Objectif 2020. L'agriculture familiale au coeur des politiques belges contre la faim
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POLICY BRIEF // OCTOBRE 2015 Objectif 2020. L’agriculture familiale au cœur des politiques belges contre la faim © PHOTO : JL BROCART – SOS FAIM
POLICY BRIEF // OCTOBRE 2015 Objectif 2020. L’agriculture familiale au cœur des politiques belges contre la faim. // 2 Objectif 2020. L’agriculture familiale au cœur des politiques belges contre la faim Bien que l’agriculture familiale soit au cœur des débats internationaux liés aux questions de sécurité alimentaire, d’agriculture et d’environnement depuis plusieurs années, le constat que dresse la Coalition contre la faim (CCF) aujourd’hui est contrasté : d’un côté il existe un large consensus sur l’importance d’un soutien à l’agriculture familiale et au droit à l’alimentation pour nourrir le monde de demain, mais de l’autre côté les orientations politiques et les mesures pour assurer ce soutien ne suivent pas. Le colloque organisé le 21 avril 2015 a eu pour objectif de présenter et de réaffirmer les acquis en matière de soutien à l’agriculture familiale et de droit à l’alimentation, de mettre en lumière les obstacles à leur mise en œuvre et d’identifier des pistes d’action pour y remédier à court et moyen termes. Le colloque s’est appuyé sur des contributions d’experts belges et internationaux et a rassemblé un large éventail de parties prenantes en Belgique afin d’enrichir la réflexion. UN CONSENSUS ET DES OBSTACLES De nombreux rapports d’experts ont établi l’importance doivent se concentrer sur une agriculture diversifiée et à d’un soutien à l’agriculture familiale dans une perspective petite échelle. de sécurité alimentaire. Publiée en 2008, l’Evaluation internationale des sciences et technologies agricoles A l’occasion du colloque du 21 avril, Olivier De Schutter, pour le développement (IAASTD) 1 est le plus important ancien Rapporteur spécial des Nations Unies sur le droit à d’entre eux. Il représente un travail de trois années l’alimentation (2008-2014) et actuel co-Président du Panel mené par quelque 400 experts du monde entier sous International d’Experts sur les Systèmes alimentaires les auspices de 7 organisations intergouvernementales, durables (IPES-Food), s’est félicité du consensus qui 30 gouvernements et 30 associations de la société civile se renforce autour du besoin de soutenir l’agriculture (ONG, groupes de producteurs et de consommateurs). familiale. Ce consensus s’est d’ailleurs concrétisé par la La conclusion majeure des experts de l’IAASTD peut proclamation de 2014 comme Année internationale de être résumée de la manière suivante : les systèmes l’agriculture familiale par les Nations Unies. Malgré ce alimentaires doivent être réformés pour faire face consensus, de nombreux obstacles empêchent une mise aux défis alimentaires, économiques sociaux et en œuvre effective de ce soutien : insécurité foncière et environnementaux futurs et, pour y parvenir, les efforts accaparement des terres et des ressources naturelles, 1 http://www.unep.org/dewa/Assessments/Ecosystems/IAASTD/tabid/105853/Default.aspx
POLICY BRIEF // OCTOBRE 2015 Objectif 2020. L’agriculture familiale au cœur des politiques belges contre la faim. // 3 faible soutien financier et investissements agricoles non cultures de rente et d’exportation ainsi que l’importation responsables, manque d’accès aux infrastructures et de denrées à bas prix en provenance des cultures aux intrants, faible organisation des petit-e-s agriculteur- subsidiées du Nord et décourage de manière très claire rice-s 2, etc. Il faut ajouter à cela la concurrence déloyale les gouvernements du Sud d’investir dans leurs petits de l’agro-industrie qui n’internalise pas les coûts agriculteurs et le développement de marchés locaux. sociaux et environnementaux que comporte son mode de production. Paradoxalement l’agriculture familiale Troisièmement, les composantes du système alimentaire contribue à de nombreux biens communs et rend de hérité du XXème siècle se renforcent (infrastructures, nombreux services sociaux, environnementaux, entres technologies, recherche et développement, pratiques autres, qui ne sont pas rétribués à leur juste valeur par agricoles, définition du prix du marché …) et favorisent les pouvoirs publics. les gros acteurs de l’agro-alimentaire qui jouissent d’un accès privilégié à la logistique et aux réseaux dans cette Au-delà de ces obstacles directs à l’agriculture économie alimentaire « low cost ». Ce système est donc familiale, Olivier De Schutter distingue plusieurs types très résistant au changement puisque ses différentes d’obstacles ne permettant pas d’opérer une transition composantes se soutiennent les unes les autres. vers des systèmes alimentaires plus durables. Il s’agit premièrement des obstacles de type cognitifs et Malgré ces obstacles, trois évolutions très importantes culturels. Selon lui, la transition vers des systèmes permettent l’optimisme : alimentaires durables demande un véritable changement de paradigme : • Des innovations sociales créent des alternatives au système