La thyroïde sur le cancer de
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sur le cancer de la thyroïde Coordonnatrice : Pr Laurence Leenhardt (Paris) Ce guide a été réalisé avec le soutien institutionnel de
sur le cancer de la thyroïde Sommaire Éditorial ............................................................................ 3 Le cancer de la thyroïde ...................................................... 4 Le diagnostic du cancer de la thyroïde ................................ 8 La prise en charge du cancer de la thyroïde ...................... 11 Vivre avec un cancer de la thyroïde ................................... 22 Liens utiles ........................................................................ 25 Glossaire ........................................................................... 26 Coordonnatrice : Pr Laurence Leenhardt Les articles publiés dans La Lettre du Cancérologue le sont sous la seule responsabilité de leurs auteurs. Tous droits de reproduction, d'adaptation et de traduction par tous procédés réservés pour tous pays. EDIMARK SAS © mai 1992 – Président et directeur de la publication : C. Damour-Terrasson Imprimé en France - Axiom Graphic - 95830 Cormeilles-en-Vexin - Dépôt légal : à parution. 2 Guide idées vraies/fausses 2014
Éditorial “Docteur, et si j’avais un cancer de la thyroïde ?” Il n’est pas rare que le patient se retrouve brutalement confronté au diagnostic de cancer thyroïdien, avec toutes les questions et inquiétudes qu’il suscite. De par son impact psychologique et sociétal, le mot cancer recouvre une telle variété de situations que ce guide à l’usage des patients est destiné à “tordre le cou aux idées fausses” sur le cancer thyroïdien et à “transmettre des idées vraies” qui vont aider le patient à se prendre en charge et à y faire face. Le cancer thyroïdien est généralement d’ex- cellent pronostic, ce qui conduit certains médecins à déclarer que “si, au cours de leur vie, il leur fallait choisir un cancer, ce serait celui de la thyroïde !” Le traitement du cancer thyroïdien est avant tout chirurgical. Il repose sur l’ablation, généralement complète, de la glande thyroïde. La particularité de ce cancer est d’être, dans la majorité des cas (dans sa forme différenciée), accessible à un traitement par l’iode radio-actif. Ce traitement, lorsqu’il est indiqué, est bien toléré et n’a pas les effets indésirables que l’on redoute comme ceux des chimiothérapies pres- crites pour d’autres types de cancers. Ce guide est destiné aux patients mais aussi aux praticiens, aussi bien hospitaliers que libéraux, généralistes et spécialistes, confrontés au quotidien à cette maladie. Le cancer thyroïdien y est présenté sous forme de questions simples, reflet du vécu des patients. Les réponses de spécialistes, guidées par les dernières recommandations publiées sur le sujet, aident le patient à trier le vrai du faux dans l’avalanche d’infor- mations fournies quotidiennement par notre société et ses médias. Pr Laurence Leenhardt Service d’endocrinologie, hôpital de La Pitié-Salpêtrière, Paris La Lettre du Cancérologue 3
sur le cancer de la thyroïde Le cancer de la thyroïde 1. Le cancer de la thyroïde est plus fréquent chez les femmes. Chaque année en France, un cancer de la thyroïde est diagnostiqué chez un peu plus de 8 200 nouvelles personnes. La prédominance féminine est très nette, puisque 72 % des cas concernent des femmes. Ce cancer touche ainsi près de 14 femmes sur 100 000 habitants chaque année, contre 5,5 hommes. C’est dans la tranche d’âge de 60 à 69 ans que les nouveaux cas sont les plus fréquents. Ce cancer peut néanmoins survenir à tout âge, même s’il est rare chez les enfants. Il y a 30 ans, le cancer de la thyroïde était relativement rare. Son incidence a ainsi fortement augmenté depuis les années 1980. Cette augmentation du nombre de nouveaux cas concerne surtout les formes dites “papillaires” du cancer de la thyroïde se présentant sous forme de tumeurs de petite taille (moins de 1 centimètre). Différentes études ont été menées pour tenter d’expliquer l’augmenta- tion du nombre de cas observée au cours des dernières décennies. Celle-ci semble être liée en partie à l’évolution des méthodes de diagnostic. Grâce aux améliorations des techniques d’examen (en particulier l’avènement de l’échographie), davantage de cancers précoces et de petite taille sont désor- mais détectés, alors que ceux-ci n’auraient probablement jamais évolué et ne se seraient jamais traduits par des symptômes. En d’autres termes, des cancers qui passaient inaperçus auparavant sont aujourd’hui diagnostiqués, ce qui explique partiellement l’augmentation constatée. 2. Il n’existe qu’un seul type de cancer de la thyroïde. La thyroïde est un organe complexe constitué de plusieurs types de cellules qui produisent différentes hormones. Chaque type de cellules thyroïdiennes peut être à l’origine d’un cancer de la thyroïde. On distingue les différents types de cancer de la thyroïde en fonction des cellules à l’origine de la maladie. Lorsque le cancer se développe à partir des cellules dites “folliculaires”, la maladie est appelée “cancer différencié de la thyroïde de souche folliculaire”. Ce type de cancer représente plus de 90 % des cas de cancer de la thyroïde. Il en existe 2 formes principales : » les formes dites “papillaires”, qui sont les plus fréquentes puisqu’elles représentent 80 % des cas ; » les formes dites “vésiculaires”, qui sont retrouvées dans 10 % des cas. 4 Guide idées vraies/fausses 2014
