Les institutions britanniques - Constitution du Royaume-Uni

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Les institutions britanniques - Constitution du Royaume-Uni
Les institutions
   britanniques
                par André Émond
                Professeur titulaire
              Université Laurentienne

Description et fonctionnement dans le contexte du référendum de
2014 sur l’indépendance de l’Écosse, conférence livrée à la ville de
                Charenton-le-Pont le 17 avril 2013
Les institutions britanniques - Constitution du Royaume-Uni
Les institutions britanniques - Constitution du Royaume-Uni
1.
Les peuples du
Royaume-Uni
Les institutions britanniques - Constitution du Royaume-Uni
Royaumes du Royaume-Uni

Le pays qui fait l’objet de cette
présentation se nomme le Royaume-Uni
de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord.
On dit souvent, en plus court, le
Royaume-Uni (R.-U), ou United
Kingdom (U.K.) en anglais.

Le Royaume-Uni a été formé à partir de
royaumes plus anciens qui ont été
fusionnés au cours des siècles. Il s’agit de
l’Angleterre, du Pays de Galles et de
l’Écosse, qui ensemble ont formé la
Grande-Bretagne, auxquels l’Irlande a été
ajoutée, puis retranchée en partie (seuls
les comtés du Nord, ceux de l’Ulster, sont
demeurés attachés à la Couronne
britannique).
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Naissance de l’Écosse

À partir du Ve siècle, des celtes
originaires d’Irlande (celtes
gaéliques) se sont installés dans le
Nord de l’île de Bretagne, une région
appelée la Calédonie. Les Romains,
qui occupaient alors le Sud de l’île,
les ont appelés des Scots, ou Écossais
en français.

Le mot Scot était un terme descriptif,
une insulte en réalité, utilisé par les
Romains pour décrire les celtes
d’Irlande qui s’adonnaient au pillage
des côtes bretonnes.

Vers l’an 1000, l’ancienne Calédonie
deviendra éventuellement l’Écosse, la
terre des Scots, quand ceux-ci auront
assimilés complètement les Pictes, les
premiers habitants du pays.
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Naissance de l’Angleterre

Peu après l’époque où les Scots (celtes
gaéliques) ont commencé à occuper le
nord de l’île de Bretagne, des guerriers
venant de l’Est, là où se trouvent
aujourd’hui le Danemark et le Nord de
l’Allemagne, ont envahi la partie
méridionale de l’île, habitée à cette
époque par des celtes romanisés, des
Bretons (celtes britonniques).

Les envahisseurs germains
appartenaient à différentes ethnies; il
s’agissait principalement d’Angles, de
Saxons et de Jutes.

Toujours vers l’an 1000, l’ancienne
Bretagne romaine sera dorénavant
connue comme étant l’Angleterre,
autrement dit la terre des Angles.
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Naissance de l’Angleterre

Les Bretons se sont défendus âprement
contre ces envahisseurs germains.
Cette lutte donnera naissance à la
légende du roi Arthur, et de ses
chevaliers de la Table ronde,
immortalisée par de nombreux films.

Malgré leur vaillance, les Bretons ont
été tués, assimilés ou repoussés vers
l’ouest (au pays de Galles et en
Cornouailles) et le nord (en
Strathclyde). Certains Bretons ont
même traversé le bras de mer qui les
séparaient du continent pour venir
s’établir en Gaule, dans la péninsule
d’Armorique, qui sera rebaptisée
Bretagne quand la Gaule deviendra la
France.
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Formation du Royaume-Uni
La formation du Royaume-Uni s’est produite sur une très
longue période.

Le pays de Galles a d’abord été législativement uni à
l’Angleterre en 1536, bien que sa conquête par les Anglais
ait eu lieu bien plus tôt, soit en 1282, par le roi Édouard Ier.

L’Angleterre et le pays de Galles ont été unis à leur tour à
l’Écosse en 1707, cette fois pour former le royaume de
Grande-Bretagne (nous reviendrons sur la perte de
l’indépendance écossaise).

