Le calme après la tempête Du choc à la résilience - Érudit

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Frontières

Le calme après la tempête
Du choc à la résilience
Josianne Crête

Résilience et deuil                                                                   Article abstract
Volume 22, Number 1-2, Fall–Spring 2009–2010                                          Knowing that breaking the news of a physical handicap diagnosis has impacts
                                                                                      both on the person with the handicap and on his or her relatives, many studies
URI: https://id.erudit.org/iderudit/045025ar                                          researched what were the impacts of that news on the latter. Nevertheless, the
DOI: https://doi.org/10.7202/045025ar                                                 stages these relatives go through to adapt to the new situation are not as well
                                                                                      known as the stages the person experiences him- or herself. A review of the
                                                                                      literature enabled us to identify two processes the relatives of a person with a
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                                                                                      physical handicap go through. The first one is chronological and has four
                                                                                      stages : before the news, the shock after the news, the rehabilitation period and
                                                                                      after the rehabilitation. The second is dynamic, systemic and changes with
Publisher(s)                                                                          time ; it is the grieving process. Many outcomes are possible after theses
                                                                                      processes ; it can be resilient, homeostatic, maladaptive or dysfunctional. The
Université du Québec à Montréal
                                                                                      identification of these processes enables us to suggest some intervention
                                                                                      techniques.
ISSN
1180-3479 (print)
1916-0976 (digital)

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Crête, J. (2009). Le calme après la tempête : du choc à la résilience. Frontières,
22(1-2), 35–41. https://doi.org/10.7202/045025ar

Tous droits réservés © Université du Québec à Montréal, 2010                         This document is protected by copyright law. Use of the services of Érudit
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                                                                                     This article is disseminated and preserved by Érudit.
                                                                                     Érudit is a non-profit inter-university consortium of the Université de Montréal,
                                                                                     Université Laval, and the Université du Québec à Montréal. Its mission is to
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                                                                                     https://www.erudit.org/en/
r     e       c       h         e       r        c        h     e

 Résumé
 Puisque l’annonce d’un diagnostic de
 déficience physique a des impacts tant
                                                                                     LE CALME
 sur la personne qui l’apprend que sur ses
 proches, plusieurs études se sont pen-
 chées sur ce que cette annonce fait vivre                                                         APRÈS
                                                                              LA TEMPÊTE
 à ces derniers. Par contre, les étapes qu’ils
 traversent pour s’adapter à la nouvelle
 situation sont moins connues que celles
 vécues par la personne atteinte. Une
 recension des écrits a permis d’identifier
 deux processus traversés par les proches
 d’une personne atteinte à la suite de
 l’annonce du diagnostic. Le premier                                           Du choc à la résilience
 est chronologique et comporte quatre
 étapes : avant l’annonce, le choc suivant
 l’annonce, la réadaptation et après la
 réadaptation. Le deuxième est dyna-
 mique, systémique et évolutif, il s’agit
 du processus de deuil. Différentes issues
 à ces processus sont possibles ; elle peut
 être résiliente, homéosta­tique, mésa-
 daptée ou dysfonctionnelle. L’identifica-
 tion de ces processus permet d’identifier
 des pistes d’intervention.
 Mots clés : processus de deuil –
 processus d’adaptation – déficience
 physique – résilience – proches.

 Abstract
 Knowing that breaking the news of a                                    Josianne Crête,                          logique qui suit quatre étapes : la période
 physical handicap diagnosis has impacts               travailleuse sociale CRLB, membre clinicienne du CRIR     avant l’annonce du diagnostic, le choc à la
                                                       et du REPAR, étudiante à la maîtrise en service social,   suite de cette annonce, la période de réa-
 both on the person with the handicap                                  Université de Montréal.
 and on his or her relatives, many studies                                                                       daptation et celle après la réadaptation. Le
 researched what were the impacts of                    Dans le domaine de la réadaptation                       deuxième processus ayant été relevé dans
 that news on the latter. Nevertheless,              en déficience physique (DP), il existe un                   les écrits est le processus de deuil qui est
 the stages these relatives go through               consensus sur le fait que l’annonce du dia-                 dynamique, systémique et évolutif et qui
 to adapt to the new situation are not               gnostic entraîne des impacts autant pour                    traverse toutes les étapes chronologiques
 as well known as the stages the person                                                                          suivant l’annonce de la DP.
                                                     la personne atteinte que pour ses proches.
 experiences him- or herself. A review
                                                     En effet, de nombreuses études se sont                          Dans le présent texte, après avoir
 of the literature enabled us to identify
 two processes the relatives of a person             penchées sur les impacts de l’annonce                       détaillé les étapes de ces deux processus,
 with a physical handicap go through.                d’un diagnostic de DP sur les proches                       il sera question de leur issue possible.
 The first one is chronological and has              de la personne atteinte (Lefebvre et al.,                   Cette issue peut être tant dysfonction-
 four stages : before the news, the shock            2007 ; O’Connell et al., 2004 ; Mann,                       nelle, mésadaptée, homéostatique que rési-
 after the news, the rehabilitation period           2002 ; Degeneffe, 2001) et démontrent                       liente. Ensuite, des pistes d’intervention
 and after the rehabilitation. The second            qu’il importe de les soutenir eux aussi                     tenant compte de ces informations seront
 is dynamic, systemic and changes with               afin de favoriser le mieux-être de chaque                   ­proposées.
 time ; it is the grieving process. Many             membre du système familial. Cependant,
 outcomes are possible after theses pro-                                                                             LE PROCESSUS D’ADAPTATION
                                                     nous constatons que les étapes qu’ils tra-
 cesses ; it can be resilient, homeostatic,
                                                     versent pour s’adapter à la nouvelle situa-                     DES PROCHES
 maladaptive or dysfunctional. The iden-
 tification of these processes enables us to         tion ont été moins documentées que celles                      Bien que chaque personne et chaque
 suggest some intervention techniques.               parcourues par la personne atteinte.                        système familial vivent différemment l’an-
                                                        Grâce à une recension des écrits1, il a                  nonce d’un diagnostic de DP, tous ont à
 Keywords : grieving process –                       été possible d’identifier deux processus                    traverser certaines étapes dans un ordre
 adaptation process – physical                                                                                   précis. En effet, tout système familial dont
                                                     que traversent les proches de la personne
 handicap – resiliency – relatives.
                                                     atteinte après avoir appris le diagnostic de                un membre est atteint d’une DP est d’abord
                                                     DP. Le premier est un processus chrono-                     un système, ce qui est la nature même de