dominant : chaines courtes, commerce • D’un paradigme fondé sur l’efficience à un paradigme équitable, marchés de niches où les producteurs fondé sur la résilience ; transforment eux-mêmes leurs produits ... • D u développement de chaînes mondiales • D e nouvelles alliances sont imaginées entre acteurs qui d’approvisionnement à la relocalisation des systèmes jusqu’à présent ne se voyaient pas d’intérêts communs : alimentaires ; organisations paysannes du Nord et du Sud, ONG de développement et environnementales, spécialistes • D ’une propension à tendre vers une spécialisation de la santé publique et ONG promouvant le droit à de chaque région à la diversification des productions ; l’alimentation et l’agriculture familiale, organisations de droits humains et organisations paysannes qui se • D es stratégies visant les économies d’échelle (par structurent de mieux en mieux … des grandes surfaces de monocultures) vers le développement d’exploitations à petite échelle au • U ne tendance à la recherche de cohérence au sein de systèmes agricoles plus diversifiés ; sein de l’UE et au niveau international dans le cadre du Comité de la sécurité alimentaire mondiale (CSA), • D ’une logique de soutien aux pauvres urbains via des que ce soit via le concept de cohérence des politiques denrées alimentaires bon marché à une protection pour le développement ou via des mécanismes de sociale qui donne les moyens aux habitants des villes gouvernance inclusifs qui visent à aligner les politiques de mieux se nourrir. agricoles, environnementales, de santé publique, de coopération au développement, de commerce Deuxièmement, les changements dans le Sud doivent et d’investissement sur les objectifs de sécurité aller de pair avec des changements dans le Nord. Il y alimentaire et du droit à l’alimentation. Cette cohérence a une interdépendance des réformes dans les différentes se concrétise également par une articulation forte entre régions du monde. Par exemple le commerce international les politiques agricoles et les politiques de réduction de libéralisé encourage les investissements dans des la pauvreté. Dans le texte, les termes de « producteurs » et « agriculteurs » sont utilisés de manière non restrictive. Ils englobent l’ensemble des producteurs alimentaires à 2 petite échelle (paysans, éleveurs, pêcheurs, peuples autochtones, …) tant femmes que hommes.
POLICY BRIEF // OCTOBRE 2015 Objectif 2020. L’agriculture familiale au cœur des politiques belges contre la faim. // 4 © PHOTO : COALITION CONTRE LA FAIM FEUILLE DE ROUTE VERS DES SYSTÈMES d’aliments à bas prix, mais elle a des conséquences sur la qualité, l’adéquation et la diversité de l’alimentation, la ALIMENTAIRES DURABLES justice sociale et la viabilité de l’environnement. La sécurité alimentaire et nutritionnelle des populations passe par La transition vers des systèmes alimentaires durables, des systèmes agro-alimentaires durables, basés sur une basés sur l’agriculture familiale, n’est donc plus une agriculture familiale qui prenne en compte la sécurité option, elle est une nécessité. Il devient urgent de d’accès des femmes et des hommes aux moyens de dépasser les consensus théoriques et de développer production (terre, outils, facteurs de production, crédits, des plans d’actions ambitieux et concrets pour engager moyens humains …). Le rôle des femmes pour assurer cette transition. Dans ce but, la Coalition contre la faim a la sécurité alimentaire et nutritionnelle des populations souhaité inviter ses principaux partenaires à approfondir la est évidemment incontournable et doit être intégré dans réflexion dans quatre domaines prioritaires dans lesquels toutes les politiques 4. des actions peuvent être entreprises dans les cinq ans à venir : la nutrition, les investissements agricoles, l’accès Pour soutenir des systèmes alimentaires durables aux marchés, la cohérence des politiques avec le droit à capables de répondre aux besoins alimentaires et l’alimentation. nutritionnels des populations prenant en compte les défis environnementaux, économiques et sociaux, les acteurs présents lors de l’atelier ont souligné l’importance L’importance de la nutrition dans d’adopter une approche multisectorielle, telle que les politiques de sécurité alimentaire promue et mise en œuvre par le Fonds belge de sécurité alimentaire (FBSA). L’engagement de la Belgique sur la Les politiques mises en place pour lutter contre l’insécurité sécurité alimentaire et nutritionnelle doit être maintenu alimentaire ont longtemps négligé la question de la nutrition 3. via cet instrument, ou tout autre démarche volontariste, L’agro-industrie peut en effet produire de grandes quantités et via une participation active à la FAO et au PAM. 3 Pour une précision des concepts et des liens entre sécurité alimentaire et 4 Voir Faire de la nutrition une thématique transversale dans les politiques de nutrition, voyez les fiches thématiques sur le site de la Coalition contre la faim : coopération au développement, Policy Brief de la Coalition contre la faim, http://www.coalitioncontrelafaim.be/publications/nutrition-securite-alimentaire/ octobre 2014.
