La collection contemporaine en devenir
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en devenir LE CHÂTEAU , 14000 CAEN, 02 31 30 47 70 MBA.CAEN.FR La collection Pierre Soulages, Peinture 7 juin,, 1974, huile sur toile, Musée des Beaux-Arts de Caen © Paris, Adagp, 2021 contemporaine
I - Nouvel accrochage des collections contemporaines Présentation Parcours et liste des oeuvres L’œuvre arpentée : le temps élargi Focus : Judit Reigl Géologie de la peinture : l’espace élargi Focus : Joan Mitchell En lisière du signe Focus : Anna-Eva Bergman Espaces fictifs : usages de la cité Focus : Christine Crozat Espaces fictifs : où est le merveilleux ? Focus : Hélène Delprat II - La politique du musée en matière d’art contemporain Présentation Programmation 2021 - 2022 Horizons proches Jim Dine Gérard Traquandi Informations pratiques et contacts presse
À partir du 6 février 2021 Nouvel accrochage des collections contemporaines En 2017, les collections du musée se réinventaient au fil d’un accrochage et d’une muséographie repensés. Depuis, le circuit de visite met en valeur les grandes écoles artistiques, depuis le XVe jusqu’au XXIe siècle, la muséogra- phie révèle, dans certains espaces, de petits ensembles d’objets d’art et de Judit Reigl, sculptures, et le parcours s’est enrichi d’une salle cubiste présentant Georges L’art de la fugue Braque, Albert Gleizes, Amédée Ozenfant, Jacques Villon, … 1982, huile sur toile, En 2021, un redéploiement partiel des collections contemporaines sera pro- Musée des Beaux- posé afin de présenter de nouvelles acquisitions et dépôts notament pour les Arts de Caen © sections des XXe et XXIe siècles. Paris, Adagp, 2021 Vincent Bioulès, Le musée propose un nouvel accrochage en hommage aux donateurs qui Le Débarquement à au cours des dernières années ont contribué à l’enrichissement des collec- Cythère, 1997-1999, tions contemporaines, en particulier dans le domaine des arts graphiques. huile sur toile,, photo MBA Caen © Paris, Parmi les œuvres offertes par les artistes sont présentés un bel ensemble de ADAGP, 2021Paris, dessins de Christine Crozat, trois lithographies de Marc Desgrandchamps, Adagp, 2021 les esquisses préparatoires au Débarquement à Cythère de Vincent Bioulès. Christine Crozat Signalétique La confrontation peinture estampe permet d’intégrer une sélection issue de provisoire, 2009, trois autres dons importants, dus à un collectionneur (Per Kirkeby, Antonio série dessins, photo Saura, Gérard Titus-Carmel), à la galerie Lelong (Jean Le Gac, James Brown) MBA Caen © Paris, ADAGP, 2021 ainsi qu’à la Fondation Hartung–Bergman (estampes de Hans Hartung et d’Anna-Eva Bergman). La générosité du fonds de dotation Judit Reigl Anna-Eva Bergman conforte enfin la présentation de cette artiste, plusieurs de ses toiles rejoi- GB 20-1957, Barque gnant la collections caennaise. sous l’eau, 1957, gravure sur bois, don de la Fonsation Direction : Emmanuelle Delapierre, conservatrice en chef Hartung - Bergman en 2020, photo MBA Caen © Paris, ADAGP, 2021 CONTACTS PRESSE Musée ouvert du mardi au vendredi (en Presse nationale juillet et août du lundi au vendredi) de 9 h 30 Alambret Communication Musée des Beaux-Arts Le Château à 12 h 30 et 13 h 30 à 18 h. Le week-end et 14000 CAEN - 02 31 30 47 7 Leila Neirijnck - leila@alambret.com www.mba.caen.fr jours fériés de 11h à 18h 01 48 87 70 77 - 06 72 76 46 85 Presse régionale GRATUIT pour les moins de 26 ans et pour Musée des Beaux-Arts tous le 1er week-end du mois. Anne Bernardo - a.bernardo@caen.fr Tarifs de 2, 50 € à 3,50 € 02 31 30 47 76 - 06 25 37 61 13
Parcours et liste des œuvres L’œuvre arpentée : le temps élargi Focus : Judit Reigl Géologie de la peinture : l’espace élargi Focus : Joan Mitchell En lisière du signe Focus : Anna-Eva Bergman Espaces fictifs : usages de la cité Focus : Christine Crozat Espaces fictifs :où est lemerveilleux ? Focus : Hélène Delprat
L’ŒUVRE ARPENTÉE : LE TEMPS ÉLARGI Dans l’atrium du musée, un ensemble de toiles aux échelles variées témoigne de modes d’exploration de la temporalité et de la spatialité propres au déploiement de la peinture. Avec L’Art de la Fugue, Judit Reigl expérimente un travail en deux temps. Ayant agrafé un rouleau de coton fin sur les quatre murs de son atelier, elle marche un pinceau à la main, au son d’une musique de Bach. Elle taille ensuite dans le drap de grands pans, qu’elle retourne pour les recouvrir de teinture acrylique, révélant au travers de taches colorées la trace ondulatoire de son premier déplacement. Monique Frydman joue, quant à elle, de la vibration de la couleur et du dessin en mettant la pulsion du corps à distance, au moyen de cordes dont elle s’applique à suivre le relevé. Judit Reigl, L’art de la Fugue, 1982, acrylique sur toile, dyptique, dépôt du Cnap, 1994, photo MBA Caen © Paris, ADAGP, 2021 Monique Frydman, Les dames de nage, pigments et liant sur lin 1992-1995, panneau gauche achat du musée, 1997 / panneau droit dépôt du Cnap, 1998, photo MBA Caen © Paris, ADAGP, 2021
