INRA 2018 : le nouveau système d'alimentation INRAE - Inn'ovin
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INRA 2018 : le nouveau système d’alimentation INRAE Le nouveau système d’alimentation des ruminants proposé par INRAE en 2018 a pour objectif principal d’être plus précis dans la prévision des apports et des besoins des animaux et de permettre ainsi un meilleur choix de rationnement en fonction des objectifs fixés. PRINCIPE DE BASE : L’efficacité d’une ration passe par une meilleure connaissance du fonctionnement du rumen. Le nouveau système permet de mieux prendre en compte la nature « INRA, 2018. des fourrages et des concentrés, ALIMENTATION mais aussi leur association dans DES RUMINANTS » une ration. Editions Quae, Versailles, Il intègre également une révision France, 728 p. de l’ensemble des besoins des animaux (entretien, gestation, croissance, production). © Jean-Marc Arranz (CA64)
Avant-propos Depuis la dernière version de 2007 – partiellement mise à jour en 2010 – INRAE a travaillé à la rénovation du système d’unités pour le rationnement des ruminants. Cette rénovation comprend à la fois une refonte des tables et des recommandations alimentaires pour les ruminants. L’objectif est de mieux expliquer les réponses des animaux, notamment aux changements de régimes et de pratiques alimentaires. Les nouveautés issues de la recherche scienti- fique doivent mieux répondre aux besoins des filières et des éleveurs pour : • Transformer plus efficacement les ressources, • Minimiser les rejets, • S’adapter à la demande, • Respecter la santé et le bien-être des animaux, • Au final, favoriser l’économie de l’élevage. À partir de bases de données regroupant des résultats d’es- sais INRAE et de la littérature internationale, le projet Systali a permis de mieux évaluer : • Les besoins productifs (lait & viande) et non productifs (entretien, utilisation de la ration, activité) des animaux, • Les interactions métaboliques (lien entre les apports et les besoins), • Les interactions digestives (valorisation des aliments dans une ration), • Les rejets azotés, • Les émissions de méthane entérique, • Le risque d’acidose. Dans l’objectif de vulgariser ces nouveaux principes, Inn’ovin et l’Institut de l’Élevage se proposent de détailler les nouveau- tés et/ou améliorations d’INRA 2018 pour les ruminants et plus spécifiquement pour les brebis laitières. À NOTER Le système étant bien plus complexe, le calcul manuel de rationnement n’est plus possible, mais un logiciel intégrant toutes les nouveautés (Rumin’al®) sera très bientôt disponible pour les ovins laitiers.
© EPLEFPA La Cazotte (12) Les besoins énergétiques liés à l’activité physique des brebis au pâturage mieux évalués Le rationnement des brebis laitières consiste à faire correspondre les apports de la ration avec les besoins des animaux. Les deux aspects évoluent dans le nouveau système. Évaluation des besoins Évaluation des apports des animaux de la ration Commençons par nous rassurer, les Face à ces besoins plus précis des brebis, la besoins sont toujours exprimés en UF méthode de calcul des apports de la ration a (Unité Fourragère) et en PDI (Protéines également été largement revue. Digestibles dans l’Intestin) et la capa- Première nouveauté très importante, les valeurs cité d’ingestion en UEM (Unité d’Encom- alimentaires données dans les tables sont brement Mouton). uniquement indicatives. Elles ne permettent Pour l’énergie, les principales avancées que de comparer les aliments, mais ne sont : renseignent pas sur la valeur finale de la ration. • une meilleure prise en compte des En effet, dès qu’un aliment sera utilisé seul ou besoins liés à la mobilisation et à la avec d’autres aliments dans une ration, ses reconstitution des réserves valeurs seront modifiées. corporelles, • les besoins liés à l’activité physique L’Énergie des brebis au pâturage mieux évalués. Cette différence entre la valeur "table" et la valeur "ration" s’explique notamment par le fait Pour les protéines, les besoins dits non qu’un aliment est plus ou moins bien digéré et productifs sont ceux qui évoluent le valorisé dans le rumen ou l’intestin. L’influence plus. Ils regroupent les besoins endo- de ce qu’on appelle les interactions digestives gènes, les pertes fécales et urinaires, en est la cause. Les interactions digestives mais aussi les besoins pour la pousse sont modulées par le niveau d’ingestion des des onglons, des cornes ou de la laine. animaux, la proportion de concentré de la Ils sont maintenant liés au poids vif et ration, et un nouveau critère qu’est la balance aux quantités ingérées alors qu’ils protéique du rumen. Ces éléments ont étaient uniquement liés au poids vif chacun un impact sur la digestibilité de la auparavant. matière organique de la ration (dMO) et donc sa valeur UFL.
