La femme n'existe pas - théâtre Variable n 2 - dossier d'accompagnement - Les Francos
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LA femme® n’eXIsTe pAs D’après “La ColonIe” de MarIvaUX COMPAGNIE Théâtre Variable N°2 Tout commence par un naufrage, un groupe, une île. Fuyant la guerre, un groupe d’hommes et de femmes, nobles et gens du peuple, s’approprient une terre pour y fonder une nouvelle société. Mais voilà que les femmes, dans ce nouveau monde, réclament de faire partie du gouvernement pour établir les lois et les institutions de demain. Des femmes au gouvernement ? Vous n’y pensez pas ! - Écrite en 1750, La Colonie est l’une des pre- mières pièces féministes du répertoire. La réé- criture contemporaine proposée par le spectacle conserve la majeure partie du texte original, en prenant le parti de la gaieté, du comique, et d’un rythme effréné. Elle permet surtout de montrer combien le texte de Marivaux, vieux de trois siècles, reste d’une actualité étonnante et met en évidence l’incroyable lenteur des progrès en termes de parité… DISTRIBUTION texte Barbara Métais-Chastanier mise en scène Keti Irubetagoyena jeu Bruno Coulon, Jézabel d’Alexis, Nicolas Martel, Julie Moulier, Grace Séri théâtre lumière Jimmy Boury scénographie Lélia Demoisy Dès 13 ans costumes Marie Le Leydour 1h30
Notes d’intention pour la mise en scène par Keti Irubetagoyena La femme® est un objet à usage unique ou répété. Il existe des versions plus résistantes, lavables, ou pouvant être rechargées, on les appelle "épouses". L’intérêt de l’usage unique est le moindre coût de production et la réactivation de la consommation. C’est un produit que l’on appelle "putain". Une pièce "féministe" de 1750 Écrite en 1750, La Colonie est l’une des l'incroyable lenteur des progrès en termes premières pièces "féministes" du répertoire d'égalités. mondial. D'emblée séduite par sa force de frappe Cette fois, pas de marivaudage mais une joyeuse mais désireuse de creuser les liens proposition coup de poing : et si les femmes qu'il entretient avec notre société, j'ai proposé entraient au gouvernement ? à Barbara Métais-Chastanier d'en signer une Malicieux écho aux débats sur la parité, lecture contemporaine : La Femme® n'existe ce texte vieux de presque trois siècles est pas, variation sur La Colonie de Marivaux. d’une actualité étonnante. Il met en évidence Une réécriture qui joue avec l’original La réécriture conserve la majeure partie du se plaît à se rendre imperceptible. texte original mais se camoufle à l'intérieur Seuls les anachronismes trahissent le de celui-ci pour faire jouer les deux écritures passage d'un auteur à l'autre et l'effet de entre elles : dialogues mêlés, digressions surprise qu'ils provoquent chez le spectateur à l'intérieur des discours, courtes scènes se double d'un plaisir de connivence dans la étoffant le canevas classique. Adoptant le reconnaissance des événements cités. phrasé du maître, Barbara Métais-Chastanier Une scénographie de l’insurrection Le parti pris scénographique qui gouverne que soutenir imperceptiblement l'éclairage l'esthétique générale du spectacle s'appuie sur de service resté allumé. Des affiches sont la réalité concrète d'une insurrection : il fait de placardées çà et là, des tables et des chaises l'espace de représentation un bâtiment occupé, servent d'estrades improvisées. Entrant dans à l'image des salles transformées à tout-va en la salle, les spectateurs deviennent cette foule lieux de réunions et de prises de décisions silencieuse et complice à laquelle s'adressent lors des révoltes ouvrières ou étudiantes. les insurgées dans leurs harangues. Le décor est donc minime, ou plutôt : tout est décor. Et la création lumineuse ne fait
Les costumes et le «déguisement» carnavalesque Travaillant sur un grotesque des couleurs et juxtaposées, dans la tradition des carnavals des formes, les costumes tranchent sur ce qui populaires. Plus qu’à une époque historique les entoure : dans ce décor ingrat, ce sont eux donnée, c’est à l’acte de déguisement même qui construisent l’espace scénique et créent qu’ils font référence. le spectacle, la fiction. Ils sont faits de nippes Un jeu de travestissements Comme un clin d’œil aux jeux de rôles chers à contemporain signalent la distance qui nous Marivaux, la distribution (à majorité féminine) sépare du texte de Marivaux autant qu’elles s’amuse de ces