Focus JUDIT REIGL Judit Reigl, mieux que tout autre choc terrible : la destruction des Twin résolument, chaque série de Judit Reigl artiste sans doute, crée un lien tendu Towers à New-York. Puis j’en ai eu un procédant d’une autre. entre cette « peinture de la chair» et autre - ahurie - quand les corps com- cette « peinture de l’espace» définies mençaient à tomber, car cela me La suite des Homme sera bientôt par le projet initial du musée comme concernait personnellement. Ces corps déconstruite par celle des Drap, déco- deux sensibilités d’art et de pensée, en chute, c’est exactement ma problé- dage, laquelle ouvrira sur les grands sinon opposées, du moins distinctes, matique picturale (depuis les années Déroulement de 1974 à 1979, avant son œuvre ouvrant des dynamiques soixante) qui s’incarnait devant mes L’Art de la fugue ... Au fur et à mesure de circulation, des traversées, lignes yeux sur l’écran. Quelquefois immobili- que l’expérience picturale devient plus de force plus que de partage. sés par l’arrêt de l’image, les corps sem- complexe, le geste s’emploie à rester blaient monter autant que descendre, en creux, ne cédant en rien à la tenta- Née en 1923 en Hongrie, elle fuit clan- ou bien flotter dans un espace indé- tion du recentrement substantialiste. destinement son pays en 1950 pour terminé. » L’échec du rêve icarien n’a L’espace du tableau est, fondamen- vivre à Paris. André Breton, que Simon cessé de tenir l’artiste. Ses torses et ses talement, conflictuel. C’est un espace Hantaï lui présente, organisera sa pre- corps d’hommes demeurent en lévita- sans lieu, sans profondeur ni disposi- mière exposition personnelle dès 1954. tion, flottant dans un espace « propice tion. Seule la couleur l’habite, deux Explorant ce qu’elle nommera les au passage » (Marcelin Pleynet). Judit champs de teintes contrastées se ren- « désécritures abstraites» (1973), Judit Reigl précise : « Le plus passionnant- le contrant pour faire ligne. Rien de moins Reigl laisse surgir de ses toiles, comme plus difficile aussi- c’est ( ... ) de guet- sonore, pourtant: la couleur est, aussi, malgré elle, des torses humains, mas- ter, de pouvoir saisir (au jeu de l’appari- contradiction. Qui, de la silhouette culins, dans une série intitulée Homme tion-disparition) l’instant d’un équilibre noire dressée ou du corps rouge ren- développée de 1966 à 1972. Figurations instable et précaire, d’arrêter la pein- versé, se tient ? Qui se perd ? Judit spontanées, pulsions automatiques, ture - suspendre le temps à la fron- Reigl réunit dans sa peinture la chair fragmentées parce que monumentales, tière de la naissance et de la mort.» et l’espace, dans une traversée toujours où la forme advient par la couleur, la Apparition inopinée des premiers rejouée de l’épaisseur, entre apparition couleur étant elle-même tout entière torses (1971), présence suspendue dans et disparition de la forme, enfouisse- tenue dans le geste, ces Homme une immobilité frontale, silhouette ment et surgissement du temps. Elle marquent ce que Marcelin Pleynet a noire sur fond noir issue de la série Un dit le courage de la peinture, de son appelé « l’impossible désincarnation de corps au pluriel (1993), que vient précé- effort pour, sans cesse, se situer sans l’art», la peinture abstraite révélant le der L’Art de la fugue (dont le musée des ne rallier aucune rive : « j’ai quitté un souffle en même temps que les limites Beaux-Arts de Caen conserve un grand bloc pour n’appartenir à aucun autre » proprement humaines de la création. diptyque noir), corps en apesanteur de écrivait-elle en 1975. Près de trente ans plus tard, l’artiste New York (2001), enfin : ces corps ima- découvre sidérée les attentats du ginaires (signes) et corps réels (déploie- World Trade Center: « En regardant les ment physique de l’artiste) donnent à images à la télévision le 11 septembre l’œuvre la dimension de son humanité. 2001, j’ai eu comme tout le monde un Abstraction et figuration s’entremêlent
GÉOLOGIE DE LA PEINTURE : L’ESPACE ÉLARGI Pour Joan Mitchell ou Per Kirkeby, le sentiment de la nature et du rapport retrouvé avec elle tient une place essentielle. Leurs tableaux et leurs gravures ne sont pas pour autant des paysages : c’est bien dans la distance prise avec le motif que la sensation née du paysage prend une nouvelle forme, suggestion abstraite d’un monde de terre et de ciel dont il ne reste que quelques éléments structurels. Leurs œuvres jouent d’une géométrie de strates, de blocs et de parcelles, colorés ou monochromes. « Ce qui m’excite quand je peins, confie Joan Mitchell à Yves Michaud, c’est ce qu’une couleur fait à une autre et ce qu’elles font toutes les deux en termes d’espace et d’interaction ». Joan Mitchell, The sky is blue, the grass is green, 1972, huile sur toile, Joan Mitchell, Champs, 1990, huile sur toile, achat du musée, 1990, dépôt du Cnap, 1996, photo MBA Caen © Fondation Joan Mitchelll photo MBA Caen © Fondation Joan Mitchell Per Kirkeby, Sans titre 1, 3 et 6, 2001, xylographie et linogravure, don d’un collectionneur, 2020, photo MBA Caen © Paris, ADAGP, 2021 Mark Tobey, Apparences, 1968, tempera sur papier marouflé sur toile, achat, 1986, photo MBA Caen © Paris, ADAGP, 2021
Courtesy Fondation Johan Mitchell Focus JOAN MITCHELL Figure essentielle de la peinture abs- Rothko, pour s’atteler à une œuvre « Ce qui m’excite quand je peins, c’est traite, Joan Mitchell compte parmi les marquée par le processus mémoriel, ce qu’une couleur fait à une autre » artistes américaines les plus impor- soucieuse de rendre compte des émo- (Journal des Arts n°5, juillet-août 1994). Le tantes du XXe siècle. L’énergie pure tions que lui provoque le contact avec titre de l’œuvre, peut-il également être déployée sur ses toiles aux couleurs la nature. A Vétheuil, elle se consacre lu comme une fantaisie de l’artiste liée vibrantes permet de considérer avec la pleinement à l’observation de la nature, à son rapport synesthésique aux mots même fraîcheur, près de 30 ans après non loin des environnements chers à et aux couleurs ? Pour elle, le ciel est sa disparition, le pouvoir immersif de Monet. De ces temps de contempla- loin de se limiter à la couleur bleue : son œuvre. Née en 1925 à Chicago, tion naissent des toiles souvent monu- « Moi je vois d’abord S-K-Y. S est plutôt Joan Mitchell grandit dans un environ- mentales, et entièrement recouvertes