Tabagisme et dépendance au tabac: au coeur de la maladie cardiovasculaire DOCUMENT D'AUTO-APPRENTISSAGE - Profession Santé
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DOCUMENT D’AUTO-APPRENTISSAGE TABAGISME ET DÉPENDANCE AU TABAC Tabagisme et dépendance au tabac: au cœur de la maladie cardiovasculaire Par Diane Lafontaine, B. Pharm., M. Sc. — Panacée Conseil Inc.
Table des matières Objectifs d’apprentissage 3 1. Perspective clinique 3 1.1 Les effets dévastateurs du tabagisme 3 1.2 Les professionnels de la santé : un rôle important à jouer 3 1.3 Définition de l’accoutumance 4 1.4 La dépendance au tabac : une maladie chronique 5 1.5 Lien entre tabagisme et maladie cardiovasculaire 5 1.6 Autres effets nuisibles du tabagisme 6 1.7 Abandon du tabac et santé cardiovasculaire 6 1.8 Dépistage du tabagisme 6 2. Traitement de la dépendance au tabac 11 2.1 Symptômes physiques et psychologiques du sevrage du tabac 11 2.2 Changement de comportement 12 2.3 Aides pharmacologiques pour l’abandon du tabac 13 2.4 Aides pharmacologiques de premier recours 13 2.5 Aides pharmacologiques de deuxième recours 21 2.6 Les médecines douces 22 2.7 Choix thérapeutique en fonction du tableau clinique 23 3. Ajustement du traitement 26 4. Suivi 26 4.1 Efficacité thérapeutique 26 4.2 Tabagisme et interactions médicamenteuses 27 4.3 Observance thérapeutique 30 Conclusion 33 Annexe A 34 Références 35 Questionnaire de formation continue 40 Tabagisme et dépendance au tabac : au cœur de la maladie cardiovasculaire Document d’auto-apprentissage 2
Objectifs d’apprentissage Le présent document vise à donner au pharmacien* un aperçu des solutions de soutien au renoncement au tabac dans une perspective globale de prévention de la maladie cardiovasculaire. Le modèle de prise en charge présenté ici s’appuie sur une méthode systématique comprenant le dépistage, l’amorce du programme de renoncement au tabac, l’ajustement du traitement et le suivi du patient. Tout au cours du présent document, le pharmacien trouvera des exemples d’intervention rapide visant à protéger la santé du cœur. À la fin de la présente activité, le pharmacien devrait être en mesure : = d’expliquer ce qu’est la dépendance aux produits du tabac; = d’observer le cheminement du fumeur et d’aider celui-ci à franchir les diverses étapes; = de conseiller des traitements pharmacologiques appropriés; = de mettre en œuvre des stratégies appropriées pour soutenir des efforts de renoncement au tabac; = de faire un suivi efficace auprès du fumeur faisant des efforts pour cesser de fumer pour l’empêcher de recommencer à fumer. 1. Perspective clinique 1.1 Les effets dévastateurs du tabagisme Les affections causées par le tabac sont toujours à l’état endémique dans le monde. L’Organisation mondiale de la santé prédit que d’ici 2020, le nombre annuel de décès causés par le tabagisme atteindra 8,4 millions, soit 4 millions de décès annuels de plus qu’en 2001.1 Concrètement cela signifie que si on empilait les corps de toutes les personnes qui mourront d’une affection causée par le tabac d’ici 2020, on obtiendrait une tour d’une hauteur de 180 km.1 Au Canada, le tabagisme constitue un grave problème de santé; il s’agit de la première cause de décès évitable.2 Malgré une multitude de programmes de prévention de l’usage du tabac, plus de 4,5 millions de Canadiens de 15 ans et plus sont des fumeurs actuels3 et le tabagisme est toujours la cause du décès prématuré de quelque 45 000 personnes.4 En vérité, 50 p. 100 de tous les fumeurs réguliers mourront des conséquences du tabagisme.5 Les effets nocifs du tabagisme et de la fumée secondaire du tabac sont bien documentés. La fumée du tabac contient plus de 4 000 substances chimiques, dont 50 au moins sont cancérogènes.6 1.2 Les professionnels de la santé : un rôle important à jouer Il existe des mesures efficaces de lutte contre le tabagisme. Les résultats de travaux de recherche révèlent que les professionnels de la santé, dont les pharmaciens, peuvent contribuer à hausser la fréquence du renonce- ment au tabac en fournissant de l’information et du soutien.7, 8 *Nota : Afin de faciliter la lecture du présent document, nous avons utilisé le masculin comme genre neutre pour désigner aussi bien les femmes que les hommes. Tabagisme et dépendance au tabac : au cœur de la maladie cardiovasculaire Document d’auto-apprentissage 3
Malgré les bienfaits éprouvés du soutien, de 2 à 15 p. 100 seulement des fumeurs qui sont suivis par un médecin reçoivent une forme quelconque d’aide, que ce soit des conseils sur la manière de cesser de fumer, de l’information sur des programmes de soutien ou une ordonnance d’un médicament aidant à cesser de fumer.9 On estime aussi qu’ordinairement, un traitement n’est offert qu’aux patients souffrant déjà d’une maladie causée par le tabac.8 Le dépistage systématique des fumeurs et la participation à des activités de renoncement au tabac sont deux aspects sur lesquels tous les professionnels de la santé devraient se pencher davantage, d’autant plus que le tabagisme est associé aux trois principales causes de morbidité et de mortalité au Canada : la maladie pulmonaire, le cancer et la maladie cardiovasculaire.10, 11, 12 Il est difficile d’identifier une autre affection qui, malgré des interventions efficaces et facilement accessibles, demeure associée à une négligence, à une fréquence et à un taux de mortalité similaires à ceux du tabagisme. On consacre beaucoup d’énergie à sensibiliser les cliniciens et à inculquer le principe selon lequel ne pas traiter le tabagisme serait perçu comme le défaut de donner des soins de santé appropriés. 