LE STATUT DU KOSOVO EN 2007 : L INDEPENDANCE COMME ILLUSTRATION DU CONFLIT JURIDIQUE ENTRE DROIT DES PEUPLES A DISPOSER D EUX-MEMES ET DROIT DES ...

 
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IMBERT Marianne                Ivan Boev
Master 2 Droits de l’Homme     Droit des Minorités

    LE STATUT DU KOSOVO EN 2007 :

 L INDEPENDANCE COMME ILLUSTRATION DU
CONFLIT JURIDIQUE ENTRE DROIT DES PEUPLES
   A DISPOSER D EUX-MEMES ET DROIT DES
                MINORITES

Année 2007-2008

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LE STATUT DU KOSOVO EN 2007 : L INDEPENDANCE COMME
ILLUSTRATION DU CONFLIT JURIDIQUE ENTRE DROIT DES
PEUPLES A DISPOSER D EUX-MEMES ET DROIT DES MINORITES.

Introduction ................................................................................................................................ 3

1°) Un antagonisme inhérent au Droit International : le conflit entre droit à
l’autodétermination et droit des minorités. ................................................................................ 5

   A) Les articulations entre droit des peuples et droit des minorités passent par l’enjeu du
   respect de la souveraineté des Etats et de leur intégrité territoriale. ...................................... 5
   B) La conciliation théorique – un arbitrage entre autonomie interne et externe- est
   inadaptée à la réalité de la situation du Kosovo : vers une inévitable indépendance ? .......... 7
      L’impossible compromis sur l’autonomie.......................................................................... 7
      Une inévitable indépendance ............................................................................................. 8

2°) L’indépendance du Kosovo : d’une l illégalité de jure à une légitimité de facto…........... 11

   A) Dépasser l’antagonisme entre peuple et minorité pour promouvoir le droit d’une nation
   nouvelle ................................................................................................................................ 12
   B) Garantir une protection des droits pour légitimer l’existence d’un Etat kosovar............ 14

Conclusion................................................................................................................................ 15

Bibliographie............................................................................................................................ 17

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Introduction

         Après la guerre du Kosovo de 1999, achevée après intervention militaire de l’OTAN et
signature des accords de Rambouillet, l’ancienne province yougoslave puis serbe se retrouve
sous mandat de l’ONU. La résolution 1244 de l’Onu place la province sous administration des
Nations Unies et sous protection de l’OTAN, avec l’instauration de la force de maintien de la
paix au Kosovo, la KFOR, garantissant la défense de la région. Depuis 1999, le sort du statut
de la province serbe, composée majoritairement d’albanais (93% de la population), n’est pas
fixé. Une « large autonomie »1 est concédée à la province, mais celle-ci reste officiellement
partie du territoire serbe. La logique des « normes avant le statut », voulue par les Nations-
unies, prévaut. Celle-ci exige qu’avant même que ne soit envisagé le devenir du statut du
Kosovo (indépendance, autonomie, intégration au territoire serbe ou albanais etc.), des
« standards « (ou normes) doivent être respectés ( retour des réfugiés serbes, institutions
démocratiques opérationnelles, état de droit, libre circulation, mesures économiques,
instauration d’un dialogue avec Belgrade, mise en place d’un Corps de protection du Kosovo
etc.).
         Depuis maintenant près de 10 ans, le statut du Kosovo est indéfini. Provoquant
l’impatience des Kosovars, Albanais, Serbes mais également de toute la communauté
internationale. En effet, la question du statut du Kosovo inquiète tous les Etats membres des
Nations Unies. Dépassant le cadre seul de la stabilité territoriale des Balkans, le devenir de la
province pose des questions sans précédents, notamment en droit international. Accorder une
indépendance à cette province touche à l’antagonisme juridique inhérent au Droit
International, à savoir l’incompatibilité entre le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes,
supposant l’autodétermination, et la protection des minorités. Si le Kosovo acquiert une
indépendance de jure et de facto, la Serbie, membre des Nations Unies, serait touchée dans
son intégrité territoriale, principe contraire au droit international depuis le traité de Westphalie
– et consacré par l’Acte final d’Helsinki de 1975 2 . A contrario, la minorité albanaise du
Kosovo, en tant que peuple majoritaire au sein de la province, revendique son droit à
l’autodétermination, ce qui serait pour elle synonyme d’indépendance. On comprend aisément

1
  « Faciliter, en attendant un règlement définitif, l'instauration au Kosovo d'une autonomie et d'une auto-
administration substantielles », article 11 de la résolution 1244 de l’ONU, disponible sur www.un.org
2
  L’Acte final prône la reconnaissance des frontières des pays de l’Est, au sortir de la guerre froide, et notamment
le principe d’inviolabilité des frontières consacrées en temps de paix.