Certains cancers surviennent à partir des cellules dites “parafolliculaires”, également appelées “cellules C”. Il s’agit alors de cancers dits “médul- laires”. Ce type de cancer de la thyroïde concerne 5 à 10 % des malades. Il existe également des types de cancer dits “anaplasiques” ou “indifféren- ciés”. Ceux-ci sont plus graves mais, heureusement, très rares. Connaître le type de cancer est important, car cela permet aux méde- cins de déterminer l’évolution prévisible de la maladie et le choix des traitements. Lobe pyramidal Artère thyroïdienne supérieure Larynx Thyroïde Thyroïde Isthme Artère carotide Glandes para- commune thyroïdiennes Trachée Artère thyroïdienne inférieure Vaisseau capillaire Follicule Cellules folliculaires Cellules parafolliculaires (cellules C) Colloïde contenant la thyroglobuline Capsule thyroïdienne La Lettre du Cancérologue 5
sur le cancer de la thyroïde 3. Tous les cancers de la thyroïde présentent les mêmes risques pour la santé. Bien qu’il s’agisse de cancers et, donc, d’une pathologie sérieuse, la plupart des cancers de la thyroïde sont considérés comme étant de “bon pronostic”. Cela signifie que, grâce à une prise en charge médi- cale adéquate et précoce, ils évoluent souvent favorablement vers une guérison complète. C’est le cas des cancers médullaires, papillaires et vésiculaires, qui sont le plus souvent d’évolution lente et sont peu agressifs, pour lesquels une guérison est obtenue chez environ 85 % des malades. En revanche, certains cancers de la thyroïde présentent une évolution plus défavorable. Il s’agit essentiellement des cancers anaplasiques ou indiffé- renciés, qui sont, heureusement, les plus rares. 4. Les personnes avec un cancer de la thyroïde conservent une bonne espérance de vie. Les cancers de la thyroïde font partie des cancers pour lesquels l’espé- rance de vie après la survenue de la maladie reste l’une des meilleures. Ce constat concerne notamment les cancers papillaires (les plus fréquents). Cinq ans après le diagnostic, seuls 1 % des malades décèdent des suites de la maladie. En d’autres termes, l’espérance de vie pour les personnes atteintes de cette forme de cancer de la thyroïde est la même que s’ils n’avaient pas eu ce cancer. La situation est presque aussi bonne avec les cancers vésiculaires, tandis que l’espérance de vie est légèrement amoindrie avec les cancers médul- laires. En revanche, l’évolution souvent défavorable des cancers anapla- siques (les plus rares) entraîne une diminution souvent importante de l’espérance de vie. 5. Les causes du cancer de la thyroïde sont connues. À l’heure actuelle, le seul facteur associé de façon certaine à une augmen- tation du risque de cancer de la thyroïde est l’exposition à des radia- tions ionisantes à fortes doses durant l’enfance. Il a ainsi été observé une augmentation considérable du nombre de cas de ce cancer chez les enfants de moins de 15 ans dans les régions d’Ukraine et de Biélorussie fortement exposées aux retombées de l’accident de Tchernobyl dans les années qui ont suivi ce dernier. La radiothérapie du cou pendant l’enfance constitue également un facteur de risque avéré de cancer thyroïdien. 6 Guide idées vraies/fausses 2014
D’autres facteurs de risque sont suspectés, mais, jusqu’à présent, les liens de causalité ne sont pas établis. C’est le cas, notamment, de la carence ou, à l’inverse, de l’excès d’apports iodés, et de l’exposition à certains polluants (comme les pesticides et les organochlorés). Des facteurs hormonaux ou liés à la reproduction sont également soupçonnés – ce qui expliquerait que les femmes sont plus fréquemment touchées que les hommes –, mais, là non plus, il n’y a pas de preuve formelle. Dans la plupart des cas, la survenue d’un cancer de la thyroïde demeure inexpliquée. Par ailleurs, il n’est pas prouvé que l’accident de Tchernobyl ait eu un impact sur l’évolution de l’incidence des cancers de la thyroïde en France. Les études réalisées jusqu’à présent ne permettent pas, en effet, de mettre en évidence avec certitude un lien de causalité entre les retombées de l’accident de Tchernobyl sur le territoire national et un éventuel excès de cas. S’il a existé, l’impact de cet accident en France ne semble pas avoir été important. 6. Certains cancers de la thyroïde sont liés à des prédispositions génétiques. Il existe des formes familiales de cancer de la thyroïde, qui touchent diffé- rents membres d’une même famille sur plusieurs générations. Ainsi, plus de 1/3 des cancers médullaires sont d’origine héréditaire. Ces cancers sont liés à la transmission d’une anomalie ou d’une mutation sur un gène par l’un des 2 parents (ou par les 2 s’ils sont l’un et l’autre porteurs de cette mutation). Pour les autres types de cancer de la thyroïde, les formes familiales sont beaucoup plus rares. Elles concerneraient 3 à 5 % des personnes diagnosti- quées avec un cancer papillaire. Certaines pathologies héréditaires, comme le syndrome de Gardner ou la maladie de Cowden, sont associées à un risque élevé de survenue d’un cancer de la thyroïde. 7. Les personnes qui ont eu un cancer de la thyroïde sont plus susceptibles que les autres de développer un autre cancer. Un cancer de la thyroïde correctement traité n’entraîne pas un risque accru de survenue d’un second cancer. Cela, même après un traitement par irathérapie, car la dose de radioactivité reçue est faible. Ce n’est qu’en cas d’irathérapies répétées (au moins 8 fois aux doses standard) qu’il existe un risque accru de survenue d’un autre cancer à moyen ou long terme. La Lettre du Cancérologue 7
