                               la culture d’entreprise doit mieux
montrer son engagement, ainsi que                augmenté                           servir les femmes. Par exemple, le
régler les questions du recrutement,                                                style masculin de communication de
de la rétention, de l’avancement et              de 20% sur                         l’industrie, avec sa liste routinière de
de l’équité salariale.                           douze mois                         chiffres, n’est pas attirant, car il rap-
                                                                                    pelle les réunions du comité d’inves-
Les projets ont inclus l’élimination             en 2016.                           tissement, ­dit-elle.
des biais sur les panels de recrute-
ment et de performance, le congé                                                « ­Je composerai mes propres témoi-
parental avec des incitations à re-                                             gnages sur les entreprises afin de
tourner au travail, des conditions de travail souples, le    pouvoir bien travailler avec mes clients », ­dit-elle, ajou-
mentorat et un groupe de soutien pour les employés           tant que les clients s’engageaient davantage grâce à
sur les sites éloignés.                                      ces narrations. Il s’agit d’être plus centré sur le client,
                                                             ­ajoute-t-elle.

Les résultats :                                              Il arrive parfois que l’on mette les femmes sur la touche
                                                             en ayant de bonnes intentions, dit ­Camilla ­Sutton. Par
Le nombre de femmes recrutées a augmenté de 20 %             exemple, un mentor pourrait conseiller à une femme qui
sur douze mois en 2016. Toutes les femmes sont retour-       a de jeunes enfants de faire un changement de carrière
nées au travail après un congé parental (2009‑2016),         vers la réglementation, avec son horaire structuré. Or,
par rapport à 50 % auparavant (2007‑2009).                   avant de prendre une décision importante concernant

                                                                             FEMMES
                                                                         FEMMES      et services
                                                                                ET SERVICES      financiers : :faire
                                                                                              FINANCIERS        fairecarrière
                                                                                                                      carrièreetetmieux servir 14
                                                                                                                                  mieuxservir   14
leur carrière, les femmes devraient attendre au moins            Alors que les hommes et les femmes partagent de plus
un an après être revenues d’un congé parental, ­dit-elle.        en plus les responsabilités familiales, de telles poli-
                                                                 tiques sont susceptibles d’être mieux acceptées et les
« ­On ne veut pas que les gens fassent de l’­auto-               hommes en bénéficieront également.
sélection », ce qui gêne la croissance de la diversité
dans les entreprises, dit ­Nagar ­Rahmani, principal,            « C’est une question relative au genre, ce n’est pas une
chez ­Kensingon ­Capital ­Partners, à ­Toronto. (Un do-          question liée à la femme », affirme ­Camilla ­Sutton, fai-
cument de recherche de ­Barbara ­Stewart met l’accent            sant référence à la diversité et à l’inclusion en milieu de
sur la diversité obtenue à l’interne. Barbara ­Stewart est       travail. « ­Il s’agit de redéfinir ce qu’est la masculinité, et
membre du conseil consultatif de l’entreprise.)                  ce que sont les femmes au travail. De telles redéfini-
                                                                 tions créeront de meilleures cultures. »
 Nagar ­Rahmani, qui attend son premier enfant pour
 septembre, dit qu’elle a conçu un plan « dynamique »
de retour au travail, mais qu’elle est ouverte à une révi-       Conseils pour permettre aux femmes de
sion de ce plan, tout comme l’entreprise qui l’a encou-          se hisser vers les sommets
ragée à prendre autant de temps que nécessaire. Pour
­Nagar ­Rahmani, qui a mis à profit ses compétences en           Camilla ­Sutton, présidente et ­PDG de ­Women in
 capital de risque, la diversité et la flexibilité de l’entre-   ­ apital M
                                                                 C        ­ arkets :
 prise sont « normales ».
                                                                 Établir la transparence de l’entreprise en matière d’em-
Normales également devraient être les politiques                 bauche, de salaire et de promotions.
comme celle du congé parental qui influe sur la vie des
femmes. « ­Nous devons cesser de ne rien faire » quand           Avoir des ­PDG qui président des conseils d’inclusion
il s’agit de mettre à jour les politiques, dit ­Angela D’An-     de la diversité pour souligner l’engagement et la res-
gelo, ­vice-présidente, ­Développement et ­Expérience            ponsabilité de l’entreprise.
client chez ­Financière ­Banque ­Nationale – ­Gestion de
­Patrimoine. Elle suggère que les entreprises consultent         Suggérer des idées pour que le personnel de gestion
 des femmes ayant de l’expérience dans les fonctions             puisse faire participer tous les employés, par exemple
 de conseil afin de comprendre les points probléma-              inviter des femmes à titre d’observatrices aux réunions
 tiques de politiques rédigées pour un environnement             avec les dirigeants.
 principalement masculin.
                                                                 Les gens qui ont besoin de plus de flexibilité au travail
Par exemple, les politiques de congé parental pour-              (pour des raisons familiales, par exemple) devraient, de
raient inclure des façons d’éliminer le stress financier         manière proactive, suggérer à leur entreprise des idées
des conseillers, en tant qu’entrepreneurs, car ils bâ-           créatives. Les politiques ou les programmes généraux
tissent leur famille et leur pratique.                           ne conviennent pas à tout le monde, et la prise d’un
                                                                 congé prolongé ou la réduction d’une fonction sont
La perte potentielle de clients au profit de ceux qui            des chemins potentiellement plus difficiles vers la réus-
couvrent leur clientèle d’affaires représente un stress          site à long terme.
commun chez ceux qui sont en congé parental. Des
solutions créatives pourraient y remédier – ­peut-être
un contrat entre les conseillers prévoyant un paiement
ou un échange lors de la perte de clients, dit ­Angela
D’Angelo.

