PARLEMENT - Observatoire du Plurilinguisme
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554 (2017-2018) — No 1 554 (2017-2018) — No 1 PARLEMENT DE LA COMMUNAUTÉ FRANÇAISE Session 2017-2018 21 NOVEMBRE 2017 PROPOSITION DE RÉSOLUTION RELATIVE À LA PROMOTION DE L’ USAGE DU FRANÇAIS DANS LES INSTITUTIONS EUROPÉENNES ET À LA REVALORISATION DU MULTILINGUISME SUITE AU B REXIT DÉPOSÉE PAR M. HAMZA FASSI-FIHRI, MMES CHRISTIANE VIENNE, FRANÇOISE BERTIEAUX, JOËLLE MAISON ET VÉRONIQUE SALVI, MM. JEAN-CHARLES LUPERTO ET GAËTAN VAN GOIDSENHOVEN. R ÉSUMÉ Le Brexit a suscité plusieurs questionnements par rapport à la manière dont l’Union européenne va dé- sormais se comporter sans le Royaume-Uni et entraîne un certain nombre d’enjeux et d’opportunités. La revalorisation du multilinguisme en fait partie, vu que désormais, l’anglais ne sera plus considéré stricto sensu comme langue officielle de l’Union européenne. En effet, l’Irlande et Malte, seuls pays anglophones, ont respectivement le gaélique et le maltais comme langue d’adhésion. Pourtant, les faits tendent à démon- trer que l’anglais garde une place prépondérante en tant que langue de travail et dans la communication de nombreux services et agences exécutives, au détriment parfois des autres langues européennes. En tant que représentants des Francophones de Belgique, les auteurs de la présente proposition entendent saisir cette opportunité pour promouvoir le français et le multilinguisme au sein des institutions européennes et contribuer ainsi à un rapprochement entre celles-ci et les citoyens qu’elles sont censées servir.
554 (2017-2018) — No 1 (2) TABLE DES MATIÈRES D ÉVELOPPEMENTS 3 P ROPOSITION DE RÉSOLUTION RELATIVE À LA PROMOTION DE L’ USAGE DU FRAN - ÇAIS DANS LES INSTITUTIONS EUROPÉENNES ET À LA REVALORISATION DU MUL - TILINGUISME SUITE AU B REXIT 4
(3) 554 (2017-2018) — No 1 D ÉVELOPPEMENTS Le français est la langue parlée par les citoyens avant tout rédigés en anglais. Il suffit, pour s’en de la Fédération Wallonie-Bruxelles de même que convaincre, de consulter les sites des 53 agences, par 290 millions d’autres francophones établis sur services et directions générales. Les onglets consa- les cinq continents. Selon les estimations de l’or- crés à l’actualité y sont, majoritairement, unique- ganisation internationale de la Francophonie ce ment rédigés en anglais ! Or rien ne justifie cet chiffre pourrait plus que doubler vu l’évolution appauvrissement de la diversité linguistique, d’au- de la démographie du continent africain pour at- tant que la Cour Européenne de Justice a rap- teindre 760 millions de locuteurs en 2060, plaçant pelé, dans un arrêt du 27 novembre 2012 consa- ainsi le français parmi les trois langues les plus cré aux avis de recrutement, que ceux-ci doivent utilisées au monde. Au vu de ces chiffres, on se- être publiés dans toutes les langues officielles de rait en droit de penser que le français figure en l’Union et que rien ne justifie la maîtrise d’une se- bonne place dans les langues utilisées au sein des conde langue parmi un choix arbitrairement limité instances internationales. à trois langues officielles. Il est vrai que depuis la création des Nations Le 23 juin 2016, le Royaume-Uni a voté par unies, le français est à la fois langue officielle référendum, sa sortie de l’Union européenne. Ce et langue de travail des principaux organes de Brexit a suscité de nombreuses questions parmi l’ONU. On le retrouve aussi aux côtés de l’anglais lesquelles la question linguistique et le statut de dans des instances telles que le comité internatio- l’anglais. Seules Malte et l’Irlande comptent en- nal olympique, l’OTAN ou encore le Conseil de core l’anglais comme langue officielle alors même l’Europe. que leur langue d’appartenance à l’Union est res- pectivement le maltais et le gaélique. Avec le Au niveau de l’Union européenne, les choses Brexit, l’anglais ne sera plus langue officielle de sont moins simples, malgré l’histoire et la régle- l’UE. Pourtant, son poids au sein des Institutions mentation en vigueur. D’abord l’histoire. Monet, reste, on l’a vu, prépondérant, et de loin. Schuman sont les premiers à avoir proposé la Selon l’Eurobaromètre spécial numéro 386 de communauté du charbon et de l’acier, de même février/mars 2012 (soit bien avant le Brexit), le que la communauté européenne, quelques années français était la langue partagée par 60 millions plus tard. La Belgique, avec le Benelux, ne sont de locuteurs européens, soit la 4è langue en im- pas en