La Vie est belle "It's a Wonderful Life"
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La Vie est belle "It's a Wonderful Life" Réalisé par Frank Capra Avec James Stewart, Donna Reed, Henry Travers, Lionel Barrymore, Thomas Mitchell, Beulah Bondi Frank Faylen, Gloria Grahame, Ward Bond, Todd Karns Titre original It's a Wonderful Life Genre Comédie dramatique, Fantastique Production Américaine Date de sortie 10 décembre 1947 La Vie est belle est le premier film produit par Liberty Films, la société de production créee par Frank Capra à la fin de la guerre. En effet, las de l'influence grandissante des studios hollywoodiens sur ses films, il pensait quitter les États-Unis pour produire des films en Grande-Bretagne. C'est alors que Sam Briskin, assistant d'Harry Cohn à la Columbia, lui suggera de créer sa propre société. Dans son autobiographie, Frank Capra écrit : "La Vie est belle n'était fait ni pour les critiques blasés, ni pour les intellectuels fatigués. C'était mon type de film pour les gens que j'aime. Un film pour ceux qui se sentent las, abattus et découragés. Un film pour les alcooliques, les drogués et les prostituées, pour ceux qui sont derrière les murs d'une prison ou des rideaux de fer. Un film pour leur dire qu'aucun homme n'est un raté". Cette première production reçut un accueil en demi-teinte auprès du public et fut éreinté par une partie de la critique qui lui reprocha principalement une mièvrerie trop envahissante ; le film ne sera réhabilité que bien des années plus tard et s'offre d'ailleurs une belle revanche en étant diffusé chaque année de l’autre coté de l’Atlantique pendant les fêtes de Noël. Au terme du tournage, La Vie est belle devint une œuvre capitale dans le cœur de Frank Capra tant l’espoir qu’il misait sur le film était immense; il pensait purement et simplement que c’était le plus grand film qu’il ait jamais fait. Lorsque disparaît le générique inaugural, une neige blanche et poudreuse envahit l ‘écran; s’ensuit alors le plan d’un panneau nous indiquant que nous nous trouvons maintenant à Bedford Falls, ville que l’on ne quittera en aucune occasion tout au long de l’évocation de la vie de l’un de ses concitoyens. Le film figure à la 20ème place du Top 100 de l' American Film Institute. . Synopsis Le film s’ouvre à la manière d’un conte de Noël et trouve sa construction dans un flash-back relatant l’existence de George Bailey (James Stewart), jeune homme un brin naïf empli d’un idéalisme à toute épreuve. Le rêve américain est ici transposé à travers les désirs d'évasion de Georges Bailey; le besoin de découverte qui l’anime rappelle celui des immigrants débarquant tout droit de Liberty Island, sa grande ambition étant en effet de poursuivre ses études d’architecture et devenir explorateur.
En cette nuit de Noël 1945 dans la petite ville de Bedford Falls, de l'État de New York, tout le monde prie pour George Bailey éminent habitant de la ville. De chaque foyer s'élève une prière. Les paroles murmurées avec ferveur concernent toutes le même homme, George Bailey, qu'elles proviennent de la bouche de son épouse, de ses enfants, de ses amis et collègues... et de manière générale de tous ceux qui tiennent à lui. James Stewart Le décès de son père oblige George Bailey à reprendre l'entreprise familiale de prêts à la construction, qui permet aux plus déshérités de se loger. Ayant renoncé à son rêve d'enfant de devenir explorateur, il a toujours consacré son énergie et son argent à l'amélioration des conditions de vie des habitants de la ville, en luttant contre le désir de puissance d'un homme d'affaires sans scrupules. Henry F. Potter (Lionel Barrymore), l’homme le plus riche de la ville, a toujours trouvé en la famille Bailey ses principaux rivaux qui ne cessent de semer des embûches sur le chemin qui le mène à son emprise totale sur la ville. Potter n’a pas hésité à placer la ville sous sa tutelle. Georges Bailey est également marqué par une forte volonté de s’enrichir mais ce dessein ne le pousse tout de même pas à rejeter toute vertu et il n’oublie pas de venir en aide aux plus déshérités via son entreprise. Lionel Barrymore George Bailey fut également très utile pour Monsieur Gowers (H.B. Warner), un pharmacien, car il empêcha ce dernier de livrer à un couple, dont le fils était atteint d'une maladie très grave, un cachet empoisonné. . H.B. Warner Todd Karns Il sauva également son jeune frère Harry (Todd Karns) de la noyade mais perdit l'usage de son oreille gauche. Cet altruisme débordant va même jusqu'à constituer un frein à ses ambitions lorsque ce même frère, devenu plus vieux et qui sera d’ailleurs bien plus tard couvert de gloire, part pour l’université, contraignant ainsi Georges à reprendre l’entreprise de prêts et construction. James Stewart et Donna Reed Adulte, George se maria à une certaine Mary Hatch (Donna Reed), amoureuse de George depuis l'enfance, et eut d'elle quatre enfants. Deux de ses amis, Marcel, un policier et Ernie, un chauffeur de taxi chantèrent même à son mariage. Donna Reed
