Tabagisme et dépendance au tabac: au coeur de la maladie cardiovasculaire DOCUMENT D'AUTO-APPRENTISSAGE - Profession Santé

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                                                                 TABAGISME ET DÉPENDANCE AU TABAC
Tabagisme
et dépendance
au tabac:
au cœur de la
maladie cardiovasculaire

Par Diane Lafontaine, B. Pharm., M. Sc. — Panacée Conseil Inc.
Table des matières

Objectifs d’apprentissage                                                                                  3

1. Perspective clinique                                                                                    3
            1.1 Les effets dévastateurs du tabagisme                                                       3
            1.2 Les professionnels de la santé : un rôle important à jouer                                 3
            1.3 Définition de l’accoutumance                                                               4
            1.4 La dépendance au tabac : une maladie chronique                                             5
            1.5 Lien entre tabagisme et maladie cardiovasculaire                                           5
            1.6 Autres effets nuisibles du tabagisme                                                       6
            1.7 Abandon du tabac et santé cardiovasculaire                                                 6
            1.8 Dépistage du tabagisme                                                                     6

2. Traitement de la dépendance au tabac                                                                   11
            2.1 Symptômes physiques et psychologiques du sevrage du tabac                                 11
            2.2 Changement de comportement                                                                12
            2.3 Aides pharmacologiques pour l’abandon du tabac                                            13
            2.4 Aides pharmacologiques de premier recours                                                 13
            2.5 Aides pharmacologiques de deuxième recours                                                21
            2.6 Les médecines douces                                                                      22
            2.7 Choix thérapeutique en fonction du tableau clinique                                       23

3. Ajustement du traitement                                                                               26

4. Suivi                                                                                                  26
            4.1 Efficacité thérapeutique                                                                  26
            4.2 Tabagisme et interactions médicamenteuses                                                 27
            4.3 Observance thérapeutique                                                                  30

Conclusion                                                                                                33

Annexe A                                                                                                  34

Références                                                                                                35

Questionnaire de formation continue                                                                       40

Tabagisme et dépendance au tabac : au cœur de la maladie cardiovasculaire Document d’auto-apprentissage
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Objectifs d’apprentissage
Le présent document vise à donner au pharmacien* un aperçu des solutions de soutien au renoncement au
tabac dans une perspective globale de prévention de la maladie cardiovasculaire. Le modèle de prise en charge
présenté ici s’appuie sur une méthode systématique comprenant le dépistage, l’amorce du programme de
renoncement au tabac, l’ajustement du traitement et le suivi du patient. Tout au cours du présent document,
le pharmacien trouvera des exemples d’intervention rapide visant à protéger la santé du cœur.

À la fin de la présente activité, le pharmacien devrait être en mesure :
      =   d’expliquer ce qu’est la dépendance aux produits du tabac;
      =   d’observer le cheminement du fumeur et d’aider celui-ci à franchir les diverses étapes;
      =   de conseiller des traitements pharmacologiques appropriés;
      =   de mettre en œuvre des stratégies appropriées pour soutenir des efforts de renoncement au tabac;
      =   de faire un suivi efficace auprès du fumeur faisant des efforts pour cesser de fumer
          pour l’empêcher de recommencer à fumer.

1. Perspective clinique
1.1 Les effets dévastateurs du tabagisme
Les affections causées par le tabac sont toujours à l’état endémique dans le monde. L’Organisation mondiale
de la santé prédit que d’ici 2020, le nombre annuel de décès causés par le tabagisme atteindra 8,4 millions, soit
4 millions de décès annuels de plus qu’en 2001.1 Concrètement cela signifie que si on empilait les corps de
toutes les personnes qui mourront d’une affection causée par le tabac d’ici 2020, on obtiendrait une tour d’une
hauteur de 180 km.1

Au Canada, le tabagisme constitue un grave problème de santé; il s’agit de la première cause de décès évitable.2
Malgré une multitude de programmes de prévention de l’usage du tabac, plus de 4,5 millions de Canadiens de
15 ans et plus sont des fumeurs actuels3 et le tabagisme est toujours la cause du décès prématuré de quelque
45 000 personnes.4 En vérité, 50 p. 100 de tous les fumeurs réguliers mourront des conséquences du tabagisme.5

Les effets nocifs du tabagisme et de la fumée secondaire du tabac sont bien documentés. La fumée du tabac
contient plus de 4 000 substances chimiques, dont 50 au moins sont cancérogènes.6

1.2 Les professionnels de la santé : un rôle important à jouer
Il existe des mesures efficaces de lutte contre le tabagisme. Les résultats de travaux de recherche révèlent que
les professionnels de la santé, dont les pharmaciens, peuvent contribuer à hausser la fréquence du renonce-
ment au tabac en fournissant de l’information et du soutien.7, 8

*Nota : Afin de faciliter la lecture du présent document, nous avons utilisé le masculin
  comme genre neutre pour désigner aussi bien les femmes que les hommes.

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Malgré les bienfaits éprouvés du soutien, de 2 à 15 p. 100 seulement des fumeurs qui sont suivis par un
médecin reçoivent une forme quelconque d’aide, que ce soit des conseils sur la manière de cesser de fumer,
de l’information sur des programmes de soutien ou une ordonnance d’un médicament aidant à cesser de fumer.9
On estime aussi qu’ordinairement, un traitement n’est offert qu’aux patients souffrant déjà d’une maladie
causée par le tabac.8 Le dépistage systématique des fumeurs et la participation à des activités de renoncement
au tabac sont deux aspects sur lesquels tous les professionnels de la santé devraient se pencher davantage,
d’autant plus que le tabagisme est associé aux trois principales causes de morbidité et de mortalité au Canada :
la maladie pulmonaire, le cancer et la maladie cardiovasculaire.10, 11, 12

Il est difficile d’identifier une autre affection qui, malgré des interventions efficaces et facilement accessibles,
demeure associée à une négligence, à une fréquence et à un taux de mortalité similaires à ceux du tabagisme.
On consacre beaucoup d’énergie à sensibiliser les cliniciens et à inculquer le principe selon lequel ne pas traiter
le tabagisme serait perçu comme le défaut de donner des soins de santé appropriés.