                                                                                                                  3
l’intérêt des grandes puissances internationales (notamment la « troïka » 3 composée de
l’Union Européenne, les Etats-Unis et la Russie) qui voient dans la question de
l’indépendance du Kosovo un baril de poudre prêt à exploser. Accorder l’indépendance
pourrait provoquer des vagues d’irrédentismes dans tous les Balkans, mais également ailleurs ;
chaque Etat ayant son lot de minorités susceptibles de réclamer une sécession (Basques en
Espagne ou en France par exemple). Tandis que le statuquo qui prévaut jusqu’à aujourd’hui
fait régner frustration tant en Albanie qu’en Serbie. Les différentes parties n’étant pas
parvenues jusqu’ici à s’entendre sur le statut du Kosovo (la date butoir du 10 décembre 2007
fixée par les Nations Unies n’y a rien changé), il est important de comprendre les enjeux,
notamment au regard du Droit International que représenterait une indépendance accordée à la
province. Si une indépendance touche à la souveraineté des Etats, comment articuler alors la
souveraineté à laquelle prétendent les minorités au Kosovo ? De quelle manière
l’indépendance pourrait-elle être rendue légale et légitime, et comment les minorités peuvent-
elles y trouver leur compte ? Cette rêflexion sera basée principalement sur les grands
principes du droit qui s’opposent dans la situation au Kosovo. Certains aspects historiques,
sociologiques et diplomatiques, explicatifs de la situation seront évoqués, mais cette étude
sera essentiellement juridique.
          D’une part, l’éventuelle indépendance du Kosovo soulève le problème de la
compatibilité des deux droits internationaux que sont le droit des peuples à
l’autodétermination et le droit des minorités nationales. Dans cette mesure, à quelle sorte
d’autodétermination les minorités ou les peuples peuvent ils prétendre : s’agit-il alors d’une
autodétermination externe, synonyme d’indépendance, ou d’une autodétermination au sens
d’autonomie ? Quelle articulation et quelles solutions, tant au niveau théorique que dans la
réalité du Kosovo, peuvent être envisagées pour qu’aucun des droits ne prime sur l’autre ?
          D’autre part, si la solution de l’indépendance est adoptée, elle nécessite le
dépassement de cet antagonisme juridique de base, entre minorité et peuple, droit et intégrité
territoriale. Et dans cette mesure, dans quelles conditions l’indépendance peut elle être en
conformité avec les règles du droit international concernant la protection des minorités
notamment ? Comment peuples et minorités peuvent ils légitimement s’entendre sur un
nouveau territoire que serait l’Etat kosovar ?

3
    SAMARY Catherine, « Kosovo après l’échec des négociations », Le monde diplomatique, 12 décembre 2007.

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1°) Un antagonisme inhérent au Droit International : le conflit
entre droit à l’autodétermination et droit des minorités.

        La situation qui règne en ce moment au Kosovo, notamment l’indétermination de son
statut à venir, reflète une lutte inhérente aux principes du Droit International, entre le droit des
peuples à disposer d’eux-mêmes et le respect de l’intégrité territoriale et de la souveraineté
des Etats.

        A) Les articulations entre droit des peuples et droit des minorités passent
        par l’enjeu du respect de la souveraineté des Etats et de leur intégrité
        territoriale.
        Depuis les débuts du Droit International, notamment le traité de Westphalie de 1648,
celui-ci consacre la stabilité et l’inviolabilité des frontières établies en temps de paix. Ce
principe est sacré et reconnu comme règle du jus cogens, puisque permettant de reconnaître la
souveraineté par la paix. Toute intervention sur le territoire d’un Etat, susceptible d’entraîner
la modification de ses frontières, n’est tolérable au regard du Droit International que sur la
base d’un traité de paix avec le dit Etat. A contrario, une intervention territoriale serait
contraire au droit, et notamment incompatible avec le principe de non ingérence dans la
souveraineté des Etats, qui sous tend la logique d’intégrité territoriale. C’est en effet au nom
du respect de la souveraineté des Etats, consacrée par la Charte des Nations-Unies4, que la
non ingérence dans les affaires intérieures des Etats est proclamée. L’interdiction de toute
atteinte à la souveraineté, dans l’esprit des législateurs des Nations Unies, est entendue
comme souveraineté étatique, impliquant donc une souveraineté territoriale que rien ne saurait
atteindre5.
        Le cas du Kosovo est unique, puisque un document international à force contraignante,
la résolution 1244 de l’ONU, reconnaît la souveraineté yougoslave et serbe sur le territoire du
Kosovo. Même en accordant une « large autonomie » à la province, la résolution mentionne
par trois fois la souveraineté de la Serbie sur le territoire, ainsi que « l’attachement de tous les
Etats membres à la souveraineté et l’intégrité territoriale de la Serbie » 6 . Les frontières
établies par ce document, et conformément au principe du droit international, sont nées en

4
  « Rien n’autorise les Nations Unies à intervenir dans les affaires qui relèvent essentiellement de la compétence
nationale d’un Etat », article 2 paragraphe 7 de la Charte des Nations Unies, et « aucune action coercitive ne
sera entreprise en vertu d’accords régionaux ou par des organismes régionaux », article 53.
5
  Seulement en cas de menaces pour la paix, les Nations Unies sont habilitées à intervenir dans les affaires
intérieures (voir chapitre 7 de la Charte).
6
  Résolution 1244, disponible sur www.un.org