Grâce à lui, son oncle Billy (Thomas Mitchell) réussit à sauver son entreprise et plusieurs personnes dont son meilleur ami Giuseppe Martini habitèrent dans des jolies maisons louées bon marché. Thomas Mitchell et James Stewart C’est par mégarde que l’oncle Billy, égarera ce même jour les 8 000 dollars qu’il devait remettre à la banque au compte de la société, et que Potter ne manquera pas de substituer. Esseulé et désespéré, George doit aujourd’hui faire face à une situation financière désastreuse et songe sérieusement à mettre fin à ses jours. Clarence (Henry Travers), un ange de seconde classe qui attend l’obtention de ses ailes, descend sur Terre pour lui venir en aide... Henry Travers et James Stewart L'instant d'après, celui-ci montre à George comment les citoyens de sa ville auraient évolué sans lui. La ville s'appellerait Pottersville et non Bedford Falls car personne n'aurait tenu tête à Potter, l'homme d'affaires. Il n'y aurait que des bars et des maisons closes. Il n'y aurait jamais eu les maisons de George et monsieur Gowers aurait empoisonné un enfant car personne ne l'en aurait empêché. Il aurait fait vingt ans de prison et serait devenu un alcoolique. Harry se serait noyé et n'aurait pu sauver tous les hommes à qui il a porté secours pendant la guerre. La mère de George serait une veuve acariâtre tenant une pension de famille douteuse, ses amis seraient des mauvais garçons, Mary une bibliothécaire vieille fille. Les enfants de George n'existeraient pas et l'oncle Billy serait devenu fou après la faillite de ses affaires. Se rendant compte de ce qui aurait pu arriver, George demande à revivre. Il s'aperçoit que tous ses amis sont allés chercher pour lui l'argent qui lui manquait. Lorsque l'histoire se termine, il trouve un livre de Clarence dans la pile de billets, avec une dédicace disant qu'aucun homme avec des amis ne rate sa vie et qui le remercie d'avoir obtenu ses ailes. Interprété par James Stewart, le personnage de de George Bailey devait à l'origine être destiné à Cary Grant pour un film produit par la RKO. James Stewart, ayant servit dans l'United States Army Air Forces de 1941 à 1945, il débuta en fait ses premières missions en 1944, y obtint beaucoup de récompenses militaires en raisons de ses énormes efforts. Ces derniers l'ayant épuisé, il faillit refuser le rôle de George Bailey. Il l'a finalement accepté et fut nominé à l'oscar du meilleur acteur, de plus il considéra La vie est belle comme l'un de ses films préférés de toute sa carrière. Toute en retenue et fragilité James Stewart a su s’intégrer à merveille dans l’univers de cinéastes aussi singuliers qu’Anthony Mann, Alfred Hitchcock ou encore John Ford, révélant ainsi une capacité d’adaptation prodigieuse. Il nous offre une palette d’émotions assez incroyable. Le couple qu’il forme avec la délicieuse Donna Reed, participe vigoureusement à l’émotion qui nous submerge tout au long de la vision du film. Et quand ceux-ci sont accompagnés de toute une ribambelle de seconds rôles aussi savoureux les uns que les autres, on ne peut que s’incliner devant la justesse et la variété du casting. Après Mr Smith goes to Washington Franck Capra voulut réunir une nouvelle fois James Stewart et Jean Arthur en lui confiant le rôle de Mary. Celle-ci refusa le rôle car elle préparait une pièce à New York. Il envisagea ensuite Ginger Rogers qui refusa puis Olivia de Havilland, Martha Scott et Ann Dvorak. C'est finalement Donna Reed qui obtint le rôle. Le scénario, écrit par Frances Goodrich, Albert Hackett, Frank Capra, Jo Swerling, Philip Van Doren Stern, Michael Wilson, quant à lui, reprend l’éternel lutte de David contre Goliath, véritable leitmotiv de l’œuvre du cinéaste. Il serait réducteur de ne voir en La Vie est belle qu'une avalanche de bons sentiments car le film possède un