1.3 Définition de l’accoutumance
La nicotine compte parmi les substances toxicomanogènes les plus puissantes, entraînant une tolérance
physique, un syndrome de sevrage et un état de besoin (parfois appelé dépendance psychologique).13 En effet,
cette substance cause autant d’accoutumance que l’alcool, la cocaïne ou les opiacés tels l’héroïne.14,15

Lorsque la fumée de cigarette est inhalée, la nicotine met sept (7) secondes à atteindre le cerveau. En stimulant
les récepteurs nicotiniques présynaptiques du système nerveux central, la nicotine cause la libération de
norépinéphrine, d’acétylcholine, de dopamine, de sérotonine et de bêta-endorphines. La libération de ces
neurotransmetteurs est associée au plaisir, à la détente, à l’augmentation de la capacité mémorielle et des per-
formances7. Par ailleurs, une hausse de la concentration de nicotine dans le sang déclenche la libération d’adré-
naline et provoque une légère augmentation de la glycémie, ce qui contribue à procurer une sensation de
«décharge» ou un regain d’énergie.11 Inversement, une diminution de la concentration de nicotine est asso-
ciée à une sensation de désagrément, à l’anxiété, au stress et à une sensation de baisse de la performance.7 Les
sensations agréables autant que désagréables renforcent le comportement du fumeur.7 Avec le temps, un
phénomène de tolérance physique apparaît ; le fumeur a besoin de plus en plus de nicotine pour obtenir les
mêmes effets parce que son cerveau s’adapte progressivement à l’excitation produite par la nicotine.7

Le syndrome de sevrage à la nicotine est l’un des principaux signes de la dépendance à la nicotine. Il apparaît
ordinairement au cours des 24 heures suivant la suppression brusque de la nicotine ou après une réduction de
la consommation.9 Voici comment se manifeste le syndrome de sevrage : 9
      =   dysphorie ou humeur déprimée ;
      =   insomnie ;
      =   irritabilité, contrariété ou colère ;
      =   angoisse ;
      =   difficulté à se concentrer ;
      =   agitation ;
      =   augmentation de l’appétit.

Les symptômes les plus graves apparaissent au cours de la première semaine, bien que l’envie irrésistible de
fumer puisse persister pendant des mois et peut-être même des années.16 D’habitude, plus la consommation
de nicotine est élevée, plus les symptômes de sevrage sont graves et plus l’arrêt est difficile, mais cela varie
beaucoup.9 Les variations génétiques du métabolisme nicotinique constituent un autre facteur de dépendance
à la nicotine.13 Certaines études révèlent que les personnes dont le métabolisme nicotinique est lent parvien-
nent plus facilement à cesser de fumer que celles dont le métabolisme est rapide.17 La personnalité (p. ex.
propension à prendre des risques) et certains troubles mentaux, en particulier la schizophrénie, le trouble bipo-
laire, la dépression et le trouble déficitaire de l’attention, sont associés avec un risque élevé d’abus.13

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Certains auteurs décrivent la toxicomanie comme un état d’hypersensibilité du système de récompense du
cerveau aux effets directs d’une substance et à tous les autres stimuli extérieurs qui ne sont pas directement
reliés à celle-ci.13 L’auto-administration de nicotine a une importante composante psychologique, qui est ren-
forcée par les activités quotidiennes et certains facteurs sociaux.7 Chaque fois qu’il s’allume une cigarette, le
fumeur prend en moyenne 10 à 12 inhalations de fumée, ce qui équivaut à prendre 10 à 12 doses d’une drogue
procurant un sentiment de bien-être.18 Il n’est donc pas étonnant que bon nombre de fumeurs décrivent leur
plaisir de fumer comme quelque chose faisant partie de leur image ou de leur vie sociale. Le fumeur qui es-
saie de réduire sa consommation de tabac se rappelle constamment de l’élément manquant associé à son
plaisir de fumer (p. ex. rituel matinal du café-cigarette, rencontres avec des amis pour prendre un verre).11 La
compulsion est une impulsion irrésistible et irrépressible à consommer la substance; elle amène la personne
à s’assurer qu’elle pourra toujours s’en procurer.19 Les stratégies visant l’identification des synchronisateurs
comportementaux constituent une composante essentielle du programme d’abandon du tabac.

Cesser de fumer est loin d’être une tâche facile. Cela sous-entend apporter d’importants changements à son
mode de vie, à ses valeurs, à son comportement en société et à son mode de penser. Mais surtout, cela
exige une grande capacité d’adaptation.

1.4 La dépendance au tabac : une maladie chronique
Le manque d’initiative de la part des cliniciens envers les programmes d’abandon du tabac est entre autres
attribuable au fait que les données sur l’abstinence à long terme trouvées dans la documentation médicale
sont décourageantes. Par conséquent, les cliniciens sont portés à penser que les interventions sont inutiles.
Mais ce jugement peut cacher la vraie nature de la dépendance au tabac, qui est en fait une maladie chronique
associée à des risques de rechute.8 Si on adoptait une attitude plus constructive, on reconnaîtrait la chroni-
cité de la dépendance au tabac et s’attendrait à ce que le patient ait des périodes de rechute et de rémission.8
Rechute et chronicité vont de pair ; ce n’est ni la défaillance du clinicien ni celle de son patient qui est en
cause. La vérité, c’est que la cessation tabagique ne nécessite pas des soins de courte durée, mais plutôt
des soins de longue durée.

À titre de professionnel de la santé, il faut se rappeler que la guérison n’est pas une destination, mais plutôt
un voyage !

1.5 Lien entre tabagisme et maladie cardiovasculaire
Il existe de très nombreuses preuves que le tabagisme accroît la morbidité et la mortalité, qu’il s’agisse de
maladies cardiovasculaires, de coronaropathies, de mort subite, de maladies vasculaires périphériques, d’acci-
dent vasculaire cérébral ou d’anévrisme de l’aorte. Les données de la Framingham Heart Study révèlent que
les femmes et les hommes n’ayant jamais fumé vivent respectivement en moyenne 4,9 ans et 6,2 ans de plus
sans souffrir de maladies cardiovasculaires comparativement aux fumeurs.20

Le tabagisme est un facteur indépendant de risque de coronaropathie. La présence simultanée d’autres facteurs
de risque, comme les antécédents familiaux de maladies cardiovasculaires, augmente de beaucoup ce risque.21
Le tabagisme a beaucoup d’effets néfastes sur l’appareil cardiovasculaire ; il provoque une hausse de la tension
artérielle et une diminution de la résistance à l’exercice physique. Il favorise la formation de caillots sanguins et
réduit le taux de lipides de haute densité (HDL-C).21

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1.6 Autres effets nuisibles du tabagisme
Le tabagisme est aussi nuisible à l’appareil respiratoire : il peut causer le cancer du poumon, de la gorge ou du
larynx, la bronchite et la maladie pulmonaire obstructive chronique.22 Il peut aussi toucher l’appareil reproducteur
(impuissance masculine, nouveau-né de faible poids à la naissance, fausse couche), l’appareil gastro-intestinal
(cancer de l’œsophage ou de la bouche, parodontopathie, perte de dents) et l’appareil urinaire (cancer de la
vessie, du rein ou du col de l’utérus).22

Par ailleurs, la fumée secondaire du tabac constitue un grave risque pour la santé des non-fumeurs. Les deux tiers
de la quantité de fumée de cigarette sont libérés dans l’air. La fumée secondaire renferme plus de substances
cancérogènes que la fumée inhalée par le fumeur. Au Canada, l’exposition à la fumée secondaire compte pour
environ 300 décès causés par le cancer du poumon annuellement; elle est aussi associée aux maladies du cœur
et au cancer du sinus.22 Les enfants exposés à la fumée secondaire du tabac sont plus sujets à la bronchite, à la
pneumonie, à l’otite moyenne, à l’asthme et à la mort subite du nourrisson.23

1.7 Abandon du tabac et santé cardiovasculaire
Bon nombre d’études montrent l’existence d’une forte corrélation entre abandon du tabac et réduction du risque
de maladie cardiovasculaire.