blanc, K est rouge, Y est ocre jaune. nement familial stimulant. Son naturel de peinture, au dynamisme éclaté, Le ciel pour moi est le mélange de ces fougueux et compétitif se manifeste ne révélant aucun point central qui couleurs. […] C’est la manière dont je dans la pratique intensive du sport concentrerait l’intensité de l’œuvre, l’ai imaginé quand j’ai appris, enfant, (patinage artistique, plongeon et équi- plongeant le spectateur au sein de l’alphabet. J’imaginais tout en cou- tation), qu’elle transposera dans son vastes surfaces colorées. leurs. » (Joan Mitchell, musée des Beaux-Arts art, marqué par une forte dimension Artiste inspirée par la nature, Joan de Nantes, Galerie nationale du jeu de Paume, gestuelle. Mitchell tient pourtant à distance la Paris, 1994). Formée à l’Art Institute de Chicago, peinture de paysage, en travaillant ses En 1990, Joan Mitchell réalise de nom- Joan Mitchell y obtient une bourse toiles sur format vertical qu’elle décline breuses toiles intitulées Champs, for- d’étude qui lui permet de séjourner en parfois en polyptiques ou en séries. mant une ultime série. Les coups de France en 1948, pays qu’elle ne quit- Liée aux souvenirs, sa peinture se forge pinceaux, très énergiques, alternant tera plus à partir de 1959, date de son coupée du motif, dans un grand enga- les coups brefs, tortueux et les lon- installation définitive à Paris puis à gement physique, souvent réalisée de gues traînées horizontales, seront les Vétheuil. Elle va y développer un style nuit ou dans son atelier aux rideaux dernières manifestations de la vitalité très personnel, né de la fusion de l’hé- tirés. L’artiste donne priorité à l’évoca- furieuse de l’artiste. ritage américain que lui ont transmis tion des émotions ressenties, au-delà L’exposition Joan Mitchell, Mémoires les peintres de l’expressionnisme abs- de toute préoccupation figurative, ce de paysage , présentée au musée des trait Franz Kline et Willem de Kooning que le philosophe Yves Michaud qua- Beaux-Arts de Caen en 2014, inven- qu’elle côtoya au cours des années lifie de feeling painting. toriait les dialogues possibles entre 1950, et d’affinités électives avec cer- Le diptyque The Sky is blue, The Grass l’œuvre de l’artiste américaine et tains maîtres de l’art moderne euro- is Green, présenté au musée de Caen celles d’autres artistes de la collection, péen – en particulier Van Gogh, à qui en 2021, est représentatif de la pein- Judit Reigl, Monique Frydman et Per elle rendra hommage en 1969 dans une ture de Joan Mitchell des années Kirkeby. Ce nouvel accrochage offre en série de Tournesols. 1970. Adepte du push pull, technique 2021 la possibilité de renouer ces dia- Fuyant les étiquettes, Joan Mitchell employée par Matisse, elle joue des logues mais aussi d’en tisser d’autres, s’écarte de ses condisciples améri- phénomènes d’attraction et de répul- affirmant toute l’intensité de l’art de cains, tels que Jackson Pollock et Mark sion entre couleurs complémentaires. Mitchell.
EN LISIÈRE DU SIGNE Dans les années 1970, Pierre Soulages et Hans Hartung signent des toiles abstraites, fruits de nouveaux outils que les deux artistes aiment à fabriquer eux-mêmes. Ils développent une gestualité puissante, maintenue à distance de tout lyrisme. Peinture 7 juin 1974 et H 1973-24 suggèrent une architecture massive, née de son propre mouvement. Au dos de la planche de bois utilisée par Hans Hartung pour son estampe monumentale (haute de plus de 2 mètres), Anna-Eva Bergman sculpte une autre matrice, figure Janus où l’on retrouve le sens des constructions que l’artiste sait si bien ériger, constituant d’une œuvre à l’autre un répertoire de formes élémentaires. Maria Helena Vieira da Silva, Arcane, huile sur toile, date inconnue, achat du musée, 1995, photo MBA Caen © Paris, ADAGP, 2021 Pierre Soulages, Peinture 7 juin 1974, huile sur toile, achat du musée, 1974, photo MBA Caen © Paris, ADAGP, 2021 Anna-Eva Bergman Hans Hartung Anna-Eva Bergman GB 20-1957, Barque sous L 1976-25, Hommage à Anna-Eva Bergman, GB 23-1957, Mur de l’eau, 1957, gravure sur 1976, lithographie sur vélin, don de la Fonsation rocher, 1957, gravure bois, don de la Fonsation Hartung - Bergman en 2020, photo MBA Caen © sur bois, don de la Hartung - Bergman en Paris, ADAGP, 2021 Fonsation Hartung 2020, photo MBA Caen - Bergman en 2020, © Paris, ADAGP, 2021 photo MBA Caen © Paris, ADAGP, 2021 Anna-Eva Hans Hartung, Bergman H- 1973 - 24, GB 42 1 - 1973, 1973, 1957, 1973, gravure gravure sur bois, sur bois, don achat du musée, de la Fonsation 2020, photo Hartung - MBA Caen © Bergman en Paris, ADAGP, Anna-Eva Bergman 2020, photo 2021 GB 63 - 1976 Bois MBA Caen © Han Hartung II, 1976, gravure Paris, ADAGP, L 102, 1963, lithographie sur bois, don de la 2021 sur vélin, don de la Fonsation Hartung Fonsation Hartung - - Bergman en 2020, Bergman en 2020, photo photo MBA Caen © MBA Caen © Paris, Paris, ADAGP, 2021 ADAGP, 2021
