Le traitement des lombalgies d'origine discale par thermoplastie annulaire - AGENCE D'ÉVALUATION DES TECHNOLOGIES ET DES MODES D'INTERVENTION EN SANTÉ
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Le traitement des lombalgies d’origine discale par thermoplastie annulaire AGENCE D’ÉVALUATION DES TECHNOLOGIES ET DES MODES D’INTERVENTION EN SANTÉ
Le traitement des lombalgies d’origine discale par thermoplastie annulaire Note technique préparée pour l’AETMIS par Reiner Banken Juillet 2005
Le contenu de cette publication a été rédigé et édité par l’Agence d’évaluation des technologies et des modes d’intervention en santé (AETMIS). Révision scientifique Dre Véronique Déry, m.d., M. Sc., directrice générale et scientifique Jean-Marie Lance, M. Sc., conseiller scientifique principal Révision linguistique Suzie Toutant Montage Frédérique Stephan Correction d’épreuves Frédérique Stephan Suzie Toutant Vérification bibliographique Denis Santerre Coordination Lise-Ann Davignon Communications et diffusion Richard Lavoie, M.A. Pour se renseigner sur cette publication ou toute autre activité de l’AETMIS, s'adresser à : Agence d’évaluation des technologies et des modes d’intervention en santé 2021, avenue Union, bureau 1050 Montréal (Québec) H3A 2S9 Téléphone : (514) 873-2563 Télécopieur : (514) 873-1369 Courriel : aetmis@aetmis.gouv.qc.ca www.aetmis.gouv.qc.ca Comment citer ce document : Agence d’évaluation des technologies et des modes d’intervention en santé (AETMIS). Le traitement des lombalgies d’origine discale par thermoplastie annulaire. Rapport préparé par Reiner Banken (AETMIS 05-02). Montréal : AETMIS, 2005, vii-17 p. Dépôt légal Bibliothèque nationale du Québec, 2005 Bibliothèque nationale du Canada, 2005 ISBN 2-550-44715-8 (version imprimée) ISBN 2-550-44716-6 (PDF) © Gouvernement du Québec, 2005. La reproduction totale ou partielle de ce document est autorisée, à condition que la source soit mentionnée.
LA MISSION L’Agence d’évaluation des technologies et des modes d’intervention en santé (AETMIS) a pour mission de contribuer à améliorer le système de santé québécois et de participer à la mise en œu- vre de la politique scientifique du gouvernement du Québec. Pour ce faire, l’Agence conseille et appuie le ministre de la Santé et des Services sociaux ainsi que les décideurs du système de santé en matière d’évaluation des services et des technologies de la santé. L’Agence émet des avis ba- sés sur des rapports scientifiques évaluant l’introduction, la diffusion et l’utilisation des technolo- gies de la santé, incluant les aides techniques pour personnes handicapées, ainsi que les modalités de prestation et d’organisation des services. Les évaluations tiennent compte de multiples fac- teurs, dont l’efficacité, la sécurité et l’efficience ainsi que les enjeux éthiques, sociaux, organisa- tionnels et économiques. LA DIRECTION Dr Luc Deschênes, M. Jean-Marie R. Lance, chirurgien oncologue, président-directeur économiste, conseiller scientifique principal général de l’AETMIS, Montréal, et président du Conseil médical du Québec, Québec Dr Alicia Framarin, médecin, conseillère scientifique Dr Véronique Déry, médecin spécialiste en santé publique, directrice générale et scientifique LE CONSEIL Dr Jeffrey Barkun, Mme Louise Montreuil, professeur agrégé, département de chirurgie, directrice générale adjointe aux ententes de Faculté de médecine, Université McGill, et gestion, Direction générale de la coordination chirurgien, Hôpital Royal Victoria, CUSM, ministérielle des relations avec le réseau, Montréal ministère de la Santé et des Services sociaux, Québec Dr Marie-Dominique Beaulieu, médecin en médecine familiale, titulaire de la Dr Jean-Marie Moutquin, Chaire Docteur Sadok Besrour en médecin spécialiste en gynéco-obstétrique, médecine familiale, CHUM, et chercheur, directeur scientifique, Centre de recherche Unité de recherche évaluative, Pavillon clinique, CHUS, Sherbrooke Notre-Dame, CHUM, Montréal Dr Réginald Nadeau, Dr Suzanne Claveau, médecin spécialiste en cardiologie, Hôpital du médecin en microbiologie-infectiologie, Sacré-Cœur, Montréal, et membre du Conseil Pavillon L’Hôtel-Dieu de Québec, CHUQ, d’administration du Conseil du médicament du Québec Québec, Québec M. Roger Jacob, M. Guy Rocher, ingénieur biomédical, coordonnateur, sociologue, professeur titulaire, Immobilisations et équipements médicaux, département de sociologie, et chercheur, Agence de développement de réseaux locaux Centre de recherche en droit public, de services de santé et de services sociaux de Université de Montréal, Montréal Montréal, Montréal M. Lee Soderstrom, Mme Denise Leclerc, économiste, professeur, département des pharmacienne, membre du Conseil sciences économiques, Université McGill, d’administration de l’Institut universitaire de Montréal gériatrie de Montréal, Montréal i
AVANT-PROPOS LE TRAITEMENT DES LOMBALGIES D’ORIGINE DISCALE PAR THERMOPLASTIE ANNULAIRE Les lombalgies chroniques constituent un lourd fardeau pour les patients, leurs familles et la so- ciété, et elles ont d’importantes répercussions économiques. Les approches thérapeutiques se multiplient sans toujours être cautionnées par des données probantes sur leur efficacité et leur sécurité. Dans ce contexte, la Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ) désirait connaître le statut de la thermoplastie annulaire. À l’heure actuelle, une approche chirurgicale, la fusion permanente de vertèbres (arthrodèse lom- baire), constitue l’une des seule avenues acceptées pour le traitement des lombalgies chroniques après échec d’une thérapie multidisciplinaire intensive. Son efficacité n’est cependant pas cer- taine. La thermoplastie annulaire, pratiquée en mode ambulatoire, pourrait constituer une solution de rechange beaucoup moins effractive que l’arthrodèse si elle s’avère efficace et sécuritaire. Depuis quelques années, plusieurs évaluations systématiques de technologies de la santé