sur le cancer de la thyroïde Le diagnostic du cancer de la thyroïde 8. Les signes pouvant évoquer un cancer de la thyroïde sont très spécifiques. Il n’existe aucun signe spécifique du cancer de la thyroïde. Dans la plupart des cas, c’est la présence d’un nodule, c’est-à-dire d’une protubérance ou d’une excroissance de tissu, sur la thyroïde qui conduit à rechercher l’éven- tualité d’un cancer. La découverte d’un nodule est généralement fortuite, à l’occasion d’une palpation du cou lors d’un examen clinique ou à la suite d’un examen d’imagerie (échographie, scanner, etc.) réalisé pour une autre raison, car, la plupart du temps, il n’est pas visible et n’entraîne aucun symptôme. Lorsque le nodule est volumineux, il peut toutefois provoquer, par compression, la survenue de certains signes comme des troubles de la voix, une gêne lors du passage des aliments ou des difficultés à respirer. Si la maladie s’est étendue à d’autres organes, les localisations secondaires (appelées métastases) peuvent entraîner des symptômes. Par exemple, des ganglions douloureux au niveau du cou ou des douleurs osseuses. Aucun de ces signes n’étant spécifique du cancer de la thyroïde, des examens complémentaires sont indispensables pour déterminer si un cancer est présent. 9. La présence d’un nodule sur la thyroïde indique forcément la présence d’un cancer. La présence d’un ou de plusieurs nodules sur la thyroïde est très fréquente. Dans 95 % de cas, ces nodules sont bénins. Un nodule thyroïdien corres- pond donc rarement à un cancer. 10. Une échographie doit être systématiquement réalisée pour diagnostiquer la maladie. Lorsqu’un nodule thyroïdien est détecté, la réalisation d’une échographie du cou est indispensable. Cet examen permet en effet de déterminer les caractéristiques du nodule (sa taille, sa morphologie), ce qui donne des indications sur le risque, qu’il soit bénin ou malin. L’échographie sert égale- ment à découvrir la présence éventuelle d’autres nodules et à analyser la région du cou pour évaluer le risque que des ganglions soient touchés en cas de cancer. 8 Guide idées vraies/fausses 2014
In fine, c’est l’échographie qui permettra de juger s’il est nécessaire de réaliser d’autres examens, en particulier un prélèvement ou une cytoponc- tion du nodule thyroïdien. 11. Un prélèvement ou une cytoponction est nécessaire pour le diagnostic. Lorsqu’un nodule thyroïdien est d’une taille supérieure à 1 cm et qu’il présente un aspect suspect à l’échographie, une cytoponction doit être réalisée. Cet examen consiste à recueillir des cellules présentes dans le nodule pour qu’elles soient ensuite analysées au microscope par un médecin spécialiste (un cytopathologiste). Ce dernier peut ainsi déterminer si les cellules prélevées sont malignes ou bénignes. Dans la très grande majorité des cas, le résultat obtenu est fiable. Le risque de “faux négatif” (les cellules sont présentées comme étant bénignes alors qu’elles sont malignes) est en effet inférieur à 3 %. En cas de doute sur le résultat, le renouvellement de la cytoponction permet de réduire le risque de faux négatif à moins de 1 %. 12. La cytoponction est un examen dangereux. Le prélèvement des cellules au sein d’un nodule est réalisé grâce à une aiguille fine. Celle-ci est insérée dans le nodule à travers la peau par le médecin. Ce dernier se guide en palpant le nodule avec ses doigts. Le plus souvent, il est également guidé par une échographie réalisée en même temps. Une fois l’aiguille en place, le médecin opère de très légers mouve- ments de va-et-vient qui permettent d’aspirer des cellules. La procédure est répétée plusieurs fois, afin de recueillir un nombre suffisant de cellules. L’examen ne nécessite pas d’hospitalisation, il est réalisé en ambulatoire (entrée et sortie de l’hôpital le même jour). Il dure quelques minutes, durant lesquelles le patient est allongé sur une table d’examen, la tête en arrière, pendant que le médecin prépare et effectue les prélèvements. Il faut éviter de déglutir pendant la réalisation de la cytoponction. Une fois les prélèvements terminés, un pansement compressif est placé sur le point de ponction. Le patient est ensuite invité à rester quelques minutes en salle d’attente pour s’assurer de l’absence d’hématome. La cytoponction est un examen peu douloureux (comparable à ce que l’on ressent lors d’une prise de sang). Elle ne nécessite généralement pas d’anesthésie locale, mais le médecin peut en proposer une si le patient le souhaite, et appliquer un gel anesthésiant. Une légère douleur peut être ressentie après la ponction, qui sera soulagée par la prise d’un antalgique. La Lettre du Cancérologue 9
sur le cancer de la thyroïde Une fois l’examen terminé, il est possible de reprendre immédiatement ses activités professionnelles et personnelles. La cytoponction présente peu de risques. Elle peut entraîner la survenue d’un hématome, qui disparaîtra spontanément dans la plupart des cas. Un malaise vagal, se manifestant par des suées et des nausées, est également susceptible de survenir. Ce type de malaise est généralement lié à l’appré- hension de l’acte ou au fait d’avoir la tête positionnée en arrière pendant les prélèvements. Lorsque le patient prend des anticoagulants, des précautions doivent être prises (vérification du degré d’anticoagulation, limitation du nombre de prélèvements, compression du point de ponction), afin de limiter les risques de saignements. Il est donc important de signaler au médecin ponctionneur la prise de ces médicaments. L’arrêt préalable des anticoa- gulants n’est toutefois pas recommandé. 