Voici les changements observables chez le sujet qui cesse de fumer : 24
      =   Au bout de huit (8) heures, la concentration sérique de monoxyde de carbone diminue
          et la concentration sérique d’oxygène augmente pour atteindre des niveaux physiologiques normaux.
      =   Deux jours seulement après l’abandon du tabac, le risque d’infarctus du myocarde commence à diminuer.
      =   Au bout de trois (3) jours, la capacité pulmonaire aura augmenté au point que la respiration est plus facile.
      =   Au bout d’un an, le risque d’infarctus du myocarde est réduit de moitié.

Les preuves semblent indiquer que l’abandon du tabac peut même avoir des effets bénéfiques chez le sujet
ayant déjà souffert d’une affection liée au tabagisme.25 Chez la personne qui souffre d’une cardiopathie
ischémique, le renoncement au tabac réduit le risque d’un autre infarctus et le risque de décès causé par une
maladie cardiovasculaire.25 Chez la personne souffrant d’une maladie obstructive périphérique, l’abandon du
tabac réduit le risque d’amputation et augmente la durée de vie.25

1.8 Dépistage du tabagisme
Le dépistage du tabagisme ouvre la voie à des interventions fructueuses. En exécutant une ordonnance ou en
fournissant des conseils, le pharmacien doit poser une question claire pour savoir si le patient fume et obtenir
des renseignements sur son milieu de vie. Voici deux exemples de question à lui poser : « Y a-t-il des fumeurs
à la maison? » « Avez-vous déjà consommé un produit du tabac? » Si le patient fume, son profil pharmaceutique
devrait l’indiquer.

Tout fumeur devrait recevoir des conseils clairs, précis et adaptés à son cas.8 Le pharmacien devrait lui expliquer
que l’abandon du tabac est la meilleure chose qu’il puisse faire pour sa santé. Sachez reconnaître les fumeurs
mondains et les fumeurs légers, car nombreux sont ceux qui ne se considèrent pas comme des fumeurs. Le
fumeur de cigare ou de pipe devrait aussi être identifié et recevoir les mêmes conseils que le fumeur de cigarette.8

Les patients asthmatiques, hypertendus, diabétiques ou souffrant d’une maladie du cœur sont particulièrement
sujets à souffrir des complications du tabagisme. Le pharmacien pourrait promouvoir l’abandon du tabac en
commençant par cibler les patients appartenant à ces groupes.

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Intervention rapide visant à protéger la santé du cœur

   Convaincre le patient de cesser de fumer en utilisant les bons arguments.
       =   Le patient doit percevoir un danger pour sa santé.
       =   Le risque d’effets nuisibles doit être réel et perceptible.
       =   Le patient doit croire que les aides au renoncement au tabac sont efficaces.
       =   Le patient doit se sentir capable de cesser de fumer.

Le clinicien doit changer sa perception du succès thérapeutique. Une intervention fructueuse n’est pas synonyme
d’une vie sans fumée. Il s’agit plutôt de reconnaître que le fumeur devient de plus en plus motivé à cesser de
fumer. Le dépistage du tabagisme actuel ou des antécédents de tabagisme permet de savoir à quelle étape de
changement le patient en est rendu. En d’autres termes, il permet de sonder son intention de cesser de fumer.
Le modèle transthéorique des étapes du changement de Prochaska, qui comporte cinq étapes, permet de
personnaliser l’approche des soins au patient.

Voici les cinq étapes du changement selon ce modèle :

            Préréflexion : Le fumeur est satisfait de sa situation et n’a pas l’intention
            de modifier son comportement dans les six mois à venir. Il fait très peu d’efforts
            pour cesser de fumer parce qu’il aime fumer.14,15

            Réflexion : Le fumeur commence à comprendre que le tabagisme comporte
            plus d’inconvénients que d’avantages.15 Il songe sérieusement à cesser de fumer
            dans les six mois à venir, mais ne s’est pas encore engagé à agir.14

            Préparation : Le fumeur songe sérieusement à cesser de fumer dans le mois
            à venir et commence à élaborer des stratégies.

            Action : Le fumeur a commencé à modifier son comportement et à s’adapter
            à une nouvelle vie sans fumée.14 Cette étape s’étend sur une période de six mois
            après qu’il ait changé son comportement pour cesser de fumer.

            Maintien : Le fumeur ne fume plus depuis au moins six mois.11 Le renforcement positif
            est important car certaines personnes conservent le goût de fumer pendant des années.

En posant des questions pertinentes, le pharmacien trouvera à quelle étape le patient en est rendu. Le tableau 1
présente quelques façons d’aborder le patient. Si le clinicien se heurte à une résistance, c’est qu’il aura sauté cer-
taines étapes et sera rendu plus loin que le patient.26 Il vaudrait mieux qu’il revienne en arrière, qu’il écoute atten-
tivement le patient, qu’il fasse preuve d’empathie et qu’il pose de nouveau des questions suscitant la réflexion.26

Après avoir mesuré la disposition du patient à cesser de fumer, le pharmacien doit lui venir en aide afin de le
faire progresser selon le modèle de Prochaska, en lui donnant des conseils et en lui présentant des aides
thérapeutiques, s’il y a lieu. En incitant le patient à progresser d’une seule étape au cours du mois à venir, le
pharmacien doublera les chances d’abandon du tabac au cours des six mois qui suivent.14

Pour donner de bons résultats, le counseling doit être adapté à la disposition du patient à cesser de fumer. Le
tableau 1 présente diverses suggestions visant à optimiser les interventions.