1.3 Définition de l’accoutumance La nicotine compte parmi les substances toxicomanogènes les plus puissantes, entraînant une tolérance physique, un syndrome de sevrage et un état de besoin (parfois appelé dépendance psychologique).13 En effet, cette substance cause autant d’accoutumance que l’alcool, la cocaïne ou les opiacés tels l’héroïne.14,15 Lorsque la fumée de cigarette est inhalée, la nicotine met sept (7) secondes à atteindre le cerveau. En stimulant les récepteurs nicotiniques présynaptiques du système nerveux central, la nicotine cause la libération de norépinéphrine, d’acétylcholine, de dopamine, de sérotonine et de bêta-endorphines. La libération de ces neurotransmetteurs est associée au plaisir, à la détente, à l’augmentation de la capacité mémorielle et des per- formances7. Par ailleurs, une hausse de la concentration de nicotine dans le sang déclenche la libération d’adré- naline et provoque une légère augmentation de la glycémie, ce qui contribue à procurer une sensation de «décharge» ou un regain d’énergie.11 Inversement, une diminution de la concentration de nicotine est asso- ciée à une sensation de désagrément, à l’anxiété, au stress et à une sensation de baisse de la performance.7 Les sensations agréables autant que désagréables renforcent le comportement du fumeur.7 Avec le temps, un phénomène de tolérance physique apparaît ; le fumeur a besoin de plus en plus de nicotine pour obtenir les mêmes effets parce que son cerveau s’adapte progressivement à l’excitation produite par la nicotine.7 Le syndrome de sevrage à la nicotine est l’un des principaux signes de la dépendance à la nicotine. Il apparaît ordinairement au cours des 24 heures suivant la suppression brusque de la nicotine ou après une réduction de la consommation.9 Voici comment se manifeste le syndrome de sevrage : 9 = dysphorie ou humeur déprimée ; = insomnie ; = irritabilité, contrariété ou colère ; = angoisse ; = difficulté à se concentrer ; = agitation ; = augmentation de l’appétit. Les symptômes les plus graves apparaissent au cours de la première semaine, bien que l’envie irrésistible de fumer puisse persister pendant des mois et peut-être même des années.16 D’habitude, plus la consommation de nicotine est élevée, plus les symptômes de sevrage sont graves et plus l’arrêt est difficile, mais cela varie beaucoup.9 Les variations génétiques du métabolisme nicotinique constituent un autre facteur de dépendance à la nicotine.13 Certaines études révèlent que les personnes dont le métabolisme nicotinique est lent parvien- nent plus facilement à cesser de fumer que celles dont le métabolisme est rapide.17 La personnalité (p. ex. propension à prendre des risques) et certains troubles mentaux, en particulier la schizophrénie, le trouble bipo- laire, la dépression et le trouble déficitaire de l’attention, sont associés avec un risque élevé d’abus.13 Tabagisme et dépendance au tabac : au cœur de la maladie cardiovasculaire Document d’auto-apprentissage 4
Certains auteurs décrivent la toxicomanie comme un état d’hypersensibilité du système de récompense du cerveau aux effets directs d’une substance et à tous les autres stimuli extérieurs qui ne sont pas directement reliés à celle-ci.13 L’auto-administration de nicotine a une importante composante psychologique, qui est ren- forcée par les activités quotidiennes et certains facteurs sociaux.7 Chaque fois qu’il s’allume une cigarette, le fumeur prend en moyenne 10 à 12 inhalations de fumée, ce qui équivaut à prendre 10 à 12 doses d’une drogue procurant un sentiment de bien-être.18 Il n’est donc pas étonnant que bon nombre de fumeurs décrivent leur plaisir de fumer comme quelque chose faisant partie de leur image ou de leur vie sociale. Le fumeur qui es- saie de réduire sa consommation de tabac se rappelle constamment de l’élément manquant associé à son plaisir de fumer (p. ex. rituel matinal du café-cigarette, rencontres avec des amis pour prendre un verre).11 La compulsion est une impulsion irrésistible et irrépressible à consommer la substance; elle amène la personne à s’assurer qu’elle pourra toujours s’en procurer.19 Les stratégies visant l’identification des synchronisateurs comportementaux constituent une composante essentielle du programme d’abandon du tabac. Cesser de fumer est loin d’être une tâche facile. Cela sous-entend apporter d’importants changements à son mode de vie, à ses valeurs, à son comportement en société et à son mode de penser. Mais surtout, cela exige une grande capacité d’adaptation. 1.4 La dépendance au tabac : une maladie chronique Le manque d’initiative de la part des cliniciens envers les programmes d’abandon du tabac est entre autres attribuable au fait que les données sur l’abstinence à long terme trouvées dans la documentation médicale sont décourageantes. Par conséquent, les cliniciens sont portés à penser que les interventions sont inutiles. Mais ce jugement peut cacher la vraie nature de la dépendance au tabac, qui est en fait une maladie chronique associée à des risques de rechute.8 Si on adoptait une attitude plus constructive, on reconnaîtrait la chroni- cité de la dépendance au tabac et s’attendrait à ce que le patient ait des périodes de rechute et de rémission.8 Rechute et chronicité vont de pair ; ce n’est ni la défaillance du clinicien ni celle de son patient qui est en cause. La vérité, c’est que la cessation tabagique ne nécessite pas des soins de courte durée, mais plutôt des soins de longue durée. À titre de professionnel de la santé, il faut se rappeler que la guérison n’est pas une destination, mais plutôt un voyage ! 1.5 Lien entre tabagisme et maladie cardiovasculaire Il existe de très nombreuses preuves que le tabagisme accroît la morbidité et la mortalité, qu’il s’agisse de maladies cardiovasculaires, de coronaropathies, de mort subite, de maladies vasculaires périphériques, d’acci- dent vasculaire cérébral ou d’anévrisme de l’aorte. Les données de la Framingham Heart Study révèlent que les femmes et les hommes n’ayant jamais fumé vivent respectivement en moyenne 4,9 ans et 6,2 ans de plus sans souffrir de maladies cardiovasculaires comparativement aux fumeurs.20 Le tabagisme est un facteur indépendant de risque de coronaropathie. La présence simultanée d’autres facteurs de risque, comme les antécédents familiaux de maladies cardiovasculaires, augmente de beaucoup ce risque.21 Le tabagisme a beaucoup d’effets néfastes sur l’appareil cardiovasculaire ; il provoque une hausse de la tension artérielle et une diminution de la résistance à l’exercice physique. Il favorise la formation de caillots sanguins et réduit le taux de lipides de haute densité (HDL-C).21 Tabagisme et dépendance au tabac : au cœur de la maladie cardiovasculaire Document d’auto-apprentissage 5