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temps de paix, lors de la signature des accords de Rambouillet du 27 mai 1999. Un
changement de ces frontières constituerait une atteinte à l’intégrité territoriale de la Serbie,
d’autant plus que celle-ci, déjà membre des Nations- unies depuis 2000, est depuis 2003
également membre du Conseil de l’Europe. Si le Conseil de sécurité de l’ONU venait à
imposer une indépendance de la province du Kosovo, il serait, une première dans l’histoire
moderne du Droit International, dans une situation d’illégalité du point de vue du droit même
des Nations Unies.
        A l’aune des principes régissant le droit international, la sacro sainte souveraineté des
Etats, impliquant la non ingérence et le respect de l’intégrité territoriale s’articule
théoriquement avec le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. Ces deux droits paraissent
pourtant, de prime abord, contradictoires. Issu de la vague de décolonisation des années 1950
et surtout 1960 qui touche les régions du monde entier, le droit des peuples à disposer d’eux-
mêmes signifie généralement, pour les peuples qui s’en réclament, le droit d’être reconnu
indépendants7 et donc souverains8 sur un territoire donné. Tous les Etats membres des Nations
Unies s’engagent à partir de ce moment à « reconnaître et favoriser la réalisation, en ce qui
concerne les populations des territoires placés sous leur administration, du droit des peuples
à disposer d’eux-mêmes, et doivent favoriser l’exercice de ce droit aux peuples de ces
territoires » (Résolution de l’ONU de 1952).
        Entendu comme accès à l’indépendance, l’autodétermination des peuples s’articule,
logiquement, avec le droit des minorités. En effet, le droit à la protection des minorités,
préexistant par ailleurs au droit des peuples à disposer d’eux mêmes (résolution 2625 XXV
ONU de 1970 relative aux principes du Droit International9), offre aux minorités des droits
individuels (droit de ne pas être victime de discrimination, promotion identitaire, libertés
spécifiques etc), puis évolue vers des droits collectifs. Ceux-ci se décomposent en plusieurs
droits théoriques10 (protection de l’existence des minorités par l’interdiction de toute tentative
d’élimination des minorités ; protection de leur identité), en mesures de discrimination
positive11 pour rétablir l’équilibre entre les minorités et le peuple. Concrètement, ces droits

7
  Mais pas seulement, on peut également entendre le droit à l’autodétermination comme un droit à ne « pas
réclamer l’indépendance », voir dans BOEV Ivan, « Le droit des peuples à l’autodétermination en droit des
minorités ? », L’Europe en formation, n°317, été 2000.
8
  « Tous les peuples ont le droit à la libre détermination ; en vertu de ce droit, ils déterminent librement leur
statut politique et poursuivent librement leur développement économique, social et culturel », article 2 de la
résolution 1514 XV de l’ ONU.
9
  Disponible sur www.un.org
10
   Voir typologie effectuée par Danilo Türk, dans « Droits des Minorités ou Droits des peuples à
l’autodétermination », 1998, disponible sur le site www.irenees.net
11
   Avis de la Cour permanente de Justice Internationale du 06/04/1935 relatif aux écoles minoritaires en Albanie,
accordant la nécessité de traitement différent en vue de rétablir un équilibre entre des situations différentes.

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collectifs se traduisent, entendus dans une signification restreinte à un niveau interne, par un
aménagement structurel afin de rendre plus juste les intérêts des minorités (dans une grande
majorité de pays cela correspond à des mesures de décentralisation ou fédéralisme). Mais
poussés à l’extrême, les droits collectifs accordés aux minorités tendent vers une liberté
d’autodétermination ; les minorités devenant alors un peuple pouvant se réclamer logiquement
de ce droit. Dans cette dimension « externe » des droits des minorités, celles-ci peuvent
accéder à l’indépendance et au rang d’Etat. Mais c’est sans compter sur les principes de la
souveraineté des Etats et du respect de l’intégrité territoriale qui rendent illégale et impossible
toute sécession d’un territoire par des minorités au sein de frontières établies12.
           Si les minorités ne peuvent faire sécession d’un Etat, alors en aucun cas les Albanais
du Kosovo ne peuvent légitimement réclamer une indépendance, qui toucherait la Serbie, Etat
membre des Nations Unies, dans sa souveraineté et son intégrité territoriale, équivalente à la
perte de prés de 15 % de son territoire. D’un autre côté, la minorité albanaise ne peut elle pas
se réclamer, au nom de la protection de ses droits, tant individuels que collectifs, d’une liberté
tendant à l’autodétermination ? Dans ce cas, le droit des minorités n’est il pas entendu
uniquement comme a contrario du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, un peuple étant
une minorité parvenue à l’indépendance ? Dans la situation du Kosovo, l’enjeu principal est
donc de savoir si l’on parle de peuple, de minorités, ou d’Etat ; le statut final de la province
dépendant de ces appellations et déterminations conceptuelles. Comment alors une solution,
conforme aux adages du Droit International, peut elle être envisagée ?

           B) La conciliation théorique – un arbitrage entre autonomie interne et
           externe- est inadaptée à la réalité de la situation du Kosovo : vers une
           inévitable indépendance ?