Quant à l’Irlande, sa conquête par les Anglais fut achevée en
1494. Mais sa fusion législative avec la Grande-Bretagne
attendra 1801. Le nouveau pays fut appelé le Royaume-Uni
de Grande-Bretagne et d’Irlande. Toutefois, comme les 26
comté du Sud de l’Irlande ont fait sécession en 1922, et que
seuls les comtés du Nord, ceux de l’Ulster, sont demeurés
rattachés à la Couronne britannique, l’ancien royaume est
donc devenu le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et
d’Irlande du Nord.
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Perte de l’indépendance écossaise          Le film Braveheart se voulait
                                              un portrait romancé de la vie
                                                   de William Wallace.
L’Écosse était un pays qui se distinguait
du voisin, l’Angleterre, par son héritage
celtique. Ses habitants étaient conscients
et fiers de leur racines.

L’Écosse, sauf pour de très brèves
périodes, a toujours résisté aux tentatives
de l’Angleterre pour y assurer sa
domination politique.

Parmi les hauts faits de cette résistance
écossaise, il y a eu la lutte armée des
William Wallace et Robert Bruce contre
les rois d’Angleterre Édouard Ier,
Édouard II et Édouard III, entre 1297 et
1328.
Perte de l’indépendance écossaise

La reine d’Angleterre, Élisabeth Ière, est morte en
1603, sans enfant, sans d’ailleurs aucun autre parent
qui portait son nom. La lignée des souverains Tudor
s’est conséquemment éteinte avec elle. Son plus
proche parent, et son héritier, était alors le roi Jacques
VI d’Écosse. Celui-ci est conséquemment devenu le
roi Jacques Ier d’Angleterre. Les deux royaumes ont
été réunis sous une seule couronne, sans guerre, ni
violence.

Comme nous l’avons vu plus tôt, il faudra encore
attendre un siècle (1707) pour que l’union législative
des deux royaumes puisse être réalisée, toujours sans
guerre, ni violence.

C’est ainsi que les Écossais ont perdu, et leur
parlement, et leur gouvernement.
Rétablissement
  d’un parlement et d’un gouvernement écossais

Il faudra attendre 1998 pour que le parlement national
du Royaume-Uni (parlement de Westminster), à la
demande du gouvernement travailliste de Tony Blair,
adopte une loi créant une nouvelle législature et un
nouveau gouvernement pour l’Écosse (on a fait de
même pour le pays de Galles et pour l’Irlande du Nord
en 2006).

Le parlement de Westminster a délégué à ces instances
régionales des compétences limitées, surtout d’intérêt
local (culture, éducation, santé, etc.). Au lieu de les
énumérer, la loi du parlement dresse plutôt une liste
des compétences que le parlement a désiré conserver
pour lui-même, surtout d’intérêt national (Constitution,
affaires étrangères, services financiers, défense,
sécurité intérieure, immigration, citoyenneté, etc.).
2.
Les origines médiévales
   de la Constitution
      britannique
Fondements de la Constitution anglaise

                                          En effet, la Constitution anglaise actuelle ne
                                          procède pas d’une création spontanée
Les Français, de Maximilien de            reposant sur quelque théorie politique, mais
Robespierre à Charles de Gaulle, ont      résulte plutôt du travail d’hommes et de
                                          femmes de pouvoir qui ont cherché, au cours
crû à l’existence d’une constitution      des siècles, à résoudre les problèmes
idéale. En bons enfants de Descartes,     concrets auxquels ils étaient confrontés. Ils
                                          ont procédé à tâtons, par essais et erreurs, en
ils ont voulu l’élaborer avec l’aide de   suivant un long parcours parsemé
leur raison.                              d’incidents de toutes sortes. C’est ainsi
                                          qu’ils ont élaborés les institutions politiques
                                          de leur pays et les règles permettant de les
Les Britanniques, pour leur part, se      faire fonctionner.
sont toujours méfiés des
                                          Contrairement à la France, qui a connu
constructions intellectuelles.            plusieurs Constitutions plus ou moins
L’expérience, et non la raison, leur a    différentes depuis la révolution de 1789, le
donc servi de principal outil pour        Royaume-Uni, tout comme l’Angleterre qui
                                          représente son noyau historique, n’a vécu
construire leur État.                     que sous une seule Constitution depuis au
                                          moins mille ans. Certes, celle-ci a évolué,
                                          comme tout organisme vivant, mais elle a
                                          conservé intacts ses principaux attributs.
Fondements de la Constitution anglaise

La Constitution anglaise a donc commencé à prendre forme dans les temps les
plus anciens, lorsque les rois saxons Alfred le Grand et son petit-fils Athelstan ont
unifié et assujetti l’ancienne province romaine de Bretagne, entre 871 et 939 de
notre ère.