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Tableau 1. Objectifs du counseling et suggestions pour établir les étapes du changement 7, 14, 15, 26, 27

   QUESTIONS À POSER                     ÉTAPE                              OBJECTIFS                       SUGGESTIONS POUR
                                         DU CHANGEMENT                      DE L’INTERVENTION               LES CLINICIENS
                                         COMPORTEMENTAL                     ET DÉFIS À RELEVER

   Avez-vous l’intention                 Préréflexion                       Le patient ne désire            Expliquer de façon claire, non équivoque
   d’arrêter de fumer au                                                    pas modifier son                et personnalisée que cesser de fumer est
   cours des six prochains                                                  comportement ; il est           la meilleure décision pour préserver
   mois ?                                                                   peu réceptif.                   sa santé : p. ex. : « Renoncer au tabac
                                                                                                            est la décision à prendre pour la person-
   Avez-vous déjà tenté                                                     Évaluer pourquoi le             ne souffrant d’une maladie du cœur. »
   d’arrêter de fumer ou                                                    patient n’a pas l’intention
   de réduire votre                                                         de cesser de fumer afin         « Arrêter de fumer sera bénéfique
   consommation de                                                          de maximiser l’efficacité       pour l’enfant que vous portez. »
   cigarettes par le passé ?                                                des interventions
   Quand ?                                                                  ultérieures.                    « Qu’est-ce qui vous empêche de
                                                                                                            cesser de fumer ? »
                                                                            Lui faire part des bienfaits
                                                                            et des inconvénients liés       «Quels seraient les bienfaits de l’abandon
                                                                            à la désaccoutumance            du tabac pour vous et les autres ? »
                                                                            au tabac.
                                                                                                            Montrer votre intention d’aider le patient
                                                                                                            et de répondre à ses questions : « Je suis
                                                                                                            disposé à vous fournir de l’information et
                                                                                                            de l’aide quand vous serez prêt. »

   Quelles raisons vous                  Réflexion                          Le patient manifeste            Faire preuve d’empathie, écouter le fumeur.
   incitent à arrêter                                                       un intérêt accru pour           Montrer que vous comprenez à quel
   de fumer ?                                                               la documentation et             point il est difficile de cesser de fumer.
                                                                            l’information portant sur
   Pourquoi hésitez-vous                                                    la désaccoutumance              Aborder les idées préconçues sur la
   à essayer ?                                                              au tabac.                       désaccoutumance au tabac : p. ex.,
                                                                                                            « Si vous faites une nouvelle tentative,
   Qu’est-ce qui vous                                                       Promouvoir la confiance         vous aurez plus de chances de réussir. »
   aiderait à arrêter ?                                                     en soi du patient.
                                                                                                            « La plupart des gens ne prennent
   Connaissez-vous les                                                                                      pas beaucoup de poids. »
   types d’aide dont vous
   pourriez bénéficier pour                                                                                 Insister sur le fait que l’emploi d’aides
   arrêter de fumer ?                                                                                       pharmacologiques associé à une
                                                                                                            intervention appropriée augmente
   Quelle petite mesure                                                                                     les chances de réussite.
   pourriez-vous prendre
   en vue de cesser                                                                                         Fournir des renseignements sur les
   de fumer ?                                                                                               méthodes d’aide de désaccoutumance
                                                                                                            au tabac qui sont couramment utilisées.

                                                                                                            Manifester de nouveau votre intention
                                                                                                            d’aider le patient et réitérer
                                                                                                            votre disponibilité.

   Avez-vous adopté de       Préparation                                    Période propice pour            Favoriser les échanges.
   nouveaux comportements,                                                  intervenir pour le clinicien.
   comme réduire votre                                                                                      Questionner le patient sur les motifs
   consommation de tabac                                                    Utiliser le renforcement        qui le poussent à arrêter de fumer et sur
   ou retarder l’heure de la                                                positif pour appuyer la         les difficultés qu’il a eues dans le passé.
   première cigarette                                                       décision du patient
   de la journée ?                                                          d’arrêter de fumer.

                                                                                                                                                              >
Tabagisme et dépendance au tabac : au cœur de la maladie cardiovasculaire Document d’auto-apprentissage
                                                                                                                                                          8
Tableau 1. Objectifs du counseling et suggestions pour établir les étapes du changement 7, 14, 15, 26, 27

   QUESTIONS À POSER                     ÉTAPE                              OBJECTIFS                     SUGGESTIONS POUR
                                         DU CHANGEMENT                      DE L’INTERVENTION             LES CLINICIENS
                                         COMPORTEMENTAL                     ET DÉFIS À RELEVER

   Avez-vous informé les                                                    Connaître les antécédents     Conseiller au patient de fixer une date de
   personnes de votre                                                       médicaux et les antécé-       cessation et de s’y préparer : p. ex., infor-
   entourage de votre                                                       dents de tabagisme* qui       mer la famille et les amis afin de bénéfi-
   intention d’arrêter                                                      permettront d’évaluer quel    cier de leur appui, nettoyer la voiture, jeter
   de fumer?                                                                type de thérapie est la       les cendriers, définir des stratégies pour
                                                                            plus indiquée.                faire face aux envies irrésistibles de fumer.

                                                                            Fixer des objectifs.          Conseiller au patient le médicament
                                                                                                          qui lui conviendrait le mieux.
                                                                            Donner des conseils sur
                                                                            la façon d’utiliser les       Lui faire comprendre que les auxiliaires
                                                                            médicaments disponibles       pour la cessation tabagique facilitent
                                                                            et fournir de la              le sevrage sans pour autant supprimer
                                                                            documentation                 les envies irrésistibles de fumer.
                                                                            d’auto-apprentissage.
                                                                                                          Déceler les préférences du patient en
                                                                                                          matière de traitement et en tenir compte
                                                                                                          au moment de choisir la méthode
                                                                                                          de traitement.

                                                                                                          Dire au patient que vous êtes disposé
                                                                                                          à l’aider et à soutenir ses efforts
                                                                                                          d’abandonner le tabac.

   Êtes-vous parvenu à                   Action                             Augmenter la fréquence        Montrer au fumeur comment reconnaître
   arrêter de fumer au                                                      et la durée des séances       les situations susceptibles de le faire
   cours des six derniers                                                   d’intervention.               rechuter (côtoyer des fumeurs, vivre
   mois ?                                                                                                 des situations stressantes, consommer
                                                                            Utiliser le renforcement      de l’alcool) et comment les éviter.
                                                                            positif.
                                                                                                          Aider le fumeur à adopter des stratégies
                                                                            Énumérer les situations       d’adaptation en présence de tentations ou
                                                                            qui sont ou seront            d’habitudes (p. ex., utiliser le monologue
                                                                            susceptibles de provoquer     intérieur positif « Beaucoup de mes amis
                                                                            une rechute et trouver des    ont réussi à arrêter et je vais y parvenir
                                                                            façons de bien les gérer.     moi aussi. » ; éviter d’accompagner des
                                                                                                          personnes qui fument après les repas).

