Note d'information de Human Rights Watch pour la 20e session de l'Assemblée des États parties de la Cour pénale internationale

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Note d'information de Human Rights Watch pour la 20e session de l'Assemblée des États parties de la Cour pénale internationale
Note d’information de Human Rights Watch
 pour la 20e session de l’Assemblée des États parties de la
                 Cour pénale internationale

                                    Novembre 2021

Les États parties au Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI) se réuniront du 6
au 11 décembre 2021 à La Haye pour la session annuelle de l’Assemblée des États parties
(« l’AEP »). Cette session annuelle, au cours de laquelle les États parties procéderont à
l’élection du Procureur adjoint, est le point d’orgue une année de changement à la tête du
Bureau du Procureur suite à l’élection, en février 2021, du nouveau procureur Karim Khan.
La Cour, les États parties et la société civile ont également entamé les premières étapes
d’un processus ambitieux visant à évaluer les quelque 400 recommandations formulées
l’année dernière dans le cadre de l’Examen par un groupe d’experts indépendants (« le
Groupe d’experts » ou « les experts ») et destinées à renforcer l’administration de la justice
de la Cour. Le processus d’évaluation et de mise en œuvre doit se poursuivre l’année
prochaine et le travail des experts, ainsi que les efforts de révision plus larges qui ont lieu
au sein de l’AEP, devraient demeurer les principales priorités de l’Assemblée et des
fonctionnaires de la Cour.

M. Khan, qui a pris ses fonctions en juin 2021, a hérité d’une charge de travail qui s’est
considérablement accrue pendant le mandat de sa prédécesseure, Fatou Bensouda. Sous
le mandat de Mme Bensouda, le Bureau du Procureur (BdP) a pris des décisions claires
pour étendre le champ du travail de la Cour au-delà du continent africain, en ouvrant des
enquêtes en Géorgie, au Bangladesh/Myanmar, en Afghanistan et en Palestine, et en
demandant une enquête aux Philippines. Non seulement ces décisions ont élargi les
possibilités de justice, mais l'inclusion dans le rôle de la Cour de crimes qui auraient
autrement été protégés par la politique des grandes puissances a fait progresser
l'application égale de la loi, même si cela a entraîné des sanctions punitives sans
précédent de la part de l'ancien gouvernement des États-Unis. Le rôle du système du

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Statut de Rome est de placer le précepte selon lequel « personne n’est au-dessus des
lois » au cœur de ses aspiration, afin de consolider l’État de droit et de dissuader les
crimes internationaux les plus graves pour le bien des « générations présentes et
futures ».

Avec l’autorisation de la situation aux Philippines et l’ouverture d’une enquête par le
procureur au Venezuela en octobre 2021, la Cour compte désormais 16 situations en cours
d’investigation. Bien que certaines de ces situations remontent à ses premières années
d’existence, un travail considérable reste à faire pour intégrer y intégrer d’autres affaires et
poser les bases nécessaires qui permettront à la Cour de maximiser son impact et son
héritage pour les communautés concernées avant la conclusion de son travail sur chacune
de ces situations. Dans sept situations, il n’y a pas encore eu de mise en accusation. La
communauté internationale doit faire davantage pour prévenir les atrocités et aider les
juridictions nationales à s’acquitter de leur responsabilité première en matière de justice,
et compte tenu de la prolifération alarmante des crimes relevant du Statut de Rome dans
le monde, la CPI est trop souvent la seule voie de justice valable. Malgré les appels de plus
en plus clairs de Mme Bensouda aux États parties pour qu’ils s’attaquent à l’écart qui
persiste entre la charge de travail de la Cour et son budget, les dirigeants de la Cour et les
États parties n’ont pas encore relevé ce défi. Éluder cette question, c’est risquer de
remettre en cause les progrès et promesses des mesures prises sous le mandat de Mme
Bensouda en vue d’étendre le champ d’action de la Cour, ainsi que l’engagement des États
parties, de la Cour et des autres parties prenantes à donner une suite à l’Examen du
Groupe d’experts.

Lors de la session de l’Assemblée qui se tiendra cette année, les États parties auront
plusieurs occasions de relever ces défis et d’obtenir les soutiens nécessaires à la
réalisation du mandat essentiel de la CPI. Bien que la participation en présentiel soit une
fois de plus limitée en raison de la pandémie de Covid-19, les organisations non
gouvernementales (ONG) du monde entier suivront les débats en ligne. Cette note
d’information donne des recommandations aux États parties pour la session de
l’Assemblée dans les domaines prioritaires suivants : 1) faire avancer le processus de
révision ; 2) renforcer le soutien politique à la justice, en s’appuyant sur les
enseignements tirés des efforts déployés pour contrer les sanctions prises par
l’administration Trump à l’encontre des fonctionnaires de la Cour ; 3) maintenir ouvert
l’espace de la société civile dans les procédures de l’Assemblée ; 4) l’élection du
Procureur adjoint et autres mesures visant à renforcer les élections de l’Assemblée ; et 5)
garantir des ressources adéquates, notamment lorsqu’il s’agit de protéger les droits de la
défense.

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I.        Examen de la Cour pénale internationale et du système du Statut de Rome

A. Retour sur le processus d’examen en 2021
Depuis la dernière session de l’Assemblée et conformément à une résolution, le Bureau de
l’Assemblée a nommé en février 2021 des représentants pour le Mécanisme d’examen et
des points focaux par pays pour guider les débats sur l’évaluation des recommandations
de l’Examen des experts indépendants. 1 La Cour a présenté sa réponse globale au rapport
des experts indépendants le 14 avril 2021. 2 Il s’agissait là de premières réactions, vu les
changements significatifs intervenus à la tête de la Cour – tant au niveau du Président que
du Procureur – au cours de l’année écoulée.

