Comité Consultatif International du Coton - ICAC
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Juin 2019 Volume XXXVII, No 2 The ISSN 1022-6303 ICAC Recorder Comité Consultatif International du Coton Table des matières • Éditorial...........................................................................................................................................................3 • Stimuler les rendements en Afrique : Quelles technologies fonctionnent ?................................................4 • La tâche difficile de l’évaluation de l’impact : Cadre d’évaluation et résumé des résultats de la COMPACI...............................................................................................................................................18 • Promotion des produits dérivés du coton en Afrique orientale et méridionale : Leçons tirées d’un projet d’assistance technique des Nations Unies.......................................................................................22 • Progrès des producteurs de coton éthiopiens vers la durabilité................................................................27
The ICAC Recorder (ISSN 1022-6303) est publié quatre fois par an par le Secrétariat du Comité consultatif international du coton, 1629 K Street, N.W., Suite 702, Washington, DC 20006, Etats-Unis. Rédacteur en chef : Dr Kashav Kranthi . Prix d’abonnement : 220 USD (par courrier). Copyright © CCIC 2019. Aucune reproduction n’est autorisée en totalité ou en partie sans le consentement exprès du Secrétariat.
The ICAC Recorder, Juin 2019 3 Mars 2018 Volume XXXVI, No 1 The ICAC Éditorial Recorder Comité Consultatif International du Coton Le volume de juin 2019 du ICAC RECORDER est le dernier numéro de la série d’articles en quatre volumes consacrée exclusive- ment à « Cette fois pour l’Afrique ». J’ai apprécié tout le temps passé à travailler sur ces articles, car ils reflètent l’espoir. Cette édition comporte quatre articles. Le professeur Serunjogi et ses collègues font une analyse incisive de presque tous les effets interactifs dans le système de production du coton afin d’établir une feuille de route pour augmenter les rendements en Afrique. Leur article est une synthèse complète des réflexions sur la sélection végétale, les pratiques de production, la lutte an- tiparasitaire, les principes de l›agronomie et les facteurs politiques qui peuvent ouvrir la voie à des rendements élevés en fibres de qualité supérieure avec des pratiques durables. La conclusion de l’article réitère la nécessité de créer un institut international de recherche sur le coton dans le cadre du Groupe consultatif pour la recherche agricole internationale (CGIAR, pour son sigle en anglais). M. Kris Terauds décrit les initiatives du projet de la CNUCED sur la « Promotion des sous-produits du coton en Afrique orien- tale et méridionale ». Le projet renforce les capacités des ressources en Afrique et cherche de nouvelles possibilités d’ajouter de la valeur aux sous-produits du coton, tels que les semences et les tiges de coton, afin d’accroître les possibilités de revenus des agriculteurs et des entrepreneurs, en particulier dans les zones rurales, pour un secteur cotonnier globalement florissant. M.Table Terauds des matières conclut « [qu]’il est possible d’établir des entreprises de transformation rentables en Afrique pour certains sous-pro- • Éditorial ..........................................................................................................................................................3 duits• du coton, Pratiques de production tels que– Extraits cotonnière le coton des données absorbant ainsi que les briquettes et granulés de biomasse... Générer des revenus supplémentaires globales, 2017 ..............................................4 dans• la chaîne de valeur du coton Compte rendu et recommandations de la 13 réunion du réseau de l’ICAC sur le coton pour peut aider à augmenter les prix du coton-graine payés aux producteurs et inciter ces derniers à e les régionsde la Méditerranée et du Moyen-Orient .................................................................................15 produire plus de coton ». Mme Daniela Jann et M. Tobias Bidlingmaier présentent les résultats d’un mégaprojet dans le cadre • Annonces......................................................................................................................................................27 de l’Initiative pour la compétitivité du coton africain (COMPACI), qui a été opérationnel dans 12 pays de 2009 à 2016, en deux phases avec l’objectif global de promouvoir la culture durable du coton et l’amélioration des conditions de vie des petits ex- ploitants agricoles en Afrique. Les entreprises partenaires collaboratrices de COMPACI ont formé près d’un million de petits exploitants agricoles aux techniques agricoles durables en Afrique subsaharienne, atteignant 25 à 30 % des cotonculteurs. Le projet a réussi à convaincre 80 % des agriculteurs de la COMPACI d’appliquer les bonnes pratiques agricoles. Zerihun Desalegn décrit les interventions pilotes pour une production durable du coton, réalisées dans le cadre d’un projet intitulé « Initiative pour un coton durable en Éthiopie (SCIE, pour son sigle en anglais) » qui a établi une analyse de rentabilité pour la production de coton de bonne qualité par des moyens durables dans le but d’accroître la rentabilité. Les quatre articles de ce volume et tous les articles des trois volumes précédents sont analytiques et expriment des idées prometteuses pour le coton en Afrique. Dans ces articles, les chercheurs ont examiné les défis et les problèmes, et ont expri- mé leurs points de vue sur les stratégies possibles pour un changement positif. La majorité des articles présupposent que les faibles rendements et la sous-utilisation du coton et de ses sous-produits sont les plus grands défis en Afrique. Environ 88,0 % du coton brut est exporté d’Afrique. Au lieu d’être exportées, si les fibres sont transformées localement, le coton africain a le potentiel de fournir des emplois supplémentaires à 5,5 millions de personnes et de générer des revenus d’exportation pour une valeur de 30 à 90 milliards de dollars américains. Les produits dérivés du coton sont sous-utilisés et pourraient générer des revenus d’une valeur d’environ 400 millions de dollars US et créer des emplois supplémentaires. Malheureusement, l’Afrique n’a pas exploité la fibre de coton ni les produits dérivés du coton pour en tirer une valeur ajoutée, des emplois ou des revenus commerciaux. Ce n’est pas comme s’il n’y avait pas eu de tentatives. Il y a eu de nombreux projets et plusieurs grandes initiatives pour améliorer les moyens d’existence des producteurs de coton et du secteur cotonnier africain. Il n’en reste pas moins qu’en dépit de tous ces efforts, les rendements en Afrique restent les plus bas du monde et ont stagné au cours des 40 dernières années. Les rendements sont-ils destinés à être faibles pour toujours ? La réponse dépend de la volonté de l’Afrique d’expérimenter et d’essayer. Un chercheur africain m’a fait remarquer un jour que « les rendements du coton ne peuvent être augmentés qu’avec les technologies haute-fidélité (hi-fi) et que l’Afrique ne peut pas se les permettre ». Il est intéressant de noter que les rendements dans le monde entier ont augmenté simplement en améliorant « l’indice de récolte », qui dépend de la relation « source- puits » de l’eau et des nutriments. L’amélioration de l’indice de récolte implique de simples changements dans la sélection variétale et une agronomie adaptée pour assurer un bon ensoleillement et une utilisation efficace de l’eau et des nutriments par les parties fruitières de la plante et moins de déchets dans la biomasse improductive. Ces concepts ont été renforcés dans les arguments avancés dans plusieurs des articles des quatre volumes. Ces idées devraient servir de base aux chercheurs africains pour expérimenter et essayer d’apporter un changement – un changement pour le mieux. En effet, là où il y a une volonté, il y a un moyen. L’Afrique a besoin de la volonté scientifique et d’un environnement politique favorable pour qu’une percée soit possible.