1.6 Autres effets nuisibles du tabagisme Le tabagisme est aussi nuisible à l’appareil respiratoire : il peut causer le cancer du poumon, de la gorge ou du larynx, la bronchite et la maladie pulmonaire obstructive chronique.22 Il peut aussi toucher l’appareil reproducteur (impuissance masculine, nouveau-né de faible poids à la naissance, fausse couche), l’appareil gastro-intestinal (cancer de l’œsophage ou de la bouche, parodontopathie, perte de dents) et l’appareil urinaire (cancer de la vessie, du rein ou du col de l’utérus).22 Par ailleurs, la fumée secondaire du tabac constitue un grave risque pour la santé des non-fumeurs. Les deux tiers de la quantité de fumée de cigarette sont libérés dans l’air. La fumée secondaire renferme plus de substances cancérogènes que la fumée inhalée par le fumeur. Au Canada, l’exposition à la fumée secondaire compte pour environ 300 décès causés par le cancer du poumon annuellement; elle est aussi associée aux maladies du cœur et au cancer du sinus.22 Les enfants exposés à la fumée secondaire du tabac sont plus sujets à la bronchite, à la pneumonie, à l’otite moyenne, à l’asthme et à la mort subite du nourrisson.23 1.7 Abandon du tabac et santé cardiovasculaire Bon nombre d’études montrent l’existence d’une forte corrélation entre abandon du tabac et réduction du risque de maladie cardiovasculaire. Voici les changements observables chez le sujet qui cesse de fumer : 24 = Au bout de huit (8) heures, la concentration sérique de monoxyde de carbone diminue et la concentration sérique d’oxygène augmente pour atteindre des niveaux physiologiques normaux. = Deux jours seulement après l’abandon du tabac, le risque d’infarctus du myocarde commence à diminuer. = Au bout de trois (3) jours, la capacité pulmonaire aura augmenté au point que la respiration est plus facile. = Au bout d’un an, le risque d’infarctus du myocarde est réduit de moitié. Les preuves semblent indiquer que l’abandon du tabac peut même avoir des effets bénéfiques chez le sujet ayant déjà souffert d’une affection liée au tabagisme.25 Chez la personne qui souffre d’une cardiopathie ischémique, le renoncement au tabac réduit le risque d’un autre infarctus et le risque de décès causé par une maladie cardiovasculaire.25 Chez la personne souffrant d’une maladie obstructive périphérique, l’abandon du tabac réduit le risque d’amputation et augmente la durée de vie.25 1.8 Dépistage du tabagisme Le dépistage du tabagisme ouvre la voie à des interventions fructueuses. En exécutant une ordonnance ou en fournissant des conseils, le pharmacien doit poser une question claire pour savoir si le patient fume et obtenir des renseignements sur son milieu de vie. Voici deux exemples de question à lui poser : « Y a-t-il des fumeurs à la maison? » « Avez-vous déjà consommé un produit du tabac? » Si le patient fume, son profil pharmaceutique devrait l’indiquer. Tout fumeur devrait recevoir des conseils clairs, précis et adaptés à son cas.8 Le pharmacien devrait lui expliquer que l’abandon du tabac est la meilleure chose qu’il puisse faire pour sa santé. Sachez reconnaître les fumeurs mondains et les fumeurs légers, car nombreux sont ceux qui ne se considèrent pas comme des fumeurs. Le fumeur de cigare ou de pipe devrait aussi être identifié et recevoir les mêmes conseils que le fumeur de cigarette.8 Les patients asthmatiques, hypertendus, diabétiques ou souffrant d’une maladie du cœur sont particulièrement sujets à souffrir des complications du tabagisme. Le pharmacien pourrait promouvoir l’abandon du tabac en commençant par cibler les patients appartenant à ces groupes. Tabagisme et dépendance au tabac : au cœur de la maladie cardiovasculaire Document d’auto-apprentissage 6
Intervention rapide visant à protéger la santé du cœur Convaincre le patient de cesser de fumer en utilisant les bons arguments. = Le patient doit percevoir un danger pour sa santé. = Le risque d’effets nuisibles doit être réel et perceptible. = Le patient doit croire que les aides au renoncement au tabac sont efficaces. = Le patient doit se sentir capable de cesser de fumer. Le clinicien doit changer sa perception du succès thérapeutique. Une intervention fructueuse n’est pas synonyme d’une vie sans fumée. Il s’agit plutôt de reconnaître que le fumeur devient de plus en plus motivé à cesser de fumer. Le dépistage du tabagisme actuel ou des antécédents de tabagisme permet de savoir à quelle étape de changement le patient en est rendu. En d’autres termes, il permet de sonder son intention de cesser de fumer. Le modèle transthéorique des étapes du changement de Prochaska, qui comporte cinq étapes, permet de personnaliser l’approche des soins au patient. Voici les cinq étapes du changement selon ce modèle : Préréflexion : Le fumeur est satisfait de sa situation et n’a pas l’intention de modifier son comportement dans les six mois à venir. Il fait très peu d’efforts pour cesser de fumer parce qu’il aime fumer.14,15 Réflexion : Le fumeur commence à comprendre que le tabagisme comporte plus d’inconvénients que d’avantages.15 Il songe sérieusement à cesser de fumer dans les six mois