La première tâche du Mécanisme d’examen a été de proposer un classement des
recommandations du Groupe d’experts telle que destinées à la Cour, à ses organes
spécifiques, à l’Assemblée (et à ses mandats spécifiques), ou conjointement. 3 Plusieurs
parties prenantes, dont la Cour, les États parties et les organisations de la société civile,
ont fait des commentaires sur la proposition du Mécanisme d’examen. 4 Le Bureau a
ensuite adopté le classement qui avait été proposé. 5

Le Mécanisme d’examen a ensuite fait une proposition de Plan d’action exhaustif, et
publié un premier rapport sur l’avancement de ses travaux qui s’appuie sur les
commentaires des parties prenantes. 6 Le Plan d’action exhaustif est censé servir de feuille

1 Bureau de l’Assemblée des États parties (AEP), « Ordre du jour et Décisions », vingtième réunion, 5 février 2021,
https://asp.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/ASP19R/Bureau20.agenda%20and%20decisions-ENG.pdf (consulté le 16
novembre 2021), p.1.
2 Cour pénale internationale (CPI), « Réponse globale à l’Examen de la Cour pénale internationale et du système du Statut de

Rome par des experts indépendants — Rapport final », 14 avril 2021, https://asp.icc-
cpi.int/iccdocs/asp_docs/ASP20/Overall%20Response%20of%20the%20ICC%20to%20the%20IER%20Final%20Report%2
0-%20ENG%20-%2014April21.pdf (consulté le 16 novembre 2021).
3 Mécanisme d’examen, « Classement des recommandations et des questions restant à examiner », 29 avril 2021,

https://asp.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/ASP20/Review-Mechanism-Categorization-IER-Recommendations-FRA.pdf
(consulté le 16 novembre 2021).
4 Voir « Commentaires sur le classement présentés au Mécanisme d’examen », site Internet de l’AEP, https://asp.icc-

cpi.int/FR_Menus/asp/review-court/pages/comments-categorization.aspx (consulté le 16 novembre 2021).
5 Bureau de l’AEP, « Decision of the Bureau: Categorization of recommendations and remaining issues », 31 mai 2021,

https://asp.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/ASP20/Bureau%20decision-Categorization.31May21.2400.docx.pdf (consulté le
16 novembre 2021).
6 Voir AEP, « Commentaires sur le plan d’action complet présentés au Mécanisme d’examen », https://asp.icc-

cpi.int/FR_Menus/asp/review-court/pages/action-plan-comments.aspx (consulté le 22 novembre 2021) ; Mécanisme
d’examen, « Plan d’action global aux fins de l’évaluation des recommandations du Groupe d’experts indépendants, comprenant les
conditions d’éventuelles mesures supplémentaires », 30 juin 2021, https://asp.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/ASP20/RM-
Comprehensive%20Action%20Plan-FRA.pdf (consulté le 16 novembre 2021) ; Mécanisme d’examen, « Report of the Review

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de route pour l’évaluation des recommandations des experts, notamment leur attribution
aux organes de la Cour et aux mandats de l’AEP, ainsi que la mise en place de priorités, de
calendriers et de plates-formes pour discuter de ces recommandations. Le Bureau a
adopté un Plan d'action exhaustif légèrement révisé. 7

À partir de septembre 2021, le Mécanisme d’examen et les mandats correspondants de
l’AEP ont commencé à discuter des recommandations prioritaires par groupe. Ils devaient
rendre compte de ces discussions avant le 1er novembre. Avant l’Assemblée de cette
année, le Mécanisme d’examen facilitera l’adoption d’une résolution autonome donnant
un aperçu global du processus d’examen à ce jour et des discussions envisagées pour
l’année prochaine. Le rapport du Mécanisme d’examen sera également présenté à cette
session. A l’heure où nous écrivons ces lignes, le projet de résolution n’a pas encore été
distribué.

B. Principes pour le processus d’examen à venir
A mesure que cet important processus va de l’avant, il est crucial de ne pas perdre de vue
son objectif ultime : apporter les changements nécessaires pour renforcer l’efficacité de la
Cour et de son offre de justice. Au vu de nos observations du processus jusqu’à présent,
nous suggérons de tenir compte, dans le cadre des futures discussions, des principes
directeurs qui suivent. Les États parties devraient insister sur ces principes dans les
déclarations qu’ils feront lors de la session de l’Assemblée, notamment pendant la
session plénière prévue sur le Mécanisme d'examen :

     •    Respect de l’indépendance de la Cour en matière de justice et de poursuites. Les
          États parties ont insisté pour que l’exercice de l’examen soit un processus dirigé
          par les États, exigeant leur participation aux discussions sur l’évaluation et la mise
          en œuvre de toutes les recommandations, même celles attribuées à la Cour. 8 Cette
          approche ouvre la porte à une possible interférence avec l’indépendance de la
          Cour et, comme nous le verrons plus loin, a conduit à une inefficacité procédurale.

Mechanism on overall progress of its work », 30 juin 2021, https://asp.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/ASP20/RM.Overall-
progress.30Jun21.1950-ENG.pdf (consulté le 16 novembre 2021).
7 Bureau de l’AEP, « Decision of the Bureau: Comprehensive action plan for the assessment of the recommendations of the

Group of Independent Experts, including requirements for possible further action, as appropriate », 28 juillet 2021,
https://asp.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/ASP20/ICC-ASP20-BD-CPA-ENG.pdf (consulté le 16 novembre 2021).
8 Voir Mécanisme d’examen, « Proposition de classement des recommandations des experts indépendants et des questions

restant à examiner : note d’introduction », 28 avril 2021, https://asp.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/ASP20/Review-
Mechanism-Proposal-categorization-IER-Recommendations-FRA.pdf (consulté le 20 novembre 2021), paragraphe 9 ; Bureau
de l’AEP, « Decision of the Bureau: Categorization of recommendations and remaining issues », https://asp.icc-
cpi.int/iccdocs/asp_docs/ASP20/Bureau%20decision-Categorization.31May21.2400.docx.pdf, paragraphe 2.