Un siècle et demi après, en 1066, Guillaume de Normandie, surnommé le Bâtard,
puis le Conquérant, s’est appropriée la Couronne d’Angleterre, puis y a
généralisé le système féodal, mais en conservant certains caractères
centralisateurs de l’ancien régime, caractères qui se sont accentués sous le règne
de ses successeurs.

En effet, la constitution anglaise a reconnu au roi l’exercice de tous les pouvoirs
aujourd’hui associés à la puissance publique: celui-ci pouvait se faire législateur,
agir comme juge suprême pour tous ses sujets, lever un impôt universel, en plus
de policer l’ensemble de son royaume. Toutefois, la sagesse lui commandait,
lorsqu’il gouvernait, de s’associer aux plus puissants parmi la noblesse de son
royaume.
3.
Le parlement de
 Westminster
Le parlement de Westminster: d’abord une assemblée féodale

Ce que l’on appelle aujourd’hui le parlement de Westminster n’était rien
d’autre, à l’origine, qu’une assemblée des plus importants nobles (lords
temporels) et prélats (lords spirituels) du royaume, assemblée que le roi
convoquait selon son plaisir, tant pour la consulter que pour lui faire part
de ses décisions. Cette assemblée, qui représentait ni plus ni moins que la
cour féodale du roi, semblable, à ses débuts, aux autres cours royales
d’Europe, a pris le nom de parlement après 1236. Il ne s’agissait
cependant que d’un simple changement de nom.

Légalement parlant, du moins avant 1215, le roi n’était pas tenu de
convoquer les lords anglais. Seule la prudence l’incitait à le faire, que ce
soit pour adopter une mesure législative majeure, pour juger quelque
grand seigneur, ou pour lever de nouveaux impôts.

C’est pendant la guerre de Cent Ans (1337-1453) que le palais royal de
Westminster devint le lieu de rencontre le plus fréquent du parlement, ce
qui explique le nom sous lequel on désigne le plus souvent le parlement
anglais.
L’ancien palais de Westminster au XVIe siècle
Évolution du parlement de Westminster

Dans ce qui a été un tournant dans
l’histoire du parlement anglais, la noblesse
du pays a exigé de Jean sans terre qu’il
inscrive, dans sa Magna Carta de 1215,
leur droit d’approuver toute augmentation
de leur contribution fiscale.

Ils voulaient ainsi transformer ce qui était,
à l’origine, un exercice de consultation de
la part du roi, en une obligation juridique
d’obtenir leur consentement avant toute
hausse d’impôt.

Bien qu’elle ait disparue dans les versions
subséquentes de la Magna Carta, cette
exigence des barons a néanmoins été
respectée, au point qu’elle fera partie de la
coutume, au moins à partir du XIVe siècle.
Évolution du parlement de Westminster

Dès le XIIIe siècle, le roi a commencé à inviter occasionnellement des
représentants élus de la petite noblesse et des bourgeois des villes, en plus
des hauts barons et des prélats qui étaient les habitués de sa cour. Ces élus
parlaient aux nom des communautés du royaume, d’où leur nom de
communes (les premières élections ont eu lieu en 1227). Lords et communes
ont d’abord siégé ensemble.

Pourquoi faire venir des représentants des communes? Leur pouvoir
augmentant dans les mêmes proportions que leur richesse, il devenait
politiquement opportun de consulter la petite noblesse et les bourgeois avant
d’accroître leur fardeau fiscal, comme on le faisait pour les grand seigneurs.

Des élections ont été systématiquement tenues à partir de 1327 pour assurer
la participation des communes aux travaux du parlement.

Peu après, en 1331, on a divisé une première fois le parlement en deux
chambres: les lords d’un côté, et les communes de l’autre. Lords et
communes ont toujours siégé séparément à partir de1407.
Les deux chambres législatives
dans l’ancien palais de Westminster (XIXe siècle)

      Lords                      Communes
Évolution du parlement de Westminster

La suite a été une longue lutte des lords et députés pour assurer la souveraineté
du Parlement et la suprématie de ses statuts. Elles ont été consacrées par
l’adoption de la Déclaration des droits de 1689. Toute législation adoptée par
le Parlement est depuis considérée comme la loi suprême du royaume. C’est
l’un des dogmes du droit anglais.

