Christian Dior, la nature pour seule muse
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Revue bimestrielle - N° 166 - janvier/février 2014 - 5,50 € Christian Dior, la nature pour seule muse
Ex t r a i t Sommaire Reportage Organe Officiel de Presse - AIFF/Concours Lépine (Reconnue d’utilité publique) n° 166 janvier/février 2014 - 113e année Christian Dior : 4 - 31 la nature pour seule muse ADMINISTRATION RÉDACTION - PUBLICITÉ La villa Les rhumbs, maison d’enfance du créateur ..... 4 12, rue Beccaria 75012 Paris Tél. 33 01 40 02 04 50 La passion des jardins et des fleurs ........................................... 7 Fax 33 01 40 02 04 51 e-mail : crslepine@concours-lepine.com www.concours-lepine.com Portrait de famille ................................................................................... 10 DIRECTEUR-GÉRANT Christian Dior et les artistes ............................................................. 11 Gérard Dorey Un succès phénoménal dès sa première collection ..... 13 DIRECTEUR DE LA PUBLICATION Barbara Dorey Parfum d’enfance : les fragrances Dior ................................... 16 RÉDACTEURS Baccarat / MOF (Meilleurs ouvriers de France) .............. 19 Barbara Dorey Chantal Palluau Le musée Christian Dior, unique « Musée de France » Cécile Crétien consacré à un couturier ................................................................... 20 PUBLICITÉ - ABONNEMENTS Chantal Palluau Dior et les Impressionnistes ............................................................... 21 PHOTOGRAPHE Publication de l’ouvrage Impressions Dior ............................ 26 François Pajot Crédit photos (intérieur) : De Christian Dior à Raf Simons : © Concours Lépine, sauf mentionné, Reproduction interdite sur Internet une même vision des femmes .......................................................... 27 RÉALISATION GRAPHIQUE Nomination de Peter Philips, Directeur de la Création ET IMPRESSION Comm’elle communication visuelle et de l’Image du Maquillage Dior Parfum ............................. 28 Tél. : 01 69 26 96 96 Chronologie ............................................................................................... 28 ABONNEMENTS (valable 1 an) France 39 € Expositions du Musée Christian Dior depuis 1997 ............ 29 Étranger 46 € Dior, Images de légende .................................................................. 29 PUBLICITÉ (HT) Couverture (3e et 4e) 1 250 € Page intérieure 880 € Actualités Dior ........................................................................................... 30 la 1/2 page 485 € le 1/4 de page 401 € Tout règlement à effectuer à l’ordre de : l’A.I.F.F./Concours Lépine Salons & Expositions INVENTION MAGAZINE décline toute responsabi- lité quant aux opinions formulées dans les articles, celles-ci n’engagent que leurs auteurs. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de Les secrets de la laque 33 - 41 française ses ayants droit ou ayants cause, est illicite au terme de la loi du 11 mars 1957 sur la propriété littéraire et artistique, et constitue donc une contrefaçon sanc- tionnée par les articles 425 et suivant du Code Pénal. Les Arts Décoratifs mettent le XVIIIème siècle à l’honneur 33 COMMISSION PARITAIRE N° 0314 G 88847 Naissance des laques français dans le contexte européen du XVIIème siècle, Monika Kopplin ............................. 35 Les vernisseurs du Faubourg Saint-Antoine © Musée Christian Dior sous le règne de Louis XIV, Daniel Alcouffe ............................. 36 La villa Le Lackkunst Museum, Münster, Allemagne .............................. 41 Revue bimestrielle - N° 166 - janvier/février 2014 - 5,50 € Christian Dior, « les Rumbs », la nature pour seule muse actuel musée Christian Dior 2 Invention Magazine - janvier/février 2014
t r a i Ex PPoint t i de Vue La Haute Couture au rang de l’Art. Christian Dior, la nature pour seule muse. Christian Dior, 2ème d’une fratrie de 3 garçons et 2 filles, naît dans la station balnéaire de Granville le 21 janvier 1905. Leurs parents, Madeleine et Maurice Dior, appartiennent à une bourgeoisie granvillaise et côtoient au quotidien des personnalités célèbres de l’époque. Maurice possède une industrie très prospère et devient le plus célèbre de la famille Dior. Nous citerons Lucien Dior, Ministre du Commerce en 1921, puis Ministre du Commerce et de l’Industrie de 1922 à 1924. Au Gérard Dorey, Président terme de ces mandats, il a choisi de s’associer avec son cousin Maurice pour développer dans leur usine de Donville la fabrication d’engrais phosphates et super phosphates, de l’acide sulfurique et tous les produits chimiques de l’époque. Les émanations de ces fumées vont incommoder tout particulièrement les habitants des environs. © Dior Horlogerie Dans les années 20, il développe la fabrication de lessive et crée la javel Dior et la fameuse lessive Saint-Marc. Au cours de ces années, Madeleine Dior engage la restauration de la villa des Rhumbs. En parallèle, elle réhabilite le parc de la propriété avec des travaux d’horticulture en compagnie de ses enfants et, particulièrement, du futur couturier qui partage une passion pour les fleurs, au point que Christian Dior gardera ce souvenir d’enfance et s’en émerveillera pour toujours. Ceci ira jusqu’à influencer ses créations très marquées par l’élégance maternelle très raffinée, ses tenues représentant le style Belle Epoque réalisées pour le théâtre. Fort de cette passion, le couturier décide de s’installer à Paris en 1947 à l’âge de 42 ans, avec la volonté de créer sa griffe : « je dessinais des femmes-fleurs, épaules douces, bustes épanouis, tailles fines et jupes larges ». Sa première collection s’est déroulée le 12 février 1947 au siège social parisien de la Maison de Couture, 30 avenue Montaigne. Ce jour-là comme les saisons suivantes, le couturier révolutionne littéralement Bracelet en veau verni noir, mouve- ment automatique, série limitée à la mode et la silhouette féminine en prônant un retour en arrière. « La couture souhaitée est de revenir 88 exemplaires. 