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S’il est important d’encourager la Cour à agir de manière transparente et à être
          ouverte au dialogue avec les États parties et la société civile sur les
          recommandations du Rapport d’experts indépendants adressées à ses organes, la
          Cour doit en dernier ressort superviser l’évaluation et, le cas échéant, la mise en
          œuvre de ces recommandations. Il a été positif d’entendre les États parties réitérer
          la nécessité de respecter l’indépendance de la Cour en matière de justice et de
          poursuites dans les discussions que nous avons observées jusqu’à présent.

          Ce dernier point est particulièrement important dans le contexte des discussions
          de facilitation de la complémentarité concernant les recommandations des experts
          sur la complémentarité et la complémentarité positive (Recommandations 262-265
          des experts) et le « seuil de gravité » (Recommandation 227). 9 Cette série de
          recommandations étaient destinées au Bureau du Procureur et non aux États
          parties, et concernent des questions qui sont au cœur de l’indépendance du
          Bureau du Procureur. Nous avions précédemment souhaité que les
          recommandations sur la complémentarité et la complémentarité positive soient
          attribuées à la Cour, une position partagée par la Cour elle-même. 10 Au lieu de quoi,
          elles ont été attribuées à la fois à la facilitation de la complémentarité et à la Cour,
          ce qui rend d’autant plus important que des discussions soient menées dans le
          respect de l’indépendance du Bureau du Procureur. Lorsque ces discussions
          reprendront en 2022, il sera essentiel que les États parties continuent de garder ce
          point à l’esprit.

          Nous continuerons à suivre de près cette question tout au long du processus de
          révision, au fur et à mesure de son avancement.

     •    Dialogue authentique entre toutes les parties prenantes et transparence.
          L’inclusion et la transparence sont des éléments clés pour la qualité et la légitimité

9 En tant que membre participant du panel pendant cette session, Human Rights Watch a partagé son analyse du rôle crucial
du Bureau du Procureur comme catalyseur de la justice nationale dans l’ensemble de son travail, notamment pendant la
phase d’examen préliminaire. Nous avons recommandé d’interpréter certaines des recommandations des expert avec
nuance afin de soutenir les efforts du BdP en matière de complémentarité positive et d’éviter que les autorités nationales
manipulent le principe de complémentarité et entravent la justice. Voir Secrétariat de l’AEP, « Complementarity: Summary, 1
October 2021 », 25 octobre 2021, https://asp.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/ASP20/Compl.%204%20summary.pdf (consulté
le 20 novembre 2021). Notre présentation s’est appuyée sur une étude de cas de quatre pays sur la pratique du Bureau en
matière d’examens préliminaires. Voir Human Rights Watch, « Point de pression : L’impact de la CPI sur la justice nationale »,
mai 2018, https://www.hrw.org/fr/report/2018/05/03/point-de-pression-limpact-de-la-cpi-sur-la-justice-
nationale/enseignements-tires.
10« Court comments on categorization submitted to the Review Mechanism » https://asp.icc-
cpi.int/iccdocs/asp_docs/ASP20/RM-AP-Comments-Court-2.pdf (consulté le 16 novembre 2021). La Recommandation 227
du Rapport de l'examen d’experts indépendants a été attribuée au Bureau du Procureur.

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du processus d’examen. Jusqu’à présent, le processus a fonctionné conformément
          à ces principes, notamment par le biais de réunions du Mécanisme d’examen
          ouvertes à toutes les parties prenantes, programmées à des heures convenant à la
          fois à La Haye et à New York, et avec interprétation en français. Cependant, la
          discussion des recommandations des experts a été conduite au sein de plusieurs
          facilitations, qui n’ont pas toutes bénéficié de ces dispositions.

          Il est également possible de faire plus l’année prochaine pour favoriser un
          véritable engagement des groupes de la société civile. En particulier, les ONG des
          pays membres de la CPI devraient être incluses le plus tôt possible dans
          l’évaluation des recommandations qui concernent directement leur travail. Des
          efforts plus concertés pourraient être faits pour les inclure dans le fonctionnement
          des plates-formes existantes, en les informant à l’avance du calendrier et en
          traduisant les documents clés. Un grand nombre des recommandations pour
          lesquelles les ONG ont une expérience pratique du travail de la Cour sont celles qui
          sont adressées à la Cour pour évaluation. Des discussions dédiées avec ces
          groupes sur les questions qui pourraient bénéficier de leur expertise, concernant la
          sensibilisation et la présence sur le terrain par exemple, devraient être organisées
          pour aider à contribuer à l’évaluation de ces recommandations par la Cour.

     •    Éviter la bureaucratisation au sein des discussions de l’Assemblée. Dans sa
          contribution sur le Plan d'action exhaustif, Human Rights Watch a mis en garde
          contre la bureaucratisation du processus. 11 L’insistance à ce que les États
          examinent toutes les recommandations, même celles qui ont été attribuées à la
          Cour pour évaluation, a généré un nombre important de réunions en un temps très
          court. Il a été difficile pour les États parties et les organisations de la société civile
          de suivre et de s’engager de manière significative dans les discussions en raison
          de contraintes de capacité. Bien que l’évaluation des recommandations des
          experts soit un exercice intrinsèquement complexe qui exige du temps et une
          organisation minutieuse, il est essentiel de s’assurer que les processus qui
          pourraient déjà être initiés ou avancés par la Cour et les États parties ne soient pas
          entravés. En structurant leurs discussions l’année prochaine, les États parties
          devraient s’assurer de disposer d’un temps suffisant pour évaluer ensemble les
          recommandations adressées à l’Assemblée. En ce qui concerne les
          recommandations adressées à la Cour, les États parties devraient limiter leur rôle

11 « Human Rights Watch’s comments for the proposal of an action plan for the assessment of the Independent Expert Review

recommendations », 10 juin 2021, https://asp.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/ASP20/RM-AP-Comments-HRW.pdf, p. 2.