Le niveau d’ingestion (NI) La balance protéique du rumen (BPR) C’est le critère qui a le plus d’impact sur la La BPR est une nouveauté importante digestibilité de la ration, car il est très élevé du nouveau système. En effet, le rumen en filière ovine. Exprimé en matière sèche joue un rôle central dans la digestion de ingérée en % du poids vif des animaux (cf. la ration. La flore ruminale assure la figure 1), il peut atteindre 5 ou 6 % pour les synthèse de protéines microbiennes à brebis laitières. Plus le NI sera élevé plus la partir des matières protéiques et de dMO de la ration, et par voie de consé- l’énergie fermentescible contenues dans quence sa valeur UFL, diminuera. la ration consommée. Une fois fabriquées, elles sortent du rumen pour passer dans FIGURE 1 • Influence du niveau d'ingestion sur la digestibilité de l’intestin grêle pour y être à nouveau digé- la matière organique rées puis absorbées. La ration consom- mée doit donc permettre de couvrir les besoins des microbes du rumen. La BPR est en fait le nouvel indicateur traduisant l’équilibre énergie/azote du rumen. Il se mesure en faisant la différence entre les matières azotées ingérées (en g/ kg MS) et les matières azotées qui sortent du rumen (en g/kg MS). N.B. : Il traduit l’ancien critère Rmic pour rapport microbien ((PDIN-PDIE)/UFL) auquel il est fortement corrélé. Source : INRA 2018, Alimentation des ruminants Comment interpréter le BPR ? La proportion de concentrés (PCO) BPR > 0 Quand le pourcentage de concentrés de la L’azote fermentescible est excédentaire par ration augmente, la digestibilité de la rapport aux besoins des microbes du matière organique (dMO) des aliments rumen. Cet excès absorbé au niveau du contenus dans la ration diminue. Pour illus- rumen est largement rejeté, essentielle- trer, la dMO perd en moyenne 4 points pour ment dans les urines. des rations à 40 % de concentrés par BPR = 0 Valeur à rechercher ! rapport à une ration à 10 %. La valorisation Le fonctionnement des microbes énergétique de la ration est donc diminuée. du rumen est optimal. En conclusion, comme pour le NI, l’augmen- tation de la PCO contribue à des interac- BPR < 0 Les microbes ne disposent pas de tions digestives « négatives » pour la valo- suffisamment d’azote. La digesti- risation de l’énergie en diminuant la dMO de bilité de la ration est amoindrie et la ration et donc sa valeur UFL. les performances laitières réduites. Le recyclage de l’azote peut cependant permettre de combler un léger déficit. L’influence du BPR sur la digestibilité de la matière organique est la moins impactante, en comparaison avec le niveau d’ingestion. © Barbara Fança (idele) Cependant, lorsqu’elle est positive elle aura tendance à améliorer la dMO et inverse- ment si elle est négative elle tendra à dimi- nuer la dMO. La BPR (Balance Protéique du Rumen) est le nouvel indicateur traduisant l’équilibre énergie/azote du rumen
© Barbara Fança (idele) Dans le nouveau système, la vitesse de transit des aliments diffère selon le type de l'aliment L’Azote L’utilisation de l’azote est aussi revue dans La conséquence de cette mise à jour le nouveau système. La variable impactée concerne principalement la valeur PDIA des par ces modifications est la dégradabilité aliments (fraction non dégradée par les théorique de l’azote. microbes dans le rumen) et donc la dégra- dabilité théorique de l’azote. La vitesse de transit des aliments En effet, les aliments passent en moyenne La vitesse de transit des aliments dans le plus de temps dans le rumen que ce que rumen est un facteur primordial pour la l’on pensait, leur digestion ruminale est digestion de la ration. Elle détermine la frac- donc plus importante. Cet impact est tion des aliments digérée par les micro- également visible sur la fraction by-pass de organismes et celle qui sort du rumen pour l’amidon. être potentiellement digérée dans les intestins. Des PDI tout court Les protéines digestibles dans l’intestin ou Cette vitesse de transit était auparavant PDI sont la somme des PDI d’origine alimen- fixée à 6 %/h quel que soit l’aliment. Dans le taire (PDIA) donc qui passent le rumen sans nouveau système cette vitesse devient être digérées et des PDI d’origine micro- variable selon que l’aliment est un fourrage bienne (PDIM). Avec la prise en compte des ou un concentré. Une équation a également interactions digestives notamment et de été mise au point pour les fractions liquides. BPR, il n’est plus nécessaire de chercher le La vitesse de transit des particules dans le facteur limitant entre l’énergie et l’azote. rumen est dorénavant dépendante du On ne parle donc plus de PDIE et de PDIN, niveau d’ingestion et de la proportion de mais seulement de PDIA, de PDIM et de PDI concentré. tout court. Nul doute que certains étudiants, et leurs professeurs, sont réjouis de cette nouvelle !