AUTOMNE 2009 / PRINTEMPS 2010                                                   35                                                     FRONTIÈRES ⁄ VOL. 22, Nos 1-2
la famille. Ensuite, lors de l’annonce du      DP chez un de ses membres : la crise auto-        tégies d’adaptation, qui peuvent être
diagnostic, le système familial est per-       référentielle et la crise hétéroréférentielle.    émotives (découragement, diminution de
turbé dans son organisation. Par la suite,         La crise autoréférentielle survient du        l’estime de soi, colère, déni, etc.), corporel-
des services temporaires de réadaptation       fait que, habituellement, les ressources          les ou psychosomatiques (développement
sont offerts afin de répondre à certains       adaptatives sont pensées à l’intérieur du         de maladies ou de problèmes cognitifs) ou
des besoins qu’expérimentent les proches.      système familial et que, avec l’apparition        comportementales (surprotéger, infanti-
Pour terminer, ces services prennent fin       de la DP, la compétence pour penser ces           liser, s’isoler, se désinvestir, se priver de
et le système familial doit retrouver un       ressources est attribuée à des acteurs exté-      plaisir, devenir agressif, etc.). Les membres
équilibre, plus ou moins précaire, pour        rieurs, soit les professionnels de la santé.      de la famille peuvent aussi utiliser des stra-
répondre à ses besoins. Ces quatre étapes      Cette extériorisation du contrôle entraîne        tégies positives, entre autres en ayant une
représentent le processus d’adaptation des     une disqualification symbolique des rôles         attitude positive et des attentes réalistes
proches, que nous détaillerons maintenant.     de chacun des membres du système fami-            par rapport à l’avenir de leur famille.
                                               lial et une perte de contrôle sur leur his-           Il est à noter que les stratégies utilisées
    ÉTAPE 1 : LE CALME AVANT LA TEMPÊTE        toire familiale. Cela déstabilise le système      vont différer selon la nature du diagnostic.
    Selon l’approche systémique, un sys-       et le fait douter de son modèle relationnel       En effet, s’il s’agit d’un diagnostic annon-
tème familial répond à certaines carac-        et de ses compétences. Aussi, cela remet          çant une récupération graduelle, bien que
téristiques. En effet, selon Destaillats       en question les règles relationnelles et fait     partielle, des capacités fonctionnelles,
et ses collègues (2007), un système est        augmenter le niveau d’incertitude et de           comme pour les personnes ayant subi un
« un ensemble d’éléments en interaction,       souffrance individuelle et collective.            traumatisme craniocérébral ou une lésion
auto-éco-organisé, autorégulé, tendant             En plus de vivre une crise interne (auto-     médullaire, les implications seront diffé-
vers un but et qui échange, pour survivre      référentielle) en se remettant lui-même en        rentes pour les proches de celles décou-
et se transformer au fil du temps, de la       question, le système familial est confronté       lant d’un diagnostic sous-­entendant une
matière, de l’énergie et des informations ».   à des remises en question qui lui viennent        fragilisation de la santé, comme c’est le
Le système familial a donc une fonction        de l’extérieur, ce qui entraîne la crise hété-    cas chez les personnes ayant subi un acci-
structurante interne qui se confond avec       roréférentielle. Cette crise est causée par       dent vasculaire cérébral, ou sous-enten-
son existence même. Il assure un ordre         le fait que le système familial et les institu-   dant une mort imminente, comme chez
relationnel qui crée une stabilité et une      tions soignantes utilisent des approches qui      les personnes souffrant de sclérose laté-
prévisibilité dont bénéficient ses membres.    s’opposent à plusieurs niveaux, opposition        rale amyotrophique. Malgré cela, comme
    Toujours selon Destaillats et ses col-     qui renforce les doutes du système familial       le relèvent plusieurs auteurs (Lefebvre
lègues (2007), le système familial se décrit   face à ses capacités d’adaptation. Ainsi,         et al. 2007 ; Lacerte et al., 2002 ; Rolland,
aussi comme une organisation relation-         d’un côté, il y a un groupe d’appartenance        1994), la nature de l’événement déstabili-
nelle spécifique, originale et complexe.       où le type de relation est choisi et où l’un      sant le système familial, soit la nature du