46 500 euros. à sa fonction première qui est de parer les femmes et les embellir », écrit-il. Pour autant comprendre l’engouement que suscite alors ces lignes doit être placé dans un contexte social : on est au lendemain de la seconde guerre mondiale, une période de restriction et de grèves. « En terme d’allure, les femmes Christian Dior nous dévoile arborent encore des profils de « zazous » et chaussures compensées, effets de bas, de jupes courtes à en exclusivité sa dernière l’image d’une mode de tristesse et de pénurie ». Futilité et superflu que Christian Dior n’hésite pas à création, la Dior VIII Grand mettre en avant. Ses modèles sont généreux et exigent des longueurs vertigineuses de tissus, les jupes Bal « Fil de Soie ». rallongent, les broderies s’enlacent, les fleurs partout s’épanouissent. Provocation et scandale pour Lorsqu’on agite le boîtier en les uns, miracle d’un décor qui renoue avec le plaisir et le sourire pour les autres. Toutes les femmes céramique noire, or rose et dia- du monde sont sous le charme de ce retour à l’art de vivre. Pour la première fois dans l’histoire, mants, le spectacle commence. un couturier influence de manière simultanée l’élite et le grand public. Lui-même en paraît surpris, La masse oscillante tendue de fil mais théorise ainsi son succès. « Lorsque devenu responsable d’un mouvement, j’ai voulu l’analyser et de soie et ourlée de diamants se met comme par magie à tour- compris qu’il incarnait avant tout le retour à l’art de plaire. » Il n’hésite pas en 1954 à démontrer sa noyer sur le cadran en nacre, propre mode avec la ligne haricot, baptisée aussi « flat look », silhouette à la fois longiligne, adaptée tels les jupons des somptueuses au changement de mœurs. robes de bal que Monsieur Dior aimait tant. En 1957, le Time offre sa « Une » à Christian Dior et son incroyable succès. Jamais auparavant un Soulignons le travail qui se dissi- couturier n’a occupé une telle place dans la presse américaine. Son premier séjour américain en 1947 a mule derrière cet effet de style, bouleversé sa conception de la mode. Il fut invité par le directeur du Grand Magasin de Dallas afin de celui d’une tisseuse capable de recevoir un Oscar de la couture, il débarque dans un pays où sa seule et première collection l’a rendu tendre son fil d’un diamant à un célèbre. autre sans le casser. Christian Dior disait « La soie est la reine Les Arts Décoratifs mettent le XVIIIème siècle à l’honneur du 13 février au 8 juin 2014 des matières, la plus ravissante, la plus féminine, la plus enchan- en présentant une grande exposition sur le secret de la laque française. teresse… ». Bel hommage. Le musée révèle l’engagement dans la technique qui incarne le luxe et le raffinement du plus important au plus discret, du plus somptueux au plus modeste : meubles, panneaux, boiseries, objets d’ameublements, boîtes et étuis, carrosses et traîneaux dessinent l’histoire largement partagée par une clientèle parisienne et européenne. Cette exposition est réalisée en collaboration avec le Lackkunst Museum de Münster en Allemagne. Quelques décennies seulement après l’arrivée des premiers laques chinois et japonais en Europe, les artisans dont le nom est parvenu jusqu’à nous, ont ouvert des ateliers spécialisés dans la fabrication d’objets laqués en utilisant le vernis Martin. Etant donné la nouveauté de la technique, des vernisseurs pionniers méfiants s’installeront principalement dans le Faubourg Saint Antoine comme l’avaient fait les premiers ébénistes. Le Faubourg jouissait du privilège de l’exemption du contrôle des corporations, peu favorable aux innovations. Que faut-il penser des secrets des Martin ? Peut-on considérer qu’il y avait un véritable secret ? Peu importe la recette, la différence de leur ouvrage réside dans un savoir- faire d’exception. « Je ne pense jamais au futur, il vient bien assez tôt » Albert Einstein (1879-1955) Invention Magazine - janvier/février 2014 3
Reportage tage Ex t r a i t Christian Dior : la nature pour seule muse Le Musée Christian Dior de Granville a récemment pré- senté « Impressions Dior », une exposition qui témoigne des liens per- manents unissant la Maison Dior au mou- vement impressionniste, des premières créations de Monsieur Dior en 1947 à celles de Raf Simons en 2012. Cette exposition fut également l’opportunité de découvrir l’amour profond que portait Christian Dior à la nature, aux fleurs et aux jardins et à quel point elle fut une source d’inspiration inépuisable pour le créateur. © DR © DR Affiche de l’exposition « Impressions Dior » La villa Les rhumbs, maison d’enfance du créateur « La maison de mon enfance… j’en garde le © Musée Christian Dior. Marc Lerouge souvenir le plus tendre et le plus émerveillé. Que dis-je ? Ma vie, mon style, doivent presque tout à sa situation et à son architecture ». Christian Dior. La villa « Les Rhumbs » aujourd’hui, actuel musée Dior © DR La Villa « Les Rhumbs » 4 Invention Magazine - janvier/février 2014