4 The ICAC Recorder, Juin 2019 Mars 2018 Volume XXXVI, No 1 The Stimuler les rendements en Afrique : Quelles ICAC technologies fonctionnent ? Recorder Comité Consultatif International du Coton Serunjogi Lastus Katende, Jolly K. Sabune (Mme) et Ben Anyama, Organisation de développement du coton (CDO), BP 7018, Kampala, E-mail : cdo@cdouga.org Michael A. Ugen, Institut national de recherche sur les ressources semi-arides (NaSARRI), PO Box 56 Soroti, E-mail : director@nassari.go.ug. Texte complet d’une présentation faite lors de la 6 e session optionnelle, durant la 77 e Réunion Plénière du Comité consul- tatif international du coton (ICAC), Abidjan, Côte d’Ivoire, du 2 au 7 décembre 2018 Introduction été produites par vingt pays d’Afrique subsaharienne sur une superficie de 4,43 millions d’hectares, avec un rende- Les estimations de l’ICAC pour la campagne 2018/19 ment moyen de 324 kg/ha. Toutefois, 68 % de la produc- montrent que les rendements en fibres des 75 pays pro- tion provenait de 60 % de la superficie africaine concen- ducteurs de coton varient entre 118 kg/ha au Tchad et trée dans cinq pays d’Afrique de l’Ouest : Bénin, Mali, 1 848 kg/ha en Australie. L’Australie, Israël, la Turquie, la Table des matières Burkina Faso, Côte d’Ivoire et Cameroun. En Afrique sub- Chine, la Russie, le Mexique, le Brésil et la Grèce ont enre- • Éditorial ..........................................................................................................................................................3 saharienne, l’Afrique du Sud arrive en tête avec 955 kg/ gistré les • Pratiques rendements de production cotonnière – les Extraitsplus des données élevés globales, 2017 du monde en 2018, ..............................................4 • Compte rendu et recommandations de la 13 réunion du réseau de l’ICAC sur le coton pour e ha, suivie par l’Éthiopie avec 657 kg/ha, le Cameroun avec et ont été les huit pays les plus performants au monde les régionsde la Méditerranée et du Moyen-Orient .................................................................................15 • Annonces......................................................................................................................................................27 473 kg/ha, la Côte d’Ivoire avec 452 kg/ha et le Bénin (Figure 1). Le rendement moyen de ces pays était de avec 418 kg/ha. Tous les autres pays d’Afrique ont récolté 1 562 kg/ha. En 2018, 1,44 million de tonnes de fibres ont apter-1 moins de 350 kg/ha. Figure 1. Yield (Kg/ha) in main cotton growing countries 2018 CHAD KENYA TANZA NIA NIGERIA MOZAMBIQUE MALAW I CENT. AFR. REP. TOGO ZIMBABWE BURKINA FA SO SENEGAL UGANDA GHANA MALI AFGHANISTAN LAOS* VENEZ UELA ZAMBIA PA RA GUAY INDIA BENIN COTE D'IVOIRE CA MEROON TAJ IKISTAN TURKM ENISTA N SUDAN PA KISTAN MYA NMA R ARGENTINA KA ZAKHS TAN AZERBAIJAN IRA N UZ BEKISTAN ETHIOPIA BANGLADESH EGYPT PERU KYRGYZS TAN COLOMBIA SPAIN SYRIA US A SOUTH AF RICA EU-27 GREECE BRA ZIL MEXICO CHINA TURKEY IS RAEL AUS TRALIA 0 200 400 600 800 1000 1200 1400 1600 1800 2000 Figure 1. Rendement (kg/ha) dans les principaux pays producteurs de coton en 2018
Chapter-1 The ICAC Recorder, Juin 2019 5 Figure 2. Cotton Growing Countries in Africa Toutefois, en novembre 2018, les estimations des rende- ments en fibre de l’Ouganda étaient de 363 kg/ha, alors que le rendement réel pour la campagne 2017 était de 340 kg/ha (Rapports annuels du CDO et www.cdouga.org). En 2018, les rendements du coton les plus faibles au monde (fourchette de 118 kg/ha à 274 kg/ha ; moyenne de 222 kg/ha) ont été obtenus dans onze pays d’Afrique – Burkina Faso, Tanzanie, Nigéria, Zimbabwe, Togo, Mo- zambique, Malawi, Tchad, Kenya, Sénégal et République centrafricaine – qui ont cultivé du coton sur une superfi- cie totale de 2,1 millions d’hectares pour ne produire que 465 310 tonnes de fibres. Ainsi, il est clair que les rende- ments du coton en Afrique sont extrêmement bas compa- rés à ceux d’autres régions du monde. L’ICAC (2018 c) déclare : « Les rendements moyens en fibre ont été d’environ 350 kg/ha en Afrique pendant plus de trois décennies, et cela doit changer ». Tout en attribuant la faible production africaine de coton à de faibles rende- ments, le CIRAD (2018) a déclaré que « les rendements du coton africain sont parmi les plus bas au monde, mais le continent dispose d’un potentiel de production énorme ». Figure 2. Pays producteurs de coton en Afrique Le coton, qui est de loin la matière première renouvelable la plus importante dans l’industrie textile mondiale, est rendements cotonniers en Afrique devrait invariablement principalement cultivé par plus de 3,5 millions de petits aller de pair avec l’augmentation de la qualité des fibres. exploitants agricoles en Afrique. Le secteur cotonnier est également cité comme l’une des sources les plus impor- Déterminants du rendement tantes d’emploi rural et de revenu monétaire en Afrique (CHA, 2018). cotonnier Les composants génétiques, agronomiques et environne- Le CIRAD (2018) a élaboré encore plus sur l’importance mentaux et leurs interactions jouent un rôle important du coton dans les économies des pays africains : « plus de dans le rendement. Il est nécessaire de diagnostiquer les deux millions de ménages ruraux d’Afrique subsaharienne facteurs critiques responsables des faibles rendements en dépendent de la production de coton pour gagner leur Afrique afin d’identifier des solutions pragmatiques pou- vie. Au total, 37 pays africains sur 55 produisent du co- vant conduire à une amélioration des rendements. ton (Figure 2). Dans de nombreux pays, le coton est une culture essentielle qui représente une part importante du Les principaux facteurs qui déterminent les rendements PIB ou des exportations totales. Pourtant, pris dans son cotonniers sont : ensemble, l’Afrique est relativement un petit producteur • Le potentiel génétique d’une