QUAND LA FAVELA DESCENDRA DES COLLINES ET QUE CE N'EST PAS CARNAVAL
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... C’est l’heure d’allumer des feux de joie ! JOURNAL DU 14e FESTIVAL FILMER LE TRAVAIL NUMÉRO 6 / SAMEDI 25 FÉVRIER 2023 ÉDITO Le festival se termine, mais les luttes continuent. Contitnuons de nous battre pour de bonnes conditions de travail, et pour nos retraites ! Rendez-vous le 1er, le 7 et le 8 mars dans les rues de Poitiers. URBAN SOLUTIONS, DE ARNE HECTOR, VINICIUS LOPES, LUCIANA MAZETO ET MINZE TUMMESCHEIT — DOCUMENTAIRE — COMPÉTITION INTERNATIONALE QUAND LA FAVELA DESCENDRA DES COLLINES ET QUE CE N’EST PAS CARNAVAL Le film semble être une suite de Pour faire le lien entre ces deux Quand la favela descendra des collines et que tableaux. Les cadres, fixes pour la plu- périodes, il y a des peintures insérées ce n’est pas carnaval part, dépeignent dans une esthétique derrière les paroles. Des peintures de Personne ne restera pour le grand défilé chaleureuse la ségrégation spatiale et l’époque coloniale où les blancs et les A l’entrée un feu d’artifice pour tous ceux qui sociale qui a lieu dans les quartiers riches noirs sont strictement séparés, chacun n’ont jamais vu ça du Brésil. occupant un rôle particulier. Finale- De fusils, de mitraillettes et de grenades C’est un film à deux voix décrivant ment l’histoire n’est pas révolue, elle est C’est la guerre civile deux situations opposées. La première actuelle et la séparation toujours pré- est celle d’un riche artiste allemand venu sente. Les riches se sont barricadés dans Quand la favela descendra des collines s’installer au Brésil pendant la période de grandes tours pour se protéger des et que ce n’est pas carnaval coloniale. La deuxième est celle des pauvres, et ce sont ces mêmes pauvres il n’y aura pas de temps pour la répétition gardiens des résidences huppées bré- qui montent la garde à l’entrée de ces générale siliennes. Entre les deux se trouvent les tours. Tout est calme et ordonné, jusqu’à Chaque école de samba se transformera en murs, les grillages, les vitres, les barrières la fin où l’ordre est renversé. troupe de combat et les caméras. Urban solutions est une proposi- La dramaturgie sera celle de la guerrilla Le rythme est lent, comme la journée tion pour un autre ordre social qui invite Et l’allégorie un arsenal d’armes de ces gardiens condamnés à attendre à contempler le présent pour mieux Et les paroles chanteront une ville divisée que quelque chose se passe, semblable le modifier. Le jour où ce sera l’enfer sur l’avenue aux résidences filmées. Le grain et le Pauline cadre lui donnent un aspect ancien, légè- Quand la favela descendra des collines rement dépassé. On se croirait presque et que ce n’est pas carnaval” immergé dans une époque révolue. (O dia em que o morro descer e não for carnaval, Wilson Das Neves)
NOUS ENFUIR SUR UN CHAR AILÉ, DE NOA ROQUET - DOCUMENTAIRE— COMPÉTITION INTERNATIONALE MÉMOIRE D’OUVRIÈRES Nous enfuir sur un char ailé est un film hybride entre docu- La présence d’un discours en voix off travaillé qui accom- mentaire et fiction de la cinéaste Noa Roquet. Ce film dresse le pagne la lutte pour ces femmes, notamment par la présence portrait d’une femme ouvrière dans les années 1970 à Genève. de musique à l’écran. La cinéaste nous plonge dans cette société patriarcale et Un militantisme puissant surgit à la fin du film et imprègne les inégalitaire envers les femmes. Une forme cinématographique images d’archives de liberté et d’espoir pour ces femmes qui simple et puissante s’appuyant sur des images d’archives qui ont souffert. nous montrent la pénibilité et la souffrance de ces femmes Bien que le noir et blanc du film et le décor nous rappellent ouvrières et mères au foyer au milieu des années 1970. que cela se passe dans les années 70, la lutte de ses femmes Une injustice prise à contrepied par la cinéaste par des choix renvoie toujours à des revendications qui sont encore d’actualité esthétiques avec des jeux de couleurs et une solidarité féminine en 2023 : égalité de salaire et reconnaissance de leur “métier” naissante qui donne espoir aux personnages. de mère. Armand et Anaëlle MÉDÉE EN VOIX OFF Les images de ton film proviennent d’ar- ENTRETIEN AVEC NOA ROQUET À PROPOS DE SON FILM NOUS ENFUIR SUR UN CHAR AILÉ journalistes en voix off expliquaient qu’à pliqué de construire une voix off qui ne chives suisses ? Est-ce la découverte chaque fois