Il est formé de sous-systèmes de niveaux       des membres se trouve affecté d’une DP,           diagnostic de DP, à lui seul n’est pas suffi-
logiques différents basés sur des règles       alors que, de l’autre côté, il y a un groupe      sant pour prédire le processus que suivront
de fonctionnement qui les rattachent aux       d’inclusion où les relations sont imposées        les personnes le vivant. La perception du
règles des groupes d’appartenance. En tant     en termes de patient et de soignant. De           diagnostic qu’a chacun des membres du
que groupe d’appartenance, le système          plus, la famille se compare aux membres           système familial et la signification que
familial permet à chacun de ses membres        de l’équipe soignante et remet son modèle         prend ce diagnostic pour le système jouent
de fonder son identité sur le fait d’en être   en question alors qu’elle vit une période de      un rôle plus central dans la détermination
issus (pôle d’appartenance), sans gommer       crise interne (autoréférentielle), en même        du processus qu’il vivra après un tel choc.
son originalité (pôle d’identité). Ces deux    temps que l’équipe soignante tient un dis-
pôles, appartenance et identité, peuvent       cours qui disqualifie, habituellement de             ÉTAPE 3 : LA RÉADAPTATION
tant être opposés que complémentaires et       façon implicite, le modèle relationnel de            Une fois le diagnostic annoncé, le sys-
la relation entre eux se nomme la boucle       la famille. Cela se fait principalement de        tème familial s’intègre habituellement dans
de la réflexivité.                             deux façons : 1) soit que l’équipe traitante      un suivi en réadaptation. Les diagnostics
                                               dissimule ses doutes sur les limites de ses       varient, les traitements diffèrent, les che-
    ÉTAPE 2 : À LA SUITE DE L’ANNONCE          propres modèles théoriques et ses compé-          minements aussi, mais certains besoins
    DU DIAGNOSTIC                              tences, 2) soit qu’elle propose des modèles       sont constants, perçus par une majorité
    Chaque famille est unique et a sa propre   relationnels différents de ceux utilisés par      de proches de personnes ayant une DP.
idée de ce qu’est et de ce que devrait être    le système familial, suggérant ainsi que le       Les études consultées classent ces besoins
une famille avec ses rôles et ses règles       modèle actuel ou antérieur à l’annonce de         en trois catégories : les besoins d’informa-
de fonctionnement. L’annonce de la DP          la DP n’est pas adéquat. Cette dynamique          tions, les besoins relationnels de soutien et
perturbe cette organisation et provoque        renforce les doutes que ressent la famille        les besoins en soins et en services.
une crise dans le système, qui ne peut plus    et se nomme la crise hétéroréférentielle.            Les études montrent que le manque
se fier à ses repères habituels. Toutefois,        Ces deux types de crise se traduisent         d’information contribue à un sentiment
cette perturbation est différente pour         par des impacts concrets sur les proches :        d’insécurité, d’impuissance, à une per-
chaque membre de chaque système fami-          impacts individuels (anxiété, incompré-           ception irréaliste de la situation, à une
lial étant donné que chacun la perçoit et y    hension, colère, culpabilité, fatigue, perte      augmentation des coûts pour le système
réagit différemment. Aussi, l’effet de sur-    d’identité, etc.), familiaux (changement de       de santé et à l’insatisfaction des personnes
prise de l’apparition de toute DP ajoute       rôles, problèmes financiers, apparition de        et des proches en regard de leur qualité
un stress important à l’événement lui-         conflits dans la famille, etc.) et environne-     de vie (Lefebvre et al., 2005 ; Fallowfield
même. Destaillats et ses collègues (2007)      mentaux (isolement de la famille, bris de         et al., 2002 ; Coulter, 1998 ; Wiles et al.,
décrivent deux types de crise pouvant          relation, marginalisation, etc.).                 1998). Il est donc important de répondre à
survenir au sein d’un système familial à           Pour faire face à ces impacts, les            ce besoin en leur donnant de l’information
la suite de l’annonce d’un diagnostic de       proches doivent utiliser différentes stra-        sur tout ce qui entoure la DP.