                                                                                                          Si le patient a déjà fait des tentatives de
                                                                                                          renoncement par le passé, demander les
                                                                                                          motifs d’échec et adopter de nouvelles
                                                                                                          stratégies en conséquence.

                                                                                                          Élaborer des stratégies pour atténuer les
                                                                                                          sautes d’humeur, comme adopter un nou-
                                                                                                          veau mode de vie pour diminuer le degré
                                                                                                          de stress, se faire plaisir souvent, utiliser
                                                                                                          des stratégies cognitives pour se distraire
                                                                                                          quand les envies irrésistibles se présentent.

                                                                                                          Déterminer avec le patient des façons
                                                                                                          simples de se faire plaisir et lui recom-
                                                                                                          mander de se récompenser souvent
                                                                                                          pour ses réussites.

                                                                                                          Encourager le patient à vous rendre visite
                                                                                                          fréquemment et à communiquer souvent
                                                                                                          avec vous.
                                                                                                                                                            >
Tabagisme et dépendance au tabac : au cœur de la maladie cardiovasculaire Document d’auto-apprentissage
                                                                                                                                                        9
Tableau 1. Objectifs du counseling et suggestions pour établir les étapes du changement 7, 14, 15, 26, 27

   QUESTIONS À POSER                     ÉTAPE                              OBJECTIFS                     SUGGESTIONS POUR
                                         DU CHANGEMENT                      DE L’INTERVENTION             LES CLINICIENS
                                         COMPORTEMENTAL                     ET DÉFIS À RELEVER

   Êtes-vous non-fumeur                  Maintien                           Utiliser le renforcement      Demander au patient à quelle étape
   depuis six mois ou plus?                                                 positif.                      il en est rendu et ce qu’il pense d’une
                                                                                                          vie sans tabac.
   Si oui, le patient est à
   l’étape du maintien.                                                                                   S’assurer que le patient a toujours
                                                                                                          recours à une aide pharmacologique
   Vous sentez-vous en                                                                                    et intervenir en fonction de la
   pleine maîtrise dans les                                                                               réponse obtenue.
   situations que vous jugiez
   auparavant fortement                                                                                   Examiner les écarts qui se sont produits
   susceptibles de vous                                                                                   et les inquiétudes qu’ils soulèvent.
   inciter à fumer ?
                                                                                                          Rappeler au patient les bienfaits d’une
                                                                                                          vie sans fumée.

                                                                                                          Féliciter le patient d’avoir atteint
                                                                                                          un objectif difficile.

   Êtes-vous non-fumeur                  Rechute                            Trouver les causes            Éviter de laisser entendre que le patient
   depuis six mois ou plus?                                                 de la rechute et de           a échoué à certains égards.
                                                                            nouvelles stratégies
   Si non, le patient est à                                                 pour composer avec            Juger si le patient a suivi correctement
   l’étape de rechute.                                                      les facteurs qui              le traitement d’aide à la
                                                                            déclenchent l’envie           désaccoutumance au tabac.
                                                                            de fumer.
                                                                                                          Souligner le fait que chaque fois qu’il
                                                                            Juger s’il est pertinent de   tente de renoncer au tabac, le fumeur
                                                                            prolonger les efforts de      augmente ses chances d’atteindre
                                                                            désaccoutumance au            l’abstinence à long terme.
                                                                            tabac ou s’il vaut mieux
                                                                            mettre fin au traitement      Prévoir une nouvelle tentative pour
                                                                            et fixer une nouvelle date    cesser de fumer.
                                                                            de cessation.
                                                                                                          Pour que le patient reste motivé, lui dire
                                                                                                          qu’il pourra mettre à profit l’expérience
                                                                                                          et les connaissances acquises quand
                                                                                                          viendra le temps de tenter de nouveau
                                                                                                          d’arrêter de fumer.

                                                                                                          Faire preuve d’empathie tout en
                                                                                                          recommandant au patient de songer
                                                                                                          de nouveau à arrêter de fumer.

   * On entend par « antécédents de tabagisme » le nombre de cigarettes fumées, le besoin urgent de fumer la première cigarette au réveil,
   le nombre de tentatives de désaccoutumance au tabac dans le passé, les méthodes utilisées lors de ces tentatives, la durée de la période
   d’abstinence selon les méthodes utilisées, l’adhésion aux méthodes utilisées et la pertinence des méthodes utilisées.

Adaptation de Kuz G., Pharmacy Practice, 1999.

Tabagisme et dépendance au tabac : au cœur de la maladie cardiovasculaire Document d’auto-apprentissage
                                                                                                                                                     10
2. Traitement de la dépendance au tabac
Le traitement de la dépendance au tabac doit consister à donner des conseils et à montrer des techniques de changement
du comportement pour soulager les symptômes physiques et psychologiques du sevrage.

2.1 Symptômes physiques et psychologiques du sevrage du tabac
Les symptômes physiologiques du sevrage du tabac sont nombreux. En les reconnaissant, le clinicien pourra intervenir de
façon plus efficace.

Le tableau 2 présente les symptômes signalés le plus souvent par les patients et des façons de les soulager.

   Tableau 2. Traitement des symptômes du sevrage de la nicotine 9, 14, 28

   SYMPTÔME                           CAUSE                                       DURÉE                   CONSEIL

   Toux                               L’organisme se débarrasse                   Quelques jours          Boire beaucoup de liquide, utiliser des pastilles
                                      du mucus qui s’est accumulé                                         contre la toux, prendre des bonbons durs et
                                      dans les voies respiratoires                                        du sirop contre la toux avant de se coucher.

   Sensation de tête légère Oxygénation accrue                                    1 ou 2 jours            Redoubler de vigilance ; se lever et changer
                            de l’organisme                                                                doucement de position ; boire de l’eau.

   Maux de tête                       Hausse de la concentration       1 ou 2 semaines                    Prendre des analgésiques ; boire beaucoup
                                      d’oxygène dans l’organisme                                          d’eau ; faire des exercices de relaxation ;
                                      et réduction de la concentration                                    prendre des bains chauds.
                                      de monoxyde de carbone

   Constipation,                      Diminution de la vitesse du                 1 ou 2 semaines         Boire beaucoup de liquide, consommer plus
   gaz intestinaux,                   transit intestinal                                                  de fibres alimentaires (céréales de grain
   maux d’estomac                                                                                         entier, légumes) ; faire de l’exercice physique.

   Irritabilité                       État de manque de nicotine                  De 2 à 4 semaines       Marcher, réduire la consommation de caféine,
                                                                                                          respirer profondément ; prendre des bains
                                                                                                          chauds ; savoir que ce symptôme disparaîtra.