variété utilisée dans la mondial ; elle ne contribue qu’à 6 % de la production mon- production du coton, diale de coton en utilisant 13,5 % de la superficie mon- • L’interaction entre la génétique et l’environnement diale cotonnière. De toute évidence, la principale raison de (GXE), et la faible production de coton en Afrique est la faiblesse des rendements ». • Les technologies de production ou pratiques agrono- miques permettant de concrétiser le potentiel géné- Il est donc important d’identifier les facteurs respon- tique de la variété. sables des faibles rendements cotonniers et d’identifier les moyens et stratégies permettant d’accroître les rende- Le potentiel génétique d’une variété pour un rendement ments en Afrique. Des rendements élevés résultant d’une plus élevé et pour tout autre trait important du point de utilisation optimisée des intrants peuvent améliorer la vue économique, tel que la protection des plantes, la résis- durabilité des chaînes d’approvisionnement du coton, tance à la sécheresse, la tolérance aux herbicides ou l’effi- contribuer au bien-être des populations africaines dans le cacité d’utilisation des intrants, peut être amélioré soit par secteur cotonnier et avoir le potentiel d’améliorer les éco- la sélection conventionnelle, soit par le biais de technolo- nomies africaines en général. Ce document examine les gies reposant sur la biotechnologie. Il existe toutefois un options technologiques pratiques pour augmenter les ren- groupe de technologies relativement contemporaines ou dements en Afrique. Il va sans dire que l’augmentation des nouvelles et/ou de types innovants, appelé dans ce docu- ment « néo-technologies ».
6 The ICAC Recorder, Juin 2019 • Les composants environnementaux, d’autre part, in- africaines de coton comprennent les facteurs suivants : cluent entre autres : les quantités et les types de pré- • Climat idéal pour le coton, avec un bon ensoleillement cipitations, la fertilité du sol, les régimes de tempéra- et des précipitations ; ture, les insectes nuisibles, les maladies, les némato- des et leurs épidémies. • De bons sols et probablement meilleur que ceux de nombreuses autres régions du monde où le coton est • Le diagnostic des effets d’interaction précis entre les cultivé ; technologies de production et l’environnement sur les rendements et les causes probables des faibles rende- • Nouvelles technologies qui ont été développées en ments pourrait servir de base à la conception de stra- Afrique et atteignent de nombreuses exploitations ; et tégies efficaces pour l’amélioration des rendements. • Agriculteurs assidus appliquant leurs meilleures com- Les faibles rendements en Afrique sont probablement dus pétences en gestion pour une production accrue. aux deux facteurs suivants : Par conséquent, il serait pertinent de demander ; « Quelles • L’incapacité de la filière coton à développer des tech- sont les contraintes prohibitives responsables des faibles nologies appropriées pour faciliter les hautes perfor- rendements cotonniers en Afrique malgré les opportu- mances des cultures de coton dans les environnements nités favorables existantes ? Comment peut-on résoudre dominants, et ces contraintes ? et « pour augmenter les rendements en Afrique, quelles technologies pourraient fonctionner ? » • L’incapacité à assurer une forte adoption et une ap- plication appropriée des technologies par les produc- British Cotton Growing Corporation (BCGC) teurs de coton. Les conditions favorables à la production cotonnière énu- Les augmentations souhaitables des rendements coton- mérées par l’ICAC (2018), qui devraient favoriser des ren- niers et de la qualité des fibres résultant des effets de l’in- dements élevés en Afrique, remontent aux premières re- teraction entre les génotypes du coton et les intrants de cherches sur le coton qui ont été appuyées dans certains production ont été décrites par Serunjogi et al. (2014) en pays africains par les anciens dirigeants, par exemple les insistant sur la nécessité d’une utilisation équilibrée des activités de la British Cotton Empire en Afrique (Figure 3). intrants dans la production cotonnière. L’utilisation ap- Celles-ci ont été succédées plus tard par les activités de la propriée des intrants au cours des étapes critiques de la British Cotton Growing Corporation (BCGC) (Anon. 2018, production cotonnière, comme le recommande le secteur b) qui ont largement contribué à façonner les technologies de la recherche et développement (R et D), jouerait un rôle de production actuelles dans la plupart des pays produc- crucial pour atteindre l’ampleur souhaitée pour le rende- teurs de coton en Afrique. Quelques exemples sont énu- ment en fibres et la qualité de la fibre. Sabune et Serunjogi mérés ci-dessous : (2017) ont décrit les augmentations de rendement comme • La station de recherche sur le coton de Namulonge a des avantages découlant des régimes qui ont facilité le été créée par le BCGC en 1949 en Ouganda. La station transfert des technologies de production du coton en Ou- de recherche qui a été d’abord créée sous le nom de ganda. Les technologies de production ne doivent pas res- Station de recherche de Kawanda a ensuite été trans- ter enfermées dans les rayons de la R et D ; Il est urgent de férée à Bukalasa (aujourd’hui un Institut agricole), mettre au point des mécanismes intégrales mais simples puis finalement à Namulonge. Les trois sites étaient de transfert de technologie en Afrique. situés dans la région centrale de l’Ouganda. Namu- longe est finalement devenu le siège des activités Améliorer les rendements de la BCGC en Afrique, jusqu’en 1972, moment où le cotonniers en Afrique : Quelles personnel de la société est parti précipitamment en raison de l’anarchie qui prévalait alors en Ouganda. technologies peuvent fonctionner ? D’autres programmes de recherche sur le coton ont Conditions de production du coton en été lancés