L’impossible compromis sur l’autonomie
           La question du Kosovo reflète donc le nœud juridique dans lequel sont emmêlés les
principes de respect de la souveraineté des Etats, d’une part, et d’autodétermination des
peuples, d’autre part. Théoriquement, une solution conforme au droit international réside dans
un arbitrage entre les différentes notions d’autonomie auxquelles aspirent tant les nations que
les Etats. Comme nous l’avons évoqué, la plupart des Etats parviennent à résoudre ce conflit
inhérent au Droit International par un système d’ « autonomie interne »13, réalisé en pratique
par l’instauration d’un système fédéral ou tout au moins décentralisé (les cas les plus connus

12
     Voir avis de la Cour Suprême du Canada vis-à-vis de la sécession du Québec, avis consultatif du 20 août 1998.
13
     Voir TÜRK Danilo, 1998.

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sont l’Allemagne et les Etats Unis). L’avantage de ce système est qu’il combine les intérêts
des différentes parties : l’Etat, qui conserve sa souveraineté, et les minorités qui accèdent à
une certaine autonomie.
        Lors de la signature des accords de Rambouillet, qui mettent fin aux frappes de
l’OTAN et à la guerre du Kosovo, les législateurs mandatés de l’ONU avaient sans doute
cette idée à l’esprit. Mentionnant à la fois le respect des frontières de la Serbie, tout en offrant
une « large autonomie » à la province kosovare, la résolution 1244 de l’ONU confirmait dans
la pratique ce compromis théorique. La minorité albanaise du Kosovo tout comme l’Etat serbe
se sont entendus sur cet accord ; chacun y trouvant son intérêt. L’avantage tout particulier
qu’offrait cette résolution, tient de son « flou » constitutif. En effet, les mandateurs de l’ONU
ont moins cherché à définir un statut au Kosovo (c'
                                                  est-à-dire autonomie, province ou
indépendance) qu’à imposer des normes (standards) afin que toutes les parties, communauté
internationale comprise, y trouvent leur compte. Cette logique des « normes avant le statut14 »
a donc prévalu, pendant 5 ans. Du point de vue du droit, cette résolution est conforme à la fois
au principe de l’intégrité territoriale et du respect de la souveraineté serbe– les frontières
restant inchangées – qu’au droit des minorités, la minorité albanaise disposant d’avantages
individuels et collectifs (notamment une représentation des minorités au gouvernement selon
les dispositions de la résolution 1244). Pareillement à l’esprit des traités bilatéraux ou à des
accords spéciaux entre un Etat et plusieurs minorités, ou plusieurs Etats et une minorité,
l’entente entre les parties permet de valider l’accord et la situation du Kosovo.

Une inévitable indépendance
        Toutefois, les évènements de mars 200415 ont changé la donne, en dévoilant la fragilité
de la paix et de la coexistence entre les différentes communautés qui peuplent le Kosovo. La
communauté internationale s’est alors empressée de mettre un terme à cette situation de
« flou » concernant le statut du Kosovo, à l’aune des dangers pour les populations qu’elle
permettait d’entretenir. Depuis 2004, il ne s’agit plus de faire respecter les normes, mais de
trouver un statut final à la province. A l’instar de Jean-Arnaut Dérens, l’idée que
« l’éclatement de la Yougoslavie a commencé au Kosovo et se terminera au Kosovo »16 fait

14
   Selon la formule utilisée par le Conseil de sécurité des Nations-Unies.
15
   Le 16 mars 2004 deux enfants albanais sont retrouvés morts noyés. La responsabilité de leur mort est attribuée,
par les médias, aux Serbes d’un village voisin qui auraient voulu se venger de la mort d’un adolescent serbe tué
par des inconnus. Des émeutes éclatent suite à cet incident, encadrées par des militants albanais. Au total, 19
morts auront lieu lors de ces émeutes qui s’élargissent à toute la province, plus de 900 blessés et beaucoup de
dégâts matériels seront occasionnés.
16
   Dérens Jean-Arnault« La dernière pièce du puzzle balkanique », Le Monde Diplomatique, mars 2007.