à venir, mais ne s’est pas encore engagé à agir.14 Préparation : Le fumeur songe sérieusement à cesser de fumer dans le mois à venir et commence à élaborer des stratégies. Action : Le fumeur a commencé à modifier son comportement et à s’adapter à une nouvelle vie sans fumée.14 Cette étape s’étend sur une période de six mois après qu’il ait changé son comportement pour cesser de fumer. Maintien : Le fumeur ne fume plus depuis au moins six mois.11 Le renforcement positif est important car certaines personnes conservent le goût de fumer pendant des années. En posant des questions pertinentes, le pharmacien trouvera à quelle étape le patient en est rendu. Le tableau 1 présente quelques façons d’aborder le patient. Si le clinicien se heurte à une résistance, c’est qu’il aura sauté cer- taines étapes et sera rendu plus loin que le patient.26 Il vaudrait mieux qu’il revienne en arrière, qu’il écoute atten- tivement le patient, qu’il fasse preuve d’empathie et qu’il pose de nouveau des questions suscitant la réflexion.26 Après avoir mesuré la disposition du patient à cesser de fumer, le pharmacien doit lui venir en aide afin de le faire progresser selon le modèle de Prochaska, en lui donnant des conseils et en lui présentant des aides thérapeutiques, s’il y a lieu. En incitant le patient à progresser d’une seule étape au cours du mois à venir, le pharmacien doublera les chances d’abandon du tabac au cours des six mois qui suivent.14 Pour donner de bons résultats, le counseling doit être adapté à la disposition du patient à cesser de fumer. Le tableau 1 présente diverses suggestions visant à optimiser les interventions. Tabagisme et dépendance au tabac : au cœur de la maladie cardiovasculaire Document d’auto-apprentissage 7
Tableau 1. Objectifs du counseling et suggestions pour établir les étapes du changement 7, 14, 15, 26, 27 QUESTIONS À POSER ÉTAPE OBJECTIFS SUGGESTIONS POUR DU CHANGEMENT DE L’INTERVENTION LES CLINICIENS COMPORTEMENTAL ET DÉFIS À RELEVER Avez-vous l’intention Préréflexion Le patient ne désire Expliquer de façon claire, non équivoque d’arrêter de fumer au pas modifier son et personnalisée que cesser de fumer est cours des six prochains comportement ; il est la meilleure décision pour préserver mois ? peu réceptif. sa santé : p. ex. : « Renoncer au tabac est la décision à prendre pour la person- Avez-vous déjà tenté Évaluer pourquoi le ne souffrant d’une maladie du cœur. » d’arrêter de fumer ou patient n’a pas l’intention de réduire votre de cesser de fumer afin « Arrêter de fumer sera bénéfique consommation de de maximiser l’efficacité pour l’enfant que vous portez. » cigarettes par le passé ? des interventions Quand ? ultérieures. « Qu’est-ce qui vous empêche de cesser de fumer ? » Lui faire part des bienfaits et des inconvénients liés «Quels seraient les bienfaits de l’abandon à la désaccoutumance du tabac pour vous et les autres ? » au tabac. Montrer votre intention d’aider le patient et de répondre à ses questions : « Je suis disposé à vous fournir de l’information et de l’aide quand vous serez prêt. » Quelles raisons vous Réflexion Le patient manifeste Faire preuve d’empathie, écouter le fumeur. incitent à arrêter un intérêt accru pour Montrer que vous comprenez à quel de fumer ? la documentation et point il est difficile de cesser de fumer. l’information portant sur Pourquoi hésitez-vous la désaccoutumance Aborder les idées préconçues sur la à essayer ? au tabac. désaccoutumance au tabac : p. ex., « Si vous faites une nouvelle tentative, Qu’est-ce qui vous Promouvoir la confiance vous aurez plus de chances de réussir. » aiderait à arrêter ? en soi du patient. « La plupart des gens ne prennent Connaissez-vous les pas beaucoup de poids. » types d’aide dont vous pourriez bénéficier pour Insister sur le fait que l’emploi d’aides arrêter de fumer ? pharmacologiques associé à une intervention appropriée augmente Quelle petite mesure les chances de réussite. pourriez-vous prendre en vue de cesser Fournir des renseignements sur les de fumer ? méthodes d’aide de désaccoutumance au tabac qui sont couramment utilisées. Manifester de nouveau votre intention d’aider le patient et réitérer votre disponibilité. Avez-vous adopté de Préparation Période propice pour Favoriser les échanges. nouveaux comportements, intervenir pour le clinicien. comme réduire votre Questionner le patient sur les motifs consommation de tabac Utiliser le renforcement qui le poussent à arrêter de fumer et sur ou retarder l’heure de la positif pour appuyer la les difficultés qu’il a eues dans le passé. première cigarette décision du patient de la journée ? d’arrêter de fumer. > Tabagisme et dépendance au tabac : au cœur de la maladie cardiovasculaire Document d’auto-apprentissage 8
Tableau 1. Objectifs du counseling et suggestions pour établir les étapes du changement 7, 14, 15, 26, 27 QUESTIONS À POSER ÉTAPE OBJECTIFS SUGGESTIONS POUR DU CHANGEMENT DE L’INTERVENTION LES CLINICIENS COMPORTEMENTAL ET DÉFIS À RELEVER Avez-vous informé les Connaître les antécédents Conseiller au patient de fixer une date de personnes de votre médicaux et les antécé- cessation et de s’y préparer : p. ex., infor- entourage de votre dents de tabagisme* qui mer la famille et les amis afin de bénéfi- intention d’arrêter permettront d’évaluer quel cier de leur appui, nettoyer la voiture, jeter de fumer? type de thérapie est la les cendriers, définir des stratégies pour plus indiquée. faire face aux envies irrésistibles de fumer. Fixer des objectifs. Conseiller au patient le médicament qui lui conviendrait le mieux. Donner des conseils sur la façon d’utiliser les Lui faire comprendre que les auxiliaires médicaments disponibles pour la cessation tabagique facilitent et fournir de la le sevrage sans pour autant supprimer documentation les envies irrésistibles de