   Insomnie                           Effet de la nicotine sur                    De 2 à 4 semaines       Réduire la consommation de café et éviter d’en
                                      l’activité cérébrale                                                d’en prendre après 16 heures ; faire des
                                                                                                          exercices de relaxation ; prendre des
                                                                                                          douches chaudes.

   Fatigue                            Manque de stimulation                       De 2 à 4 semaines       Faire de l’exercice physique ; faire des siestes,
                                      par la nicotine                                                     prendre beaucoup de repos.

   Difficulté à se                    Adaptation au manque de                     Quelques                Planifier son travail ; éviter le stress ;
   concentrer                         stimulation par la nicotine                 semaines                s’accorder plus de temps ; faire des
                                                                                                          exercices de relaxation.

   Faim, augmentation                 Confusion entre l’envie                     Quelques mois           Boire de l’eau ou des boissons
   de l’appétit                       irrésistible de fumer et                                            hypocaloriques ; prendre des collations
                                      une fringale.                                                       hypocaloriques ; faire plus d’exercice
                                                                                                          physique.
                                      Le fait de goûter plus
                                      augmente le plaisir de manger.

                                      Le tabagisme hausse le
                                      métabolisme de 5 à 10 %.

                                                                                                                                                               >
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Tableau 2. Traitement des symptômes du sevrage de la nicotine 9, 14, 28

   SYMPTÔME                           CAUSE                                       DURÉE                   CONSEIL

   Dysphorie ou                       Adaptation à l’absence de                   Quelques                Parler à un ami, sortir, demander de l’aide.
   état dépressif                     nicotine et de tabac                        semaines

   Envie impérieuse                   Sevrage de la nicotine,                     Quelques                Réfréner l’envie de fumer en se souvenant
   de fumer                           une substance causant                       semaines;               qu’elle ne dure que quelques minutes;
                                      de la dépendance.                           peut-être               respirer profondément ; se divertir ; boire de
                                                                                  même quelques           l’eau ; faire une promenade.
                                      Nostalgie des rituels                       mois ou années
                                      tabagiques                                                          Changer les habitudes associées au
                                                                                                          tabagisme : p. ex. opter pour des milieux sans
                                                                                                          fumée. La consommation d’alcool peut causer
                                                                                                          la rechute; le patient doit songer à réduire sa
                                                                                                          consommation d’alcool ou encore s’abstenir,
                                                                                                          et éviter de rester trop longtemps à la table
                                                                                                          après les repas.

Adaptation de Pbert L et coll., Medscape Pharmacist, 2005.

2.2 Changement de comportement
Selon le Tobacco Use and Dependance Guideline Panel 8 des États-Unis (comité d’étude sur les lignes directri-
ces sur le traitement du tabagisme et de la dépendance au tabac), il existe trois types d’orientation et de thérapie
comportementale efficaces, qui sont associés à des taux élevés d’abstinence : 1) donner au fumeur des con-
seils pratiques visant l’acquisition d’aptitudes à résoudre les problèmes ; 2) offrir du soutien social dans le cadre
thérapeutique et 3) aider le fumeur à obtenir du soutien social à l’extérieur du cadre thérapeutique. Selon ce
groupe d’experts, ces types d’orientation et de thérapie comportementale doivent faire partie de tout pro-
gramme de renoncement au tabac.

Tout le long du présent document, nous expliquerons comment mettre en application ces principes.

   Intervention rapide pour protéger la santé du cœur

   Inciter le patient à obtenir du soutien auprès d’un groupe d’entraide.
   Il est plus facile de cesser de fumer lorsqu’on est soutenu par une personne ayant arrêté de fumer.
   On a prouvé que chez les patients ayant bénéficié de soutien, le taux de réussite à court terme était
   de 12 à 27 % (p < 0,01) supérieur à celui enregistré chez les fumeurs n’en n’ayant pas eu.22

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                                                                                                                                                           12
2.3 Aides pharmacologiques pour l’abandon du tabac
L’abandon du tabac sans aide pharmacologique (sevrage brutal) est associé à la fréquence de rechute élevée.29
Parmi les Américains adultes ayant tenté de cesser de fumer, 7 p. 100 environ étaient toujours abstinents un
an après.8 Dans l’ensemble, chez les personnes ayant recours à des méthodes d’auto-assistance et à divers
programmes de renoncement au tabac, le taux de succès après un an varie entre 8 et 25 p. 100.30

La grande majorité des personnes qui essaient de cesser de fumer bénéficieront de l’intervention précoce
d’un professionnel. La pharmacothérapie double ou triple les chances d’abstinence.8 Le pharmacien saura être
réceptif et reconnaître le moment où le patient est disposé à faire des efforts pour cesser de fumer.

On se sert souvent du Test sur la dépendance de Fagerström (voir l’annexe A)31 pour mesurer le degré de
dépendance au tabac. Bien qu’il puisse être utile, cet outil risque d’être trop long pour le clinicien occupé et
de le dissuader d’intervenir. Il n’est pas nécessaire de mesurer la dépendance physiologique pour recom-
mander une pharmacothérapie.8

Voici deux questions très pertinentes pour connaître le degré de dépendance d’un fumeur : 14
      =   Combien de cigarettes fumez-vous par jour ?
      =   Combien de temps après le réveil fumez-vous votre première cigarette ?

Si le patient fume plus de 15 cigarettes par jour et qu’il fume sa première au cours des 30 minutes qui suivent
son réveil, il est probable que la dépendance à la nicotine joue un rôle important dans la conservation du
comportement.9

Chez tous les fumeurs, notamment ceux qui sont très dépendants de la nicotine, les traitements de
substitution par la nicotine et les médicaments ne contenant pas de nicotine doivent être recommandés
et de préférence en association avec une thérapie comportementale.8, 32 La dépendance au tabac est une
maladie chronique nécessitant souvent des interventions répétitives. Il existe cependant des traitements effi-
caces menant à l’abstinence à long terme ou même permanente.

2.4 Aides pharmacologiques de premier recours
Le Tobacco Use and Dependence Guideline Panel des États-Unis a recueilli des preuves solides que les agents
de remplacement par la nicotine et le bupropion administré par voie orale sont efficaces pour traiter la dépen-
dance à la nicotine.8 Ces agents sont considérés comme des agents de premiers recours puisqu’ils permettent
d’augmenter le taux d’abstinence à long terme de façon fiable.8 Depuis la parution de leur étude, un nouvel
agent, la varénicline, a fait son apparition dans le commerce. Les résultats d’études cliniques révèlent que ce
nouvel agent semble être aussi efficace que le bupropion ; les experts médicaux recommandent de le con-
sidérer comme une aide pharmacologique de premier recours.33

Parmi les aides pharmacologiques approuvées, citons les agents de remplacement par la nicotine (sous forme
de gomme à mâcher, de timbre transdermique et d’inhalateur) et deux médicaments administrés par voie orale,
ayant deux mécanismes d’action distincts : le bupropion et la varénicline.