r a i t © Office de tourisme Jersey Reportage tage Ex t © DR Motif de la rose des vents, « Les Rhumbs » Vue sur Jersey depuis la mer ville. G. Gontier e Gran V ille d n– a tio nic mu c om Christian Dior a été fortement marqué par la villa « Les Rhumbs », sa d e ice maison d’enfance située à Granville, en Normandie. Acquise en v r Se ll. Co 1905, le futur couturier est encore un nourrisson lorsque sa mère © Madeleine, persuade son mari Maurice Dior, d’acheter cette villa anglo-normande qui surplombe la mer et depuis laquelle on peut apercevoir les îles Chausey et Jersey. Christian Dior y passera les cinq premières années de sa vie puis ses vacances. La villa « Les Rhumbs » doit son nom au terme de marine désignant les trente-deux divisions de la rose des vents qui orne la mosaïque au sol de l’une des entrées de la villa. Vue sur les îles Chausey Vue sur la pointe de Granville et vers les îles Chausey depuis © Vincent Leret, musée Christian Dior la terrasse du musée Christian Dior Invention Magazine - janvier/février 2014 5
© DR Reportage tage Ex t r a i t Christian Dior & moi Editions Vuibert Peu avant sa mort en 1957, Christian Dior entreprit de publier ses Mémoires où il retrace © Coll. Service de communication – Ville de Granville. G. Gontier le destin exceptionnel d’un homme qui, i n c o n n u u n j o u r, célèbre dans le monde entier le lendemain, révolutionna la mode. C’est ce parcours hors du commun que Christian Dior nous fait découvrir. Il invite le lecteur à passer les portes du 30, avenue Montaigne pour assister à la naissance d’une collection ou pénétrer dans les coulisses d’un défilé. Et, surtout, il dit ses intuitions géniales, avoue ses doutes, ses audaces, son obsession du détail et du travail soigné, tout ce qui en fit l’un des plus grands noms de la haute couture. Intérieur de la villa avec vue sur le jardin En 1956, lorsqu’il publie à 51 ans ses mémoires , Christian Dior années, supervisera les travaux de rénovation intérieure et ex- se réfère avec précision au souvenir de Granville et de sa pre- térieure de la villa. La villa se trouve au milieu d’un jardin situé mière demeure. Il y décrit la rosace du plafond de sa chambre, sur une crête de falaise dominant la mer. Il est l’un des rares les panneaux peints d’après des estampes japonaises, la ma- jardins d’artistes du début du XXème siècle encore conservé, et gnifique salle à manger Henri II et le bureau de son père, où il restauré par Guillaume Pellerin dans le respect des aménage- est interdit d’entrer. ments réalisés par Madeleine, passionnée par l’art des jardins. C’est Madeleine Dior, la mère du couturier, qui pendant deux Cette imprégnation du jardin clos qui a protégé son enfance déterminera en Christian Dior un idéal de vie. Il n’est pas étonnant qu’il avoua ensuite une vocation d’architecte. Son goût pour les maisons et la décoration, son sens de l’art de vivre et son appétit pour les grandes et belles tables ne l’en ramènent pas moins et tout au long de sa vie à ses rêves de confort, de bien-être, à un mode de vie simple et raffiné qu’il avait connu enfant dans sa famille. © Vincent Leret, musée Christian Dior Lieu de mémoire très évocateur de l’art de vivre à la Belle Epoque, la Villa accueille le musée Christian Dior depuis 1997 et regroupe au- tour de la personnalité multiple de Christian Dior, des collections illus- trant l’art de la mode et restituant le contexte artistique et culturel du couturier. Christian Dior a lui-même dessiné les plans de la pièce d’eau et de la Pergola autour de 1925. 6 Invention Magazine - janvier/février 2014
Reportage tage Ex t r a i t Modèle de haute couture et de prêt- à-porter, souliers, chapeaux, bijoux flacons de parfums… et de nombreux autres accessoires d’autres couturiers ainsi qu’un riche fond documentaire rassemblant photographies et des- sins de mode. Composé d’un parc à l’anglaise renfermant des essences rares et exotiques, deux roseraies, des bam- bous et des pins parasols, ce jardin © Vincent Leret, musée Christian Dior touche le visiteur parce qu’il a été le lieu d’expérimentation du jeune couturier. Féru de dessin et d’archi- tecture, il a réalisé autour de 1925, les plans de la pièce d’eau et de la pergola toujours en place. Vue de la Pergola et de la pièce d’eau du jardin Christian Dior. La passion des jardins et des fleurs A Granville, Christian Dior donne libre cours à ses envies de jardin d’eau et met en pratique les conseils lus dans les catalogues VILMORIN. © DR Sa pergola entoure un miroir d’eau ceinturée de briques rouges. Il opte pour un jardin de plantes vivaces aménagé à la façon des parterres simples et sauvages. Il veut retrouver la poésie des fleurs qui bordent les sentiers de campagne. « Pour planter un lilas, un poirier, un saule, choisir les oignons de tulipes, les couleurs des cosmos et des zinnias, connaître les mœurs des petits pois ou celles de l’estragon, Christian Dior n’a pas son pareil… Après la couture, ce qu’il préfère, c’est son retour hebdomadaire à la terre », analyse Marika Genty dans la biographie Christian Dior de Marie-France Pochna. Christian Dior Marie-France Pochna Edition Garamond, 2009 (éditeur tchèque) Když se 12. února 1947 vyzývavě prošla Paříží žena v rozhoupané plisované sukni a s kloboukem lehce posazeným na stranu, bylo jasné, že v této ztělesněné Christian Dior et koketerii se válkou zdecimovaná Francie vrací k son frère Raymond obnově svého proslulého umění žít. Christian Dior se au bord du bassin stal okamžitě slavným, i když pravým strůjcem jeho dans la Pergola de la villa úspěchu byli Američané, zhlížející se v tradicích staré « Les Rhumbs » Evropy. První životopis tohoto módního návrháře se pokouší nastínit jeho pečlivě střežený soukromý © Musée Christian Dior, Granville život, z něhož probleskovaly na veřejnost jiskry jeho smyslu pro humor. K úplné spokojenosti mu po deseti letech vyčerpávající práce stačilo jedno: odpočinek. Christian Dior zemřel ve dvaapadesáti letech na vrcholu slávy. (Voir traduction page 30) Invention Magazine - janvier/février 2014 7