                                                                                                                8
mouche, face à la crainte de voir les évènements empirer. Le Kosovo, véritable « dernière
pièce du puzzle balkanique »17, doit voir son statut se régler. Dès lors que la communauté
internationale souhaite mettre fin au problème du Kosovo, l’idée de l’indépendance devient la
seule possible et acceptable. Si jusque-là, une conditionnalité à l’indépendance était
envisageable, ce qu’entretenait par ailleurs la résolution 1244 de l’ONU, désormais ce n’est
plus le cas.
           Plusieurs raisons permettent de justifier du point de vue du droit cette solution.
Premièrement, l’urgence d’un point de vue humanitaire, permet légitimement et légalement
une ingérence dans les affaires intérieures de la Serbie, conformément au principe de la
Charte des Nations Unies. En effet la résolution de 1988 marque la naissance du droit
d’ingérence pour porter assistance « aux victimes de catastrophes naturelles et de situation
d’urgence »18. Concernant au départ uniquement les OIG et ONG, ce droit s’est vite étendu
aux grandes puissances, sous couvert de l’ONU, pour des raisons évidentes de moyens et
d’efficacité d’action.
           Deuxièmement, l’impasse dans laquelle se trouve le Kosovo à partir de 2004 laisse
apparaître que l’indépendance est la seule solution envisageable. En effet, depuis 2004, les
négociations concernant le statut de la province n’ont pas abouti. La date butoir du 10
décembre 2007 n’a rien changé, tant les parties en présence sont dans l’incapacité de trouver
un accord. Si les Albanais du Kosovo réclament une indépendance qu’on leur a promise à
demi-mots depuis 1999, les Serbes sont prêts à tout accepter, sauf cette indépendance. Les
parties de poker diplomatique auxquels se livrent les membres de la communauté
internationale ne sont pas sans reste : si la majorité des membres de l’Union Européenne et les
Etats-Unis sont prêts à reconnaître un Kosovo indépendant – les conditions de l’indépendance
n’étant pas claires et fixées – la Russie, parmi d’autres, s’y refuse, et menace de faire jouer
son droit de veto au sein du Conseil de Sécurité de l’ONU si celui-ci venait à vouloir imposer
une indépendance. De fait, ce qui légitimait le « non statut du Kosovo », à savoir l’entente
entre les parties, n’est plus d’actualité. Dans ce cas, la solution qu’offrait le statut quo de 1999,
correspondant d’un point de vue juridique à l’arbitrage entre les principes de souveraineté
étatique et autodétermination des peuples, n’est plus légitime dès lors qu’il ne résulte pas
d’une solution pacifique et d’une entente entre les différents protagonistes. On peut alors se
référer à l’avis de la Cour Suprême du Canada de 1988 qui, s’il interdit toute sécession,
stipule également qu’en cas d’accord de la majorité de la province au Québec sur une

17
     Op. cit.
18
     Résolution 43/121 du 08/12/1988, disponible sur www.un.org

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indépendance, l’Etat canadien serait contraint d’accepter les négociations sur l’indépendance.
Et en cas d’échec de négociations, le Québec pourrait accéder à son indépendance. Ainsi
l’impasse des négociations et de la situation légitimerait l’indépendance, ou tout au moins
l’ouverture d’un débat légitime sur l’indépendance.
        En outre, le droit international n’a pas pour principe d’autoriser une sécession, mais
entendu a contrario, il pourrait légitimer dans certains cas ce genre de situations. Le droit
proclame effectivement que rien n’autorise la remise en cause de l’intégrité territoriale d’un
Etat en conformité avec les principes d’égalité des droits et de droit des peuples à disposer
d’eux-mêmes, se traduisant en pratique par « un gouvernement représentant la population
entière du territoire sans distinction de race, de croyance ou de couleur » 19 . Peut-on en
conclure qu’à l’inverse, un Etat ne respectant pas ces droits pourrait voir son intégrité
territoriale remise en cause ? Cette théorie d’une « autodétermination sanction » (TÜRK,
1998) qui punirait les Etats ne respectant pas les droits des minorités sur leur territoire permet
d’envisager une sécession d’une minorité dont les droits seraient bafoués. Toutefois les Etats
se sont bien gardés de comprendre cette résolution de l’ONU a contrario, à l’aune des risques
de sécession qu’elle pourrait provoquer.
        Entendue comme autodétermination-sanction, l’indépendance serait alors acceptable,
d’autant plus qu’une alternative n’est pas envisageable pour la communauté internationale. De
la même manière que les accords cadres de 2001 d’Ohrid ont accordé à la Macédoine son
indépendance et sa souveraineté20, les Nations Unies devraient autoriser l’indépendance du
Kosovo.
        Si les Nations Unies ne peuvent alors s’opposer à cette indépendance, établie en temps
de paix et seule solution appropriée, elles doivent tout de même faire accepter ce mouvement
par tous les protagonistes ; la naissance d’un Etat étant liée par la reconnaissance de son statut
par la communauté internationale. Or la dernière solution en date que représente le plan
Ahtisaari,21 - du nom du mandateur de l’ONU chargé de superviser les négociations sur le
statut final du Kosovo - loin de prendre en compte tous les intérêts en jeu, n’est aucunement
synonyme de négociations ou compromis : imposant une « indépendance sous supervision

19
   Résolution 2625 XXV de l’ONU de 1970, §7.
20
   Dispositions de l’accord d’Ohrid disponibles sur www.senat.fr
21
   Présenté le 26 mars 2007 devant l’ONU, le plan Ahtisaari s’inspire des accords de Dayton (séparation de la
Bosnie Herzégovine en trois entités) et des accords d’Ohrid (organisant la mixité de la République de
Macédoine). Il a reçu le soutien de l’Union Européenne, du secrétaire général de l’ONU, des Etats-Unis, des
Kosovars albanais. La Serbie l’a refusé. Parmi les membres du Conseil de sécurité de l’ONU, la Russie
(disposant du droit de veto) et la Slovaquie y sont opposés.