                                                                                  FEMMES
                                                                              FEMMES      et services
                                                                                     ET SERVICES      financiers : :faire
                                                                                                   FINANCIERS        fairecarrière
                                                                                                                           carrièreetetmieux servir 15
                                                                                                                                       mieuxservir   15
Sarah ­Kaplan, professeure de gestion stratégique à
                                                             Les professionnels de l’industrie peuvent :
l’École de gestion R
                   ­ otman :
                                                              Demander une rétroaction sur leur performance et s’ad-
Retirer des descriptions de poste le langage lié au           joindre un mentor, suggère ­Sallie ­Krawcheck, ancienne
genre et supprimer le langage de « convenance », qui          de ­Wall ­Street et cofondatrice et ­PDG de ­Ellevest, dans
est une manière d’exclure ceux qui ne correspondent          son ouvrage ­Own ­It : ­The P
                                                                                         ­ ower of ­Women at ­Work. Elle
pas au profil du conseiller traditionnel.                    explique avoir demandé une rétroaction aux patrons,
                                                             aux employés et aux collègues – allant jusqu’à la de-
Donner aux femmes des postes où elles pourront ac-           mander trois fois avant d’être prise au sérieux. Camilla
quérir des clients fortunés, potentiellement au moyen        ­Sutton rapporte que les personnes vers lesquelles elle
d’un parrainage actif. Dans le secteur juridique, les         s’est tournée pour demander conseil sont devenus des
quotas qui ont mis les femmes sur les gros dossiers           « parrains » qui la défendaient en coulisse.
ont fait bouger les choses, i­llustre-t-elle.
                                                             Intervenir sur les biais subtils liés au genre en milieu de
Utiliser des quotas liés au genre pour les programmes        travail, que n’importe qui peut afficher. Des échanges
coopératifs, les stages et le mentorat.                      à petite échelle dans les couloirs ou pendant le lunch
                                                             sont bénéfiques, comme de demander négligemment
Angela D’Angelo, ­vice-présidente, ­Développement,           à une personne qui interrompt si elle est consciente de
­Financière ­Banque ­Nationale – G
                                 ­ estion de P
                                             ­ atrimoine :   ce qu’elle a fait.