travestissements et du trouble nous rappellent à son actualité. provoqué par l’androgynie des interprètes. Elle Si le rire franc de la comédie classique se fait use, au début du spectacle, de tous les codes parfois sombre et grinçant dans l’écriture de et accessoires permettant de distinguer les Barbara Métais-Chastanier, l’humour demeure femmes des hommes, les nobles des gens toujours présent. Bousculant la bien-pensance du peuple. À mesure que la révolte s’accroit, et les idées reçues, il invite le spectateur à néanmoins, et dès l’instant où chaque considérer son propre regard sur les rapports interprète jongle d’un genre à l’autre pour homme-femme et à plonger joyeusement incarner tour à tour la ligue des femmes dans cette utopie collective d’un ébranlement et l’assemblée des hommes, les normes des dominations sexistes. vestimentaires volent en éclats, incitant les spectateurs au vif plaisir de la transgression. Là encore, les frictions du classique et du
Notes d’intention pour l’écriture par Barbara Métais-Chastanier Dans La Colonie de Marivaux se rêve une C’est ce récit de l’échec de la lutte des utopie qui commence avec la contestation femmes qu’interroge la réécriture : comment des inégalités homme/femme et du rapport s’y prennent les dominants pour forcer les de domination qui les rend possible. dominés à consentir à leur propre domination Ce désir de penser autrement l’organisation ? Quelles stratégies mettent-ils en place ? sociale prend la forme de quelques courtes Comment s’y prennent-ils pour naturaliser scènes jetées avec la vigueur des esquisses. leurs privilèges ? La Colonie nous place à l’endroit de la La réécriture que j’en propose avec La rupture : la grande audace de Marivaux, en Femme® n’existe pas ouvre ces enjeux précurseur des approches intersectionnelles, sur le présent, joue de l’anachronisme, du c’est de corréler les formes de domination et rapprochement ou du plus grand écart. d’inégalité. Non content de mettre l’accent Interpellée par la possibilité de lire La Colonie sur le caractère construit et historique de comme une fable où serait mise en scène la l’identité de genre, il pose les conditions de question de l’agir, du droit et de l’organisation son exercice de domination. sexuelle et politique, je me suis prise au jeu S’il s’agit de défaire la croyance dans des de la greffe pour faire sonner les triples normes naturelles, La Femme® n’existe pas rapports de domination que maille le texte est à la fois un pied de nez à l’échec que se de Marivaux : violences de genre, rapports de propose la pièce et un jeu grinçant et amusé classes et, plus souterraines mais présentes à avec la fiction révolutionnaire qu’invente travers la fiction des sauvages habitant l’île, Marivaux : une anatomie des formes politiques discriminations racistes. de la domination. L’identité y apparaît pour ce qu’elle est : une circonstance, une stratégie et, le plus souvent, un rapport de force qui ne dit pas son nom. L’échec de la révolte menée par Arthénice et Madame Sorbin découvre le fait que « la » femme n’existe pas car celles qui fondaient leur alliance sur la fusion (« Il n’y a plus qu’une femme et qu’une pensée ici ! ») sont obligées de constater à l’issue de la fable que les dissensus l’emportent.
extrait du texte réécrit MADAME SORBIN. Les hommes n’en reviendront jamais je vous le dis. Ils chieront leurs privilèges et c’est avec leur fiente qu’on enterrera ce monde de papa qui étouffe tout le monde. ARTHÉNICE. Madame Sorbin, vos images surveillez vos images. Cette trivialité m’agresse c’est ce qu’il faut je crois à tout prix éviter. Voyons plus loin mes sœurs regardez s’avancer ce nouveau monde sous l’étendard de nos audaces. Regardez-les Olympe de Gouges Louise Michel Simone Veil Angela Davis Madonna oui Madonna toutes prononçant à voix basse nos noms liés toutes diront elles n’ont pas fléchi elles ont résisté. MADAME SORBIN. C’est ça ! Personne ne pourra dire elles ont consenti. ARTHÉNICE. Personne ne pourra dire elles ont abdiqué. MADAME SORBIN. Personne ne pourra dire l’intelligence elles l’avaient la lucidité aussi mais ARTHÉNICE. mais le courage leur a manqué. MADAME SORBIN. Nous toutes dans vingt mille ans nous ferons encore la Une têtes d’affiche et gros titres parce que nous aurons essayé. ARTHÉNICE. Et quand bien même nous ne réussirions pas aujourd’hui nos petites filles réussiront demain.