Reportage tage Ex t r a i t © Coll. Service de communication – Ville de Granville. G. Gontier © Coll. Service de communication – Ville de Granville. G. Gontier Jardin du Musée Christian Dior Jardin du Musée Christian Dior Son premier défilé au 30 avenue Montaigne, le 12 février 1947 est aussi un hommage rendu aux fleurs : Pois de senteur les visiteurs sont accueillis dès l’entrée par des palmiers- quincias, des delphiniums bleus, des pois de senteur roses ou encore par le fameux muguet blanc. © DR © Musée Christian Dior, Granville © DR © DR Le muguet blanc, fleur fétiche du couturier devenue emblème de la Maison Dior Christian Dior pose en gentleman farmer 8 Invention Magazine - janvier/février 2014
Reportage tage Ex t r a i t © Don de Mrs David Kluger, The Metropolitan Museum of Art, New York Couturier, il demandera au brodeur Rébé des motifs floraux empreints de simplicité et de fraicheur. Il ne fait aucun doute que Christian Dior a commencé son « herbier » dans le © Musée Christian Dior jardin de son enfance et qu’il fut marqué par la roseraie plantée par sa mère. Plusieurs variétés Etoile porte-bonheur de roses ont d’ailleurs été de Christian Dior créées pour le couturier et l’une d’entre elles a été baptisée « Miss Dior » en hommage à la fra- grance du même nom. Plus que tout autre, la rose est sa fleur préfé- rée et repré- sente « un voyage en soi ». Détail de la robe «May» Christian Dior, collection printemps/été 1953 Roseraie du jardin de la villa « Les Rhumbs » © Musée Christian Dior, Granville © DR Rose « Miss Dior » Invention Magazine - janvier/février 2014 9
Reportage tage La couture de Christian Dior est inspirée par les lianes fines et les jupes corolles de la collection « New-Look » mais aussi, de saison en saison, les modèles aux noms de fleurs, les motifs et ornements de soie comme des pétales de rose, les impressions pâquerette, les entrelacs de feuilles, le rouge coquelicot, le bleu myosotis ou bleuet, le gris de la falaise de Granville. Sans oublier le muguet, fleur fétiche du couturier devenue emblème de la maison. Il en fit son parfum favori, avec Edmond Roudnitska, un des grands nez du siècle, qui créa « Diorissimo » en 1956. © DR Le grand parfumeur Edmond Roudnitska Portrait de famille Christian Dior est né à Granville, le © Dior © DR 21 janvier 1905. Son père Maurice Dior est un industriel prospère. Parmi les personnalités célèbres de la famille Dior, citons Lucien Dior, ministre du commerce en 1921, puis ministre du commerce et de l’industrie de 1922 à 1924, et Marguerite Dior (épouse Lanos) qui fut une des premières femmes médecins en 1901. Lucien Dior, Ancien Maurice Dior développe avec son ministre du commerce, cousin Lucien une entreprise de cousin de Maurice Dior, fabrication d’engrais. Dans les le père du couturier années 1920, c’est le lancement La famille Dior © Musée Christian Dior, Granville de la fabrication des lessives. La javel Dior et la fameuse lessive Saint-Marc sont créées. © Musée Christian Dior, Granville La famille Dior, debout de droite à gauche : Raymond, Bernard, Jacqueline et Christian. Au premier plan, entre Madeleine et Maurice, Catherine. Raymond, Christian et Jacqueline, vers 1910 10 Invention Magazine - janvier/février 2014
© Musée d’art et d’histoire de Granville Reportage tage © Musée d’art et d’histoire de Granville © DR Papier à entête Dior frères et fils Usines Dior à Donville (Manche) © Musée d’art et d’histoire de Granville Publicité d’époque pour les engrais dissous Dior Donville, panorama sur Granville. Vue prise des carrières. © Dior C’est dans ce contexte de prospérité grandissante que Christian vient au monde, second après Raymond d’une lignée qui comptera encore Jacqueline, née en 1908, Bernard en 1910 et Catherine en 1917. Elevée par une mère soucieuse des apparences, notamment celles de son intérieur et de son jardin, Madeleine Dior marque et influence le futur couturier. Il partagera avec elle ses travaux d’horticulture et la même passion des fleurs. Christian Dior admire aussi l’élégance maternelle. Issue d’une bourgeoisie raffinée, il est impressionné par ses tenues recherchées et caractéris- tiques de la mode Belle Epoque. C’est la mode de sa mère qui va commencer par l’inspirer, avant celle des Parisiennes. Madeleine Dior Son guide donc, c’est Madeleine, sa mère, jusqu’à sa mort Le jardin de la villa sera ouvert au public dès 1938. prématurée en 1931 d’une septicémie. Année fatale, puisque Maurice est contraint de se réfugier avec sa plus jeune fille c’est à cette même date que la roue tourne pour l’entreprise Catherine, dans le Var, chez leur fidèle employée qui y pos- familiale. Victime de la crise de 29, c’est le début de la ruine sède une petite maison. Jusqu’à la mort de son père en 1946, qui se solde en 1938 par la vente de la villa. Son mobilier est Christian Dior fait en sorte de leur venir en aide autant qu’il dispersé et la villa est achetée en 1938 par la ville de Granville. le peut. Christian Dior et les artistes Son ami Jean Cocteau dira de © Photo Christian Baraja © DR © DR ▼ lui dans les années 40, qu’il était « ce génie léger propre à notre temps dont le nom magique com- porte celui de Dieu et or ». Mais avant de devenir couturier et de connaître le succès, Christian Dior aura longtemps parcouru les chemins buissonniers au fil des- quels, à la manière d’un prome- neur contemplatif, il s’imprègne Le poète, graphiste, du paysage alentour, de la vie, de dessinateur, dramaturge l’époque et surtout des arts. et cinéaste français Jean Cocteau (1889-1963) Portrait de Christian Dior par Dior dessiné par Marc Chagall Bernard Buffet en 1954 1957 Invention Magazine - janvier/février 2014 11