Zoom ANNE-EVA BERGMAN Anna-Eva Bergman naît à Stockholm dans la construction d’un monde la côte norvégienne, au-delà du Cap le 29 mai 1909, de mère norvégienne pictural symbolique et abondent de Nord et rapportent près de 1000 pho- et de père suédois. Ses parents se questions théoriques ou techniques. tographies. Durant plusieurs années, séparent six mois après sa naissance Cette période marque un tournant Anna-Eva Bergman utilisera dans son et sa mère la ramène en Norvège où majeur dans sa création. Elle invente travail les esquisses et les photogra- elle passe son enfance et adolescence. et construit peu à peu un univers sin- phies de ce voyage au Nord. Elle fait ses études à l’Académie des gulier. Elle réalise son premier tableau Le couple s’installe à Antibes en 1973. Beaux-Arts d’Oslo (1927) et à l’École à la feuille d’or. Les œuvres d’Anna-Eva Bergman évo- des Arts Appliqués de Vienne (1928). Au cours de l’été 1950, elle fait un luent alors vers des formes de plus En mai 1929, elle rencontre Hans voyage en bateau le long de la côte en plus simples et une gamme colo- Hartung. Ils se marient la même année. norvégienne, visite les îles Lofoten, le rée plus restreinte. Elle abandonne la Finnmark et les villes principales de construction de ses toiles au nombre Son art est marqué à ses débuts par la Norvège du nord, dont elle livre un d’or. les artistes allemands de la Neue récit détaillé dans son journal Voyage Anna-Eva Bergman décède le 24 juillet Sachlichkeit, comme George Grosz ou au cap Nord. En 1951, elle abandonne 1987 à l’hôpital de Grasse. Otto Dix ; ses dessins de personnages définitivement l’illustration. emblématiques de la bourgeoisie En 1952, elle s’installe à Paris et L’artiste a de très nombreuses expo- allemande et française traduisent un retrouve Hans Hartung. Ils décident sitions personnelles, notamment en regard plein d’humour. de vivre à nouveau ensemble, puis se Norvège, comme en 1969 aux musées De 1933 à 1934, le couple s’installe remarient en 1957. d’Oslo et de Bergen, en 1979 à la dans l’île de Minorque, aux Baléares. En 1958, dans une série d’œuvres sur Fondation Henie-Onstad ; en Suède, en Les peintures et aquarelles de cette papier de même format, à la tempera Finlande, en Italie, comme au Museo période montrent son intérêt pour et feuille de métal, Anna-Eva Bergman Civico de Turin en 1967, à la Biennale le nombre d’or ou l’architecture et décline pour la première fois en pein- de São Paulo en 1969, en Allemagne, annoncent les formes simples et ture le répertoire de formes qu’elle a comme à la Kunsthalle de Düsseldorf construites de son travail futur. développé dans son travail depuis 1952 : en 1981-1982, à Paris à la Galerie de Le couple divorce en 1938, Anna-Eva pierre, lune, astre, planète, montagne, France où elle expose régulièrement de Bergman retourne en Norvège. stèle, arbre, tombeau, vallée, barque, 1958 à 1977, au musée d’Art moderne De 1935 à 1945, elle se consacre essen- proue ou miroir. Elle en fera l’inventaire de la Ville de Paris avec une rétrospec- tiellement à l’illustration et à l’écriture. à la fin des années 1960 sous forme tive en 1977-1978, à Antibes au musée En 1946, elle recommence à peindre de listes qui détaillent ses thèmes, Picasso en 1986, etc... avec intensité et s’engage à la fin des décomposent son alphabet, fabriquent années 1940 dans une voie non figu- des ensembles et montrent leurs trans- Le musée des Beaux-Arts de Caen lui rative. Peinture et écriture sont alors formations dans ses peintures et ses a consacré une exposition en 2019. étroitement liées. Les Carnets qu’elle estampes. suite à laquelle, la Fondation Hartung- a tenus de 1941 à 1951 décrivent son Anna-Eva Bergman et Hans Hartung, Bergman a offert les estampes présen- cheminement intime, jour après jour, en 1964, voyagent en bateau le long de tées dans ce nouvel accrochage .
EN LISIÈRE DU SIGNE Chez James Brown et Gérard Titus-Carmel – le premier est fasciné par les rituels ancestraux du Mexique, le second a suivi une double formation de graveur et d’orfèvre dont il joue pour mieux s’en départir -, la liberté du geste fait naître des traces primaires et tiennent en lisière toute possibilité de signe. James Brown Salt Roma I à V, 1990, lithographie, don de la galerie Lelong, 2018, photo MBA Caen © Paris, ADAGP, 2021 Gérard Titus-Carmel Dopo como I, 1992, sérigraphie, don d’un Grande Égéenne 2, 1993, sérigraphie, don d’un collectionneur privé en 2019, photo MBA collectionneur privé en 2020, photo MBA Caen, Caen © Paris, ADAGP, 2021 droits réservés ou © Paris, ADAGP, 2021 Antonio Saura Tagebücher, 1998, livre illustré de 69 lithographies, don d’un collectionneur particulier, 2020, photo MBA Caen © Paris, ADAGP, 2021
ESPACES FICTIFS : USAGES DE LA CITE Célèbre pour ses « date paintings » commencées à partir de 1966, On Kawara est l’auteur de plusieurs séries emblématiques portant sur l’immuable décompte du temps. I Met, I Read, I Got Up At et I Went proposent une autobiographie minimaliste croisant les dimensions sociales, culturelles, temporelles et géographiques. I Got Up emprunte la voie postale : depuis son lieu de résidence ou de villégiature, l’artiste envoie chaque jour une carte postale à une personnalité du monde de l’art avec qui il se sent en affinité (ici, l’artiste Philippe Boutibonnes). Au verso, un tampon indique la date et l’heure de son réveil, en mode mineur. Banals aussi sont les fragments prélevés par Christine Crozat au cours de ses errances urbaines. Eléments de signalétique, panneaux routiers et pictogrammes sont réinterprétés au crayon, accompagnés parfois de commentaires anecdotiques. L’artiste s’empare de l’accumulation des signes, juxtaposant ou enchevêtrant les systèmes de représentation, suggérant l’idée d’un mouvement que le désordre menace. C’est un sentiment d’urgence qui domine là encore, au cœur de la cité rompue de signes et de bruits, où la présence de chacun semble dérisoire. On Kawara, I got up, 1979, série de 52 cartes Vincenzo Castella, Caen, 2009, tirage Maria Helena Vieira da Silva, postales, don de Philippe Boutibonnes, 2002, C-Print, don de l’artiste 2010, droits réservés New Amsterdam III, 1970, huile sur toile, dépôt photo MBA Caen, droits réservés du Musée national d’art moderne, 1996, photo MBA Caen © Paris, ADAGP, 2021 Christine Crozat Et à partir de là, 2007-2009, serie de 10 dessins, achat et don de l’artiste, 2010 et 2018, photo MBA Caen, droits réservés Signalétique provisoire, 2009, serie de 12 dessins, don de l’artiste, 2010, photo MBA Caen © Paris, ADAGP, 2021