POLICY BRIEF // OCTOBRE 2015 Objectif 2020. L’agriculture familiale au cœur des politiques belges contre la faim. // 5 Mesures à mettre en œuvre : Nécessité d’investissements agricoles responsables • Etablir un mécanisme de monitoring, de rappor tage et de débat public concernant le respect des L’agriculture familiale ne bénéficie pas des moyens engagements pris par la Belgique en matière de alloués à l’agro-industrie par les investisseurs, qu’ils sécurité alimentaire et nutritionnelle, notamment soient publics ou privés. Or comme l’a démontré le dans le cadre du Comité pour la sécurité rapport IAASTD de 2008 et d’autres rapports, il est urgent alimentaire mondiale : ODD qui intègrent le d’investir dans des systèmes agricoles et alimentaires qui nutrition, création d’un outil abordant la nutrition assurent à la fois la sécurité alimentaire et la réalisation du de façon multisectoriel (type FBSA), déclaration droit à l’alimentation, préservent les ressources naturelles de Rome sur la nutrition, cadre d’action sur la et la biodiversité, répondent aux défis du changement nutrition approuvé à l’occasion de la deuxième climatique, contribuent au renforcement des droits des Conférence Internationale sur la nutrition (CIN2). femmes, participent au développement de l’économie rurale etc. En d’autres termes, les investissements • Appuyer la recherche (proactivité des universités agricoles doivent être responsables. En outre, comme et financement adéquat mis à disposition par l’a souligné Jan Douwe Van der Ploeg, professeur l’Etat) sur les modèles agricoles (en particulier de sociologie rurale à l’université des Wageningen: l’agriculture biologique et l’agroécologie) contri l’investissement dans la production alimentaire de petite buant à renforcer durablement la sécurité alimen échelle, avec des projets ciblés, des moyens simples, taire et nutritionnelle. des marchés de petite taille mènent davantage au développement rural que les projets à grande échelle 5 . • Adapter les modalités d’accès aux financements de la coopération belge pour favoriser les synergies Malgré le fait que les agriculteurs soient reconnus comme entre acteurs pour une approche multisectorielle étant les principaux investisseurs agricoles, ils ont des et multi-acteurs (type FBSA) qui intègrent la difficultés d’accès au crédit parce que le rendement question de la nutrition de manière transversale. financier de leurs exploitations est faible et risqué. Même si certains organismes de financement comme • Assurer l’intégration et la valorisation du rôle Alterfin investissent dans les filières, la plupart de ces primordial des femmes dans les programmes organismes sont inadaptés aux besoins des agriculteurs d’amélioration de la sécurité alimentaire et nutri familiaux, ou inaccessibles du fait de leur éloignement tionnelle financés par la Belgique : renforcement géographique. Dans le cadre de la réforme de la société de l’accès des femmes à l’éducation, aux res belge d’investissement BIO, la Coalition contre la faim sources et au pouvoir de décision, analyse et avait émis une série de recommandations afin que BIO prise en compte de leurs besoins spécifiques. prenne mieux en compte les besoins de l’agriculture familiale du Sud 6. Malheureusement les exigences de • Prioriser l’appui aux systèmes de production rendement sont restées les mêmes et la somme minimale économiquement, socialement et environnemen d’investissement a été revue à la hausse, ce qui éloigne talement plus durables et diversifiés et la val encore un peu plus la possibilité pour BIO de soutenir orisation adéquate de la production locale dans directement l’agriculture familiale. l’alimentation des populations dans les stratégies et projets de développement belge. Par ailleurs, les investissements agricoles sont en majorité privés et négligent les infrastructures et les services • P rioriser les circuits courts et les systèmes locaux de publics, les organisations agricoles, l’organisation des transformation, commercialisation et distribution. marchés, etc. Et lorsque les gouvernements s’occupent d’investir dans l’agriculture, ils privilégient souvent des modèles agricoles de type « révolution verte ». De nouveaux modèles d’investissements sous forme 5 Voir, Paysans et Entrepreneurs : Investir dans l’agriculture des petits exploitants 6 Voir Accès au crédit pour l’agriculture familiale. Comment BIO peut-elle devenir pour la sécurité alimentaire, Rapport du Groupe d’Experts de Haut Niveau sur réellement pertinente pour le développement? Policy Brief de la Coalition contre la sécurité alimentaire et la nutrition, Juin 2013 la faim, octobre 2013.