ils auraient voulu filmer des soit pas une plate redondance de l’image de ces archives qui a inspiré le film ou femmes sur leur lieu de travail et que ça ni un hors sujet, et qui établisse un dia- tu avais déjà une idée de ce que tu vou- avait été refusé par la direction de l’usine. logue avec l’image, un contrepoint. Tra- lais faire ? Donc j’avais très peu d’images. Alors j’ai vailler à deux m’a vraiment permis d’écrire Je suis en section montage à la Haute été picorer dans d’autres reportages. J’ai cette voix off avec une certaine liberté par école d’art et design (HEAD) à Genève. passé des heures et des heures à cher- rapport à l’image, de ne pas l’enfermer C’est un film réalisé dans le cadre d’un cher dans des reportages qui ne parlaient dans la stricte description. atelier sur la mémoire ouvrière, car les pas forcément de la condition féminine nouveaux bâtiments dans lesquels l’école des images qui pouvaient être éloquentes. Pourquoi avoir fait le choix de super- s’est installée il y a deux ans sont ceux poser un texte actuel, bien que inspiré d’une ancienne usine. L’idée était de reve- D’où provient le discours en voix off ? de romans de plusieurs époques, à des nir sur l’histoire des murs. Est-ce qu’il provient aussi d’archives ? images du passé ? Dans cet atelier on devait utiliser les C’est un long travail. Je suis tombé sur Les romans que j’ai utilisés viennent de archives de la RTS (Radio télévision une émission qui parlait de cette femme plusieurs époques différentes, du très suisse romande), la principale télé à Lausanne, qui, poussée par la détresse, ancien au très récent et je pense que la suisse. On avait accès à un stock d’ar- la misère économique et sociale, avait tué question de la position des femmes tra- chives qui existe depuis 1954. On était son enfant. Ce fait divers m’a frappée, et je verse les époques libre d’utiliser des archives plus ou moins l’ai tout de suite relié au mythe de Médée. récentes, et d’interpréter le thème de la J’ai d’abord eu l’idée de faire une réécri- Tu as utilisé des archives, des docu- mémoire ouvrière. ture féministe du mythe de Médée, qui a ments du passé, pour porter un dis- C’est un exercice assez commun en beaucoup été réécrit par des hommes, cours filmique actuel. Dans la mesure montage de travailler avec des archives : très peu par des femmes. Et puis il y a ou les archives disent des choses de c’est un vrai travail de montage et ça nous cette très belle version écrite par l’écri- leur époque et du contexte de création, place en tant que réalisateur. Ça nous vaine Christa Wolf. J’en ai sélectionné quel genre d’archive constitue ton film, pousse à travailler à partir d’un matériel des extraits. J’ai aussi lu de la littérature ou, peut-être, comment penses-tu qu’on préexistant. C’était un cours de cinéma, plus récente, notamment des romans le lira plus tard, en tant qu’archive ? de montage et d’archives en même temps. qui parlent de femmes ouvrières, Daizy C’est un film entre le documentaire et sisters, de Mankell, L’amie prodigieuse la fiction, mais aussi entre le passé et le Est-ce que les images que tu à utili- d’Elena Ferrante, et un périodique des présent. Il pourra témoigner d’un regard sées parlaient déjà de la condition des années 70, L’insoumise, que j’ai beau- de 2022 sur les années 70. Je ne me suis femmes, ou tu les a utilisées pour ce coup utilisé. Je sélectionnais des extraits jamais posé la question de comment il qu’elles montrent de la condition des que j’avais envie de réinterpréter dans pourrait être perçu dans le futur. J’ai l’im- femmes ? mon film. J’en ai constitué une sorte de pression qu’il y a des moments comme Ça dépend lesquelles. Quand j’ai com- corpus et en parallèle, j’ai commencé à ça dans l’histoire, ou à un instant, on mencé à explorer les archives, je me suis monter les images d’archives. J’ai confié réinterprète des faits, des événements, intéressé à l’histoire des ouvriers et des tout ce matériel à une amie qui écrit afin des structures de pensée, des structures travailleurs étrangers. Dans les repor- qu’elle s’en inspire. On a fait un travail sociétales du passé. J’ai l’impression que tages, il y avait quelques femmes et ça d’aller-retour, elle écrivait, j’ajoutais des mon film s’inscrit là-dedans. Il est très m’a beaucoup interpellé, notamment choses, je remontais les images par rap- ancré en 2022, avec un discours qui est l’idée de la double journée de travail, port à son texte. celui d’une jeune femme de 2022, mais qui revenait souvent. J’ai recherché des Ce processus d’écriture de la voix off qui s’interroge sur ce qu’ont vécu les archives sur les femmes au travail, sur les m’intéresse beaucoup, c’est le sujet grands-mères par exemple. C’est un fil femmes ouvrières. J’ai trouvé deux grands de mon essai bachelor (une sorte de tendu entre ces deux époques. reportages sur le sujet, principalement mémoire de licence). J’aime cette dialec- Propos recueillis par Célian constitués d’interviews, et c’est tout. Les tique entre le texte et l’image. C’est com-