ont porté sur l’efficacité et la sécurité de la thermoplastie annulaire, dont deux avis publiés en 2004. La présente évaluation confirme les évaluations précédentes, selon lesquelles les preuves sur l’efficacité de cette technologie restent fragmentaires. Quant à sa sécurité, toutes les évaluations menées à ce jour jugent cette intervention tout à fait acceptable. Compte tenu de la gravité de la maladie et de l’absence d’autres traitements éprouvés, la décision de ne plus considérer la thermoplastie annulaire comme une technologie expérimentale peut être jugée raisonnable. Elle est alors assimilée à une innovation nécessaire à l’amélioration de la quali- té des soins, mais ses modalités d’application et ses indications doivent être précisées. En conséquence, la décision d’inclure cette technologie dans les services assurés du régime public devrait être conditionnelle à son utilisation par des médecins bien formés, dans des centres dispo- sant d’un encadrement de recherche clinique, et à la création de registres qui permettront d’évaluer son efficacité pratique au Québec. En remettant ce rapport, l’AETMIS souhaite contribuer, par une approche de médecine factuelle, à améliorer la qualité du traitement des maux de dos chroniques au Québec. Dr Luc Deschênes Président-directeur général iii
REMERCIEMENTS Cette note technique a été préparée par le Dr Reiner Banken, M. Sc. (santé communautaire), chercheur-consultant, à la demande de l’Agence d’évaluation des technologies et des modes d’intervention en santé (AETMIS). L’Agence remercie la Dre Nathalie J. Bureau, radiologiste au Centre hospitalier universitaire de Montréal (CHUM), et le Dr Luc Marcoux, de la Direction des services médicaux à la Commis- sion de la santé et de la sécurité du travail, pour leurs renseignements utiles et pertinents. L’AETMIS remercie également les lecteurs externes suivants pour leurs précieux commentaires sur ce rapport : Dr Marc Filiatrault Physiatre, Hôpital Notre-Dame du CHUM et Institut de physiatrie du Québec, Montréal Dr Charles Gravel Chirurgien-orthopédiste, président du Comité sur l’exercice professionnel et les normes de pratique de l’Association d’orthopédie du Québec, Montréal Dr Michel Rossignol Médecin conseil, Unité Santé au travail et environnementale, Direction de santé publique de Montréal, Montréal DIVULGATION DE CONFLITS D’INTÉRÊTS Aucun conflit à signaler. iv
RÉSUMÉ INTRODUCTION À l’heure actuelle, l’arthrodèse lombaire (fusion permanente de deux vertèbres lom- Le présent avis a été réalisé à la demande de baires ou plus) est la technique chirurgicale la Régie de l’assurance maladie du Québec reconnue pour le traitement des problèmes (RAMQ), qui désirait savoir si la thermo- discaux dégénératifs, dont les lombalgies plastie annulaire pour le traitement des lom- d’origine discale, après échec des traite- balgies chroniques « doit toujours être consi- ments conservateurs. Son efficacité n’est dérée comme expérimentale et, si tel est le cependant pas certaine. L’évaluation de la cas, quelle est la perspective qu’elle de- thermoplastie annulaire pour le traitement vienne reconnue médicalement ». L’évalua- des lombalgies d’origine discale s’inscrit tion a donc pour objectif de déterminer si les donc dans un contexte thérapeutique incer- preuves de l’efficacité et de la sécurité de la tain, où le jugement clinique ne peut pas thermoplastie annulaire actuellement dispo- toujours se fonder sur des preuves scientifi- nibles sont suffisantes pour que ce traite- ques. ment ne soit plus considéré comme expéri- mental. LA THERMOPLASTIE ANNULAIRE LES LOMBALGIES La thermoplastie annulaire implique l’intro- duction percutanée, sous anesthésie locale et La grande majorité des lombalgies sont de contrôle fluoroscopique, d’un cathéter dans courte durée. Les lombalgies chroniques le disque intervertébral susceptible de causer (durée de plus de trois mois) constituent la douleur. Un élément chauffant au bout cependant un défi diagnostique et thérapeu- du cathéter augmente graduellement la tem- tique important. Une thérapie multidisci- pérature jusqu’à 90 °C pendant environ plinaire intensive devrait toujours être of- 17 minutes. Cette technique, pratiquée en ferte à tous les patients, et ce n’est qu’en cas mode ambulatoire, prend environ 90 minu- d’échec qu’il y a lieu de chercher de façon tes. Le patient doit porter un corset lombaire plus poussée à établir un diagnostic précis. pendant six à huit semaines et suivre un La lombalgie d’origine discale est une entité programme de physiothérapie. clinique caractérisée par une douleur qui provient directement d’un ou de plusieurs disques intervertébraux, sans compression RÉSULTATS radiculaire. Le contour externe du disque Depuis quelques années, plusieurs évalua- resterait intact, mais se caractériserait par tions systématiques de technologies de la une déchirure interne due à des fissures ra- santé ont porté sur l’efficacité et la sécurité diales. Le diagnostic de lombalgie d’origine de la thermoplastie annulaire. Des rapports discale repose sur un test de provocation récents ont fait la recension d’une étude discographique : l’injection sous faible pres- randomisée portant sur un petit nombre de sion d’un produit de contraste à l’intérieur patients, d’une étude comparative non ran- d’un disque permet de visualiser sa structure domisée et de plusieurs études de séries de interne et d’établir la corrélation entre les cas. Notre propre recherche documentaire, douleurs provoquées et la symptomatologie qui s’est poursuivie jusqu’en avril 2005, n’a habituelle du patient. v