13. Aucun autre examen n’est nécessaire pour le diagnostic. Différents examens biologiques, réalisés à partir d’une prise de sang, sont requis pour compléter le diagnostic et le bilan de la maladie thyroïdienne. Ils comprennent notamment : » un dosage de la thyréostimuline (TSH). Cette hormone, produite par l’hypo physe, une glande du cerveau, a pour fonction de réguler la production hormonale de la thyroïde. La mesure de la TSH permet ainsi d’évaluer le fonctionnement de la thyroïde. En revanche, la valeur de la TSH ne présage pas de la présence ou de l’absence de cellules cancé- reuses. Un dysfonctionnement de la thyroïde peut être, de façon fortuite, associé à un nodule thyroïdien cancéreux. Mais le cancer thyroïdien n’entraîne pas de dysfonctionnement de la thyroïde (hyperthyroïdie ou hypothyroïdie) ; » un dosage de la calcémie. La mesure du taux de calcium dans le sang permet de vérifier le fonctionnement des glandes parathyroïdes. Il s’agit de 4 minuscules glandes situées à proximité de la thyroïde qui participent à la régulation du calcium dans l’organisme. Ce dosage vise à repérer un éventuel dysfonctionnement de ces glandes ; » un dosage de la calcitonine. Le taux de cette hormone, produite notam- ment par la thyroïde, s’élève en cas de cancer médullaire. Sa mesure est donc utilisée comme marqueur spécifique de ce type de cancer de la thyroïde. Son dosage est recommandé avant toute intervention chirurgi- cale sur un nodule. D’autres examens peuvent être nécessaires en fonction des spécificités de chaque patient. Ils sont déterminés au cas par cas. 10 Guide idées vraies/fausses 2014
14. Le diagnostic du cancer est confirmé à l’issue d’une intervention chirurgicale. En cas de cancer ou de forte suspicion de cancer à la suite de l’écho- graphie et de la cytoponction, une intervention chirurgicale est proposée pour retirer tout ou partie de la thyroïde, ainsi que, éventuellement, des ganglions situés à proximité. À l’issue de l’intervention, les tissus enlevés sont analysés par un médecin spécialiste, un anatomopathologiste, afin de préciser les caractéristiques de la (des) tumeur(s) présente(s) et de confirmer le diagnostic. Cette analyse permet également de déterminer si des ganglions situés à proximité de la thyroïde sont touchés par des cellules cancéreuses. Le compte-rendu de l’anatomopathologiste est généralement disponible dans un délai de 1 à 3 semaines après l’intervention. Dans certains cas, quand le diagnostic de cancer n’est pas suspecté avant l’intervention, que la moitié de la thyroïde a été enlevée pour un nodule isolé dans un lobe, et que l’examen du nodule pendant la chirurgie (examen extemporané) n’a toujours pas permis de poser le diagnostic de cancer, il faut attendre le compte-rendu définitif de l’anatomopatholo- giste pour avoir la certitude du diagnostic de cancer thyroïdien. Il est alors souvent nécessaire de réintervenir pour enlever l’autre lobe et effectuer un curage ganglionnaire. La prise en charge du cancer de la thyroïde 15. La prise en charge est adaptée à chaque patient. Les différents examens réalisés pour établir le diagnostic du cancer de la thyroïde, ainsi que les éventuels examens complémentaires (qui sont décidés au cas par cas), permettent de déterminer le stade de la maladie, ainsi que son risque d’évolution et de récidive. Différents facteurs sont pris en compte, en particulier la taille de la tumeur au moment du diagnostic, une éventuelle atteinte des ganglions environnants, la présence ou l’ab- sence de métastases à distance. En fonction de ces éléments, le niveau de risque d’évolution et de récidive est classé dans l’une des 3 catégories suivantes : très faible, faible ou élevé. C’est en tenant compte de la caté- La Lettre du Cancérologue 11
sur le cancer de la thyroïde gorie individuelle de risque de chaque patient que les propositions de trai- tement sont définies. Pour les cancers thyroïdiens à faible risque (les plus fréquents), les modalités de traitement sont allégées par rapport à celles des cancers présentant un risque de récidive plus élevé. 16. Le choix des traitements est fait par un seul médecin. Le dossier médical d’une personne atteinte d’un cancer de la thyroïde doit être présenté et discuté dans le cadre de ce que l’on appelle une “réunion de concertation pluridisciplinaire” (RCP) en cancérologie. Des médecins de différentes spécialités participent à cette réunion : endocrinologue, chirur- gien, radiologue, médecin nucléaire, anatomopathologiste, etc. Les déci- sions prises sont collégiales afin de proposer la meilleure prise en charge possible. 17. Un programme personnalisé de soins doit être proposé à chaque patient. Les propositions thérapeutiques préconisées à l’issue de la réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP) sont ensuite expliquées et proposées au patient par le médecin qui le suit lors d’une consultation spécifique, appelée “consultation d’annonce”. Le patient doit clairement exprimer son accord sur les traitements et la prise en charge qui lui sont proposés. Ceux-ci sont alors consignés dans un document appelé “programme personnalisé de soins” (PPS), qui est remis au patient. Un exemplaire du PPS est également adressé à son médecin traitant. Le PPS présente les différents traitements qui vont être mis en œuvre et le détail de leurs modalités (dates, durée, etc.). Ce programme peut ensuite être adapté selon l’évolution de l’état de santé du patient et selon la façon dont il réagit aux traitements. 18. La thyroïde doit toujours être entièrement enlevée en cas de cancer. Une intervention chirurgicale visant à retirer la thyroïde est le premier trai- tement du cancer de la thyroïde (sauf contre-indication liée à l’état de santé général du patient). L’opération vise à retirer la tumeur, à permettre des traitements complémentaires et à limiter autant que possible le risque de récidive de la maladie. La thyroïde est une glande, de forme allongée, composée de 2 lobes réunis en leur centre ; on dit ainsi souvent qu’elle ressemble à un papillon. 12 Guide idées vraies/fausses 2014