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au suivi des progrès de l’évaluation de la Cour et, le cas échéant, de sa mise en
       œuvre.

Recommandations à l’Assemblée et aux États parties de la CPI
   • Affirmer, lors des déclarations du débat général, de la plénière d’examen et
     d’autres points adaptés de l’ordre du jour, le soutien continu au processus
     d’examen et au respect de l’indépendance judiciaire de la Cour et du Bureau du
     Procureur lors des discussions sur le processus d’examen de l’année prochaine ;
   • Continuer à améliorer l’inclusion et la transparence, eu égard notamment à
     l’organisation de la programmation et de l’interprétation, et en encourageant la
     Cour à prévoir en amont la consultation de la société civile sur les
     recommandations concernant la Cour et qui présentent un intérêt particulier pour
     leur expertise ;
   • Prendre note, lors des déclarations au débat général, de la résolution sur le
     processus d’examen, et de la plénière d’examen, du risque de bureaucratisation
     du processus et appeler les acteurs de la Cour à continuer à améliorer leur
     approche de l’évaluation et de la mise en œuvre des recommandations pour
     s’assurer que le processus n’entrave pas les progrès ; et
   • Donner la priorité aux recommandations dans les programmes de travail de l’année
     prochaine, qu’il s’agisse du Mécanisme d’examen ou des facilitations des groupes
     de travail auxquels participent les États parties pour son évaluation, tout en
     donnant à la Cour le temps et l’espace nécessaires pour mener en parallèle son
     évaluation des recommandations qui relèvent de sa seule compétence.

C. Gouvernance unifiée
Le Rapport des experts a formulé plusieurs recommandations sur la gouvernance unifiée,
notamment en proposant un « Modèle des Trois Strates de Gouvernance »
(Recommandations 1 à 11 des experts). Bien que le Mécanisme d’examen ait entamé des
discussions initiales sur ces questions, une discussion de fond sur ces recommandations
aura très probablement lieu au cours du premier semestre 2022, comme indiqué dans le
Plan d’action exhaustif. Cette discussion concerne également d’autres recommandations
(par exemple, celles relatives à l’élection du greffier, voir ci-dessous).

À l’occasion des discussions qui débuteront l’année prochaine, nous exhortons les États
parties à examiner attentivement le modèle des trois strates de gouvernance proposé par
les experts en vue de préserver l’indépendance judiciaire de la Cour et du Bureau du
Procureur. Étant donné que la Cour a pour mandat de demander aux plus puissants de
rendre des comptes, les États parties de la CPI et les parties prenantes doivent être

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attentifs en permanence au risque d’ingérence. Nous présentons ci-dessous nos
premières réflexions sur ce sujet important.

Premièrement, le Rapport d’experts a fondé son modèle des trois strates de gouvernance
sur la nature double de la Cour, à la fois entité judiciaire (« CPI/Cour ») et organisation
internationale (« CPI/OI »). 12 Si cette distinction peut être utile pour séparer de manière
claire les différentes fonctions de l’institution, elle ne reflète peut-être pas assez
fidèlement son fonctionnement. La Cour ne travaille pas en silos isolés et ses opérations
impliquent une interaction entre les différentes strates identifiées par les experts. Par
exemple, la capacité du Bureau du Procureur à recruter et à conserver un personnel
suffisamment qualifié a un impact direct sur la réalisation de son activité de poursuites
judiciaires. Par conséquent, le modèle des trois strates de gouvernance peut ne pas offrir
les garanties adéquates pour l’indépendance de la Cour en matière de justice et de
poursuites.

Deuxièmement, pour les questions liées à la « CPI/OI », le Greffier serait, selon le modèle
des trois strates de gouvernance proposé, responsable de l’élaboration et de la mise en
œuvre de tous les processus et politiques administratifs. Même si le Greffier doit consulter
d’autres directeurs, il resterait le décideur ultime pour tous les services administratifs
(Recommandations 4 et 9 des experts), et serait apparemment responsable devant
l’Assemblée dans l’exercice de ses activités. 13 Pour les autres fonctions, le Greffier
resterait responsable devant le Président.

De notre point de vue, les États parties devraient faire preuve d’une grande prudence dans
l’adoption de toute mesure visant à reconsidérer la relation entre l’Assemblée et le
Greffier. L’Auditeur externe de la Cour s’est notamment écarté des recommandations du
Groupe d’experts, en suivant le principe selon lequel il devrait maintenir inchangés les

12 La « CPI/Cour » englobe deux niveaux. Le niveau 1 concerne l’activité judiciaire et les poursuites, où la présidence, les
juges et le procureur requièrent une indépendance absolue (Recommandation 2 des experts) ; le niveau 2 concerne
l’administration de la justice, dont la présidence et le Procureur sont les chefs, et dont le Président détient l’autorité
suprême (Recommandation 2 des experts). Le greffe soutient les niveaux 1 et 2 en coopérant avec le Procureur et en rendant
compte à la présidence, et la participation des États parties est limitée à la fonction législative et à la coopération judiciaire.
La « CPI/organisation internationale » constitue le niveau 3, relatif à l’administration d’une organisation internationale et
englobant des services administratifs tels que les ressources humaines, le budget et les finances, les achats, la gestion des
installations et les services généraux. Les États parties jouent un rôle clé dans la CPI/OI, notamment en élisant ses
responsables, en finançant ses dépenses et en supervisant son fonctionnement. Le Greffier est en charge du travail de la
CPI/OI. Selon le Rapport de l’examen d’experts indépendants, le Greffier consulte les autres directeurs mais reste le décideur
final et est responsable devant l’AEP (Recommandation 4 des experts). Voir Examen de la CPI par des experts indépendants,
« Rapport final », 30 septembre 2020, https://asp.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/ASP19/ICC-ASP-19-16-FRA-IER-Report-
9nov20-1800.pdf, para. 26-50.
13 Idem, para. 36, 45.