au début des années 1930 à Serere, dans Afrique le nord-est de l’Ouganda (Serunjogi et al ; 2001), pour répondre aux besoins technologiques en matière de Alors que les rendements du coton ont été stagnants et production cotonnières des régions semi-arides du faibles pendant des décennies en Afrique, on a observé nord et de l’est. l’existence d’une technologie de production appropriée et de conditions propices aux rendements élevés dans le • Les succès de la technologie de production qui ont même domaine de production. permis de produire des rendements cotonniers élevés sont attribuables aux échanges d’informations sur les En 2018, l’ICAC a perçu cette coexistence de faibles rende- technologies de production, de matériels de sélection ments, malgré des conditions favorables, comme un « pa- et des stocks de matériel génétique, entre les pays afri- radoxe », dans la mesure où les conditions de production cains sous l’auspice de la BCGC. Par exemple, on sait
Figure 3.The British’s Cotton Corporation’s Director of Research Station, Dr. Hutchinson, The ICAC with workers Recorder, examining cotton plants for signs of Juin 2019 7 diseases at Namulonge, Uganda in the 1950s (www.iwn.org.uk). ganiser la recherche cotonnière en Afrique au niveau technique (Seine et Bachelier, 2017, a & b) pour réa- liser une percée. Il s’agit de permettre aux pays afri- cains producteurs de coton de s’adapter aux nouvelles exigences mondiales en matière de rendement et de qualité des fibres dans les chaînes de valeur du coton compétitives, un scénario différent de celui qui préva- lait à l’époque de la BCGC. Les technologies actuelles de production cotonnière en Afrique Les technologies de production cotonnière en vogue sont similaires dans beaucoup des pays africains qui ont héri- té d’une structure commune de recherche de la BCGC. Les technologies sont classées selon les catégories suivantes : Figure 3. Le Dr Hutchinson, Directeur de la station de Amélioration variétale recherche de la société cotonnière britannique, avec des Les variétés crées en Afrique ont été développées, testées ouvriers examinant les plants de coton à la recherche et sélectionnées dans les zones de production prévues de signes de maladie à Namulonge (Ouganda) pour les caractéristiques suivantes : une période de matu- dans les années 1950 (www.iwn.org.uk) rité précoce, des rendements améliorés du coton-graine et du filé (complétés par un rendement élevé en égrenage, que les stocks de coton Albar qui étaient recherchés GOT), des fibres de haute qualité, une résistance aux pa- pour leur résistance à la fameuse maladie de la tâche rasites, par exemple en sélectionnant une des plantes à angulaire causée par Xanthomonas axonopodis malva- pilosité élevée qui confère une résistance aux insectes su- cearum en Afrique de l’Est provenaient de sélections ceurs comme les jassides (Empoasca sp), la résistance aux faites à partir d’une variété appelée « Allen » obtenue maladies et la tolérance à la sécheresse. du Nigéria. L’Allen nigérian, a été à son tour importé d’Ouganda en 1912. Toutefois, on pense que lorsqu’il Multiplication et traitement des semences était au Nigeria, Allen s’est croisé naturellement avec Le développement variétal et la production de semences une espèce cotonnière vivace, Gossypium hirsutum reposent sur des procédures organisées et normalisées race punctatum, qui lui a conféré les gènes de résis- par l’ICAC. Lors de la 72 e réunion plénière de l’ICAC tenue tance à la tâche angulaire. Les accessions résistantes à Carthagène (Colombie) en 2013, les pays membres de qui en ont résulté ont été connues sous le nom d’« Al- l’ICAC ont approuvé la normalisation de la nomenclature bar », où « Al » signifie « Allen » et « bar » signifie la « ré- des semences de coton pour leur adoption par les gouver- sistance à la tâche angulaire /bras noir » (Serunjogi nements membres. La nomenclature comprend les niveaux et al ; 2001 et Orawu et al ; 2017). Les stocks d’Albar suivants : semence d’obtenteur, semence de base, semence ont jeté les bases des programmes de sélection ac- certifiée, semence enregistrée et semence commerciale tuels pour le développement de variétés de coton en (ICAC 2013). Les semences sont transformées, délintées, Afrique, en particulier en Ouganda, et continuent de traitées avec des produits chimiques contre les ravageurs jouer un rôle crucial dans les programmes de sélec- et les maladies, puis emballées et étiquetées pour indiquer tion, principalement en raison de leur résistance à la le nom de la variété, la période spécifique de plantation, les maladie de la tâche angulaire, ainsi que de leur adap- paquets agronomiques sur l’espacement afin d’obtenir les tabilité à une large gamme de variations environne- densités végétales souhaitées et sur la lutte antiparasitaire. mentales dans les zones de production et de la bonne qualité de leur fibre. Paquets agronomiques Les pratiques de production culturale incluent des détails • Essentiellement, les efforts déployés dans le cadre sur la préparation du sol, la préparation du lit de semence, des programmes actuels de recherche sur le coton la date appropriée de semis, la gestion de l’humidité du en Afrique continuent de s’appuyer sur les résultats sol, la géométrie de la plantation, la gestion de la fertilité obtenus à l’époque de la BCGC et de ses institutions du sol, la gestion des plantes adventices, la régulation de affiliées en matière de recherche cotonnière, qui ont la croissance des plantes et de la cueillette. Le suivi de la été appliqués ailleurs dans des pays africains alors gestion des résidus de culture permet de s’assurer que les bénéficiaires. Certaines « écoles de pensée » estiment résidus sont incorporés dans le sol en temps voulu pour toutefois qu’il est nécessaire de renouveler et de réor- fournir des éléments nutritifs à la culture suivante. Les