En règle générale, la thyroïde est entièrement enlevée. Toutefois, un seul lobe est parfois retiré (celui présentant la tumeur). C’est le cas lorsque le cancer présente un faible risque d’évolution et qu’aucun nodule n’est présent sur le lobe intact. 19. L’opération ne nécessite pas d’anesthésie générale. L’ablation de la thyroïde nécessite une hospitalisation de 1 à 3 jours. Elle est précédée d’une consultation avec le chirurgien et d’une autre avec l’anesthésiste pour préparer l’intervention et apporter au patient toutes les informations nécessaires. L’intervention prend un certain temps (jusqu’à quelques heures) et requiert que le patient soit endormi. Une anesthésie générale est réalisée juste avant l’intervention, au bloc opératoire. Lorsque le patient est endormi, son cou est dégagé en plaçant sa tête en arrière. Une incision horizontale est pratiquée par le chirurgien pour qu’il puisse accéder à la thyroïde. Dans la mesure du possible, cette incision est effectuée au niveau d’un pli du cou afin de minimiser la visibilité de la cicatrice. Souvent, la cicatrice est recouverte par un pansement compressif pendant quelques jours. Parfois, 1 ou 2 drains sont mis en place pendant l’interven- tion afin d’éviter la survenue d’œdèmes et d’hématomes au niveau de la zone opérée. Ils sont ensuite retirés par une infirmière, avant la sortie de l’hôpital. La réalisation de la chirurgie thyroïdienne en ambulatoire est déconseillée en France par les experts, en raison du risque, rare (mais qui peut être grave si le patient est éloigné de l’hôpital), d’hématome compressif du cou au cours des 48 premières heures qui suivent l’intervention. 20. Au cours de l’intervention, le chirurgien peut enlever des ganglions. Les ganglions sont de petits organes répartis dans tout le corps qui jouent un rôle important pour les défenses de l’organisme. Ils ont notamment pour fonction de filtrer la lymphe et d’éliminer toutes les substances étran- gères ou anormales. Les cellules cancéreuses présentes au niveau de la thyroïde peuvent se détacher de celle-ci et atteindre les ganglions situés aux alentours. Si les examens du bilan diagnostique ont mis en évidence ou font suspecter la présence de cellules cancéreuses dans des ganglions situés à proximité de la thyroïde, le chirurgien retire ces ganglions lors de l’intervention. La Lettre du Cancérologue 13
sur le cancer de la thyroïde Il pratique ainsi ce que l’on appelle un “curage ganglionnaire”. L’objectif est d’éliminer le plus possible de cellules cancéreuses pour limiter les risques de récidive de la maladie. En cas de cancer médullaire de la thyroïde, un curage ganglionnaire est réalisé de façon systématique à titre préventif (c’est-à-dire même si les ganglions ne sont pas atteints). En cas de cancer papillaire, du fait de la fréquence de l’atteinte ganglion- naire, la plupart des équipes chirurgicales conseillent un curage systéma- tique (prophylactique) de la partie centrale du cou. 21. Après l’intervention, des troubles de la voix peuvent survenir. Les nerfs récurrents, qui innervent tous les muscles du larynx, en parti- culier les cordes vocales, passent à proximité immédiate de la thyroïde. Lors de l’ablation de celle-ci, l’un de ces nerfs peut être involontairement lésé. Cela entraîne ce que l’on appelle une “paralysie récurrentielle”. Cette complication est rare, survenant chez 0,5 à 5 % des patients opérés. Elle est généralement unilatérale, c’est-à-dire qu’un seul des 2 nerfs récurrents est touché. Les répercussions concernent essentiellement la voix, qui devient souvent rauque, voire bitonale (2 sons sont émis en même temps lorsque la personne parle) ; on parle alors de dysphonie. La voix est également essoufflée et se fatigue rapidement. Des troubles de la déglutition, notam- ment en buvant des liquides, peuvent aussi se manifester, ainsi qu’un essoufflement à l’effort. Un examen des cordes vocales est généralement réalisé avant et, surtout, après l’intervention chirurgicale afin d’évaluer leur état. Cela permet, en cas de troubles de la voix, de proposer une prise en charge adaptée (des séances d’orthophonie, notamment). Dans la plupart des cas, la paralysie récurrentielle est temporaire. Elle s’es- tompe en quelques semaines, et la voix redevient normale. Si la lésion sur le nerf récurrent est importante ou si la dysphonie persiste plus de 12 mois, celle-ci peut être définitive. Une prise en charge ortho- phonique est alors proposée, et l’éventualité d’une intervention chirurgi- cale de réparation peut être envisagée. Dans de très rares cas, les 2 nerfs récurrents sont lésés lors de l’ablation de la thyroïde. La paralysie récurrentielle est alors dite “bilatérale”. Elle néces- site une prise en charge en urgence, car la respiration peut être nettement altérée. 14 Guide idées vraies/fausses 2014