relevé aucune autre étude pertinente. Les vateur. Ce jugement tient compte à la fois preuves sur l’efficacité de cette technologie des incertitudes entourant son efficacité et sa restent donc fragmentaires. Par ailleurs, sécurité et de l’ouverture à l’innovation né- l’interprétation des résultats des études est cessaire à l’amélioration de la qualité des rendue difficile par l’évolution naturelle des soins. Particulièrement dans les situations lombalgies chroniques d’origine discale, où la nouvelle technologie traite des mala- la difficulté de mesurer la douleur, la possi- dies graves pour lesquelles il existe peu bilité d’un effet placebo et l’absence de don- ou pas d’autres traitements, l’attribution nées sur l’efficacité à long terme. d’un statut innovateur peut être considérée comme raisonnable même si elle se fonde Compte tenu de la faiblesse de la preuve, sur des preuves fragmentaires. Toutefois, plusieurs évaluations recommandent de ne cette approbation devrait être conditionnelle pas inclure la thermoplastie annulaire dans à un processus de recherche sur le terrain les services assurés, sauf dans un contexte visant à évaluer l’efficacité pratique de la de recherche. Par contre, le National Insti- technologie. tute for Clinical Excellence (NICE) du Royaume-Uni mentionne que, si des clini- Dans le cas présent, l’absence d’autres trai- ciens désirent recourir à cette intervention, tements éprouvés milite en faveur de l’attri- ils doivent le faire dans un cadre particulier bution d’un statut innovateur à la thermo- de contrôle clinique (audit) et respecter plastie annulaire pour le traitement des lom- rigoureusement les exigences particulières balgies d’origine discale réfractaires à toute relatives au consentement éclairé du patient. forme de traitement conservateur, notam- Ce type de cadre de pratique correspond à la ment à des interventions multidisciplinaires classification de technologie innovatrice au intensives. De plus, il s’agit d’une interven- Québec. Quant à la sécurité de la thermo- tion beaucoup moins effractive que l’arthro- plastie, toutes les évaluations menées à ce dèse lombaire, actuellement considérée jour concluent qu’elle est tout à fait accepta- comme une technologie acceptée même si ble. les preuves de son efficacité ne semblent guère meilleures que pour la thermoplastie. Au Québec, il semble que la thermoplastie annulaire ne soit utilisée qu’à Montréal. Une La décision d’inclure cette technologie dans clinique médicale privée offre ce traitement les services assurés devrait être condition- à des patients indemnisés par la Commission nelle à son utilisation par des médecins bien de la santé et de la sécurité du travail formés, dans des centres disposant d’un (CSST) sur la base d’un tarif de rembourse- encadrement de recherche clinique, et à la ment de 4 820 $, qui comprend l’ensemble création de registres qui permettront d’éva- des coûts à l’exception de l’acte profession- luer son efficacité pratique au Québec. Il nel du médecin. Le département de radiolo- serait souhaitable que les arthrodèses lom- gie du Centre hospitalier de l’Université de baires pratiquées pour le traitement des lom- Montréal (CHUM) l’offre à des patients balgies chroniques soient incluses dans ces couverts par le régime public. registres afin d’établir également leur effica- cité et d’améliorer la qualité du traitement des maux de dos chroniques au Québec. Ces CONCLUSIONS registres pourraient être sous la responsabili- Pour qu’une technologie soit reconnue mé- té de centres hospitaliers universitaires et dicalement, un jugement doit être porté sur des réseaux universitaires intégrés de santé le niveau de preuve nécessaire pour qu’elle (RUIS) actuellement en cours d’implanta- passe du statut expérimental au statut inno- tion au Québec. vi
TABLE DES MATIÈRES LA MISSION ....................................................................................................................................i AVANT-PROPOS.......................................................................................................................... iii REMERCIEMENTS .......................................................................................................................iv RÉSUMÉ..........................................................................................................................................v 1 INTRODUCTION.......................................................................................................................1 2 LES LOMBALGIES ...................................................................................................................2 2.1 Lombalgies aiguës ...............................................................................................................2 2.2 Lombalgies chroniques........................................................................................................2 3 LES LOMBALGIES D’ORIGINE DISCALE............................................................................3 3.1 Diagnostic............................................................................................................................3 3.2 Traitement............................................................................................................................3 4 DESCRIPTION DE LA TECHNOLOGIE .................................................................................5 5 EFFICACITÉ ET SÉCURITÉ ....................................................................................................6 5.1 Méthode ...............................................................................................................................6 5.2 Résultats sur l’efficacité ......................................................................................................6 5.3 Résultats sur la sécurité .......................................................................................................9 6 LA SITUATION AU QUÉBEC................................................................................................10 7 CONCLUSIONS.......................................................................................................................12 ANNEXE A STATUT DES TECHNOLOGIES MÉDICALES D’APRÈS LA CLASSIFICATION DE L’AETMIS.......................................................................13 RÉFÉRENCES ...............................................................................................................................14 Tableau 1 Évaluations systématiques réalisées par des agences d’évaluation ...........................7 vii