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rôles respectifs des directeurs. 14 En l’absence de garanties suffisantes, le contrôle exercé
par l’Assemblée pourrait conduire à l’érosion de l’indépendance essentielle dont la Cour a
besoin pour s’acquitter de son mandat de manière efficace et crédible.

Troisièmement, le Groupe d’experts indépendants a également recommandé que le
Bureau du Procureur délègue au greffe les questions liées à l’administration
organisationnelle de la Cour afin de permettre une gestion plus efficace des ressources et
d’éviter les doubles emplois ou les chevauchements avec les activités déjà réalisées par le
greffe (Recommandation 6 des experts). Bien que nous soyons d’accord avec la nécessité
de rationaliser certaines activités administratives, nous sommes préoccupés par le fait
que, sans garantie adéquate, la centralisation de certains services au sein du greffe (tels
que les ressources humaines du BdP) pourrait augmenter les possibilités d’ingérence.

En somme, l’effet combiné de la centralisation des fonctions administratives au sein du
greffe et le droit de regard simultanément donné à l’Assemblée sur le Greffier dans
l’exercice de ses fonctions pourrait potentiellement donner à l’Assemblée une influence
indue sur le BdP et le pouvoir judiciaire. Cette approche serait également incompatible
avec la lettre et l’esprit du Statut de Rome, dans lequel les États parties se sont
délibérément écartés des précédents ad hoc, en investissant le Procureur des « pleins
pouvoirs » dans la gestion de son bureau (art. 42(2)) et le président d’un pouvoir de
contrôle sur le Greffier (art. 38 et 43(2), entre autres). 15 Bien que le Groupe d’experts
indépendants ait soulevé des préoccupations valables concernant la coordination interne
de la Cour, nous pensons que nombre de ces préoccupations peuvent être résolues par la
mise en œuvre de recommandations spécifiques par la Cour, sans qu’il soit nécessaire de
procéder à une refonte de la gouvernance et à un éventuel amendement du Statut de
Rome.

II.     Soutien politique
Ces dernières années ont été marquées par plusieurs politiques d’opposition active à la
Cour. Les sanctions américaines visant les fonctionnaires de la Cour ne sont qu’un

14 AEP, « Auditeur externe : Rapport final sur la surveillance de la gouvernance de la Cour pénale internationale », ICC-
ASP/20/6, 13 octobre 2021, https://asp.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/ASP20/ICC-ASP-20-6-RE.pdf (consulté le 16 novembre
2021), para. 41-44.
15 Voir, par exemple, CPI, « Réponse globale de la Cour pénale internationale à l’examen par les experts indépendants de la

Cour pénale internationale et du système du Statut de Rome - Rapport final », https://asp.icc-
cpi.int/iccdocs/asp_docs/ASP20/Overall%20Response%20of%20the%20ICC%20to%20the%20IER%20Final%20Report%2
0-%20ENG%20-%2014April21.pdf, annexe 1, partie C.

                                                            9
exemple parmi d’autres d’attaques manifestes et inconsidérées contre la Cour. 16 Si
l’annulation de ces sanctions punitives par le président américain Joe Biden a permis
d’apaiser les tensions autour de la Cour, 17 cette dernière continue, avec ses partisans, de
faire l’objet de menaces (manifestes ou implicites). Aussi longtemps que la CPI fera son
travail, elle s’attirera une opposition politisée dont les sources sont multiples, et qui ne
pourra être surmontée que par le soutien déterminé et créatif des États parties.

Il y a d’importantes leçons à tirer de la façon dont les États parties se sont ralliés à la Cour
pour organiser sa défense, notamment par leurs déclarations conjointes. 18 En particulier,
le langage de la résolution Omnibus réitérant l’engagement de l’Assemblée à préserver
l’intégrité du Statut de Rome sans se laisser décourager par les menaces et les mesures
contre la Cour, a servi de modèle important pour ces déclarations. Le rapport du Groupe
d’experts reconnaît ces réalités en recommandant que « l’AEP et les États parties...
élaborent une stratégie pour répondre aux attaques contre la Cour par des États non
parties », quoique l’expérience passée montre que l’opposition peut aussi venir des États
parties. Cette recommandation (Recommandation 169 du des experts) a été discutée au
sein du Mécanisme d’examen en octobre et a été fortement soutenue par la Présidente de
l’Assemblée, Silvia Fernández di Gurmendi. Les États parties devraient saisir l’occasion de
mettre rapidement en œuvre cette recommandation en demandant au Bureau de charger
les points focaux pour la non-coopération d’explorer plus avant et de développer un
processus de gestion des crises, et ce dès l’année prochaine, à temps pour que la mesure
puisse être présentée à la vingt-et-unième session de l’Assemblée.