Mettre au point des programmes pour enseigner aux            Encourager ses filles à pratiquer des sports d’équipe,
conseillers à avoir les bonnes conversations. Par            qui sont fortement en corrélation avec la réussite en af-
exemple, il faudrait leur apprendre à analyser leur          faires, probablement à cause de leurs enseignements
clientèle d’affaires et à évaluer le risque découlant        sur l’échec, affirme ­Sallie K
                                                                                          ­ rawcheck dans son livre.
d’une incapacité à engager les deux conjoints dans la
conversation sur les objectifs et les événements de la                        Initialement publié dans ­Advisor’s E
                                                                                                                  ­ dge,
vie, ce qui entraînerait des retombées au moment où                                                en septembre 2018
les entreprises apprendront à faire davantage appel à
tous leurs conseillers.                                                                   (traduit par ­Thérèse ­Le C
                                                                                                                    ­ hevalier)

                                                                             FEMMES
                                                                         FEMMES      et services
                                                                                ET SERVICES      financiers : :faire
                                                                                              FINANCIERS        fairecarrière
                                                                                                                      carrièreetetmieux servir 16
                                                                                                                                  mieuxservir   16
Les CONSEILS de
Christine Lengvari à la relève
Pierre THÉROUX

Christine ­Lengvari a emprunté plusieurs chemins avant        Diversifier ses expériences de travail
de prendre les rênes de ­Lengvari ­Financière, une en-
treprise familiale fondée il y a plus de 60 ans par ses       Christine ­Lengvari conseille d’ailleurs aux plus jeunes
parents, des réfugiés hongrois. Mais avec toujours une        qui souhaitent travailler au sein d’une entreprise fami-
ligne directrice : l’avancement des femmes, dans un           liale, ou d’en reprendre le flambeau, de faire d’abord
milieu composé majoritairement d’hommes, et le sou-           leurs classes dans d’autres firmes.
tien à la communauté.
                                                                                             « ­Ce n’est pas l’endroit
Son parcours vient d’ail-                                                                    idéal pour se faire les
leurs d’être récompen-                Quand j’ai commencé à                                  dents. C’est important
sé par la ­Chambre de
la        sécurité   financière
                                      travailler dans l’industrie                            d’avoir des expériences
                                                                                             de travail ailleurs, où on
(CSF), qui lui a décerné              financière, c’était un milieu                          sera plus à l’aise d’ex-
le ­Prix ­Distinction lors de                                                                primer     ses    opinions,
sa 10e édition des ­Prix              composé principalement                                 sans peur de froisser des
­Excellence, tenue à la
 ­mi-novembre. Un honneur
                                      d’hommes et j’ai souvent                               membres de la famille »,
                                                                                             souligne celle qui a tra-
  d’autant plus grand que             senti qu’on ne me prenait                              vaillé comme comptable
  ces prix « sont décernés                                                                   agréée, spécialisée en
  par un jury composé de              pas au sérieux. Les temps                              évaluations, fusions et ac-
  confrères et consoeurs
  de l’industrie », commente
                                      ont changé, mais il reste                              quisitions d’entreprises,
                                                                                             en plus d’avoir enseigné
  la présidente et direc-             encore du chemin à faire.                              la comptabilité finan-
  trice générale de ­Lengvari                                                                cière à l’Université ­McGill
  ­Financière, un cabinet de            –  Christine     Lengvari                            et  à l’Université ­Natal, à
   courtage en assurance vie                                                                 D
                                                                                             ­  urban,  en ­Afrique du
   spécialisé en planification                                                               S
                                                                                             ­  ud.
   de succession et de re-
   traite, pour les propriétaires d’entreprises et les par-   Par ailleurs, un conseiller en assurance qui entre sur le
   ticuliers.                                                 marché du travail devrait d’abord « travailler dans une
                                                              firme qui a ses propres agents captifs. C’est la meil-
   Christine ­Lengvari avait pourtant d’abord obtenu en       leure place pour faire son apprentissage », ­dit-elle.
   1972 un baccalauréat ès sciences… en psychologie,
   à l’Université ­Concordia, et n’avait pas l’intention de
   suivre les pas de ses parents dont les discussions au-     Apprendre, toujours apprendre
   tour de la table portaient trop souvent sur l’univers par-
   ticulier des assurances ! ­Mais en 1995, après un séjour   Après son diplôme en psychologie, ­Christine ­Lengvari
   de six ans en ­Afrique du ­Sud, elle revient au ­Québec     a obtenu un ­MBA à la ­Richard ­Ivey ­School of ­Business
   pour se rapprocher de ses parents vieillissants qui lui    de l’Université ­Western ­Ontario, puis a terminé des
   offrent du même coup de prendre la relève.                 études supérieures en comptabilité à l’Université
                                                              ­McGill. Quelques années plus tard, elle décrochera le