Certes, le monarque fait toujours partie du parlement. Son pouvoir de légiférer,
qui se manifeste par sa sanction à chaque projet de loi, n’a donc jamais
disparu. Mais il n’est plus ce qu’il a été à l’origine. Il est désormais encadré.
Selon la formule d’édiction consacrée, que l’on retrouve dans chaque texte de
loi, un roi ou une reine ne légifère plus que «sur l’avis et du consentement des
lords spirituels et temporels et des communes réunis en parlement.»

En outre, le monarque a toujours possédé et possède donc encore le pouvoir
légal de convoquer le parlement en session, de le dissoudre, d’en suspendre les
travaux, de convoquer des élections pour former une nouvelle chambre des
communes, ainsi que de nommer de nouveaux lords à la chambre des lords. Le
parlement est demeuré, aussi bien dans la forme qu’en stricte légalité, son
parlement.
Actuel palais de Westminster
   (1847 à aujourd’hui)
Démocratisation du parlement de Westminster

Quoique des élections aient systématiquement tenues depuis 1327 pour la
formation de chaque nouveau parlement, cela n’a pas fait de celui-ci une
institution démocratique pour autant.

Il faut savoir que, jusqu’à la réforme électorale de 1832, environ 5% des
sujets de Sa Majesté possédaient les biens ou revenus nécessaires à
l’exercice du droit de vote, à main levée, faut-il préciser, avant 1872.

En effet, le Royaume-Uni devra attendre la réforme électorale de 1917 pour
que tous les hommes adultes puissent enfin voter, et celle de 1928 pour que
le même droit soit enfin reconnu aux femmes.

La Chambre des lords, quant à elle, est demeurée une chambre législative
composée de non-élus. Toutefois, les lords actuels ne conservent leur siège
qu’à titre viager. La classe des lords héréditaires, ceux qui transmettent leur
droit de siéger au Parlement à leur fils aîné, à été abolie en 2005 par une loi
de parlement.
4.
   Le cabinet
(gouvernement)
Le Conseil privé

Le monarque anglais s’est toujours entouré
de conseillers pour diriger son royaume. Ils
étaient nommés et congédiés par lui, selon
son bon plaisir et les besoins du moment.

En 1540, sous le roi Henri VIII, les
conseillers du roi ont commencé à se réunir
de manière routinière, selon une procédure
bien établie, pour s’occuper de la gestion
quotidienne du royaume. Leurs décisions
étaient désormais colligées dans un registre
tenu par un secrétaire. Ce nouvel organisme
portait le nom de Conseil privé du roi
(Henri VIII). Et ses membres étaient les
conseillers du roi.
Le cabinet
Le Conseil privé de la reine
(Élisabeth II) existe toujours             Rencontre du cabinet
aujourd’hui. Toutefois, en réalité, seul
un petit nombre de ses membres,                britannique
ceux qui détiennent des portefeuilles
administratifs (les ministres                     (2007)
actuellement en poste), exercent la
réalité du pouvoir au nom de
l’ensemble du Conseil privé.

Depuis environ 1700, les ministres de
la Couronne en fonction se
réunissent au sein d’un autre
organisme appelé le cabinet.

Le cabinet n’a pas d’existence légale.
Il s’agit en réalité d’un simple comité
de l’entité légale plus large qu’est le
Conseil privé.
Nominations au poste de ministre

Élisabeth II nomme encore les            La Couronne incarne le pays et ses
membres du Conseil privé et ceux          institutions. Elle symbolise et se
qui, parmi eux, auront la                 confond aujourd’hui avec l’État
responsabilité d’administrer le                        anglais.
gouvernement, autrement dit les
titulaires de charge ministérielle. Ce
sont ses ministres. Et le
gouvernement britannique est donc,
légalement, le gouvernement de la
reine.

Conséquemment, Élisabeth II,
détentrice du pouvoir exécutif, est
considérée comme étant le chef de
l’État britannique.
5.
La reine (ou le roi)
Élisabeth II (1952-aujour.), reine du Royaume-Uni,
  a hérité des droits, pouvoirs et privilèges de ses
             prédécesseurs sur le trône.