reste. Sur les six membres fondateurs trois portance démographique avec 12% derrière l’al- comptent le français comme langue officielle. Sa lemand (16%), l’italien (13%, chiffre identique place est donc prépondérante. Avec le traité de pour l’anglais à l’époque) et devant l’espagnol et Rome, instituant la Communauté européenne, un le polonais (8%)(1) premier règlement est adopté, portant sur le fonc- tionnement général. Le règlement n˚ 1/58 daté du Avec le contexte politique nouveau faisant 15 avril 1958 a veillé à ce que les langues officielles suite au Brexit, il apparait important aux auteurs de l’UE soient celles des Etats membres qui la com- de la présente résolution d’examiner la situation posent. Cette année-là, il y en avait 4 : l’allemand, au niveau national et européen, de réévaluer les le français, l’italien et le néerlandais. Mais au fur et équilibres linguistiques au sein des Institutions eu- à mesure des élargissements successifs, ce nombre ropéennes, de réaffirmer leur attachement à la di- a augmenté pour s’établir aujourd’hui à 24. Offi- versité linguistique et culturelle tout en promou- ciellement donc, le multilinguisme et le respect de vant l’usage du français. la diversité linguistique sont de rigueur et chacune des 24 langues est considérée sur le même pied d’égalité. Mais dans les faits, les agents des insti- tutions et organismes européens qui doivent com- muniquer entre eux au quotidien ont eu tendance à privilégier certaines langues de travail parmi les- quelles, l’allemand, le français et l’anglais. Depuis les années 90 et notamment suite aux élargisse- ments à l’est, cette érosion s’est accélérée pour finir par faire de l’anglais la quasi seule langue utilisée par les fonctionnaires européens. Désormais, les conférences de presse se font majoritairement en anglais, les réunions se tiennent en anglais, les documents sont d’abord et (1) http ://ec.europa.eu/commfrontoffice/publicopinion/archives/ebs/ebs_386_fr.pdf
554 (2017-2018) — No 1 (4) P ROPOSITION DE RÉSOLUTION RELATIVE À LA PROMOTION DE L’ USAGE DU FRANÇAIS DANS LES INSTITUTIONS EUROPÉENNES ET À LA REVALORISATION DU MULTILINGUISME SUITE AU B REXIT En ce qui concerne le multilinguisme en vi- m) Considérant plus particulièrement son chapitre gueur dans l’Union européenne consacré aux « pratiques linguistiques dans le fonctionnement des institutions européennes » a) Vu le règlement CE n˚1/1958 qui fixe le régime qui démontre le déclin de l’usage du français et linguistique et définit les langues officielles et des autres langues au profit de l’anglais ; de travail dans les institutions européennes ; En ce qui concerne la Francophonie b) Considérant que l’Union européenne compte n) Vu l’accord entre la Communauté française, aujourd’hui vingt-quatre langues officielles ; la France, le Grand-Duché de Luxembourg, et c) Considérant que les conclusions du Conseil du l’ACCT (Agence de Coopération Culturelle et 12 juin 1995 sur la diversité linguistique et le Technique) en janvier 2002 visant à créer un plurilinguisme dans l’Union européenne souli- plan d’action pour la défense du français au gnaient qu’il convient de préserver la diversité sein des institutions européennes ; linguistique et de promouvoir le plurilinguisme dans l’Union, dans l’égal respect des langues de o) Vu l’accord passé par la COCOF et l’Alliance l’Union et à la lumière du principe de la subsi- Française Bruxelles Europe, et le CGRI (Com- diarité ; missariat Général aux Relations Internatio- nales) en 1996 visant à dispenser des cours de d) Vu la résolution sur la diversité linguistique français aux diplomates et journalistes en poste dans l’Union européenne adoptée par l’assem- à Bruxelles ; blée nationale française le 6 janvier 2004 ; e) Vu l’arrêt du 27 novembre 2012 de la CJUE qui p) Vu la déclaration des chefs d’Etats et de gouver- condamne la Commission européenne à respec- nements de la Francophonie adoptée le 27 no- ter le multilinguisme dans ses avis de recrute- vembre 2004 lors du sommet de Ouagadougou ment ; et qui entendait notamment « assurer le sta- tut et la promotion du français comme grande f) Constatant que l’anglais tend à devenir la langue de communication sur le plan interna- langue de travail unique utilisée par les fonc- tional et comme outil d’élaboration et de trans- tionnaires de la commission européenne por- mission des savoirs. » ; tant ainsi atteinte au principe de pluralisme lin- guistique institué ; q) Vu le Vade-mecum relatif à l’usage de la langue française