POLICY BRIEF // OCTOBRE 2014 2015 Objectif 2020. L’agriculture familiale au cœur des politiques belges contre la faim. // 6 © PHOTO : JL BROCART – SOS FAIM de partenariats publics-privés (PPP) n’ont pas démontré respectent les Directives volontaires pour une qu’ils répondent aux besoins d’investissements de gouvernance responsable des régimes fonciers l’agriculture familiale, au contraire ils ont tendance à applicables aux terres, aux pêches et aux forêts favoriser les intérêts des grands investisseurs, en faisant dans le contexte de la sécurité alimentaire largement porter les risques de ces investissements sur nationale, et plus largement les droits humains les petits agriculteurs 7. des populations locales. Mesures à mettre en œuvre : • Assurer la participation des organisations de producteurs (OP) à l’orientation des investis • Changer le mandat de BIO afin qu’elle puisse sements agricoles soutenus par des fonds belges, investir dans des projets cadrant avec les objectifs qu’ils soient privés, publics ou publics-privés, et de la Note stratégique agriculture et sécurité les renforcer à cet effet, afin de garantir que ces alimentaire, plus risqués mais visant à un meilleur investissements répondent au mieux eux aux impact sur le développement. besoins prioritaires formulés par ces OP. • Garantir la réalisation d’études d’impacts indé • Encourager les gouvernements des pays parte pendantes approfondies ainsi qu’un mécanisme naires à définir des stratégies nationales de de suivi de tout projet d’investissement public, nature à favoriser les investissements des petits privé ou public-privé impliquant des fonds exploitants, comme recommandé par le Groupe belges, notamment des investissements soutenus d’experts de haut niveau sur la sécurité alimen financièrement par BIO, pour s’assurer qu’il taire et la nutrition 8. 7 Voir Willoughby, Robin, Moral Hazard? ‘Mega’ public-private partnerships in 8 Groupe d’experts de haut niveau sur la sécurité alimentaire et la nutrition, African agriculture, Oxfam, September 2014. Paysans et entrepreneurs : investir dans l’agriculture des petits exploitants pour la sécurité alimentaire, juin 2013.
POLICY BRIEF // OCTOBRE 2015 Objectif 2020. L’agriculture familiale au cœur des politiques belges contre la faim. // 7 • S’engager avec les gouvernements des pays Du côté des marchés privés, les petits agriculteurs partenaires à investir davantage dans l’agriculture concluent généralement des contrats commerciaux avec familiale, diversifiée, résiliente et adaptée à des intermédiaires à des prix souvent peu avantageux. son environnement, dans une perspective de Le regroupement en organisations de producteurs (OP) souveraineté alimentaire des populations. Cela va permettre aux agriculteurs d’améliorer leur pouvoir de implique notamment : négociation sur les prix, volumes et périodes de vente afin d’obtenir de meilleurs prix ainsi que des systèmes - U n accroissement des fonds alloués à de paiements qui leur évitent de devoir faire appel à des des projets d’investissements agricoles et crédits d’usuriers. Les OP peuvent aussi négocier avec alimentaires réellement plus durables ; les banques afin de faciliter l’accès des agriculteurs aux services financiers. Elles aident également les producteurs - U n soutien institutionnel et financier accru à développer des activités de transformation afin que aux initiatives développées de manière les producteurs gardent la production de valeur ajoutée autonome par les organisations et réseaux à leur niveau. Pour tous ces rôles socio-économiques paysans pour développer à plus large qu’elles jouent - sans parler de leurs rôles politiques, il est échelle une transition vers des systèmes essentiel de les encourager et les renforcer. agricoles et alimentaires plus durables, et agroécologiques en particulier ; Les contrats commerciaux poussent généralement à la spécialisation des cultures, or la résilience d’une - U n accroissement des dépenses pub exploitation et sa qualité passent par la diversification. liques visant à assurer la fourniture de Dans le but de maintenir ou de développer cette diversité, biens publics en région rurale : infrastruc il est nécessaire de renforcer les marchés locaux et ture (routes, électricité, technologies nationaux en protégeant et promouvant la production de l’information et la communication, et consommation