Recommandations aux États parties de la CPI
   • Exprimer, dans les déclarations du débat général, un soutien ferme au mandat
     critique de la CPI en tant que tribunal essentiel de dernier recours, chargé de
     garantir le principe de l’application impartiale de la loi ;
   • Attirer l’attention, dans les déclarations du débat général et lors de la plénière sur
     la coopération, sur l’importance pour toutes les victimes d’avoir accès à la justice
     et sur la nécessité de renforcer les capacités de la Cour par un soutien pratique et
     politique accru, ainsi que d’investir dans la complémentarité positive ;

16 « Les États-Unis infligent des sanctions à la Cour pénale internationale », communiqué de presse de Human Rights Watch,
11 juin 2020, https://www.hrw.org/fr/news/2020/06/11/les-etats-unis-infligent-des-sanctions-la-cour-penale-
internationale.
17 « Les États-Unis annulent leurs sanctions contre la CPI », communiqué de presse de Human Rights Watch, 2 avril 2021,

https://www.hrw.org/fr/news/2021/04/02/les-etats-unis-annulent-leurs-sanctions-contre-la-cpi.
18 Voir, par exemple, Mission permanente de la France auprès des Nations unies à New York, « Déclaration de soutien à la

Cour pénale internationale (CPI) suite à la publication du décret américain du 11 juin 2020 », 12 décembre 2020,
https://onu.delegfrance.org/Nous-demeurons-engages-pour-un-ordre-international-fonde-sur-des-regles (consulté le 16
novembre 2021).

                                                           10
•    Conserver et renforcer le langage existant dans la résolution Omnibus, qui réitère
          l’engagement de l’Assemblée à préserver l’intégrité du Statut de Rome sans se
          laisser décourager par les menaces et les mesures contre la Cour, ses
          fonctionnaires et ceux qui coopèrent avec elle ;
     •    Appeler, dans les déclarations du débat général et les interventions en plénière sur
          la coopération, à une mise en œuvre rapide de la recommandation 169 des experts
          par une action rapide du Bureau dès l’année prochaine, pour charger les points
          focaux pour la non-coopération d’explorer un processus et « développer une
          stratégie pour répondre aux attaques contre la Cour… et… être préparés à
          s’exprimer en faveur de la Cour » ; et
     •    S’engager à soutenir concrètement la Cour, lors du débat général ou de la session
          plénière de coopération, y compris en travaillant à l’achèvement d’accords-cadres.

III.     Protéger l’espace de la société civile
Il est essentiel de reconnaître, comme le fait le libellé de la résolution Omnibus
mentionnée ci-dessus, que non seulement la Cour et ses fonctionnaires, mais aussi ceux
qui coopèrent (ou sont perçus comme coopérant) avec elle sont confrontés à des
menaces.

L’Assemblée reconnaît depuis longtemps que le partenariat unique entre États et ONG est
fondamental pour le succès du système du Statut de Rome. Les ONG ont joué un rôle
crucial dans la création de la Cour et, dans le cadre de leurs mandats respectifs, elles
continuent de jouer de multiples rôles au sein du système du Statut de Rome. Il s’agit
notamment de plaider en faveur de la ratification et de la mise en œuvre du traité, de faire
pression sur les fonctionnaires de la Cour et sur l’Assemblée des États parties pour qu’ils
prennent des décisions politiques, budgétaires et législatives judicieuses afin de garantir
l’équité, l’efficacité et l’indépendance de la Cour, d’aider les victimes et les accusés à faire
valoir leurs droits devant la Cour, de promouvoir le soutien politique et la coopération
pratique avec la Cour et de défendre l’indépendance de la Cour en matière de justice et de
poursuites, contre les pressions qu’elle subira invariablement de la part d’intérêts
opposés à la responsabilité. Les ONG font souvent l’objet de pressions et de menaces,
précisément en raison de leur rôle de défenseur de la justice devant cette Cour. Le
gouvernement israélien a récemment désigné d’importants groupes de la société civile
palestinienne comme des « organisations terroristes » dans le but de mettre un terme à
leur action en faveur des droits humains. Certaines de ces organisations ont fait campagne
pour une enquête de la CPI en Palestine.19

19 « Israël/Palestine : Des organisations palestiniennes de défense des droits humains sont qualifiées de “terroristes” »,

communiqué de presse de Human Rights Watch, 22 octobre 2021,

                                                              11
Étant donné que les menaces qui visent les défenseurs des droits humains du fait de leur
plaidoyer en faveur de la justice peuvent viser à faire dérailler le mandat de la Cour,
l’Assemblée et les États parties doivent intégrer les réponses aux attaques contre la
société civile dans leurs stratégies plus larges pour faire face à l’obstruction du travail de
la CPI.

L’Assemblée devrait également servir de modèle pour soutenir l’espace de la société
civile.

Compte tenu des limitations des réunions en présentiel pendant la pandémie de Covid-19,
l’adaptation des méthodes de travail de l’Assemblée a, à certains égards, élargi l’espace
de la société civile. Les ONG du monde entier ont pu participer à des réunions virtuelles
des groupes de travail de New York et de La Haye, ainsi qu’au Mécanisme d’examen.

Dans le même temps, cependant, nous sommes préoccupés par ce qui semble être une
érosion certaine des pratiques de l’Assemblée en matière de transparence et de
participation de la société civile. Des discussions importantes se déroulent de plus en
plus souvent au sein du Bureau de l’Assemblée, qui, traditionnellement, n’est ouvert ni
aux États parties ni aux observateurs. En outre, l’élaboration du processus de « vérification
diligente » pour l’élection du Procureur adjoint s’est faite en l’absence de toute
consultation avec les ONG, malgré la campagne concertée menée par plusieurs groupes
pour mettre en avant cette question lors de l’élection du Procureur. Les décisions initiales
concernant les dispositions prises pour la session de l’Assemblée de cette année, qui ont
imposé de sévères contraintes à la participation de la société civile et qui, à leur tour,
affecteront le caractère public de la session, ont été prises sans consultation préalable
des ONG. Depuis plusieurs années, la facilitation du budget de l’Assemblée est fermée à la
participation des ONG, ce qui les a exclues de l’examen, cette année, des
recommandations du Groupe d’experts sur le processus budgétaire.