Reportage tage Ex t r a i t DR De retour de Granville à Paris, au lendemain de la © grande guerre, il a une quinzaine d’années et de la curio- sité à revendre : « Officiellement, je préparais mon bachot (…) mais déjà je faisais clan avec les camarades épris de peinture, de toutes les manifestations de l’art nouveau (…) ». Pour mener à bien cette nouvelle existence, Christian Dior négocie avec ses parents. Il accepte Sciences d’entrer à Sciences Po, rue Saint Guillaume, en échange de quoi il est Po, la autorisé à apprendre la musique (notamment le piano). Il rencontre ainsi le célèbre insti- tution de la rue musicien Henri Sauguet, qui lui présente le peintre Christian Bérard ou encore Saint Guillaume où l’historien Pierre Gaxotte. étudia Christian Dior Contraint en 1927 de faire son service militaire, Christian Dior en revient convaincu qu’il doit ouvrir une galerie de tableaux à Paris. Années de folie, encore, pendant lesquelles, associé à son ami Jacques Bonjean, il expose Picasso, Matisse, Dufy, Bérard, Dali et les néo-humanistes. « Dans ce climat bigarré, non seulement je me formais le gout, mais je nouais les a mitiés graves qui ont composé et composeront jusqu’a mon dernier jour le fond sérieux de ma vie, écrit Christian Dior. © Musée Christian Dior © Musée Christian Dior Lorsque, ruiné, dans les années 30, il doit chercher un emploi, tous ses amis l’hébergent, le conseillent, et plus tard, ne manquent pas de l’aider lorsqu’il crée sa maison. Il créera des costumes pour le cinéma et la scène : pour l’écran, le Lit à colonnes de Roland Tual, Lettres d’amour de Claude Autant-Lara. Pour le théâtre, il travaille à la pièce de Giraudoux, pour Lucrèce présentée par Madeleine Renaud, Edwige Feuillère et Simone Valère. © DR Christian Dior, maquette de costume pour le film « le lit à colonnes » de Roland Tual, 1941 © DR C’est lui qui conçoit les smokings de Marlène Dietrich, l’habille par- fois à l’écran, notam- ment dans le Grand Alibi d’Alfred Hitchcock. Christian Dior réalise aus- si des maquettes aqua- rellées de 1942 à 1950 pour le cinéma et la scène. L’actrice et chanteuse allemande L’actrice française de théâtre et de cinéma naturalisée américaine Marlène Edwige Feuillère (1907-1998) Dietrich (1901-1992) 12 Invention Magazine - janvier/février 2014
Reportage tage Un succès phénoménal dès sa première collection © Bellini/Archives Christian Dior Atelier Christian Dior © Archives Christian Dior © Bellini/Archives Christian Dior Le tailleur «Bar» premier défilé Christian Dior le 12 février 1947 Le tailleur «Bar» page du cahier de fabrication printemps-été 1947 « La couture souhaitait revenir au bercail et retrouver sa fonction premiere qui est de parer les femmes et les embellir. » © DR © DR Christian Dior connaît un succès phénoménal dès sa première collection, le 12 février 1947. Ce jour-là, comme les saisons suivantes, le couturier révolutionne littéralement la mode et la silhouette féminine en prônant un… retour en arrière. © DR Collection “New Look” Christian Dior, 1947 Christian Dior, tailleur « Bar », ligne «Corolle» - 1947 Invention Magazine - janvier/février 2014 13
© DR Reportage tage Ex t r a i t © Bellini/Archives Christian Dior Christian Dior drapant un tissu sur le mannequin Sylvie Pour autant, comprendre l’engouement que suscitent alors ses lignes, doit être replacé dans un contexte social : on est au lende- DR Chaussures main de la seconde guerre mondiale, une période de restrictions © dites «ZAZOU» et de grèves. En termes d’allures, les femmes arborent encore des avec dessus un profils de « zazous », chaussures compensées, effets de bas et superbe rou- leau clouté, jupes courtes, à l’image d’un monde de tristesses et de pénuries. talon de 9 cm Futilité et superflu que Christian Dior n’hésite pas à mettre en et semelle pla- avant : ses modèles sont généreux, exigent des longueurs vertigi- teau de 1 cm neuses de tissu, les jupes rallongent, les broderies s’élancent, les fleurs partout s’épanouissent. © Concours Lépine Provocation et scandale pour les uns, miracle d’un décor qui renoue avec le plaisir et le sourire pour les autres. Toutes les femmes du monde sont sous le charme de ce retour à l’art de vivre fastueusement bien et beau. Toutes les femmes de la rue se font confectionner des robes à l’image de celles de la maison du 30 de l’avenue Montaigne. © Concours Lépine Maison Christian Dior du 30, avenue Montaigne 14 Invention Magazine - janvier/février 2014