Croix Roussienne,/Tribune de Lyon, 2016 Focus CHRISTINE CROZAT Du dessin et de la mobilité Texte écrit par Caroline Joubert à l’espace, loin d’être anodine, renvoie à ils sont assemblés suivant un axe verti- propos de l’exposition Et à partir de là la pratique du piéton déambulant dans cal, images et signaux semblent impo- (novembre 2009 - février 2010) une ville : le bibliobus, réduit à deux ser une présence à la fois autoritaire et lignes parallèles, comme les graffiti aporétique. Leur multiplication et leur En marchant dans la ville souillant la porte d’un immeuble sont déploiement horizontal, jouant avec les Ce n’est pas le mouvement en soi qui saisis depuis le trottoir, dans leur proxi- bords du papier, suscitent l’idée d’une intéresse Christine Crozat mais bien mité immédiate; la pendule du lycée expansion, d’un mouvement vite gagné la perception qu’elle a des choses et et les oculi de la bourse du travail sont par le désordre. Un sentiment d’ur- des lieux quand elle-même est en vus de dessous; les panneaux ou les gence, d’instabilité s’installe alors (...). mouvement. Le déplacement permet quelques mots sur une affiche, aperçus Invité à voyager dans les espaces com- de parvenir à un regard plus acéré et en passant, sont représentés selon une posés, l’œil rebondit d’un élément à véritablement synthétique. (...) Ainsi perspective oblique. L’approche objec- l’autre, emboîtant le pas d’une figure, Christine Crozat marche, flâne, se tive de la réalité vient en quelque sorte revenant en arrière, butant sur tel presse, se perd, avec cette faculté de contrebalancer la dimension subjective message. Désorienté par un fléchage faire du trajet le plus banal et le plus de l’interprétation graphique et des contradictoire, il poursuit son chemin prévisible une nouvelle expérience commentaires anecdotiques parfois dans des directions opposées, allant et du regard. (...) Lorsqu’elle marche, ajoutés au bas des dessins. venant entre la première et la seconde se rendant d’un point à un autre, elle couche de papier. Composante essen- remarque, note mentalement, photo- A propos de signalétique tielle des dessins, la transparence du graphie parfois. Elle s’arrête sur l’ar- Et à partir de là, elle va, et nous allons support permet de réintroduire une chitecture d’un bâtiment, s’étonne de à sa suite (..) ; des panneaux nous distinction entre le premier plan et tel détail infime, retient quelques uns orientent, nous indiquent la voie, nous le fond de l’image, de contrecarrer des morceaux de vision qui ont rythmé dévient, nous arrêtent parfois…, ces l’excès de planéité des formes pour son parcours, ceux en particulier qui panneaux que nous regardons sans déjouer ainsi les pièges de la fron- entrent en résonance avec sa propre vraiment les voir, dont nous compre- talité. La circulation à laquelle nous histoire. La restitution sur le papier nons immédiatement le message sans sommes conviés obéit pour le moins de ces fragments épars s’effectue sur avoir à le déchiffrer. Nous allons là aux principes d’une organisation et un mode économe. Toute velléité de où la nécessité nous conduit, là où le d’un cadrage pleins de souplesse. description est abandonnée au profit caprice nous pousse, où le hasard nous Les dessins de Christine Crozat nous d’une notation graphique minimaliste. guide, faisant l’usage, communément rendent plus attentifs et plus sen- Les motifs ne sont pas seulement partagé, de la cité.(...) sibles aux signes qui nous entourent. sortis de leur contexte, dénués de En sémiologue experte, Christine Négligeant leur signification première, toute consistance, ils sont aussi nus Crozat s’empare de cette pluralité de nous sommes emportés à notre tour et incomplets, donnant un sentiment signes, juxtaposant ou enchevêtrant dans d’autres mondes régis par une de légèreté, d’apesanteur que l’emploi les systèmes idéographique, pictogra- poésie paradoxale et le jeu de fécondes de papiers fins et transparents ne fait phique et alphabétique, pour recom- associations. que redoubler. Leur disposition dans poser des parcours imaginaires. Quand
ESPACES FICTIFS : OÙ EST LE MERVEILLEUX ? On caractérise volontiers l’art de Jean Le Gac de narratif. Dès les années 1970, l’artiste se détourne de la peinture au profit d’œuvres juxtaposant texte et photographie ou bien texte et dessin au pastel comme dans la série Le Délassement du peintre. Dans un troublant exercice de mise en abyme, Jean Le Gac crée Le Peintre, un anti-héros se délectant d’aventures stéréotypées inspirées de la littérature populaire des années 1930, qu’il associe à d’autres personnages tout aussi fantasmés. Jean Le Gac Amazone, Lieutenant et Le Peintre, 1987, lithographie, don de la galerie lelong, 2018, photo MBA Caen © Paris, ADAGP, 2021 Alberto Cremonini, A travers le miroir, 1963, PIerre Buraglio, Trio, 2001, technique mixte, Hélène Delprat, Bad taste, Donkey burger, huile sur toile, dépôt du Conseil régional de achat du musée, 2003, photo MBA Caen © 2017, acrylique sur papier marouflé sur toile, Normandie, 1995, photo MBA Caen © Paris, Paris, ADAGP, 2021 achat du musée, 2019, photo MBA Caen © ADAGP, 2021 Paris, ADAGP, 2021