8 The ICAC Recorder, Juin 2019 dates de semis sont déterminées sur la base des prévisions Le Nigéria a donc suivi les six pays africains — Afrique du de la mousson afin de garantir une humidité adéquate du Sud, Soudan, Swaziland, Kenya, Malawi et Éthiopie — qui sol pour les plantules et au moins 500 mm de pluie pour ont précédemment approuvé la production de coton bio- la culture (Serunjogi et al., 2001). La préparation du sol, la tech en vertu de leur législation nationale (ISAAA, 2018). préparation du lit de semence, les semis et les opérations Kranthi (2018a) a décrit l’état d’avancement des approba- de désherbage sont effectués avec une mécanisation mini- tions gouvernementales sur l’utilisation du coton biotech male à l’aide d’outils tirés par des bœufs (Figure 4). dans les pays africains. À ce jour, le coton Bt biotech résis- Lutte intégrée contre les ravageurs (LIR) tant aux insectes a été approuvé dans six pays d’Afrique : Afrique du Sud, Burkina Faso, Soudan, Nigéria, Swaziland Figurenuisibles Les insectes 4 Using Animal et les Draft maladies sont Power for Cotton gérés à l’aide et Éthiopie. En outre, le caractère tolérant aux herbicides Seed Bed de stratégies Preparations de lutte intégrée. Cesinapproches Ugandaincluent, a également été approuvé en Afrique du Sud. Le Malawi, entre autres, le recours à la lutte biologique, aux biopes- le Kenya et le Cameroun ont mené des essais de coton Bt sur plusieurs sites, tandis que le Cameroun envisageait d’approuver des caractères to- lérants aux herbicides. En Ouganda, le « projet de loi national sur la biotechnologie et la biosécurité de 2012 » a été déposé au Parlement en octobre 2017. Il a été renvoyé à la Commission parlemen- taire de la science, de la technologie et de l’innovation pour être peaufiné. Le projet de loi remanié a été déposé de nouveau et adopté par le Parlement en novembre 2018. Il a été rebaptisé « Projet de loi sur la réglementation du génie génétique, 2018 » et a pour mandat de fournir un cadre régle- mentaire pour le développement et l’appli- cation en toute sécurité de la biotechnolo- gie et la dissémination d’organismes géné- tiquement modifiés (OGM), Anon (2018a). La nouvelle loi devait être approuvée par le Président de l’Ouganda avant la fin du mois Figure 4. Utilisation de la force de traction animale pour de février 2019 avant d’être pleinement les préparations de lits de semences de coton en Ouganda opérationnelle en vertu des lois ougan- daises, Anon 2019. ticides et aux insecticides chimiques sur la base de seuils économiques afin de garantir que les actions de lutte anti- Perspectives de l’ICAC pour parasitaire ont le moins d’effets perturbateurs sur les or- ganismes de lutte biologique présents à l’état naturel (Se- accroître les rendements en Afrique kamatte et al. 2003). Les options de lutte intégrée exigent • En 2018 et 2019, l’ICAC a publié trois numéros spé- également que les agriculteurs suivent les recommanda- ciaux de « The ICAC Recorder », qui contiennent les tions de dilution appropriée des pesticides, respectent les points de vue et les idées de divers acteurs de la com- précautions de sécurité, utilisent de manière appropriée munauté cotonnière mondiale sur la manière d’aug- les technologies de pulvérisation avec des pulvérisateurs menter les rendements cotonniers en Afrique (ICAC à dos, motorisés ou montés sur tracteur avec des types de 2018b, ICAC 2018c, ICAC 2019). Dans l’édition de buses appropriés. septembre 2018 (ICAC 2018b), l’éditorial a fait un excellent résumé sur les faibles rendements qui ont Coton biotech entaché la production cotonnière africaine. Les rende- Plusieurs pays africains ont rationalisé les procédures offi- ments ont stagné à 350 kg/ha au cours des trois der- cielles en matière de biosécurité afin de réglementer l’éva- nières décennies, contre plus de 1 500 kg/ha de fibre luation et l’approbation du coton biotech pour des carac- dans cinq pays à forte rendement cotonnier : Austra- tères économiquement importants, tels que la résistance lie, Chine, Mexique, Brésil et Turquie. aux insectes nuisibles, aux maladies et aux herbicides. En • L’éditorial a souligné la nécessité de modifier l’archi- août 2018, le Nigéria est devenu le septième pays africain tecture des plantes et la géométrie des plantes pour à approuver officiellement la production de coton biotech. une forte densité des plantes en Afrique et en Inde,
The ICAC Recorder, Juin 2019 9 une idée qui pourrait conduire à une percée des ren- - Promotion de l’agriculture de conservation pour dements. La géométrie de plantation proposée pour- améliorer la santé des sols par rapport aux systèmes rait permettre à la culture d’améliorer efficacement conventionnels de travail du sol en vigueur en Afrique son utilisation de la lumière du soleil, de l’eau et des et responsables de la dégradation des sols. intrants, et de produire des rendements élevés en - Programmes de formation au transfert de technolo- peu de temps avec moins d’intrants et à faible coût. gie pour l’éducation et la sensibilisation des agricul- Ces idées sont basées sur les preuves dérivées des teurs. réussites australiennes, chinoises, mexicaines, brési- liennes, turques et américaines. • Parmi les autres documents complets et « incontour- nables » sur les idées pour augmenter les rendements • L’éditorial a mis en évidence la nécessité d’identifier cotonniers en Afrique publiés dans le ICAC Recorder les principes de base sur lesquels reposent les chan- en septembre 2018 (ICAC 2018b), figurent ceux rédi- gements technologiques nécessaires pour augmenter gés par Farid Uddin et al, et Sabesh. les rendements. Les principes seraient ensuite assi- milés et utilisés dans le développement de concepts, • En outre, dans le même numéro du ICAC Recorder stratégies et technologies qui devaient être testés et de septembre 2018 (ICAC 2018b), Kranthi (2018b) validés dans les environnements locaux d’adoption