ÉCLAIREUSES, DE LYDIE WHISSHAUPT-CLAUDEL - DOCUMENTAIRE - COMPÉTITION INTERNATIONALE UNE TENDRE BULLE Marie et Juliette sont deux enseignantes qui ne comptent plus leurs heures. Elles sont coincées entre leur bataille avec l’admi- nistration belge pour être reconnues et financées et leur désir d’aider les enfants qu’elles accompagnent. Dans ce film, la réalisatrice Lydie Whisshaupt-Claudel, nous montre la formidable initiative de ces deux femmes pour aider des enfants issus de l’immigration et sans parcours scolaire. Dans le lieu qu’elles ont créé, “La petite école” , elles tentent de trouver un compromis entre école et maison, pour ces enfants qui n’ont jamais acquis l’apprentissage des rythmes scolaires. Elles font tout pour préparer les enfants au cadre qui les attend pour espérer qu’ils ne se retrouvent pas en décrochage scolaire. Bien que l’apprentissage soit au cœur de leurs préoccupations, le bien-être des enfants passe avant tout. Il semble plus simple comme le dit une pédopsychiatre qu’elles vont voir, « les enfants parfois de suivre les envies des enfants pour les re-concentrer sont bloqués dans le passé, qu’ils ignorent en même temps. » sur les activités plus scolaires. On ressent comment le périple Le projet de ces deux femmes tend à la recherche d’une de ses enfants les à marquer au plus profond, tout comme leurs bulle d’apaisement pour les enfants, mais également pour parents. leurs parents. Juliette et Marie ne sont cependant pas seules dans ce voyage. C’est un film qui joue entre l’innocence des enfants et la dure Elles font appel à différents spécialistes pour mieux adapter réalité des manquements au bon accueil de ceux-ci dans un leurs techniques pédagogiques auprès des enfants. Cependant, système qu’ils ne connaissent pas encore. Anaëlle MAUVAISES FILLES, D’EMÉRANCE DUBAS - ATELIER DÉMONTAGE D’UN MONTAGE IL EN FAUT DU TEMPS ET DE LA CHANCE POUR SE FAIRE UNE PLACE AU SOLEIL Mauvaises filles est un film alliant Ce film touche plusieurs thèmes sen- Entre rejet des enfants et manipu- mise en scène, scènes d’archives et prise sibles : viols, bastonnades, homophobie, lation de la part institutions, ce film de parole de femmes anciennement inter- délaissement des parents,... Les maisons dénonce le système et raconte l’histoire nées en maison de correction. Il dresse de correction sont vues par les filles universelle de ces femmes. Mais au-delà le portrait croisé de quatre femmes qui comme une prison physique et mentale de cet apport, il permet à ces femmes de ne se connaissent pas mais qui pourtant avec divers endoctrinements ( être tran- reconnecter avec les petites filles qu’elles partagent une histoire commune, celle quille, silencieuse, bien se tenir, ne pas étaient. Il a donc pour vocation d’être un d’avoir été placée en internat de réédu- avoir de relation homosexuelle). film mémoriel, un travail sur la question cation pour fille. Il montre comment les Une voix cristalline presque enfantine des traces et l’enfermement des corps. marges - et leur prise en charge-peuvent nous accompagne dès le début dans ces Un film émouvant qui prend aux tripes et raconter l’exercice du pouvoir, et struc- lieux aujourd’hui délabrés pour pour qui ne peut que nous faire ressentir de turent la place des femmes dans la société raconter ces vies à travers l’espace. Des la compassion. Ces femmes tiennent ce française. Les vies y sont organisées par récits d’une grande puissance et d’une traumatisme comme un poids : “Il restera section dans des lieux labyrinthiques. Ici grande violence s’enchaînent montrant des traces de cette vie de chien”. des religieuses sans connaissance dans le traumatisme transgénérationnel qui en Natane le domaine éducatif appliquent des puni- découle. Le montage conçu comme un tions aux conséquences traumatiques. puzzle fait monter l’ébranlement général.