En stricte légalité, c’est donc la reine qui:

 sanctionne les lois;
 convoque le parlement en session;
 proroge ce même parlement en mettant fin à la
  session en cours;
 dissout la Chambre des communes pour convoquer
  des élections;
 nomme les lords qui siègent à la chambre haute;
 nomme et congédie les ministres du gouvernement;
 nomme les juges;
 nomme les ambassadeurs;
 déclare la guerre et signe la paix;
 confère les honneurs et les titres de noblesse.
Coutume de primogéniture

À la mort d’Élisabeth II, tous ses droits, pouvoirs et
privilèges, vont passer automatiquement à son fils
aîné, Charles Windsor, le prince de Galles, sans même
la nécessité d’un couronnement.

C’est la coutume de primogéniture qui régit la
succession à la Couronne. Cette coutume a toutefois
été modifiée par le passage d’une loi du parlement,
l’Acte d’établissement de 1701, afin d’écarter les
catholiques du trône.

Être roi (ou reine) n’est donc pas un droit. Il s’agit
plutôt d’une obligation. Elle incombe à l’héritier de la
Couronne dès sa naissance.

Voilà pourquoi l’abdication n’existe pas en droit
britannique. Pour abandonner son trône, le monarque
anglais doit absolument sanctionner un projet de loi
voté par les lords et les communes, car seule une loi
du parlement peut modifier l’ordre de succession.
6.
Les conventions de la
    Constitution
La reine règne, mais ne gouverne pas.

La reine ou le roi anglais possèdent donc d’importants
pouvoirs.

En réalité, depuis au moins le règne de Victoria
(1820-1830), reines et rois exercent leurs pouvoirs en
écoutant presque mécaniquement les avis des élus.
Ces élus sont les députés des communes et surtout les
leaders des partis politiques au sein desquels ils se
regroupent.

Les souverains britanniques agissent ainsi, non pas à
cause d’une obligation légale, mais en vertu d’une
règle à laquelle ils obéissent par sentiment de
nécessité politique.

On connaît cette règle sous la forme d’une maxime:
«la reine (ou le roi) règne, mais ne gouverne pas». En
d’autres termes, le monarque possède tous les
pouvoirs légaux qui font de lui le chef de l’État, mais
laisse à ses ministres le soin de gouverner à sa place.
Conventions de la Constitution

La règle selon laquelle la reine règne,
mais ne gouverne pas, est appelée une
convention de la Constitution, ou
convention constitutionnelle.

Une convention de la Constitution est
une règle politique qui régit la manière
dont un pouvoir public sera ou ne sera
pas exercé par son titulaire, dépendant
des circonstances.

Une telle règle ne fait pas partie du droit.
Elle n’est donc pas du ressort des
tribunaux.

Une convention de la Constitution naît
en raison de considérations purement
politiques, et continue d’exister tant que
ces considérations persistent.
Convention du «gouvernement responsable»

Parce que la reine règne, mais ne             Chambre des communes
gouverne pas, elle sanctionne
automatiquement tous les projets de lois            actuelle
votés par les lords et les communes.

Ceci explique aussi pourquoi, lorsque
vient le temps de nommer le futur
Premier ministre après des élections
générales, le monarque choisit toujours
celui ou celle qui saura gagner et
conserver la confiance d’une majorité
des députés élus des communes.