en a donné un aperçu inestimable de la façon dont l’ar- Afrique. chitecture compacte des plants de coton et la gestion du couvert végétal permettraient d’augmenter les • Certaines des observations ci-dessus ont également rendements cotonniers en Afrique. Il a expliqué les été consignées dans un article intitulé « Perspectives mérites de scénarios en Australie, au Brésil et aux sur la recherche cotonnière et idées pour l’Afrique : États-Unis dans lesquels les sélectionneurs cherchent actes et recommandations de la XIVe réunion du Fo- à développer des cultivars d’architecture compacte rum du coton en Afrique méridionale et orientale qui conservent un optimum de 15 à 20 capsules par (SEACF, pour son sigle en anglais) » qui contenait les plante, mais avec une densité de plantation de 80 000 vues exprimées lors de la réunion du SEACF à Harare, à 110 000 plantes par hectare. Des rendements élevés au Zimbabwe, du 4 au 6 juillet 2018, sur le thème des de 1 000 à 2 500 kg/ha de fibres sont obtenus dans de « Meilleures pratiques mondiales pour améliorer la tels cas. Kranthi a plaidé en faveur de l’adoption d’une production de coton en Afrique » (ICAC 2018b). architecture compacte du cotonnier et une gestion du • Vous trouverez ci-dessous une liste abrégée des re- feuillage afin d’accroître les rendements cotonniers commandations émanant de la réunion du SEACF : dans les pays d’Afrique orientale et méridionale (voir le paragraphe sur les Points de vue des auteurs pour - La sélection de variétés de coton « efficaces » en ma- améliorer les rendements cotonniers en Afrique dans tière d’utilisation de nutriments et d’eau et avec une ce présent document). Il a décrit les différents scéna- architecture compacte pour permettre la mécanisa- rios en Afrique et en Inde où les obtenteurs ont déve- tion des opérations de production. loppé des types de plantes qui produisent un grand - Soutien accru de la recherche cotonnière et renfor- nombre de capsules allant de 80 à 150 capsules par cement des institutions de recherche sur le coton. plante. De telles plantes ont besoin d’un grand espa- - Formulation de technologies de production axées cement pour leurs habitudes de croissance hautes et sur la demande, avec la participation des agriculteurs larges. Bien qu’ils produisent de nombreuses capsules, pour accroître leur utilisation. ces cultivars de coton mettent plus de temps à arriver - Concevoir des stratégies participatives avec les agri- à maturité et, s’ils sont terminés prématurément, ils culteurs pour protéger la culture cotonnière contre donnent de faibles rendements. Leurs « fenêtres cri- les aléas climatiques et les changements climatiques. tiques » (de la floraison aux stades de formation des capsules) varient de 80 à 120 jours par rapport aux - Organismes gouvernementaux et privés facilitant cultures à haute densité de courte durée de 40 à 80 l’accès des agriculteurs aux technologies de protec- jours. Ainsi, la culture du coton en Afrique ou en Inde a tion des cultures contre les parasites et les maladies. besoin de plus d’eau et de nutriments pendant les lon- - Production organisée et disponibilité de semences gues périodes critiques pour obtenir des rendements de plantation certifiées de bonne qualité. élevés. - Programmes de soutien pour la disponibilité du- • Dans le numéro spécial de décembre 2018 de « The rable d’intrants tels que les engrais, les pesticides et ICAC Recorder », Hezhong Dong et Michel Fok (2018), les machines. ont décrit comment les techniques de culture légère et - Des marques de coton durables dans les systèmes simplifiée (LSC, pour son sigle en anglais) pourraient de production pluvial afin d’obtenir des prix plus éle- améliorer les rendements des systèmes de production vés sur les marchés mondiaux. agricole à petite échelle en Afrique. Cette technique
10 The ICAC Recorder, Juin 2019 comprend l’utilisation de petites machines agricoles, l’efficacité des technologies actuellement utilisées et pro- de matériaux et d’équipements conçus pour réduire poser de nouvelles stratégies pour la recherche sur le coton ou remplacer les opérations manuelles, mais simpli- en Afrique, le cas échéant. fiée par rapport aux machines lourdes utilisées dans les technologies de culture intensive, telles que celles Utilisation de technologies « néo- déployées en Chine. Les techniques comprennent innovantes » et abordables des semoirs monograines de précision, le contrôle des branches végétatives sans élagage, la fertilisation Biopesticides unique, la fertirrigation et le groupement de maturité La formulation d’extraits de bio-pesticides abordables, pour des récoltes uniques. sûrs et efficaces à partir de matières végétales disponibles • Dans le numéro spécial de décembre 2018 de l’ICAC localement, comme les arbres et les herbes ; des feuilles, Recorder (ICAC 2018c), Blaise Desouza a donné une des écorces, des fruits et des amandes ou des graines ont explication détaillée de la façon dont l’adoption des été essayés en Ouganda. Un laboratoire de biopesticides a « meilleures pratiques de gestion (MPG) » dans la été construit et inauguré en août 2017, www.cdouga.org, catégorie des petites exploitations et des ressources (Figure 5). Il est stratégiquement situé à l’Institut national limitées de l’agriculture, pouvait augmenter les rende- de recherche sur les ressources semi-arides (NaSARRI). Le ments cotonniers en Afrique. L’agriculture de conser- NaSARRI (www.nasarri.go.ug) est chargé de la recherche vation (AC) est l’une des composantes majeures des cotonnière dans le cadre des programmes de recherche MPG, essentielle à l’amélioration de la productivité. élargis de l’Organisation nationale de recherche agricole L’AC s’articule autour de trois principes de base, à sa- (NARO) (www.naro.go.ug). Le laboratoire de biopesticides voir : minimiser le travail du sol, y compris une cou- a été construit sous les auspices