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                                                                                                            13
Tableau 3. Aides pharmacologiques de premier recours 8, 12, 34, 35, 36, 37, 38

   PRODUIT                DOSE                           DURÉE                      EFFETS                 MISES EN GARDE                    COÛT PAR
                                                         D’UTILISATION              INDÉSIRABLES           RECOMMENDATIONS                   SEMAINE
                                                                                    FRÉQUENTS                                                (prix de vente
                                                                                                                                             au détail)

   Timbre                 Un timbre de 7, 14             10 semaines                Irritation cutanée,    Tous les matins, appliquer un De 14 à 25 $
   transdermique          ou 21 mg                                                  insomnie, rêves        nouveau timbre sur une zone
                          aux 24 heures.                                            d’apparence réelle,    non velue, située entre la taille
                                                                                    cauchemars             et le cou. Si le sommeil est
                          Chez les patients                                                                perturbé, retirer le timbre
                          souffrant d’une                                                                  avant d’aller au lit. Utiliser
                          maladie CV récente                                                               une crème à base d’hydro-
                          ou instable, pesant                                                              cortisone pour soulager
                          moins de 45 kg ou                                                                les irritations bénignes.
                          fumant moins
                          d’1/2 paquet de                                                                  Au cours des 2 semaines
                          cigarettes par jour,                                                             suivant un IM et chez les pa-
                          commencer par                                                                    tients souffrant d’une aryth-
                          14 mg/jour.                                                                      mie grave ou d’une affection
                                                                                                           cardiovasculaire évolutive, il
                                                                                                           faut faire preuve de prudence.

   Gomme de               On recommande une De 8 à 12                               Irritation de la       Mastiquer la gomme                Entre
   polacrilex de          dose de 2 mg si la    semaines                            bouche ou de la        lentement jusqu`à la              19 à 40 $
   nicotine               consommation est                                          gorge, mâchoires       perception de l’arôme ou          si le patient
                          < 25 cigarettes/jour                                      douloureuses,          d’un picotement, puis, laisser    consomme
                          (échelle de tolérance                                     troubles de            la gomme entre la gencive         entre 10 et
                          à la nicotine de                                          dentition,             et la joue. Lorsque le goût       20 morceaux/
                          Fagerström ≤ 6)                                           stomatite,             ou le picotement a disparu        jour
                          ou 4 mg si la                                             gingivite, stomatite   (après 1 minute environ),
                          consommation est                                          aphteuse, glossite,    reprendre le cycle
                          ≥ 25 cigarettes/jour                                      dyspepsie,             mastication-pause et garder
                          (échelle de tolérance                                     hoquet.                en bouche pendant
                          à la nicotine de                                                                 30 minutes environ.
                          Fagerström ≥ 7).
                                                                                                           Éviter de boire ou de manger
                          Posologie :                                                                      au cours des 15 minutes
                          1 morceau/heure ou                                                               précédentes et durant
                          2 heures pendant le                                                              l’utilisation. La plupart des
                          premier mois ;                                                                   effets indésirables sont liés
                          1 morceau/2 à                                                                    à la vitesse et à la technique
                          4 heures pendant le                                                              de mastication.
                          2e mois ; 1 morceau/
                          4 à 8 heures pendant
                          le 3e mois. Les
                          3 mois suivants,
                          utiliser au besoin ;

                          Ne pas dépasser
                          20 morceaux/jour.

   Inhalateur             De 6 à 12             De 3 à 6 mois                       Irritation de la       Utiliser l’inhalateur lorsque    Entre
   de nicotine            cartouches/jour                                           bouche et de la        l’envie de fumer s’exprime.      32 et 64 $
                          (4 mg par cartouche).                                     gorge, toux,           Inhaler pendant 5 à 10 minutes.
                                                                                    maux de tête           Chaque cartouche permet une
                          Réduire                                                                          inhalation continue de 20 mi-
                          progressivement                                                                  nutes. Cesser d’utiliser lorsque
                          la consommation                                                                  la consommation quotidienne
                          pendant les                                                                      est de 1 ou de 2 cartouches.
                          6 à 12 dernières
                          semaines.                                                                        Éviter de manger ou de boire
                                                                                                           pendant l’inhalation et pendant
                                                                                                           les 15 minutes précédentes.
                                                                                                                                                              >
Tabagisme et dépendance au tabac : au cœur de la maladie cardiovasculaire Document d’auto-apprentissage
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Tableau 3. Aides pharmacologiques de premier recours 8, 12, 34, 35, 36, 37, 38

   PRODUIT                DOSE                           DURÉE                      EFFETS                MISES EN GARDE                      COÛT PAR
                                                         D’UTILISATION              INDÉSIRABLES          RECOMMENDATIONS                     SEMAINE
                                                                                    FRÉQUENTS                                                 (prix de vente
                                                                                                                                              au détail)

   Bupropion              150 mg par jour                De 7 à 12                  Insomnie,             Limiter la consommation             15 $
                          pendant 3 jours,               semaines                   sécheresse de la      d’alcool.
                          puis 150 mg 2 fois                                        bouche, agitation,
                          par jour; cesser                                          trouble de            Surveiller la tension artérielle.
                          de fumer après                                            concentration,
                          une semaine                                               nausées               Aucune adaptation
                          de traitement.                                                                  posologique nécessaire
                                                                                                          chez le fumeur léger.

   Varénicline            Pendant les trois              12 semaines                Nausées, maux         Prendre avec un grand verre         À déterminer
                          premiers jours :               On recommande              de tête, rêves        d’eau, avec ou sans repas.
                          0,5 mg par jour ;              aux patients               étranges,
                          Entre le 4e et le              parvenant à cesser         constipation,         Une adaptation de la
                          7e jour : 0,5 mg               de fumer au bout           et vomissements       posologie peut aider à
                          2 fois par jour ;              de 12 semaines                                   réduire les nausées.
                          Du 8e jour à la fin            de prolonger le
                          du traitement : 1mg            traitement pour                                  Ne pas prendre en
                          2 fois par jour ;              12 autres                                        association avec un
                          Cesser de fumer 1              semaines afin                                    traitement de remplacement
                          semaine ou 2 après le          d’augmenter leurs                                par la nicotine (TRN).
                          début du traitement.           chances
                          Réduire progressi-             d’abstinence
                          vement la dose entre           à long terme
                          la 12e et la 24e
                          semaine pour
                          réduire au maximum
                          les symptômes
                          du sevrage (irritabilité,
                          envie irrésistible
                          de fumer, dépression,
                          insomnie).