                                                                                                                10
internationale 22 », il ne tient absolument pas compte des intérêts de Belgrade. Qualifié
d’ « illégitime »23 , la proposition des mandateurs de l’ONU est inacceptable pour les autorités
et la population serbes, à l’instar des propos du Président Boris Tadic : « La Serbie et moi-
même n’accepterons jamais l’indépendance du Kosovo »24.
        La clef réside dans le contexte « pacifique » de création d’un Etat kosovar. Le
paradoxe est donc là : si le blocage des négociations laisse à penser que seule l’indépendance
mettrait un terme à cette situation de flou dans laquelle se situe la province, le fait que les
protagonistes ne s’entendent pas ne constitue en rien un contexte pacifique, idéal à la création
d’un nouvel Etat.
        Comment concilier indépendance et légalité dans ce cas ? Si l’on accepte le postulat
que l’indépendance est inévitable, comment peut elle être rendue légale au regard du Droit
International ? En outre, la création d’un Etat kosovar déboucherait sur un renversement
intégral de la situation de la province : la minorité albanaise devenant peuple constitutif et les
Serbes de la province étant réduits à une minorité de fait. Les minorités et le peuple ayant
échangé leur statut lors d’une indépendance à la légalité douteuse, comment protéger les
droits tant des Etats (le futur Etat kosovar, la Serbie, l’Albanie) que des minorités en jeu ? La
dernière pièce du puzzle balkanique n’est pas encore posée que déjà les contours de l’image
sont brouillés…

2°) L’indépendance du Kosovo : d’une l illégalité de jure à une
légitimité de facto…

        Si certains Etats et certains politiciens sont encore aujourd’hui dans le déni et le refus
d’une indépendance kosovare, nous partons du postulat que celle-ci est inévitable, et que seul
le temps et les conditions d’octroi de l’indépendance sont des critères susceptibles d’être
modifiés à l’avenir. D’un point de vue strictement juridique, cette indépendance n’est en rien
légale, bouleversant les règles du Droit International établies depuis plus de quatre siècles. De
quelle manière l’indépendance du Kosovo, qui représenterait donc une révolution dans les lois
des relations internationales, peut être paraître tant légale que légitime ? Cela passe
essentiellement par une promotion du droit, et notamment du droit des minorités. Ce n’est

22
   Plan Ahtisaari disponible sur www.colisee.org
23
   Déclaration du premier ministre Vojislav Kostunica lors de la présentation du plan Ahtissari.
24
   In, DERENS Jean-Arnault et Laurent GESLIN, « Du Monténégro au Kosovo, la Serbie défiée », Le Monde
Diplomatique, Juillet 2006.

                                                                                                        11
probablement qu’à travers le prisme européen que cette indépendance pourra être rendue la
plus légitime possible.

        A) Dépasser l’antagonisme entre peuple et minorité pour promouvoir le
        droit d’une nation nouvelle
        Avant tout il convient de revenir à l’enjeu essentiel que représente l’indépendance du
Kosovo en termes de nation et de minorités. Si la guerre des Balkans et la crise yougoslave
sont issues d’une        convergence entre de nombreux éléments, économiques, territoriaux,
politiques, personnels (règne de Milosevic notamment), la situation au Kosovo peut s’analyser
à travers le prisme des minorités. En effet, l’antagonisme entre peuple et minorité est
structurel au conflit kosovar ; chaque minorité souhaitant devenir un peuple et à se titre
pouvoir bénéficier d’un territoire et dune nation, et chaque peuple craignant au contraire de
n’être réduit qu’à une minorité et ainsi perdre ses avantages. Cette analyse, partagée par
certains théoriciens des relations internationales25, de l’opposition entre peuple et minorités
débouche logiquement et sans alternative possible sur l’impossible création d’une nation
nouvelle dotée d’un territoire nouveau. Dans le cas du Kosovo, il s’agirait principalement de
la minorité albanaise du Kosovo souhaitant devenir peuple constitutif, de la minorité serbe ds
la province kosovare ne souhaitant pas devenir une minorité26.
        Après 1999, les mandateurs de l’ONU au Kosovo ont cru, à tort, que cet antagonisme
entre les différentes minorités pouvait être résolu par la création d’un Etat « multinational »,
selon la proposition de Bernard Kouchner, ancien Haut représentant de l’ONU au Kosovo de
1999 à 2001. Créer un Etat nouveau, constitué de plusieurs nations capables de cohabiter
ensemble sur un même territoire, cette idée a continué de germer dans l’esprit des têtes
pensantes sur le statut du Kosovo. Même après les évènements tragiques de mars 2004, qui
ont pourtant prouvé la difficulté voire l’impossibilité de l’entente entre les différentes
minorités, cette solution est encore portée par le rapport Ahtisaari, qui prône notamment des
mesures symboliques illustrant la multiethnicité de la province (plusieurs emblèmes sur le
futur drapeau par exemple). Mais cette théorie de la multiethnicité de la province ne fait
qu’attiser l’antagonisme entre les différentes populations, provoquant un effet paradoxal. En
confiant une autonomie au Kosovo, elle fait des Albanais le seul peuple constitutif de la
province, et relègue les Serbes au statut de minorité. Or, étant donné le nombre de Serbes

25
   voir notamment KRULIC Joseph, « des minorités en quête de statut », questions internationales n °23, janvier
février 2007, pp 81-84.
26
   Nous ne parlons pas des autres minorités présentes sur le territoire kosovar : roms, croates, bosniens etc.