fumer. d’auto-apprentissage. Déceler les préférences du patient en matière de traitement et en tenir compte au moment de choisir la méthode de traitement. Dire au patient que vous êtes disposé à l’aider et à soutenir ses efforts d’abandonner le tabac. Êtes-vous parvenu à Action Augmenter la fréquence Montrer au fumeur comment reconnaître arrêter de fumer au et la durée des séances les situations susceptibles de le faire cours des six derniers d’intervention. rechuter (côtoyer des fumeurs, vivre mois ? des situations stressantes, consommer Utiliser le renforcement de l’alcool) et comment les éviter. positif. Aider le fumeur à adopter des stratégies Énumérer les situations d’adaptation en présence de tentations ou qui sont ou seront d’habitudes (p. ex., utiliser le monologue susceptibles de provoquer intérieur positif « Beaucoup de mes amis une rechute et trouver des ont réussi à arrêter et je vais y parvenir façons de bien les gérer. moi aussi. » ; éviter d’accompagner des personnes qui fument après les repas). Si le patient a déjà fait des tentatives de renoncement par le passé, demander les motifs d’échec et adopter de nouvelles stratégies en conséquence. Élaborer des stratégies pour atténuer les sautes d’humeur, comme adopter un nou- veau mode de vie pour diminuer le degré de stress, se faire plaisir souvent, utiliser des stratégies cognitives pour se distraire quand les envies irrésistibles se présentent. Déterminer avec le patient des façons simples de se faire plaisir et lui recom- mander de se récompenser souvent pour ses réussites. Encourager le patient à vous rendre visite fréquemment et à communiquer souvent avec vous. > Tabagisme et dépendance au tabac : au cœur de la maladie cardiovasculaire Document d’auto-apprentissage 9
Tableau 1. Objectifs du counseling et suggestions pour établir les étapes du changement 7, 14, 15, 26, 27 QUESTIONS À POSER ÉTAPE OBJECTIFS SUGGESTIONS POUR DU CHANGEMENT DE L’INTERVENTION LES CLINICIENS COMPORTEMENTAL ET DÉFIS À RELEVER Êtes-vous non-fumeur Maintien Utiliser le renforcement Demander au patient à quelle étape depuis six mois ou plus? positif. il en est rendu et ce qu’il pense d’une vie sans tabac. Si oui, le patient est à l’étape du maintien. S’assurer que le patient a toujours recours à une aide pharmacologique Vous sentez-vous en et intervenir en fonction de la pleine maîtrise dans les réponse obtenue. situations que vous jugiez auparavant fortement Examiner les écarts qui se sont produits susceptibles de vous et les inquiétudes qu’ils soulèvent. inciter à fumer ? Rappeler au patient les bienfaits d’une vie sans fumée. Féliciter le patient d’avoir atteint un objectif difficile. Êtes-vous non-fumeur Rechute Trouver les causes Éviter de laisser entendre que le patient depuis six mois ou plus? de la rechute et de a échoué à certains égards. nouvelles stratégies Si non, le patient est à pour composer avec Juger si le patient a suivi correctement l’étape de rechute. les facteurs qui le traitement d’aide à la déclenchent l’envie désaccoutumance au tabac. de fumer. Souligner le fait que chaque fois qu’il Juger s’il est pertinent de tente de renoncer au tabac, le fumeur prolonger les efforts de augmente ses chances d’atteindre désaccoutumance au l’abstinence à long terme. tabac ou s’il vaut mieux mettre fin au traitement Prévoir une nouvelle tentative pour et fixer une nouvelle date cesser de fumer. de cessation. Pour que le patient reste motivé, lui dire qu’il pourra mettre à profit l’expérience et les connaissances acquises quand viendra le temps de tenter de nouveau d’arrêter de fumer. Faire preuve d’empathie tout en recommandant au patient de songer de nouveau à arrêter de fumer. * On entend par « antécédents de tabagisme » le nombre de cigarettes fumées, le besoin urgent de fumer la première cigarette au réveil, le nombre de tentatives de désaccoutumance au tabac dans le passé, les méthodes utilisées lors de ces tentatives, la durée de la période d’abstinence selon les méthodes utilisées, l’adhésion aux méthodes utilisées et la pertinence des méthodes utilisées. Adaptation de Kuz G., Pharmacy Practice, 1999. Tabagisme et dépendance au tabac : au cœur de la maladie cardiovasculaire Document d’auto-apprentissage 10
2. Traitement de la dépendance au tabac Le traitement de la dépendance au tabac doit consister à donner des conseils et à montrer des techniques de changement du comportement pour soulager les symptômes physiques et psychologiques du sevrage. 2.1 Symptômes physiques et psychologiques du sevrage du tabac Les symptômes physiologiques du sevrage du tabac sont nombreux. En les reconnaissant, le clinicien pourra intervenir de façon plus efficace. Le tableau 2 présente les symptômes signalés le plus souvent par les patients et des façons de les soulager. Tableau 2. Traitement des symptômes du sevrage de la nicotine 9, 14, 28 SYMPTÔME CAUSE DURÉE CONSEIL Toux L’organisme se débarrasse Quelques jours Boire beaucoup de liquide, utiliser des pastilles du mucus qui s’est accumulé contre la toux, prendre des bonbons durs et dans les voies respiratoires du sirop contre la toux avant de se coucher. Sensation de tête légère Oxygénation accrue 1 ou 2 jours Redoubler de vigilance ; se lever et changer de l’organisme doucement de position ; boire de l’eau. Maux de tête Hausse de la concentration 1 ou 2 semaines Prendre des analgésiques ; boire beaucoup d’oxygène dans l’organisme d’eau ; faire des exercices de relaxation ; et réduction de la concentration prendre des bains chauds. de monoxyde de carbone Constipation, Diminution de la vitesse du 1 ou 2 semaines Boire beaucoup de liquide, consommer plus gaz intestinaux, transit intestinal de fibres alimentaires (céréales de grain maux d’estomac entier, légumes) ; faire de l’exercice physique. Irritabilité État de manque de nicotine De 2 à 4 semaines