© Catherine de Boissieu (idele) De nouveaux indicateurs de diagnostic importants Le risque d’acidose On détermine l’acidose chez les ruminants par le passage du pH ruminal en dessous de 6, la valeur normale étant autour de 6,5 dans cette cavité. On distingue ensuite deux types d’acidose : • l’acidose dite aiguë, peu fréquente dans nos élevages ovins laitiers, est due à une Un nouvel indicateur, nommé IRA, ingestion rapide de grandes quantités de mesure le risque d’acidose glucides très fermentescibles (amidons très dégradables de certains concentrés comme l’avoine, les sons de blé, les pulpes, la mélasse…). Elle provoque une chute rapide du pH ruminal. La production de méthane • l’acidose subaiguë, ou chronique, est bien La prédiction des émissions de méthane plus fréquente. Elle est due à une inges- fait partie des nouveautés d’INRA 2018. Elle tion irrégulière de glucides hautement est basée sur la matière organique diges- fermentescibles, qui entraîne des fluctua- tible de la ration, sur le niveau d’ingestion de tions du pH au cours de la journée avec un nouveau, et : pH moyen < 6,0. • de la part de NDF (fibres totales obtenues L’indicateur de risque d’acidose, nommé IRA, après action d’un détergent neutre) pour concerne plutôt l’acidose subaiguë. Il s’agit les rations 100 % fourragères, d’appliquer à un ensemble de critères (8 au • de la part de concentrés pour les rations total) une note de 0 quand il n’y a aucun mixtes. risque, de 1 quand le risque est faible, et de Des propositions de stratégie de réduction 2 lorsque le risque d’acidose lié à ce critère du méthane émis sont également données, est considéré fort (cf. figure 2). La moyenne comme l’apport de tannins dans la ration, ou des notes obtenues constitue le score IRA. de lipides. Pour limiter les effets négatifs de Ce score n’a pas vocation à déterminer une la matière grasse sur la digestion des fibres probabilité de faire tomber les animaux en dans le rumen, il est conseillé cependant de acidose, mais il informe l’éleveur sur le limiter cette complémentation à 6 % risque potentiel existant d’une ration maximum de la matière sèche de la ration. donnée. En fonction des critères les plus L’augmentation de NI et de PCO a pour effet pénalisants, l’éleveur peut être amené à la diminution des émissions de méthane. modifier sa ration pour diminuer ce score. FIGURE 2 • Critères pris en compte dans le calcul du score de risque d'acidose Risque fort Risque faible Pas de risque Bilan électrolytique (mEq/kg MS 200 250 MO dégradable du concentré (g/kg MS) 300 250 Amidon digestible dans le rumen (g/kg MS) 250 200 Concentré (% MS) 50 40 P > 2 mm (% MS) 45 50 NDF de fourrage (g/kg MS) 250 300 NDF (g/kg MS) 300 350 Indice de mastication (min/kg MS) 40 45
Pour en savoir plus : L'alimentation des brebis laitières, coll. Synthèse Fiche réalisée par Barbara Fança (Idele) avec la participation de Philippe Hassoun (INRAE) N° PUB 0022301002 © Jean-Marc Arranz (CA64)
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