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Les proches ont aussi des besoins rela-       l’état de la personne atteinte d’une DP, la        LE PROCESSUS DE DEUIL
tionnels de soutien, soit le besoin d’être        nature évolutive ou non de sa DP, l’état de         Le deuxième processus décrit dans le
partie prenante des soins de la personne.         ses proches et leur capacité et disponibilité   présent article concerne le deuil. Bien que
Afin d’obtenir le soutien psychologique           à offrir le soutien nécessaire, en plus de      ce dernier soit habituellement associé à
dont ils ont besoin pour bien gérer leurs         facteurs sociétaux comme la disponibilité       la mort de quelqu’un, un processus appa-
émotions, ils doivent souvent puiser dans         des services nécessaires.                       renté est observé dans d’autres situations
leurs ressources personnelles et envi-                Par ailleurs, les études démontrent         de perte, tel un diagnostic de DP. En effet,
ronnementales. Ces ressources peuvent             que, malgré les différents scénarios pos-       en plus de faire traverser les étapes que
être naturelles (famille, amis, collègues         sibles, les besoins à long terme des proches    nous venons de décrire, l’annonce d’un
ou autres) ou professionnelles (interve-          demeurent les mêmes. En effet, il revient       diagnostic de DP demande aux membres
nants). Bien sûr, il faut parallèlement           souvent aux familles d’assumer en partie        du système familial de faire le deuil d’une
maximiser le bien-être de la personne             les soins à prodiguer, sans que celles-ci       partie de leurs rêves et de leurs attentes
atteinte d’une DP, puisque le bien-être           aient les ressources suffisantes et les con-    face à la personne atteinte. Pour cette
des proches est tributaire du bien-être de        naissances nécessaires pour y parvenir          raison, à l’annonce du diagnostic de DP,
la personne atteinte.                             (O’Connell et al., 2004 ; Degeneffe, 2001).     parfois même avant, le processus de deuil
    Afin de diminuer leur fardeau objec-          Ainsi, les familles ont besoin d’une aide       s’entame. Ce processus se définit comme
tif, les proches ont besoin de recevoir de        professionnelle pour prendre certaines          étant un mécanisme psychologique qui
l’aide et des services concrets, tant par leur    décisions concernant la personne ayant          permet à la personne vivant la perte de se
réseau naturel que par le réseau profes-          une DP (Bond et al., 2003). Ce besoin varie     réorganiser intérieurement pour s’adapter
sionnel. Ainsi, il faut les aider à identifier    dans le temps, mais est réel et important, et   à l’événement et ensuite réorienter sa vie.
et à faire appel à des ressources pouvant         ce, même plusieurs années après l’annonce       Ce processus permet à la personne de se
combler leurs besoins d’aide à domicile           du diagnostic, étant donné les impacts à        détacher affectivement de l’objet investi
(aide ménagère, popote roulante, etc.),           long terme de ce dernier (Kolakowsky-           pour être capable ultérieurement de réin-
leur offrir du répit, les accompagner dans        Hayner et al., 2001 ; Sinnakaruppan et al.,     vestir de nouveaux attachements (Lefebvre
différentes démarches administratives et          2001). Une aide professionnelle serait donc     et al., 2005).
combler leurs besoins financiers. Ce sou-         toujours nécessaire et bénéfique au-delà            Kübler-Ross (1981) décrit le deuil
tien social plus adapté à leurs besoins leur      de la phase de réadaptation, même dix           comme étant un processus comportant six
permettra d’avoir plus de temps pour eux.         ans plus tard (Lefebvre et al., 2004 ; Ergh     étapes : le choc initial, le déni, la révolte, le
    L’expérience clinique et les études           et al., 2003 ; Minnes et al., 2000). Ce sou-    marchandage, la tristesse et l’acceptation.
montrent que les proches ont un double            tien est primordial, car il est en relation     Par contre, elle spécifie que les personnes
rôle en réadaptation (Rochette et al.,            directe avec le fonctionnement familial et      endeuillées ne vivent pas toutes les étapes
2007). Ils ont d’abord un rôle de « client »,     représente un moyen puissant de réduire         dans le même ordre et que certaines per-
étant donné qu’ils ont des besoins phy-           la détresse psychologique du tandem             sonnes ne vivent pas les six étapes, bien
siques et émotionnels causés par la DP,           soignant-­soigné.                               qu’elles en vivent toujours au moins deux.
et aussi un rôle de « proche intervenant »,           À long terme, le système familial           Pelchat et ses collègues (2005) ainsi que
parce qu’ils doivent prodiguer des soins          s’adapte à la DP, mais des impacts concrets     Lefebvre et ses collègues (2005) ont boni-
à la personne et s’impliquer dans sa réa-         persistent dans le temps. Ainsi, bien que       fié ce modèle en en proposant un en huit
daptation. Afin de répondre adéquatement          les proches aient modifié leur emploi du        phases interreliées à travers lesquelles la
aux besoins des proches, il importe de gar-       temps et réorganisé leurs responsabilités       personne endeuillée chemine : l’appréhen-
der en tête cette dualité entre le besoin de      familiales et sociales, certaines inquié-       sion, le choc de l’annonce, la dénégation et
s’investir dans les soins de l’autre (rôle de     tudes subsistent, la charge émotionnelle        le déni, la colère, la culpabilité, la dépres-
proche intervenant) et celui de recevoir          reste importante, les contacts sociaux          sion, l’adaptation et la transformation. La
les soins dont ils ont eux-mêmes besoin           demeurent moins fréquents et les diffi-         spécificité de ce modèle est son carac-
(rôle de client).                                 cultés financières se manifestent encore        tère dynamique et systémique se situant
                                                  régulièrement.                                  dans une conception évolutive (figure 1 :
   ÉTAPE 4 : APRÈS LA RÉADAPTATION                    Bien entendu, les besoins des proches       Le processus de deuil). Il est dynamique
    Tout au long de la réadaptation, les          d’une personne qui décède rapidement de         puisque plusieurs phases peuvent coexister
intervenants proposent des outils au sys-         sa DP seront différents à long terme par        et des va-et-vient sont possibles entre les
tème familial afin que celui-ci retrouve          rapport à ceux des proches d’une personne       différentes phases. Il est systémique étant
un équilibre relationnel malgré la désta-         qui survit longuement avec des incapacités      donné que les membres du système familial
bilisation causée par l’annonce de la DP.         physiques. Ainsi, bien que l’issue de cer-      s’interinfluencent dans leur cheminement.
Par contre, quand la réadaptation se ter-         taines DP soit la mort, tant que la personne    Aussi, la conception se veut évolutive, car
mine, les services changent et les proches        vit avec sa DP, les besoins de ses proches      le commencement d’une étape du proces-
n’ont plus le même soutien professionnel          correspondent à ceux décrits plus avant. Ils    sus sous-entend la résolution de la phase
qu’avant. Divers scénarios deviennent             deviennent différents uniquement une fois       précédente. Nous présenterons brièvement
alors possibles. Parfois, les services            que la mort est imminente ou survenue. Il       ici les particularités de chacune des phases
cessent complètement et le réseau social          faut noter à ce sujet que plusieurs diagnos-    de ce modèle.
dit « naturel » prend la relève, d’autres fois,   tics annonçant une maladie dégénérative
ils sont maintenus par un suivi dans la           n’entraînent pas une mort immédiate. Par           PHASE 1 : L’APPRÉHENSION
communauté (CLSC, organismes commu-               exemple, les gens atteints de sclérose en          L’appréhension se produit avant même
nautaires, etc.) ou encore, ils sont rempla-      plaques peuvent vivre plusieurs années          que le diagnostic de DP soit connu. Elle
cés par un suivi interne (hébergement).           avec leur maladie – trente à cinquante ans.     représente en fait le moment où la famille
Le choix du scénario à privilégier est                                                            reconnaît que la personne a des difficultés,
influencé par plusieurs facteurs, comme                                                           mais ne sait pas de quelle origine ni à quoi