1 INTRODUCTION Le présent avis a été réalisé à la demande de Québec, la RAMQ a reçu une demande de la Régie de l’assurance maladie du Québec codification et de tarification de cet acte (RAMQ), qui désirait savoir si la thermo- professionnel. plastie annulaire (Intradiscal Electrothermal L’évaluation a donc pour objectif de déter- Therapy) pour le traitement des lombalgies miner si les preuves de l’efficacité et de la chroniques « doit toujours être considérée sécurité de la thermoplastie annulaire actuel- comme expérimentale et, si tel est le cas, lement disponibles sont suffisantes pour que quelle est la perspective qu’elle devienne ce traitement ne soit plus considéré comme reconnue médicalement ». Cette question expérimental (voir l’annexe A). Des infor- était d’abord motivée par des demandes mations brèves seront d’abord données sur d’autorisation de traitement hors Québec : si l’affection que traite cette technique, soit la les soins demandés ne sont pas dispensés au lombalgie d’origine discale, puis sur la tech- Québec et qu’une autorisation préalable est nologie elle-même. Les résultats de la revue accordée, le patient a droit au rembourse- de la littérature scientifique seront suivis ment des frais déboursés. Toutefois, comme d’un examen du contexte québécois afin cette technique est maintenant disponible au d’énoncer des conclusions pertinentes. 1
2 LES LOMBALGIES Les maux de dos affligent l’humanité depuis tidisciplinaire contribue substantiellement à des millénaires. La première description de réduire le risque que la lombalgie aiguë de- la lombalgie aiguë provient d’un papyrus vienne chronique [Waddell et Schoene, datant de 1500 ans avant J.-C., et Hippocrate 1998]. décrivait déjà la sciatalgie il y a 25 siècles. Aujourd’hui, les lombalgies constituent un lourd fardeau avec leur lot d’incapacités et 2.2 LOMBALGIES CHRONIQUES de souffrances, et elles ont des répercussions Les lombalgies chroniques (durée de plus de économiques sur le patient [Waddell et trois mois) constituent un défi diagnostique Schoene, 1998], la famille [Strunin et Bo- et thérapeutique important [ANAES, 2000a]. den, 2004] et la société [Nachemson, Les approches thérapeutiques sont aussi 2004a]. Si le problème n’est pas nouveau, multiples que controversées, mais l’appro- les approches diagnostiques et thérapeuti- che de médecine factuelle est de plus en plus ques ont quant à elles évolué avec les pro- préconisée [Bogduk et McGuirk, 2002; grès de la médecine moderne [Allan et ANAES, 2000a]. Contrairement aux lom- Waddell, 1989]. balgies aiguës, il y a peu d’algorithmes de traitement pour les formes chroniques [Bog- 2.1 LOMBALGIES AIGUËS duk, 2004]. Une thérapie multidisciplinaire intensive devrait néanmoins être offerte à La grande majorité des lombalgies sont de tous les patients, et ce n’est qu’en cas courte durée. Selon une revue systématique d’échec qu’il y a lieu de chercher de façon d’études prospectives, 82 % des patients plus poussée à établir un diagnostic précis. Il (intervalle de confiance [IC] à 95 % : de 73 est à noter qu’un diagnostic anatomopatho- à 91 %) en arrêt de travail y retournent en logique est souvent demandé dans un moins d’un mois, et 93 % y retournent en contexte médicolégal, dans le cadre d’une trois à six mois (IC à 95 % : de 91 à 96 %). demande d’indemnisation par un régime Toutefois, 73 % des patients subissaient au d’assurance, par exemple. Bogduk [2004] moins une récidive dans les 12 mois suivant propose un algorithme de traitement des la première crise (IC à 95 % : de 59 à 88 %) lombalgies chroniques comportant un nœud [Pengel et al., 2003]. Pour les lombalgies de décision qui permet de décider si un diag- aiguës, une investigation diagnostique pous- nostic précis est nécessaire. Une exploration sée est rarement indiquée [Carragee et Han- diagnostique approfondie peut mener à un nibal, 2004]. Au stade subaigu (douleur diagnostic de lombalgie chronique d’origine durant de un à trois mois), une approche discale. biopsychosociale avec prise en charge mul- 2
3 LES LOMBALGIES D’ORIGINE DISCALE La lombalgie d’origine discale, une dégéné- changements sont à l’origine de la douleur. rescence symptomatique de disques interver- Ainsi, dans une population asymptomatique tébraux, est une entité clinique faisant partie comparable à la population de patients souf- d’un ensemble d’affections liées aux chan- frant de douleurs lombaires chroniques, gements dégénératifs du rachis lombaire jusqu’à 76 % des examens d’IRM mon- [Crock, 2004]. Il s’agit d’une douleur qui traient des anomalies [Sachs et Ohnmeiss, provient directement d’un ou de plusieurs 2003]. Dans un groupe de patients de 50 ans disques intervertébraux, sans compression et plus, les examens d’IRM ont mis en évi- radiculaire. L’origine de cette douleur est dence des changements dégénératifs des imputée au tiers externe de l’anneau fibreux disques lombaires chez 90 à 100 % des su- du disque, qui contient des nocicepteurs. Le jets, et des déchirures internes (fissures ra- contour externe du disque resterait intact, diales) dans 20 à 50 % des cas [Dietemann, mais se caractériserait par une déchirure 2004]. interne (internal disc disruption) due à des Le diagnostic de déchirure interne du disque fissures radiales [Anderson, 2004; Schwar- est confirmé par un test de provocation dis- zer et al., 1995]. cographique [Schwarzer et al., 1995]. L’in- La déchirure interne du disque résulte de jection sous faible pression d’un produit de changements dégénératifs souvent liés au contraste à l’intérieur d’un disque, fré- vieillissement. Le disque intervertébral