HÉLÉNE DELPRAT Hélène Delprat poursuit un travail singulier, risquaient à une forme de préciosité sédui- dessin cerné de noir, de gris ou de blanc de au fil d’un parcours de près de quarante an- sante. Hélène Delprat décrit les Bad taste son étrange figure et l’éclatant ornement nées marqué par le goût de la recherche. comme des « peintures un peu criardes, végétal jeté sur le fond rouge. Une formation classique – l’artiste est di- proches de l’affiche ou de l’imagerie. » Ces Au printemps 2018, le musée invitait plômée de l’école des Beaux-Arts de Paris, compositions naissent de la transforma- Hélène Delprat dans son cycle « Ré- pensionnaire de la Villa Médicis à Rome tion d’images, de photos d’archives, d’af- sonance » dédié à la création contem- entre 1982 et 1984 -, alliée à une maîtrise vir- fiches de cinéma, d’illustrations diverses poraine. L’exposition et le catalogue qui tuose de la peinture, gage de ses premiers trouvées sur Internet. « La manipulation l’accompagnait révélaient un art de la succès avec la galerie Maeght, l’engagent des formes, précise l’artiste, crée aussi des suggestion ironique, du déplacement, de en réaction à fuir toute facilité. Quittant espèces monstrueuses, des créatures sem- la métamorphose. Les œuvres d’Hélène la scène artistique dès 1995, elle traverse blables à celles présentées dans les Delprat grincent subtilement ; elles ins- les deux décennies qui suivent dans une Wunderkammer. » Hélène Delprat col- taurent une forme d’écart, de tension ou solitude choisie, avant que la galerie Chris- lectionne les curiosités du monde, qu’elles d’inconfort. L’artiste n’a qu’un souci : res- tophe Gaillard ne la redécouvre en 2009. soient merveilles, bizarreries ou horreurs. ter en mouvement, en capacité de voir le Hélène Delprat développe un travail de Aussi présente-t-elle le Donkey Burger, monde. Pour le reste, elle n’a pas de leçon à peinture, élargi au dessin, à l’écriture, à la silhouette humaine affublée d’une double donner, pas de message à délivrer. Comme vidéographie et à la sculpture. La peinture, tête d’âne, comme la figure inversée de elle le confesse elle-même dix ans après pour autant, reste ce qui « ancre tout chez l’agneau à deux corps conservé au Muséum la série des Bad Taste : « Je n’ai pas envie [elle] ». S’il ne s’est jamais agi de prendre d’histoire naturelle de Bordeaux. Ses ta- d’en parler. » Ce regard si singulier qu’Hé- de la distance avec cette technique, l’ar- bleaux, indique-t-elle, « disent les his- lène Delprat pose sur le monde, critique tiste ne cesse en revanche de lutter contre toires acides des hommes-animaux, ceux sans être sentencieux, à la fois frontal et les dictatures du beau et du bon goût. « Je des fables ou encore de Hogarth : histoires métaphorique, fait d’une inquiétude fon- n’essaie pas de faire laid, explique-t-elle, je de crime, de ruse, de violences grotesques, damentale autant que d’une volonté de veux aller au-delà de mon propre goût, qui histoires de singes-peintres à un seul œil et résistance invaincue, est sans doute la clé m’entraîne plus volontiers du côté de Vélas- d’ânes savants stupides et pervers. » de son art volontiers figuratif, plus que plei- quez ou de Poussin. Mais ce n’est pas facile Fascinée par l’esprit encyclopédique et in- nement narratif. Elle apparaît proche, dès d’avoir la laideur acceptable. » (cité par Ca- ventif propre au XVI siècle, Hélène Delprat e lors, de quelques-uns des artistes présents roline Bourgeois, Les travaux et les jours, prête attention à ce qui s’apparente à des dans la collection des XXe et XXIe siècles du 2017, p. 14). objets de curiosité, mais elle se tourne éga- musée des Beaux-Arts de Caen, et qui, tels Comme le souligne Dominique Païni (Art- lement vers la peinture de la Renaissance, Zoran Music (Nous ne sommes pas les der- press 447, p. 30), « deux artistes s’affrontent celle des grotesques notamment. Celle-ci niers, 1970 ; Double portrait, 1989), Paul Re- en elle », l’un d’eux apparaissant comme vient nourrir son imaginaire figuratif, son beyrolle (Suicide nu, 1982 ; Pas de question, « une sorte de Jiminy Cricket, un fou qui penchant pour les créatures hybrides ou 1989) ou Jim Dine (Pinocchio, portfolio de ose conseiller et critiquer sur l’épaule d’une pour les masques. Elle alimente encore son 41 lithographies, 2006) dérobent toute pos- reine en pleine possession de ses moyens sens aigu de l’ornementation, clé d’éton- sibilité de portrait, dans la quête désespé- picturaux. » La série de tableaux intitulée nants écarts, ou surprises visuelles. Au rire rée d’une identité mise à mal. Ces œuvres Bad taste, réalisée en 2007 était initiale- grinçant des deux têtes d’âne de Donkey dessinent un ensemble central dans la col- ment présentée en regard de petites toiles Burger répond une floraison résolument lection du musée en même temps qu’un abstraites, ensemble de monochromes joyeuse de végétaux ici stylisés, là som- jalon essentiel pour qui veut appréhender éclairés de poudre argentée intitulés Skele- mairement esquissés. Dénué d’arrière-plan, la création artistique dans son rapport au ton. Les premiers jouaient de la tentation le tableau d’Hélène Delprat instaure une monde après 1945. du mauvais goût, quand les seconds se tension fondamentale entre la précision du
ESPACES FICTIFS : OÙ EST LE MERVEILLEUX ? Avec Vincent Bioulès, Judith Reigl ou Marc Desgrandchamps, la peinture devient moins un espace de fiction qu’un espace fictif, affranchi de tout récit. Tous trois créent des paysages suspendus, schématiques et étranges, qu’habitent des présences indéchiffrables, comme revenues d’un âge d’or. Si Hélène Delprat partage avec eux le goût de la spéculation et de la synthèse, son univers reste toutefois très différent, marqué par le merveilleux autant que par un certain goût de l’horreur. Vincent Bioulès Le Débarquement à Cythère, 1997-1999, huile sur toile, achat du Judit Reigl, New York, 2001, huile sur toile, musée, 2000, photo MBA Caen © Paris, ADAGP, 2021 dépôt du Fonds de dotation Judit Reigl, photo MBA Caen © Paris, ADAGP, 2021 Études Le Débarquement à Cythère, 1997, pastel et gouache sur papier, don de l’artiste, 2015, photo MBA Caen © Paris, ADAGP, 2021 Marc Desgrandchamps Sans titre, 2016, huile sur toile, achat du musée Latona I, II, III, 2018, lithographie, don de l’artiste et de la galerie Lelong en 2017, photo MBA Caen © Paris, ADAGP, 2021 en 2019, photo MBA Caen © Paris, ADAGP, 2021