Traversez la rue… Journal du 14e festival Filmer le Travail n°6 - Samedi 25 février 2023 Rédaction : Gwendal Guillard, Pauline David, Anaëlle Bruneteau, Jade Desmou- lins, Natane Marion, Armand Barranger, Lucas Audinette, Isabelle Taveneau, Thomas Dupuis Le journal Traversez la rue est la concréti- sation d’un atelier d’écriture critique mené par Filmer le travail depuis novembre 2022 avec un SOIT BELLE ET TAIS-TOI, DE DELPHINE SEYRIG — DOCUMENTAIRE — RÉTROSPECTIVE groupe d’étudiants de l’Université de Poi- ON A ENVIE DE LES ÉTRANGLER tiers, issus des Master CTC et Anthropo- logie, parcours ethnographie et écriture audiovisuelle. Réalisation encadrée par Isabelle Taveneau (FLT) et Thomas Cette phrase est dite par l’une des 24 Delphine Seyrig pointe déjà les pro- Dupuis (Éditions FLBLB). actrices que Delphine Seyrig a inter- blèmes qui existent dans le domaine Avec le soutien du FSDIE (Université et rogées lors de son projet Sois belle du cinéma, et cela 40 ans avant les CROUS de Poitiers) et tais-toi. Lors de ses entretiens, les premières campagnes du mouvement actrices françaises et américaines #meetoo. AGENDA participent à une réflexion commune Bien que le titre “On a envie de les autour de leur métier et leur rapport étrangler” puisse choquer nos chers avec les acteurs et les autres actrices. lecteurs, celui-ci entre dans le cadre La réalisatrice ne destinait pas ces entretiens filmés à devenir un film. Son d’une réflexion beaucoup plus vaste que la réalisatrice porte et qui résonne SAMEDI 25 FÉVRIER 14h La vie recommencée but était de faire des projections pour encore aujourd’hui. de François Perlier (2022) amener le débat. Elle n’a pas fait beau- Anaëlle Tap Castille coup de montage, seulement des cuts. Elle laisse ainsi les propos des actrices Le film sera projeté au cinéma Le Dietrich 16h Goutte d’or, bruts. Elle les guide néanmoins en leur au début du mois de mars. N’hésitez pas de Clément Cogitore (2023) à vous y rendre si vous n’avez pas eu la Tap Castille posant des questions allant de ce que chance de participer à la séance ces femmes auraient fait si elles étaient du jeudi 23 février. 19h Cérémonie de remise des prix nées homme à leurs relations avec les suivie d’un buffet de clôture autres actrices. offert par la ville de Poitiers 20h45 Polaris, d’Ainara Vera (2022) Truffaut a dit : Tap Castille “il faut que les femmes écrivent pour elles” DIMANCHE 26 FÉVRIER Merci François ! 14h Rediffusion des films primés au Cinéma le Dietrich SWEET SIXTEEN, DE KEN LOACH — FICTION — RÉTROSPECTIVE ET JEUNE PUBLIC TUER POUR ENTRER DANS LA COUR DES GRANDS Entre vente illégale de cigarettes et visites de sa mère toxico- mane en prison, Liam tente de s’en sortir. Il vit chez son beau- père violent et dealer de drogue et trouve refuge régulièrement chez sa sœur Chantelle, jeune mère célibataire. Toujours accom- pagné de son meilleur ami Pinball, il décide de vendre de la drogue en prévision de la sortie de prison de sa mère. Il rêve d’une vie sans problèmes avec elle, au bord du Clyde, dans une caravane. Ken Loach nous plonge dans une Écosse précaire, en proie à la violence et à une jeunesse désemparée. On est d’autant mieux immergé dans cette réalité sociale que les acteurs sont des non-professionnels, et que les cadrages restent très proches des personnages. Le ciel perpétuellement gris ainsi que les pierres des maisons renforcent l’ambiance funeste de l’histoire. Les fans du réalisateur ne seront cependant pas dépaysés par ment des films de mafieux avec le traditionnel rite de passage le film qui reprend les mêmes codes et la même trame narrative pour entrer dans l’organisation de drogue. que ses autres films. Le monde décrit est tragique, précaire La tension ne redescend jamais et chaque nouvel évènement et violent. Rien n’épargne les personnages d’une destinée qui éloigne un peu plus Liam du futur qu’il espère. semble déjà tracée. Par son sujet, le film se rapproche égale- Anaëlle et Pauline