22. Une baisse du calcium dans le sang est possible à l’issue de l’opération chirurgicale. Il est fréquent que l’ablation de la thyroïde provoque un dysfonction- nement des glandes parathyroïdes (voir question 13, p. 10) en raison de lésions non intentionnelles liées à l’intervention. Les 4 glandes parathy- roïdes sont très petites, accolées à la thyroïde et irriguées par les mêmes vaisseaux sanguins. Elles sont difficiles à repérer, et il n’est pas toujours facile pour le chirurgien de les laisser en place. Le dysfonctionnement des glandes parathyroïdes entraîne une baisse plus ou moins importante du taux de calcium dans le sang. L’hypocalcémie qui en résulte peut se traduire par différents symptômes, en particulier des fourmillements, picotements ou engourdissements au niveau des mains, des pieds et de la bouche. Des crampes peuvent également survenir. Un faible taux de calcium est également susceptible d’avoir des conséquences sur l’humeur (instabilité émotionnelle, anxiété) et sur le fonctionnement du cœur (arythmies). Cette complication de l’ablation de la thyroïde survient chez moins de 20 % des personnes opérées. Elle se manifeste généralement dans les jours qui suivent l’intervention. C’est la raison pour laquelle le taux de calcium est contrôlé quotidiennement, par le biais d’une prise de sang, pendant l’hospitalisation. Le plus souvent, cette complication est transitoire, et peut durer de quelques jours à quelques mois. Dans l’intervalle, du calcium et de la vita- mine D par voie orale peuvent être prescrits au patient pour normaliser le taux de calcium. Cette complication peut être définitive dans 0,5 à 4 % des cas. Elle néces- site alors un suivi et une prise en charge spécifique. 23. Aucun autre effet indésirable ne peut survenir à l’issue de l’opération chirurgicale. D’autres effets indésirables liés à l’intervention chirurgicale sont également possibles. En cas de curage ganglionnaire, il peut se produire un écoule- ment de lymphe, entraînant la formation d’une poche de ce liquide. Celle- ci est généralement évacuée par ponction ou drainage. Elle peut aussi se résorber spontanément. Enfin, les complications associées à toute opéra- tion et anesthésie peuvent survenir. La Lettre du Cancérologue 15
sur le cancer de la thyroïde 24. Une radiothérapie métabolique par ingestion d’une gélule d’iode radio-actif (irathérapie) peut être proposée après l’intervention. Une fois l’ablation de la thyroïde réalisée, il reste généralement une petite quantité de tissu thyroïdien. Cette petite lame de tissu est laissée par précaution, pour protéger les nerfs de la voix et les glandes du calcium. Ce tissu résiduel est appelé “reliquat”. Ainsi, il ne peut être exclu que quelques cellules cancéreuses soient toujours présentes dans la zone thyroïdienne, voire dans d’autres régions de l’organisme. Pour ces raisons, il peut être proposé un traitement par de l’iode radio-actif (iode-131). Le principe de ce traitement repose sur le fait que seules les cellules de la thyroïde captent l’iode. En présence d’iode radio-actif, celles-ci sont progressivement détruites par les rayonnements émis par l’iode. Ainsi, ce traitement ciblé permet de limiter le risque de récidive, puisqu’il ne reste plus aucune cellule thyroïdienne dans l’organisme. Par ailleurs, les éventuelles cellules cancéreuses qui auraient migré dans d’autres régions de l’organisme captent elles aussi l’iode radio-actif. Elles émettent alors un rayonnement qui peut être détecté grâce à un examen d’imagerie appelé “scintigraphie”. Celui-ci permet dès lors de déterminer si des localisations secondaires de la maladie sont présentes, et de prendre les mesures thérapeutiques adaptées. Enfin, l’iode radio-actif permet non seulement de visualiser les cellules cancéreuses mais aussi de les détruire grâce aux rayonnements radioactifs. La pertinence d’un traitement par irathérapie est examinée en réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP) par l’équipe médicale en fonction des constatations effectuées lors de l’analyse des tissus prélevés par chirurgie, ainsi que du risque d’évolution de la maladie pour chaque patient. L’irathé- rapie n’est donc pas systématique. 25. Avant l’irathérapie, des précautions alimentaires sont à respecter. Pour s’assurer que les cellules thyroïdiennes restantes absorbent le mieux possible l’iode radio-actif, il est préférable d’éviter de les saturer d’iode “stable”, que l’on trouve notamment dans l’alimentation. Ainsi, il est conseillé ne pas consommer, pendant les 2 semaines qui précèdent l’ira- thérapie, les aliments suivants : fruits de mer, crustacés, algues, sel iodé et tout autre aliment riche en iode. Par ailleurs, l’application de désinfectant iodé est également à éviter pendant cette période. Enfin, il faut s’abstenir 16 Guide idées vraies/fausses 2014
de subir des examens nécessitant le recours à des produits de contraste iodé, un scanner par exemple, pendant les 3 semaines qui précèdent le traitement. 