La politique du musée en matière d’art contemporain Le musée des Beaux-Arts de Caen est le fruit d’une histoire nationale, sa collection étant initialement constituée par des envois de l’Ėtat (en 1804 et 1811). Les premières œuvres parvenues à Caen sont des chefs-d’œuvre de la peinture européenne des XVIe et XVIIe siècles, lesquels constituent des ensembles conséquents, encore enrichis au fil des décennies. Le musée des Beaux-Arts de Caen a acquis sa première œuvre contemporaine – une toile de Soulages – en 1974. Il a depuis lors constitué un fonds qui en 2015 Le château de Caen et la façade du musée, comptait environ 130 œuvres - ou ensemble d’œuvres, peintes, dessinées et gra- François Morellet, Un angle deux vues pour trois arcs, 2015, Paris, Adagp, 2021 / Marta Pan, Sphère coupée 1400- 1000, vées - d’ après 1950. Ce fonds sans racines dont l’enjeu initial était de s’arrimer au 1991, dépôt du FNAC, photo MBA Caen, droits réservés fil des collections anciennes tout en privilégiant une visée a-historique, n’oppose pas les courants de l’abstraction à ceux de la figuration. Le musée a fondé un premier corpus pensé autour de deux « visions du monde complémentaires », une « peinture de la chair » venant s’écrire en parallèle d’une « peinture de l’espace ». À la première appartiennent ces œuvres nées d’une tension au réel, dans l’affronte- ment d’une histoire qu’il faut tenter de reconnaître et ponctuer de façon critique, Pérugin, en ses refoulements comme en ses points de fixation, à l’instar des compositions Le Mariage de la Vierge, 1504 abstraites de Mikos Bokor ou des tableaux figuratifs de Zoran Music et de Paul huile sur toile, Rebeyrolle. La seconde est éclairée par de grandes toiles de Maria-Elena Vieira Musée des Beaux- da Silva, Joan Mitchell, Monique Frydman ou Judit Reigl. Arts de Caen Ce premier élan d’ouverture au contemporain a fléchi en même temps que les acquisitions déclinaient au début des années 2000. Cependant, le champ s’est ouvert à la sculpture (création d’un parc de sculptures dans l’enceinte du châ- teau en 2007 : Rodin, Bourdelle, Huang Yong Ping, Morellet, Plensa...) et à l’es- tampe contemporaine qui a constitué un axe d’acquisition maintenu (Baselitz, Jim Dine, Sans titre, 2006, Bergman, Dine, Hartung, Plensa, Sicilia...sont venus augmenter le fonds de lithographie, 50 000 pièces anciennes). Depuis 2015, 24 œuvres ou ensembles d’œuvres peintes, Musée des Beaux- dessinées et gravées après 1950 ont été acquises ou déposées. La même année, Arts de Caen le musée a initié un partenariat avec le Frac Normandie Caen, doublé en 2016 de « Résonance », un nouveau cycle de résidences d’artistes. Cela a permis de réinter- roger la place du contemporain au sein du musée, mais également de ré-impulser Jaume Plensa, une dynamique d’enrichissement, par le biais de donations, de dépôts et d’achats, Lou, 2015, à la faveur de laquelle ont été intégrées des œuvres de Marc Desgrandchamps, fonte de fer, Hélène Delprat, Gilgian Gelzer, Patrick Gabler, Christine Crozat, ou bien encore dépôt courtoisie de l’artiste et de la de Jean Le Gac, Gérard Titus Carmel, Per Kirkeby, Anna-Eva Bergman, Hans Galerie Lelong, Paris Hartung... Le musée présente aujourd’hui un nouveau visage de sa collection © Paris, Adagp, contemporaine remise en mouvement, fidèle au parti pris initial d’un fonds simul- 2021 tané plutôt que chronologique, à rebours de toute considération d’école, et met- tant particulièrement en valeur l’un des points constitutifs de l’identité du musée : la rencontre de la peinture et de l’estampe. Hélène Delprat, Je n’ai pas envie d’en parler, 2017, posca sur carton, acquisition du musée, 2019 © Paris, Adagp, 2021
Fort de cette collection pensée comme un véritable continuum de la création artistique, le musée porte une programmation ouverte, mêlant de grandes expositions dédiées à la peinture ancienne (L’école du regard, Caravage et les peintres caravagesques de la collection Longhi, 2021 ; Théodule Ribot, une déli- cieuse obscurité, 2022), des invitations à des artistes contemporains accueillis en résidence (Résonance, Horizons proches...), et des études thématiques et transhistoriques (L’attention au réel. Art flamand et hollandais d’hier et d’aujourd’hui, 2017 ; MURS, 2018 ; Sous le regard de Méduse,2023 ; Horizons, 2025). La richesse de la programmation pose le musée comme un lieu de circulations, où l’art, quel que soit son siècle d’émergence, constitue un moyen non didactique de saisir une histoire commune en per- pétuelle construction. La programmation contemporaine Nouvelle invitation aux plasticiens; Horizons proches Expositions : Jim Dine, mars 2021 Gérard Traquandi, exposition personnelle, printemps 2022