RELAXE, D’AUDREY GINESTET-DOCUMENTAIRE-COMPÉTITION LE GROUPE DE TARNAC ÉTAIT UNE FICTION Le film documentaire d’Audrey Même si le film tourne autour trice derrière la caméra et des voix Ginestet met en avant le travail d’un de Manon, il met en avant une vie off expliquant le choix de son sujet groupe de personnes soupçonnées en communauté à travers différents pour son premier film. On peut sen- dans l’affaire de Tarnac. La réalisa- plans mettant en scène le groupe de tir que la réalisatrice est proche des trice a choisi de suivre l’une des per- soutien qui l’aide pour sa défense. personnes présentes, à travers des sonnes présentes dans cette affaire : Les proches de Manon témoignent regards caméra, surtout ceux des Manon, musicienne professionnelle face caméra de leur implication et de enfants de Manon. Le long métrage et gérante en collectivité d’une épi- leur soutien dans cette affaire. Cer- Relaxe à une dimension musicale cerie, d’un bar et d’une bibliothèque, tains autres inculpés dans l’affaire importante, à travers des musiques Le magasin général à Tarnac. témoignent de l’impact sur leur vie qui nous rappellent l’activité de la et participent à la mise en scène du protagoniste du film et les scènes de Le long métrage nous replonge procès. De manière générale, le film répétition de sa formation. dans cette affaire qui a occupé dix nous rappelle l’univers du monde judi- ans de la vie de Manon, préparant ciaire à travers des textes présents à Gwendal et Pauline sa défense à travers un simulacre de l’image tirés des dossiers du procès, tribunal pour le dernier chef d’accusa- mais aussi de la difficulté de ce monde tion encore présent. L’utilisation d’ar- notamment avec la scène où Manon chives de journaux télévisés traitant tente d’expliquer à ses enfants cer- des débuts de l’affaire ainsi que des tains termes comme le mot “soupçon- extraits plus récents sur la requalifi- ner”. Relaxe dévoile des moments de cation du procès en cours permettent vie rythmée par le jugement à venir de recontextualiser l’affaire pour le jusqu’au feu de joie finale. spectateur. Le documentaire montre plus largement les impacts de ces Le documentaire met l’accent dix années sur l’entourage des per- sur la relation intime entre Manon sonnes concernées, ayant à la fois et Audrey Ginestet. Cette proxi- brisé des amitiés et des familles mais mité avec les sujets filmés est également renforcé certains liens. renforcée par les quelques interventions de la réalisa-
GOUTTE D’OR, DE CLÉMENT COGITORE - FICTION - AVANT-PREMIÈRE UN BON ARNAQUEUR Ramsès est un médium qui exerce doute grandi à Paris, que c’est son père (scène très drôle où les médiums se par- dans le quartier de la Goutte d’or à Paris. qui est venu du Maghreb en France. Le tagent les populations : toi les maliens, toi Il prétend voir des choses, parler avec les film nous montre trois générations, celle les indiens, toi les arabes etc.). C’est aussi morts, mais on s’aperçoit vite que c’est des enfants, qui sont venus en France de le médium (au sens de moyen de com- une supercherie. Il va être confronté à une façon illégale et qui survivent tant bien munication) qui va faire le lien pour les bande de mineurs isolés venus du Maroc, que mal dans ce quartier en se cachant et spectateurs entre l’histoire des mineurs qui dorment dans un parc, et viennent le en volant, celle du père de Ramsès, venu isolés et l’histoire de son