AUTOMNE 2009 / PRINTEMPS 2010                                          37                                                 FRONTIÈRES ⁄ VOL. 22, Nos 1-2
savoir-faire. Ce changement se fait sentir
                                           FIGURE 1                                                    de l’intérieur tant sur le plan des valeurs,
                                                                                                       des croyances que des connaissances.
                                     LE PROCESSUS DE DEUIL
                                                                                                          PARTICULARITÉS DU PROCESSUS
                                                                                                          DE DEUIL SUIVANT L’ANNONCE
                                                                                                          D’UNE DÉFICIENCE PHYSIQUE
                                                                                                           Ces huit phases sont influencées par
                                                                                                       différents facteurs particuliers à la DP.
                                                                                                       Ainsi, il faut d’abord savoir que le proces-
                                                                                                       sus de deuil qui accompagne une DP peut
                                                                                                       n’être jamais achevé. En effet, le caractère
                                                                                                       évolutif de la DP – vers le mieux-être ou
                                                                                                       l’inverse – sous-entend des annonces répé-
                                                                                                       tées de pertes, ou encore la montée de l’es-
                                                                                                       poir, se concluant souvent par un nouveau
                                                                                                       désespoir. Cela fait en sorte que le proces-
                                                                                                       sus est récurrent. Par exemple, lorsque la
                                                                                                       DP entraîne la mort, plusieurs chocs ont
                                                                                                       lieu ; l’annonce du diagnostic, suivie par
 Source : Hélène Lefebvre, Ph. D. et Marie Josée Levert, Ph. D. (cand.),                               l’annonce répétée de pertes significatives
 Équipe de recherche interdisciplinaire sur la famille (ÉRIFAM), Université de Montréal.
                                                                                                       – perte de la capacité de marcher, perte
s’attendre. Cette phase a comme fonction                  PHASE 5 : LA CULPABILITÉ                     de la capacité d’utiliser la toilette, etc. –
de préparer la famille au choc de l’annonce               Cette colère, surtout celle contre la        jusqu’à ce que la mort survienne comme
de l’événement.                                        personne atteinte, peut être impossible         ultime choc et déstabilise une nouvelle fois
                                                       à exprimer pour les proches. Elle sera          le système familial. Le processus de deuil
    PHASE 2 : LE CHOC DE L’ANNONCE                     donc dirigée vers d’autres cibles, sou-         reprend à chaque choc, à chaque perte. Par
   L’annonce arrive comme un choc et                   vent le proche lui-même, qui développera        contre, le processus peut tant être ralenti
paralyse le fonctionnement du système                  de la culpabilité face à l’état de la per-      par les difficultés non résolues qu’avaient
familial et le fonctionnement psychique de             sonne atteinte et la considérera comme          causées les chocs précédents, qu’être faci-
chacun de ses membres. Il correspond à la              un reproche vivant. À cette phase, de la        lité par les ressources personnelles, fami-
deuxième étape du processus d’adaptation               surprotection s’observe souvent.                liales et sociales développées à la suite
décrit plus avant, nous ne le détaillerons                                                             de la confrontation aux chocs précédents.
donc pas plus ici.                                        PHASE 6 : LA DÉPRESSION                          En plus d’être récurrent, le deuil qui
                                                          Après avoir pris contact avec ses émo-       fait suite à l’annonce d’un diagnostic de
    PHASE 3 : LA DÉNÉGATION ET LE DÉNI                 tions de colère et de culpabilité, le proche    DP présente des particularités que peuvent
    Une fois le choc initial passé, une mon-           commence graduellement à exprimer sa            éclairer les concepts de deuil ambigu (Boss,
tée d’angoisse est vécue. Pour s’en proté-             tristesse, voire sa dépression, et à se cen-    1999), de deuil non affranchi (St-Charles,
ger, le psychisme des proches endeuillés               trer sur son monde intérieur. Cette période     1998 ; Doka, 1989) et de deuil psychoso-
met en place un mécanisme de défense                   constructive marque le début de l’intégra-      cial (Doka, 1989). Le deuil ambigu suit un
qui est la dénégation, soit le fait de se dire         tion de la nouvelle situation en amenant        événement où les faits ne sont pas clairs ou
que l’événement n’a pas pu se produire.                le proche à réfléchir sur sa vie.               non disponibles et où chacun donne une
Certaines recherches (Cohadon, 2000 ;                                                                  signification différente à l’événement. Par
Doka, 1989) démontrent à ce sujet que,                    PHASE 7 : L’ADAPTATION                       exemple, après un accident de la route,
étant donné que la personne ayant une                     Lorsqu’il arrive à la phase de l’adap-       lorsqu’il est impossible de savoir si l’acci-
DP est encore présente physiquement à                  tation, le proche apprend à vivre avec          denté pourra marcher à nouveau ou non,
l’inverse d’un deuil faisant suite à un décès,         les incapacités causées par la DP et leurs      l’ambiguïté fait en sorte que les proches ne
ses proches resteront plus longtemps en                impacts sur sa vie quotidienne. Il apprend      savent pas s’ils doivent faire le deuil de la
période de dénégation, ayant plus de dif-              à reconnaître les compétences de la per-        marche ou non.
ficulté à identifier l’objet réel de la perte.         sonne. C’est à ce moment que le système             Pour sa part, le deuil non affranchi
Si ce mécanisme s’avère insuffisant pour               familial réinvestit la personne telle qu’elle   représente l’expérience des personnes
contenir l’angoisse, un déni de la réalité             est avec sa DP.                                 endeuillées dont les droits, les rôles et
peut alors se mettre en place. Ce méca-                                                                les capacités d’être en deuil ne sont pas
nisme moins adaptatif conduit à un rejet                  PHASE 8 : LA TRANSFORMATION                  reconnus socialement. Par exemple, les
de la réalité et à la construction d’une                  Plusieurs modèles proposés pour reflé-       proches de personnes ayant une DP se
­néoréalité où la DP n’existe pas.                     ter le processus de deuil se terminent          font parfois dire qu’ils ne devraient pas
                                                       avec l’adaptation du système familial à la      être tristes puisque la personne atteinte est
    PHASE 4 : LA COLÈRE                                perte vécue. Par contre, le présent modèle      encore en vie. Étant donné que la perte est
    La diminution progressive du déni                  rappelle que le travail de deuil insère les     partielle (des pertes existent, mais la per-
conduit à une reprise graduelle du contact             personnes et les familles dans un proces-       sonne est encore là), la douleur et le deuil
avec la réalité et s’exprime par des réac-             sus d’apprentissage qui les transforme. Le      qui y sont rattachés ne sont pas reconnus
tions de révolte et de colère dirigée vers             processus se termine donc par la phase          socialement.
l’extérieur, que ce soit contre la personne            de transformation, qui représente la capa-          En ce qui concerne le deuil psychoso-
atteinte ou tout autre acteur ou facteur               cité de la famille à se sentir compétente et    cial (Doka, 1989), il s’agit de ce qui suit
pouvant être tenu responsable de la DP.                confiante pour utiliser ses ressources et ses   une perte psychocognitive. Par exemple,