Une autre règle d’éthique politique, qui
s’impose cette fois au Premier ministre
et au cabinet qu’il dirige, consiste donc à
conserver la confiance des élus du
Parlement, i.e. les députés des
communes. Cette autre règle à caractère
politique se nomme la «convention du
gouvernement responsable».
L’application de ces deux conventions de la
Constitution, la reine règne, mais ne gouverne
pas, ainsi que la convention du gouvernement
 responsable, ont transformé la nature de la
monarchie britannique pour en faire le véhicule
     d’une véritable démocratie libérale.
Comparaison entre le choix des ministres du cabinet
                       en France et au Royaume-Uni
                La France                                    Le Royaume-Uni
 Le Président de la République, élu au             La reine du Royaume-Uni, dont le droit et
  suffrage universel pour cinq ans, est le           l’obligation de régner à vie lui vient de sa
  chef de l’exécutif;                                naissance, est le chef de l’exécutif;
 Le Président nomme le Premier ministre;           La reine nomme le Premier ministre;
 Sur proposition du Premier ministre, le           Sur proposition du Premier ministre, la reine
  président nomme les autres ministres du            nomme les autres ministres du cabinet.
  gouvernement;                                     La reine choisit comme Premier ministre le
 Si le parti politique du président gagne le        chef du Parti politique qui est en mesure
  plus grand nombre de sièges aux                    d’obtenir et de conserver la confiance d’une
  élections législatives, le président choisit       majorité des députés à la Chambre des
  librement celui ou celle qui deviendra             communes;
  Premier ministre et lui indique les               La reine, par la suite, exerce l’ensemble de ses
  orientations politiques à suivre;                  pouvoirs de puissance publique en suivant les
 Mais si un parti politique s’opposant au           avis de son Premier ministre.
  président remporte les élections
  législatives, le choix du président doit       LA POSITION DE LA REINE RESSEMBLE
  porter sur le chef de ce parti politique,      DONC, UN PEU, À CELLE D’UN PRÉSIDENT
  dans la mesure où il peut commander            FRANÇAIS QUI N’EXERCERAIT JAMAIS
  une majorité des voix à l’Assemblée            AUCUN CONTRÔLE SUR L’ASSEMBLÉE
  nationale (hypothèse d’une                     NATIONALE, ET QUI DEVRAIT DONC
  cohabitation), et le Premier ministre          TOUJOURS LAISSER LA DIRECTION
  décide alors dans les faits des choix          EFFECTIVE DU GOUVERNEMENT À SON
  politiques du gouvernement.                    PREMIER MINISTRE, LE CHEF RÉEL DE LA
                                                 MAJORITÉ.
7.
Le référendum écossais
Accord d’Édimbourg

Le 15 octobre 2012, David Cameron, Premier
ministre du Royaume-Uni, a conclu un accord avec
Alex Salmond, Premier ministre de la région
administrative de l'Écosse, sur les conditions de la
tenue d’un référendum sur l’indépendance politique
de l’Écosse (Accord d'Édimbourg).

Le référendum se tiendra à l’automne 2014 sous la
supervision de la commission électorale écossaise.
Son devoir est de veiller à ce que le référendum
reflète bien la volonté des électeurs, de manière
objective et sans parti pris.
La Commission électorale a suggéré la question référendaire suivante:
«L'Écosse devrait-elle être un pays indépendant? Oui ou non!»
Accord d’Édimbourg (suite)

Des doutes furent d’abord émis sur la capacité de l’Écosse de tenir un
référendum sur l’indépendance de l’Écosse, car, en vertu de la loi du parlement
de Westminster qui a créé la législature écossaise, le parlement de Westminster
avait conservé la juridiction sur les affaires constitutionnelles.

Toutefois, a répondu l’Écosse par la voie de son Premier ministre, Alex
Salmond, le référendum écossais n’aurait pas pour effet de créer légalement et
automatiquement le nouveau pays, mais seulement de demander l’opinion des
Écossais sur cette question. En d’autres termes, le référendum écossais
n’aurait qu’une valeur consultative.

Cette polémique juridique a pris fin par la signature de l’Accord d’Édimbourg
d’octobre 2012. En vertu de cet accord, le gouvernement du Premier ministre
du Royaume-Uni, David Cameron, a étendu temporairement la compétence de
la législature écossaise au moyen d’un décret, une technique autorisée par la
loi du parlement de Westminster qui a créé cette législature.
Référendum consultatif,
   mais néanmoins contraignant

Peu importe que le référendum
écossais n’ait juridiquement qu’une
valeur consultative, comme l’est un
immense sondage d’opinion, les deux
gouvernements, celui du Royaume-
Uni et celui de l’Écosse, s’estimeront
liés politiquement par le résultat.

L’indépendance de l’Écosse, il va
sans dire, transformerait radicalement
Royaume-Uni, à commencer par son
nom et sa géographie.
Une indépendance peu probable

Pour être concluant, en faveur de l’indépendance, le référendum devrait
donner une réponse claire (un résultat serré pourrait causer un problème).

Tous les récents sondages d’opinion montrent cependant que seule une
minorité d’Écossais se montre favorable à la création d’un nouvel État.
Suite d’un référendum concluant à l’indépendance de l’Écosse

Si l’indépendance politique de l’Écosse se réalise, et cela en respectant les formes
de la Constitution actuelle du Royaume-Uni, le parlement du Royaume-Uni devra
adopter une loi à cet effet, comme cela a été le cas lorsque ce même parlement, en
1931, a reconnu l’indépendance de ses anciens dominions du Canada, de Terre-
Neuve, de l’Australie, de la Nouvelle-Zélande et de l’Afrique du Sud.
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