propre père. voir pour qu’il retrouve l’un des leurs, mys- du Maghreb en France pour travailler, On est beaucoup dans la nuit, l’image térieusement disparu. et celle de Ramsès, fils d’immigré, qui a est très belle. Immergés dans le quartier, Le début du film reste entre les quatre cette double culture, et qui va faire le lien dans les chantiers, on reste très proche murs de l’appartement et du cabinet de entre les deux autres générations. des personnages. J’aime beaucoup ce Ramsès, avant de s’élargir vers l’exté- Que Ramsès soit un médium a en côté “pris sur le vif”. C’est aussi assez rieur, constitué principalement du parc où effet une double signification. C’est un violent, mais je dirais que c’est une vio- dorment les enfants, et du chantier, dans arnaqueur, qui profite de la crédulité de lence de survie, de fauve blessé. Cette lequel les pelleteuses évoluent comme de gens désespérés, mais un “bon” arna- violence (verbale et physique) vient plutôt grands animaux, comme des dinosaures, queur dans le sens où il est aussi montré des enfants, et on sent que c’est leur seule à la fois lents et carnassiers. comme quelqu’un qui console. D’ailleurs façon de communiquer : ils ne parlent pas Les mineurs isolés parlent en arabe, son business a tellement de succès le français, ils sont perdus dans la ville, ils reprochent parfois à Ramsès de mal le que les autres médiums du quartier lui n’ont pas d’autre façon de subsister. parler, et on comprend que Ramsès a sans reprochent de leur piquer leur clientèle Thomas RAMBOY DE MATTHIAS JOULAUD ET LUCIEN ROUX - DOCUMENTAIRE - COMPÉTITION INTERNATIONALE APPRENDRE “Mon grand-père Martin Calvey, c’est un fermier. Il aime grand-père lui donne envie de revenir à cette vie de fermier dire que c’est l’un des meilleurs. J’aime penser la même chose.” plus tard, avec quelques moutons. “On ne laissera pas tomber”. Cian, jeune garçon irlandais vit sur l’île d’Achill. Il a grandi Des plans larges offrent une douceur et une évasion vers des sur cette île principalement peuplée de moutons. Il aide et paysages apaisants, étendue verte ou océan atlantique, aussi apprend avec son grand-père le travail à la ferme. sauvages l’une que l’autre. Des plans plus serrés On découvre sa vie avec les moutons, les chiens Vous savez la nous rapprochent de Cian et de belles transitions bergers, l’entretien de la ferme, quand il n’est pas chose la plus nous transportent d’un monde à l’autre, comme à l’école ou au foot. importante dans de la ferme à une baignade, une transition réalisée C’est une “aide à temps plein”. Nous décou- la vie ? À votre par la présence de l’eau servant au nettoyage des vrons à travers ce portrait de Cian, les efforts et avis ? La santé ? moutons et plus tard à la baignade de Cian. Ce film les enjeux qu’une ferme exige, et l’apprentissage L’amour? L’argent ? a une chronologie cyclique, les premières images difficile de cette activité. Non ! Un sont celles des essais vains de Cian à attraper un La voix-off de Cian nous fait entendre ses rêves bon réveil-matin mouton et le film se conclut sur le même essai et ses envies pour sa vie future. Son père a un tra- réussi cette fois. vail très éloigné de celui de fermier et loin de son fils, il a une vie Un très beau film qui nous permet de rencontrer un grand- connectée, avec les réseaux sociaux, à l’étranger. Cian voudrait père qui vit pour sa ferme, pour ses moutons, qui sont comme de connaître cette vie et partir, voir et vivre autre chose. En même l’or pour lui. Et un petit-fils, qui a un héritage et une perspective temps, son respect et son admiration pour le métier de son future différente. Jade
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