est quemment en association avec une tomogra- une structure avasculaire composée d’un phie axiale, permet de visualiser sa structure anneau fibreux périphérique, d’un noyau interne et d’établir la corrélation entre les pulpeux au centre et de plaques cartilagineu- douleurs provoquées et la symptomatologie ses qui assurent le lien avec les vertèbres habituelle du patient [Anderson, 2004; adjacentes. L’ensemble du disque reçoit des Guyer et al., 2003]. Selon la taxonomie de éléments nutritifs à partir de ces plaques l’International Association for the Study of cartilagineuses. Une diminution de cette Pain, le résultat du test de provocation dis- fonction de diffusion des plaques, soit par cographique est positif lorsqu’il reproduit dégénérescence, soit par microfractures, exactement la douleur habituelle, confirme semble à l’origine des changements dégéné- les fissures, fréquemment par tomographie ratifs du disque : diminution du contenu en axiale, et ne produit pas de douleur lors de la protéoglycanes et, par conséquent, en eau, stimulation d’au moins un disque adjacent changements dans la répartition des forces [Grönblad, 2004]. Plusieurs auteurs préconi- mécaniques et apparition de fissures radiales sent de repérer au préalable par IRM les [Biyani et Andersson, 2004; Kaigle Holm et disques présentant des changements dégéné- Holm, 2004]. ratifs et de confirmer ensuite que ces chan- gements sont à l’origine de la douleur par un test de provocation discographique [Saifud- 3.1 DIAGNOSTIC din, 2004; Guyer et al., 2003]. Les lombalgies d’origine discale, contraire- ment à la plupart des autres maladies dégé- 3.2 TRAITEMENT nératives du rachis lombaire, ne présentent aucun signe visible à l’examen clinique, sur L’efficacité du traitement chirurgical des les radiographies standard ou les examens de lombalgies chroniques après échec des trai- tomographie axiale [Crock, 2004]. L’ima- tements conservateurs n’est pas certaine. À gerie par résonance magnétique (IRM) mon- l’heure actuelle, l’arthrodèse lombaire (fu- tre des changements dégénératifs du disque, sion permanente de deux vertèbres lombai- mais elle ne permet pas de confirmer que ces res ou plus) est la technique chirurgicale 3
reconnue pour le traitement des problèmes mes dégénératifs discaux et est arrivé à la discaux dégénératifs [Gunzburg et al., 2004; même conclusion : « La publication récente ANAES, 2000b]. Une revue narrative pu- des résultats de plusieurs études randomi- bliée en 1995 conclut que « la littérature sées est encourageante, mais il reste difficile scientifique appuie le recours à l’arthrodèse de définir le traitement approprié à un lombaire pour le traitement de plusieurs problème clinique spécifique, car aucune problèmes dégénératifs du rachis. Dans bien étude n’atteint une qualité de preuve même des cas, la pratique de l’arthrodèse se fonde 'moyenne' pour appuyer quelque interven- davantage sur une expérience clinique em- tion que ce soit » (traduction libre) [Gibson pirique que sur des recherches scientifiques et Waddell, 2004, p. 299]. rigoureuses. Si les entités diagnostiques L’évaluation de la thermoplastie annulaire étaient plus précises, on pourrait procéder à pour le traitement des lombalgies d’origine des études contrôlées pour mieux cerner les discale doit s’inscrire dans ce contexte com- indications de l’arthrodèse rachidienne » plexe et incertain du traitement des lombal- (traduction libre) [Zdeblick, 1995, p. 133S]. gies chroniques, où le jugement clinique ne Un groupe de la Cochrane Collaboration a peut pas toujours se fonder sur des preuves effectué en 2004 une revue systématique de scientifiques [Nachemson, 2004b]. la littérature scientifique sur le recours à l’arthrodèse pour le traitement des problè- 4
4 DESCRIPTION DE LA TECHNOLOGIE La thermoplastie annulaire implique l’intro- Le mécanisme d’action reste inconnu. On duction percutanée, sous anesthésie locale et avance l’hypothèse que la chaleur entraîne- contrôle fluoroscopique, d’un cathéter dans rait une coagulation du collagène de le disque intervertébral susceptible de causer l’anneau fibreux ou une destruction des no- la douleur. Un élément chauffant au bout du cicepteurs du disque [Cohen et al., 2003]. cathéter augmente graduellement la tempé- Des études sur des animaux ne semblent rature jusqu’à 90 °C pendant environ 17 mi- cependant valider ni la théorie de coagula- nutes, ce qui augmente la température de tion du collagène [Bass et al., 2004], ni celle l’anneau fibreux du disque à environ 60 ou de la destruction des nocicepteurs [Freeman 65 °C [Endres et al., 2002]. Cette technique, et al., 2003]. pratiquée en mode ambulatoire, prend envi- ron 90 minutes. Le patient doit porter un corset lombaire pendant six à huit semaines et suivre un programme de physiothérapie. 5
5 EFFICACITÉ ET SÉCURITÉ 5.1 MÉTHODE Selon les données analysées par le NICE, la majorité des patients indiquent une di- La recension des publications scientifiques a minution de la douleur sur une échelle vi- été effectuée dans la base de données Pub- suelle analogue (EVA). La seule étude ran- Med1, dans la base de publications en éva- domisée portait sur un petit nombre de pa- luation des technologies du Centre for Re- tients : 37 traités, dont 32 inclus dans l’ana- views and Disseminations, de l’Université lyse, et 27 témoins, dont 24 inclus dans de York (Angleterre)2, et dans le Web. Les l’analyse [Pauza et al., 2004]. Les études articles et rapports publiés jusqu’en avril randomisées sur des interventions effractives 2005 ont été examinés pour la présente éva- se heurtent à des difficultés importantes, et luation. celle-ci n’a pas échappé à cette règle. En effet, 4 523 personnes ont répondu aux an- nonces de recrutement dans les médias, mais 5.2 RÉSULTATS SUR 3 163 (70 %) d’entre elles ont refusé de L’EFFICACITÉ participer à l’étude lorsqu’elles ont été in- formées du protocole expérimental. Des Depuis quelques années, plusieurs