du « Programme d’assis- verture permanente et une rotation des cultures. Il a tance technique » du coton Cotton-TAP-Africa-India), avec été souligné que la réalisation des mérites de l’AC né- l’appui du Gouvernement indien pour renforcer les chaînes cessitait de tester les technologies sur une base régio- d’approvisionnement du coton (www.cottontapafrica.org) nale, c’est-à-dire que les technologies efficaces de l’AC dans les pays africains. La phase 1 du programme a été dans un pays donné peuvent ne pas fonctionner direc- opérationnelle de mars 2012 à 2017 dans sept pays afri- tement ou nécessairement dans un autre pays sans cains producteurs de coton, à savoir le Bénin, le Burkina confirmer leur adéquation au nouvel environnement. Faso, le Mali, l’Ouganda, le Malawi et le Mali. Il est nécessaire de comprendre la situation locale (y Le laboratoire de bio-pesticides de NaSARRI est déjà en Chapter-1 compris les sols et le climat) et d’adapter les pratiques train de formuler des bio-pesticides à partir d’arbres et de l’AC aux conditions locales. d’arbustes indigènes ougandais, tels que le Lantana ca- Figure 5.Training of scientists mara, le Neem in the (Azadirachata Bio-pesticide indica), Lab l’Acajou, le Khaya Points de vue des auteurs pour at NaSARRIsenegalensis Serere, Uganda in August et le Moringa olifera. Le2017 laboratoire dispose améliorer les rendements cotonniers en Afrique Étant donné que les technologies conven- tionnelles et les systèmes de production existants n’ont pas réussi à obtenir des ren- dements élevés en Afrique (ICAC, 2018b), il est proposé que les efforts soient dirigés vers la promotion des technologies néo ou innovantes, qui ont été mises au point et qui se sont révélées efficaces dans les sta- tions de recherche africaines. Il est néces- saire d’utiliser des mécanismes appropriés de transfert de technologie pour transférer les innovations des laboratoires sur le ter- rain. Ces nouvelles approches devraient être soutenues par des arrangements ju- ridiques et institutionnels appropriés et complétées par des collaborations entre les programmes de recherche et les initiatives en Afrique. Des efforts devraient également Figure 5. Formation de scientifiques au laboratoire de biopesticides être faits périodiquement pour examiner à NaSARRI Serere, en Ouganda, en août 2017
The ICAC Recorder, Juin 2019 11 également d’un laboratoire d’analyse d’échantillons de sol les guêpes communes, les mantes religieuses, les punaises pour déterminer les besoins en engrais pour la production assassines (Pristhesancus sp.), les guêpes (Trichogram- de coton dans les différentes zones de production. Le la- ma et Telenomus sp.) et les araignées. Les agents biolo- boratoire de bio-pesticides devrait passer à la production giques comprennent également les virus bénéfiques de la commerciale de bio-pesticides afin de desservir les autres polyhédrose nucléaire, Metarhizium anisopliae, Beauveria pays producteurs de coton de la région. bassiana, Isaria sp. et Verticillium lecanii, qui infectent les Gayi et al. (2016) ont montré que des bio-pesticides tels insectes nuisibles pour le coton (Gayi, et al ; 2017). Des que la « nimbicidine », qui sont des extraits de l’arbre modalités d’élevage en masse de ces agents biologiques neem ; les feuilles, l’écorce, les fruits, les racines, les pé- devraient être mises au point pour améliorer la durabilité pins et les graines, ainsi que les extraits des graines et de de la protection des cultures par des approches peu coû- l’écorce de Khaya, permettaient de mieux lutter contre le teuses et respectueuses de l’environnement. ver de la capsule du cotonnier et d’obtenir des rendements Engrais organiques de coton-graine nettement supérieurs à ceux des pesti- cides synthétiques équivalents en Ouganda. Ces bio-pesti- L’utilisation de biofertilisants améliore considérablement cides ont été recommandés en Ouganda pour lutter contre la santé du sol de la manière la plus écologique possible. le ver de la capsule du cotonnier, à savoir le ver américain De nombreuses espèces de micro-organismes tels que le de la capsule (Helicoverpa armigera), le ver de la capsule Rhizobium, Azotobacter et les bactéries solubilisant les épineux (Earias insulana et Earias biplaga) et le ver rose phosphates (PSB) telles que le Pantoea agglomerans ou le Chapter-1 gossypiela), (Gayi et al ; 2017). de la capsule (Pectinophora Pseudomonas putida ont été couramment utilisées dans les écosystèmes du coton soit comme inoculants pour légumi- Des isolats d’un champignon Metarhizium anisopliae ont neuses, soit comme applications sur des semences et des Figure6. Plants of Tithonia sp, (left), and leaves applied in trenches été obtenus dans le laboratoire de bio-pesticides de Na- sols pour améliorer la fertilité des sols. La culture étagée between Cotton Rows, (right) to be incorporated into the soil SARRI. Le champignon est connu pour son efficacité dans du coton avec des légumineuses fixatrices d’azote telles la lutte contre les principaux organismes nuisibles, en que le soja (Glycine max L.) (Serunjogi et al ; 2002), ou les particulier les insectes lépidoptères, qui comprennent : les haricots communs Phaseolus vulgaris (Elobu et al ; 1995) légionnaires d’automne , les vers de la capsule du cotonnier et les pyrales de maïs. Des cultures pures du champignon ont été obtenues au laboratoire. Les cultures sont actuellement testées en laboratoire et sur le terrain afin d’identifier les souches les plus puissantes pou- vant être reproduites et libérées pour être utilisées dans les cultures de coton en Ouganda (Gayi, 2019. Pers com). Figure 6. Les plantes de Tithonia sp (à gauche) et les feuilles appliquées dans Figure 7. Tithonia treated cotton crop at flowering, (left) and Contrôle biologique les tranchées entre les rangées de coton (à droite) pour être plantées L’utilisation du contrôle biologique at boll opening stages, (right) fait référence à l’utilisation d’orga- nismes vivants pour lutter contre les insectes nuisibles et les agents pathogènes nocifs dans le coton. Certaines de ces techniques in- cluent l’utilisation d’insectes utiles ou d’ennemis naturels, qui sont antérieurs aux parasites du coton, par exemple les fourmis noires Lepisiota spp. qui se sont révélées efficaces dans la lutte contre les principaux insectes nuisibles du coton en Ouganda (Ogwal et al. ; 2003). Les autres insectes utiles Figure 7. Culture de coton traitée au Tithonia à la floraison (à gauche) et pour le coton sont : les coccinelles, aux stades d’ouverture des capsules (à droite)