26. Une hospitalisation est généralement nécessaire pour l’irathérapie. L’irathérapie repose sur la prise d’une gélule d’iode radio-actif, qui est avalée avec un grand verre d’eau. En cas de difficulté à avaler les médica- ments sous forme de gélule, une solution buvable est possible ; il faut que l’équipe médicale soit prévenue. Une partie des rayonnements radio-actifs émis par l’iode se diffuse à l’extérieur de l’organisme et pourrait être dangereuse pour l’entourage (notamment les femmes enceintes et les jeunes enfants). Des mesures de protection sont donc nécessaires. Il s’agit de protéger l’environnement du patient et non le patient de son environnement. Le traitement est administré à l’hôpital, dans un service de médecine nucléaire. Le plus souvent, le patient est hospitalisé pour une durée de 2 à 5 jours. L’hospitalisation se déroule dans une chambre radioprotégée ; celle-ci ne laisse pas passer la radio-activité à l’extérieur. Cela permet d’éviter que le personnel hospitalier et les autres patients ne soient exposés à la radio-activité. Le patient ne peut ni sortir du service hospitalier ni rece- voir de visites pendant toute la durée de l’hospitalisation. Le protocole de protection est bien souvent spécifique à chaque hôpital. Une brochure explicative est ainsi généralement remise au patient quelques jours avant l’irathérapie, pour lui expliquer le déroulement de son séjour dans le service de médecine nucléaire. 27. Après l’irathérapie, aucune précaution n’est requise. L’irathérapie entraîne l’émission d’une faible dose de radio-activité par le patient pendant quelques jours. Il est donc indispensable qu’il respecte quelques mesures de protection vis-à-vis de son entourage. Ainsi, au moment de sa sortie de l’hôpital, il doit prendre une douche, se laver les cheveux et mettre des vêtements qui n’ont pas été portés pendant le séjour à l’hôpital et qui ont été rangés à part. En revanche, les objets apportés et utilisés pendant l’hospitalisation peuvent être rapportés sans risque, ils ne sont pas radio-actifs. Avant la sortie de l’hôpital, une mesure de la radio-activité émise par le patient est effectuée. Cela permet à l’équipe médicale de préciser les consignes à respecter et la durée de celles-ci. La Lettre du Cancérologue 17
sur le cancer de la thyroïde Une fois de retour à domicile, la principale précaution consiste à éviter les contacts rapprochés et prolongés avec les femmes enceintes et les enfants de moins de 15 ans. Il s’agit d’éviter de soumettre la thyroïde en plein développe- ment des enfants aux rayonnements radio-actifs. Il est également conseillé de renforcer les mesures d’hygiène habituelles (toilette, lavage des mains, etc.). Habituellement, ces précautions sont à respecter pendant quelques jours. 28. L’irathérapie peut entraîner des troubles de la salivation et des douleurs au niveau du cou. Le traitement par l’iode-131 peut entraîner certains effets indésirables : » une inflammation des glandes salivaires. Celle-ci s’accompagne de douleurs dans la bouche et en haut du cou (3). Les douleurs au niveau du cou peuvent également résulter d’une inflammation liée à la destruction des cellules thyroïdiennes ; » des nausées et des douleurs gastriques. Afin de minimiser ces désagréments, il est conseillé de sucer des bonbons, de boire de l’eau citronnée ou de prendre de la vitamine C le jour de la prise de la gélule d’iode-131 et pendant les jours qui suivent. Cela limite l’inflammation et favorise la production de salive. Il est également recommandé de boire beaucoup d’eau pendant cette période. Cela permet d’éliminer plus rapidement l’iode radio-actif des systèmes digestif et urinaire. 29. Pour compenser l’ablation de la thyroïde, un traitement hormonal est indispensable. Une fois la thyroïde enlevée, il est nécessaire de compenser l’absence des hormones qu’elle produisait. Il est en effet impossible de vivre longtemps sans hormone thyroïdienne car elle est indispensable au fonctionnement de nombreux organes, dont le cœur. Un traitement comportant des hormones de synthèse doit donc impérati- vement être instauré. Il commence soit après l’intervention chirurgicale, soit après l’irathérapie. Ce traitement repose sur la prise d’un médicament qui remplace les hormones naturelles de la thyroïde (L-T4). Il s’agit d’une hormone de synthèse identique à celle produite par la thyroïde. Le plus souvent, il s’agit d’un comprimé à avaler 1 fois par jour avec un verre d’eau. Le comprimé doit être pris à jeun. 18 Guide idées vraies/fausses 2014
La triiodothyroxine (T3) peut être utile en complément de la L-T4 pendant quelques jours, comme “starter” après une période de sevrage de la L-T4. Son association à long terme avec la L-T4 est parfois utilisée. Le traitement hormonal doit être pris à vie. Pour adapter son dosage et surveiller son efficacité, des mesures de la TSH (thyréostimuline, voir ques- tion 13, p. 10) dans le sang sont réalisées à intervalles réguliers. 30. Le taux de TSH à obtenir est le même pour tout le monde. L’objectif du traitement hormonal est déterminé par l’équipe médicale en fonction de la situation de chaque patient. Si le risque de récidive du cancer est faible, le but de l’hormonothérapie est d’être substitutive, c’est-à-dire de remplacer le fonctionnement de la thyroïde. Dans ce cas, l’objectif recherché est d’obtenir un taux de thyréos- timuline (TSH) situé dans les valeurs normales. En revanche, s’il existe un risque de récidive du cancer, le traitement hormonal vise à maintenir un taux de TSH bas, afin d’empêcher autant que possible que d’éventuelles cellules cancéreuses restantes soient stimulées par la TSH et se développent. Dans ce cas, l’hormonothérapie est dite “frénatrice”. La dose de l’hormonothérapie est fixée en fonction de l’objectif souhaité et est variable d’un patient à l’autre. Elle est plus forte en cas d’hormonothé- rapie frénatrice. La dose peut ensuite être adaptée en fonction des résultats des mesures régulières de la TSH et du ressenti du patient. 