certain goût d'amertume d'après guerre et laisse fréquemment poindre un pessimisme incontestable, contrastant et nuançant l'image que l'on se fait habituellement du cinéma de Frank Capra. Certes, l'humanisme et l’optimisme en ressortent triomphants mais cela ne l’empêche pas de jouer sur une double lecture. Frank Capra nous met la plupart du temps en face d'un héros pétri de faiblesses, en proie à un désespoir qui ne fait que s’accroître au fil de l’histoire, le tout se déroulant dans un cadre d’une noirceur terrible qui n'hésite pas à parler de mort, de crise économique et surtout de suicide. Ce tableau de la nature humaine s’accompagne d’une vision particulièrement lucide sur l’ingratitude de l’existence et sa nébulosité ponctuelle. Par ailleurs, le film évoque de façon très juste et réaliste des problèmes de l'Amérique de l'entre-deux-guerres, de la crise économique de 1929 à l'entrée dans le deuxième grand conflit mondial de l’histoire en passant par la description du pays sous la présidence de Roosevelt. La photographie est signée par Joseph F. Biroc, Joseph Walker etVictor Milner (non-crédité). Avant La Vie est belle, on représentait la neige à l'écran avec des cornflakes peints en blanc. Mais, ils faisaient tant de bruit en tombant qu'on devait réenregistrer les dialogues plus tard. Pour ce film, Frank Capra tenait à enregistrer directement le son. Ainsi, une nouvelle technique fut inventée, utilisant un produit chimique de lutte contre le feu, du savon et de l'eau. Cette mixture était projetée à haute pression à travers une machine à vent ce qui permettait de faire tomber la neige silencieusement. Le département son de la RKO reçut d'ailleurs un Oscar spécial pour le développement de cette nouvelle technique. Pour les décors d'Emile Kuri, la ville de Bedford Falls fut intégralement construite dans les studios de la RKO à Encino en Californie. Le plateau a été bâti en deux mois et reste l'un des plus grands décors jamais construit pour un film américain : 16 000 mètres carrés. Il comprenait 75 magasins et immeubles, une rue principale de 275 mètres, une usine et un quartier résidentiel. Selon l'analyse de Jacques Lourcelles "Venant se placer de lui-même sous l'invocation de Leo McCarey que Frank Capra considéra toujours comme un maître, sinon comme son maître, ce sublime conte de Noël est le film le plus riche et le plus complet du réalisateur. Il combine non seulement la comédie et le drame mais fait appel au romanesque, à la poésie et même au fantastique pour relater l'histoire d'une destinée reliée, au sein de la communauté où elle se déroule, à toutes les autres destinées de cette communauté et par extension à celle de l'humanité toute entière. Le propos du film est d'ailleurs beaucoup plus de raconter l'histoire de ce lien que celle d'un individu. Et ce conte qui veut souligner la solidarité de tous les hommes en fournit, dans son intrigue une démonstration aussi étincelante qu'émouvante Dans les trois premiers quarts du film, Frank Capra se révèle habile, prenant, parfois touchant. Dans le dernier quart, il se surpasse et le spectateur s'aperçoit qu'il n'a pas seulement affaire à un excellent film comme Frank Capra en a réalisé beaucoup, mais à un chef-d'œuvre. Ce dernier quart du film amène le spectateur, ainsi que le héros, à revoir ce qui s'est passé jusque là dans une autre lumière et sous un autre point de vue. En permettant au héros de contempler pendant quelques instants un monde où il ne serait pas né, Frank Capra, et son bon ange Clarence, l'obligent à sentir le caractère irrémédiable de chacun de ses actes. Comme, pour la plupart, il s'agit d'actes utiles et inspirés par le bien, le fait de les supprimer de la surface de la terre devient une véritable catastrophe. Mais, au-delà de la bonté du personnage, c'est bien le caractère de responsabilité absolue, infinie de chaque action humaine qui est ainsi démontrée à travers l'infinité des relations en chaîne qu'elle a déclenchée." Sources : http://www.cineclubdecaen.com / http://www.dvdclassik.com / http://www.imdb.com / http://fr.wikipedia.org http://www.allocine.fr
• • La Vie est belleComédie dramatiqueU.S.A.1947Avec James Stewart, Donna Reed, Lionel Barrymore, Thomas Mitchell, Henry Travers. De Frank Capra • Le décès de son père oblige un homme à reprendre l'entreprise familiale de prêts à la construction, qui permet aux plus déshérités de se loger. Il entre en conflit avec l'homme le plus riche de la ville, qui tente de ruiner ses efforts. Au moment où il approche de la victoire, il égare les 8 000 dollars qu'il devait déposer en banque. Le soir de Noël, désespéré, il songe au suicide. C'est alors que le Ciel dépêche à ses côtés un ange de seconde classe, qui pour gagner ses ailes devra l'aider à sortir de cette mauvaise passe...