                                                                                                            12
présents sur le territoire, l’histoire de la province, et l’existence conjointe d’un Etat serbe et
d’un Etat alabanis, il est impossible de reléguer l’une ou l’autre entité au statut de minorité.
La notion de minorité perd complètement son sens, appliqué à deux populations qui ne sont
en rien des minorités, puisque possédant déjà des Etats et des territoires. Toute la difficulté du
droit des minorités réside dans cette difficile définition des minorités, à la fois universel,
puisqu’il existe des minorités partout, et en même temps toujours spécifique pour pouvoir être
défini à un niveau large. Dans ce cas, qui sont les bénéficiaires de ce droit, et comment les
protéger ?
        La polémique sur le Kosovo s’enlise dans cet affrontement entre peuple et minorité.
Affrontement sans fin puisque deux tendances apparaissent simultanément. D’une part, la
création d’un nouvel Etat à majorité albanaise fait des Albanais un peuple constitutif. D’autre
part, plusieurs images des minorités appariassent. Du côté du droit européen, elles sont vues
comme des entités à protéger au nom du maintien de la paix dans la région ; en témoignent les
ex-Etats yougoslaves qui deviennent membres du Conseil d l’Europe depuis les années 2000
et sont amenées à se soumettre dans l’avenir au Protocole 12 de non discrimination. Même si
la Serbie ne l’a pas encore signé, elle sera sans doute amenée à le faire dans les prochaines
années. D’autre part, les minorités sont vues comme la cause des troubles dans la région, et
perçues comme une menace. Et, ce cercle vicieux, alimente les envies d’irrédentismes et de
séparation, porté par la quête de chaque minorité pour obtenir le statut envié de « peuple
constitutif ».
        La solution consiste alors à contourner ces problèmes « structurels » au conflit kosovar.
C'
 est-à-dire de ne considérer aucun peuple constitutif et aucune minorité. Il faut dépasser le
cadre d’analyse de référence dans le droit des minorités, à savoir celui de l’Etat nation et de la
conception renanienne de la nation, puisque dans les Balkans ces définitions ne se sont jamais
appliquées. Le Kosovo n’a jamais eu de frontières, il n’y a jamais eu de nation kosovare. Il est
important également de ne pas tomber dans l’excès inverse, à savoir de croire en l’illusoire
viabilité d’un Etat multinational ou multiethnique.
        L’interdépendance entre minorités/peuple/nation est inhérente au problème kosovar.
La solution d’un Kosovo viable passe uniquement par la prééminence du droit, pour toutes les
populations. C’est uniquement dans cette promotion du droit qu’un Kosovo indépendant
trouvera sa légitimé tant au niveau interne qu’aux yeux de la communauté internationale.

                                                                                               13
B) Garantir une protection des droits pour légitimer l’existence d’un
           Etat kosovar

           Seule l’instauration d’un véritable Etat de droit garantissant la protection et l’identité
de tous au Kosovo rendrait légitime l’indépendance. Ce n’est donc pas tant les moyens qui
importent, que la fin, c'
                        est-à-dire l’instauration d’un Kosovo viable, démocratiquement. « Le
Kosovo sera indépendant si c’est la seule manière pour les Kosovars de vivre libres dans un
Etat de droit », constate Giulani27, ajoutant que « le droit des peuples à vivre en démocratie
prime l’irrédentisme ». En effet, qu’est ce que le droit des peuples à l’autodétermination, si ce
n’est un droit des peuples à vivre libres dans un Etat de droit ? L’autodétermination doit être
analysée non pas comme un droit en soi, mais comme un moyen d’accéder à une protection
des droits. De cette manière, c’est la visée téléologique de l’indépendance de la province qui
importe. Et cette fin consiste bel et bien, tant pour la population peuplant le Kosovo que pour
la communauté internationale, à créer un Etat démocratique et garant des droits.
           Un Kosovo indépendant protégeant les minorités acquerrait de facto, si ce n’est de jure,
une légitimité au regard du Droit International, conformément par ailleurs aux principes de la
Résolution 2625 XXV entendue a contrario : nul ne saurait alors contester son existence si les
droits des minorités et des peuples se trouvaient protégés. La seule solution consiste alors de
la part des instances internationale de l’ONU d’imposer une indépendance et un statut final à
la province, et d’en surveiller le processus. Les Nations Unies ont un rôle à jouer de toute
évidence dans la construction de ce nouvel Etat. D’une part, politiquement et
diplomatiquement, pour justifier une indépendance que certains refusent encore, au nom
d’intérêts plus ou moins légitimes. D’autre part, parce qu’elle a sa part de responsabilité à tirer
suite aux conséquences de la Guerre. Economiquement, un Kosovo indépendant n’est pas
viable. La province est actuellement dépendante à près de 50% des aides internationales28, et
souffre simultanément d’un important trafic de drogue, sexuel et d’un manque d’expérience
politique autonome. L’assistance ne doit pas cesser, mais au contraire participer encore au
développement de l’Etat. En outre, le manque d’expérience démocratique de la nation
kosovare risque de faire piétiner les premiers moments de l’existence de la démocratie. Une
« surveillance » telle que prônée par le plan Ahtisaari est nécessaire, a minima.
           De surcroit, non seulement les Nations Unies doivent prendre part à cette construction,
mais c’est également, et surtout, l’Union Européenne qui offre une perspective d’avenir viable

27
     GIULIANI « Du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes », 22 mai 2006.
28
     HARDY Thierry, « l’Europe et la Guerre du Kosovo », Regards sur l’actualité, janvier 2000.