31. Certaines précautions sont à respecter pour la prise du traitement hormonal. Certains aliments ou compléments alimentaires interagissent avec le médi- cament qui remplace les hormones naturelles de la thyroïde (L-T4) et risquent d’en diminuer l’efficacité. C’est le cas, notamment, du soja et des compléments en fer et en calcium. Il est préférable d’éviter de consommer du soja dans les heures qui précèdent ou qui suivent la prise du traitement hormonal. De même, les compléments en fer et en calcium doivent être pris au moins 2 heures après l’hormonothérapie. La L-T4 doit être prise à jeun. Il est généralement recommandé d’attendre entre 20 et 30 minutes avant de commencer à manger, pour éviter toute interaction médicamenteuse. Le mieux est de prendre ce médicament tous les jours dans les mêmes conditions, c’est-à-dire à peu près à la même heure et avant le même repas. Des interactions existent également entre la L-T4 et d’autres médicaments (les pansements gastriques, par exemple), avec le risque d’une diminu- tion de l’efficacité. C’est pourquoi il est préférable que les patients sous La Lettre du Cancérologue 19
sur le cancer de la thyroïde hormonothérapie s’informent préalablement auprès de leur pharmacien s’ils souhaitent prendre des médicaments sans ordonnance. Il est égale- ment recommandé qu’ils signalent leur traitement par L-T4 à tout médecin consulté avant toute prescription d’autres médicaments. 32. L’arrêt du traitement hormonal entraîne des effets indésirables. Avant une irathérapie, il est nécessaire de stimuler les cellules thyroï- diennes restantes pour qu’elles captent au mieux l’iode en provoquant une augmentation de la thyréostimuline (TSH). L’une des 2 méthodes utilisée pour cela est ce que l’on appelle la “défrénation”. Elle consiste en une interruption de l’hormonothérapie pendant plusieurs semaines (lorsqu’elle a été commencée après l’intervention chirurgicale). Pendant cet arrêt, l’organisme est en manque d’hormones thyroïdiennes. L’hypothyroïdie qui résulte de la baisse des hormones peut se traduire par un certain nombre de signes, en particulier de la fatigue, une prise de poids, une faiblesse musculaire, des gonflements, une frilosité, une consti- pation, des difficultés de concentration, des troubles de l’humeur et de la mémoire. Ces différents symptômes disparaissent lorsque l’hormonothé- rapie est reprise une fois l’irathérapie terminée. Il est toutefois possible d’augmenter artificiellement le taux de TSH par l’injection de TSH recombinante humaine. Cette molécule de synthèse, qui imite la TSH naturelle, permet d’éviter l’arrêt de l’hormonothérapie et les symptômes d’hypothyroïdie. 33. Le traitement hormonal peut entraîner une perte osseuse. En règle générale, l’hormonothérapie s’accompagne de peu d’effets indé- sirables. Toutefois, lorsqu’elle est donnée à dose élevée dans le but d’être très frénatrice, elle est associée, chez les femmes ménopausées, à une augmentation du risque de perte osseuse (ostéoporose). L’hormonothérapie très frénatrice constitue également un facteur de risque de troubles du rythme cardiaque chez les patients âgés. Ces risques sont pris en compte par l’équipe médicale au cours du suivi. 34. Une fois le traitement initial terminé, un bilan doit être réalisé. Généralement, un premier bilan est effectué 3 mois après la fin du trai- tement initial. Il comprend notamment un examen clinique (avec palpa- tion du cou) et des dosages sanguins de la thyroglobuline (un marqueur 20 Guide idées vraies/fausses 2014
permettant de vérifier s’il reste des cellules thyroïdiennes, saines ou cancé- reuses), et de la thyréostimuline (TSH) pour surveiller le bon dosage du traitement hormonal substitutif. Un second bilan est ensuite réalisé 6 à 12 mois après le traitement initial. Outre l’examen clinique et les examens sanguins, il repose également sur une échographie du cou et un dosage de la thyroglobuline sous stimula- tion. C’est ce second bilan qui permet de déterminer si le patient est en rémission complète. Un scanner du cou et du thorax peut être demandé selon les cas (principalement lorsque l’extension initiale du cancer semblait importante). 35. La chimiothérapie est un traitement fréquent du cancer de la thyroïde. La chimiothérapie ne fait pas partie des traitements les plus habituels des cancers de la thyroïde. Elle est parfois indiquée en cas de récidive ou d’absence d’évolution favorable des cancers différenciés, ou pour le traite- ment des cancers anaplasiques. Le plus souvent, la chimiothérapie est alors proposée dans le cadre d’essais cliniques. 36. Des thérapies ciblées sont disponibles pour traiter certains cancers de la thyroïde. Les thérapies ciblées sont des médicaments qui agissent sur des protéines spécifiques participant à la croissance des cellules cancéreuses. La recherche sur ce type de médicaments pour lutter contre un grand nombre de cancers différents est en plein développement depuis une dizaine d’années. Plusieurs thérapies ciblées ont une place à l’heure actuelle parmi les options thérapeutiques dans certains cancers de la thyroïde. Différents essais sont en cours concernant d’autres médicaments de thérapie ciblée. Ce type de médicaments sera de plus en plus utilisé pour le traitement des personnes atteintes d’un cancer de la thyroïde réfractaire à l’iode radio-actif dans les prochaines années. 37. Les thérapies ciblées utilisées dans les cancers de la thyroïde sont injectées par voie veineuse à l’hôpital. Les médicaments de thérapie ciblée actuellement disponibles sont à retirer en pharmacie de ville ; d’autres sont en cours d’évaluation dans des essais cliniques. Toutes ces thérapies ciblées se présentent sous forme La Lettre du Cancérologue 21
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