                                                                              FEMMES
                                                                          FEMMES      et services
                                                                                 ET SERVICES      financiers : :faire
                                                                                               FINANCIERS        fairecarrière
                                                                                                                       carrièreetetmieux servir 17
                                                                                                                                   mieuxservir   17
titre professionnel d’assureur vie agréé (AVA) et celui       Redonner à la communauté
de conseiller en planification pour les aînés (CPA, ou
­EPC en anglais, pour E­ lder P
                              ­ lanning C
                                        ­ ounselor).          Son alma mater compte toujours beaucoup pour
                                                              ­Christine ­Lengvari qui, en avril dernier, lui a ainsi fait
« C’est important d’avoir le plus de diplômes ou de cer-       un don planifié personnel de 1 M$. Cette somme per-
tificats possibles, surtout quand on envisage un chan-         mettra, entre autres, d’offrir des bourses d’études aux
gement de carrière ou qu’on souhaite le faire », estime        femmes qui choisiront le ­Programme de gestion de
­Christine ­Lengvari qui, encore                                                       portefeuilles ­Kenneth ­Woods
 aujourd’hui, suit divers cours ou                                                     de la ­John ­Molson ­School
 séminaires en formation conti-                                                        of ­Business, de l’Université
 nue.                                       Aux plus jeunes qui                        ­Concordia.
                                            souhaitez travailler                     « ­Quand on a été choyé dans la
Avoir un mentor                             au sein d’une                            vie, c’est essentiel de s’impli-
                                                                                     quer et de redonner à la com-
Christine ­Lengvari n’a pas eu              entreprise familiale,                    munauté », estime ­Christine
la chance d’avoir de mentor.
Mais elle souligne l’importance
                                            ou d’en reprendre                        ­Lengvari dont l’esprit philan-
                                                                                      thropique s’est développé pen-
de « compter sur une personne               le flambeau: faites                       dant son séjour en ­Afrique du
qui peut nous prendre sous                                                            ­Sud, où elle s’était rendue lors
son aile et mieux nous guider »,            d’abord vos classes                        d’une année sabbatique qui a
souligne celle que le ­Journal de
­l’assurance avait nommé l’une
                                            dans d’autres firmes.                      duré… six ans ! ­En pleine pé-
                                                                                     riode   de bouleversement poli-
 des « 50 femmes d’influence                 – Christine Lengvari                    tique,  survenu   avec la libération
dans l’industrie de l’assurance                                                      de   N
                                                                                          ­ elson   M
                                                                                                    ­ andela  en février
vie du ­Canada », en 2014. Un                                                        1990,   C
                                                                                             ­ hristine L
                                                                                                        ­ engavari a mis
rôle qu’elle prend aujourd’hui                                                       en   place   un  organisme    à  but
plaisir à jouer, en particulier auprès des jeunes femmes   non  lucratif afin de recueillir des fonds,  au moyen   d’une
qui souhaitent faire carrière dans l’industrie financière, loterie, pour financer des projets de création d’emplois
voire même dans d’autres sphères d’activité.               dans des communautés défavorisées du ­Zululand.

« ­Quand j’ai fait mon ­MBA, il y avait seulement 10 % de     Aujourd’hui, elle siège au conseil exécutif montréalais du
femmes. Puis, quand j’ai commencé à travailler dans           ­Forum international des femmes (IWF), de même qu’au
l’industrie financière, c’était un milieu composé princi-      ­Comité des relations gouvernementales et au groupe
palement d’hommes et j’ai souvent senti qu’on ne me             de ­Politique ­Fiscale de la ­Conference of ­Advanced ­Life
prenait pas au sérieux. Les temps ont changé, mais              ­Underwriting (CALU).
il reste encore du chemin à faire », constate celle qui
préside l’Alumni ­Women and ­Leadership program de                      Initialement publié sur le site web de ­Finance
l’Université ­Concordia et s’implique particulièrement                           et ­Investissement, en novembre 2017
auprès des étudiantes de l’Université C   ­ oncordia.

                                                                              FEMMES
                                                                          FEMMES      et services
                                                                                 ET SERVICES      financiers : :faire
                                                                                               FINANCIERS        fairecarrière
                                                                                                                       carrièreetetmieux servir 18
                                                                                                                                   mieuxservir   18
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