Recommandations aux États parties de la CPI
   • Reconnaître, dans les déclarations du débat général et à d’autres occasions au
     cours de la session de l’Assemblée, le rôle essentiel des organisations de la
     société civile concernant la Cour et des efforts plus larges visant à garantir la
     justice pour les victimes, et condamner les efforts déployés par d’autres acteurs

https://www.hrw.org/fr/news/2021/10/22/israel/palestine-des-organisations-palestiniennes-de-defense-des-droits-
humains.

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pour empêcher le travail de défense des droits humains ou étouffer la voix des
          ONG ; et
     •    Demander, dans les déclarations du débat général et à d’autres occasions pendant
          la session de l’Assemblée, d’accroître l’espace de la société civile dans les
          procédures de l’Assemblée.

IV.    Élections
L’une des principales responsabilités des États parties de la CPI est de veiller à ce que la
Cour bénéficie d’un leadership de la plus haute qualité parmi ses représentants élus. Au
cours de l’année écoulée, les États parties ont fait des efforts pour améliorer les
procédures d’élection, notamment en ce qui concerne le Procureur adjoint et le Greffier. En
plus des développements abordés ci-dessous, le Bureau de l’Assemblée a réalisé des
avancées avec un exercice de retour sur expérience, mandaté par l’Assemblée dans le
cadre de l’élection du Procureur en février 2021. Les États parties ont aussi poursuivi les
discussions, notamment sur les recommandations correspondantes du Groupe d’experts,
dans le cadre de la facilitation de l’examen de la procédure de nomination et d’élection
des juges. Ces deux processus sont essentiels pour améliorer les futures élections et se
poursuivront en 2022.

A. L’élection des Procureurs adjoints et la nécessité d’un mécanisme de filtrage
permanent
Lors de la prochaine session de l’Assemblée, les États parties de la CPI éliront le ou les
procureurs adjoints de la Cour. Le Procureur a demandé à l’Assemblée d’élire deux
Procureurs adjoints et a présenté deux listes distinctes de candidats à l’attention des États
parties. 20 Bien que les États parties ne prendront une décision formelle sur l’élection de
deux Procureurs adjoints qu’après avoir conclu les négociations sur le budget-programme
2022 de la Cour pendant la session de l’Assemblée, on s’attend à ce que les États parties
approuvent les ressources nécessaires pour financer deux postes de Procureur adjoint.

Ce sera la première fois que la Cour aura deux Procureurs adjoints depuis 2007. Selon un
plan de réorganisation présenté par le Procureur, chaque Procureur adjoint dirigera un
pilier distinct au sein du Bureau du Procureur. Ces piliers intégreront les fonctions du
Bureau dans chaque situation, de l’examen préliminaire aux appels, plutôt que de diviser
ces fonctions entre des divisions distinctes de coopération, d’enquête et de poursuites. 21

20 Bureau du Procureur de la CPI, Lettre au Président de l’AEP sur les nominations de candidats au poste de Procureur

adjoint, 10 octobre 2021, https://asp.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/Elections/DPROS2021/ICC-ASP20-DPROS-Shortlist-
FRA.pdf (consultée le 16 novembre 2021).
21 AEP, « Projet de budget-programme de la Cour pénale internationale pour 2022 », ICC-ASP/20/10, 16 août 2021,

https://asp.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/ASP20/ICC-ASP-20-10-FRA.pdf (consulté le 16 novembre 2021), para. 232-86.

                                                           13
Il sera important d’assurer la cohérence entre le travail des deux piliers et de limiter la
concurrence entre les piliers pour les ressources, étant donné l’écart important entre la
charge de travail et le budget fourni par les États parties.

Si le Procureur a présenté deux listes distinctes de candidats – l’une composée
entièrement de femmes et l’autre d’avocats francophones ou d’avocats ayant une
expérience en droit civil – on ne sait pas encore si les États parties éliront un candidat de
chaque liste ou deux candidats des deux listes. Des tables rondes publiques avec les
candidats, co-animées par des représentants de l’Assemblée et de la société civile, se
sont tenues le 15 novembre 2021. 22

Pour ces élections, le Bureau de l’Assemblée a, par certains côtés, cherché à combler une
lacune notable dans l’élection du Procureur en 2020-2021 : l’absence d’un contrôle
professionnel visant à évaluer la « haute considération morale » des candidats, une
condition requise pour le Procureur par le Statut de Rome de la CPI, et que les Procureurs
adjoints doivent également remplir. En l’absence d’une approche globale pour la
vérification lors de la récente élection du Procureur, des informations sur les qualifications
des candidats ont circulé sur les réseaux sociaux et auprès du grand public, sans qu’il y ait
de processus permettant de recevoir et d’évaluer les plaintes pour mauvaise conduite.23

Cette année, le Bureau de l’Assemblée a approuvé un processus de « vérification
diligente » convenu entre le Président de l’Assemblée des États parties de la Cour et le
Procureur. Le processus consistait en un questionnaire destiné aux candidats, des
vérifications des antécédents supervisées par le Procureur et la possibilité pour le
mécanisme de contrôle indépendant de la Cour d’évaluer toute allégation de mauvaise
conduite soumise par voie confidentielle à l’encontre des candidats présélectionnés. 24

Bien qu’il s’agisse d’un pas en avant, ce processus de vérification diligente a été mis en
place rapidement et sans consultation de la société civile. Les États parties devraient
maintenant saisir l’occasion de développer, par le biais de consultations approfondies,

22 AEP, « Table ronde avec les candidats présélectionnés pour le poste de procureur adjoint ayant eu lieu le 15 novembre
2021 », vidéos, https://asp.icc-cpi.int/FR_Menus/asp/elections/prosecutor/pages/deputyprosecutor2021.aspx (consulté le
20 novembre 2021).
23 Voir Open Society Justice Initiative, « 2020-2021 International Criminal Court Prosecutor Election Process : Insights and

Recommendations for Future Elections », 10 novembre 2021, https://www.justiceinitiative.org/uploads/fad4ffa4-3697-471a-
8878-3a62656ca559/icc-prosecutor-election-process_insights-and-recommendations-for-future-elections_112021.pdf
(consulté le 20 novembre 2021), p. 24-26.
24 « Accord de la présidence de l’Assemblée et du Procureur sur le processus de vérification diligente pour les candidats au

poste de procureur adjoint », https://asp.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/Elections/DPROS2021/DP-Due-Diligence-FRA.pdf
(consulté le 16 novembre 2021) (adopté par le Bureau de l’AEP le 6 juillet 2021).