dans les organisations internationales g) Regrettant que l’essentiel de la communication adopté par la 22è session de la Conférence mi- des institutions européennes vers le grand pu- nistérielle de la Francophonie à Bucarest, le 26 blic et notamment les sites internet officiels, ne septembre 2006 ; se font pas dans toutes les langues mais princi- palement en anglais ; r) Vu le document de suivi du Vade-mecum re- h) Estimant que le strict respect du multilinguisme latif à l’usage de la langue française dans les peut contribuer à un rapprochement entre le ci- organisations internationales conçu pour « se toyen et ses institutions ; doter des moyens de renforcer, en toutes cir- En ce qui concerne la place du français dans constances, la présence de la langue française l’Union européenne au service du multilinguisme. » ; i) Considérant que la politique étrangère et de sé- s) Vu la résolution relative à la nécessité d’une co- curité commune (PESC) a pour régime linguis- opération renforcée au sein de la Francopho- tique l’anglais et le français et que le Comité des nie sur le plurilinguisme et l’usage du français Représentants Permanents (COREPER) utilise dans les organisations internationales adoptée l’anglais, le français et l’allemand ; par l’APF le 8 juillet 2010 à Dakar ; j) Vu que la procédure à la Cour de justice de En ce qui concerne le Brexit l’Union européenne et au Tribunal de première t) Vu la sortie du Royaume-Uni de l’Union eu- instance se déroule en français ; ropéenne (Brexit) votée par referendum par le k) Considérant que les principales institutions de Royaume-Uni le 23 juin 2016 ; l’Union Européenne se situent dans des villes u) Considérant que désormais seuls les citoyens francophones ou françaises, telles Bruxelles, maltais et irlandais utilisent l’anglais comme Luxembourg et Strasbourg ; langue officielle bien que ce soient le maltais l) Considérant le « Rapport au Parlement sur et le gaélique qui aient été introduits par eux l’emploi de la langue française » publié en no- comme première langue officielle respective au- vembre 2016 ; près de l’Union européenne ;
(5) 554 (2017-2018) — No 1 v) Considérant que cet évènement implique la né- H. Fassi-Fihri cessité de mettre à jour les statistiques au sujet des langues officielles de l’Union européenne. C. Vienne Le Parlement de la Fédération Wallonie- F. Bertieaux Bruxelles J. Maison demande au Gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles : V. Salvi 1o de proposer à la Francophonie en tant qu’or- J.-C. Luperto ganisation internationale de mettre à profit la période de négociation liée au Brexit pour in- G. Van Goidsenhoven tervenir auprès de l’Union européenne afin de rendre au français la place qui lui revient ; 2o de prendre une initiative avec des Etats membres de la Francophonie et de l’Union eu- ropéenne pour déterminer ensemble une stra- tégie en vue de promouvoir le français comme langue de travail au sein des instances euro- péennes ; 3o d’inviter ses autorités politiques, administra- tives et membres de sa diplomatie à privilégier l’usage du français lorsqu’ils doivent intervenir par des prises de parole et de communication dans des contextes multilingues ; 4o de promouvoir des initiatives de promotion du français visant les fonctionnaires européens et le monde professionnel qui gravitent au- tour de l’Union européenne (formations en langue française, stages, mise à disposition et échanges d’experts francophones, visites cultu- relles dans les capitales des institutions euro- péennes (toutes francophones, . . .) ; 5o d’agir avec et/ou auprès du Gouvernement fé- déral afin a. de travailler de concert avec les représen- tants des autres Etats membres afin d’accen- tuer la promotion et le respect des principes du multilinguisme et de la diversité´ culturelle ainsi que le statut des langues officielles ; b. de rendre accessible, plus rapidement et de manière systématique, par les institutions et or- ganismes de l’UE qui ne le font pas encore, une traduction française et des autres langues offi- cielles de l’Union de tout document publié quel que soit son support ; saisira l’Assemblée parlementaire de la Fran- cophonie/Région Europe de cette question afin de mobiliser l’ensemble des parlementaires nationaux d’Europe auprès de leurs gouvernements respec- tifs ; communiquera la présente résolution au Par- lement européen en lui suggérant de réactiver le ré- seau des parlementaires européens francophones.
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