évalua- 1 360 patients qui étaient prêts à participer, tions systématiques de technologies de la 1 100 ne remplissaient pas les critères d’in- santé ont porté sur l’efficacité et la sécurité clusion, et 196 avaient eu un résultat négatif de la thermoplastie annulaire. Le tableau 1 au test de provocation discographique. résume les résultats des six évaluations les plus récentes, et précise les études rete- L’évaluation subjective des patients réalisée nues dans l’analyse. Des évaluations plus six mois après l’intervention montre qu’il y limitées ont également été réalisées au Da- a eu amélioration chez 78 % (25/32) des nemark [DACEHTA, 2003] et au Canada sujets traités par thermoplastie annulaire, [OCCETS, 2003]. Il s’agit respectivement comparativement à 46 % (11/24) des sujets d’une note sur une technologie émergente du groupe témoin. La douleur s’est aggravée (Health Technology Alert) et d’une évalua- chez 6 % des patients du groupe traité et tion préliminaire. 33 % des sujets du groupe témoin, et elle est restée semblable chez 16 % (5/16) et 21 % En règle générale, les évaluations ont analy- (5/21) d’entre eux respectivement. Ces diffé- sé le même éventail d’études, à quelques rences de proportions dans l’ensemble des variantes près, en tenant compte de l’année catégories sont significatives (test de Fis- de publication. Les études sur l’efficacité de cher : p = 0,037). Ces résultats montrent que la thermoplastie annulaire sont peu nom- l’intervention pourrait non seulement dimi- breuses et surtout de type série de cas. nuer la douleur chez certains patients, mais L’évaluation la plus récente, réalisée par le également prévenir une aggravation. Toute- National Institute for Clinical Excellence du fois, si l’on retient le critère recommandé Royaume-Uni, illustre bien ces différentes d’une amélioration supérieure à 50 %, la analyses [NICE, 2004a]. différence entre les deux groupes n’est guère marquée, soit 38 % dans le groupe traité et 33 % dans le groupe témoin. 1. L’énoncé suivant a été utilisé pour la recherche dans la base de publications PubMed : ((discal* OR intradiscal* OR intradiskal OR intervertebral OR discogenic OR disco- genique) AND (thermocoagulation OR therapy OR therapie OR electrothermal* OR thermal* OR electrocoagulation OR electric OR heat OR electrotherm* OR electrique )) OR ideta OR idta OR idet OR pirft OR diskogra* OR discogra*. 2. Cette base peut être consultée à l’adresse suivante : http:// www.york.ac.uk/inst/crd/htahp.htm. 6
TABLEAU 1 Évaluations systématiques réalisées par des agences d’évaluation RÉFÉRENCE (PAYS) ÉTUDES SUR L’EFFICACITÉ EXAMINÉES RÉSULTATS Institute for Clinical Systems Étude comparative non randomisée : Faible niveau de preuve Improvement (ICSI) et al., Karasek et Bogduk, 2000 Pas de recommandation sur 2002 le statut de la technologie (États-Unis) Études de séries de cas : Derby et al., 2000; Saal et Saal, 2000a; 2000b Medical Services Advisory Études comparatives non randomisées : Faible niveau de preuve Committee (MSAC), 2002 Bogduk et Karasek, 2002; Karasek et Bogduk, 2000 Technologie (Australie) expérimentale Études de séries de cas : Endres et al., 2002; Saal et Saal, 2002; Derby et al., 2000; Saal et Saal, 2000a; 2000b ASERNIP-S, 2003 Étude randomisée : Efficace à court terme, (Australie) Pauza et al., 2002 (résumé de conférence) preuves fragmentaires Étude comparative non randomisée : Pas de recommandation sur Karasek et Bogduk, 2000 le statut Études de séries de cas : Endres et al., 2002; Saal et Saal, 2002; Derby et al., 2000; Saal et Saal, 2000a; 2000b; Singh, 2000; et 12 autres références de type résumé de conférence Washington State Étude randomisée : Niveau de preuve Department of Labor and Pauza et al., 2004 insuffisant Industries, 2003 Étude comparative non randomisée : Technologie (États-Unis) Bogduk et Karasek, 2002 expérimentale Études de séries de cas : Lutz et al., 2003; Endres et al., 2002; Gerszten et al., 2002; Saal et Saal, 2002 Technology Evaluation Étude randomisée : Faible niveau de preuve Center et Blue Cross Blue Pauza et al., 2004 Technologie Shield Association, 2004 expérimentale (États-Unis) Étude comparative non randomisée : Karasek et Bogduk, 2000 Études de séries de cas : Lutz et al., 2003; Endres et al., 2002; Gerszten et al., 2002; Saal et Saal, 2002; Spruit et Jacobs, 2002; Derby et al., 2000; Saal et Saal, 2000a; 2000b; Singh, 2000 National Institute for Clinical Étude randomisée : Incertitudes persistantes Excellence (NICE), 2004a Pauza et al., 2004 quant à l’efficacité (Royaume-Uni) Technologie innovatrice Études comparatives non randomisées : Bogduk et Karasek, 2002; Karasek et Bogduk, 2000 Études de séries de cas : Cohen, 2003; Lutz et al., 2003; Gerszten et al., 2002; Saal et Saal, 2002; Derby et al., 2000; Saal et Saal, 2000a; 2000b Dans deux études de séries de cas, l’effet la douleur et de meilleurs scores à l’échelle analgésique variait entre 48 % (38/79) après d’incapacité après l’intervention. Toutefois, six mois [Cohen, 2003] et 72 % (42/58) ces améliorations ne sont pas établies par après 24 mois [Saal et Saal, 2002]. Certaines rapport à un groupe témoin, sauf dans données indiquent aussi une amélioration du l’étude randomisée de Pauza et ses collabo- fonctionnement physique, une réduction de rateurs [2004]. 7