Reportage tage Ex t r a i t Pour la première fois dans l’histoire, un couturier influence de manière simultanée l’élite et le grand public. Lui-même en paraît surpris mais théorise ainsi son succès : « Lorsque devenu responsable d’un mouvement, je voulus l’analyser, je compris qu’il incarnait avant tout le retour a l’art de plaire ». L’homme a de l’instinct, voire de la prémonition. C’est ce Même attitude vis-à-vis de Marc Bohan qu’il place à la tête sens-là qui lui permet d’engager dès fin 1946 un certain Pierre de la filière londonienne. Christian Dior est encore là mais Cardin comme premier tailleur et de remarquer le frêle jeune n’hésite pas à devancer l’avenir. homme qui rejoint en 1955 sa maison : Yves Saint Laurent. © DR © The Estate of Jeanloup Sieff Yves Saint Laurent. Assistant de Christian Dior en 1955, il prend la direction artistique de la maison Dior à la mort de ce dernier, en 1957. Il présente sa première collection, dite « Trapèze », en janvier 1958, qui connaît un immense succès. Il restera à la maison Dior jusque 1960. Pierre Cardin, premier tailleur de Christian Dior, engagé dès 1946 par le couturier © DR Le grand couturier Marc Bohan qui a passé presque trente ans (1961-1989) © Archives Christian Dior à la tête de la direction artistique de la maison Dior Programme de la ligne Y, Christian Dior, collection automne-hiver 1955-1956 Invention Magazine - janvier/février 2014 15
Reportage tage Ex t r a i t Parfum d’enfance : les fragrances Dior «« Le parfu m c’est le complément indispensable de la personnalité féminine, c’est le finishing touch d’une robe, c’est la rose dont Lancret signait ses toiles ». Christian Dior © DR Le parfum « Poison » a été créé en 1985 par le parfumeur Édouard Fléchier e pin s Lé our onc ©C Alambics, musée Dior Le couturier disait tout devoir à Granville, cette © DR ville balnéaire et au jardin secret de son enfance. Il n’était pas le seul : Serge Heftler-Louiche, fondateur des parfums Christian Dior, passa lui © DR aussi, ses premières années dans la « Monaco du Nord ». Lorsqu’il propose à son ami Christian Dior de lancer un parfum assorti à sa première collection, le couturier n’hésite pas un instant : « Sa longue expérience en cette matière, jointe au fait qu’il était un compagnon de ma plus tendre enfance me fit accepter d’emblée. Le parfum Miss Dior De nombreux amis voulurent tout de suite y participer ». Le projet se monte à la manière d’une chaine de l’amitié. La fragrance de « Miss Dior » allie parfums de rose et notes vertes du jasmin. Le dessinateur René Gruau conçoit l’affiche publicitaire, le cygne blanc habillé d’un collier de perles et d’un ruban noir qui a, depuis, fait le tour du monde. Autre proche, le musicien Henri Sauguet compose une valse en l’honneur de « Miss Dior ». Le décorateur Victor Grandpierre aux côtés de Christian Dior Quant au décorateur Victor Pour le jus de « Diorissimo », Christian Dior choisit des notes basées Grandpierre, qui a signé les sur l’exaltation du muguet, sa fleur fétiche. L’univers du parfum décors de l’avenue Montaigne, est proche de celui de la mode Dior, cette élégance faite de poé- il propose en guise de motifs sie nostalgique et de féminité au sens le plus éternel du terme : pour la boîte, de reproduire le tissu pied-de-poule présent dans Un parfu m est une porte ouverte sur un univers © DR la collection. Une géniale stra- retrouvé. Voila pourquoi je suis devenu parfu meur, tégie d’image et de marketing pour qu’il suffise de déboucher un flacon pour construite sur le seul instinct. Dès son premier défilé, le célèbre New voir surgir toutes mes robes et pour que chaque Look dévoilé le 12 février 1947, femme que j’habille laisse derriere elle un sillage tous les spectateurs sont par- de désirs. » fumés à « Miss Dior ». C’est un succès ! 16 Invention Magazine - janvier/février 2014
Reportage tage Ex t r a i t © DR © DR Les fleurs, qu’il adore plus que tout, vont inspirer toutes ses créations, robes comme parfums. Et il se rend dès qu’il peut dans sa maison de la Colle Noire dans cette région grassoise qu’il aime tant. Entouré d’un jardin de roses et de jasmin qu’il cultive passionnément, il s’y ressource entre deux collections. Situé près de Grasse, le château de la Colle Noire fut la maison de villégiature de Christian. Eglise Sainte Honoré d’Eylau Place Victor Hugo, Paris 16ème Le couturier s’y installa dès 1955 ▼ Le 29 octobre 1957, les fleurs envahissent Paris. Muguet, aubépine, œillets, camélias, tubéreux, enlacent les avenues de la capitale. Christian Dior est décédé, une messe est célébrée à l’église Sainte Honoré d’Eylau, les bouquets affluents du monde entier. La maison a reçu tant de gerbes et de couronnes que la ville délivre l’autorisation exceptionnelle de les exposer au pied de l’Arc de Triomphe devenu, pour l’occasion, somptueux massif de couleurs et de parfums. Ce dernier et majestueux hommage, à celui qui, en 1947, réinvente une silhouette de « femme fleur », est d’une magnifique justesse. © Parfum Christian Dior, Paris 2013 J’adore est né d’une vision : celle d’un bouquet lumineux, composé des plus belles fleurs qui s’épanouissent sur les meilleurs terroirs. Emblématique de la philosophie des parfums Dior, J’adore conjugue le foisonnement de la belle matière, l’expertise des fleurs au service de la création et une architecture olfactive exigeante et distinctive. Comme Christian Dior, François Demachy dans l’amour d’une belle matière. Il s’appuie sur sa maîtrise technique pour laisser libre cours, sans contrainte. Poète terrien, il perpétue ainsi l’histoire d’amour de Dior pour les femmes et les fleurs. © Parfum Christian Dior, Paris 2013 © Parfum Christian Dior, Paris 2013 François Demachy, parfumeur créateur de la maison Dior depuis 2006. Invention Magazine - janvier/février 2014 17