janvier 2021 - mars 2022 Horizons proches En soutien aux artistes qui vivent et travaillent en Normandie et que la crise sanitaire et économique du Covid 19 a fragilisés, le musée invite six plasticiens à investir ses espaces d’accueil, à tour de rôle, pendant l’année 2021. Cette carte blanche permettra de découvrir des œuvres achevées, des pro- jets en cours ou des propositions à éprouver, dans une forme de monstration non réductible au format classique de l’exposition. Fenêtre ouverte sur l’atelier, elle mettra en lumière l’exigence du travail de l’artiste, tantôt en lien, tantôt à rebours de la nécessité de faire œuvre. Jean-Claude Mattrat / janvier Jean-Claude Mattrat conçoit Iconomoteur comme principe de production, éditions de livres sans texte mais avec titres et de textes sans livre et sans titre, à un rythme accéléré dans son atelier situé à Avenay. Musée ouvert du mardi au vendredi (en Claire Soulard / mars juillet et août du lundi au vendredi) de 9 h 30 Née en 1986 et diplômée de l’ésam Caen/Cherbourg en 2009, elle construit une œuvre à 12 h 30 et 13 h 30 à 18 h. Le week-end et hybride. Mélant peinture, feutre, craie, crayon, elle compose des superpositions et des jours fériés de 11h à 18h épaisseurs qui dévoilent le processus de création. Ses travaux qui, au premier abord, donnent une impression de dessins enfantins, sont bien trop complexes et précis. Ils GRATUIT pour les moins de 26 ans et pour créent une confusion entre ce temps passé de l’insouciance et celui du présent : un tous le 1er week-end du mois. travail structuré, construit et où apparaissent désirs, tristesse, joie, peur, espérance… Tarifs de 2, 50 € à 3,50 € Pascal Casson / mai La peinture de Pascal Casson est très loin de cet art qui ne tient que par la force, presque magique, d’un discours. Elle n’illustre pas, ne démontre pas : elle est, voilà tout. Certes, vous pourrez y deviner ici des formes végétales, organiques, là des che- mins, des frontières, des bâtiments, et c’est une vieille habitude humaine que de vouloir identifier. Or la meilleure façon d’approcher la peinture de Pascal Casson est précisément de s’efforcer de se déprendre du langage pour laisser toute leur place à vos sensations, nées des formes et des couleurs*. Thibault Bélliere / juillet Né en 1988, il interroge la photographie et plus largement l’image. Son travail est un jeu de seuils qui s’entrecroisent et qui s’informent l’un l’autre, inscrits par l’artiste dans des protocoles de création qui intègrent l’imprévu, l’aléatoire à travers des médiums variés qui s’imposent à chaque œuvre. Axelle Rioult / septembre Axelle Rioult vit en Normandie et travaille sans frontières. Elle utilise essentiellement le médium photographique, et réalise des installations et/ou des livres d’artiste. Les CONTACTS PRESSE marges et les minorités l’ont toujours attirées, l’interrogeant en miroir en tant que Alambret Communication femme artiste, sur la question du Pouvoir (liberté, résistance, visibilité, relation au Leila Neirijnck - leila@alambret.com vivant, fragilité, interrogation sur la culture occidentale dominante…). 01 48 87 70 77 - 06 72 76 46 85 Presse régionale Mélissa Mérinos / novembre Musée des Beaux-Arts Diplômée de l’ésam en 2018, Mélissa Mérinos a bénéficié dès 2019 d’une résidence de Anne Bernardo - a.bernardo@caen.fr création à Prague, en République Tchèque. Artiste du champ des formes documen- taires, son travail est une réaction au monde auquel nous sommes confronté.es. Par Musée des Beaux-Arts Le Château une observation sensible et active Mélissa utilise le temps passé sur le terrain comme 14000 CAEN - 02 31 30 47 7 www.mba.caen.fr matière première; la photographie, la vidéo, l’écriture et le dessin comme des outils pour enregistrer son regard; et le travail en atelier pour donner à voir ce réel dans un langage autre que celui hégémonique. * Extrait du texte de Yann Ricordel
6 mars - 5 septembre 2021 Cabinet d’art graphique Jim Dine PINOCCHIO Propulsé au-devant de la scène artistique d’après-guerre par ses happenings et ses détournements d’objets usuels, Jim Dine (né en 1935) développe, dans les décennies suivantes, l’essentiel de son œuvre autour de motifs récurrents, tels Geppetto begins les outils, le cœur, le peignoir, la Vénus de Milo ou plus récemment Pinocchio. to make a puppet, Si la marionnette entre dans la vie de Jim Dine dès 1941 grâce au dessin animé réa- issu du portefolio Pinocchio, 2006, lisé par Walt Disney, ce n’est qu’en 1997 qu’elle vient hanter un grand nombre de lithographie, Caen, ses photographies, peintures, sculptures et estampes. musée des Beaux- Offert par l’artiste à la suite de l’exposition que le musée lui a consacré en 2007, le Arts, © droits réservés portfolio Pinocchio (éditions Steidl, 2006, impression atelier Michael Woolworth) – soit une suite de quarante-quatre lithographies exposée au cabinet d’art graphique dans son intégralité –, prend appui sur les Aventures de Pinocchio imaginées par Carlo Collodi et publiées dans leur version définitive en 1883. Les trente-six chapitres du conte sont illustrés par autant d’estampes qui intègrent dans l’image les en-têtes du livre, les mots venant s’insinuer entre les personnages. Geppetto makes Cette histoire de la transformation d’un morceau de bois en petit garçon sage Pinocchio new feet a pour Jim Dine des résonances autobiographiques. Il s’identifie à Pinocchio, le pantin désobéissant et menteur, mais aussi à Geppetto, l’artisan qui l’a façonné de ses mains et le père qui l’a guidé à travers une succession de rudes épreuves. Difficile dans son accomplissement, la métamorphose est aussi pour Dine « clairement une métaphore de la création artistique », thème qui lui est particulièrement cher. Commissaire : Caroline Joubert He tells a lie CONTACTS PRESSE Alambret Communication Leila Neirijnck - leila@alambret.com 01 48 87 70 77 - 06 72 76 46 85 Presse régionale Musée des Beaux-Arts Anne Bernardo - a.bernardo@caen.fr Musée des Beaux-Arts Le Château The terrible Dogfish 14000 CAEN - 02 31 30 47 7 Is he alive or dead ? www.mba.caen.fr Musée ouvert du mardi au vendredi (en juillet et août GRATUIT pour les moins de 26 ans et pour du lundi au vendredi) de 9 h 30 à 12 h 30 et 13 h 30 à tous le 1er week-end du mois. 18 h. Le week-end et jours fériés de 11h à 18h Tarifs de 2, 50 € à 3,50 €
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