Deux publications récentes n’ont pas été L’absence de résultats sur l’efficacité à long retenues dans l’analyse du NICE parce que terme a aussi été soulignée [NICE, 2004b]. les populations étudiées étaient trop ciblées Ces constats amènent autant le NICE que pour que l’on puisse généraliser les résultats les autres agences d’évaluation à conclure à toute la population. Il s’agissait d’une que le niveau de preuve sur l’efficacité reste étude de type série de cas réalisée auprès de faible ou insuffisant. C’est aussi le constat soldats américains en service actif [Freed- auquel sont parvenues les agences d’éva- man et al., 2003] et d’une étude de registres luation danoise et canadienne dans leur d’indemnisation de travailleurs américains évaluation sommaire [DACEHTA, 2003; [Webster et al., 2004]. OCCETS, 2003]. Bien que la description d’une autre étude de Cette incertitude quant à l’efficacité de la type série de cas [Davis et al., 2004] ait été thermoplastie annulaire a été invoquée pour ajoutée dans l’annexe du rapport britannique justifier le statut expérimental que lui ont après la période de consultation, celui-ci conféré quatre des agences (dont l’agence n’en a pas tenu compte dans sa conclusion. danoise) et la décision de ne pas l’inclure Cette étude avait analysé les résultats de dans les services couverts par les régimes la thermoplastie annulaire sur 60 patients d’assurance publics ou privés, sauf dans un adressés par 17 centres. L’analyse de l’effi- contexte de recherche. cacité portait sur les résultats de 38 patients, Par contre, le NICE ne ferme pas complète- huit ayant refusé de répondre au question- ment la porte à cette technologie. Cet orga- naire parce qu’ils étaient engagés dans un nisme mentionne que, si des cliniciens dési- processus d’indemnisation d’accidents du rent recourir à la thermoplastie annulaire, ils travail et de lésions professionnelles, huit doivent le faire dans un cadre particulier de n’ayant pu être rejoints, et six ayant dû subir contrôle clinique (audit) et respecter rigou- une chirurgie lombaire après la thermoplas- reusement les exigences particulières relati- tie. Le suivi était de 6 à 38 mois, pour une ves au consentement éclairé du patient moyenne de 20,4 mois. La douleur a dimi- [NICE, 2004b]. Ce type de cadre de pratique nué en moins de 12 mois chez 39 % des correspond à la classification de technologie 38 patients, elle est restée stable chez 29 % innovatrice au Québec (voir l’annexe A). des sujets, et a augmenté chez 29 % d’entre Cette prise de position particulière du NICE, eux. Cinquante pour cent des patients qui s’appuie pourtant sur une appréciation n’étaient pas satisfaits des résultats, 37 % en de la qualité méthodologique et des résultats étaient satisfaits et 13 % étaient indécis. Par des études primaires semblable à celle des contre, 53 % ont dit qu’ils choisiraient de autres agences, semble découler d’exigences nouveau le traitement s’ils étaient dans la différentes quant au niveau de preuve néces- même situation, 31 % qu’ils ne le feraient saire pour qu’une technologie passe du statut pas, et 16 % n’étaient pas certains. Le taux expérimental au statut innovateur. d’arthrodèses a été estimé à 15 % à un an et à 30 % à deux ans avec la méthode de Depuis l’avis du NICE publié en août 2004, Kaplan-Meier. aucune nouvelle publication sur l’efficacité de la thermoplastie n’a été recensée. Une L’organisme NICE précise que l’interpréta- étude encore inédite portant sur un petit tion des résultats des études examinées est nombre de patients québécois a obtenu des aussi rendue plus difficile par l’évolution résultats intéressants : la douleur a complè- naturelle des lombalgies chroniques d’origi- tement ou presque complètement disparu ne discale, la difficulté de mesurer la dou- après 12 mois chez 42 % (5/12) des patients leur et la possibilité d’un effet placebo. [Filiatrault et al., 2002]. 8
5.3 RÉSULTATS SUR LA 2003]. Les complications transitoires rele- SÉCURITÉ vées étaient : recrudescence de la radiculal- gie (15 % : 5/33) [Lutz et al., 2003], pares- Toutes les évaluations menées à ce jour sur thésie et engourdissement des cuisses (3 % : la sécurité de la thermoplastie concluent 2/79), et pied tombant (1 % : 1/79) [Cohen, qu’il s’agit d’une intervention sécuritaire. 2003]. Une étude signale une fuite de liquide Selon l’évaluation du NICE, semblable à céphalorachidien chez un patient. Certaines celle des autres agences, les complications publications ont toutefois fait état de l’appa- sont majoritairement transitoires, et leur rition d’un syndrome de la queue de cheval incidence varie entre 0 % (0/58) [Saal et (deux patients) et d’ostéonécrose vertébrale Saal, 2002] et 15 % (5/33) [Lutz et al., (deux patients) [NICE, 2004b]. 9
6 LA SITUATION AU QUÉBEC Au Québec, il semble que la thermoplastie Le département de radiologie du CHUM annulaire ne soit utilisée qu’à Montréal, à offre actuellement la thermoplastie annulaire l’Institut de physiatrie du Québec, une clini- à des patients couverts par le régime public. que médicale privée, et au département de À la suite d’un projet d’évaluation financé radiologie du Centre hospitalier de l’Univer- dans le cadre du mandat d’évaluation des sité de Montréal (CHUM). À la suite d’une nouvelles technologies des hôpitaux univer- entente conclue entre le ministère de la San- sitaires, le matériel nécessaire a été acheté té et des Services sociaux et la Commission en mai 2002, et le budget alloué a permis de de la santé et de la sécurité du travail traiter une dizaine de patients. Depuis 2003, (CSST), la thermoplastie annulaire est rem- le département de radiologie du CHUM boursée depuis juin 2003 à des patients in- finance l’intervention pour les patients cou- demnisés par la CSST. Le tarif de rembour- verts par le régime public6, mais aucune sement, qui comprend l’ensemble des coûts analyse du projet d’évaluation n’a été effec- à l’exception de l’acte professionnel du mé- tuée à ce jour7. Un comité conjoint des dé- decin, est de 4 820 $ depuis le 15 avril 2004. partements de médecine et de radiologie sera L’Institut de physiatrie du Québec est ac- mis sur pied pour harmoniser la sélection tuellement le seul endroit au Québec qui des patients et l’utilisation du traitement par offre ce traitement à des patients indemnisés les physiatres et les radiologistes du par la CSST3. Les médecins de l’Institut de CHUM8. physiatrie ne sont pas encore rémunérés Les décisions relatives à la pratique de la pour cette intervention, car la tarification de thermoplastie annulaire au