                                                                                                  14
au Kosovo. Parce que la Serbie est sûrement en passe d’intégrer l’Union29 Européenne, parce
que la Serbie est maintenant membre du Conseil de l’Europe et donc liée par la Convention
Européenne des Droits de l’Homme, on peut s’attendre à une amélioration quant à la
protection des minorités dans les Balkans. Même si pour le Moment ni la Serbie ni la Bosnie
n’ont ratifié le Protocole 12 de la Convention, l’entrée de ces Etats dans la sphère juridique
européenne fait souffler une brise d’espoir au Kosovo. Si une véritable protection des
minorités, de toutes les minorités, est effective au Kosovo, la dualité peuple/nation
s’estompera logiquement assez vite au profit de l’instauration d’un Etat de droit démocratique.
Pour éviter à tout prix que les évènements tragiques de mars 2004 puissent se reproduire, il est
maintenant vital que le Kosovo accède à l’indépendance, et que cette indépendance se fasse,
bon gré mal gré des coutumes du droit international, sous couvert des Nations Unies et de
l’Union Européenne. D’une indépendance illégale du strict point de vue du droit, la province
acquerrait une légitimité de facto, si toutefois les résultats en terme notamment de démocratie
et de protection des droits des minorités se font visibles.

Conclusion

         L’indépendance du Kosovo est inéluctable. L’enjeu principal aujourd’hui n’est non
pas quand cette indépendance aura lieu, mais comment et dans quel contexte. L’indépendance
n’a pas d’alternative et la communauté internationale sera obligée de s’y soumettre et/ou de
l’imposer ; non pour des raisons purement théoriques de conflit de légitimité entre peuple et
nation (ou territoire et minorité) mais pour garantir une protection effective des droits. Pour
que les Kosovars, dans leur diversité, puissent libres dans une démocratie, les instances
internationales se doivent d imposer un contrôle du respect de la protection de tous les droits,
surtout ceux des minorités sur place. Il faut dépasser les conflits théoriques inhérents au Droit
International. Le but premier du Droit International n’est il d’ailleurs pas de promouvoir
l’instauration d’Etat de droit et de démocratie de par le monde ?
         Au Kosovo c’est le sort des minorités qui entre en jeu ; raison pour laquelle la
communauté internationale s’intéresse autant au destin de la province. Toute la complexité de
la protection internationale des minorités s’incarne au Kosovo. Faut-il des principes
universels pour protéger des « minorités », terme invoquant la diversité et la multiplicité par
excellence ? Le droit international n’est toujours pas parvenu à une définition stricte du terme

29
  La victoire de Boris Tadic aux élections législatives de janvier 2007 laisse la porte ouverte à l’entrée de la
Serbie dans l’Union Européenne.

                                                                                                                   15
de « minorités », à juste titre. La question des minorités s’articule dans la contradiction entre
son caractère universel – il y a des minorités partout et il y en a toujours eu – et son caractère
particulier – chaque minorité est différente d’une autre, vivant dans une situation différente
des autres. La clef de la crise au Kosovo est donc de ne pas considérer comme un principe
universel le droit des minorités, ni même le droit des peuples ou un quelconque droit à
l’indépendance. Le seul principe de droit international universellement viable et souhaitable
sans contestations est ce « droit à vivre libre dans un Etat de droit ».
       Concernant le Kosovo, ce droit ne peut que passer par une indépendance. La
responsabilité des Nations Unies et surtout de l’Union Européenne envers la province devrait
permettre de garantir le bon déroulement de cette indépendance. Si les élections récentes en
Serbie permettent d’envisager une véritable amélioration quant au sort des minorités au
Kosovo, il faut pourtant également mentionner la justesse avec laquelle Boris Tadic a été
réélu en Serbie. Son opposant Nikolic opposant également à l’indépendance et au
rapprochement de l’Union Européenne, et partisan au contraire d’une alliance serbo-russe, fait
planer l’image d’un Kosovo indépendant, viable et garant des droits, comme un mirage
encore assez lointain.

                                                                                               16
Bibliographie
Ouvrages et Périodiques

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Documents et rapports en ligne :

   -   Rapport Sénat 2004 sur la situation de la Serbie et du Kosovo, disponible sur
       www.senat.fr
   -   Résolutions de l’ONU disponibles sur www.un.org

Sites internet régulièrement consultés :

   -   www.balkans.courrier.info
   -   www.regard-est.com
   -   www.un.org

I. L’intervention d’humanité et ???

II. L’intervention d’humanité et l’autodétermination des minorités ?

L’intervention d’humanité – permet à la minorité d’acquérir le statut de peuple, titulaire du
droit à l’autodétermination…

L’intervention d’humanité – moyen ultime de protection des minorités

L’intervention d’humanité – fin du droit des minorités

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