de produits locaux et traditionnels, en systèmes d’irrigation durable), services de développant des circuits courts et stables et, surtout, en recherche, systèmes d’assurance contre garantissant des prix rémunérateurs aux producteurs. les risques liés aux aléas climatiques, installations de stockage, soins de santé, A une échelle plus globale, il est finalement nécessaire systèmes d’assainissement ... de mieux réguler les marchés mondiaux afin d’éviter une volatilité excessive des prix. Il est par ailleurs envisagé que les prix des matières agricoles intègrent les coûts Développement de l’accès aux marchés sociaux et environnementaux que comporte leur mode de production, ce qui permettrait de donner un avantage Le développement de l’agriculture familiale est souvent sur les marchés aux produits issus de l’agriculture limité par un manque d’accès des producteurs non pas familiale, souvent plus pourvoyeurs d’emplois et plus aux marchés en général, mais bien à des marchés respectueux de l’environnement. rémunérateurs. En effet, les agriculteurs manquent souvent d’accès physique aux marchés du fait de Mesures à mettre en œuvre : l’absence d’interventions publiques en matière de routes, de dessertes agricoles, d’infrastructures de • Améliorer l’accès à des marchés rémunérateurs, stockage, ou encore de législation et d’organisation des par une intervention publique sur le long terme et marchés, autant d’éléments représentant des sources des politiques agricoles fortes. importantes de coûts ou de pertes. Les pouvoirs publics doivent donc mener des politiques agricoles fortes et • Renforcer les organisations de producteurs afin inclusives. Les politiques d’achats institutionnels auprès qu’elles améliorent encore leurs rôles écono des petits producteurs locaux et nationaux (similaires mique, politique et social notamment dans les au Programme d’Acquisition d’Aliments- PAA brésilien) négociations avec les acteurs de la chaîne de sont une des solutions que peuvent mettre en place production et les pouvoirs publics. les politiques pour offrir des débouchés aux petits agriculteurs, mais également pour renforcer leur position • Appuyer le développement des systèmes d’infor d’interlocuteurs crédibles sur les marchés. mation de marchés afin de mieux identifier et
POLICY BRIEF // OCTOBRE 2015 Objectif 2020. L’agriculture familiale au cœur des politiques belges contre la faim. // 8 © PHOTO : TRIAS analyser les oppor tunités de marchés et que les ancré dans le droit de l’UE via l’article 208 du Traité de OP et producteurs puissent développer leur stra Lisbonne et dans le droit belge via les articles 2, 8 et 31 tégie de vente en fonction. de la loi du 19 mars 2013 relative à la coopération au développement. En Belgique, plusieurs mécanismes ont • Développer les capacités de transformation des été mis en place afin d’assurer la CPD. Il est encore trop producteurs afin qu’ils gardent la production et tôt pour en tirer un bilan mais il est néanmoins déjà utile les retombées financières de la valeur ajoutée à d’attirer l’attention des décideurs politiques sur plusieurs leur niveau. points : l’importance de définir la cohérence des politiques de développement en fonction des droits humains, la • Appuyer le développement de bonnes procé coordination entre les différents niveaux institutionnels dures de contractualisation entre producteurs et de décision (au sein de la Belgique mais également de acheteurs. l’Union européenne) ; la nécessité d’une veille d’impact élargie où la société civile pourrait avoir un rôle à jouer ; • Défendre le besoin crucial de régulation du com l’instauration de mesures d’accompagnement permettant merce international afin qu’il ne contrevienne pas le suivi, la révision des politiques mises en œuvre et des aux droits humains et qu’il n’engendre pas une mesures de compensation en cas d’impacts négatifs ; trop grande volatilité des prix. la définition de critères pour objectiver la cohérence, y compris sur les principes des droits humains et de • Promouvoir l’intégration des externalités sociales développement durable. et environnementales des produits afin de favoriser les produits issus de l’agriculture familiale. En matière de sécurité alimentaire et d’agriculture, la Note stratégique agriculture et sécurité alimentaire de la DGD fixe clairement les priorités de la coopération Dans une perspective de cohérence belge, qui vise à « soutenir une agriculture familiale des politiques pour le développement humaine, professionnelle et économiquement rentable, dans le respect des principes du droit à l’alimentation et Ces dernières années, le concept de Cohérence des de l’égalité entre les genres ». politiques pour le développement (CPD) a été légalement