La Vie est belle, de Frank Capra : les grands classiques Pour renouer avec un peu d'innocence, de naïveté et de légèreté à la nouvelle année qui s'écoule déjà, revisitons ce beau classique, sorti en 1946 (on sent d'ailleurs au sein même de l'histoire les stigmates de la guerre encore proche). Il est le film préféré de son réalisateur, grand artiste qui nous a offert nos plus belles joies de cinéma à travers bien des chefs d'oeuvre. Comme au sein d'un beau conte, mais qui toujours flirtera avec les zones d'ombre de la nature humaine (l’œuvre a aussi une dimension sociale non négligeable). L'immense générosité de Capra est lucide. Ces films sont comme des remparts à l'adversité, comme les refuges d'une innocence naïve certes, mais si revigorante. Le film se place d'emblée dans une tradition surnaturelle et merveilleuse. Des anges (sous forme d'étoiles brillantes dans un ciel nocturne) discutent entre eux du sort d'un certain Georges Bailey. Ce dernier est au désespoir et va se suicider un soir de Noël. Le tableau est déjà bien noir pour poser les fondements d'un beau conte. Une bonne partie du film va consister en un simple postulat: connaître cet homme et comprendre ce qui l'a conduit à ce geste. Son ange gardien Clarence pourra alors intervenir pour tenter de le sauver et gagner ainsi ses ailes. On va donc suivre les grands moments de la vie de Bailey depuis l'enfance, lorsqu'il sauve son petit frère de la noyade dans un lac gelé. Il avertit plus tard le pharmacien qui l'emploie qu'il allait commettre une erreur funeste. Il rencontre enfin celle qui sera la femme de sa vie. Il y a également un autre aspect. On voit ce héros assumer ses responsabilités et renoncer à ses vieux rêves de voyages pour reprendre l'entreprise familiale de prêts et construction. Il a une approche humaine de sa profession. Il veut permettre aux gens de posséder leur maison. Il s'élève contre le vieux Potter, entrepreneur sans scrupules qui règne sur la ville. Ce dernier ne pense qu'à s'enrichir sur le dos des honnêtes gens. Bailey est une sorte de bienfaiteur, une figure classique de Robin des bois ou d'humble David contre un affreux Goliath. Un homme si irréprochable ne saurait être l'objet de tourments suicidaires. La trouvaille de Capra est de lui infliger cette souffrance morale. Alors que Bailey vit une large
partie du film dans un bonheur sans nuages, son oncle, qui a égaré 8000 dollars, va le plonger dans la détresse. Ainsi, l'homme exemplaire, si heureux et bienveillant qu'il en devenait presque agaçant, en est réduit à la dernière extrémité. Il s'humilie devant son ennemi juré Potter pour ne pas voir l'oeuvre de sa vie détruite. Mais trahissant ainsi tous ses principes, il perd l'envie de vivre et se dit que le monde se porterait bien mieux sans lui. C'est là que la dimension merveilleuse, qui était le prologue du film prend tout son sens. Le récit conventionnel d'une success story légère, change de nature. C'est ce qui fait la grandeur de ce film, avoir poussé le cliché du bonheur à bout et pendant longtemps, l'avoir détaillé même au point qu'on y voyait le coeur de l'histoire. Tout est bouleversé dans la dernière demi-heure. Capra revient habilement sur les certitudes que le spectateur croyait acquises. La lumière radieuse devient nuit noire, la réalité devient autre, le désespoir s'invite dans un monde d'où il semblait exclu. L'insouciance est brisée d'une façon assez radicale. Le casting est composé d'acteurs chevronnés, que l'on croise souvent chez John Ford (comme Thomas Mitchell, dans le rôle de l'oncle Billy, également célèbre pour avoir été le père de Scarlett dans Autant en emporte le vent et un habitué de l'univers de Capra). La belle Mary Hatch est incarnée par la touchante Donna Reed. On associe souvent James Stewart à des personnages un peu lunaires et bienveillants, type qu'il épouse comme à son habitude dans la première partie du film. Mais le voir ainsi rompre avec cet aspect lisse, se décomposer de détresse et de chagrin est un choc. Il va jusqu'à devenir violent même pour sa femme et ses enfants tant il est à bout. La part d'ombre du personnage est pourtant suggérée très tôt. On sent un renoncement et une frustration en lui lorsqu'il choisit