Le Théâtre Variable n°2 Questionner le réel Le Théâtre Variable n°2 est fondé en 2010 le système de notation mathématique), dite par Keti Irubetagoyena et Barbara Métais- génération « why ». C’est bien un « pourquoi Chastanier dans une volonté d’approfondir le » qui préside à la démarche artistique du travail de recherche sur les dramaturgies du groupe. réel qu’elles mènent depuis 2004 à l’École Il s’agit chaque fois de : mobiliser des normale supérieure de Lyon. méthodologies documentaires pour nourrir le Composé d’artistes et de chercheurs nés dans travail d’écriture et de plateau ; user des outils les années 80/90, le Théâtre Variable n°2 est du théâtre pour répondre à des questions un fruit de la génération Y (variable n°2 dans posées dans le champ des sciences humaines. Un travail autour de cycles de recherches Les spectacles du Théâtre Variable n°2 l’écriture des partitions textuelle et scénique. s’inscrivent dans des cycles de travaux qui Enquêtes de terrain, entretiens, étude de explorent un même thème plusieurs années documents et analyse de l’actualité sont durant. autant d’éléments à partir desquels s’invente Chaque création s’ouvre sur une longue le geste artistique. période de documentation qui sert de base à Écrire à quatre mains Nourris de cette matière documentaire, les recherche réunissent artistes et chercheurs spectacles s’élaborent dans un dialogue intime afin de favoriser discussions et tentatives et continu entre écriture textuelle et écriture au plateau. Elles ouvrent ainsi de nouvelles scénique. perspectives d’écriture, creusant la question Auteurs et metteuse en scène écrivent à quatre identifiée par l’enquête documentaire jusqu’à mains, à partir de la confrontation régulière la conduire vers une forme achevée, poétisée. de fragments de texte et de propositions scéniques. Ponctuellement, des résidences de Et rire… Malgré la violence des thèmes abordés, le rire face aux énormités humaines. Parce qu’il demeure toujours présent dans les spectacles invite chaque spectateur à s’approprier les du Théâtre Variable n°2. questions soulevées, il devient la porte par Rire tragique, qui parfois reste étranglé dans laquelle déconstruire le désastre pour mieux la gorge. Rire qui ne naît pas du partage de le penser, et s’en émanciper. la béatitude mais d’un constat d’impuissance
Exemples d’activités en classe pour préparer ou prolonger la séance • Évoquer les rapports filles-garçons à l’école (les conflits, les violences) • Les relations hommes / femmes : - Dans la famille : comment s’effectue la répartition des tâches domestiques ? Qui fait quoi, comment, pourquoi etc. ? Raconter les « droits et les devoirs » des frères et des sœurs, des hommes et des femmes dans la famille. - En France ou ailleurs : par rapport à la façon de vivre au quotidien (relations à la famille, droits, devoirs, habillement…), par rapport au mariage etc. • Recherches sur l’évolution des lois sur l’émancipation féminine / en France, dans les pays européens, dans d’autres pays • Pour rappel en France : - droit pour la femme de disposer de ses biens personnels, ou de les gérer sans l’autorisation de son mari : 1965 - droit de vote : 1945 - enseignement secondaire identique pour filles /garçons : 1924 - port du pantalon plus reconnu comme un délit : 1909 - droit pour la femme mariée de disposer de son salaire : 1907 ... • La difficile «condition féminine» dans certains pays de nos jours • Les inégalités qui perdurent aujourd’hui en France (différences salariales…) • Recherches et variations sur les femmes qui ont fait avancer la cause féminine • Recherches et variations sur les femmes célèbres du XXe siècle (Marie Curie, Lucie Aubrac, Marguerite Yourcenar….) • Les questions que soulèvent la parité (par exemple en politique). - est-elle vraiment souhaitable ? Pourquoi ? etc.
Quelques exemples de lectures, d’études pour accompagner le projet et les axes de réflexion 1 - Chansons Exemple de corpus de chansons françaises autour de la thématique / Chansons à écouter, à commenter… • Hommage aux femmes ou misogynie… - Femmes je vous aime Julien Clerc - Les Biches / Les Filles et les chiens Jacques Brel • Sur les «femmes d’aujourd’hui» - Femme libérée Cookie Dingler - Elle a fait un bébé toute seule J.J. Goldman 2 - Essais / documents • Deux «classiques de l’émancipation» : - Le Deuxième Sexe de Simone de Beauvoir - La cause des femmes de Gisèle Halimi • Deux essais récents d’Elisabeth Badinter - XY, de l’identité masculine - Le conflit, la femme et la mère • Le fameux témoignage Jamais sans ma fille de Betty Mahmoody • Ou en plus ludique : - Les Hommes viennent de Mars, les femmes de Vénus de John Gray L’auteur montre en s’amusant combien les deux sexes se ressemblent peu dans leur manière d’agir et d’exprimer leurs sentiments… . • Un livre-événement : - La Moitié du Ciel (Kristof – Wudunn) Un reportage auprès de centaines de femmes qui refusent l’oppression qui continue à s’abattre sur cette «moitié du ciel» dans le monde…
Le festival, les francos, est organisé à l’initiative du théâtre du mantois, une compagnie en résidence sur le territoire. l’équipe Président Jacques Jaudeau Direction Eudes Labrusse Administration Anne Conforti-Souty Développement culturel et relations publiques Constance Winckler Communication et production Laure Ricouard Coordination et production Clément Fahy Chargée de mission projets de territoire Carla Duret Assistante de production et coordination Océane Yard Accueil et billetterie Hafida Falami Direction technique Nicolas Prigent Graphisme et illustrations Géraldine Lepoivre www.typodepoivre.com Un grand merci aux comédiens, artistes, techniciens et bénévoles qui participent à l’aventure ! composition du dossier : Eudes Labrusse sources : dossier de la compagnie Théâtre Variable n°2 / Théâtre du Mantois
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