Marcher, réduire la consommation de caféine, respirer profondément ; prendre des bains chauds ; savoir que ce symptôme disparaîtra. Insomnie Effet de la nicotine sur De 2 à 4 semaines Réduire la consommation de café et éviter d’en l’activité cérébrale d’en prendre après 16 heures ; faire des exercices de relaxation ; prendre des douches chaudes. Fatigue Manque de stimulation De 2 à 4 semaines Faire de l’exercice physique ; faire des siestes, par la nicotine prendre beaucoup de repos. Difficulté à se Adaptation au manque de Quelques Planifier son travail ; éviter le stress ; concentrer stimulation par la nicotine semaines s’accorder plus de temps ; faire des exercices de relaxation. Faim, augmentation Confusion entre l’envie Quelques mois Boire de l’eau ou des boissons de l’appétit irrésistible de fumer et hypocaloriques ; prendre des collations une fringale. hypocaloriques ; faire plus d’exercice physique. Le fait de goûter plus augmente le plaisir de manger. Le tabagisme hausse le métabolisme de 5 à 10 %. > Tabagisme et dépendance au tabac : au cœur de la maladie cardiovasculaire Document d’auto-apprentissage 11
Tableau 2. Traitement des symptômes du sevrage de la nicotine 9, 14, 28 SYMPTÔME CAUSE DURÉE CONSEIL Dysphorie ou Adaptation à l’absence de Quelques Parler à un ami, sortir, demander de l’aide. état dépressif nicotine et de tabac semaines Envie impérieuse Sevrage de la nicotine, Quelques Réfréner l’envie de fumer en se souvenant de fumer une substance causant semaines; qu’elle ne dure que quelques minutes; de la dépendance. peut-être respirer profondément ; se divertir ; boire de même quelques l’eau ; faire une promenade. Nostalgie des rituels mois ou années tabagiques Changer les habitudes associées au tabagisme : p. ex. opter pour des milieux sans fumée. La consommation d’alcool peut causer la rechute; le patient doit songer à réduire sa consommation d’alcool ou encore s’abstenir, et éviter de rester trop longtemps à la table après les repas. Adaptation de Pbert L et coll., Medscape Pharmacist, 2005. 2.2 Changement de comportement Selon le Tobacco Use and Dependance Guideline Panel 8 des États-Unis (comité d’étude sur les lignes directri- ces sur le traitement du tabagisme et de la dépendance au tabac), il existe trois types d’orientation et de thérapie comportementale efficaces, qui sont associés à des taux élevés d’abstinence : 1) donner au fumeur des con- seils pratiques visant l’acquisition d’aptitudes à résoudre les problèmes ; 2) offrir du soutien social dans le cadre thérapeutique et 3) aider le fumeur à obtenir du soutien social à l’extérieur du cadre thérapeutique. Selon ce groupe d’experts, ces types d’orientation et de thérapie comportementale doivent faire partie de tout pro- gramme de renoncement au tabac. Tout le long du présent document, nous expliquerons comment mettre en application ces principes. Intervention rapide pour protéger la santé du cœur Inciter le patient à obtenir du soutien auprès d’un groupe d’entraide. Il est plus facile de cesser de fumer lorsqu’on est soutenu par une personne ayant arrêté de fumer. On a prouvé que chez les patients ayant bénéficié de soutien, le taux de réussite à court terme était de 12 à 27 % (p < 0,01) supérieur à celui enregistré chez les fumeurs n’en n’ayant pas eu.22 Tabagisme et dépendance au tabac : au cœur de la maladie cardiovasculaire Document d’auto-apprentissage 12
2.3 Aides pharmacologiques pour l’abandon du tabac L’abandon du tabac sans aide pharmacologique (sevrage brutal) est associé à la fréquence de rechute élevée.29 Parmi les Américains adultes ayant tenté de cesser de fumer, 7 p. 100 environ étaient toujours abstinents un an après.8 Dans l’ensemble, chez les personnes ayant recours à des méthodes d’auto-assistance et à divers programmes de renoncement au tabac, le taux de succès après un an varie entre 8 et 25 p. 100.30 La grande majorité des personnes qui essaient de cesser de fumer bénéficieront de l’intervention précoce d’un professionnel. La pharmacothérapie double ou triple les chances d’abstinence.8 Le pharmacien saura être réceptif et reconnaître le moment où le patient est disposé à faire des efforts pour cesser de fumer. On se sert souvent du Test sur la dépendance de Fagerström (voir l’annexe A)31 pour mesurer le degré de dépendance au tabac. Bien qu’il puisse être utile, cet outil risque d’être trop long pour le clinicien occupé et de le dissuader d’intervenir. Il n’est pas nécessaire de mesurer la dépendance physiologique pour recom- mander une pharmacothérapie.8 Voici deux questions très pertinentes pour connaître le degré de dépendance d’un fumeur : 14 = Combien de cigarettes fumez-vous par jour ? = Combien de temps après le réveil fumez-vous votre première cigarette ? Si le patient fume plus de 15 cigarettes par jour et qu’il fume sa première au cours des 30 minutes qui suivent son réveil, il est probable que la dépendance à la nicotine joue un rôle important dans la conservation du comportement.9 Chez tous les fumeurs, notamment ceux qui sont très dépendants de la nicotine, les traitements de substitution par la nicotine et les médicaments ne contenant pas de nicotine doivent être recommandés et de préférence en association avec une thérapie comportementale.8, 32 La dépendance au tabac est une maladie chronique nécessitant souvent des interventions répétitives. Il existe cependant des traitements effi- caces menant à l’abstinence à long terme ou même permanente. 2.4 Aides pharmacologiques de premier recours Le Tobacco Use and Dependence Guideline Panel des États-Unis a recueilli des preuves solides que les agents de remplacement par la nicotine et le bupropion administré par voie orale sont efficaces pour traiter la dépen- dance à la nicotine.8 Ces agents sont considérés comme des agents de premiers recours puisqu’ils permettent d’augmenter le taux d’abstinence à long terme de façon fiable.8 Depuis la parution de leur étude, un nouvel agent, la varénicline, a fait son apparition dans le commerce. Les résultats d’études cliniques révèlent que ce nouvel agent semble être aussi efficace que le bupropion ; les experts médicaux recommandent de le con- sidérer comme une aide pharmacologique de premier recours.33 Parmi les aides pharmacologiques approuvées, citons les agents de remplacement par la nicotine (sous forme de gomme à mâcher, de timbre transdermique et d’inhalateur) et deux médicaments administrés par voie orale, ayant deux mécanismes d’action distincts : le bupropion et la varénicline. Tabagisme et dépendance au tabac : au cœur de la maladie cardiovasculaire Document d’auto-apprentissage 13