d'aider les autres plutôt que de vivre sa vie. Il ne sera pas l'aventureux voyageur qu'il rêvait d'être. Il sera un bon citoyen de sa petite ville Bedford Falls, qu'il ne quittera jamais, oeuvrant à maintenir à flot l'entreprise familiale, au service des bonnes gens qui ont droit au bonheur. La « recherche du bonheur » est d'ailleurs inscrite dans la constitution américaine, ce qui fait de Bailey un défenseur de ces valeurs fondamentales, contre le capitalisme inhumain du vieux Potter. Il est l'humain contre le système, un peu comme dans M. Smith au Sénat. Il incarne donc un motif cher au coeur du réalisateur, et très récurent dans son oeuvre. Il est presque l'archétype du héros chez Capra. On a pu reprocher avec grand tort à ce film d'être mièvre, or il est tout le contraire. Il est entendu que c'est un conte, mais ce qui le domine, c'est la précarité du bien-être. On ressent fort la fragilité de ceux qui agissent bien, leur sentiment de ne pas compter, de vivre à perte, en dépit d'eux-mêmes. Bailey est aussi soumis à la tentation de l'opulence (lorsque Potter lui fait une proposition de rachat qui ferait de lui un homme riche). Tout dans sa réussite et sa reconnaissance peut être balayé. Il peut regretter de n'avoir pas davantage pris soin de lui. Ce personnage incorruptible a consenti un douloureux sacrifice. S'il veut en finir, au début du film, c'est qu'il s'est oublié lui-même, qu'il ne voulait pas de cette vie, de ce mariage et de « tant d'enfants » comme il le dit, hors de lui, au soir où il se croit ruiné. Les 8000 dollars censés causés sa perte ne sont au final qu'accessoire, c'est toute sa frustration qui explose à la fin du film, une forme d'égoïsme qu'il a étouffée pendant trop longtemps… Le conte de Noël enneigé en vient peu à peu questionner l'existence, avec l'irruption de l'ange gardien Clarence qui va littéralement sauver Bailey des eaux. Il fait semblant de se jeter dans le
fleuve. Fidèle à son attitude secourable, George va le tirer des flots plutôt que de s'y noyer lui-même (dans un sauvetage qui rappelle un peu celui de son petit frère au début du film). Il voit ensuite son voeu exaucé: voir ce que serait le monde sans lui. Il constate à quel point sa ville chérie aurait alors dérivé vers le vice et la corruption -tant et si bien qu'elle se nommerait « Pottersville »-. L'ange gardien le prend au mot et le confronte à ce triste spectacle : tous ses amis ont raté leur vie sans lui. Il se voit même malmené et maltraité par eux. psui Lorsqu'enfin il revient de cet épisode surréaliste et cauchemardesque, sur le pont où il soupirait, il devient euphorique, puisqu'il a retrouvé sa réalité où les gens l'aiment et le connaissent. D'un coup, sa situation sans issue ne pèse plus bien lourd devant la joie qu'il éprouve à être simplement en vie. Il a surtout enfin gagné le respect de lui-même, la dignité et la fierté qu'il avait un moment perdue, submergé par ses problèmes. La morale est simple et profonde: malgré tout, la vie est belle. C'est ce que le film montre très explicitement, allant d'un idéalisme enthousiaste à la détresse la plus profonde. Capra est de ceux qui savent surmonter le désespoir, raviver un peu de chaleur humaine avec une apparente simplicité. Mais, imperceptiblement, il aura également avec ce film dépeint notre abattement, notre frustration, nos désarrois et notre impuissance face à un monde où les braves sont décidément si méprisés. La réponse que Capra apporte est toute simple: le seul espoir pour ne pas se laisser avoir par la fatalité machinale et inhumaine, c'est d'être un homme tout simplement, avec ses faiblesses, ses maladresses et ses défauts. Bailey reprend conscience du bien qu'il a pu faire, de tous ses petits riens qui rendent la vie supportable, de ce qui fait de lui une personne à part entière tout simplement. Peut-être que le plus beau résumé de La Vie est belle est dans cette citation de John Lennon : « La vie, c'est ce qui arrive pendant qu'on est occupé à faire d'autres projets ». Et c'est ce présent là, inestimable, que Capra le magicien amène à la conscience de son spectateur. On lui sera éternellement reconnaissant de cette sublime simplicité.
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