FRONTIÈRES ⁄ VOL. 22, Nos 1-2                                                  38                                        AUTOMNE 2009 / PRINTEMPS 2010
il peut s’agir de changements – fréquents
chez les personnes ayant une DP avec                                               FIGURE 2
atteintes neurologiques – au niveau de la
personnalité, ou des facultés cognitives et
                                                           ISSUES POSSIBLES DES PROCESSUS D’ADAPTATION ET DE DEUIL
comportementales qui font en sorte que
le système familial devra reconstruire sa
représentation psychosociale du proche
atteint.

   LES ISSUES DE CES PROCESSUS
    En regardant le processus de deuil
tel que décrit par Pelchat et ses col-
lègues (2005) ainsi que Lefebvre et ses
collègues (2005), il a été possible de voir
que son issue n’est pas la simple accep-
tation, malgré ce que proposait Kübler-
Ross (1981). Le système familial s’adapte
et se transforme à cette nouvelle réalité.
Il transforme ses habitudes, son modèle
relationnel, pour faire face aux obstacles
devant lui. La résilience s’observe entre
autres par cette transformation.
    Mais, qu’est-ce que la résilience ?
Plusieurs auteurs se sont penchés sur sa
définition. Certains la définissent comme
une série de caractéristiques personnelles,
                                               de transformation individuelle et familiale      que la présence ou l’absence de ces fac-
d’autres comme l’issue positive d’une crise,
                                               pour faire face à la situation de stress, lui    teurs ne permettent pas de prédire avec
d’autres comme un processus, et d’autres
                                               donner un sens constructif et permettre          exactitude quelles personnes et quels sys-
encore comme l’ensemble de ces trois com-
                                               à chacun de trouver un nouvel équilibre          tèmes pourront être résilients, il semble
posantes. Dans le présent texte, le modèle
                                               pour lui-même afin de participer au renou-       qu’ils permettent de favoriser la résilience.
de Richardson et ses collègues (1990) sera
                                               vellement du bien-être familial (Pelchat         En contrepoids de ces facteurs de protec-
utilisé. Selon eux, le processus résilient,
                                               et al., 2005). Pour sa part, la résilience       tion, il y a ce que certains (Waller, 2001 ;
facilité par certaines caractéristiques per-
                                               familiale consiste en « la capacité déve-        Richardson, 1990) nomment les facteurs
sonnelles, permet une réintégration rési-
                                               loppée au sein d’une famille, elle-même          de risque. Tout comme les facteurs de pro-
liente. Leur modèle propose quatre issues
                                               éprouvée, à soutenir et aider un ou plu-         tection, les facteurs de risque peuvent être
possibles à un événement difficile, comme
                                               sieurs de ses membres victimes de circons-       individuels, familiaux ou communautaires.
l’est l’annonce d’un diagnostic de DP,
                                               tances difficiles ou à construire une vie           Les écrits indiquent que ces différents
soit une réintégration dysfonctionnelle,
                                               riche et épanouissante pour chacun de            facteurs se conjuguent de deux façons pour
mésadaptée, homéostatique ou résiliente
                                               ses membres, malgré un environnement             favoriser ou entraver le processus de rési-
(Figure 2 : Issues possibles des processus
                                               adverse auquel l’ensemble est soumis »           lience. Delage (2008) parle de la balance
d’adaptation et de deuil).
                                               (Delage, 2008, p. 78-79).                        de vulnérabilité. Selon cette théorie, le fait
    La réintégration dysfonctionnelle ren-
                                                  Ces deux types de résilience permettent       d’avoir plus de facteurs de protection favo-
voie à un mode d’adaptation qui ne permet
                                               un retour à l’équilibre et l’apprentissage de    riserait le processus de résilience, alors
pas à l’individu ou au système familial de
                                               la capacité à rebondir, à se reconstruire et     que l’inverse l’entraverait. Toutefois, une
fonctionner correctement. La réintégra-
                                               à reprendre le contrôle sur sa vie. Quand        deuxième relation entre ces facteurs entre
tion mésadaptée renvoie à l’idée que le
                                               cela n’est pas fait dès le départ, elle permet   aussi en jeu. En effet, Waller (2001) pro-
système fonctionne moins bien qu’avant
                                               aussi d’accorder un sens positif à l’évé-        pose l’image de l’effet de vagues (ripple
l’événement difficile. La réintégration
                                               nement traumatisant en lui trouvant une          effect) pour expliquer qu’un facteur isolé
homéostatique fait référence à un retour
                                               raison d’être (mission) ou en y découvrant       peut prendre une ampleur plus ou moins
au niveau de fonctionnement équivalent,
                                               des gains et des bénéfices a posteriori          importante, selon le contexte. Comme une
ce qui ne veut pas dire identique, à celui
                                               (apprentissages).                                pierre jetée dans l’eau, les vagues qu’un
d’avant. La réintégration résiliente définit
                                                                                                élément crée peuvent prendre de l’am-
les systèmes qui arrivent à développer un
                                                  LA RÉSILIENCE                                 pleur si rien ne les interceptent. Ainsi,
niveau de fonctionnement supérieur à celui
                                                  Certains auteurs (Waller, 2001 ;              peu importe le nombre réel de facteurs de
qu’ils avaient auparavant, grâce ou à la
                                               Richardson, 1990) ont identifié des fac-         risque par rapport à ceux de protection,
suite de l’événement traumatique.
                                               teurs de protection pouvant jouer un rôle        leur importance relative pour l’individu
    L’utilisation de comportements rési-
                                               dans la capacité d’être résilient pour cer-      et le système familial est ce qui aurait le
lients permet donc aux membres du sys-
                                               taines personnes ou systèmes. Ces fac-           plus d’impact sur la capacité de rebondir.
tème familial et au système lui-même de
                                               teurs peuvent être individuels, comme
s’adapter à cette situation difficile. Dans
                                               être positif et confiant en soi, familiaux,         CONCLUSIONS POUR
une famille, la résilience se joue tant au
                                               comme la bonne entente des parents et la            L’INTERVENTION
niveau individuel que familial. La rési-
                                               responsabilisation des enfants pour cer-            Nous savons donc maintenant que les
lience individuelle consiste en la capacité
                                               taines tâches de la maison, ou commu-            systèmes familiaux traversent un proces-
de chacun à se prendre en charge, à être
                                               nautaires, comme la sécurité du quartier         sus linéaire d’adaptation en même temps
proactif et à s’engager dans le processus
                                               et la présence de services adéquats. Bien