Tableau 3. Aides pharmacologiques de premier recours 8, 12, 34, 35, 36, 37, 38 PRODUIT DOSE DURÉE EFFETS MISES EN GARDE COÛT PAR D’UTILISATION INDÉSIRABLES RECOMMENDATIONS SEMAINE FRÉQUENTS (prix de vente au détail) Timbre Un timbre de 7, 14 10 semaines Irritation cutanée, Tous les matins, appliquer un De 14 à 25 $ transdermique ou 21 mg insomnie, rêves nouveau timbre sur une zone aux 24 heures. d’apparence réelle, non velue, située entre la taille cauchemars et le cou. Si le sommeil est Chez les patients perturbé, retirer le timbre souffrant d’une avant d’aller au lit. Utiliser maladie CV récente une crème à base d’hydro- ou instable, pesant cortisone pour soulager moins de 45 kg ou les irritations bénignes. fumant moins d’1/2 paquet de Au cours des 2 semaines cigarettes par jour, suivant un IM et chez les pa- commencer par tients souffrant d’une aryth- 14 mg/jour. mie grave ou d’une affection cardiovasculaire évolutive, il faut faire preuve de prudence. Gomme de On recommande une De 8 à 12 Irritation de la Mastiquer la gomme Entre polacrilex de dose de 2 mg si la semaines bouche ou de la lentement jusqu`à la 19 à 40 $ nicotine consommation est gorge, mâchoires perception de l’arôme ou si le patient < 25 cigarettes/jour douloureuses, d’un picotement, puis, laisser consomme (échelle de tolérance troubles de la gomme entre la gencive entre 10 et à la nicotine de dentition, et la joue. Lorsque le goût 20 morceaux/ Fagerström ≤ 6) stomatite, ou le picotement a disparu jour ou 4 mg si la gingivite, stomatite (après 1 minute environ), consommation est aphteuse, glossite, reprendre le cycle ≥ 25 cigarettes/jour dyspepsie, mastication-pause et garder (échelle de tolérance hoquet. en bouche pendant à la nicotine de 30 minutes environ. Fagerström ≥ 7). Éviter de boire ou de manger Posologie : au cours des 15 minutes 1 morceau/heure ou précédentes et durant 2 heures pendant le l’utilisation. La plupart des premier mois ; effets indésirables sont liés 1 morceau/2 à à la vitesse et à la technique 4 heures pendant le de mastication. 2e mois ; 1 morceau/ 4 à 8 heures pendant le 3e mois. Les 3 mois suivants, utiliser au besoin ; Ne pas dépasser 20 morceaux/jour. Inhalateur De 6 à 12 De 3 à 6 mois Irritation de la Utiliser l’inhalateur lorsque Entre de nicotine cartouches/jour bouche et de la l’envie de fumer s’exprime. 32 et 64 $ (4 mg par cartouche). gorge, toux, Inhaler pendant 5 à 10 minutes. maux de tête Chaque cartouche permet une Réduire inhalation continue de 20 mi- progressivement nutes. Cesser d’utiliser lorsque la consommation la consommation quotidienne pendant les est de 1 ou de 2 cartouches. 6 à 12 dernières semaines. Éviter de manger ou de boire pendant l’inhalation et pendant les 15 minutes précédentes. > Tabagisme et dépendance au tabac : au cœur de la maladie cardiovasculaire Document d’auto-apprentissage 14
Tableau 3. Aides pharmacologiques de premier recours 8, 12, 34, 35, 36, 37, 38 PRODUIT DOSE DURÉE EFFETS MISES EN GARDE COÛT PAR D’UTILISATION INDÉSIRABLES RECOMMENDATIONS SEMAINE FRÉQUENTS (prix de vente au détail) Bupropion 150 mg par jour De 7 à 12 Insomnie, Limiter la consommation 15 $ pendant 3 jours, semaines sécheresse de la d’alcool. puis 150 mg 2 fois bouche, agitation, par jour; cesser trouble de Surveiller la tension artérielle. de fumer après concentration, une semaine nausées Aucune adaptation de traitement. posologique nécessaire chez le fumeur léger. Varénicline Pendant les trois 12 semaines Nausées, maux Prendre avec un grand verre À déterminer premiers jours : On recommande de tête, rêves d’eau, avec ou sans repas. 0,5 mg par jour ; aux patients étranges, Entre le 4e et le parvenant à cesser constipation, Une adaptation de la 7e jour : 0,5 mg de fumer au bout et vomissements posologie peut aider à 2 fois par jour ; de 12 semaines réduire les nausées. Du 8e jour à la fin de prolonger le du traitement : 1mg traitement pour Ne pas prendre en 2 fois par jour ; 12 autres association avec un Cesser de fumer 1 semaines afin traitement de remplacement semaine ou 2 après le d’augmenter leurs par la nicotine (TRN). début du traitement. chances Réduire progressi- d’abstinence vement la dose entre à long terme la 12e et la 24e semaine pour réduire au maximum les symptômes du sevrage (irritabilité, envie irrésistible de fumer, dépression, insomnie). Adaptation de Tscheng D, Pharmacist Letter 2004. Tom WC. Pharmacist Letter 2006. 