Reportage tage Ex t r ai t D è s s a p re m i è re c o l l e c t i o n en février 1947, Christian Dior Pour Christian Dior, les matériaux nobles, la précision du geste révolutionne la mode ; sa « ligne en de l’artisan, le temps long donnent à l’ouvrage toute sa qualité. 8 », bientôt rebaptisée New Look, Ainsi, depuis toujours, la maison Dior fait appel aux meilleurs artisans d’art pour ses éditions d’exception. La cristallerie française célèbre le corps féminin. La taille Baccarat qui crée dès 1947 les premières amphores en cristal est marquée, les formes sont pour Dior réalise aujourd’hui pour « J’adore » des écrins de soulignées. L’amphore choisie par cristal entièrement soufflés à la bouche, travaillés à la main le couturier pour être l’écrin de par des artisans Meilleurs Ouvriers de France. ses premiers parfums possède Le col Massaï du flacon s’orne d’une parure bijou facettée ristian Dior, Paris 2013 cette même féminité. La par les artisans de la haute joaillerie Dior. Une coiffe en rondeur du flacon de J’adore, or massif qui requiert les techniques manuelles les plus son cou élancé, délicatement fines, autour de laquelle vient s’enrouler une chaîne forçat diamantée. cerclé d’or, ainsi que la perle m Ch en suspension de sa coiffe © Parfum Christian Dior, Paris 2013 font de J’adore une évocation arfu ©P moderne de l’amphore. © Parfum Christian Dior, Paris 2013 © Parfum Christian Dior, Paris 2013 © Parfum Christian Dior, Paris 2013 Charlize Theron, égérie du parfum J’adore depuis 2004. La maison Dior explique son choix en déclarant que Charlize Theron incarne la fémi- nité moderne et qu’elle incarne à merveille l’es- prit et l’énergie de Dior. 18 Invention Magazine - janvier/février 2014
r a i t © Christian Dior Parfums BACCARAT Ex Reportage tage t La cristallerie Baccarat présente son travail et son savoir-faire dans deux lieux aussi passionnants que complémentaires. L’un est situé sur le site industriel de Baccarat, en Meurthe-et-Moselle. Il permet de retracer l’histoire de la manu- facture depuis 1764 et de découvrir les différentes étapes de la fabrication : travail à chaud, taille, gravure, dorure… Le deuxième, installé depuis 2003 au 11, place des Etats-Unis dans le seizième arrondissement de Paris, s’articule autour de cinq grands thèmes qui incarnent la signature de la marque. Riche d’une collection de 5000 objets exception- nels, certains réalisés pour les expositions universelles, d’autres pour des commandes prestigieuses, de verres à armoiries, de flacons de parfum, c’est la prodigieuse histoire de Baccarat que raconte ce musée. Conçu comme un © Concours Lépine lieu de rêve et de magie, le musée propose une scé- nographie inédite sachant mettre en valeur la place toute particulière que dé- tient le cristal de Baccarat dans le domaine des Arts Décoratifs travaillés à la main par des artisans « Meilleurs Ouvriers de France ». © Christian Dior Parfums MOF © DR Création du MOF (Meilleurs Ouvriers de France) Pour retracer une partie de la Grande Histoire d du Concours Lépine, il faut se reporter à 1913 quant Lucien Klotz, critique d’art et jour journaliste, lança l’idée l’une Exposition Nationale du Travail, ceci afin de valoriser les métiers manuels. En 1923, sera donc organisée une Exposition des Travaux d’Habileté métie Professionnelle et des Chefs d’œuvre des Métiers, initiée par l’Association des Petits Prof Fabricants et Inventeurs Français qui organise le Concours Lépine depuis 1901. Fab La p première manifestation officielle aura lieu en 1924, dans le cadre du Concours Lépine Lépin où cent quatorze candidats obtiennent le titre de « Meilleur Ouvrier de France ». Ils se réu réuniront par la suite au sein d’un groupement, créé par arrêté du 25 mai 1935. Celui-ci deviendra, à partir de 1961, le COET (Comité Départemental d’Organisation des Expositions Exp du Travail) et sera régi, à compter de cette date, par la Loi de 1901 sur les Associations. A « Pour la première fois depuis 1935, et pour les 110 ans du Concours Lépine, les Meilleurs Ouvriers de France ont rejoint notre Institution lors de nos salons Concours Lépine International Paris et Concours Lépine Européen Strasbourg. S Le M M.O.F. renoue ainsi avec cette tradition du passé et s’expose à nouveau chaque année dans nos salons ». Invention Magazine - janvier/février 2014 19
Reportage tage Ex t r a i t Le musée Christian Dior, unique « Musée de France » consacré à un couturier Unique « Musée de France » consacré à un couturier, le musée Christian Dior expose depuis 1997 des modèles de Haute Couture sur ses trois niveaux. Le Musée est abrité dans la villa « Les Rhumbs », maison d’enfance du créateur. © DR C’est grâce à la détermination du petit cousin Granvillais de Christian Dior, Jean- Luc Dufresne que la villa va devenir un musée. Ce dernier était alors conservateur d’un des deux musées municipaux, le musée d’art moderne Anacréon, situé dans le quartier historique de la Haute Ville de Granville. En 1987, il y organise une exposition intitulée « Christian Dior, l’autre lui-même » à l’occasion du quarantième anniversaire du premier défilé du couturier. Cette exposition sera le point de départ du projet de musée. Le fonds Christian Dior est également constitué, d’abord de dons de ses deux sœurs, Catherine et Jacqueline, puis de collaborateurs et d’achats financés par la ville de Granville. En 1991, l’association « Présence de Christian Dior » est créée pour soutenir l’activité du musée et progressivement, des collections sont constituées et des Jean-Luc Dufresne, le petit cousin Granvillais du créateur travaux de rénovation effectués dans la villa. En 1993, le jardin d’hiver est reconstitué et en 1997, la villa est prête à devenir un musée. Le jardin a gardé son plan d’origine et présente des espaces restaurés à l’identique (Pergola, salle de jeux, ancienne roseraie). © DR Labellisé « Musée de France », la villa a également obtenu le label « Maison des Illustres » en juin 2012. Ce label honore les maisons d’hommes et de femmes ayant marqué l’histoire