AUTOMNE 2009 / PRINTEMPS 2010                                       39                                                 FRONTIÈRES ⁄ VOL. 22, Nos 1-2
BOSS, P. (1999). Ambiguous Loss, Cam-
                                                                                                  bridge, MA, Harvard University Press.
                                FIGURE 3
                                                                                                  COHADON, F. (2000). Sortir du coma,
   PROCESSUS DE DEUIL DANS LA CHRONOLOGIE DU PROCESSUS D’ADAPTATION                               Paris, Odile Jacob.
                                                                                                  COULTER A. (1998). « Evidence based
                                                                                                  patient information », British Medical
                                                                                                  ­Journal, vol. 317, p. 225-226
                                                                                                  CYRULNIK, B. (1999). Un merveilleux
                                                                                                  ­malheur, Paris, Odile Jacob.
                                                                                                  DEGENEFFE, C.E. (2001). « Family care-
                                                                                                  giving and traumatic brain injury », Health
                                                                                                  and Social Work, vol. 26, no 4, p. 257-268.
                                                                                                  DELAGE, M. (2008). La résilience fami-
                                                                                                  liale, Paris, Odile Jacob.
                                                                                                  DESTAILLATS, J.-M., J.-M. MAZAUX et C.
                                                                                                  BELIO (2007). Le lien familial à l’épreuve du
                                                                                                  handicap et des soins, Service de ­médecine
                                                                                                  physique et de réadaptation du Dr Mazaux,
                                                                                                  CHU Pellegrin, France, en ligne, , consulté le 2010-07-26.
                                                                                                  DOK A, J.C.L. (1989). Disenfranchised
                                                                                                  Grief : Recognizing Hidden Sorrow, Toronto,
                                                                                                  Lexington Books.
                                                                                                  ERGH, T.C., R.A. HANKS, L.J. RAPPORT
                                                                                                  et R.D. COLEMAN (2003). « Social sup-
qu’ils en traversent un non-linéaire de          famille à travers une crise. Par exemple,        port moderates caregiver satisfaction with
deuil. Comme nous l’avons vu, ces proces-        on peut impliquer les proches dans la            life following TBI », The Journal of Clinical
                                                                                                  and Experimental Neuropsychology, vol. 25,
sus peuvent avoir différentes issues, selon      démarche, reconnaître leur expertise,
                                                                                                  no 8, p. 1090-1101.
les facteurs de protection et les facteurs       les informer, leur offrir du soutien, cer-
de risques qui entrent en jeu (Figure 3 :        ner leurs attentes et tenter autant que          FALLOWFIELD, L.J., V.A. JENKINS, H.A.
                                                                                                  BEVERIDGE (2002). « Truth may hurt but
Processus de deuil dans la chronologie du        possible d’y répondre, les encourager à          deceit hurts more : Communication in pal-
processus d’adaptation).                         bâtir un réseau de support, explorer leurs       liative care », Palliative Medicine, vol. 16,
    Ces données nous permettent de               projets de vie à moyen et à long terme,          p. 297-303.
nous demander ce que nous pouvons                respecter les valeurs et les croyances du        KOLAKOWSKY-HAYNER, S.A., K.D.
faire comme intervenant pour favoriser           système familial, mettre l’accent sur leurs      MINER et J. KREUTZER (2001). « Long-
la résilience des familles. Une partie de        forces, respecter leurs limites et les nôtres,   term life quality and family needs after trau-
la réponse vient du concept de « tuteur          référer au besoin, viser de petits change-       matic brain injury », Journal of Head Trauma
de résilience » (Delage, 2008 ; Cyrulnik,        ments, préparer la fin des interventions et      Rehabilitation, vol. 16, no 4, p. 374-384.
1999). Un tuteur de résilience est une per-      les informer des ressources disponibles à        KÜBLER-ROSS, E. (1981). Living with
sonne « capable d’accueillir la souffrance       court, moyen et long terme (réseautage)          Death and Dying, New York, Macmillan.
et d’aider à reprendre le cours de la vie »      (Lefebvre et al., 2007).                         LACERTE, J. et K. TAUPIER (2002). TAN-
(Delage, 2008, p. 22). En devenant un               En résumé, les interventions pouvant          DEM – Un cahier de bord destiné aux
tuteur de résilience, on permet aux per-         favoriser la résilience des familles restent à   proches des personnes ayant subi un trau-
sonnes en difficulté de grandir à travers        définir et à explorer. En attendant que cela     matisme crânio-cérébral (TCC) ou un acci-
                                                                                                  dent vasculaire cérébral (AVC), Montréal,
l’épreuve qu’elles vivent. Des petits gestes     soit fait, un travail de collaboration peut
                                                                                                  Centre de réadaptation Lucie-Bruneau.
pouvant sembler anodins, comme prendre           être réalisé avec les membres du système
le temps d’expliquer à un enfant comment         familial pour développer leurs facteurs de       LEFEBVRE, H., G. CLOUTIER et M.J.
                                                                                                  LEVERT (2007). « Dix ans après avoir
se forment les nuages, peuvent prendre           protection et minimiser leurs facteurs de        subi un traumatisme crânien : participation
une signification très importante pour la        risques. Devenir tuteur de résilience n’est      sociale et continuum de services », Interven-
personne. C’est la multiplication de ces         pas chose simple, ni même planifiable.           tion, vol. 127, p. 99-109.
gestes, ces petites attentions bien placées et   Par contre, devenir partenaire dans un           LEFEBVRE, H., C. DAVID, I. GÉLINAS,
non calculées, qui peuvent servir de trem-       moment difficile est réalisable et, qui sait,    D. PELCHAT, B. SWAINE, C. DUMONT,
plin à la résilience. Malheureusement, bien      peut-être deviendrez-vous ainsi la per-          B. MICHALLET, P. BOUDREAULT (2007).
que plusieurs pistes aient été identifiées       sonne qui permet aux membres du sys-             L’adéquation entre les besoins vécus par
pour déterminer comment devenir tuteur           tème familial déstabilisé de grandir dans        les proches de personnes ayant un trauma-
de résilience, aucune n’a de résultats assu-     l’adversité.                                     tisme craniocérébral et les services offerts
                                                                                                  par le continuum de soins, en collabora-
rés. Une personne peut être un tuteur de                                                          tion avec M.J. LEVERT, G. CLOUTIER et
résilience sans même le vouloir. Ainsi, la          Bibliographie                                 J. GAUVIN-LEPAGE, Montréal, Université
volonté de jouer ce rôle n’est pas synonyme         BOND, E., C. DRAEGER, B. MANDELCO             de Montréal (MSSS, REPAR, SAAQ, 2005-
de pouvoir le faire.                                et M. DONNELLY (2003). « Needs of family      2007), 70 p.
    Malgré la difficulté à identifier une           members of patients with severe traumatic     LEFEBVRE, H. et M.J. LEVERT (2005).
façon d’amener un système familial à être           brain injury. Implications for evidence-      « Traumatisme craniocérébral : de la souf-
                                                    based practice », Critical Care Nursing,      france à la résilience », Frontières, vol. 17,
résilient, plusieurs pistes d’intervention
                                                    vol. 23, no 4, p. 63-72.                      no 2, p. 53-58.
peuvent servir à bien accompagner une

