L'influence de la génétique sur les composantes de la densité du bois chez l'épinette blanche - Teluq
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L’influence de la génétique sur les composantes de la densité du bois chez l’épinette blanche André Soro1,2, Patrick Lenz2,3, Mariana Hassegawa1,4, Jean–Romain Roussel1, Jean 1,2 1 Bousquet et Alexis Achim Article d’origine : Soro, A., Lenz, P., Hassegawa, M., Roussel, J. R., Bousquet, J., & Achim, A. (2021). Genetic influence on components of wood density variation in white spruce. Forestry, 95(2), 153-165. 1 Centre de recherche sur les matériaux renouvelables, Département des sciences du bois et de la forêt, Université Laval, 2425, rue de la Terrasse Québec (Québec) G1V 0A6 ; 2Chaire de recherche du Canada en génomique forestière, Institut de biologie intégrative et des systèmes (IBIS). Université Laval, 1030, avenue de la Médecine Québec (Québec) G1V 0A6; 3 Ressources naturelles Canada, Service canadien des forêts, Centre de foresterie des Laurentides, 1055, rue du Peps C. P. 10380, succ. Sainte-Foy, Québec (Québec) G1V 4C7; 4 European Forest Institute, Bioeconomy Programme, Yliopistokatu 6 B, 80100 Joensuu, Finland. Contexte En complément à la régénération naturelle de la forêt, les plantations forestières sont une source non négligeable d’approvisionnement en bois. Elles permettent notamment de choisir les essences à planter ainsi que les génotypes issus de l’amélioration génétique issus de l’amélioration génétique qui ont une croissance plus rapide, une meilleure résilience aux contraintes environnementales et une qualité de bois qui répond mieux aux besoins de l’industrie du bois. Or, la corrélation négative entre le taux de croissance et la qualité du bois a soulevé des inquiétudes. Ainsi, les programmes d’amélioration génétique ont commencé à intégrer les traits de qualité du bois dans leurs objectifs de sélection. Dans l’est du Canada, par exemple, un important programme d’amélioration de l’épinette blanche a permis de produire deux générations de vergers à graines qui ont servi à planter 26 millions de semis améliorés, soit 20 % des semis annuels d’épinette blanche au Québec. La densité du bois est un indicateur fréquemment utilisé pour déterminer la qualité du bois grâce à la corrélation entre elle et les autres caractéristiques physico- mécaniques. Toutefois, la densité du bois peut varier entre les cernes de croissance, ce qui pourrait avoir un impact sur l’homogénéité du produit final. De plus, elle change au cours d’une même saison de croissance avec un bois initialement moins dense comparativement à celui produit en fin de saison. En plus de ce patron de variation intraannuelle, la densité du bois de l’épinette blanche change d’une année www.2rlq.teluq.ca Mai 2022
à l’autre en raison des variables climatiques comme la température estivale ou la disponibilité en eau. Or, l’homogénéité de la densité du bois est non seulement une caractéristique désirée par l’industrie, mais elle est aussi indicatrice de la vigueur des arbres. Cette étude avait pour objectif d’évaluer les profils de variation générale et interannuelle des composantes de la densité du bois de l’épinette blanche et de déterminer leur héritabilité. Méthodologie Des carottes de bois ont été prélevées Figure 1. Localisation des sites d’arbres issus d’un essai génétique de de l’étude. provenances de croisements dirigés qui a été répliqué dans deux environnements Saint-Casimir distincts. Les plantations expérimentales ont été établies en 1999 à Asselin et à Saint-Casimir, au Québec, avec un espacement de 2 m x 2 m entre les arbres (fig. 1). En 2015, des carottes de bois ont été prélevées de 93 familles biparentales pour un total de 2196 arbres. Les profils de la densité du bois ont été obtenus en numérisant les carottes de bois de la moelle à l’écorce à l’aide d’un densitomètre à rayons X (QTRS-01X, Quintek Measurement Systems Inc., Knoxville, TN, USA). À partir des profils de densité, les limites des cernes de croissance annuelle ont été déterminées, en plus de la largeur des cernes ainsi que des proportions relatives du bois initial et final de chaque cerne annuel. Les données ainsi obtenues ont servi à modéliser la densité moyenne des cernes (kg/m3), la densité moyenne du bois final (kg/m3) et le pourcentage du bois final en fonction de l’âge cambial (%). De plus, un indice a été développé pour quantifier l’amplitude de variation interannuelle des composantes de la densité du bois le long de chaque profil radial (de la moelle à l’écorce). Enfin, l’héritabilité des traits étudiés a été estimée afin d’évaluer la possibilité de les intégrer à un programme d’amélioration génétique Résultats L’analyse de la densité du bois de la moelle à l’écorce montre des profils de variation similaires entre les deux sites jusqu’à la 5e année de croissance, avec un déclin rapide de la densité près de la moelle. À partir de la 6e année, la densité est demeurée stable à Asselin et a légèrement augmenté à Saint-Casimir, jusqu’à atteindre un plateau à la 8e année (fig. 2). www.2rlq.teluq.ca Mai 2022