Adaptation de Tscheng D, Pharmacist Letter 2004. Tom WC. Pharmacist Letter 2006.

2.4.1 Traitement de remplacement par la nicotine (TRN)

Le TRN est essentiellement une source de nicotine exempte de contaminants (comme le goudron, le monoxyde
de carbone).32 Par rapport à la cigarette, la concentration sérique de nicotine est plus faible et la vitesse de
libération de nicotine est beaucoup plus lente.15 Le TRN vise à fournir des quantités suffisantes de nicotine
pour réduire la gravité des symptômes du sevrage et par conséquent, hausser les taux d’abstinence.22 Le taux
de réussite varie selon le degré de dépendance à la nicotine du fumeur et le soutien obtenu.32

Le tableau 3 montre les schémas posologiques habituels des TRN. Il en existe de nouveaux, considérés comme
des options valables.

          Traitement de longue durée: L’abstinence à long terme est plus difficile à atteindre chez certains fumeurs.
          Le TRN de longue durée peut aider le fumeur à rester abstinent ou prolonger la période d’abstinence.8
          L’objectif ultime du traitement est l’abstinence complète, mais il est préférable de suivre un TRN à long
          terme que de reprendre ses habitudes de fumer.8 Au cours d’un essai clinique appelé Lung Health Study
          (étude sur la santé pulmonaire), qui a été effectué auprès de plus de 3 000 sujets, aucune preuve clinique
          de risque à long terme n’a été observée, même chez ceux ayant continué à utiliser de la gomme à mâcher
          pendant plus de cinq ans.39 Il est cependant intéressant de noter que les sujets n’ayant pas continué à
          utiliser la gomme à mâcher après un an avaient de meilleures chances de rester abstinents au cours des
          cinq ans du suivi de l’étude.39 On doit donc inciter le patient à devenir abstinent dans un délai raisonnable.
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Traitement intermittent et traitement associatif : La gomme et le timbre de nicotine sont utiles quand
          le fumeur n’est pas encore disposé à cesser de fumer ou qu’il est incapable d’abandonner le tabac. Chez
          certains fumeurs, le sevrage du tabac est un objectif irréaliste. Le TRN peut venir en aide au fumeur
          désirant cesser de fumer temporairement pour des raisons d’ordre personnel ou médical (p. ex. pour ren-
          dre visite à des parents qui ne fument pas, se préparer à une intervention chirurgicale). Dans certains cas,
          le TRN peut grandement aider à réduire la consommation de tabac (p. ex. abstinence durant les heures
          de travail).15 L’atteinte de cet objectif provisoire réaliste peut mener vers le sevrage du tabac.

Certains patients craignent de passer d’un type de dépendance (dépendance au tabac) à un autre (dépendance
au TRN). Le pharmacien doit expliquer que c’est la nicotine qui cause la dépendance et la sensation d’euphorie ;
les autres constituants de la fumée peuvent causer le cancer. La cigarette cause des hausses brusques de con-
centration de nicotine dans le sang, ce qui explique en grande partie pourquoi elle cause une forte dépendance. 8
Il est essentiel d’expliquer au patient que suivre un TRN est plus sûr que continuer de fumer et que l’efficacité
du TRN a été prouvée pour le sevrage du tabac. La libération à vitesse constante de faibles doses de nicotine
et la diminution progressive de la quantité libérée font que la plupart du temps, il est facile d’interrompre le
traitement.8 Il est vrai que de nombreux fumeurs ont essayé en vain d’arrêter de fumer en ayant recours à un
TRN, mais ce n’est pas une raison pour ne pas essayer ultérieurement ce mode d’aide à la cessation tabagique.
Le pharmacien doit prendre le temps d’examiner les raisons des échecs antérieurs. Le plus souvent, l’échec
est attribuable à des attentes irréalistes (le TRN ne remplace pas la cigarette et ne supprime pas les symp-
tômes du sevrage), à un mode d’utilisation erroné ou à une durée d’utilisation trop courte.32

> Traitement de remplacement par la nicotine transdermique
Les résultats de plusieurs essais cliniques fournissent des preuves convaincantes de l’efficacité du traitement de
remplacement par la nicotine transdermique.8 Fiore et ses collaborateurs ont réalisé une méta-analyse regroupant
plus de 5 000 sujets et comparé le taux de sevrage du tabac enregistré chez des utilisateurs de timbres transder-
miques à celui ayant été enregistré chez des sujets ayant pris un placebo.40 Le taux d’abstinence attestée biochi-
miquement enregistré après six mois était de 22 p. 100 chez les utilisateurs de timbres transdermiques alors qu’il
était de 9 p. 100 chez les sujets ayant pris un placebo. Par rapport au placebo, le timbre de nicotine a permis de
doubler le taux d’abstinence à long terme.40

La plupart des patients peuvent amorcer le traitement avec une dose quotidienne de 21 mg.34 Les personnes
qui fument moins de 10 cigarettes par jour, pèsent moins de 45 kg (100 lb) ou souffrent d’une maladie cardio-
vasculaire récente évolutive débutent plutôt avec une dose quotidienne de 14 mg.34, 41

Pour que le timbre reste en place pendant 24 heures, le site d’application doit être propre, sec et non velu.34, 41
Il faut appliquer le timbre et exercer une pression dessus pendant au moins 10 secondes.34 Le timbre doit être
jeté et remplacé s’il s’est décollé de la peau.34

L’emploi de timbres transdermiques peut causer une réaction cutanée au point d’application chez certaines
personnes. Cette réaction est généralement bénigne et passagère et l’abandon du traitement ne s’impose que
dans moins de 5 p. 100 des cas.8 L’application d’une crème à base d’hydrocortisone (à 1 %) ou de triamcinolone
(à 0,5 %) procure habituellement un soulagement.8 L’utilisation de plusieurs sites d’application par rotation peut
prévenir les réactions.8

Le traitement doit être abandonné en cas de réactions locales graves ou persistantes (p. ex. érythème marqué,
prurit, œdème) au point d’application ou de réaction cutanée généralisée (urticaire, eczéma généralisé).34

On a signalé des cas où l’emploi de timbres transdermiques avait provoqué une tachycardie. En cas de symp-
tômes cardiovasculaires graves, le traitement doit être abandonné et il faut recommander au patient de consulter
son médecin.34

Le traitement de remplacement par la nicotine transdermique cause parfois des troubles du sommeil, comme
l’insomnie ou des cauchemars. Dans ces cas, le retrait du timbre avant d’aller au lit pourrait être utile.8
Tabagisme et dépendance au tabac : au cœur de la maladie cardiovasculaire Document d’auto-apprentissage
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