POLICY BRIEF // OCTOBRE 2015 Objectif 2020. L’agriculture familiale au cœur des politiques belges contre la faim. // 9 © PHOTO : CYNTHIA VERTESSEN Malgré cet engagement en faveur de l’agriculture • Ancrer clairement les mécanismes de CPD dans familiale et du droit à l’alimentation, les ONG ont mis un cadre basé sur les droits humains, visant en en exergue plusieurs exemples d’incohérence des particulier le respect, la protection et la réalisation politiques dans différents domaines 9 : les accords de du droit à l’alimentation. commerce et d’investissement ratifiés par la Belgique malgré les impacts négatifs sur les petits agriculteurs • Etablir la transversalité de la CPD à tous les familiaux (ex. Accords de partenariat économiques niveaux dans les processus de décision politique avec les pays ACP), les politiques de soutien aux (à l’exemple du Gender Mainstreaming). agrocarburants, l’opposition de la Belgique au processus de la Déclaration des Nations Unies sur les droits • Investir le législatif d’une capacité de suivi et des paysans, le non-respect des engagements sur le de contrôle plus important sur l’exécutif dans financement des projets d’adaptation au changement l’application de la CPD. climatiques, le manque de régulation sur la spéculation financière, etc. • Obtenir une plus grande transparence des mécanismes de décision et de mise en œuvre Il est donc nécessaire de renforcer les outils et en y renforçant notamment la participation de la mécanismes de cohérence mis en place afin que leur société civile (y compris la représentation des portée soit plus contraignante. organisations de producteurs du Sud). Mesures à mettre en œuvre : • R enforcer la redevabilité des décideurs politiques par l’établissement de dispositifs récurrents de • Assurer l’effectivité des mécanismes institution monitoring, l’instauration de voies de recours nels de cohérence en leur donnant les moyens pour les victimes, et l’obligation de rendre des humains et financiers nécessaires. comptes sur les cas d’incohérence, etc. 9 Voir Une cohérence des politiques pour le droit à l’alimentation, Policy Brief de la Coalition contre la faim, avril 2014.
POLICY BRIEF // OCTOBRE 2015 Objectif 2020. L’agriculture familiale au cœur des politiques belges contre la faim. // 10 © PHOTO : CYNTHIA VERTESSEN OBJECTIF 2020 : L’AGRICULTURE La Note stratégique pour le secteur de l’agriculture et la sécurité alimentaire représente déjà une bonne base FAMILIALE AU CŒUR DES POLITIQUES pour une politique de coopération qui entend résolument BELGES CONTRE LA FAIM s’investir en faveur de l’agriculture familiale durable. Les mesures mises à jour durant le colloque et présentées Lors de son intervention au colloque organisé par la ci-dessus permettront de renforcer ce soutien et cet Coalition contre la faim le 21 avril 2015, le Ministre de investissement. Une des forces de la politique belge la coopération au développement a répété la nécessité de coopération en matière de sécurité alimentaire de soutenir l’agriculture familiale parce que c’est elle qui repose sur les nombreux espaces de coordination et de nourrit 80% de la population mondiale, et qui continuera dialogue. La Coalition contre la faim entend continuer à le faire dans le futur, parce qu’elle préserve davantage à alimenter ces espaces et pousser les politiques vers l’environnement et offre davantage d’emplois que toujours plus de cohérence, de soutien aux agriculteurs l’agro-industrie. familiaux et leurs organisations et de dialogue entre les acteurs belges agissant pour l’agriculture familiale et la sécurité alimentaire. CONTACTS Note rédigée au nom de la Coalition contre la faim par : Caroline Amrom (Collectif Stratégies alimentaires) Jonathan de Patoul (Défi Belgique Afrique) Jean-Jacques Grodent (SOS Faim) Nathalie Janne d’Othée (CNCD-11.11.11) Thierry Kesteloot et Stéphane Parmentier (Oxfam Solidarité) Gilles Michelin (ADG) Plus d’infos : www.coalitioncontrelafaim.be/
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