FRONTIÈRES ⁄ VOL. 22, Nos 1-2                                         40                                           AUTOMNE 2009 / PRINTEMPS 2010
LEFEBVRE, H., M. VANIER, B. SWAINE,              PELCHAT, D. et H. LEFEBVRE (2005).                  ST-CHARLES, D. (1998). « La reconstitu-
   É. DUTIL, M. PÉPIN, P. ­FOUGEYROLLAS,            Apprendre ensemble, Le PRIFAM, Pro-                 tion identitaire des “proches-soignants” des
   et al. (2004). La participation sociale à long   gramme d’intervention interdisciplinaire            personnes traumatisées cranio-cérébrales »,
   terme des personnes ayant subi un trauma-        familial, Montréal, Chenelière – McGraw-            dans J.C. KALUBI, B. MICHALLET, N.
   tisme crânien et l’impact chez les proches,      Hill.                                               KORNER-BITENSKY et S. TÉTREAULT
   10 ans post-traumatisme, Montréal,                                                                   (dir.), Innovations, apprentissages et réa-
                                                    RICHARDSON, G.E., B.L. NEIGER, S.
   ­Université de Montréal.                                                                             daptation en déficience physique, Montréal,
                                                    JENSEN et K.L. KUMPFER (1990). « The
                                                                                                        IQ Éditeur, p. 97-103.
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                                                    ROCHETTE, A., N. KORNER-BITENSKY
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                                                                                                        vol. 71, no 3, p. 290-297.
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   « Managing as carers of stroke survivors :       Model, New York, Basic Books.                       Note
   Strategies from the field », International                                                         1. L’auteure du présent texte tient à souligner
                                                    SINNAKARUPPAN, I. et D.M. WILLIAMS
   Journal of Nursing Practice, vol. 10, no 3,                                                           l’importance de l’apport des travaux de la pro-
                                                    (2001). « Family carers and the adult head-
   p. 121-126.                                                                                           fesseure Hélène Lefebvre, qui ont particulière-
                                                    injured : A critical review of carers’ needs »,
                                                    Brain Injury, vol. 15, no 8, p. 653-672.             ment été pertinents pour le sujet traité ici.

AUTOMNE 2009 / PRINTEMPS 2010                                           41                                                    FRONTIÈRES ⁄ VOL. 22, Nos 1-2
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