Québec font res- cet acte professionnel doit être négociée sortir les contradictions entourant le statut avec la Fédération des médecins spécialistes des technologies, alors que le ministère de la du Québec (FMSQ). Les discussions sur la Santé et des Services sociaux signe une en- rémunération de cet acte seront amorcées tente avec la CSST sur le remboursement de après que le présent avis aura été soumis à la cette technologie pendant que la RAMQ se Régie de l’assurance maladie du Québec demande si elle est reconnue médicalement. (RAMQ)4. Le Dr Filiatrault, de l’Institut de De plus, au sein d’un même centre hospita- physiatrie du Québec, a demandé, par l’en- lier universitaire, les décisions concernant la tremise du département de médecine du thermoplastie annulaire diffèrent d’un dépar- CHUM, que l’intervention soit offerte aux tement à l’autre. Cette situation illustre clai- patients couverts par le régime public rement la nécessité de mieux harmoniser les d’assurance. Cette demande a été acceptée décisions dans le système de santé en les en principe, mais le financement nécessaire fondant sur une information adéquate quant n’a pas été assuré5. 3. Communications personnelles (courriel et téléphone) avec le Dr Luc Marcoux, Direction des services médicaux, Com- mission de la santé et de la sécurité du travail (CSST), sep- tembre 2004. 6. Communication téléphonique avec Mme Nicole Langlois, 4. Communications personnelles (courriel et téléphone) avec gestionnaire au département de radiologie du CHUM, le Dr Serge Lafrance, Direction des affaires médicales, den- 20 janvier 2005. taires et optométriques, RAMQ, septembre 2004. 7. Communication téléphonique avec la Dre Nathalie J. 5. Communication téléphonique avec le Dr Marc Filiatrault, Bureau, radiologiste, CHUM, 9 septembre 2004. Institut de physiatrie du Québec, Montréal, 2 septembre 8. Communication personnelle avec le Dr Marc Filiatrault, 2004. 13 février 2005. 10
à l’efficacité, à la sécurité et aux coûts d’une Il semble que le Québec soit l’une des pro- technologie. Il apparaît essentiel de déve- vinces canadiennes où l’on pratique le plus lopper l’évaluation des technologies de la la thermoplastie annulaire. La division cana- santé dans les centres hospitaliers universi- dienne de Smith & Nephew, qui commercia- taires pour améliorer cette situation. lise le matériel de thermoplastie annulaire à l’échelle mondiale, prévoit intensifier la promotion de cette technologie9. 9. Communications téléphoniques avec Mme Kim Auty, responsable de la Division endoscopie, Smith & Nephew Canada, juin et août 2004. 11
7 CONCLUSIONS Selon les différentes évaluations systémati- si les preuves de son efficacité ne semblent ques de la technologie réalisées aux États- guère meilleures que pour la thermoplastie. Unis, en Australie et au Royaume-Uni, le Enfin, la thermoplastie pourrait être propo- statut de la thermoplastie annulaire corres- sée aux patients qui choisissent de ne pas se pondrait à une technologie expérimentale ou soumettre à la chirurgie. à une technologie innovatrice (voir l’annexe Il revient toutefois au ministère de la Santé A). Quel devrait être le cadre d’utilisation de et des Services sociaux (MSSS) de juger si la thermoplastie annulaire au Québec ? les informations sur l’efficacité, les coûts et Selon une réflexion menée à l’agence alber- le besoin clinique fournies dans le présent taine d’évaluation des technologies, la déci- document lui semblent suffisantes pour jus- sion de rembourser des technologies émer- tifier de ne plus considérer cette technologie gentes doit tenir compte à la fois des in- comme expérimentale. Si tel est le cas, le certitudes entourant leur efficacité et leur libellé de l’acte professionnel concerné et du sécurité et de l’ouverture à l’innovation né- tarif qui lui est associé devront être discutés cessaire à l’amélioration de la qualité des au Comité technique FMSQ-MSSS-RAMQ soins. Particulièrement dans les situations où avant d’être inclus dans l’entente entre le la nouvelle technologie traite des maladies MSSS et la FMSQ. Les médecins spécialis- graves pour lesquelles il existe peu ou pas tes pourront alors être rémunérés, ce qui d’autres traitements, le passage du statut influera sur l’offre de cette technologie aux expérimental au statut innovateur peut être patients québécois. considéré comme raisonnable même s’il se La décision d’inclure cette technologie dans fonde sur des preuves fragmentaires. Dans le régime public d’assurance devrait être ce cas, l’approbation comme technologie conditionnelle à son utilisation par des mé- innovatrice peut être conditionnelle à un decins bien formés, dans des centres dispo- processus de recherche sur le terrain visant à sant d’un encadrement de recherche clini- évaluer l’efficacité pratique de la technolo- que, et à la création de registres qui gie [Hailey et Harstall, 2001]. permettront d’évaluer son efficacité pratique Dans le cas présent, l’absence d’autres trai- au Québec. Il serait souhaitable que les ar- tements éprouvés milite en faveur de l’attri- throdèses lombaires pratiquées pour le trai- bution d’un statut innovateur à la thermo- tement des lombalgies chroniques soient plastie annulaire pour le traitement des incluses dans ces registres afin d’établir lombalgies d’origine discale réfractaires à également leur efficacité et d’améliorer la toute forme de traitement conservateur, no- qualité du traitement des maux de dos chro- tamment à des interventions multidiscipli- niques au Québec. Ces registres pourraient naires intensives. De plus, il s’agit d’une être sous la responsabilité de centres hospi- intervention beaucoup moins effractive que taliers universitaires et des réseaux universi- l’arthrodèse lombaire, actuellement considé- taires intégrés de santé (RUIS) actuellement rée comme une technologie acceptée même en cours d’implantation au Québec. 12
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