Figure 2. Les patrons de variation de la densité du bois le long des cernes, à partir de carottes prises à hauteur de poitrine. Les indices de variation de la densité moyenne et du pourcentage du bois final étaient plus élevés à Asselin comparativement à Saint-Casimir. En revanche, l’indice de variation de la densité du bois final n’était pas différent entre les deux sites de l’étude. L’héritabilité de la variation des composantes de la densité du bois (de la moelle à l’écorce et d’une année à l’autre) était similaire entre les sites. Globalement, l’héritabilité avait tendance à diminuer lorsque l’échelle d’observation se raffinait. Ainsi, les patrons généraux de variation de la moelle à l’écorce (c’est-à-dire ceux représentés dans la figure 2) avaient une héritabilité supérieure à la variation interannuelle (entre deux cernes adjacents). L’héritabilité du pourcentage du bois final était inférieure à celle de la densité moyenne du bois, tous âges confondus. Malgré l’utilisation fréquente de la densité comme indicateur de la qualité du bois, il faut faire preuve de prudence lorsqu’on établit un lien entre la densité du bois et son aptitude à l’utilisation finale. Par exemple, la zone de forte densité du bois près de la moelle peut être classée comme bois de « flexion » ayant des propriétés comparables au bois de compression avec un angle de microfibrilles élevé, une www.2rlq.teluq.ca Mai 2022
teneur élevée en lignine et, par conséquent, une faible rigidité (Telewski, 1989 ; Meinzer et collab., 2011). Une grande variation des propriétés du bois au sein d’une pièce de bois sciée peut entraîner des changements dimensionnels après transformation (Macdonald et Hubert, 2002) et des propriétés d’usinage non homogènes. La corrélation négative entre la densité du bois et le taux de croissance radiale a mis en évidence la nécessité de sélectionner des arbres et des familles qui présentent une croissance rapide ainsi qu’une densité de bois optimale (Lenz et collab., 2011). Dans ce travail, la prise en compte de la variation de la densité du bois, en allant de la moelle à l’écorce, a permis une caractérisation plus fine de la variation de cette propriété du bois à l’intérieur d’un arbre. Cette approche peut faciliter l’étude des effets de la variation annuelle du climat, connue pour affecter les caractéristiques du bois final ainsi que la densité moyenne du bois (Parker et Henoch, 1971 ; D’Arrigo et collab., 1992). En raison de la corrélation négative entre la densité du bois et les traits de réaction de croissance face à la sécheresse (résilience de la croissance et récupération) (Depardieu et collab., 2021), il est possible qu’une variation plus faible d’une année à l’autre de la densité du bois soit également souhaitable dans le contexte des changements climatiques. Les résultats de ce travail ont montré que l’héritabilité des caractères liés à la variation interannuelle était plus faible que celle des caractères décrivant la variation radiale de la densité du bois de la moelle à l’écorce. En plus d’être des traits recherchés par l’industrie du bois, une densité élevée et une forte proportion de bois final pourraient rendre les arbres plus résistants aux stress environnementaux tels que les épisodes de sécheresse. Ainsi, l’héritabilité de la variation interannuelle de la densité du bois final devrait être prise en compte dans la sélection des arbres, que ce soit comme critère de sélection positif ou comme seuil minimum lorsque la priorité de sélection est sur d’autres caractères. Ultimement, les arbres sélectionnés devraient présenter une meilleure aptitude à l’utilisation finale et être moins sensibles aux variations environnementales. Outre la variation de la densité du bois le long des cernes de croissance, les diverses conditions environnementales entre les sites ont également entraîné des différences de variation d’une année à l’autre, ce qui suggère que différents sites de reboisement peuvent entraîner une variation significative de la densité du bois. La croissance radiale étant principalement contrôlée par l’environnement (Corriveau et collab., 1991 ; Ivkovich et collab., 2002 ; Beaulieu et Bousquet, 2010), il est probable qu’une grande partie des différences observées dans la densité du bois soient la conséquence de différences dans les patrons de largeur de cernes. Références Beaulieu, J. et Bousquet, J. (2010). Facteurs génétiques affectant la variabilité des cernes annuels chez les espèces arborescentes nordiques . Dans : Payette, S., et L. Filion (sous la dir. de). La dendroécologie : principes, méthodes et applications, Presses de l’Université Laval, Québec, Québec, p. 137-163. Corriveau, A., Beaulieu, J. & Daoust, G. (1991). Heritability and genetic correlations of wood characters of Upper Ottawa Valley white spruce populations grown in Quebec. For. Chron. 67, 698–705. D’Arrigo, R.D., Jacoby, G.C. & Free, R.M. (1992). Tree-ring width and maximum latewood density at the north American tree line: parameters of climatic change. Can. J. For. Res. 22, 1290–1296. www.2rlq.teluq.ca Mai 2022
Depardieu, C., Gérardi, S., Nadeau, S., Parent, G.J., Mackay, J., Lenz, P. et al. (2021). Connecting tree- ring phenotypes, genetic associations and transcriptomics to decipher the genomic architecture of drought adaptation in a widespread conifer. Mol. Ecol. 30, 3898–3917. Ivkovich,M., Namkoong, G. & Koshy, M. (2002). Genetic variation in wood properties of interior spruce. I. Growth, latewood percentage, and wood density. Can. J. For. Res. 32, 2116–2127. Lenz, P., MacKay, J., Rainville, A., Cloutier, A. & Beaulieu, J. 2011 The influence of cambial age on breeding for wood properties in Picea glauca. Tree Genet. Genomes 7, 641–653. Macdonald, E. & Hubert, J. (2002). A review of the effects of silviculture on timber quality of Sitka spruce. Forestry 75, 107–138. Meinzer, F.C., Lachenbruch, B. & Dawson, T.E. (2011). Size-and Age-Related Changes in Tree Structure And Function (Volume 4). Springer Science and Business Media. Parker, M.L. & Henoch,W. (1971). The use of Engelmann spruce latewood density for dendrochronological purposes. Can. J. For. Res. 1, 90–98. Telewski, F.W. (1989). Structure and function of flexurewood in Abies fraseri. Tree Physiol . 5, 113– 121. www.2rlq.teluq.ca Mai 2022
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