française dans tous les domaines de la création. Aujourd’hui, l’association « Présence de Christian Dior » œuvre à la conservation des collections et à leur enrichissement, son objectif étant de préserver et de faire connaître l’œuvre de Christian Dior à travers des expositions, des manifestations culturelles. Une partie des collections s’est constituée autour de la personnalité de Christian Dior : sa famille, ses goûts artistiques, son parcours dans la mode avant 1947. Mais le cœur de la collection est bien sur consacrée à la griffe Dior avec des modèles Haute Couture et boutique (entre 1947 et 1957) et des acces- soires (chapeaux, sacs, bijoux). © Don Bettina Ballard The Metropolitan Museum of Art New York © Laziz Hamami Les « Dior de Christian Dior », montres, stylos et briquets Robe Aladin © DR Christian Dior, collection automne hiver 1947 Souliers Christian Dior par Delman en mousseline de soie imprimée de fleurs de chardons. Vers 1953. Collection Quidam de Revel. Détail d’une robe 20 Invention Magazine - janvier/février 2014
Reportage tage Depuis 1987, plus de 30 expositions ont été présentées au Musée. Une des dernières expositions fut notamment consacrée aux liens étroits qui unissent le couturier au mouvement impressionniste. Intitulée « Impressions Dior », elle a accueilli plus de 45 000 visiteurs. Dior et les Impressionnistes © DR «« Je dessinais des femmes fleurs, épaules douces, bustes épanouis, tailles fines comme lianes et jupes larges comme corolles ». Christian Dior L’exposition Impressions Dior était récemment à l’honneur dans la villa Les Rhumbs pour témoigner des liens permanents de la Maison Dior au mouvement impressionniste, de 1947 à 2012. Ce parallèle entre l’œuvre du couturier et celles du peintre ont été l’occasion de présenter plus de 70 robes aux côtés d’une impressionnante sélection de chefs d’œuvre de maîtres impressionnistes : Degas, Monet, Renoir, Berthe Morisot… © Béatrice HATALA Affiche de l’exposition « Impressions Dior » © DR Edgar Degas, Femme se coiffant. Pastel, vers 1887-1890, collection particulière Monet, Déjeuner sur l’herbe, 1865-1866 huile sur toile © DR Pierre-Auguste Renoir, Femme à l’ombrelle dans un jardin, 1875 Invention Magazine - janvier/février 2014 21
Reportage tage Ex t r a i t Ces œuvres exceptionnelles ont été prêtées par le musée Pour démontrer le lien entre les créations du couturier et d’Orsay et le musée Marmottan. L’exposition a cherché à l’impressionnisme, l’exposition a été conçue comme un démontrer à quel point la révolution picturale de la fin du face-à-face entre les modèles de la Maison Dior et les XIXème siècle s’est répandue jusque dans le milieu de la haute œuvres des Impressionnistes, originales ou reproduites. couture. © Thingaud / Musée Christian Dior © Musée d’Orsay, Paris © Thingaud / Musée Christian Dior ▼ ▼ Marie Bracquemond Trois femmes aux ombrelles, dit aussi Les Trois Grâces, huile sur toile, 141,30 x 89,50 cm, entre 1841 et 1916. Paris, musée d’Orsay Robe du soir Fête, en faille rose boréal, collection Haute Couture printemps-été 1948, ligne Envol. Le thème de la nature est central chez les impression- © Musée Christian Dior nistes et il l’est aussi chez Christian Dior. Dès 1947, le couturier lance le « New-Look », avec des robes qui traduisent l’idée pour le couturier d’une femme fleur et la création d’une ligne toute en courbes (jupes amples ou très étroites s’inspirant de la corolle d’une fleur). © Musée Marmottan-Monet, Paris ▼ ▼ Robe d’après-midi habillée, en organdi bleu pâle, brodée de myo- Berthe Morisot, Tulipes, aquarelles, 1890, sotis bleus et roses. Collection Haute Couture printemps-été 1953, Musée Marmottan-Monet, Paris ligne Tulipe 22 Invention Magazine - janvier/février 2014
Reportage tage Ex t r a i t Christian Dior portait un amour profond à la nature comme les artistes impressionnistes qui ont inventé la peinture de plein air. Avant d’être couturier, il aimait les fleurs et les jardins et il les transposa dans ses robes tout au long de sa carrière. Comme ces peintres, il a © Agence Bulloz RMN-Grand Palais aussi choisi la Normandie comme source d’inspiration et hymne à la beauté féminine. Monet près du bassin aux nymphéas, 1905 Jacques-Ernest Bulloz Soixante-dix robes, de la première collection de Dior en 1947 Des accessoires, des photographies et divers documents ont jusqu’à son dernier successeur Raf Simons en 2012, ont été aussi été présentés, toujours pour témoigner de la force des exposées, ainsi que douze tableaux de grands maîtres de ce liens esthétiques entre la mode et l’art. mouvement pictural (Degas, Renoir, Monet...). ▼ ▼ ▼ ▼ © Paris, musée d’Orsay © Laziz Hamami © Laziz Hamami Robe à danser Helvétie, en organdi blanc Edgar Degas, Le Bal dit aussi Le souper au bal, huile sur bois, Robe du soir Jour de fête, en organza brodé de croissants de lune en dentelle 45,5cm x 65,5cm, vers 1879. blanc, collection Haute Couture, bleue et paillettes, collection Haute Cou- printemps-été 1955, ligne A. ture, printemps-été 1956. Ligne Flèche © Laziz Hamami © Laziz Hamami © Hervé Lewandowski /RMN-Grand Palais ▼ ▼ ▼ ▼ Edgar Degas, Etude de ciel, pastel sur papier gris-bleu, Robe du soir en Organza blanc vers 1869, Paris, musée d’Orsay. brodé de bande de mousseline dégradées rose pâle, collection haute couture automne-hiver Robe rose pompon en mousseline de soie imprimée de 2012/2013, Christian Dior par roses, collection haute Couture printemps-été 1952, Raf Simons. ligne Sinueuse Invention Magazine - janvier/février 2014 23
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