Figure8. Pest control with a Novel Mechanical Pesticide, “Deadzone”. Chemical residues on the sprayed leaves (left) and the resultant healthy crop (right) 12 The ICAC Recorder, Juin 2019 inoculés avec Bradyrhizobium japo- nicum fixant l’azote ou une espèce appropriée de Rhizobium enrichit considérablement le sol en azote. Plusieurs stratégies ont été utilisées pour concevoir des systèmes de culture étagée comprenant les légu- mineuses afin d’assurer une fixation significative de l’azote sans aucune concurrence entre la légumineuse et le coton. Tout en améliorant la santé des sols, de nombreuses lé- Figure 8. Lutte antiparasitaire avec un nouveau pesticide mécanique, gumineuses assurent la sécurité « Deadzone ». Résidus chimiques sur les feuilles pulvérisées (à gauche) alimentaire et des revenus supplé- et la culture saine qui en résulte (à droite) mentaires. Outre la culture étagée, le couvert végétal et les engrais vert induisant la vigueur des racines du cotonnier. Il contient sont cultivées avant le semis ou entre les rangs de coton, des agents biostimulants hautement actifs provenant de puis incorporées dans le sol pour améliorer la fertilité. sources végétales naturelles qui favorisent une croissance Les cultures qui ont été testées et recommandées pour la luxuriante des plantes. Ses ingrédients actifs comprennent culture du coton en Ouganda comprennent : creuser des les vitamines B, l’acide folique et d’autres régulateurs de fèves de Macuna pruriens, de tournesol sauvage ou mexi- croissance non quantifiés (Syltie, 1985). Vitazyme a été cain, Tithonia diversifolia (Figure 6), des herbes dans le sol testé en association avec le produit chimique de prépara- avant le smis (application souterraine) ou pailler le lit des tion des semences déjà approuvé, le « Cruiser Extra Cot- graines de coton avec les herbes des deux espèces, c.-à-d. ton », utilisé pour lutter contre les maladies transmises application en surface (Elobu et al ; 2016). L’application par les graines, telles que la tâche angulaire, et connu pour de feuilles de Tithonia dans des tranchées à 5-10 cm des améliorer la vigueur des racines. Vitazyme s’est avéré ef- rangées de coton et à environ 10 cm de profondeur, là où ficace pour renforcer la vigueur des racines du cotonnier, les feuilles de Tithonia ont été enfouies au taux de 1000 ce qui a permis une pénétration plus profonde et une cou- kg/ha de feuilles, a permis d’augmenter le rendement en verture plus large des sols pour le captage de l’eau et des coton-graine (Figure 6). Les feuilles de Tithonia sp sont nutriments par les cultures de coton. En plus d’améliorer connues pour être riches en azote, phosphore, potassium, la vigueur des plantes dans l’étude, Vitazyme a permis calcium et magnésium qui contribuent à la croissance des d’améliorer les rendements en coton-graine et les carac- plants de coton. Les parcelles traitées avec Tithonia ont téristiques de la fibre par rapport aux témoins. Les meil- donné jusqu’à 2 245 kg/ha de coton-graine contre 1 796 leurs résultats ont été obtenus avec la concentration de Vi- kg/ha pour les parcelles témoins sans Tithonia. Cela re- tazyme de 5 % pour le traitement des semences, associée à présentait une augmentation de 25 % du rendement par une pulvérisation foliaire sur les cotonniers utilisant 1 l/ha rapport au témoin (Figure 7) avec une amélioration de la de Vitazyme à la pleine floraison (Elobu et al ; 2018). Des qualité de la fibre (longueur et résistance des fibres), ce produits chimiques présentant de nouveaux modes d’ac- qui permettrait d’obtenir de meilleurs prix pour la fibre, tion ont été testés dans les programmes de lutte intégrée. notamment sur les marchés internationaux. De plus, il y En Ouganda, un produit appelé « Celite 610 » (nom com- avait une augmentation des éléments nutritifs résiduels mercial : « Deadzone ») est en testé sur le coton (Figure 8). dans le sol, tels que le phosphore et le potassium, qui Celite 610 est un « insecticide mécanique » qui adhère à la pourraient profiter aux cultures suivantes : le mil (Eleu- cuticule des insectes et absorbe leurs couches lipidiques sine coracana (L) Gaertn), le maïs (Zea mays) et l’arachide ou leur cire cuticulaire. Il crée ainsi des pores dans les cu- (Arachis hypogaea L.) dans les rotations culturales (Elobu ticules qui conduisent à la dessiccation et à la mort de l’or- et al ; 2017). ganisme nuisible. Il est fabriqué à partir de terre de diato- mées constituée de diatomées, un type d’algue à carapace Régulateurs de croissance dure déposée sur les lacs d’eau douce préhistoriques et les Quelques produits chimiques régulateurs de croissance estuaires marins. Deadzone s’est avéré très efficace dans ont été testés et certains se sont révélés utiles pour stimu- la lutte contre les organismes nuisibles tels que le Lygus, ler la croissance des plantes et lutter contre les insectes la mineuse des feuilles, la cochenille, le vers rose de la cap- nuisibles. En Ouganda, un produit chimique appelé « Vita- sule, et les thrips du tabac Frankliniela fusca (Jiwei Zhu et zyme » a été testé sur du coton pendant trois campagnes. al ; 2016). Le Vitazyme est connu pour être un produit chimique
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