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notamment avec des experts en processus de contrôle, un mécanisme permanent de
contrôle pour les élections de tous les fonctionnaires de la CPI et de l’AEP. Un processus
permanent – plutôt que le développement continu de procédures ad hoc – offrira une
certitude aux candidats et aux États parties et augmentera la transparence et la confiance
dans les processus d’élection de la CPI. L’élaboration d’un processus permanent pourrait
tenir compte des différentes approches de contrôle appropriées pour différentes élections.
Par exemple, le processus pourrait faire la distinction entre l’élection des fonctionnaires
de la CPI, notamment le Procureur, les juges et le Greffier, et celle des membres de l’AEP,
notamment le Comité du budget et des finances, le Conseil de direction du Fonds au profit
des victimes et le Comité consultatif des candidatures.

B. Rôle de l’AEP dans l’élection du Greffier
Lors de la prochaine session de l’Assemblée, les États parties devraient adopter une
décision concernant l’élection du prochain Greffier de la Cour en 2023. Le Groupe
d’experts a recommandé que l’élection du Greffier soit plus approfondie et que les États
parties renforcent leur rôle dans cette élection (recommandation 76 des experts). Cette
recommandation est liée au modèle des trois strates de gouvernance proposé par le
Mécanisme d’examen, dans lequel le Greffier serait directement responsable devant l’AEP
des fonctions associées à la « CPI/OI », qui constitue le niveau 3 (voir note 12 ci-dessus).

La recommandation du Groupe d’experts, si elle est mise en œuvre, rendrait l’Assemblée
responsable du vote de confirmation d’une liste restreinte de candidats au poste de
greffier, établie avec l’aide d’un comité d’experts. Le Greffier serait alors élu par les juges à
partir de cette liste restreinte. En vertu du Statut de Rome, l’Assemblée ne joue
actuellement aucun rôle dans la sélection des candidats au poste de greffier, cette tâche
étant confiée à la présidence de la Cour. L’Assemblée fait des recommandations sur la
liste, bien que jusqu’à présent ces recommandations aient porté sur des critères
généraux.25 Comme indiqué ci-dessus, le Greffier rend compte au président de la Cour et
non à l’Assemblée.

Les États parties n’ont pas encore terminé leur évaluation de cette recommandation et
poursuivront les discussions en 2022. Mais dans le même temps, la décision approuve
l’avis du Groupe d’experts selon lequel la participation des États parties à l’élection du
Greffier devrait effectivement être renforcée. Elle appelle à des tables rondes publiques
avec les candidats au poste de greffier, suivies d’un examen des candidats au sein du
groupe de travail de La Haye et de l’adoption d’un rapport et de recommandations à

25Secrétariat de l’AEP, « Note pour le dossier : Élection du Greffier de la CPI », 20 mai 2021, document non publié versé au
dossier de Human Rights Watch, annexe II.

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soumettre à la prochaine session de l’Assemblée. Elle demande également au Bureau de
mettre en place un processus de « vérification diligente » pour examiner les candidats à
l’élection. 26

Cette décision d’approuver un rôle plus important pour les États parties est prématurée.
L’élection du Greffier devrait se faire de manière plus approfondie, en incluant des étapes
telles que des tables rondes publiques et un processus d’approbation – même si un
mécanisme permanent créé à cet effet, plutôt qu’un autre processus ad hoc, pourrait à cet
égard être utile et préférable. Cependant, les États parties doivent examiner attentivement
si les changements apportés à la relation entre l’AEP et le Greffier sont susceptibles de
mettre en péril l’indépendance de la Cour en matière de justice et de poursuites (surtout
s’ils sont combinés à la recommandation que le Greffier ait directement à rendre compte à
l’Assemblée). Les États parties devraient d’abord évaluer les recommandations du Groupe
d’experts sur la « gouvernance unifiée » avant de renforcer leur rôle dans le processus
d’élection du Greffier. En outre, toute décision concernant l’adaptation du processus
d’élection pourrait bénéficier des leçons tirées de l’exercice actuellement en cours pour
l’élection du Procureur en 2020-2021.

Recommandations à l’Assemblée et aux États parties de la CPI
   • Veiller à ce que l’élection du ou des procureurs adjoints soit strictement fondée sur
     le mérite, en tenant compte des critères suivants :
     o Engagement envers la CPI et sa mission en tant qu’institution qui transcende
         tout intérêt étatique, politique ou professionnel particulier ;
     o Excellence démontrée dans la conduite de procédures pénales complexes et
         internationales ;
     o Expérience avérée en matière d’indépendance, d’équité et d’impartialité dans
         l’application de la loi, en particulier face à des pressions politiques ;
     o Haute considération morale ;
     o Maîtrise du Statut de Rome et du droit pénal international ;
     o Manifester des capacités de gestion pour diriger un personnel nombreux et
         diversifié ;
     o Accroître la diversité de genre dans la haute direction du Bureau du Procureur ;
         et
     o Expérience de la mise en œuvre de changements dans la culture
         institutionnelle.

26AEP, « Projet de rapport du Bureau sur le groupe d’étude sur la gouvernance », 1er novembre 2021, document non publié
versé au dossier de Human Rights Watch, pp. 15-16.

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