2.4.1 Traitement de remplacement par la nicotine (TRN) Le TRN est essentiellement une source de nicotine exempte de contaminants (comme le goudron, le monoxyde de carbone).32 Par rapport à la cigarette, la concentration sérique de nicotine est plus faible et la vitesse de libération de nicotine est beaucoup plus lente.15 Le TRN vise à fournir des quantités suffisantes de nicotine pour réduire la gravité des symptômes du sevrage et par conséquent, hausser les taux d’abstinence.22 Le taux de réussite varie selon le degré de dépendance à la nicotine du fumeur et le soutien obtenu.32 Le tableau 3 montre les schémas posologiques habituels des TRN. Il en existe de nouveaux, considérés comme des options valables. Traitement de longue durée: L’abstinence à long terme est plus difficile à atteindre chez certains fumeurs. Le TRN de longue durée peut aider le fumeur à rester abstinent ou prolonger la période d’abstinence.8 L’objectif ultime du traitement est l’abstinence complète, mais il est préférable de suivre un TRN à long terme que de reprendre ses habitudes de fumer.8 Au cours d’un essai clinique appelé Lung Health Study (étude sur la santé pulmonaire), qui a été effectué auprès de plus de 3 000 sujets, aucune preuve clinique de risque à long terme n’a été observée, même chez ceux ayant continué à utiliser de la gomme à mâcher pendant plus de cinq ans.39 Il est cependant intéressant de noter que les sujets n’ayant pas continué à utiliser la gomme à mâcher après un an avaient de meilleures chances de rester abstinents au cours des cinq ans du suivi de l’étude.39 On doit donc inciter le patient à devenir abstinent dans un délai raisonnable. Tabagisme et dépendance au tabac : au cœur de la maladie cardiovasculaire Document d’auto-apprentissage 15
Traitement intermittent et traitement associatif : La gomme et le timbre de nicotine sont utiles quand le fumeur n’est pas encore disposé à cesser de fumer ou qu’il est incapable d’abandonner le tabac. Chez certains fumeurs, le sevrage du tabac est un objectif irréaliste. Le TRN peut venir en aide au fumeur désirant cesser de fumer temporairement pour des raisons d’ordre personnel ou médical (p. ex. pour ren- dre visite à des parents qui ne fument pas, se préparer à une intervention chirurgicale). Dans certains cas, le TRN peut grandement aider à réduire la consommation de tabac (p. ex. abstinence durant les heures de travail).15 L’atteinte de cet objectif provisoire réaliste peut mener vers le sevrage du tabac. Certains patients craignent de passer d’un type de dépendance (dépendance au tabac) à un autre (dépendance au TRN). Le pharmacien doit expliquer que c’est la nicotine qui cause la dépendance et la sensation d’euphorie ; les autres constituants de la fumée peuvent causer le cancer. La cigarette cause des hausses brusques de con- centration de nicotine dans le sang, ce qui explique en grande partie pourquoi elle cause une forte dépendance. 8 Il est essentiel d’expliquer au patient que suivre un TRN est plus sûr que continuer de fumer et que l’efficacité du TRN a été prouvée pour le sevrage du tabac. La libération à vitesse constante de faibles doses de nicotine et la diminution progressive de la quantité libérée font que la plupart du temps, il est facile d’interrompre le traitement.8 Il est vrai que de nombreux fumeurs ont essayé en vain d’arrêter de fumer en ayant recours à un TRN, mais ce n’est pas une raison pour ne pas essayer ultérieurement ce mode d’aide à la cessation tabagique. Le pharmacien doit prendre le temps d’examiner les raisons des échecs antérieurs. Le plus souvent, l’échec est attribuable à des attentes irréalistes (le TRN ne remplace pas la cigarette et ne supprime pas les symp- tômes du sevrage), à un mode d’utilisation erroné ou à une durée d’utilisation trop courte.32 > Traitement de remplacement par la nicotine transdermique Les résultats de plusieurs essais cliniques fournissent des preuves convaincantes de l’efficacité du traitement de remplacement par la nicotine transdermique.8 Fiore et ses collaborateurs ont réalisé une méta-analyse regroupant plus de 5 000 sujets et comparé le taux de sevrage du tabac enregistré chez des utilisateurs de timbres transder- miques à celui ayant été enregistré chez des sujets ayant pris un placebo.40 Le taux d’abstinence attestée biochi- miquement enregistré après six mois était de 22 p. 100 chez les utilisateurs de timbres transdermiques alors qu’il était de 9 p. 100 chez les sujets ayant pris un placebo. Par rapport au placebo, le timbre de nicotine a permis de doubler le taux d’abstinence à long terme.40 La plupart des patients peuvent amorcer le traitement avec une dose quotidienne de 21 mg.34 Les personnes qui fument moins de 10 cigarettes par jour, pèsent moins de 45 kg (100 lb) ou souffrent d’une maladie cardio- vasculaire récente évolutive débutent plutôt avec une dose quotidienne de 14 mg.34, 41 Pour que le timbre reste en place pendant 24 heures, le site d’application doit être propre, sec et non velu.34, 41 Il faut appliquer le timbre et exercer une pression dessus pendant au moins 10 secondes.34 Le timbre doit être jeté et remplacé s’il s’est décollé de la peau.34 L’emploi de timbres transdermiques peut causer une réaction cutanée au point d’application chez certaines personnes. Cette réaction est généralement bénigne et passagère et l’abandon du traitement ne s’impose que dans moins de 5 p. 100 des cas.8 L’application d’une crème à base d’hydrocortisone (à 1 %) ou de triamcinolone (à 0,5 %) procure habituellement un soulagement.8 L’utilisation de plusieurs sites d’application par rotation peut prévenir les réactions.8 Le traitement doit être abandonné en cas de réactions locales graves ou persistantes (p. ex. érythème marqué, prurit, œdème) au point d’application ou de réaction cutanée généralisée (urticaire, eczéma généralisé).34 On a signalé des cas où l’emploi de timbres transdermiques avait provoqué une tachycardie. En cas de symp- tômes cardiovasculaires graves, le traitement doit être abandonné et il faut recommander au patient de consulter son médecin.34 Le traitement de remplacement par la nicotine transdermique cause parfois des troubles du sommeil, comme l’insomnie ou des cauchemars. Dans ces cas, le retrait du timbre avant d’aller au lit pourrait être utile.8 Tabagisme et dépendance au tabac : au cœur de la maladie cardiovasculaire Document d’auto-apprentissage 16
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